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    Plan détaillé Texte intégral Les mutations du système partisan local 1977 : une campagne, des campagnes Rennes 1977, un virage à gauche Notes de bas de page Auteur

    Les élections municipales de 1977

    Ce livre est recensé par

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    Table des matières

    Rennes 1977, une élection-matrice pour le système partisan à l’échelle locale

    François Prigent

    p. 213-229

    Texte intégral Les mutations du système partisan local L’empreinte du temps long des cultures politiques locales : l’exemple socialiste 1971, la vraie rupture électorale locale ? Un clivage gauche(s)/droite(s) recomposé 1977 : une campagne, des campagnes À droite, un dauphin ou une rupture de l’héritage À gauche, l’apogée de l’union Récits de campagne. L’élection vue par la presse (janvier-mars 1977) Rennes 1977, un virage à gauche La clarification politique du premier tour La gauche, sans surprise Notes de bas de page Auteur

    Texte intégral

    1Cette étude de cas1 sur la configuration rennaise des municipales de mars 19772 suppose de revenir sur le sens et les logiques du champ électoral, qui renvoient à une triple dimension.

    2Un scrutin, même local ou devrait-on dire a fortiori municipal, sert à trancher entre des projets politiques concurrents, soit à choisir entre des programmes politiques pluriels qui présentent et impulsent des politiques municipales reposant sur des principes différenciés. En l’espèce, la victoire d’Edmond Hervé et de l’Union de la gauche en mars 1977 impulse de nouvelles pratiques du politique et des politiques, à l’échelle rennaise, qui ouvrent un nouveau cycle du développement de la capitale bretonne, après l’ère Henri Fréville (1953-1977) qui avait façonné la physionomie de la métropole de l’après Libération.

    3Voter, élire ses édiles c’est aussi sélectionner les figures de la démocratie représentative, en l’occurrence en 1977 légitimer un pouvoir municipal largement doté de ressources militantes mais sans expérience du pouvoir, apparaissant toutefois résolument novateur et moderne. La modernité s’entend ici comme ce qui est nouveau, imprimant une rupture radicale, et ce qui s’inscrit dans la durée. 1977 est pensé comme un phare éclairant les actes à venir, un repère auquel la majorité se réfère, par fidélité à un acte politique fondateur3. Ces réseaux militants dynamiques de l’Union de la gauche modifient la politisation à l’échelle locale en portant une autre façon de faire et de penser la politique (démocratie locale, autogestion), emblématique des années 19704. C’est bien un cycle générationnel nouveau qui s’ouvre avec l’arrivée au pouvoir des équipes municipales d’Edmond Hervé, impulsant de façon durable une rupture dans l’orientation et les contours du personnel politique en responsabilité.

    4Les élections valident enfin, par la logique majoritaire, les stratégies partisanes dominantes. Ce jeu d’échelles entre local et national relève de l’intégration dans un système partisan qui fonctionne selon le clivage gauche(s)/droite(s). Or, ce scrutin de 1977 initie assurément une nouvelle phase de l’implantation des forces politiques à gauche, autour d’un socle PS représentatif de la métropolisation du socialisme breton, un socialisme à visage urbain pour reprendre une expression forgée lors d’un récent colloque sur la génération 1977 dans l’Ouest5. Quel(s) bouleversement(s) reflètent et impulsent ce scrutin municipal à Rennes, ouvrant une nouvelle période politique dominée par la figure d’Edmond Hervé, maire de Rennes (1977-2008), député (1981-1993, 1997-2002) et ministre (1981-1986) ?

    Les mutations du système partisan local

    5Le grand basculement de Rennes à gauche procède de mutations sur le temps long du système partisan local. Les recompositions politiques se mesurent singulièrement par l’évolution des chrétiens sociaux et des socialistes locaux.

    L’empreinte du temps long des cultures politiques locales : l’exemple socialiste

    6L’élection en 1977 d’un maire socialiste peut être relue à l’aune du temps long. En 1908, l’intégration dans la majorité municipale du radical Jean Janvier favorise un autre rapport au pouvoir, avec l’entrée dans le conseil municipal d’élus SFIO. En 1925, l’élection d’un premier maire socialiste, l’universitaire Carle Bahon, épaulé par Eugène Quessot et Honoré Commeurec, témoigne de la consolidation, dans les villes bretonnes, de l’implantation de la SFIO adossée aux filières républicaines de gauche. En concurrence avec les radicaux, la SFIO, en retrait politique, ne compte en 1929 et 1935 qu’un seul élu au conseil municipal (comme au conseil général d’ailleurs), Eugène Quessot, même si des socialistes indépendants comme Charles Bougot ou Oscar Leroux cheminent avec la majorité municipale.

    7En 1945-1947, le reflux des gauches face au pouvoir local de centre-droit puis à dominante gaulliste traduit le repli électoral de la SFIO. Aux élections municipales de 1947, sur 46 271 suffrages exprimés, la liste RPF conduite par Yves Milon (19 215 voix, 16 élus) arrive nettement en tête, impulsant une recomposition de fait du système partisan municipal. Les trois autres forces politiques majeures obtiennent moins de 10 sièges au conseil municipal : SFIO (6 élus, 6 984 voix), PCF (8 élus, 10 185 voix), MRP et RI (7 élus, 8 411). Les radicaux, réduits à la portion congrue, 918 voix, n’obtiennent plus aucun élu.

    8En 1953, l’irruption d’Henri Fréville au pouvoir municipal initie une rupture dans les politiques et suscite une fracture les droites, entre gaullistes et démocrate-chrétiens, la configuration rennaise se singularisant du paysage politique départemental ou régional6. Une majorité très courte, scellée par une alliance MRP-SFIO, se forge autour d’Henri Fréville (MRP, 10 élus) et Alexis Le Strat (SFIO, 6 élus), contre à la fois les listes conservatrice (13 élus) et communiste (8 élus). La Troisième force dans toute sa splendeur et ses contradictions.

    9Entre 1953 et 1977, les élus SFIO minoritaires, sont, par intermittence, intégrés à cette majorité composite soudée par une fibre sociale revendiquée. Le scrutin de 1977 s’écrit ainsi en rupture une tradition ancrée dans des pratiques politiques locales pour le PS.

    10Complexe, l’élection de 1959 fait partiellement évoluer la donne électorale locale, avec pas moins de 6 listes en présence. Fort d’un enracinement puissant autour de réseaux militants pluriels (polarisés par des figures comme l’ancien syndicaliste CFTC Léon Grimault, le Dr Le Gal La Salle ou Guy Houist), le MRP obtient seulement 12 373 voix au premier tour, nettement devant la SFIO, 8 033 voix (6 élus dont Alexis Le Strat et Marcel Biétry). La liste UNR-CNIP, avec 15 626 voix et 13 élus (François Château, ancien maire entre 1935 et 1944, Henri Jouault, Neumager, Marc, François Le Douarec) ainsi que la Liste PCF, 10 468 voix, 8 élus (dont Emile Guerlavas) s’opposent à la majorité sortante. Deux autres listes, celle des indépendants, 1 247 voix (Prosper, Jardin, Oberthur) et celle du PSA (Charles Foulon, Albert Renouf) se partagent le reste des 50 971 suffrages exprimés. Au second tour, si la SFIO refaçonne sa liste, autour de nouveaux candidats comme Louis Volclair, et que le PSA et le PCF fusionnent leurs listes, le MRP emporte l’élection en faisant passer sa liste entière. Une certaine clarification électorale, consolidant ce qui est dénommé en 1977 le « système Fréville », s’opère lors du scrutin de 1965 opposant 3 listes : Lamache (3 208 voix), Henri Fréville (8 797 voix), Alexis Le Strat (4 073 voix).

    1971, la vraie rupture électorale locale ?

    11Moins connue, l’élection de 1971 pose pourtant les bases d’une nouvelle configuration locale émergeant au grand jour en 1977. Consacrant a priori la domination électorale de l’équipe municipale d’Henri Fréville (37 élus), cette élection porte en germe, l’inversion des gauches et les dynamiques électorales à l’œuvre en faveur de la gauche non communiste7, et, par voie de conséquence, au détriment de la démocratie-chrétienne.

    Tableau 1. – Synthèse des résultats du scrutin municipal de 1971.

    ListeTête de listePartisVoixSuffrages exprimés
    Entente républicaine pour le développement et la promotion de la ville de RennesHenri FrévilleMajorité*31 17847 %
    Rennes socialisteAubry J. Caillaud, P.-Y. Heurtin J.-P. PlanckaertPSU-PS-CIR13 50525 %
    Yves BraultPCF9 04318 %

    * En 1977, le conseil municipal sortant est composé de 11 CDS, 6 centristes, 4 RI, 7 RPR, 3 divers gauches (ex SFIO appuyant la stratégie de Troisième force), 2 radicaux, 1 CNIP et 1 gaulliste isolé.

    12À y regarder de plus près, les progressions de la gauche, notamment non-communiste, s’expriment à plein dans les nouvelles zones urbaines rennaises.

    Tableau 2. – Municipales de 1971, une nouvelle géographie électorale de la ville ?

    ListesSuffrages exprimésRennes Nord-EstRennes Nord-OuestRennes Sud-EstRennes Sud-Ouest
    Liste d’entente Fréville31 1789 2648 20910 9632 742
    Liste d’union Brault9 0431 9792 2543 976834
    Rennes socialiste Aubry13 5053 0903 6235571 235
    Total53 72614 33314 08620 4964 811

    13À l’échelle cantonale (10 cantons à Rennes), les mutations en cours s’avèrent encore plus nettes.

    Tableau 3. – Synthèse des résultats électoraux par cantons (municipales de 1971).

    CantonsListe FrévilleListe BraultListe Aubry
    Beaux-Arts/Liberté4 0925301 002
    Echange/Vanneau4 2851 0501 520
    Villejean1 9596541 377
    Joseph Lotte/Motte Brulon1 965550726
    Trégain3 3019931 362
    Duchesse Anne/Jeanne Jugan3 8857511 325
    Francisco Ferrer/Landrel3 1361 6541 947
    Basses Chalais1 299505828
    Guinguené/Quineleu4 5141 5222 183
    Tour d’Auvergne/Champion de Cicé2 7428341 235
    Total31 1789 04315 505

    Un clivage gauche(s)/droite(s) recomposé

    14À droite, plusieurs réalités bousculent en 1977 les équilibres existant sur la longue durée, contribuant au basculement à gauche. Depuis 1968 au moins, les droites duales laissent exister en leur sein des duels qui fragmentent et fragilisent une hégémonie politique de moins en moins évidente. Cela s’exprime en trois temps. Moment de rupture, sans retour, les législatives de 1968 se soldent par la défaite symbolique d’Henri Fréville face à Jacques Cressard, ainsi que par une poussée, confirmée en 1973-1976, des gaullistes autour de François Le Douarec, député depuis 1962 puis président du conseil général à partir de 19768. Second temps, après le succès national des centrismes incarnés par Giscard d’Estaing, Henri Fréville doit faire avec une succession contrariée en raison des problèmes de santé, en 1975, de Guy Houist, son suppléant depuis 1958 et ancien chef de cabinet d’André Colin9. Henri Fréville est lui-même victime d’une attaque cérébrale en 1976, ce qui achève de perturber la fin de son mandat municipal. À court terme, les tensions et les divisions s’expriment au grand jour en 1976-1977, une fois le retrait officialisé du maire sortant10, lorsque Jean-Pierre Chaudet est désigné pour briguer sa succession.

    15À gauche, la nouvelle configuration née du scrutin de 1971 incite à repenser la question de l’Union de la gauche, d’autant plus après les poussées continues d’un PS bénéficiant à plein du cycle d’Épinay11. La percée enregistrée lors des législatives de mars 1973, confirmée par l’entrée au conseil général de plusieurs élus PS (dont Edmond Hervé et Michel Phlipponneau) en octobre 1973, est prolongée par une dynamique de nationalisation du vote PS lors des présidentielles de 1974 et par une amplification locale lors des cantonales de 1976 (succès spectaculaire de Jean-Michel Boucheron face à Henri Fréville, défaites des piliers du CDS, Yves Garnier et Gérard Pourchet contre de nouvelles figures du PS).

    16À la veille du scrutin, les gauches, plurielles et ascendantes, en reconstruction, se présentent unies et en capacité de mobiliser et d’additionner leurs réseaux militants, quand le déclin et la décomposition des filières démocrates-chrétiennes sont aiguisés par la concurrence virulente des gaullistes.

    1977 : une campagne, des campagnes12

    17Enjeu national, perçu et traité comme tel, cette campagne des élections municipales du printemps 1977 peut être saisie en détail, grâce aux fonds d’archives très riches des archives municipales (fonds Boucheron et Hervé), rassemblant professions de foi, documents préparatoires, résultats précis et coupures de presse.

    À droite, un dauphin ou une rupture de l’héritage

    18Le parcours de Jean-Pierre Chaudet (1938-2012) mérite d’être retracé pour saisir cette lutte de pouvoir entre un dauphin de rupture et un outsider en politique. Né dans une famille de 7 enfants, Jean-Pierre Chaudet, qui grandit à Rennes, Laval et Vannes, fait sa scolarité au lycée Saint-Vincent. Fondateur, avec d’autres étudiants en droit, de l’association de la Jeune chambre économique (JCE) en 1966, année où il soutient sa thèse, il est major de l’agrégation de droit en 1969 (comme Yves Fréville en sciences économiques). Universitaire établi, il investit les nouvelles filières centristes soutenant Valéry Giscard d’Estaing, tout en fréquentant les réseaux des SAC. Adjoint dès 1971, en charge des dossiers stratégiques du développement économique et de l’urbanisme, il est conseiller régional et président départemental des RI en 1977. S’il se fait remarquer pour son rôle dans la naissance des foulées rennaises en 1971, ce proche de Michel Duval connaît une émergence politique locale relativement tardive en 1975-1976. Il se singularise par son style volontariste aussi bien dans le dossier de l’aménagement de la ZAC de Patton qu’à la présidence de la Société d’économie mixte d’aménagement et d’équipement de la Bretagne (SEMAEB). Dans une lettre aux Rennais, le 21 janvier 1977, Henri Fréville finit par l’adouber pour sa succession.

    19Épineuse, la transmission de l’héritage politique se confronte aux réticences à droite. En l’absence d’un accord pour la conduite et la composition de la liste d’union des droites, le quotidien Ouest-France du 1er septembre 1976 fait état d’une alliance de façade qui masque une division profonde. Irréductibles, ces dissensions sont exacerbées par la tête de liste pressentie, qui est loin de faire l’unanimité. Par son refus répété d’assumer une étiquette politique, Jean-Pierre Chaudet ne contribue pas à fédérer les organisations partisanes de droite (CDS et surtout UNR) autour de lui, ne disposant ainsi que des maigres forces militantes locales des Républicains indépendants. Signe d’un lancement tardif de la campagne et des préventions sur le terrain, à droite, face à la désignation non consentie d’un dauphin imposé d’en haut, la composition de la liste Chaudet n’est divulguée que le 18 février 1977 dans Ouest-France.

    20De moins en moins larvée depuis 1968, la concurrence entre droites opposées apparaît au grand jour. Privés des premières places sur une liste polarisée par un axe RI-CDS, les gaullistes se trouvent pourtant au cœur du dispositif. Mais cantonné à un rôle secondaire en dépit du nombre de ses candidats, le RPR ne fait pas mystère de sa faible implication dans une campagne qui lui paraît extérieure. Cette déconnexion, à l’image des déclarations publiques de ses leaders, François Le Douarec (député et président du conseil général) ou Jacques Cressard (député entre 1968 et 1981)13, exprime aussi des animosités personnelles non dissimulées, cristallisées dans la durée. Le faible rayonnement du staff de campagne de Jean-Pierre Chaudet (une trentaine de responsables actifs) contraste et pèse peu face aux équipes militantes du PS et du PCF (300 personnes chacune), qui quadrillent le terrain politique14. Entre désengagement des milieux gaullistes sociaux et délitement des anciens réseaux MRP, la campagne autour de Jean-Pierre Chaudet semble d’entrée plombée, faute de clarté et de cohérence de la ligne stratégique.

    21D’autant que l’étude du profil des candidats, sous l’angle des réseaux et relais mobilisés, dévoile un décalage entre une rupture de fait et un discours de continuité apparente. Net, le glissement de l’assise traditionnelle de la démocratie-chrétienne vers une culture de la droite libérale se veut compensé par un encadrement de la tête de liste par deux chefs de file du CDS (Gérard Pourchet et Yves Fréville15). Si les réseaux classiques de la droite (professionnels, syndicaux, associatifs, enseignement privé) figurent bien sur la liste, les têtes de réseau manquent d’épaisseur et la propagande militante met plus l’action sur l’idée d’une équipe compétente et expérimentée, à grand renfort de photos d’élus en action. Seul Jacques Cressard produit une expression non centriste ou libérale, ce qui atténue largement la portée des milieux militants ciblés, plutôt issus du RPR. Contrairement aux autres listes, les âges des candidats ne sont pas présentés dans les documents de campagne, et ce en dépit d’une moyenne d’âge qui ne dénote pas avec les mandatures précédentes. Le poids de l’équipe sortante reste significatif, puisque la moitié de la liste siège déjà sous Henri Fréville : 8 adjoints (Chaudet, Brand, Denis, Janton, Jouault, Leyzour, Pitard, Porée) et 10 conseillers municipaux (Dartois, Dault, Granville, Houalet, Jan, Laurence, Ledu, Pourchet, Quéré, Rumeur).

    22Tiraillé entre une rupture affichée qui ne résiste pas aux faits et un héritage revendiqué difficilement assumé, Jean-Pierre Chaudet se trouve dans un entre-deux politique qui participe de la défaite des droites.

    À gauche, l’apogée de l’union

    23Aspirant à la conquête du pouvoir local, la configuration des gauches se situe à l’exact opposé des difficultés des droites. Le vote interne de la section PS pour désigner la tête de liste survient dès le 6 mai 1976, Edmond Hervé obtenant 75 % des voix, ce qui entraîne le retrait de Michel Phlipponneau16. L’ancien secrétaire fédéral du PS, conseil général depuis 1973, parvient à fédérer les réseaux militants à base multiple17 d’un PS dont la percée électorale est fulgurante entre 1973 et 1976. Dans la foulée de l’accord national du 28 juin 1976, l’accord départemental PS-PCF, signé en juillet 1976, assure une mobilisation totale des deux principales organisations partisanes, partenaires et concurrentes, qui mènent chacune leur campagne en faveur de la liste de la gauche unie. Portées par les dynamiques nationales du programme commun et de l’Union de la gauche, PS et PCF s’accordent également sur les contours de la plate-forme programmatique locale et sur la proportion et les noms des candidats retenus18

    24Connu dans les sphères militantes pour son parcours socialiste19, Edmond Hervé présente, sur la place publique rennaise, un déficit de notoriété. L’article du 4 mars 1977 de Ouest-France lève le voile sur certains aspects plus concrets et personnels de sa trajectoire. « Je gagne 3 600 francs et je suis propriétaire de mon appartement et d’une R6. » Célibataire, il habite dans un immeuble collectif, dans le quartier du vélodrome (square du Dr Guérin). Après une année comme maître d’internat au lycée de Pontivy, il se fixe définitivement à Rennes en 1962. Garçon de café l’été à Erquy (1960-1968), l’étudiant de La Bouillie (1962-1968) devient assistant d’université en 1970. Militant SGEN, il dispense des cours à FO et au club Léo Lagrange, piliers d’une SFIO à laquelle il adhère dès 1966. La publication de son comité de soutien présidé par Jean Raux fait résonner le slogan de campagne, « Non au pouvoir d’argent, oui au pouvoir de tous ».

    Récits de campagne. L’élection vue par la presse (janvier-mars 1977)20

    25Présentant les enjeux du scrutin, Ouest actualité (2 janvier 1977) insiste sur la concurrence entre deux nouvelles jeunesses politiques (respectivement 38 et 34 ans), par contraste avec un Henri Fréville « qui avance en âge », fragilisé par ses défaites de 1968 (expression de la poussée gaulliste) et de 1976 (signe d’un basculement électoral vers le nouveau PS et le RPR). Incontournable depuis 1953, le sénateur-maire ne s’efface pas totalement du jeu politique, affirmant sans détours la filiation politique avec son successeur désigné : « J’ai choisi Chaudet pour le proposer aux Rennais parce que je le crois compétent. Je l’ai vu, je le sais honnête. Il a bien compris ce que j’ai essayé de faire. C’est un homme cultivé qui possède le sens de l’aménagement. Il saura rester dans la ligne. »

    26L’insistance sur la similarité des profils de Jean-Pierre Chaudet et Edmond Hervé (âge, mandats électifs et partisans, parcours professionnels, rigueur de la personnalité) contraste avec la vive opposition de style, de pratiques et de conceptions politiques : démocratie du dialogue contre démocratie locale. Face au bilan des vingt-deux ans de l’ère Fréville, revu et corrigé sous l’angle libéral du développement, porté par Jean-Pierre Chaudet21, la liste Hervé se présente sur projet défini par un nouveau rapport politique à l’espace local22. Se référant au livre-manifeste de Michel Phlipponneau, Changer la vie, changer la ville, cette rupture est définie par un outil politique la fiscalité locale et un but la démocratie locale23. L’idée de nouvelles relations affleure bien souvent dans les analyses, comme le montrent ces propos d’Edmond Hervé : « Rennes est une ville sans âme. Il n’y a pas de relations entre les quartiers et le centre, la mairie et les citoyens, l’université et la ville, les entreprises et la ville. » Transcription urbaine de l’autogestion et des nouvelles idées qui confluent au PS, ces thématiques apparaissent pleinement en phase avec l’électorat de gauche, s’identifiant aux candidats en position de relais de par leurs ressources militantes spécialisées (tissu associatif, parcours syndical, engagements dans les domaines socio-culturels).

    27Dans Le Point du 24 janvier 1977, une autre approche, centrée sur la « guerre des profs », insiste à la fois sur l’appartenance commune aux milieux universitaires des nouveaux notables en politique (Yves Fréville, Jean-Pierre Chaudet, Michel Phlipponneau, Edmond Hervé). Mais ce lien étroit université/cité, plus qu’une filière de sélection du personnel politique (de Carle Bahon à Henri Fréville en passant par Yves Milon), est d’une brûlante actualité politique du fait du bouillonnement géopolitique local directement corrélé aux effets de la massification et de la démocratisation de l’accès à l’enseignement supérieur. La fin de parcours en politique d’Henri Fréville, intellectuel antifasciste nourri aux idéaux de Sangnier ou Mounier, doit être mise en perspective avec un éclairage qui paraît crucial : la transformation du vote des chrétiens24.

    28Dans Ouest-France du 31 janvier 1977, la symétrie des affrontements internes du quadrille bipolaire (socialiste/communiste, centriste/gaulliste) est nuancée. Si « Rennes n’est pas Paris », en écho au conflit d’Ornano/Chirac, les rivalités interpersonnelles attisent les divisions d’une « majorité déchirée » (L’Express du 21 février 1977). La portée nationale de la conquête possible des grandes villes de l’Ouest par la gauche est clairement énoncée. Vice-président de l’Assemblée nationale et président du conseil général, François Le Douarec ne mâche pas ses mots face au mode de campagne du leader de la droite : « Je fais, moi, de la vraie politique. Mais je les aiderai dans les derniers jours. » En 3e position sur la liste, Jacques Cressard fait le même constat d’une campagne sans relief, née d’un simple accord d’appareil « Je suis plus connu. Le RPR m’avait proposé son investiture. Sans moi cette liste ne passerait pas. »

    29La presse nationale ne manque pas de mettre en exergue un double enjeu, sociologique et culturel, pour expliquer que François Mitterrand talonne Valéry Giscard d’Estaing de 2 000 voix en 1974. Si la poussée de la gauche et du PS est expliquée par les comportements électoraux des classes moyennes urbaines salariées des périphéries, la symbolique des transformations des mondes chrétiens est décrite à grands traits. Des positions de Martial Gabillard, secrétaire de section et syndicaliste de la FEP-CFDT aux annonces apaisantes d’un Edmond Hervé qui assure ne pas vouloir rallumer la guerre scolaire ou rompre les ponts financiers avec l’enseignement privé (Ouest-France, 7 février 1977)25 s’opposent les positions de la droite dure, sur la ligne Guermeur, incarnée à Rennes par Jacques Cressard26, à contrepied du pragmatisme neutre d’Henri Fréville. Le Monde du 22 février 1977 évoque une « démocratie-chrétienne sans légataire », alors qu’Edmond Hervé « regrette que Fréville n’ait pas été le Buron de Rennes ». La présence sur la liste du frère du directeur de Ouest-France, François-Xavier Hutin, directeur du journal Le Marin, semble neutraliser partiellement les affinités politiques du quotidien de culture démocrate-chrétienne.

    30La campagne officielle s’ouvre le 25 février 1977, par un meeting aux Lices (2 000 personnes) en présence de Michel Rocard, venu « soutenir non un homme, mais toute une liste ». Le 27 février 1977, le PCF qui compte 14 potentiels conseillers municipaux divulguent le nom de ses trois derniers candidats (Bouleu, Cussonneau et Monier qui supplée Foulon). La presse militante de gauche, comme L’Unité de février 1977, attaque de façon virulente, à travers la figure de Jean-Pierre Chaudet, une droite locale divisée et une politique présidentielle détestée.

    31Dans Politique Hebdo, le 28 février 1977, Hervé Hamon27 rédige un article au titre évocateur « Municipales, le PS en terre chrétienne », pointant plusieurs aspects : le tassement du PCF (de 16 % à 13 %), le renouvellement générationnel au centre au risque de la défaite (Georges Lombard, André Morice, Henri Fréville), le système Fréville (de l’éviction de François Château du siège de maire à l’instrumentalisation politique des jumelages de Rochester et Erlanger en 1975 pour attirer l’implantation de Kodak et Siemens).

    32Assimilant l’apolitisme à la droite « Je suis apolitique, concluez, je suis de droite. À gauche, on est fier de sa croyance », François Mitterrand, dans son meeting du 3 mars 1977 (8 000 personnes)28 rappelle à quel point « élire un conseil municipal est un acte politique ». Arrivé à seulement 23 h 35 en avion depuis Lorient, il est présenté par Edmond Hervé comme « celui qui symbolise l’espoir du peuple de France29 ». Surtout, la multiplication des réunions politiques de quartier montre la prégnance des forces militantes de gauche dans cette campagne, bien plus que la portée des duels radiophoniques organisés par Europe 1 et RTL à LeCoq Gadby. Le 10 mars 1977, le fest-noz militant des Lices donne une coloration particulière à cette atmosphère favorable à une gauche qui a le vent en poupe.

    33Durant le mois de mars, Ouest-France consacre, dans le cadre de la rubrique « Les municipales en question », huit dossiers récapitulant les programmes précis des différentes listes, sur des thématiques variées (budget, emploi, transports, quartiers, association, développement, district, question libre). Le 18 mars 1977, Ouest-France consacre un article sur le « bilan Fréville », ménageant un maigre suspense : « il n’est pas encore exclu que Chaudet soit élu ».

    Rennes 1977, un virage à gauche

    34Érigée en ville-test lors de ces élections de 1977, le vote de Rennes s’inscrit dans une double dynamique de nationalisation des enjeux de la campagne et de renversement des rapports de force à l’échelle locale.

    La clarification politique du premier tour

    35Cinq listes s’affrontent sur fonds de forte mobilisation du corps électoral (103 605 inscrits, 76 030 votants, 74 451 suffrages exprimés). Configuration rare, une double union et un rassemblement très large avivent le processus de bipolarisation : les 2 principales listes captent 91,01 % des voix. Sous l’étiquette « Changeons Rennes ensemble », la liste de la gauche unie frôle la victoire dès le 1er tour (48,57 %). Contrairement à la configuration de 1971, un large rassemblement des différentes composantes de la gauche est réalisé : 24 PS, 12 PCF, 4 MRG, 2 UDB30, 1 PSU31. Cette coalition qui s’appuie sur des réseaux militants à base multiple32 exprime notamment la diversité d’un PS qui tire profit des dynamiques électorales récentes (mitterrandiens et ex-SFIO, rocardiens ex-PSU, CERES). Pourtant relativement inexistante en 1971, la gauche non communiste (socialiste) était explosée entre un PSU en dehors du cycle d’Épinay et des élus SFIO absorbés et digérés par la Troisième Force (dont Paul Collinot). En 1977, le PS ouvre une période d’hégémonie politique locale, jusqu’à l’effritement et la fragilisation de la période récente.

    36En seconde position, la liste des droites (42,44 %), distancée, ne dispose d’aucunes réserves électorales. Les 3 autres listes se réclament de la gauche, ce qui renforce l’échec de ce premier tour pour une droite qui escomptait un total de voix plus élevé grâce à une stratégie d’union large visant à imprimer un élan politique pour l’emporter sans coup férir. Une double déperdition de voix, à droite et au centre, s’observe : d’une part au profit d’un PS qui mord sur l’électorat démocrate-chrétien33, d’autre part dans les traces des tensions et concurrences entre gaullistes (RPR) et centristes (double composante RI et CDS)34.

    37La liste Autogestion et union socialiste, composée de militants du PSU35, des Amis de la Terre et d’un noyau MAN36 dépasse les 5 %. Cette implantation préfigure la dimension stratégique et centrale de l’espace rennais dans la naissance puis l’enracinement de l’écologie politique en Bretagne depuis les années 1968.

    38La puissance relative de la mouvance contestataire37, fait marquant de ce scrutin, n’empêche pas les deux listes d’extrême gauche38 de se situer hors des enjeux du second tour.

    Tableau 4. – Synthèse des résultats du 1er tour.

    ListeTête de listePartisVoixSuffrages exprimés
    Union de la gaucheEdmond HervéPS-PCF-RG-UDB36 16148,57 %
    Majorité présidentielleJean-Pierre ChaudetRI-CDS-RPR31 59342,44 %
    Autogestion et union socialisteJean-Pierre AgaessePSU-ADT-MAN3 9675,33 %
    Liste pour le socialisme et le pouvoir aux travailleursRaymond MadecPrésentée par LO et soutenue par la LCR1 6992,28 %
    Liste d’unité ouvrière et populaireChristian Le MoenneHumanité rouge1 0301,38 %

    39Dès le 15 mars 1977, Ouest-France esquisse des analyses fines des résultats39. En signalant d’abord une relative dichotomie géographique du vote, la liste Chaudet arrivant en tête dans 4 cantons (Rennes 1, 2, 4, 6, à savoir les cantons de l’espace urbain central, Rennes Centre, Centre-Ouest, Nord-Ouest et Est), tandis que la liste Hervé l’emporte dans 5 cantons (Rennes 3, 5, 7, 8 et 9, essentiellement les zones de la première couronne urbaine rennaise). Les deux candidats, séparés d’une petite trentaine de voix, font jeu égal dans le canton de Rennes 10 (Rennes Sud-Ouest). Derrière cet apparent équilibre de la spatialisation du vote se cache une différenciation éminemment décisive. Dans les cantons où la droite arrive en tête, l’écart du total des voix, qui ne compte pas pour une part majoritaire des inscrits, reste ténu (13 607 voix contre 10 114 voix). Au contraire, la liste Hervé distance nettement celle de son adversaire, là où elle vire en tête : 23 570 voix contre 15 539, et tout particulièrement dans le canton de Rennes 7 (Rennes Sud-Est), où elle enregistre une avance de 4 300 voix. S’il existe quelques variations minimes, d’un bureau de vote à l’autre au sein d’un même canton (Échange/Vanneau, Guinguené/De Mun, Tour d’Auvergne/Champion de Circé), la topographie électorale s’avère extrêmement homogène. Traduction socio-spatiale des résultats électoraux, la clé sociologique semble déterminante en la matière, ce qui conforte l’idée d’une attraction du PS sur certains milieux sociaux, avancée dans nos travaux antérieurs.

    40Autre approche, un trend de progression continue des gauches apparaît clairement à l’analyse des différents scrutins, sur des échelles différentes : municipales 1971, 41,97 % ; législatives 1973, 45 % ; cantonales 1973, 48,35 % ; présidentielles 1974, 48,99 % ; cantonales 1976, 55,22 % ; municipales 1977, 57,57 %. Plus intéressante, la comparaison cantonales 1976/municipales 1977, limitée à quelques espaces, démontre un potentiel de réserve de voix à gauche, avec un différentiel de 10 et 15 points dans des quartiers périphériques populaires (Villejean, La Tour d’Auvergne, le Landrel, Francisco Ferrer, Trégain).

    La gauche, sans surprise

    41L’entre-deux-tours est scandé par les désistements ou appels à voter en faveur de la liste Hervé. Ainsi, la liste Madec appelle à « se reporter sur liste d’Union de la gauche sans aucune illusion en raison des renoncements politiques du PS et du PCF ». Humanité rouge et l’union ouvrière populaire laissent à leurs électeurs le choix de l’abstention et du vote blanc. Les différentes composantes de la liste écologiste se fracturent quant au choix à effectuer : les Amis de la Terre ne donnent pas de consigne de vote, quant au PSU et à la fraction MAN, leurs responsables appellent tous deux clairement à un vote en faveur de la liste d’Union de la gauche.

    42Le 16 mars 1977, France-Soir anticipe, « depuis 1971, Rennes glisse à gauche ». Pour Le Figaro et son journaliste (frère de Jacques Cressard), à cette même date, « la liste de la majorité est toujours confiante en dépit des chiffres » du premier tour.

    Tableau 5. – Synthèse des résultats du second tour. Sur 103 218 inscrits et 80 932 votants, il y a 79 813 suffrages exprimés.

    VoixSuffrages exprimésÉlus
    Liste Hervé44 57855,85 %37
    Liste Chaudet35 23544,15 %0

    43Le surcroît de participation, se répercutant par un léger sursaut de la liste de droite, peut s’interpréter comme le signe de la peur et de l’anticommunisme touchant encore largement les espaces les plus modérés. Le tassement de la gauche, par rapport aux projections du rapport de force gauche/droite du 1er tour, exprime quant à lui un report plus volatil des trois listes d’extrême gauche vers la nouvelle majorité municipale. Le mode de scrutin aboutit à l’absence d’une opposition municipale de droite, offrant une mainmise complète sur les institutions du pouvoir local pour la nouvelle équipe qui porte Edmond Hervé au siège de maire de Rennes40.

    44Plusieurs analyses pertinentes s’expriment dans la presse. Le Monde du 22 mars 1977 constate que « la menace socialo-communiste ne marche pas41 », quand Ouest-France, soulignant l’absence du classique effet amplificateur, titre « Le second tour confirme le premier ». Le regard sur la topographie électorale fine explicite de deux manières distinctes le survote du second tour. Le renforcement de la mobilisation des électeurs, à gauche, apparaît très ciblé d’un point de vue sociologique et générationnel, au vu des quartiers concernés, surtout dans le sud et le sud-est de la métropole (Basses Chalais, Francisco Ferrer, Landrel). Plus marqué dans le survote centriste de certains bureaux de vote (Duchesse Anne, Jeanne Jugan), le fait marquant de ce second tour reste la poussée du vote Chaudet (de 42,33 % à 44,15 %), en capacité d’attirer de nouveaux électeurs et de profiter d’une relative déperdition à gauche (report des 9 % du vote des 3 listes situées à gauche de l’alliance PCF-PS). Paradoxalement, la liste Hervé atteint un score, somme toute, proche de celui d’Henri Fréville en 1971.

    Tableau 6. – Un vote différencié ? Source : AMR, 2024 W 80-81.

    CantonsListe HervéSuffrages exprimés
    Beaux-Arts/Liberté2 8147 594
    Echange/Vanneau4 2478 624
    Villejean4 1896 484
    Joseph Lotte/Motte Brulon2 4295 502
    Trégain4 8068 269
    Duchesse Anne/Jeanne Jugan3 0836 014
    Francisco Ferrer/Landrel10 55715 626
    Basses Chalais3 8536 151
    Guinguené/Quineleu5 4859 677
    Tour d’Auvergne/Champion de Cicé3 1155 872
    Total44 578 contre 35 23579 813

    ***

    45Avec l’alternance en marche, Le Monde du 22 mars 1977 s’interroge « Peut-on vraiment changer la ville ? » Si Le Nouvel Obs du 28 mars 1977 produit des analyses globales, sous la plume de l’ancien jéciste brestois Claude-François Jullien pour comprendre « Pourquoi la Bretagne a basculé ? », c’est Le Figaro du 1er avril 1977 qui fournit à ses lecteurs la grille d’analyse la plus tranchante pour expliquer la défaite des droites : « Les jeunes42, les nouveaux habitants43 et le clergé ont donné la victoire à la gauche », pointant notamment près de 6 000 nouvelles inscriptions sur les listes électorales en décembre 1976, dont deux tiers de jeunes venant d’accéder à la majorité44.

    46Le 4 avril 1977, Ouest-France relate la première séance du conseil municipal qui, symboliquement, « amorce un nouveau style », soulignant la rencontre directe du nouveau maire avec les directeurs des services et les personnels45. C’est le temps de l’apprentissage du rôle de maire, ses codes et représentations46, avant la mise en œuvre des nouvelles politiques locales, placées sous le signe des marqueurs culturels de la gauche par les différents adjoints (Michel Phlipponneau, 1er adjoint. Jean-Michel Boucheron, Martial Gabillard, Marcel Rogemont, Lucien Rose, Albert Renouf, Noël Elliot, Jean Normand, Pierre-Yves Heurtin et Annick Hélias, Christian Benoist et Serge Huber pour le PCF, Henri Le Moal pour le MRG). Mais c’est là une autre histoire…

    Notes de bas de page

    1Outre les archives compulsées lors de notre thèse sur les réseaux socialistes au xxe siècle en Bretagne, plusieurs sources ont été mobilisées : données électorales des archives municipales et départementales, fonds Boucheron et Hervé déposés aux archives municipales, presse locale et nationale, notices produites pour le Maitron ou le dictionnaire des parlementaires de la Ve République.

    2Sur cette élection, cf. Fayol Marie-Françoise, Thèmes et programmes de la campagne municipale de Rennes (mars 1977), maîtrise de droit public, université Rennes 1, juin 1980 ; Binois Émilie, La victoire de l’union de la gauche unie aux élections municipales de mars 1977 à Rennes, mémoire de master 1, université Rennes 2, 2005 ; Vion Antoine, « Retour sur le terrain. La préparation des élections municipales de 1995 par l’équipe d’Edmond Hervé, maire de Rennes », Sociétés contemporaines, vol. 24, 1995, p. 95-122.

    3Hervé Edmond (dir.), Rennes, regards sur mars 1977, décembre 1995. Dans cette compilation de sources documentaires (données électorales, tracts, listes et programmes, coupures de presse) engagée à partir de septembre 1994 avec l’aide de Jean-Pierre Michel, Martial Gabillard, Jean Raux et Yves Préault notamment, Edmond Hervé resituant ce scrutin de 1977, une ville test à l’échelle nationale, utilise cette métaphore du phare pour désigner la rupture de 1977. Archives municipales de Rennes (AMR), 1387 W 2 élections.

    4Hatzfeld Hélène, Faire la politique autrement. Les expériences inachevées des années 1970, Rennes, PUR, 2005.

    5Prigent François, « Génération 1977. La révolution des réseaux PS en Bretagne », Place publique, Nantes, no 30, 2011, p. 12-19 (actes de la journée d’études, Le socialisme à visage urbain, Nantes, 19 novembre 2011).

    6Bensoussan David, « L’élection mouvementée d’Henri Fréville en 1953 », Place publique, Rennes, no 26, 2013, p. 79-83.

    7Une liste finalisée à l’extrême dernière minute, le dépôt se faisant le dernier jour, peu avant minuit.

    8Fonction occupée par Henri Fréville (1966-1976), qui siège au sénat à partir de 1971.

    9Sabatier Benjamin, « Guy Houist, l’inlassable Monsieur anti-taudis rennais », Place publique, Rennes, no 39, 2016, p. 74-77.

    10[http://fresques.ina.fr/ouest-en-memoire/fiche-media/Region00215/declaration-d-henri-freville.html].

    11Prigent François, « Le cycle d’Épinay en Bretagne (1971-1981) », in Castagnez Noëlline et Morin Gilles (dir.), Les socialistes d’Épinay à l’Élysée : 1971-1981, Rennes, PUR, 2015, p. 105-117.

    12AMR, 2024 W 80 (photos, presse, résultats) [https://www.franceculture.fr/emissions/la-fabrique-de-lhistoire/histoire-du-socialisme-24].

    13Jacques Cressard l’affirme publiquement, « Chaudet ne me pose jamais de questions. Je ne suis là que pour mon nom ».

    14Biais des archives consultées, notre étude mériterait d’explorer plus le point de vue du PCF.

    15Conseiller municipal (1983-1995), conseiller général (1985-1998), député (1986-1997) puis sénateur (1998-2008), Yves Fréville a relaté à plusieurs reprises les propos de son père à son endroit en 1977 : « Fils, tu n’es pas fait pour la politique, tu es un théoricien. »

    16Fondé sur des notes établies par Edmond Hervé, avec plusieurs références au livre-programme de Michel Phlipponneau, Changer la vie, changer la ville, le manifeste du PS, rédigé depuis son nouveau siège en janvier 1977 (6, rue Guillaume Lejean), sert de base au programme augmenté validé par ses partenaires (PCF, MRG, UDB).

    17Les rôles militants de Lucien Rose et Jean-Michel Boucheron sont à souligner. Les affiches, au-delà de l’homogénéité générationnelle, démontrent la force des ancrages et réseaux professionnels, géographiques, associatifs et militants (moins net pour le PCF).

    1810 PCF (Benoit, Boudet, Bleas, Berroche, Chapelet, Foulon, Géraud, Huber, Ploteau, Rolland), 2 UDB (Rannou, Duval) et 4 MRG (Le Moal, Guihard, Fournier, Hurault).

    19Hardy Jacques, Devenir un homme politique. Le cas Edmond Hervé, maire de Rennes, DEA, Rennes 1, 1978 ; Bougeard Christian (dir.), Un siècle de socialismes en Bretagne. De la SFIO au PS (1905-2005), Rennes, PUR, 2008, p. 301-303 ; Delacotte Philippe et Cornu Bernard, Dans le sillon d’Edmond Hervé : de La Bouillie à Rennes, Les Sables-d’Or, Éditions Astoure, 2008.

    20Pour Marie-Françoise Fayol, trois thématiques cristallisent l’affrontement Chaudet/Hervé : la sécurité économique (emploi, fiscalité, budget), la politique socioculturelle (développement, rôle, politique sociale), la démocratie locale (rôle des associations et réseaux, alliances politiques, querelles partisanes).

    21L’accent est mis sur les réalisations en matière de logement, d’infrastructures, d’eau (dans le sillage des actions de Graff et Descottes) ou de structures politiques (le district de Rennes et ses 27 communes). Du système Fréville à l’ère Hervé, il existe des continuités (part des réalisations sociales, rôle des comités de quartier).

    22Le PS dénonce l’opération immobilière et financière du Colombier. Sur ses affiches, plusieurs symboles visent à disqualifier Jean-Pierre Chaudet (affublé d’un fouet, en collusion avec le grand patronat), tenant une lourde feuille d’impôts et vêtu d’une tenue de sport évoquant l’inanité des Foulées rennaises comme projet politique.

    23Dans Sud-Ouest, le 4 février 1977, Edmond Hervé, insistant sur le rôle décisif de la culture et des associations dans la démocratie, s’exprime ainsi : « l’idéal de l’homme ne doit pas être le travail mais le temps de vivre ».

    24Sur ce thème, voir Prigent François, « Chrétiens de gauche, chrétiens à gauche ? Plongée dans les réseaux socialistes des mondes chrétiens en Bretagne (1945-2004) », En Envor, no 6, 2015 [http://enenvor.fr/eeo_revue/numero_6/fp/chretiens_de_gauche_chretiens_a_gauche_plongee_dans_les_reseaux_socialistes_des_mondes_chretiens_en_bretagne_1945_2004.pdf].

    25La figure du recteur Le Moal, qui eut à appliquer la loi Debré en 1959, est mise en avant.

    26Lettre du 6 mars 1977 sur le rapport Mexandeau et le programme commun de gouvernement prônant la nationalisation de l’enseignement privé.

    27Ancien responsable JEC et PSU, Yves Rousseau dit Hervé Hamon débute ses engagements militants à Saint-Brieuc.

    28Les formules de Rocard et Mitterrand montrent le refus de la dépolitisation ou de la personnalisation du scrutin.

    29Prigent François, « François Mitterrand et la Bretagne. Les relations en politique », in Dubasque François et Ollivier Anne-Laure (dir.), L’enraciné. François Mitterrand et les territoires, sensibilités et pouvoirs (à paraître).

    30L’UDB s’associe mais n’entend pas signer le Programme commun de gouvernement qui ne tient pas compte des idées régionalistes (Le Monde, 8 mars 1977). Sur l’UDB et 1977, cf. Kernalegenn Tudi et Pasquier Romain (dir.), L’Union démocratique bretonne (UDB), un parti autonomiste dans un État unitaire, Rennes, PUR, 2014.

    31Plus un gaulliste d’opposition, Jean-François Brault, de l’Union des jeunes pour le progrès (UJP).

    32Notamment les huit premiers PS (Phlipponneau, Rose, Boucheron, Renouf, Elliot, Gabillard, Normand, Heurtin).

    33Bensoussan David (dir.), « Bretagne en politique », Parlement[s], hors-série no 10, 2015 ; Richard Gilles, « Le transfert des voix centristes vers le PS », in Bougeard Christian, Porhel Vincent, Richard Gilles et Sainclivier Jacqueline (dir.), Les années 1968 dans l’Ouest, Rennes, PUR, 2011, p. 131-144.

    34Pour Jean-Pierre Chaudet, la préemption de l’héritage Fréville se heurte à un double obstacle RI/CDS et centristes/gaullistes qui explique le faible score de l’alliance des droites au 1er tour.

    35Ce second PSU n’a plus rien à avoir avec le PSA puis le PSU, laboratoire d’idées et de pratiques, de la guerre d’Algérie aux années 1968. Du début des années 1970 aux Assises du socialisme, sa frange militante la plus dynamique a été absorbée (et diluée) par le PS. Ce PSU de 1977 irrigue par la suite à la fois les milieux de la gauche alternative et de ce qui devient les Verts en 1984.

    36La liste PSU-ADT-MAN incorpore les facettes multiples de la mouvance de l’écologie politique, en cours d’affirmation politique. Multipositionnés, ces candidats, aux caractéristiques sociologiques un peu différentes des organisations partisanes traditionnelles (place des minorités de genre, âge, classe), présente des profils militants extrêmement marqués : parcours syndical et ancrage dans les militances de quartier ou les comités de chômeurs chez les PSU (à l’image de Janine Palm à Villejean), participation aux nouveaux mouvements sociaux aux engagements distanciés (tiers-monde, luttes des immigrés) et bien sûr filières écologistes liées au mouvement antinucléaire, aux combats environnementaux et à la cause féministe. Outre La Bollardière pour le Mouvement pour une alternative non violente (MAN) ou Marie-Pierre Rougé, il faut souligner la part des couples militants (Morfoisse, De Certaine).

    37Le profil militant très marqué reflète bien l’enracinement spécifique de LO : jeunesse, couples militants, ancrages socio-professionnels très ciblés (CSP +, milieux hospitaliers).

    38Voir les contributions de Christian Bougeard et Hugo Melchior dans ce volume.

    3973,38 % des inscrits ont voté, ce qui place la mobilisation électorale au niveau des scrutins de 1973-1974, de véritables pics démocratiques.

    40Les oppositions se matérialisent entre sensibilités socialistes et différentes composantes de la majorité.

    41Ciblant les figures du PS (Hervé, Phlipponneau, Boucheron, Rose et Gabillard), l’antisocialisme virulent reprend les codes de l’anticommunisme, à l’image de l’affiche « La bande à Hervé. Ils sont dangereux », Civilisation, no 17, décembre-janvier, 1976-1977. Henri Fréville lui-même dramatise les enjeux du second tour, mettant en garde contre Edmond Hervé (« Il nous promet le socialisme et il nous apporte le communisme »).

    42Les travaux de Michel Phlipponneau incorporent des réflexions poussées sur la transformation de la pyramide des âges en milieu urbain

    43Avançant les données du recensement de 1975 sur la tertiarisation de la ville.

    44Une façon de regretter la période réformatrice du Président, avec l’abaissement de la majorité de 21 à 18 ans.

    45Source intéressante, les agendas officiels d’Edmond Hervé montrent la façon dont ce travail politique se déploie à partir d’avril 1977. AMR, 12 Z 51.

    46Après l’enjeu de la crédibilité économique et la nécessité de désarmer les peurs suscitées par l’Union de la gauche, Edmond Hervé doit endosser le rôle de notable politique. L’Express du 27 février 1978 donne, moins d’un an après l’élection et peu avant les législatives de mars 1978, la parole aux deux principaux protagonistes de l’élection. Sévère, le jugement de Chaudet attaque le maire de Rennes (« on nous avait promis Jaurès et Saint-Just, nous avons M. Queuille ») ; tandis qu’Edmond Hervé déclare : « Rennes a été gravement touchée par la crise. Je ne suis pas là pour faire plaisir. Ce n’est pas en cocufiant la démocratie par des promesses démagogiques que l’on respecte les électeurs. » Intéressant en termes de représentations du politique, le journaliste conclut : « À 35 ans, il a encore l’air d’un étudiant effacé. Plus à l’aise dans sa HLM coincée entre le chemin de fer et la Vilaine que dans les salons d’apparat de la mairie. »

    Auteur

    • François Prigent

      Agrégé et docteur en histoire contemporaine, chercheur associé à l’université Rennes 2 (EA Tempora 7468). Il a notamment publié Le Gall Erwan et Prigent François (dir.), C’était 1958 en Bretagne. Pour une histoire locale de la France, Rennes, Éditions Goater, 2018, 528 p. ; Bougeard Christian et Prigent François (dir.), La Bretagne en portrait(s) de groupe. Les enjeux de la méthode prosopographique (Bretagne, xviiie-xxe siècles), Rennes, PUR, 2016, 339 p. ; Le Gall Erwan et Prigent François (dir.), C’était 1936. Le Front populaire vu de Bretagne, Rennes, Éditions Goater, 2016, 336 p. ; Kernalegenn Tudi, Prigent François, Richard Gilles et Sainclivier Jacqueline (dir.), Le PSU vu d’en bas : réseaux sociaux, mouvement politique, laboratoire d’idées (années 1950-années 1980), Rennes, PUR, 2009, 343 p.

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    L’implantation des élus du PSA-PSU en France (1958-1981) : réseaux et prosopographie

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    La mutation des milieux socialistes dans l’Ouest breton (1967-1973) : réseaux, trajectoires, identités

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    L’expérience de l’union de la gauche en Bretagne (1967-1978)

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    Les années tournant du socialisme breton ? Le cycle d’Épinay (1971-1981)

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    Socialistes résistants, résistants socialistes : formes, engagements, trajectoires

    François Prigent

    Chapitre XVI. En haut à gauche ? Les évolutions géopolitiques de la Bretagne sous la Ve République

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    La Charrue Rouge : réseaux, identités et pratiques socialistes dans le Trégor des années 1930

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    1Outre les archives compulsées lors de notre thèse sur les réseaux socialistes au xxe siècle en Bretagne, plusieurs sources ont été mobilisées : données électorales des archives municipales et départementales, fonds Boucheron et Hervé déposés aux archives municipales, presse locale et nationale, notices produites pour le Maitron ou le dictionnaire des parlementaires de la Ve République.

    2Sur cette élection, cf. Fayol Marie-Françoise, Thèmes et programmes de la campagne municipale de Rennes (mars 1977), maîtrise de droit public, université Rennes 1, juin 1980 ; Binois Émilie, La victoire de l’union de la gauche unie aux élections municipales de mars 1977 à Rennes, mémoire de master 1, université Rennes 2, 2005 ; Vion Antoine, « Retour sur le terrain. La préparation des élections municipales de 1995 par l’équipe d’Edmond Hervé, maire de Rennes », Sociétés contemporaines, vol. 24, 1995, p. 95-122.

    3Hervé Edmond (dir.), Rennes, regards sur mars 1977, décembre 1995. Dans cette compilation de sources documentaires (données électorales, tracts, listes et programmes, coupures de presse) engagée à partir de septembre 1994 avec l’aide de Jean-Pierre Michel, Martial Gabillard, Jean Raux et Yves Préault notamment, Edmond Hervé resituant ce scrutin de 1977, une ville test à l’échelle nationale, utilise cette métaphore du phare pour désigner la rupture de 1977. Archives municipales de Rennes (AMR), 1387 W 2 élections.

    4Hatzfeld Hélène, Faire la politique autrement. Les expériences inachevées des années 1970, Rennes, PUR, 2005.

    5Prigent François, « Génération 1977. La révolution des réseaux PS en Bretagne », Place publique, Nantes, no 30, 2011, p. 12-19 (actes de la journée d’études, Le socialisme à visage urbain, Nantes, 19 novembre 2011).

    6Bensoussan David, « L’élection mouvementée d’Henri Fréville en 1953 », Place publique, Rennes, no 26, 2013, p. 79-83.

    7Une liste finalisée à l’extrême dernière minute, le dépôt se faisant le dernier jour, peu avant minuit.

    8Fonction occupée par Henri Fréville (1966-1976), qui siège au sénat à partir de 1971.

    9Sabatier Benjamin, « Guy Houist, l’inlassable Monsieur anti-taudis rennais », Place publique, Rennes, no 39, 2016, p. 74-77.

    10[http://fresques.ina.fr/ouest-en-memoire/fiche-media/Region00215/declaration-d-henri-freville.html].

    11Prigent François, « Le cycle d’Épinay en Bretagne (1971-1981) », in Castagnez Noëlline et Morin Gilles (dir.), Les socialistes d’Épinay à l’Élysée : 1971-1981, Rennes, PUR, 2015, p. 105-117.

    12AMR, 2024 W 80 (photos, presse, résultats) [https://www.franceculture.fr/emissions/la-fabrique-de-lhistoire/histoire-du-socialisme-24].

    13Jacques Cressard l’affirme publiquement, « Chaudet ne me pose jamais de questions. Je ne suis là que pour mon nom ».

    14Biais des archives consultées, notre étude mériterait d’explorer plus le point de vue du PCF.

    15Conseiller municipal (1983-1995), conseiller général (1985-1998), député (1986-1997) puis sénateur (1998-2008), Yves Fréville a relaté à plusieurs reprises les propos de son père à son endroit en 1977 : « Fils, tu n’es pas fait pour la politique, tu es un théoricien. »

    16Fondé sur des notes établies par Edmond Hervé, avec plusieurs références au livre-programme de Michel Phlipponneau, Changer la vie, changer la ville, le manifeste du PS, rédigé depuis son nouveau siège en janvier 1977 (6, rue Guillaume Lejean), sert de base au programme augmenté validé par ses partenaires (PCF, MRG, UDB).

    17Les rôles militants de Lucien Rose et Jean-Michel Boucheron sont à souligner. Les affiches, au-delà de l’homogénéité générationnelle, démontrent la force des ancrages et réseaux professionnels, géographiques, associatifs et militants (moins net pour le PCF).

    1810 PCF (Benoit, Boudet, Bleas, Berroche, Chapelet, Foulon, Géraud, Huber, Ploteau, Rolland), 2 UDB (Rannou, Duval) et 4 MRG (Le Moal, Guihard, Fournier, Hurault).

    19Hardy Jacques, Devenir un homme politique. Le cas Edmond Hervé, maire de Rennes, DEA, Rennes 1, 1978 ; Bougeard Christian (dir.), Un siècle de socialismes en Bretagne. De la SFIO au PS (1905-2005), Rennes, PUR, 2008, p. 301-303 ; Delacotte Philippe et Cornu Bernard, Dans le sillon d’Edmond Hervé : de La Bouillie à Rennes, Les Sables-d’Or, Éditions Astoure, 2008.

    20Pour Marie-Françoise Fayol, trois thématiques cristallisent l’affrontement Chaudet/Hervé : la sécurité économique (emploi, fiscalité, budget), la politique socioculturelle (développement, rôle, politique sociale), la démocratie locale (rôle des associations et réseaux, alliances politiques, querelles partisanes).

    21L’accent est mis sur les réalisations en matière de logement, d’infrastructures, d’eau (dans le sillage des actions de Graff et Descottes) ou de structures politiques (le district de Rennes et ses 27 communes). Du système Fréville à l’ère Hervé, il existe des continuités (part des réalisations sociales, rôle des comités de quartier).

    22Le PS dénonce l’opération immobilière et financière du Colombier. Sur ses affiches, plusieurs symboles visent à disqualifier Jean-Pierre Chaudet (affublé d’un fouet, en collusion avec le grand patronat), tenant une lourde feuille d’impôts et vêtu d’une tenue de sport évoquant l’inanité des Foulées rennaises comme projet politique.

    23Dans Sud-Ouest, le 4 février 1977, Edmond Hervé, insistant sur le rôle décisif de la culture et des associations dans la démocratie, s’exprime ainsi : « l’idéal de l’homme ne doit pas être le travail mais le temps de vivre ».

    24Sur ce thème, voir Prigent François, « Chrétiens de gauche, chrétiens à gauche ? Plongée dans les réseaux socialistes des mondes chrétiens en Bretagne (1945-2004) », En Envor, no 6, 2015 [http://enenvor.fr/eeo_revue/numero_6/fp/chretiens_de_gauche_chretiens_a_gauche_plongee_dans_les_reseaux_socialistes_des_mondes_chretiens_en_bretagne_1945_2004.pdf].

    25La figure du recteur Le Moal, qui eut à appliquer la loi Debré en 1959, est mise en avant.

    26Lettre du 6 mars 1977 sur le rapport Mexandeau et le programme commun de gouvernement prônant la nationalisation de l’enseignement privé.

    27Ancien responsable JEC et PSU, Yves Rousseau dit Hervé Hamon débute ses engagements militants à Saint-Brieuc.

    28Les formules de Rocard et Mitterrand montrent le refus de la dépolitisation ou de la personnalisation du scrutin.

    29Prigent François, « François Mitterrand et la Bretagne. Les relations en politique », in Dubasque François et Ollivier Anne-Laure (dir.), L’enraciné. François Mitterrand et les territoires, sensibilités et pouvoirs (à paraître).

    30L’UDB s’associe mais n’entend pas signer le Programme commun de gouvernement qui ne tient pas compte des idées régionalistes (Le Monde, 8 mars 1977). Sur l’UDB et 1977, cf. Kernalegenn Tudi et Pasquier Romain (dir.), L’Union démocratique bretonne (UDB), un parti autonomiste dans un État unitaire, Rennes, PUR, 2014.

    31Plus un gaulliste d’opposition, Jean-François Brault, de l’Union des jeunes pour le progrès (UJP).

    32Notamment les huit premiers PS (Phlipponneau, Rose, Boucheron, Renouf, Elliot, Gabillard, Normand, Heurtin).

    33Bensoussan David (dir.), « Bretagne en politique », Parlement[s], hors-série no 10, 2015 ; Richard Gilles, « Le transfert des voix centristes vers le PS », in Bougeard Christian, Porhel Vincent, Richard Gilles et Sainclivier Jacqueline (dir.), Les années 1968 dans l’Ouest, Rennes, PUR, 2011, p. 131-144.

    34Pour Jean-Pierre Chaudet, la préemption de l’héritage Fréville se heurte à un double obstacle RI/CDS et centristes/gaullistes qui explique le faible score de l’alliance des droites au 1er tour.

    35Ce second PSU n’a plus rien à avoir avec le PSA puis le PSU, laboratoire d’idées et de pratiques, de la guerre d’Algérie aux années 1968. Du début des années 1970 aux Assises du socialisme, sa frange militante la plus dynamique a été absorbée (et diluée) par le PS. Ce PSU de 1977 irrigue par la suite à la fois les milieux de la gauche alternative et de ce qui devient les Verts en 1984.

    36La liste PSU-ADT-MAN incorpore les facettes multiples de la mouvance de l’écologie politique, en cours d’affirmation politique. Multipositionnés, ces candidats, aux caractéristiques sociologiques un peu différentes des organisations partisanes traditionnelles (place des minorités de genre, âge, classe), présente des profils militants extrêmement marqués : parcours syndical et ancrage dans les militances de quartier ou les comités de chômeurs chez les PSU (à l’image de Janine Palm à Villejean), participation aux nouveaux mouvements sociaux aux engagements distanciés (tiers-monde, luttes des immigrés) et bien sûr filières écologistes liées au mouvement antinucléaire, aux combats environnementaux et à la cause féministe. Outre La Bollardière pour le Mouvement pour une alternative non violente (MAN) ou Marie-Pierre Rougé, il faut souligner la part des couples militants (Morfoisse, De Certaine).

    37Le profil militant très marqué reflète bien l’enracinement spécifique de LO : jeunesse, couples militants, ancrages socio-professionnels très ciblés (CSP +, milieux hospitaliers).

    38Voir les contributions de Christian Bougeard et Hugo Melchior dans ce volume.

    3973,38 % des inscrits ont voté, ce qui place la mobilisation électorale au niveau des scrutins de 1973-1974, de véritables pics démocratiques.

    40Les oppositions se matérialisent entre sensibilités socialistes et différentes composantes de la majorité.

    41Ciblant les figures du PS (Hervé, Phlipponneau, Boucheron, Rose et Gabillard), l’antisocialisme virulent reprend les codes de l’anticommunisme, à l’image de l’affiche « La bande à Hervé. Ils sont dangereux », Civilisation, no 17, décembre-janvier, 1976-1977. Henri Fréville lui-même dramatise les enjeux du second tour, mettant en garde contre Edmond Hervé (« Il nous promet le socialisme et il nous apporte le communisme »).

    42Les travaux de Michel Phlipponneau incorporent des réflexions poussées sur la transformation de la pyramide des âges en milieu urbain

    43Avançant les données du recensement de 1975 sur la tertiarisation de la ville.

    44Une façon de regretter la période réformatrice du Président, avec l’abaissement de la majorité de 21 à 18 ans.

    45Source intéressante, les agendas officiels d’Edmond Hervé montrent la façon dont ce travail politique se déploie à partir d’avril 1977. AMR, 12 Z 51.

    46Après l’enjeu de la crédibilité économique et la nécessité de désarmer les peurs suscitées par l’Union de la gauche, Edmond Hervé doit endosser le rôle de notable politique. L’Express du 27 février 1978 donne, moins d’un an après l’élection et peu avant les législatives de mars 1978, la parole aux deux principaux protagonistes de l’élection. Sévère, le jugement de Chaudet attaque le maire de Rennes (« on nous avait promis Jaurès et Saint-Just, nous avons M. Queuille ») ; tandis qu’Edmond Hervé déclare : « Rennes a été gravement touchée par la crise. Je ne suis pas là pour faire plaisir. Ce n’est pas en cocufiant la démocratie par des promesses démagogiques que l’on respecte les électeurs. » Intéressant en termes de représentations du politique, le journaliste conclut : « À 35 ans, il a encore l’air d’un étudiant effacé. Plus à l’aise dans sa HLM coincée entre le chemin de fer et la Vilaine que dans les salons d’apparat de la mairie. »

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    Prigent, F. (2020). Rennes 1977, une élection-matrice pour le système partisan à l’échelle locale. In M. Boisdron & M. Catala (éds.), Les élections municipales de 1977 (1‑). Presses universitaires de Rennes. https://doi.org/10.4000/13zj2
    Prigent, François. « Rennes 1977, une élection-matrice pour le système partisan à l’échelle locale ». In Les élections municipales de 1977, édité par Matthieu Boisdron et Michel Catala. Rennes: Presses universitaires de Rennes, 2020. https://doi.org/10.4000/13zj2.
    Prigent, François. « Rennes 1977, une élection-matrice pour le système partisan à l’échelle locale ». Les élections municipales de 1977, édité par Matthieu Boisdron et Michel Catala, Presses universitaires de Rennes, 2020, https://doi.org/10.4000/13zj2.

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    Boisdron, M., & Catala, M. (éds.). (2020). Les élections municipales de 1977 (1‑). Presses universitaires de Rennes. https://doi.org/10.4000/13zlu
    Boisdron, Matthieu, et Michel Catala, éd. Les élections municipales de 1977. Rennes: Presses universitaires de Rennes, 2020. https://doi.org/10.4000/13zlu.
    Boisdron, Matthieu, et Michel Catala, éditeurs. Les élections municipales de 1977. Presses universitaires de Rennes, 2020, https://doi.org/10.4000/13zlu.
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