• Contenu principal
  • Menu
OpenEdition Books
  • Accueil
  • Catalogue de 15551 livres
  • Éditeurs
  • Auteurs
  • Facebook
  • X
  • Partager
    • Facebook

    • X

    • Accueil
    • Catalogue de 15551 livres
    • Éditeurs
    • Auteurs
  • Ressources numériques en sciences humaines et sociales

    • OpenEdition
  • Nos plateformes

    • OpenEdition Books
    • OpenEdition Journals
    • Hypothèses
    • Calenda
  • Bibliothèques

    • OpenEdition Freemium
  • Suivez-nous

  • Lettre d’information
OpenEdition Search

Redirection vers OpenEdition Search.

À quel endroit ?
  • Presses universitaires de Rennes
  • ›
  • Histoire
  • ›
  • La mémoire face à l'Histoire
  • ›
  • Troisième partie. Éthique de la mémoire...
  • ›
  • Une historiographie postmoderne ?
  • Presses universitaires de Rennes
  • Presses universitaires de Rennes
    Presses universitaires de Rennes
    Informations sur la couverture
    Table des matières
    Liens vers le livre
    Informations sur la couverture
    Table des matières
    Formats de lecture

    Plan

    Plan détaillé Texte intégral Fin des grands récits (nationaux et ouvriers) et fin de l’intérêt vivant pour le passé (occulté par le patrimoine et la mémoire) Crise de l’avenir, fin de l’histoire et à venir apocalyptique Présentisme, significations de l’histoire, et possible montage historiographique d’une autre modernité messianique Bibliographie Notes de bas de page Auteur

    La mémoire face à l'Histoire

    Ce livre est recensé par

    Précédent Suivant
    Table des matières

    Une historiographie postmoderne ?

    Ou comment dépasser l’obsession mémorielle et la fin de l’histoire

    Tanguy Wuillème

    p. 333-347

    Texte intégral Fin des grands récits (nationaux et ouvriers) et fin de l’intérêt vivant pour le passé (occulté par le patrimoine et la mémoire) Crise de l’avenir, fin de l’histoire et à venir apocalyptique Présentisme, significations de l’histoire, et possible montage historiographique d’une autre modernité messianique Bibliographie Ouvrages cités Notes de bas de page Auteur

    Texte intégral

    1Nous assistons depuis une quarantaine d’années à une profonde reformulation de notre rapport au temps. Elle contient tous les ingrédients révolutionnaires de la précédente transformation qui s’est opérée selon Reinhart Koselleck entre 1750 et 1850. Elle avait vu le basculement de notre orientation historique du passé vers l’avenir, accompagnée d’une nouvelle croyance en l’Histoire désignée par Koselleck comme un « singulier collectif » et conduisant les acteurs humains vers une nouvelle action dans le monde en vue du progrès1.

    2Cependant, deux discours semblent seuls avoir pris la mesure de ce changement : la littérature et l’historiographie à teneur philosophique, toutes deux marquées en profondeur par l’intuition d’un nouveau « régime d’historicité ». Réflexions littéraire et historiographique ressentent le besoin de développer un regard rétrospectif et réflexif sur nos relations au passé, au présent et au futur. À les lire, quelquefois entre les lignes, il semblerait (ce sera notre hypothèse), que l’ancienne cohésion et unité de ces trois dimensions du temps s’est délitée, œuvrant à la mise en place, non pas forcément d’une postmodernité tant annoncée, mais du moins à un élargissement radical de cette modernité.

    3Œuvres littéraires et essais historiographiques multiples se sont sédimentés et nous permettent aujourd’hui d’apprécier l’inflexion majeure, que l’on nommera « néolibérale », de notre économie temporelle. Nous voudrions conjuguer leurs apports les plus essentiels pour organiser à notre tour une compréhension synthétique autre de ce tournant historique, nous permettant de reconfigurer la carte du monde où nous vivons. Qu’est-ce qui a changé dans cette dislocation de l’unité des temps ? Notre société du changement est en train de rompre d’une part avec la société de tradition mais également avec celle de l’Histoire. Nos trois temporalités sont ainsi radicalement bouleversées, le passé en vient à ne plus compter sinon de manière pathologique ou artificielle, le présent perd toute consistance et l’avenir connaît une crise inédite. Trois points que nous allons successivement développer.

    Fin des grands récits (nationaux et ouvriers) et fin de l’intérêt vivant pour le passé (occulté par le patrimoine et la mémoire)

    4Aux alentours des années 1970, on peut dire que le régime moderne de l’histoire a achevé la « détraditionnalisation » et la « déthéologisation » du temps. Jusque-là le processus historique se déployait toujours dans une forme unitaire, assurée jadis à l’intérieur du temps religieux, la religion assurant la continuité de l’existence collective à travers la tradition (où le modèle du passé est aussi la loi du futur). Après la Révolution française, cette unité resta confortée par l’idée d’Histoire, des philosophies de l’histoire et des idéologies. Ces dernières réactivaient très bien la même unité temporelle.

    5En effet, au lendemain du tournant 1800, l’orientation temporelle a commencé à privilégier le futur et non plus le passé, mais ce dernier prenait un nouvel intérêt et un nouveau sens. Le passé formait le processus qu’il avait fallu accomplir pour être ce que nous sommes. Il fallait en passer par l’histoire pour comprendre d’où nous venions. D’où la constitution, au début du xixe siècle, de la science historique et d’une conscience historique et de l’idée d’une fin de l’histoire, c’est-à-dire d’un but réconciliateur à atteindre en vue d’une humanité autonome. La fin de l’histoire pouvait être advenue (selon Hegel) ou à venir (selon Marx), reste que l’Histoire a pu dès lors rester pendant près de deux siècles la réponse aux questions ultimes de l’Humanité (d’où venons-nous, qui sommes-nous, où allons-nous ?).

    6En ce qui concerne le passé, si l’on sait le poids écrasant qu’il occupait dans les sociétés de tradition, pour les modernes, il a constitué, par le biais du cadre national, le creuset identitaire central. La nation, dans le sillage de la Révolution française, a capté les vestiges théologiques de l’Un religieux, constituant une communauté d’expérience historique singulière, offrant une identité nationale qui en disait la teneur. La nation offrait des repères et fournissait un grand récit émancipateur. Le travail de Pierre Nora nous renseigne sur la centralité inédite de l’histoire nationale dans le cadre républicain français : l’école, les manuels, le roman familial du type « nos ancêtres les Gaulois », tous ces aspects ont constitué un puissant moteur d’intégration, de cohésion et de promotion sociale2.

    7Aujourd’hui ce cadre national s’est entièrement délité sous les coups de la juridiciarisation des liens sociaux, de l’individualisation, de l’avancée de l’État social et du multiculturalisme. L’idée d’une histoire commune, avec un passé à construire en commun qui ferait l’objet d’une appropriation politique, semble évanouie. Cette Histoire ne semble plus raconter des processus, mais présenter des « lieux de mémoire ». Ce phénomène concerne deux autres notions qui ont elles aussi gagné en visibilité et changé de sens, le patrimoine et la mémoire.

    8En effet, la transformation de notre rapport au passé a consisté en sa progressive patrimonialisation. Si le présent n’est plus le prolongement du passé, ce passé ne disparaît pas pour autant de notre imaginaire collectif. Il existe plus que jamais pour nous mais sur un mode nouveau : celui de la patrimonialisation. On a bien assisté depuis les années 1980 (comme en témoignent des phénomènes comme la Journée du patrimoine, la mise en place d’une Direction du patrimoine, toute la décentralisation du patrimoine culturel, la montée des mouvements associatifs villageois, provinciaux, etc.) à une objectivation des attestations du passé, qui procède à un souci systématique de la conservation et de la préservation de ce passé. C’est maintenant à l’ensemble des attestations du passé que s’étend cette conservation, du monument le plus imposant à l’objet le plus ténu. Tout constitue un témoignage constitutif, il y a prolifération et en même temps déhiérarchisation, tout est mis sur le même plan. Mais plus que tout, ce processus opère une désymbolisation de ces signes et traces du passé : où l’on voit que le sens ultime de cette omni-préservation est paradoxalement l’irruption de l’avenir. Nous conservons tout car nous ignorons ce qui comptera dans le futur et nous ne savons pas ce qui compte dans notre présent. Le patrimoine est une notion futuriste, il s’agit d’un rapport au passé mais soumis à l’avenir. Dans l’obéissance au futur, nous anticipons le regard rétrospectif de nos successeurs. Ce qui vit encore est regardé sous l’angle de sa disparition prochaine. Le sens moral de cette patrimonialisation n’est pas lié à la dette mais à la perte, le passé est perdu, nous ne l’habitons plus. Une familiarité avec le passé s’est encore ici défaite et l’on assiste à un élargissement de la conscience historique car la totalité de la vie sociale doit être sauvée. L’inconnu du futur introduit une distance radicale avec le passé. Silencieux, ce dernier ne nous lie plus à lui, ne nous édifie plus ; au contraire, cet acte de patrimonialisation est lui-même symbolique, il nous signifie notre nouvelle historicité, où le passé acquiert rang d’énigme. Le monument qui représentait l’exceptionnel, l’objet, sont rendus muets, objectivés et s’opposent à tout lien généalogique, à toute reconnaissance de soi dans un passé qui ne fournit plus une identité. Le passé ne nous dit plus qui nous sommes.

    9Le patrimoine atteste d’une altérité à laquelle on ne peut plus s’identifier, on ne sait plus articuler l’héritage du passé et le projet transformateur vers le futur. Il se pourrait que le présent soit écrasé par le passé, voire même qu’il ne fournisse plus un équivalent à la tradition d’autrefois. Celle-ci constituait un important surmoi, le passé était un modèle prescriptif énonçant l’impératif d’être à la hauteur des exemples du passé. Dorénavant il a l’effet inverse, délétère sur nos psychismes : la conviction que ces hommes du passé étaient meilleurs que nous, entraînant un climat de dépréciation des modernes par rapport aux anciens. Impossible d’agir pareillement car nous sommes d’un autre temps, il y a une force inhibitrice du patrimoine. On a remplacé une culpabilité persécutrice par une culpabilité dépressive.

    10Notons que les Anciens partageaient une forte indifférence à l’égard de leur passé. Ils ne conservaient pas, mais réutilisaient des matériaux du passé pour reconstruire des édifices culturels. Le passé ne les intéressait pas car les modèles fondateurs vivaient dans le présent ainsi que les attestations de leur sacré ancestral. La tradition était faite pour s’incarner, on ne connaissait pas de monumentalisation du passé. Le monde des sociétés de tradition est un monde de l’oubli qui ne garde que ce qui a du sens pour le présent.

    11Un dernier volet a émergé : la problématique de la mémoire. Là aussi pas un seul historiographe qui n’ait vu à partir des années 1980 la présence d’une folie mémorielle. Ce « moment histoire » est également imprégné d’histoire et il est au croisement de plusieurs moments de grande ampleur : pour Pierre Nora, l’accélération de l’histoire, le basculement de toutes choses dans un passé qui s’éloigne lui-même de plus en plus vite, tout cela exige une action devenue formule : une réappropriation, où la mémoire remplace l’histoire. L’autre phénomène est celui de la « décolonisation » de l’histoire. L’émergence rapide de toutes les formes de mémoires des minorités, issues de deux types de décolonisation, à la fois géo-politique (celle des ex-colonies) mais également d’une décolonisation intérieure (sociale, sexuelles, religieuse, provinciale) et idéologique (les peuples libérés d’un joug totalitaire ou autoritaire). Ces mémoires minoritaires ont remplacé le grand récit national qui assurait l’unité des temps historiques et fournissait un repère identitaire fort.

    12La vieille mémoire nationale, hégémonique, tyrannique, qui offrait une conscience historique, s’est délitée (au regard des effets des guerres européennes mondiales et coloniales) pour laisser la place au déploiement des mémoires sociales et culturelles. On a privatisé, subjectivisé le rapport au passé. Les vieilles blessures se sont rouvertes, les refoulés du sentiment national (de la Terreur sous la Révolution française à la torture pendant la guerre d’Algérie) sont ressortis au grand jour. Un vaste mouvement d’émancipation des identités de groupe, identités qui autrefois étaient assignées et non choisies, a cherché à revendiquer son histoire propre, plutôt sa mémoire, à se la réapproprier. La mémoire a acquis le statut aussi bien de source que d’objet d’investigation généralisée, précocement en France, puis dans le monde entier. Le problème se situe dans le fait que la mémoire a pris la forme de l’humanisme compassionnel avec l’apparition d’une figure centrale : celle de la victime. Massive, anonyme, celle-ci a envahi la scène et domine désormais notre vision de l’histoire. Là encore, il semble que les ruines soient le seul tableau proposé, où aucun temps actuel n’entre en résonance avec le passé pour accomplir l’espérance des vaincus. Comme le dit Enzo Traverso, « la mémoire du goulag a effacé celle des révolutions, la mémoire de la Shoah a remplacé celle de l’antifascisme […] tout se passe comme si le souvenir des victimes ne pouvait coexister avec celui de leurs combats, de leurs conquêtes et de leurs défaites3 ». Notons d’ailleurs que le discours actuel de la repentance appartient typiquement à ce sentiment d’étrangeté du passé, les luttes d’autrefois ne sont comprises que sous le signe de la culpabilité ignorante.

    13On voit bien que l’histoire bascule du côté de l’inconscient social. Elle n’est plus qu’une sédimentation singularisante d’expériences plurielles historiques. Avant on se rattachait en conscience au passé ; dorénavant on est sous l’emprise de plusieurs passés dont on ignore qu’ils coexistent et que l’on est incapable de comprendre. On a des comportements modelés par un passé que l’on ne maîtrise pas. Ce sont véritablement des nœuds d’histoire inconsciente. Obsession, retour du refoulé, revendication victimaire et repentante, il se pourrait également que la mémoire devenue volontaire, acharnée, enquêtrice, archivistique soit cette mémoire qu’on n’a pas, mais qui répond à une insistance du passé irrépressible. Nombreux sont les romans contemporains (Sebald, Modiano, Mendelsohn) à montrer la hantise, l’impression de revenance du même, de ce qu’on préfère après Ricœur appeler le « travail de mémoire », mais qui montre les effets au présent de cette histoire subie, au rebours de la littérature d’engagement d’autrefois qui défendait l’idéal d’une histoire voulue4. Jean-François Hamel a bien montré cette réapparition d’une temporalité de l’éternel retour, de la compulsion de répétition, de dénégation des forces vives au présent5. La mémoire instille des affects dépréciatifs et mélancoliques, où les trop faibles trouées d’utopies ne servent qu’à montrer la noirceur du temps présent où la mémoire joue à plein. Nous ne sommes plus hantés par des modèles mais possédés par des esprits de l’histoire qui nous condamnent à notre insu. Le passé n’a pas disparu mais il est présent sous le signe de l’inconscience. D’où peut-être le besoin d’une autre historiographie où il ne suffit pas de raconter, ni d’entrer dans le récit.

    Crise de l’avenir, fin de l’histoire et à venir apocalyptique

    14À l’obscurcissement du passé, dont nous semblons à jamais coupé s’est surajouté dans l’analyse de nombreux historiographes, le constat d’un obscurcissement de l’avenir. Puisque nous ne savons plus d’où nous venons, nous ne savons plus non plus où nous allons. L’idée est énoncée dans un article inaugural de Krisztof Pomian, « la crise de l’avenir6 » en 1980.

    15L’idée centrale est qu’autrefois les trois idéologies issues de la Révolution française, le conservatisme réactionnaire, le libéralisme et le socialisme offraient une claire vision de l’avenir et de ses fins : soit une restauration d’un modèle éprouvé de société, soit un progrès indéfini avec développement continuel des virtualités, soit une forme révolutionnaire érigeant l’avenir comme un accomplissement du devenir. Nous ne pouvons revenir dans le détail de ces trois idéologies7. Notons seulement que ce sont des philosophies de l’histoire qui orchestraient et développaient les principales options historiques dans lesquelles se débattaient les forces politiques de nos sociétés. Ces idéologies, basées sur des philosophies de l’histoire, avaient valeur de symptômes. Elles amenaient au jour des structures sous-jacentes du temps social, des façons de se projeter dans le passé, dans le présent et dans l’avenir. Mais pour le dire autrement, elles assuraient encore, malgré la déthéologisation du temps, une unité des temps, certes différente mais bien réelle. Elles se couplaient avec le grand récit national. Au lendemain de 1789, elles avaient un problème à résoudre : l’accélération du temps, le bousculement de l’avenir, l’idée que l’avenir serait meilleur que le présent qui lui-même se distanciait du passé, l’idée de puissance créatrice propre aux acteurs historiques. Ces spéculations s’enracinaient dans une expérience objective : elles traduisaient un sentiment vécu, à savoir que le devenir était le vrai milieu de l’expérience humaine, que c’était là que se jouait la destinée. Il fallait concilier cette idée de la distance des temps avec celle de l’unité.

    16Là encore un texte fait date, bien plus que celui de Lyotard, celui d’Henri Lefebvre écrit en 1970, La fin de l’histoire8. Il souligne que jusque-là l’histoire avait offert une réponse aux questions ultimes de nos origines, de notre actualité et de notre avenir, et montre que toutes les philosophies de l’histoire comportaient cinq traits que je résume : une objectivité du processus historique (en trouver les lois et la science afin de se guider sur lui) ; l’universalité de ce processus (qui englobait l’ensemble des manifestations humaines depuis que les sociétés existent) ; la continuité du processus (il est partout tout le temps à l’œuvre et forme un tissu serré) ; la nécessité (il y a une forme supérieure de continuité des enchaînements, l’histoire en est la clé de voûte) et la finalité (il existe une direction, un but vers lequel l’histoire va nécessairement). Henri Lefebvre soulignait le caractère organisateur de ce processus et en proposait une remarquable variation sur l’idée de fin qui pouvait se comprendre de trois manières différentes : comme finitude (le processus historique a un début et une fin), finalité (il a un dessein, une destination), et finition (il tend vers un achèvement, un accomplissement, un aboutissement qui représente la perfection de son parcours).

    17Or précisément, on peut dire que tous ces traits repérés par Lefebvre en son temps se sont désagrégés. Ce thème de la fin de l’histoire inauguré en 1989 par les écrits de Francis Fukuyama, réitéré par la suite à outrance chez nombre d’auteurs, est bien sûr un thème absurde mais qui saisit un trait essentiel de notre nouveau rapport au temps9. Ce sont l’ensemble des repères relevés par Lefebvre qui se sont évanouis, si l’on reprend ses catégories : à la finitude s’est substituée une impossibilité d’assigner un objet à l’expérience de nos sociétés qui serait leur unique objet, nous n’avons pas de principes, pas de facteurs autour duquel nos sociétés graviteraient ; à la place de la finalité, on ne perçoit plus aucune direction, l’histoire ne va nulle part (si tant est qu’elle existe) ; et à l’idée de finition, on ne peut opposer que l’inconcevable achèvement en vue, l’impossibilité de concevoir à partir du présent la réalisation d’un quelconque absolu.

    18On peut affirmer que ce thème de la fin de l’histoire et de la crise de l’avenir apparaît toujours à des moments de grande incertitude, après la Révolution française, en 1918, ou en 1945, mais à chaque fois on y répondait par des philosophies de l’histoire conséquentes. Alors que s’est-il passé ? Cela doit-il faire la fortune du terme de postmodernité dont on connaît le succès10 et de sa teinte pessimiste ? Ou bien doit-on parler de modernité avancée, tardive, inachevée, réflexive, de sur-ou d’hyper-modernité, qui enregistrent toutes plutôt des transformations dues à une crise des temporalités et qui font signe vers la conceptualisation d’une époque de transition, bien plus que vers l’idée de ruptures irréversibles dont on va voir qu’elles se rapprochent du thème de l’apocalypse ?

    19Henry Rousso a bien montré que l’intérêt pour le passé proche, que le projet d’une histoire contemporaine ou du temps présent, ont été liés aux moments de violence paroxystique du xxe siècle ainsi qu’à leur après-coup. Cette histoire du temps présent commence « avec la dernière catastrophe en date11 ». Mais il en va de même pour le futur. Il ne nous apparaît plus que dans l’horizon de la catastrophe à venir. Les expériences du siècle passé apparaissent comme autant de jalons d’une conception de l’humanité qui doit désormais vivre avec la possibilité de faire face à sa propre destruction partielle ou totale. Si le thème eschatologique de la fin du monde appartient à une tradition de pensée très ancienne, s’il est possible qu’il se soit sécularisé au fil des temps modernes, il n’empêche qu’il a connu un regain de vigueur depuis 1945. Il atteste du repli des Lumières, autrefois critiques impitoyables de ce discours apocalyptique jugé irrationnel, mais il provient également du recul de la croyance dans le progrès.

    20Deux auteurs forment des jalons de la réflexion : Hans Jonas et son Principe Responsabilité (1979), qui introduit le sentiment de peur comme aiguillon de l’action et qui annonce le risque de catastrophe écologique12. Et l’œuvre de Günther Anders qui, dès 1956, actionne un imaginaire de l’apocalypse au regard de l’explosion des bombes atomiques : un imaginaire de la fin qui passe par l’idée d’un monde sans hommes. La fin y est conçue comme une pensée-signe, elle devient signifiante à condition de la relier à un imaginaire comprenant une anticipation, un rappel et des expériences qui s’imbriquent. Anders pense surtout à une temporalité d’ordre apocalyptique : demain pourrait ne plus être, on aurait un monde sans avenir. Cette fin de l’avenir est celle de toute humanité. Anders fait sienne la belle formule de Robert Jungk, « le futur a déjà commencé », mais il la complète ainsi : « Dorénavant l’absence de futur a déjà commencé. » L’avenir n’est plus ouvert puisqu’il est devenu un délai. L’avenir est vidé de tout contenu puisque le présent est réduit au sursis. Nous vivons donc le temps de la fin, nous devons nous préparer à la fin et si nous n’y mettons pas d’obstacles, ce sera « la fin des temps ». Ici le statut de l’Histoire, censée nous consoler de notre mortalité individuelle, est modifié, l’Histoire faite par l’homme pourrait elle-même disparaître, réduite qu’elle serait à un événement final. Anders n’articule aucune philosophie de l’histoire, le futur est déjà là, ce qui fait que les générations futures et la nôtre constituent une même humanité, celle du sursis. Ce temps de la fin est bien notre œuvre (rien de religieux ou de transcendant, donc pas de renouveau attendu, ni d’autre monde salvateur, pas de messianisme ou de rédemption, ni d’utopie), ce qu’il appelle une « apocalypse sans royaume13 ».

    21La force d’Anders est de montrer que la menace n’est pas imaginaire mais bien présente, déjà arrivée sans l’être vraiment. On pourrait dire qu’il peint comme les auteurs de la Rome antique une sorte d’entéléchie, l’accomplissement d’un possible déjà arrivé mais pas encore achevé. Cet aspect catastrophiste se retrouve chez Jean-Pierre Dupuy et son idée de « catastrophisme éclairé » qui commente les thèses de Jonas ou d’Anders en réitérant l’impératif catégorique de ce dernier : « Inquiète ton voisin comme toi-même14 ! » Le combat y devient moral et politique. Le problème n’est pas de savoir si une catastrophe va se produire mais d’y croire et d’agir en conséquence. Le futur n’est que trop prévisible, sinon déjà joué. Il faut se projeter dans l’avant-catastrophe. Le moment ne demande qu’un acte de résistance, il faut prolonger le délai autant qu’on peut. C’est une morale « catéchontique », on y retrouve la puissance négative qui retarde l’Apocalypse. Il ne s’agit pas, selon Jonas, d’« éthique du futur » ou « de la civilisation » ; au contraire il faut se faire moraliste et combattre le mal de l’économie et de la technocratie. « Morts en sursis de tout pays, unissez-vous ! » : Anders et ses poursuivants optent pour une morale de l’urgence, du principe de précaution voire même d’abstention, de sensibilisation aux menaces à venir avec cette idée que l’accélération n’est pas celle de l’histoire humaine mais aussi celle de l’histoire naturelle. Il faut repousser l’avènement du futur.

    22Jean-Paul Engélibert montre bien que ces scénarios d’extinction pullulent également dans la littérature avec plusieurs cas de figure : soit on a le récit de destruction de l’humanité (suite à des catastrophes technologiques, des guerres nucléaires ; ou à des changements climatiques, des épidémies ; ou encore du fait de l’invasion d’extraterrestres, de fantômes, de zombies, à cause de l’épuisement des sociétés), soit on considère le temps du délai comme le temps de l’action. On prendrait conscience de notre humanité, avec l’advenue d’une solidarité effective15 et le présent pourrait être ouvert, quoique faiblement, à l’action « politique » (surtout chez J.-G. Ballard). On pourrait aussi saluer la destruction à venir, qui constituerait une tabula rasa et permettrait de tout reconstruire sur de nouvelles bases. Cet autre monde espéré, dont l’accès représenterait cependant un coût exorbitant, permettrait de dépasser l’ordre mauvais existant et chasserait toute tentative de retour au passé, ou de maintien dans un présent immobile. On aurait une libération des désirs mais hors de tout projet utopique, ce qui semble bien maigre. Même dans son ouvrage La route, Cormac McCarthy, qui nous décrit ce que serait le jour d’après la catastrophe, offre à son lecteur un trop faible espoir. On ne peut s’empêcher, en lisant tous ces textes, de repérer une rhétorique complaisante, jouisseuse, de l’effondrement soudain et irréversible du monde « respectable ». On a un théâtre de la cruauté où se déploie le rite sulfureux du saccage des apparences à l’encontre de toute stabilité ou de toute moralité du monde moderne. Il y a un malin plaisir à dépeindre la destruction qui ouvre sur un espoir bien incertain.

    23À ce moment de notre réflexion, nous ne pensons pas que l’avenir soit coincé entre l’idée de fin de l’histoire et celle d’un horizon apocalyptique : certes il y a un effacement des images de l’avenir mais on peut remarquer que notre orientation vers l’avenir s’est démultipliée. On est face à une extension supplémentaire de la production de l’avenir. Cependant cet avenir a pour nom l’inconnu. La révolution néolibérale qui débute après les deux chocs pétroliers, avec les gouvernements de Thatcher et Reagan, fait que l’avenir est déterminé non par les plans, mais par les marchés, c’est-à-dire par une régulation et un arbitrage automatique, pour se projeter vers cet inconnu avec les réajustements permanents et la flexibilité qu’il demande. L’avenir n’est plus que ce qui résulte du présent. On laisse l’histoire se faire. Le néolibéralisme est bien une philosophe de l’histoire mais qui ne dit pas son nom, voire même qui se présente comme hors-histoire ou post-histoire et qui enregistre la disparition de l’Histoire comme processus global et finalisé.

    24On peut remarquer d’ailleurs qu’il propose de remplacer l’histoire par l’idée de Nature, ou d’Évolution, comme processus de sélection de ce qui mérite d’être « à venir », et cela pas toujours sous la forme de menaces, selon la vision véhiculée par Bruno Latour, mais parfois sous des aspects souhaitables.

    25L’orientation pratique vers l’avenir s’est plus que jamais généralisée, nous avons une manière de nous rapporter à l’existant envisagé selon ses changements possibles en vue de l’amélioration de sa nature. L’économie et le droit en sont les lieux d’investissement les plus considérables. On voit que grâce au principe de l’institution, grâce à des institutions publiques et privées existantes, à la stabilité du droit, en fonction de pôles de perpétuité, bref que grâce à tout cela, le changement peut devenir notre nouveau rituel. Le changement est devenu le vecteur de notre identité dans le temps, la permanence des collectifs se nourrit du changement. Nous sommes dans des sociétés fortement assurées de leur durée, d’une perpétuation temporelle, ce qui nous permet d’ailleurs de ne pas penser à leurs fonctionnements. On se situe dans une société éminemment tournée vers ses propres changements, au point qu’ils sont dorénavant intra-générationnels. À tel point que ce sont souvent les structures incarnant la permanence (famille, institution, emploi à vie, transmission) qui doivent se défendre d’exister. Seul Hartmut Rosa se pose la question des motivations de cet impératif du changement : il désigne la peur des entrepreneurs d’être sur des pentes qui s’éboulent, qui craignent de manquer des opportunités ou des connexions décisives16. L’individu contemporain adhère à la promesse d’une richesse éternelle, absolue, que seul l’argent permet d’obtenir puisque lui seul sert à maîtriser les contingences et les incertitudes de l’avenir.

    26C’est aussi la crise du passé qui provoque cette avidité et cette cupidité généralisée. Le but en est individualiste : il s’agit de disposer d’options aussi nombreuses que possible, face à de nouveaux besoins, face à de nouvelles menaces. L’argent sous la forme du capital est chargé de transformer une complexité indéterminée en complexité déterminée. On pourrait également ajouter l’idée de toute-puissance, dans l’optique wébérienne, de la grâce divine et son adéquation au fait qu’il y a beaucoup d’appelés et peu d’élus. Notre historicité est aussi contaminée par l’argent et l’intérêt, par le sentiment de notre finitude et solitude intrinsèques17.

    27Cependant cette idée de changement n’est plus partagée par les sociétés de l’Histoire : l’innovation n’est plus que le fait d’acteurs indépendants, qui ne demandent rien à personne ; il peut encore s’agir d’acteurs révolutionnaires qui souhaitent changer la société mais qui n’incarnent plus des collectifs porteurs de masses, de classes. Chaque acteur tente de se projeter dans le futur mais cette conduite n’a de sens qu’individuel (même au niveau le plus quotidien : comment rembourser les crédits et dettes que l’on a contractées et dont on devra s’acquitter dans l’avenir). Ce qui fait qu’il n’y a in fine que le marché pour connecter tout cela. D’autre part, cela génère un malaise existentiel entre les adaptés, les flexibles, et, d’autre part, les inadaptés qui ne font que réagir au lieu d’agir. Le Marché remplace l’Histoire, on obtient uniquement des résultantes non anticipables de conduites, et non plus des résultats prévisibles. Reste que l’unité des temps est (re-) trouvée dans le présent. On a inventé mieux que la tradition ou plus efficient que le récit national : le principe institutionnel et surtout l’espace public médiatique comme scène de l’actualité. Cependant, comme on va le voir, il se peut que l’on ne puisse pas s’en contenter car l’un comme l’autre, institution et médiasphère, font du présent un cadre vide, loin d’être pleinement signifiant.

    Présentisme, significations de l’histoire, et possible montage historiographique d’une autre modernité messianique

    28Le positionnement de l’historiographie actuelle à l’encontre du passé et de l’avenir emprunte davantage à un climat affectif inquiet que serein. C’est notre « Zeitgeist » contemporain. L’idée, depuis son énonciation dans les travaux de François Hartog d’un présent éternel, extrêmement étendu et continuellement remis en question, qui est voué à se répéter lui-même indéfiniment puisqu’on le vit sur le rythme de l’instant et de l’obsolescence immédiate de cet instant, a fait son chemin18. Difficile pour nous ici de dire ce que ce présentisme représente vraiment : il serait soit la marque d’un nouveau régime d’historicité qui serait substitué au régime d’historicité moderne, soit une crise transitoire du régime moderne19.

    29Notons ici que cette thèse nous semble assez peu claire car nous avons montré combien nous étions encore tournés vers le futur. Au fond, nous pensons fondamentalement qu’il n’existe que deux régimes d’historicité et pas davantage, celui tourné vers le passé et celui orienté vers le futur. Par ailleurs, l’essence du temps dont parle François Hartog reste assez obscure, le présentisme a davantage une force d’évocation que de conviction. Il rencontre effectivement des aspects pratiques : étant illustré par le temps médiatique, par l’événementialité croissante qui s’autodétruit elle-même, par un sentiment d’accélération et de compression du temps qui affecte l’ensemble de la vie sociale et individuelle, générant, on l’a vu, des exclus décélérants, ainsi qu’une certaine intoxication anhistorique. Mais en serions-nous réellement revenus à une décroyance dans l’Histoire, basée sur une foi dans la contingence de tout ?

    30Il y a bien, on l’a vu aussi, un regard catastrophiste sur le présent conçu comme présent sans fin, celui du délai, de l’attente, comme histoire pensée en termes d’un long et unique désastre. Ce que la geste benjaminienne avait vu, l’histoire ne nous offrant que la contemplation des ruines, l’enfer étant cette vie-ci. La véritable catastrophe, ce serait justement la paralysie de l’histoire. Cela rejoindrait aussi l’idée que les catastrophes sont comme les fêlures de Scott Fitzgerald, invisibles et lentes. Elles commencent toujours sans qu’on les remarque, le présent en est partout porteur. Nous voudrions noter combien ces scénarios-catastrophes peuvent servir aussi à renforcer l’aspect biopolitique actuel, ce que l’on peut appeler une politique des catastrophes. Risques accrus, principe de précaution : on annonce le pire pour promouvoir le développement durable, la télésurveillance, l’immunisation généralisée, la production de l’indemne rapatrié dans le présent, où tout doit être sauvé sans tri préalable entre ce qui compte et ne compte pas.

    31La nouvelle historiographie propose cependant une idée de l’histoire renouvelée : elle a fait sienne la critique de la modernité dans son rapport au futur comme horizon d’attente progressif et émancipateur. Elle a su apprendre des propositions faites par les théories catastrophistes, par celles décrivant en termes sombres le visage du monde présent et révélant les apories de la dialectique des Lumières. Mais on peut voir qu’une certaine historiographie n’a pas abandonné la recherche du sens, du sens de l’histoire, où il ne s’agit pas de comprendre l’histoire faite mais bien celle qui est à faire, que nous faisons, que nous voulons faire, celle qui naît de l’action en direction de l’avenir. Il existe toujours une volonté d’amélioration du sort de l’humanité (de ses ressources, de ses avoirs, etc.) dans l’optique moderne d’une histoire en droit infinie, ou selon Condorcet indéfinie. Impossible donc d’échapper à la philosophie de l’histoire, même si le néolibéralisme semble en nier et dénier l’utilité.

    32La difficulté à parler de philosophie de l’histoire aujourd’hui a été bien analysée par Karl Löwith : « la plénitude du sens est l’affaire d’un accomplissement dans le temps. Oser proférer un énoncé portant sur le sens de certains événements historiques n’est possible que lorsqu’un telos (fin) à venir devient visible20 ». La question devient celle de cette figure qui vient vers nous, qui devient visible et de ceux qui peuvent la lire. L’historien ou l’écrivain peuvent effectivement se faire guetteurs sans pour autant céder aux injonctions du présent21. Où l’on insiste, non pas seulement sur le fond du décor menaçant apocalyptique, mais de la figure porteuse de promesses qui s’approche. De la démocratie, de la communauté, du sujet politique qui viennent. Il ne s’agit plus de futurologie qui comportait la croyance que l’on allait s’en sortir, née elle aussi dans le sillage du tournant néolibéral.

    33Car il existe bien une unité dernière de l’humanité, même au regard de l’hétérogénéité des sociétés. S’il n’y a effectivement pas de direction universelle et uniforme d’un processus unique et homogène, au sens rigoureux pas de sens, reste qu’il y a bien des significations primordiales prises par tout un chacun. Il y a de la signification dans les différents parcours empruntés par les groupes humains ; on peut s’y reconnaître, s’y déchiffrer malgré une non-familiarité d’essence. L’idée d’autonomie reste en vigueur : comme explication de l’humanité avec elle-même, dans et par l’expérience de la liberté. Ce que nous poursuivons reste gros de significations. Il y a place pour une « refondation » de l’historiographie, qui impose d’être partielle, locale, circonscrite ; qui est inscrite dans un devenir ouvert qui pose que la modernité est advenue, présente mais qui exige d’en réaménager des tendances, des lignes. Il n’y a pas lieu d’innover radicalement mais de volontairement modifier un certain nombre de choses.

    34C’est pourquoi nous pouvons indiquer trois démarches susceptibles de nous aider, trois messianismes envisageables (du passé, du présent et du futur) dans une optique non pas religieuse mais profane.

    35Voyons d’abord le messianisme qui puise en premier lieu sa force du passé. On y a fait allusion, les catastrophes lentes commencent toujours sans qu’on les remarque, le présent en est partout porteur. Cela pousse à un autre travail d’histoire où il s’agit de partir du présent pour faire l’archéologie des problèmes, tout en procédant selon la méthode blochienne de repérer ce qui est gros de tendances futures du non-encore-être dans le passé. Ou bien c’est encore le thème formulé par Carlos Fuentes, d’une « mémoire du futur » où « le passé est le seul avenir avéré que nous connaissions […], il faut se remémorer le futur et imaginer le passé22 ». Mais peut-on savoir quand une catastrophe commence, et inversement, peut-on connaître l’étincelle messianique et utopique contenue dans une séquence historique ? Il faut refaire le déroulement du film pour voir ce qui trouble le temps passé, actuel et bien sûr à venir. Un autre montage comportant les trois temporalités, assurant leur unité.

    36Le messianisme du passé consiste à réévaluer le passé afin de le rédimer mais également, dans une optique benjaminienne, à accomplir ce qui aurait dû l’être. S’il s’agit de retrouver la tradition des opprimés par le biais d’une mémoire sélective et critique de l’arracher au conformisme de l’interprétation, il faut également en retrouver les potentialités émancipatrices. Cela ouvre sur un messianisme du présent. Pour modifier les évidences d’un présent dominateur et oppresseur, il s’agit de trouver des « à présent » qui permettent de saisir l’occasion d’action quand elle se présente. En effet l’histoire n’a pas dit son dernier mot, elle repose sur un refoulement qui la travaille. Nous ne savons peut-être pas l’histoire que nous faisons car elle nous arrive toujours sous une autre forme que celle que nous attendions. Il faut que la raison reste ouverte à l’aléatoire, à des micro-événements qui peuvent avoir de grandes conséquences. Il y aura un après néolibéralisme, le devenir existe au-delà du présent, la volonté au-delà des régulations automatiques. Il y a bien un passé qui agit en nous, au travers de nous et malgré nous. C’est pourquoi le passé demande à être déchiffré : nous sommes condamnés à le réfléchir afin de l’infléchir au présent, sinon il s’agirait d’une histoire subie dont nous ne voudrions rien savoir. Il existe une vraie originalité de notre moment historique, qui n’est pas étoffé d’illusions mais de dénis. Le seul pragmatisme mou consistant en une volonté d’aller de l’avant (avec la persévérance névrotique qui l’accompagne), ne saurait nous suffire. Ni non plus les perspectives écologistes, cette autre version de l’économisme ambiant ; il se pourrait que tous ces thèmes ne soient pas à la hauteur des enjeux.

    37En dernier lieu, il reste à étudier la possibilité d’un messianisme du futur23. Celui-ci comporte des aspects phénoménologiques entrevus par Siegfried Kracauer ou Ernst Bloch. Le premier a mis en valeur la notion d’attente, comme « demeurer ouvert hésitant ». Il y a dans cette posture comme une acceptation de l’allégorie kafkaïenne de la porte de la loi fermée. Il existe un savoir de l’attente comprise comme un état psychique qui permet la survenue de l’événement, de l’absolu, qui n’est pas empreint de passivité mais qui est « bien plutôt activité tendue et active auto-préparation ». Bloch quant à lui se concentre sur les traces du futur attendu, anticipé ou souhaité dans le passé et dans le présent. Il faut étudier les rêves de notre époque puisque l’homme accompagne toujours son désir de souhaits, de buts, d’idéaux qu’il se dépeint à l’avance et qui possèdent la représentation de quelque chose de meilleur. Bien des rêves éveillés animés ont pris la réalité à bras-le-corps et l’ont remodelée pour lui arracher son consentement. À l’historien de faire le tri entre les rêves éveillés puérils, d’évasion, d’égarement et de divertissement, et ceux responsables, lucides et engagés dans la réalité. Si la porte étroite est le lieu par où peut s’immiscer le messie, à nous d’y mettre un pied pour la maintenir ouverte à l’imagination. Le travail du critique des matériaux du présent y devient central puisqu’il s’agit pour lui, selon la formule de Walter Benjamin, d’y « lire ce qui n’a jamais été écrit », en l’occurrence tout ce qui est le futur ou les prophéties rétrospectives.

    Bibliographie

    Ouvrages cités

    Anders Günther, Hiroshima est partout, Paris, Seuil, 2008.

    Bonny Yves, Sociologie du temps présent, Paris, Armand Colin, 2004.

    Dupuy Jean-Pierre, Pour un catastrophisme éclairé, Paris, Seuil, 2004.

    Engelibert Jean-Paul, Apocalypses sans royaume, Paris, Classiques Garnier, 2013.

    Fuentes Carlos, « La mémoire du futur », L’Écrit du temps, no 10, 1985.

    Fukuyama Francis, La fin de l’histoire et le dernier homme, Paris, Champs Flammarion, 1989.

    Gauchet Marcel, L’avènement de la démocratie, 3 vol., Paris, Gallimard, 2005-2009.

    Hamel Jean-François, Revenances de l’histoire, Paris, Minuit, 2006.

    Hartog François, Régimes d’historicité, Paris, Seuil, 2003.

    Hartog François, La chambre de veille, Paris, Flammarion, 2013.

    Jonas Hans, Le Principe Responsabilité, Paris, Cerf, 1993.

    Koselleck Reinhart, L’expérience de l’histoire, Paris, Seuil, 1997.

    Lefebvre Henri, La fin de l’histoire, Paris, Economica, 2001 (2e éd).

    Nora Pierre, Recherches de la France, Paris, Gallimard, 2013.

    Pomian Krzysztof, Sur l’histoire, Paris, Gallimard, 1999.

    Rosa Hartmut, Accélération. Une critique sociale du temps, Paris, La Découverte, 2010.

    Rousso Henry, La dernière catastrophe, Paris, Gallimard, 2012.

    Tanguay Daniel, « De la fin de l’histoire à l’ère du présentéisme », in Foessel Michaël, Kervegan Jean-François et Revault D’Allones Myriam (dir.), Modernité et sécularisation, Paris, CNRS Éditions, 2007, p. 61-80

    Traverso Enzo, L’histoire comme champ de bataille, Paris, La Découverte, 2012.

    Wuillème Tanguy, « Consentement et résistance aux péchés du capitalisme », Argument, vol. 11, no 2, printemps-été 2008, p. 58-72.

    Wuillème Tanguy, « Lire ce qui n’a jamais été écrit : Lesbarkeit chez Walter Benjamin », in Abdelkéfi Hedia (dir.), L’illisible. Les enjeux modernes et postmodernes, Tunis, Presses de l’université de Tunis, 2013.

    Wuillème Tanguy, « Quelle imagination au service du travail de mémoire ? (Modiano, Mendelsohn, Sebald) », inDevigne Matthieu, Martinat Monica, Mounier Pascale et Panter Marie (éd.), Imagination et mémoire : enjeux contemporains, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2014.

    Wuillème Tanguy, « Siegfried Kracauer, l’ornement de la masse. Essai sur la modernité weimarienne », Questions de communication, no 15, 2009, p. 472-475.

    Wuillème Tanguy, « Subvertir l’inconscient : pour une esthétique utopique (Ernst Bloch) », in Toudoire-Surlapierre Frédérique (dir.), Hypnos. Esthétique, littérature et inconscients en Europe (1900-1968), Paris, Éditions L’improviste, 2009, p. 57-75.

    Notes de bas de page

    1Koselleck R., L’expérience de l’histoire, Paris, Seuil, 1997.

    2Nora P., Recherches de la France, Paris, Gallimard, 2013.

    3Traverso E., L’histoire comme champ de bataille, Paris, La Découverte, 2012, p. 265

    4Wuillème T., « Quelle imagination au service du travail de mémoire ? (Modiano, Mendelsohn, Sebald) », in Devigne M., Martinat M., Mounier P. et Panter M. (éd.), Imagination et mémoire : enjeux contemporains, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2014.

    5Hamel J.-F., Revenances de l’histoire, Paris, Minuit, 2006.

    6Pomian K., Sur l’histoire, Paris, Gallimard, 1999.

    7Voir à ce sujet Gauchet M., L’avènement de la démocratie, 3 vol., Paris, Gallimard, 2005-2009.

    8Lefebvre H, La fin de l’histoire, Paris, Economica, 2001 (2e éd).

    9Fukuyama F., La fin de l’histoire et le dernier homme, Paris, Champs Flammarion, 1989.

    10Voir à ce propos Bonny Y., Sociologie du temps présent, Paris, Armand Colin, 2004.

    11Rousso H., La dernière catastrophe, Paris, Gallimard, 2012.

    12Jonas H., Le Principe responsabilité, Paris, Cerf, 1993.

    13Anders G., Hiroshima est partout, Paris, Seuil, 2008.

    14Dupuy J.-P., Pour un catastrophisme éclairé, Paris, Seuil, 2004.

    15Engelibert J.-P., Apocalypses sans royaume, Paris, Classiques Garnier, 2013.

    16Rosa H., Accélération. Une critique sociale du temps, Paris, La Découverte, 2010.

    17Wuillème T., « Consentement et résistance aux péchés du capitalisme », Argument, vol. 11, no 2, printemps été 2008, p. 58-72.

    18Hartog F., Régimes d’historicité, Paris, Seuil, 2003.

    19Voir à ce propos : Tanguay D., « De la fin de l’histoire à l’ère du présentéisme », in Foessel M., Kervegan J.-F. et Revault D’Allones M. (dir.), Modernité et sécularisation, Paris, CNRS Éditions, 2007, p. 61-80.

    20Ibid., p. 72.

    21Hartog F., La chambre de veille, Paris, Flammarion, 2013.

    22Fuentes C., « La mémoire du futur », L’Écrit du temps, no 10, 1985, p. 95.

    23Ce dernier paragraphe entend synthétiser succinctement un ensemble d’études dont on trouvera un approfondissement ailleurs : Wuillème T., « Siegfried Kracauer, l’ornement de la masse. Essai sur la modernité weimarienne », Questions de communication, no 15, 2009, p. 472-475 ; « Subvertir l’inconscient : pour une esthétique utopique (Ernst Bloch) », in Toudoire-Surlapierre F. et N. (dir.), Hypnos. Esthétique, littérature et inconscients en Europe (1900-1968), Paris, Éditions L’improviste, 2009, p. 57-75 ; « Lire ce qui n’a jamais été écrit : Lesbarkeit chez Walter Benjamin », in Abdelkéfi H. (dir.), L’illisible. Les enjeux modernes et postmodernes, Presses de l’université de Tunis, 2013.

    Auteur

    • Tanguy Wuillème

      Maître de conférences à l’université de Lorraine. Il est membre du Centre de recherche sur les médiations (CREM EA 3476).

    Précédent Suivant
    Table des matières

    Creative Commons - Attribution - Pas d'Utilisation Commerciale - Pas de Modification 4.0 International - CC BY-NC-ND 4.0

    Le texte seul est utilisable sous licence Creative Commons - Attribution - Pas d'Utilisation Commerciale - Pas de Modification 4.0 International - CC BY-NC-ND 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

    Voir plus de livres
    Paysans des Alpes

    Paysans des Alpes

    Les communautés montagnardes au Moyen Âge

    Nicolas Carrier et Fabrice Mouthon

    2010

    Pérégrin d’Opole

    Pérégrin d’Opole

    Un prédicateur dominicain à l'apogée de la chrétienté médiévale

    Hervé Martin

    2008

    Prêtres de Bretagne au xixe siècle

    Prêtres de Bretagne au xixe siècle

    Samuel Gicquel

    2008

    Un constructeur de la France du xxe siècle

    Un constructeur de la France du xxe siècle

    La Société Auxiliaire d'Entreprises (SAE) et la naissance de la grande entreprise française de bâtiment (1924-1974)

    Pierre Jambard

    2008

    Ouvriers bretons

    Ouvriers bretons

    Conflits d'usines, conflits identitaires en Bretagne dans les années 1968

    Vincent Porhel

    2008

    L'intrusion balnéaire

    L'intrusion balnéaire

    Les populations littorales bretonnes et vendéennes face au tourisme (1800-1945)

    Johan Vincent

    2008

    L'individu dans la famille à Rome au ive siècle

    L'individu dans la famille à Rome au ive siècle

    D'après l'œuvre d'Ambroise de Milan

    Dominique Lhuillier-Martinetti

    2008

    L'éveil politique de la Savoie

    L'éveil politique de la Savoie

    Conflits ordinaires et rivalités nouvelles (1848-1853)

    Sylvain Milbach

    2008

    L'évangélisation des Indiens du Mexique

    L'évangélisation des Indiens du Mexique

    Impact et réalité de la conquête spirituelle (xvie siècle)

    Éric Roulet

    2008

    L'étranger en Bretagne au Moyen Âge

    L'étranger en Bretagne au Moyen Âge

    Présence, attitudes, perceptions

    Laurence Moal

    2008

    Les saints bretons entre légendes et histoire

    Les saints bretons entre légendes et histoire

    Le glaive à deux tranchants

    Bernard Merdrignac

    2008

    Les miroirs du silence

    Les miroirs du silence

    L'éducation des jeunes sourds dans l'Ouest, 1800-1934

    Patrick Bourgalais

    2008

    Voir plus de livres
    1 / 12
    Paysans des Alpes

    Paysans des Alpes

    Les communautés montagnardes au Moyen Âge

    Nicolas Carrier et Fabrice Mouthon

    2010

    Pérégrin d’Opole

    Pérégrin d’Opole

    Un prédicateur dominicain à l'apogée de la chrétienté médiévale

    Hervé Martin

    2008

    Prêtres de Bretagne au xixe siècle

    Prêtres de Bretagne au xixe siècle

    Samuel Gicquel

    2008

    Un constructeur de la France du xxe siècle

    Un constructeur de la France du xxe siècle

    La Société Auxiliaire d'Entreprises (SAE) et la naissance de la grande entreprise française de bâtiment (1924-1974)

    Pierre Jambard

    2008

    Ouvriers bretons

    Ouvriers bretons

    Conflits d'usines, conflits identitaires en Bretagne dans les années 1968

    Vincent Porhel

    2008

    L'intrusion balnéaire

    L'intrusion balnéaire

    Les populations littorales bretonnes et vendéennes face au tourisme (1800-1945)

    Johan Vincent

    2008

    L'individu dans la famille à Rome au ive siècle

    L'individu dans la famille à Rome au ive siècle

    D'après l'œuvre d'Ambroise de Milan

    Dominique Lhuillier-Martinetti

    2008

    L'éveil politique de la Savoie

    L'éveil politique de la Savoie

    Conflits ordinaires et rivalités nouvelles (1848-1853)

    Sylvain Milbach

    2008

    L'évangélisation des Indiens du Mexique

    L'évangélisation des Indiens du Mexique

    Impact et réalité de la conquête spirituelle (xvie siècle)

    Éric Roulet

    2008

    L'étranger en Bretagne au Moyen Âge

    L'étranger en Bretagne au Moyen Âge

    Présence, attitudes, perceptions

    Laurence Moal

    2008

    Les saints bretons entre légendes et histoire

    Les saints bretons entre légendes et histoire

    Le glaive à deux tranchants

    Bernard Merdrignac

    2008

    Les miroirs du silence

    Les miroirs du silence

    L'éducation des jeunes sourds dans l'Ouest, 1800-1934

    Patrick Bourgalais

    2008

    Voir plus de chapitres

    L’autonomie du politique au miroir de l’État et de la langue (le cas français, 1500-1647)

    Tanguy Wuillème

    Quelle imagination au service du « travail de mémoire » ? (Modiano, Mendelsohn, Sebald)

    Tanguy Wuillème

    L’écriture de la rupture révolutionnaire (1906-1908) : Jack London ou comment actualiser la pensée et la critique collective

    Tanguy Wuillème

    Voir plus de chapitres
    1 / 3

    L’autonomie du politique au miroir de l’État et de la langue (le cas français, 1500-1647)

    Tanguy Wuillème

    Quelle imagination au service du « travail de mémoire » ? (Modiano, Mendelsohn, Sebald)

    Tanguy Wuillème

    L’écriture de la rupture révolutionnaire (1906-1908) : Jack London ou comment actualiser la pensée et la critique collective

    Tanguy Wuillème

    Accès ouvert

    Accès ouvert freemium

    ePub

    PDF

    PDF du chapitre

    Suggérer l’acquisition à votre bibliothèque

    Acheter

    Édition imprimée

    Presses universitaires de Rennes
    • amazon.fr
    • decitre.fr
    • mollat.com
    • leslibraires.fr
    • placedeslibraires.fr
    ePub / PDF

    1Koselleck R., L’expérience de l’histoire, Paris, Seuil, 1997.

    2Nora P., Recherches de la France, Paris, Gallimard, 2013.

    3Traverso E., L’histoire comme champ de bataille, Paris, La Découverte, 2012, p. 265

    4Wuillème T., « Quelle imagination au service du travail de mémoire ? (Modiano, Mendelsohn, Sebald) », in Devigne M., Martinat M., Mounier P. et Panter M. (éd.), Imagination et mémoire : enjeux contemporains, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2014.

    5Hamel J.-F., Revenances de l’histoire, Paris, Minuit, 2006.

    6Pomian K., Sur l’histoire, Paris, Gallimard, 1999.

    7Voir à ce sujet Gauchet M., L’avènement de la démocratie, 3 vol., Paris, Gallimard, 2005-2009.

    8Lefebvre H, La fin de l’histoire, Paris, Economica, 2001 (2e éd).

    9Fukuyama F., La fin de l’histoire et le dernier homme, Paris, Champs Flammarion, 1989.

    10Voir à ce propos Bonny Y., Sociologie du temps présent, Paris, Armand Colin, 2004.

    11Rousso H., La dernière catastrophe, Paris, Gallimard, 2012.

    12Jonas H., Le Principe responsabilité, Paris, Cerf, 1993.

    13Anders G., Hiroshima est partout, Paris, Seuil, 2008.

    14Dupuy J.-P., Pour un catastrophisme éclairé, Paris, Seuil, 2004.

    15Engelibert J.-P., Apocalypses sans royaume, Paris, Classiques Garnier, 2013.

    16Rosa H., Accélération. Une critique sociale du temps, Paris, La Découverte, 2010.

    17Wuillème T., « Consentement et résistance aux péchés du capitalisme », Argument, vol. 11, no 2, printemps été 2008, p. 58-72.

    18Hartog F., Régimes d’historicité, Paris, Seuil, 2003.

    19Voir à ce propos : Tanguay D., « De la fin de l’histoire à l’ère du présentéisme », in Foessel M., Kervegan J.-F. et Revault D’Allones M. (dir.), Modernité et sécularisation, Paris, CNRS Éditions, 2007, p. 61-80.

    20Ibid., p. 72.

    21Hartog F., La chambre de veille, Paris, Flammarion, 2013.

    22Fuentes C., « La mémoire du futur », L’Écrit du temps, no 10, 1985, p. 95.

    23Ce dernier paragraphe entend synthétiser succinctement un ensemble d’études dont on trouvera un approfondissement ailleurs : Wuillème T., « Siegfried Kracauer, l’ornement de la masse. Essai sur la modernité weimarienne », Questions de communication, no 15, 2009, p. 472-475 ; « Subvertir l’inconscient : pour une esthétique utopique (Ernst Bloch) », in Toudoire-Surlapierre F. et N. (dir.), Hypnos. Esthétique, littérature et inconscients en Europe (1900-1968), Paris, Éditions L’improviste, 2009, p. 57-75 ; « Lire ce qui n’a jamais été écrit : Lesbarkeit chez Walter Benjamin », in Abdelkéfi H. (dir.), L’illisible. Les enjeux modernes et postmodernes, Presses de l’université de Tunis, 2013.

    La mémoire face à l'Histoire

    X Facebook Email

    La mémoire face à l'Histoire

    Ce livre est diffusé en accès ouvert freemium. L’accès à la lecture en ligne est disponible. L’accès aux versions PDF et ePub est réservé aux bibliothèques l’ayant acquis. Vous pouvez vous connecter à votre bibliothèque à l’adresse suivante : https://freemium.openedition.org/oebooks

    Suggérer l’acquisition à votre bibliothèque Acheter ce livre aux formats PDF et ePub

    Si vous avez des questions, vous pouvez nous écrire à access[at]openedition.org

    La mémoire face à l'Histoire

    Vérifiez si votre bibliothèque a déjà acquis ce livre : authentifiez-vous à OpenEdition Freemium for Books.

    Vous pouvez suggérer à votre bibliothèque d’acquérir un ou plusieurs livres publiés sur OpenEdition Books. N’hésitez pas à lui indiquer nos coordonnées : access[at]openedition.org

    Vous pouvez également nous indiquer, à l’aide du formulaire suivant, les coordonnées de votre bibliothèque afin que nous la contactions pour lui suggérer l’achat de ce livre. Les champs suivis de (*) sont obligatoires.

    Veuillez, s’il vous plaît, remplir tous les champs.

    La syntaxe de l’email est incorrecte.

    Référence numérique du chapitre

    Format

    Wuillème, T. (2019). Une historiographie postmoderne ?. In A. Le Guellec-Minel (éd.), La mémoire face à l’Histoire (1‑). Presses universitaires de Rennes. https://doi.org/10.4000/149mv
    Wuillème, Tanguy. « Une historiographie postmoderne ? ». In La mémoire face à l’Histoire, édité par Anne Le Guellec-Minel. Rennes: Presses universitaires de Rennes, 2019. https://doi.org/10.4000/149mv.
    Wuillème, Tanguy. « Une historiographie postmoderne ? ». La mémoire face à l’Histoire, édité par Anne Le Guellec-Minel, Presses universitaires de Rennes, 2019, https://doi.org/10.4000/149mv.

    Référence numérique du livre

    Format

    Le Guellec-Minel, A. (éd.). (2019). La mémoire face à l’Histoire (1‑). Presses universitaires de Rennes. https://doi.org/10.4000/149p6
    Le Guellec-Minel, Anne, éd. La mémoire face à l’Histoire. Rennes: Presses universitaires de Rennes, 2019. https://doi.org/10.4000/149p6.
    Le Guellec-Minel, Anne, éditeur. La mémoire face à l’Histoire. Presses universitaires de Rennes, 2019, https://doi.org/10.4000/149p6.
    Compatible avec Zotero Zotero

    1 / 3

    Presses universitaires de Rennes

    Presses universitaires de Rennes

    • Mentions légales
    • Plan du site
    • Se connecter

    Suivez-nous

    • Flux RSS

    URL : http://www.pur-editions.fr

    Email : pur@univ-rennes2.fr

    Adresse :

    2, avenue Gaston Berger

    CS 24307

    F-35044

    Rennes

    France

    OpenEdition
    • Candidater à OpenEdition Books
    • Connaître le programme OpenEdition Freemium
    • Commander des livres
    • S’abonner à la lettre d’OpenEdition
    • CGU d’OpenEdition Books
    • Accessibilité : partiellement conforme
    • Données personnelles
    • Gestion des cookies
    • Système de signalement