Avant-propos
p. 17-19
Texte intégral
1Avant de rentrer dans le vif du sujet, je voudrais revenir sur deux anecdotes qui se sont déroulées au début de ma thèse et qui ont influé grandement sur la tournure qu’a pris ce travail.
2 Septembre 2011. Quelques semaines après avoir débuté ma thèse, je rencontre une collègue dans le couloir de mon centre de recherche. À l’évocation de mon travail en cours, elle me demande, un peu étonnée, si il y a encore des choses à écrire sur le sujet puisque plusieurs auteurs pionniers l’ont déjà étudié.
3 Décembre 2011. Premier terrain au Sénégal. Je découvre les archives nationales de Dakar. Le président de salle me fait remplir une fiche de renseignement et me demande mon thème de recherche. Je remplis lapidairement « Travail forcé au Sénégal ». Ce à quoi il me répond : « Cela ne va pas être possible Monsieur Tiquet, ce sujet a déjà été fait, il faut changer de thème. »
4Ces deux anecdotes ne m’ont pas quitté pendant toute la durée de ma recherche. Elles ont constitué une sorte de poids que j’ai traîné sur les épaules pendant toutes mes années de thèse : comment réussir à proposer une étude originale sur un sujet déjà traité sans tomber dans le piège d’une simple réactualisation des travaux majeurs qui ont été écrits dessus ? Tel est le pari du présent ouvrage.
5 Octobre 2015. Quelques semaines avant le dépôt de mon manuscrit de thèse. Je redécouvre un petit ouvrage d’Howard Becker, Les ficelles du métier. L’auteur écrit une page intitulée « Tout le monde sait ça ! », quelques lignes pour déconstruire l’idée que l’on ne pourrait plus étudier ce qui l’a déjà été :
« Nous ne pouvons pas négliger un sujet simplement parce que quelqu’un d’autre l’a déjà étudié. Il faut considérer en fait, et c’est là une ficelle bien utile, que lorsqu’on entend dire, ou que l’on s’entend dire soi-même, que tel sujet ne vaut pas la peine d’être étudié parce que ça a déjà été fait, cela signifie justement que le moment est venu de commencer à travailler dessus. “Ça a déjà été fait” reste cependant une expression que l’on entend très souvent, notamment lorsqu’on est étudiant et que l’on cherche un sujet de thèse. “Ce serait stupide d’étudier ça, Dupont vient juste de publier un article sur la question.” Ce genre de remarque repose sur une grave erreur : celle qui constitue à croire que les choses qui portent le même nom sont toutes identiques. Or ce n’est pas le cas, tout au moins pas de manière évidente, de sorte qu’“étudier la même chose” consiste souvent à ne pas étudier du tout la même chose1. »
6Il était nécessaire pour moi de relater ces deux réflexions – quelque peu naïves j’en conviens – reçues au début de mon travail car elles ont été plus que structurantes dans la construction de mon objet de recherche et ont joué un rôle central dans le contenu et la forme que la présente étude a prise.
7Au cours de ces années de thèse, de nombreuses personnes m’ont encadré, soutenu et supporté. Mes remerciements vont tout d’abord à Alexander Keese qui a dirigé ma thèse. Sa disponibilité, son exigence et son suivi constant m’ont permis de formuler au mieux ce travail. Le dynamisme du centre de recherche re :work de Berlin et de son directeur Andreas Eckert a participé à la maturation de ce projet lors des nombreuses rencontres et des prolifiques échanges que j’ai pu avoir avec certains fellows du centre. Qu’ils en soient toutes et tous remerciés. Je remercie également les membres de mon jury de thèse qui ont dû lire les 500 pages de mon manuscrit initial : Frederick Cooper, Susanne Gehrmann, Joël Glasman, Baz Lecoq et Agathe Menetrier.
8Le soutien financier de la Commission européenne, dans le cadre du projet ERC Forced labour : an Afro-European heritage in sub-Saharan Africa (1930-1975) ?, ainsi que la bourse de mobilité de l’Institut historique allemand de Paris, ont contribué à l’aboutissement de ce travail dans les meilleures conditions matérielles.
9Tous mes remerciements vont en particulier aux jeunes (et moins jeunes) chercheurs dont certain·e·s sont devenus des ami·e·s au fil des années, et qui ont, par leurs conseils de lecture, leurs avis critiques et leurs corrections avisées, grandement participé à ce travail : Séverine Awenengo Dalberto, Nicolas Courtin, Camille Evrard, Benoît Henriet, Enrique Martino, Marie Rodet.
10À toutes celles et ceux qui m’ont aidé, écouté, orienté, ici ou là, que ce soit lors de mes séjours aux archives nationales de Dakar, au département d’histoire de l’UCAD, ou encore en Casamance et dans la région de Saint-Louis. À Mamadou Badji, rencontré à Tobor, qui a partagé son histoire et m’a ouvert sa porte à plusieurs reprises. Aux anonymes de Ouassadou-Dépôt, avec qui j’ai pu discuter et en apprendre plus sur l’histoire du village malgré une insolation carabinée… Aux habitants et aux anciens pionniers de Savoigne, pour leur accueil, leur confiance. À Alioune Diaye et sa famille, à Ahmedou Touré qui m’a fourni de précieux documents. À Erwan le Menn, pour ses précisions et ses corrections sur son expérience à Savoigne.
11Aux amis de Dakar et de Navarre : Delphine, Yo, Christophe et Raphaëlle. À la compagne de galère de la « stabi », Fanny. À mes parents (sortez les violons), qui me suivent, m’encouragent et me supportent sans faiblir depuis le début de mes pérégrinations ouest-africaines. Merci à eux pour leur écoute, et surtout pour leur patience face à mon entêtement – parfois –, et mon arrogance – sans doute. Mention spéciale à Corinne Tiquet, correctrice en chef.
12Enfin à Jana, qui m’accompagne depuis le début. Pour son soutien, son sourire et sa tendresse.
Notes de bas de page
1Becker Howard S., Les ficelles du métier. Comment conduire sa recherche en sciences sociales, Paris, La Découverte, 2002, p. 151.

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