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    Plan détaillé Texte intégral Charles de Montchal ou l’impossible représentation monarchique Être en mesure de tenir la place Des procédures juridiques à la représentation cérémonielle Conclusion Bibliographie Notes de bas de page Auteur

    La représentation avant le gouvernement représentatif

    Ce livre est recensé par

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    Table des matières

    La représentation dans le cérémonial

    Manifester l’absent

    Fanny Cosandey

    p. 75-96

    Texte intégral Charles de Montchal ou l’impossible représentation monarchique Être en mesure de tenir la place Des procédures juridiques à la représentation cérémonielle Conclusion Bibliographie Notes de bas de page Auteur

    Texte intégral

    1L’interprétation du cérémonial monarchique peut difficilement faire l’économie du concept de représentation. Les sources en usent et en abusent, les textes s’y réfèrent constamment, et il semble bien qu’il y ait là un terrain propice à l’observation de ses effets. Pourtant, à regarder de près la documentation un peu particulière des conflits de rangs, un certain malaise saisit l’historien qui cherche à qualifier ce que les débatteurs tentent de mettre en avant afin de se placer. Car la polysémie du mot représentation renvoie à des réalités bien différentes selon les contextes d’énonciation, et dans le cas du rituel royal, l’évidence de l’action n’a rien de transparent pour un lecteur d’aujourd’hui.

    2De fait, la représentation politique peut prendre plusieurs directions. La plus couramment empruntée est celle qui consiste à retenir la capacité de quelques-uns à s’exprimer au nom d’un groupe, ou d’une communauté, dont ils portent la parole et se font, en ce sens, les représentants1. Sous l’Ancien Régime, les délégués aux États généraux sont ainsi les tenants-lieu de tous ceux qui, ne pouvant siéger, confient alors leurs voix2. Une autre direction concerne la mise en scène du pouvoir par de fastueuses cérémonies destinées à rappeler les principes monarchiques en une série de symboles qui sont autant de figures de la puissance souveraine. Le sacre, les entrées solennelles dans les bonnes villes, les funérailles, les lits de justice, voire les Te Deum en sont les manifestations les plus éclatantes3. Cette voie se prolonge par les images, avec des programmes iconographiques qui donnent vie à ce qui n’est pas nécessairement présent, depuis la majesté rendue omniprésente par les œuvres artistiques jusqu’aux marques de la souveraineté aisément déchiffrables par les contemporains4. Mais il existe encore une direction, plus négligée de nos jours, à l’heure où la communication occupe une place essentielle dans la vie politique et où la légitimité du pouvoir repose sur la députation du peuple souverain. Or cette troisième piste, moins visible au regard des préoccupations qui sont les nôtres, est fondamentale pour l’historien des temps modernes car inhérente au fonctionnement de la monarchie française. Empruntée à l’univers du droit, elle consiste en un moyen de rendre présent en observant une parfaite adéquation entre le représentant et le représenté. Dans l’agencement cérémoniel, cette opération de substitution est une clé qu’il convient d’examiner de près dans la mesure où elle permet de comprendre avec précision les modalités d’attribution des rangs jusque dans les conflits que ces derniers provoquent5.

    3Partant des archives relatives aux querelles de préséances, l’analyse qui suit propose donc de s’arrêter pour un temps sur l’usage de la représentation par les acteurs de la France moderne, les ressources qu’elle recèle lorsqu’elle devient un instrument du politique, et le profit qui peut être tiré d’une ambiguïté dont les parties se saisissent pour gagner leurs procès. Puisés au cœur des textes, les débats qui entourent la mise en œuvre et les effets de la représentation conduisent, finalement, à revenir sur les fondements de ce qui, sous une forme largement dérivée, charpente notre démocratie. De l’interrogation sur les limites de la représentation monarchique à la manière de représenter dans le cérémonial, les développements conduiront à préciser les règles qui président à l’opération, jusque dans des contradictions propices à toutes les contestations.

    Charles de Montchal ou l’impossible représentation monarchique

    4Avant de développer des exemples qui montrent l’usage que les acteurs de l’Ancien Régime font du concept de représentation, il convient de faire un point sur les différentes approches et leurs implications. À suivre le Dictionnaire historique de la langue française6, le terme vient du latin repraesentare, c’est-à-dire « faire apparaître, rendre présent devant les yeux », « reproduire par la parole », ce qui revient à créer, d’une manière concrète ou symbolique, l’image d’une chose abstraite. Il s’agit ainsi de restituer le souvenir, d’incarner par le jeu théâtral un personnage réel ou fictionnel, et également de tenir la place d’autrui lorsque celui-ci est dans l’incapacité de le faire soi-même. De ce sens initial et de ses dérivés, la notion aborde deux aspects qui intéressent directement le cérémonial. Le premier concerne la substitution, suivant une pratique courante dans le monde juridique afin de rendre présent l’absent par l’existence d’un représentant qui tient la position du disparu (ou absent). C’est le cas de la représentation successorale où le fils représente le père défunt à la succession du grand-père et occupe alors la place de celui-ci comme si le mort était vivant7. Ce procédé est une fiction qui vise à maintenir l’ordre des choses. Le second renvoie à la construction d’un discours (oral, littéraire, pictural, etc.) qui rappelle l’existence de l’absent et entraîne à l’inverse un déplacement puisque, de la chose à sa représentation, l’opération mentale produit une reconstitution de l’objet absent. Cela suppose une interprétation qui se joue dans le transfert entre le point de départ (le sujet de la représentation) et la réception de son image, de sa figuration. Cette seconde conception de la représentation ouvre alors le champ de la perception, par le récipiendaire, des modalités du « faire voir » ou « faire croire » et suppose des actes stratégiques de manipulations symboliques. Elle participe de ce fait aux « systèmes de représentation » ou encore « représentations collectives », notions empruntées à l’anthropologie à partir des travaux d’Émile Durkheim et Marcel Mauss (en référence aux « faits culturels qui forment système8 ») et mobilisées par les sociologues (Bourdieu en est un bon exemple9) et par les historiens, notamment ceux qui ont travaillé sur le cérémonial, les formes rituelles, la figuration du pouvoir.

    5Ces deux orientations impliquent des points d’observation différents qui ne produisent pas les mêmes effets. Dans le premier cas, l’attention se porte sur l’objet de la représentation, c’est-à-dire sur ce qui est représenté qu’il s’agit ainsi de « faire vivre », ou revivre par la substitution. Ce qui est alors mis en scène n’est jamais qu’un remplacement, sans autre ambition que de rappeler l’existence de l’absent. Dans l’autre cas, c’est sur le destinataire de l’opération que se joue l’efficience du procédé en faisant appel à son activité cérébrale : la capacité du témoin à recevoir le message est ce qui en assure la performativité, à travers des signes, symboles, langages qui engagent les mécanismes de la « montre10 ». Louis Marin, passé maître dans la mise en œuvre du concept jusqu’à en faire un sujet de l’action, propose ainsi un déchiffrage de la carte qui suppose un constant va-et-vient entre la production et la réception de l’image. Car, « pour que la représentation soit parfaite dans son auto-représentation, pour qu’elle se fonde elle-même légitimement dans son pourvoir de représenter rationnellement et politiquement, il faut que nous, ses lecteurs-spectateurs, y soyons inclus “vivants”, contemplant l’incomparable capitale du roi et lisant sa représentation totale et unique11 ». Poussé à son extrême limite, l’acte est susceptible d’acquérir une autonomie qui rend la puissance d’évocation indépendante de son support et dont la seule performativité suffit à justifier l’existence12.

    6Tant les procédés eux-mêmes que leurs implications engagent donc des perspectives divergentes, et il apparaît nécessaire de ne pas les confondre. Étudier le phénomène à partir de cas précisément situés permet de pointer les risques que l’ambiguïté du vocabulaire fait courir à l’analyse. Il est en effet important de définir la position des acteurs dans le processus de représentation, et d’identifier par ces distinctions ce qui est en œuvre dans l’opération. Or, la documentation relative à l’ordre cérémoniel ne rencontre pas nécessairement l’interprétation usuelle qui en est donnée dans les travaux des sciences sociales, et la difficulté tient à la conciliation des notions emic (à savoir le point de vue du groupe social étudié) et etic (nos propres catégories d’analyse) tout en restant vigilent sur le sens à accorder au phénomène. Les sources sont, en ce domaine, assez univoques, et lorsqu’elles ne « représentent pas au roi », par un discours orienté, le problème qui agite les auteurs13, elles s’en tiennent le plus souvent à l’approche en usage dans le monde juridique. Cette inscription n’est pas exclusive : un texte de l’archevêque de Toulouse en butte aux prétentions des officiers royaux montre qu’il est possible de rassembler les différentes appréhensions dans une seule réflexion. Il permet, ce faisant, une première analyse, poursuivie par trois autres exemples qui sont autant de cas donnant à comprendre l’utilisation indigène de la représentation, essentiellement marquée par l’influence de la matière successorale.

    7En 1629, Charles de Montchal décide d’adresser au roi un mémoire de plus de cent pages imprimées faisant état des griefs que le prélat a accumulé contre « quelques uns des principaux officiers de vostre Parlement de Tholose en l’ordre du service de l’Église14 ». L’affaire n’est pas seulement honorifique ; elle engage les droits ecclésiastiques et offre l’occasion d’exprimer une conception protéiforme de la représentation dont l’objectif est à double détente : souligner l’unicité de la personne souveraine afin de dénier la prééminence des officiers royaux dans l’espace ecclésial. Le cœur de l’argument porte alors sur l’aptitude des agents monarchiques à se tenir en lieu et place de leur maître.

    « Messieurs du Parlement estans en corps dans leur Tribunal, et en l’administration de la justice, representent le Roy, aussi leurs arrest portent son nom, pour marque de leur authorité ; comme les Decrets de l’Eglise portent la marque du sainct Esprit qui les inspire aux Prelats. Mais cette representation ne leur donne pas rang ou preéminence hors des principales fonctions de leurs charges. […] Que si les Officiers qui representent l’authorité souveraine du Roy, prenoient la seance qui est deuë au Roy, il ne faudroit pas qu’ils cedassent à personne, non pas mesmes aux enfans de France. Mais tant s’en faut que ceste representation leur donne la seance qui est deuë au Roy, que dans le Palais mesme ils laissent sa place vuide sans y mettre leur mortier ny leurs placets15. »

    8La volumineuse diatribe de l’archevêque de Toulouse s’inscrit parmi les innombrables conflits de préséances qui agitent l’attribution des rangs. Elle révèle ce faisant les dessous des cartes cérémonielles en déclinant les règles censément prescriptives de l’ordre hiérarchique tel qu’il se donne à voir lors des grandes occasions. Enregistré et dûment archivé, cet ordre a vocation à servir de modèle pour les événements ultérieurs et c’est bien ce qui rend si sensible à chacun l’assignation présente et le tableau offert à la postérité. D’où la plainte de l’archevêque qui n’entend pas laisser à la concurrence laïque le bénéfice de ce qu’il considère comme une usurpation. Pour dénoncer l’abus, l’auteur s’appuie sur une conception de la représentation strictement limitée au périmètre des attributions parlementaires. Les agents du roi ne « représentent l’authorité souveraine » que dans les espaces où leurs titres et dignités sont efficients. Alors, ils tiennent la place due au monarque. « Mais les Officiers hors de leurs sieges & de leurs fonctions, soit en particulier, soit en compagnie, ne representent pas le Roy : & ne peuvent pas donner des jugemens qui portent son nom16. » La précision est d’importance ; elle souligne la forme de délégation que suppose une substitution. C’est bien le modèle d’une représentation politique telle qu’elle peut s’exprimer, également, à l’occasion d’un vote qui désigne des élus. Implicite ou explicite, la mandature restreint la marge de manœuvre ; cette dernière n’étant légitime que dans le cadre précis des attributions accordées aux mandatés.

    9L’explication donnée dans la suite du mémoire porte sur la sacralité du monarque, incomparable et incommunicable. Le rang pris à l’église par celui qui est oint lors de son couronnement est exclusif : le saint chrême confère au roi « quelque espece de charactere Ecclesiastique, en vertu duquel il guerit les malades, fait des miracles : & a des preéminences dans l’Eglise qu’il n’auroit pas s’il n’avoit l’onction. […] Or il est certain que les prerogatives qui dependent du sacre, comme celles qui dépendent de l’ordre, ne se peuvent commettre, ny transferer à ceux qui ne sont pas sacrez, & qui n’ont pas l’ordre ; d’où il s’ensuit que le Roy ne peut pas estre representé en la seance & droicts honorifiques qu’il a aux Eglises, non plus qu’en la grace qu’il a, de guerir les malades17 ».

    10En cela, les officiers qui restent simples fidèles au regard de l’Église n’ont pas, ici, la faculté de se substituer à leur souverain. En se référant à la nature ontologique du roi, le texte renvoie aux fondements idéologiques de la monarchie. Ce roi, qui ne touche l’humanité que « du bout de son sceptre », dira plus tard l’abbé de Ceriziers18, détient une place à part dans l’ordre socio-politique qu’aucun sujet n’est en capacité d’occuper. Son trône reste vide en son absence, et s’il peut déléguer une part de son autorité, il se réserve toujours la toute-puissance.

    11Les thèses absolutistes trouvent ainsi un écho dans l’ordre cérémoniel. La séparation très nette entre le détenteur du pouvoir souverain et les agents du roi qui exercent en son nom est une configuration encore valable dans l’Église : la distinction entre fidèles et desservants fait pendant à celle qui oppose le roi à ses sujets. Dans tous les cas, il y a une égalité postulée pour tous ceux qui, en position de soumission, s’effacent devant leurs supérieurs, et là encore, le roi se distingue en appartenant au double registre des monarchies spirituelle et temporelle. Cela posé, il est possible d’affirmer que « les Magistrats sont considerez, ou comme hommes politiques ou comme Chrestiens. Comme hommes politiques ils possedent les dignitez seculieres ; comme Chrestiens ils sont brebis et enfans de l’Eglise, y ont seance, & participent aux sacrez misteres de Jesus-Christ, qui leur sont dispensez par les Prestres. Partant on ne doit pas s’offencer si l’Archevesque a dit que les Magistrats ne sont considerez dans l’Eglise que comme Chrestiens, puis que c’est la doctrine des Peres, & qu’ils ne representent pas le Roy comme chrestiens, mais comme hommes politiques & Officiers19 ».

    12Contrairement au monarque, les gens du Parlement accumulent des statuts qui sont dissociés dans l’action et n’ont de sens qu’en considération des lieux où ils s’appliquent. Non seulement il leur est impossible de se prévaloir des prérogatives propres à la majesté, mais ils ont de surcroît le devoir de renoncer à leurs distinctions dans la maison de Dieu. La démonstration semble imparable. Elle vise à souligner la nature exceptionnelle d’un roi qui ne peut être remplacé, tandis que le laïc n’est rien d’autre qu’un fidèle sur les bancs de l’église. Elle pointe ce faisant un des traits marquants de la représentation, à savoir que celle-ci n’est opératoire qu’en des situations tout à fait spécifiques. Car elle suppose une stricte analogie entre l’objet et son double, ce qui ne peut se faire en toutes circonstances. Mais elle postule aussi que le représentant est en mesure de remplir sa fonction, donc qu’il dispose des qualités requises pour la mission. Le point est délicat, non exempt de tension à considérer la clause précédente. En effet, la parfaite substitution entraîne un dépouillement de l’identité initiale pour revêtir celle du représenté dont il occupe la place, quand la dignité requise pour l’exercice exige au contraire la conservation de sa propre nature : si celle-ci s’efface lors de l’opération, elle reste une condition de sa mise en œuvre. Les débats sur le rang ne manquent pas de s’emparer d’une telle ambiguïté, bien que les arguments soient toujours tendancieux. Comme souvent, la contestation des préséances porte sur les micro-déplacements qu’une forme d’incertitude provoque nécessairement20.

    13L’archevêque, dans son mémoire, joue ainsi d’une représentation consistant à « se mettre à la place d’autrui » pour en récuser l’efficience dans l’affaire qui l’occupe. Mais il décline encore le thème sous d’autres formes qui contribuent à la grandeur royale et appuient la démonstration d’une souveraineté hors du commun. Le cérémonial devient un spectacle quand il met en œuvre « la decence & l’apparat qui doit accompagner la representation d’un si grand Roy21 », et le terme, ici, change de registre en adoptant une perspective théâtrale. Le faste participe de la célébration ; il en est une composante qui trouve à s’exprimer par un même mot transformé en cadre de l’action quand il en constituait le sujet. Du cadre, il peut même se faire toile lorsqu’il s’agit d’évoquer les images dont la démultiplication risque de galvauder l’inimitable figure royale. Toujours dans l’idée de maintenir la « veneration parmy le peuple », la rareté des illustrations est un signe de l’exception monarchique, à l’instar d’Alexandre le Grand qui « deffendit à tous les peintres de le pourtraire […], tant il avoit peur, que sa representation estant renduë trop commune par la multitude de ses pourtraicts, le peuple en prît des conceptions basses, et perdît l’opinion de sa divinité, qu’il vouloit imprimer dans les esprits des hommes22 ». Cette prévention contre la reproduction des traits royaux n’est plus d’actualité dans un contexte français où la publicisation du prince passe, au contraire, par une large diffusion de l’image. Mais l’auteur, en s’inspirant de cette mise en garde d’un autre temps, élargit le gouffre qui sépare le souverain de son parlement, rejetant un peu plus ce dernier dans la catégorie des hommes ordinaires par opposition à l’inatteignable couronne. Il conduit ce faisant à penser les effets de la représentation, sous une forme artistique, qui rend présent selon d’autres modalités, et en cela à développer une omniprésence qui fait pendant à l’omnipotence d’un roi de droit divin. La question est alors celle de la puissance d’évocation d’une autorité qui englobe l’ensemble du royaume sans avoir la possibilité de s’imposer partout physiquement. La représentation, vue sous cet angle, est une projection de l’identité où intervient une part d’imaginaire dans ce que chacun met derrière les dessins.

    14En s’exprimant au nom du roi dans l’attendu des décisions de la cour, ou en diffusant les traits physiques de celui qui gouverne, les officiers d’une part, les images d’autre part, se chargent de faire connaître la volonté royale. Ils le font parfois à l’occasion d’un cérémonial qui se veut un spectacle de majesté faisant la part belle aux instruments symboliques de la royauté. Tous ces aspects rassemblés ici sous le seul terme de « représentation » relèvent de significations diverses qui sont elles-mêmes des opérations mentales différentes. En cela, il est assez rare de les rencontrer sous une seule plume aux xvie-xviie siècles, et c’est ce qui fait la richesse du texte de Charles de Montchal. La restitution de la polysémie s’accompagne d’un attachement au radical qui rend le vocable opératoire dans des champs très variés (politiques, juridiques, littéraires, symboliques, etc.) tout en restant fidèle à l’objectif de pallier une absence. Cet objectif constitue le fil directeur de tout recours au phénomène ; il est cependant d’un usage plus circonscrit dans la plupart des écrits relatifs au cérémonial, comme le montrent les trois conflits qui suivent, empruntés à trois affaires différentes, trois époques et trois objets.

    Être en mesure de tenir la place

    15Le premier d’entre eux traite de l’ordonnancement cérémoniel lors du sacre et la place des pairs en son sein sous Charles IX ; le deuxième fait référence à l’exercice du pouvoir monarchique dans le milieu parlementaire au début du règne personnel de Louis XIV ; le troisième engage la place des princesses du sang royal dans les années 1710.

    16Les débats sur la place que doivent tenir les pairs de France lors du rituel d’intronisation sont entamés depuis le règne d’Henri II. Théoriquement, ce dernier résout la difficulté en s’appuyant sur les extraits de registres fournis par Du Tillet qui a fait de longues recherches dans les archives du Parlement. Sur la base des documents produits, « Henry second regla les rangs et [selon sa décision] le duc de Guise representant le duc d’Aquitaine preceda le duc de Monpensier qui representoit le comte de Flandres23 ». Une telle disposition est conforme à l’ordre fixé au xive siècle des pairies laïques qui officient au sacre, à savoir, par degré de grandeur, les ducs de Bourgogne, de Normandie, de Guyenne ; puis les comtes de Toulouse, de Flandres et de Champagne24. Cette mise au point n’empêche nullement la querelle de reprendre en 1559, lors du couronnement de François II, puisque « avant cette Ceremonie il y eut une contestation entre M. de Montpensier et Mrs les Ducs de Guise et de Nevers pour la préséance dans la représentation des anciens Pairs25 ». Chaque fois, le problème posé interroge le rang déterminé par la qualité des représentants (à savoir de Montpensier, Guise et Nevers) ou par la prééminence initiale de ceux qui sont ainsi représentés, avec un enjeu spécifique lié à la qualité de Montpensier comme prince du sang.

    17Le problème prend une tournure particulière avec le sacre de Charles IX, et la volonté de Catherine de Médicis de placer en tête des pairs le frère cadet du roi, futur Henri III, qui n’est encore investi d’aucune pairie. « La Reyne Catherine de Medicis voulut que le duc d’Orleans qui fut depuis le Roy Henry troisieme servit de pair et representast le duc de Bourgogne au sacre du Roy Charles 9e. Il y eut ordre au parlement de consulter les registres pour scavoir si entre ceux qui au sacre des Roys ont representé les pairs, il n’y en a point eu qui n’ayent point esté pairs26. » Un autre texte fournit quelques explications, à savoir que « l’objet de ces recherches demandées par le Roi et par la Reine Mere, c’etoit de pouvoir faire servir le duc d’Orleans frere du Roi, de premier Pair au sacre du Roi Charles IX, et de repondre aux difficultés que l’on faisoit sur ce que ce Prince n’etoit point Pair, le duché d’Orleans n’ayant pas été de nouveau erigé en Pairie27 ». L’objectif de la reine-mère vise à mettre en avant la qualité de fils de France détenue par ses fils et faire ainsi valoir le caractère exceptionnel du sang royal. Pour cela, elle joue sur un double tableau en instrumentalisant la notion de représentation : d’une part le petit prince, en endossant le rôle de duc de Bourgogne, s’impose sur tous les autres, d’autre part, il démontre que sa naissance suffit à obtenir la première place (à savoir celle du duc de Bourgogne), par un phénomène de réciprocité permettant finalement au représenté de communiquer sa prééminence au représentant. C’est là une subtilité du cérémonial dont la reine mère sait jouer avec maestria28.

    18Dans la deuxième affaire, il s’agit d’identifier le rôle de chacun au sein du Parlement, et subséquemment de reconnaître le pouvoir de ceux qui portent la parole du roi. La célèbre querelle du bonnet de 1664 sur l’ordre d’opiner au Parlement rejoint ainsi certaines des préoccupations de l’archevêque de Toulouse quant à la capacité à représenter le roi, mais elle met aux prises cette fois les ducs et pairs et les présidents. Le conflit donne lieu à une forte production de mémoires de la part des deux parties. Plusieurs éléments entrent en compte : l’ancienneté des origines – pariales ou parlementaires –, la fonction des uns et des autres et, derrière tout cela, la capacité de chacun à représenter la majesté. Si les pairs sont incontestablement les premiers en date de création, les présidents considèrent qu’ils incarnent, à eux seuls, l’ensemble du parlement dont ils sont la tête, et portent ce faisant la justice, attribut royal par excellence. La fonction, ici, prime sur l’antériorité des titres et impose les présidents sur ceux qui, membre d’un corps, doivent se soumettre au chef, dans une conception organiciste de l’institution. Les pairs, de leur côté, entendent faire valoir un ancrage historique plus ancien. Compagnons du monarque bien avant l’apparition de la cour souveraine et constitutifs de la curia regis originelle, ils exigent la prééminence. De ce débat sur les racines découle directement la question de la représentation, à savoir l’aptitude à porter les valeurs monarchiques. Le lit de justice, dans cette configuration, devient l’épreuve où se révèlent les rapports de force et la continuité, ou non, des différentes prétentions.

    19L’extrait présenté ici est une réponse des pairs à la réplique des présidents. La reprise des arguments de la partie adverse, pour en tirer avantage, montre que derrière les positions partisanes se profile une idée partagée de la représentation :

    « Les memoires de Messieurs les Ducs et Pairs l’ont faite voir et l’ont expliquée nettement et doctement, on peut ajouter que le Parlement fixé est la figure et l’image du Parlement de France qu’on appelle Cour de France et lict de justice, le premier president represente le Roy. […] Quand le Roy tient son lit de justice la figure et la representation cessent, et comme une riviere perd son nom dans la mer, aussi le parlement fixe perd son nom quand le Roy entre pour tenir sa cour et son lit de justice […], Messieurs les Presidens et autres officiers, qui brilloient comme des astres dans le tribunal de la justice souveraine de sa Majesté un moment avant l’entrée du Roy au Palais, n’ayant qu’une lumière empruntée et par participation, perdent leur esclat quand le Roy vray soleil de la justice se presente pour presider a son Parlement. En l’absence du Roy, le costé gauche dans l’audience est le plus honorable parce que Monsieur le premier president y est proche la place du Roy que personne n’occupe ; tous ceux qui sont de ce costé là, presidents et conseillers, opinent avant ceux qui sont du costé droit, evesques, Maistres des Requestes, et Ducs, gouverneurs de la province et autres. Quand le Roy tient son lit de justice, le costé droit est le plus honorable, les Reines, les enfans de France, les Princes du sang, les pairs etc. s’y mettent et opinent avant ceux qui sont du costé gauche29. »

    20L’explication est développée un peu plus loin ; elle permet de préciser les conséquences politiques et cérémonielles de l’apparition royale. « Quand le Roy est entré et placé dans son lit de justice, soudain Monsieur le Chancelier quitte la teste du banc où sont les presidens et se met dans une chaise, place beaucoup plus honorable que la premiere, et dez ce momens le theatre de la justice change de face, et l’on y voit une nouvelle scene et tout a fait differente de la premiere : le Roy preside, Monsieur le chancelier prend les avis […], Messieurs les presidens y opinent comme conseillers d’estat seulement […], parce que dans cette action le Parlement de Paris n’y est pas, c’est la Cour du Roy qui ordonne30. » Et un autre mémoire, cette fois en faveur du Parlement, précise que « le rang le pouvoir et l’auctorité du Parlement appartient au Roy, et n’est autre chose que le pouvoir et l’auctorité Royalle, puisque le Parlement n’a rien de luy mesme independamment de la Royauté, et que toute sa force est en ce qu’il represente le Roy et exerce son auctorité31 ». On observe dans tous ces textes qu’en l’absence du roi, le premier président le représente, mais en la présence royale, « la représentation cesse ». Ainsi, le premier président tenant lieu et place du roi, le côté gauche où siège le président est le plus honorable. Mais quand le roi tient son lit de justice, un renversement de perspective s’opère et c’est la droite qui a la prééminence, du côté du roi, où s’installent les membres de la famille royale. Car, dit encore un des mémoires, « le Roy estant present n’est representé par personne et qu’ainsy les Presidents perdent en sa presence ce rang et prerogative que la seule representation leur donne32 ».

    21La troisième affaire nous propulse dans les années 1710-1711. Elle concerne un gros conflit entre le duc d’Orléans et les princes du sang sur la place des princesses dans l’ordre hiérarchique. La longévité exceptionnelle du règne de Louis XIV conduit à une situation inédite : à la fin de sa vie, le vieux roi héberge à la cour non seulement les princesses du sang, femmes des princes du sang, mais également les descendantes directes du deuxième Bourbon, à savoir les filles du duc d’Orléans, lui-même petit-fils de France. Ces arrière-petites-filles de France estiment qu’au nom du sang royal qui coule dans leurs veines, elles doivent être valorisées sur des épouses de princes n’ayant de titre que par mariage. La politique de promotion du lignage travaillée depuis l’avènement d’Henri IV favorise l’exaltation de la tige royale et la préséance est demandée pour les princesses d’Orléans sur leurs cousines par alliance. La question est loin d’être simple car elle oppose deux logiques, toutes deux recevables : celle, d’une part, d’un ordre défini par l’aptitude à monter sur le trône (ce qui favorise les princesses du sang, susceptibles de devenir reines par l’intermédiaire de leurs maris, héritiers présomptifs) ; celle, d’autre part, d’une grandeur lignagère que la propagande monarchique n’a cessé de célébrer jusque dans l’accession des bâtards de Louis XIV à un degré proche de la ligne de succession33. Les débats se fondent sur les critères d’assignations des places, les princes insistant sur ce qui justifie leur position spécifique dans l’ordre hiérarchique, tandis que le duc d’Orléans exige pour sa progéniture féminine la création d’un rang forgé sur le modèle des petites-filles de France qui ont à la cour un statut particulier.

    22Les discussions portent ainsi sur la position des femmes – filles ou épouses – au sein de la famille royale et de l’ordre hiérarchique ; elles renvoient de ce fait à la question de la participation féminine à la succession royale. En réponse aux propositions du duc d’Orléans, la partie adverse apporte quelques précisions sur le rapport entre dévolution du trône et place à la cour : « Quoy que les Princes du Sang qui ont droit de succeder a la Couronne en soient esloignés de plusieurs degrés, on ne peut pas leur disputer ce droit de succeder, parce qu’a cet esgard la representation a lieu a l’infiny pour le droit de succeder, et par consequent pour les rangs des Princes du sang et de leurs femmes. Mais quand il s’agit des honneurs il n’en est pas de mesme, et l’on ne peut pas dire que la representation ait lieu a l’infini ni dans les branches, ni dans les masles, ni dans les filles34. » Ailleurs, les princes soulignent que « si la consanguinité n’est autre chose que la representation perpetuelle, que peuvent-elles representer par le droit a la couronne dont elles sont excluses ; pour representer il faut pouvoir exercer un droit au lieu d’une autre personne35 ». Dans un tout autre dossier, qui concerne cette fois une revendication d’héritage et puise dans l’ordonnancement cérémoniel la preuve d’une inscription dans l’ordre des ayants droit, la formule est plus lapidaire encore : « droits d’une P[rincesse] du sang. Bon pour le Rang comme pour les biens36 ».

    23Référence explicite au dispositif juridique de transmission successorale, le document lie intrinsèquement l’ordre des rangs à celui de l’aptitude au trône en insistant sur la relation entre le droit, l’héritage et la représentation. Or cette représentation successorale, ou plus exactement la fiction sur laquelle elle repose, est précisément celle qui opère encore dans les autres conflits : c’est bien la substitution par un tiers de celui qui n’est pas en mesure de faire valoir ses droits et qui est de la sorte incarné par un autre. Dans tous les cas, les conflits articulent droits, cérémonies et pouvoirs en renvoyant au sens très précis que revêt la représentation dans la culture juridique, une culture dont sont pétris les cérémonialistes et théoriciens de la monarchie. Le dispositif hiérarchique est par ailleurs fondé sur la dialectique de la grâce et du droit, ce dernier constituant à bien des égards l’horizon lointain dans lequel prennent effet les débats de préséances. Car si, d’un côté, le monarque entend attribuer les places selon son bon vouloir, en « maitre des rangs » comme le reconnaissent volontiers les plaignants, d’un autre côté, les participants au cérémonial invoquent chaque fois leurs droits au rang, au nom des titres, dignités et fonctions dont ils sont détenteurs. Ici, les mécanismes juridiques constituent une référence obligée, tant dans le vocabulaire employé (procès, jugement, procédure de l’affaire, « mise en délibération », « préjudice », « instruction », « plaintes et requêtes », etc.) que dans le déroulement des opérations conduisant, in fine, à la composition de l’ordre institué.

    Des procédures juridiques à la représentation cérémonielle

    24Le poids du droit et des droits dans les conflits conduit alors à regarder du côté des traités juridiques pour comprendre les implications de la représentation telle qu’elle opère dans les querelles de préséances. Bien des parallèles peuvent être faits entre ce qui se joue dans la transmission patrimoniale et l’engagement dans l’activité cérémonielle. Le Dictionnaire de droit et de pratique rédigé dans la première moitié du xviiie siècle par Claude Joseph de Ferrière offre de ce point de vue un bon poste d’observation. La longue entrée consacrée au sujet propose une définition qui tient en quelques lignes : « La représentation en matière de succession est le droit de succéder à quelqu’un du chef d’une personne prédécédée, de sorte que ceux qui le [il s’agit du chef] représentent, en quelque nombre qu’ils soient, ne sont admis à la succession, que pour la part et portion qu’auroit eue la personne prédécédée si elle étoit vivante, et qu’elle recueillit la succession du défunt37. » De là, l’auteur fait découler toute une série de prescriptions. Ainsi, le représenté communiquant strictement ses droits, et rien de plus, le représentant (mais ils peuvent être plusieurs) doit s’en tenir à ceux-ci, sans en invoquer d’autres lors de l’opération. Conséquence logique de ce qui précède, le représentant tient le degré, ou lieu et place, de la personne qu’il représente. L’effet est alors de rapprocher les générations, ce qui permet au descendant d’hériter directement de son aïeul. Par contre, le procédé n’est pas possible du vivant, ou en présence, de celui qui est concerné, car il ne peut y avoir en un même endroit le représenté et son double. Seule une incapacité à être physiquement là justifie d’en appeler à ce procédé fictionnel. De plus, la représentation en corps ne fait qu’un, à l’instar d’une fratrie qui hérite du grand-père au nom du père défunt. Dernier point, et celui-ci est plus délicat en ce qui concerne le rituel, le représentant est supposé capable de représenter, ce qui revient à lui reconnaître les qualités requises pour ce faire. Dans le domaine cérémoniel, cette formule ouvre la porte à diverses contestations, même si elle renvoie au principe selon lequel seuls certains droits autorisent à se substituer à l’absent. Au terme de cet exposé, Claude Joseph de Ferrière conclut que « l’effet de la représentation n’est autre que de réparer le défaut de la personne représentée, et de la feindre présente en entrant en son lieu et place38 ».

    25Qu’il s’agisse du cérémonial ou de la transmission successorale, l’opération de substitution fait en sorte que l’absence est totalement compensée, sans qu’il y ait de rupture. Dans cette perspective, l’esprit de la représentation consistant en un rappel de la personnalité déficiente, l’exercice peut se décliner sur un plan physique ou mental, par une incarnation matérielle ou une projection intellectuelle. Furetière en rend compte en abordant la série de définitions par le travail de l’esprit39. La première entrée concerne les « images qui nous met en idée et en mémoire les objets absents, et qui nous les peint tels qu’ils sont. L’Eglise a receu les images, parce que ce sont les representations de Dieu et des Saints ». L’auteur poursuit sur le thème de l’exercice spéculatif, avec l’exemple d’un « fils qui ressemble si bien à son père, que c’est la vraye representation », et surtout en développant la voie de l’imagination : « Se dit aussi de ce qui fait connoistre les choses par les paroles, par les gestes. » Il apparaît plus loin que le terme « fait cognoistre quelque chose par quelques figures, par quelques marques. Le grand nombre d’astres, l’entenduë de l’Univers, nous representent bien la toute-puissance de Dieu […]. Et les enigmes, les emblemes, les fables, les allegories, nous representent diverses veritez & moralitez. » Du discours à la scène du théâtre, Furetière insiste surtout sur la reconstitution mentale, et ce n’est qu’en dernier ressort qu’il évoque ce qui fait le principal dans le monde juridico-politique, à savoir « tenir la place de quelqu’un, avoir en main son autorité ». Les exemples qui servent à expliciter cette ultime proposition sont significativement pris dans le cérémonial : « Le pape represente Dieu sur la terre. Les Ambassadeurs representent le Prince. Les Magistrats representent le Roy. On dit aussi dans la ceremonie du Sacre, Un tel Seigneur represente le Duc de Normandie, le Comte de Champagne. » Avant de compléter par la question de l’héritage : « On dit aussi dans les successions, qu’un petit-fils represente son pere decedé pour venir à partage avec les oncles à la succession d’un ayeul. » Le cheminement du dictionnaire est à l’inverse de ce qui se produit dans le rituel, Furetière attachant en cette fin du xviie siècle plus d’importance à la puissance des images, signe peut-être du déclin du cérémonial comme instrument de la propagande royale au bénéfice d’autres illustrations de la grandeur monarchique, manifestation quoi qu’il en soit d’une forme possible d’expression de l’insaisissable. À la même époque, le programme iconographique de Versailles répond au besoin de rendre sensible la figure du pouvoir, tant par des portraits au vif du souverain que par des symboles ou emblèmes monarchiques. Cette direction est une des voies empruntées par le terme de représentation, encore valable dans les décors des autres résidences royales, dans les entrées urbaines ou diverses festivités d’importance. Et c’est bien une des façons dont l’archevêque de Toulouse aborde la question dans sa diatribe contre les parlementaires.

    26Mais à trop retenir cette interprétation au détriment du sens initial que conserve toujours le terme, le travail sur le cérémonial risque de sous-estimer le poids que revêt l’idée d’une parfaite adéquation entre le représentant et sa doublure, tant dans les conflits de préséances que dans le dispositif rituel en général. Or c’est à cette aune-là que se mesure l’ordre socio-politique tel qu’il se donne à voir. Le dispositif hiérarchique ne peut se comprendre en dehors d’une lecture juridique, et les principes de la représentation successorale croisent ceux du cérémonial. Dans un cas comme dans l’autre, les impératifs entraînent les mêmes restrictions. Ainsi, conformément à la règle stipulant que les représentants ne peuvent invoquer d’autres droits que ceux des représentés, le rang accordé à celui qui incarne l’absent ne peut être supérieur au référent. C’est pourquoi les ducs et pairs, par exemple, n’ont pas la possibilité de faire valoir leurs qualités de naissance pour obtenir une prééminence dans leurs fonctions de représentation. Toute personnalité est suspendue le temps de la cérémonie au Parlement. Dans le prolongement de ce précepte, il appert que la place tenue par le représentant est exactement celle du représenté, sans la moindre modification, en un strict analogon. Cette fiction de la présence de l’absent permet aux présidents du Parlement de tenir la place la plus honorable quand ils remplacent le roi lors des séances ordinaires ; elle autorise aussi le fils de Catherine de Médicis à prendre le premier rang au titre de duc de Bourgogne sans être apanagé. De surcroît, la représentation par corps revient à ne faire qu’un, ce qui explique que les présidents peuvent, à eux tous, représenter le monarque, comme ils peuvent, aussi, représenter en corps le Parlement40. Confinée à un cadre circonscrit, la représentation ne peut excéder le mandat, de sorte qu’aux limites sur les droits du représenté s’ajoutent un certain nombre de contraintes. Car, de la même manière qu’il est impossible de représenter, dans la chaîne de dévolution, une personne vivante, il est inconcevable d’incarner, en un même lieu, celui qui est présent. Ainsi, « le Roy estant present n’est representé par personne41 » et donc « quand le Roy tient son lit de justice la figure et la representation cessent42 ». Les effets de l’arrivée royale sont immédiats, « l’authorité du parlement ordinaire est suspendue : et il ne represente plus alors la majesté Royale ; qui est presente en la personne du Monarque mesme43 ».

    27À partir de là, « les Presidens perdent en sa presence ce Rang, et prerogative, que la seule representation leur donne44 ». Et il va de soi qu’un grand seigneur remplace un ancien pair au sacre uniquement parce que ce dernier a disparu. Théoriquement, le représentant se dépouille de son identité pour porter la valeur, à savoir les droits, ou rangs, du substitué ; et ses titres initiaux sont donc inopérants. Sur cette base, un mémoire soutient, à propos de couronnements très antérieurs, qu’« on avoit veu dans plusieurs de ces ceremonies des representans non pairs preceder des representans pairs45 ». Il n’est pas anodin que les exemples soient empruntés à des époques reculées, en des temps où le rituel était plus incertain et les querelles moins engagées. Mais une telle affirmation montre cependant que, encore au xviiie siècle, l’idée d’un ordonnancement où prévaut le rang du représenté quelle que soit l’origine du représentant est toujours recevable. La question est posée, autrement, à propos « du rang des cardinaux, selon la dignité des Rois qui les deputent », sans que la conclusion en soit très différente. « Aux deux Traictez de Cambray en l’an 1508 entre l’Empereur Maximilien I et le Roy Louys XII, Marguerite fille du dict Empereur, Duchesse douairiere de Savoye, ayant pouvoir de son pere d’intervenir au dict Traicté, fut nommée et preferée au Cardinal d’Amboise, Legat à Latere en France, commis et deputé du dict Roy Louys : de sorte que l’on eut esgard à la dignité de ceux qui deputoient et non à celles des Deputez46. »

    28Pour autant, la qualité de l’agent doit permettre de tenir le rang du sujet figuré, suivant en cela la même logique que pour la dignité, supposant toujours qu’elle n’est accordée qu’à celui qui en est digne47. Ce principe ne postule pas qu’il y ait une stricte équivalence de statut ; il suppose néanmoins que le missionné ait le niveau requis pour remplir sa fonction. La position des petits-fils, descendants du grand-père, les autorise à représenter le père prédécédé, dans le respect d’un ordre qui donne droit à la succession. Dans l’affaire qui oppose les princesses du sang aux arrière-petites-filles de France, l’argument de la capacité successorale est explicitement invoqué ; il établit une relation directe entre la position hiérarchique et la place dans la ligne de dévolution – il est vrai, de la couronne. Mais au-delà de cette spécificité liée à la loi salique, la défense s’appuie sur l’idée que le représentant mérite une telle fonction. Les effets de la représentation sont alors à double sens : ils attestent des droits en même temps qu’ils les conditionnent, et les acteurs en jouent pour conforter leur propre valeur par un procédé qui est d’abord une substitution. Savoir prendre la place de, c’est montrer qu’on est en puissance de le faire, quel que soit par ailleurs le degré d’abstraction de son être social lors de l’opération. L’évolution de l’ordre cérémoniel tend à privilégier cet aspect qui permet de souligner les avantages obtenus par le remplacement de l’absent. En 1561, Catherine de Médicis se saisit de l’occasion pour avancer son fils lors du sacre de l’aîné, arguant de la naissance afin de le mettre en position de pair : façon de dire par le rituel, avant l’acte législatif de 1576, que les princes disposent, par le lignage, d’un rang qui leur assure la prééminence. Les cérémonialistes en tirent la conclusion d’une supériorité intrinsèque du sang de France ; ce n’était sous Charles IX qu’une contribution à l’affirmation de celle-ci. Louis Le Gendre peut ainsi écrire après d’autres, en 1716, que « les auteurs du temps disent que la Reine Mere fut louée de la conduite qu’elle avoit tenue en faisant servir l’un de ses fils de premier Pair, pour prouver que les Princes du sang n’ont pas besoin d’être Pairs pour jouir des prerogatives qui sont attachées à la Pairie qui n’est qu’un simple titre de Dignité dont les Privileges sont au dessous de ceux des Princes du sang48 ». En 1664, les premiers présidents font valoir le « charactere pour representer sa Majesté49 » afin de prendre le pas sur quiconque dans le Parlement, transformant ainsi une qualité circonstancielle en un absolu garantissant la préséance. A contrario, l’archevêque de Toulouse se réfère à l’exception royale pour dénier aux parlementaires toute possibilité de remplacer le monarque lors des cérémonies religieuses. La distinction spirituelle reçue avec l’onction du sacre justifie un rang dans l’Église que nul fidèle n’est en mesure d’occuper. La nature de la cérémonie, toujours déterminante pour l’attribution des préséances, est un critère dont les parties se saisissent pour réfuter un droit ou, au contraire, revendiquer un échelon qui peut être douteux en se référant à celui qui fut obtenu ailleurs. Ce sont là des ruses permises par le degré d’incertitude qui accompagne généralement la distribution des places. Malgré tout, la représentation est censée n’être qu’éphémère ; elle agit à l’heure de l’événement et s’éteint sitôt celui-ci achevé. Amelot de la Houssaye se réfère à ce principe lorsqu’il précise qu’au sacre, « cette grace ne confere point la realité de pair, et ceux à qui elle est faite ne le sont que pour autant de temps que dure la ceremonie pariale à laquelle ils sont appellez50 ».

    29Le bénéfice tiré à long terme d’une opération ponctuelle n’ouvrant d’autres perspectives que celles autorisées sur le moment tient alors à la combinaison de prescriptions, restrictions et possibles qu’offre le processus de représentation tel qu’il est entendu dans le contexte cérémoniel. « Se mettre à la place de » s’accompagne d’impératifs qui, sans être absolument contradictoires, s’entrecroisent de telle sorte que les effets produits autorisent des interprétations divergentes. Ces dernières sont remobilisées plus tard, au service d’une cause n’ayant qu’un lointain rapport avec celle qui fournit l’argument. Mais puisque la représentation postule une capacité pour ce faire, elle devient un marqueur social au-delà de l’action momentanée, et dans la mesure où elle accorde des droits, ceux-ci sont des acquis pour la postérité. La suspension du temps n’est jamais un absolu dans un modèle d’établissement des rangs fondé sur le précédent et nourri des exemples du passé. Or, et c’est là que se situe le point nodal, la substitution n’est opérante qu’en situation, en l’absence du sujet concerné et dans un effacement de l’identité de l’acteur. C’est donc dans la relecture de l’événement que se créent les hiatus qui alimentent conflits et plaidoyers. La possibilité de déplacements offerte par le réinvestissement des bénéfices – pourtant temporaires – de la représentation naît, ainsi, de la manipulation des normes prescriptives, entre injonctions à s’en tenir aux droits et nécessité d’en avoir la capacité. Ce n’est pas tant l’opération elle-même qui est mise en cause dans les conflits (tous s’accordant à y voir une simple substitution), que l’interprétation des conséquences, les uns considérant que les effets sont nuls quand les autres en retiennent quelques prolongements.

    30Tout se joue donc sur les préalables, à condition toutefois de s’en tenir à l’idée qu’il s’agit, uniquement, de remplir le vide laissé par l’absent. En ce sens, les prérequis s’avèrent fondamentalement différents d’une représentation par l’image. Car cette dernière n’exige pas l’absence du représenté, lequel peut parfaitement faire face à sa figuration et partager le même espace. Elle n’implique pas non plus une rigoureuse reproduction et laisse la voie libre à l’imagination, autorisant d’emblée un décalage entre l’objet et le récipiendaire qui doit interpréter ce qu’il a sous les yeux. De surcroît, elle n’engage ni droits ni obligations spécifiques, n’étant porteuse que d’un message qu’elle communique au public.

    31Puisés à la même source, les procédés doivent être distingués si l’on veut bien comprendre ce qui se joue dans les conflits de préséances et, au-delà, dans l’ordre politique tel qu’il se manifeste par le cérémonial. Le terme de représentation prend dans ce contexte une connotation qui est finalement à l’opposé de ce qui est entendu de nos jours, et que les historiens retiennent généralement. En une sorte de retournement, les analyses actuelles partent de la position du spectateur quand, dans l’attribution des rangs, il s’agissait de concentrer l’attention sur le représenté, à savoir sur la qualité de la personne qui est à l’origine de l’affaire. Tant le point de vue que les effets divergent. En considérant l’action comme productrice de sens, le commentaire impute un décalage qui est précisément récusé dans l’ordonnancement cérémoniel. Cette analogie entre les originaux et leurs doublures explique qu’il n’y ait pas de contestation quant à la place assignée dans l’instant, à moins d’une indignité de celui qui tient le rôle. Seule la qualité du représentant fait débat parce que l’honneur d’une telle participation se répercute à long terme. La fiction juridique institue donc un mode de fonctionnement qui éclaire non seulement la distribution des places, mais aussi les liens entre droits, pouvoirs et préséances. L’acuité des querelles tient précisément à la revendication des droits que porte la possibilité d’une représentation, et les limites imposées par les conditions de celle-ci circonscrivent encore la puissance des acteurs. Derrière les conflits qui entourent la question se profilent des enjeux qui dépassent largement sa mise en pratique.

    Conclusion

    32La représentation, au sens théâtral du terme, passe par une représentation, sur le mode juridique, de personnages dont la mission première et de se mettre en lieu et place de l’absent. Dès lors, les dispositions adoptées pour régler les successions instituent le même type de relation causale lorsque la société politique se donne à voir dans les festivités publiques. En effet, il n’est pas question d’autre chose dans l’ordonnancement du cérémonial lorsque, par exemple, les pairs ont la prérogative d’assister aux sacres « par fiction et par représentation51 » ; l’opération ayant pour objectif de « rendre présent » ce qui ne peut l’être par lui-même, au point que les caractères inhérents aux acteurs sont suspendus le temps de la cérémonie afin de procéder à une identification parfaite. Aux obsèques royales, l’effigie (d’ailleurs appelée « représentation » dans les textes) tient ce rôle : en figurant le roi défunt jusqu’à emprunter ses traits et ses vêtements d’apparat, elle empêche l’apparition simultanée du souverain héritier, tenu à l’écart tant qu’est célébré celui qui s’efface en un long rituel de la vie politique. Dans le même ordre d’idée, un particulier – ou un corps, le cas échéant –, incarne en un décalque exact le sujet mis en scène. Nul déplacement, nulle interprétation, ne doivent altérer la configuration reproduite. Les critères d’attribution des places relèvent du seul représenté, et l’attention se focalise alors sur le point de départ, la forme originelle à laquelle il convient de se conformer. Dans cette perspective, ce n’est donc pas le récepteur du message symbolique, ni même l’interprète de ce message, qui détermine le sens du processus, mais bien l’absent rendu présent dont le caractère est restitué par l’opération. Réceptacle de l’identité devenue efficiente par ce procédé fictionnel, le représentant est neutralisé quant à sa nature et à ses qualités, à ceci près qu’il doit être en mesure de prendre en charge cette figuration. Et c’est là, précisément, que la querelle peut s’engager. Car si l’acteur renonce ce faisant à sa propre dignité, la place qu’il occupe alors dit cependant son aptitude à tenir son rôle. Les présidents du Parlement en tirent quelque gloire et font valoir cette capacité pour s’imposer sur les pairs ; les pairs entendent valoriser le rang qu’ils obtiennent au nom des pairies éteintes qu’ils font revivre au sacre, ou à l’inverse contester la distribution des rôles à cette occasion ; les fils de France marquent par cette voie la supériorité de leur naissance.

    33Or la manière dont les sciences sociales ont travaillé le concept de représentation dans les dernières décennies conduit, paradoxalement, à invalider l’injonction d’une exacte reconstitution de l’ordre initial, pourtant à l’origine du processus. Car à trop focaliser sur l’interprétation des signes et des symboles qui composent le message délivré, et ainsi à se positionner du côté de la réception, les analyses s’écartent du point de départ, à savoir le sujet de la représentation, relégué au second plan. La lecture devient la finalité d’une opération constituée d’un enchaînement de fictions jusqu’à produire un discours sur l’objet qui est loin d’en être une fidèle restitution. Le risque est alors d’accepter le phénomène de transposition sans tenir compte de sa source. Mais c’est bien à celle-ci qu’il convient de se référer pour réparer le défaut provoqué par l’absence, et de respecter de la sorte le mandat confié à d’autres. Dans le domaine politique, les déplacements successifs produits par la version moderne de la représentation, attentive à l’herméneutique plutôt qu’à l’esprit de la mission, conduit à perdre de vue la justification de la députation, l’ordre initial, donc, celui qui s’impose encore dans l’agencement cérémoniel. La légitimité de la représentation, qu’elle soit monarchique ou populaire, tient au respect des préceptes qui sous-tendent cette action.

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    Notes de bas de page

    1Association française des historiens des idées politiques, Le concept de représentation dans la pensée politique, Actes du colloque d’Aix-en-Provence de mai 2002, PU d’Aix-Marseille, 2003. Pour un état des lieux, Podlech Adalbert, « La représentation : une histoire du concept », Trivium, no 16, 2014.

    2Chartier Roger et Richet Denis (dir.), Représentation et vouloir politiques. Autour des États généraux de 1614, Paris, EHESS, 1982.

    3Giesey Ralph E., Le roi ne meurt jamais. Les obsèques royales dans la France de la Renaissance, Paris, Flammarion, 1987 (éd. anglaise, 1960) ; Jackson Richard A., Vivat Rex ! Histoire des sacres et couronnements en France, Strasbourg, université de Strasbourg, 1984 ; Bryant Lawrence M., The King and the City in the Parisian Royal Entry Ceremony. Politics, Ritual and Art in the Renaissance, Genève, Droz, 1986 ; Hanley Sarah, Le Lit de Justice des Rois de France. L’idéologie constitutionnelle dans la légende, le rituel et le discours, Paris, Aubier, 1991 ; Fogel Michèle, Les cérémonies de l’information dans la France du xvie au xviiie siècle, Paris, Fayard, 1989.

    4Sabatier Gérard, Versailles ou la figure du roi, Paris, Albin Michel, 1999.

    5Sur toute cette question, Cosandey Fanny, Le rang. Préséances et hiérarchies dans la France d’Ancien Régime, Paris, Gallimard, 2016.

    6Ray Alain (dir.), Dictionnaire historique de la langue française, Paris, Le Robert, 1994, entrée « Représentation ».

    7Voir par exemple Bart Jean, Histoire du droit privé, de la chute de l’Empire romain au xixe siècle, Paris, Montchrestien, 1998.

    8Bonte Pierre et Izard Michel (dir.), Dictionnaire de l’ethnologie et de l’anthropologie, Paris, PUF, 1991, entrée « Systèmes de représentation ».

    9Bourdieu Pierre, « L’identité et la représentation », Actes de la Recherche en sciences sociales, no 35, 1980, p. 63-72 ; id., « La représentation politique », Actes de la Recherche en sciences sociales, no 36-37, 1981, p. 3-24.

    10Marin Louis, Le portrait du roi, Paris, Minuit, 1987 ; id., De la représentation, Paris, Gallimard/Seuil, 1994.

    11Marin Louis, « Les voies de la carte », in Giulio Macchi, Cartes et figures de la terre, Paris, Centre Georges-Pompidou, 1980, p. 47-54 (citation p. 53). Pour une analyse critique de cette approche de Louis Marin, cf. Chartier Roger, « Pouvoirs et limites de la représentation. Sur l’œuvre de Louis Marin », Annales HSS, 1994, vol. 49, no 2, p. 407-418.

    12À titre d’exemple, l’article de Roy Lyse, « Espaces urbains et systèmes de représentation. Les entrées du Dauphin et de François Ier à Caen en 1532 », in Marie-France Wagner, Louise Frappier et Claire Latraverse (dir.), Les jeux de l’échange : entrées solennelles et divertissements du xve au xviie siècle, Paris, Honoré Champion, 2007, est éclairant. L’auteur introduit son sujet en se fondant sur les analyses de Bourdieu concernant les opérations mentales de représentation et achève sa présentation en affirmant que « le récit des entrées de Caen met en valeur toutes les dimensions du rituel ».

    13En des expressions telles que : « Messieurs les Princes du sang […] osent encore representer au Roy que […] », BnF, Mss Fr. 16214, fo 49 vo ; ou encore « Mr luy dit de representer au Roy que… », BnF, Mss Clair 515, p. 585.

    14Montchal Charles de, Sommaire des moyens de l’Archevesque de Tholose contre les pretentions de Monsieur le premier President, et autres du Parlement, imprimé l’an 1629, « épitre au roi », p. 1.

    15Ibid., p. 22-23.

    16Ibid., p. 23.

    17Ibid., p. 27-28.

    18Ceriziers abbé René de, Reflexions chétiennes et politiques sur la vie des Roys de France, Paris, 1641, p. 4.

    19Montchal Charles de, Sommaire des moyens…, op. cit., p. 26.

    20Cosandey Fanny, « Participer au cérémonial. De la construction des normes à l’incorporation dans les querelles de préséances », in Antoine Roullet, Olivier Spina et Nathalie Szczech (dir.), Trouver sa place. Individus et communautés dans l’Europe moderne, Madrid, Publication de la Casa de Velazquez, 2011, p. 135-152.

    21Montchal Charles de, Sommaire des moyens…, op. cit., p. 24.

    22Ibid.

    23BnF, Mss Clair 515, p. 554.

    24Labatut Jean-Pierre, Les ducs et pairs de France au xviie siècle, Paris, PUF, 1972, p. 55 ; Jackson Richard A., Vivat Rex ! Histoire des sacres et couronnements en France, op. cit.

    25BnF, Mss Fr. 20824, fo 179.

    26BnF, Mss Clair 515, p. 561 ; voir aussi BnF, Mss Clair 719, « Memoire pour la preseance des princesses du sang servant de responses », p. 213-214.

    27BnF, Mss Fr. 20825, fo 8.

    28Cosandey Fanny, « Préséances et sang royal à la cour de France à l’époque moderne », Cahiers de la Méditerranée, no 77, décembre 2008, p. 19-26.

    29BnF, Mss Clair. 444, « Memoires sur les questions de préséances (1664) », fo 477.

    30Ibid., fo 477 vo.

    31BnF, Mss NAF 1426, « Memoire de ce qui s’est observé dans les lits de justice », fo 229.

    32Ibid., fo 221.

    33Valensise Marina, Le droit royal à l’époque absolutiste. La légitimation des bâtards de Louis XIV et leur habilitation à succéder à la couronne, thèse de doctorat, Paris, EHESS, 1991.

    34BnF, Mss Fr. 16214, « Memoire », fo 47 & vo.

    35BnF, Mss Clair 515, p. 667.

    36BnF, Mss Fr. 16214, fo 87.

    37Ferriere Claude Joseph de, Dictionnaire de droit et de pratique, Paris, Veuve Brunet, 1769, t. 2, p. 496-497.

    38Ibid.

    39Furetière Antoine, Dictionnaire universel, La Haye/Rotterdam, Arnout et Reinier Leers, 1690.

    40De nombreux exemples dans Lancelot Antoine, Recueil des ecrits qui ont été faits sur le differend entre les pairs de France et les presidents à mortier du parlement de Paris pour la manière d’opiner aux lits de justice, 2e édition, Paris, chez Urbain Coustellier, 1720.

    41BnF, Mss NAF 1426, « Memoire de ce qui s’est observé dans les lits de justice », fo 218.

    42BnF, Mss Clair. 444, « Memoires sur les questions de préséances (1664) », fo 477.

    43BnF, Mss Fr. 4336, « Memoires pour la suite du Parlement, appelé communement depuis 330 ans, la Cour des Pairs », fo 28.

    44Bibliothèque de l’Institut, Mss God. 395, fo 287.

    45BnF, Mss Fr. 20825, fo 24.

    46BnF, Mss Fr. 18515, fo 21, « Du Rang des Cardinaux, selon le Dignité des Rois qui les deputent ».

    47Descimon Robert, « La dignité du dignitaire », in Hervé Drévillon et Diego Venturino (dir.), Penser et vivre l’honneur à l’époque moderne, Rennes, PUR, 2011, p. 351-358 ; Nagle Jean, Un orgueil français, la vénalité des offices sous l’Ancien Régime, Paris, Odile Jacob, 2008.

    48Le Gendre Louis, Requête de la noblesse contre les fausses pretentions de messieurs les ducs et pairs, 1716, p. 8.

    49BnF, Mss Clair 444, « Memoires sur les questions de préséances (1664) », fo 473.

    50Amelot de la Houssaye Abraham-Nicolas, Mémoires historiques, critiques et littéraires, Amsterdam, M. Le Cène, 1722, p. 254.

    51Le Gendre Louis, Requête de la noblesse…, op. cit., p. 8.

    Auteur

    • Fanny Cosandey

      Directrice d’études à l’EHESS et membre du Centre de recherches historiques (CRH, Paris). Elle travaille sur le fonctionnement politique de la France d’Ancien Régime, et en particulier sur les relations entre les structures dynastiques, les possessions patrimoniales et l’organisation monarchique. Ses travaux sur la reine de France, l’absolutisme et l’ordre social l’ont amenenée à interroger conjointement theories et pratiques du pouvoir. Elle a notamment publié Le Rang. Préséances et Hiérarchies dans la France d’Ancien Régime (Paris, Gallimard, 2016).

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    1Association française des historiens des idées politiques, Le concept de représentation dans la pensée politique, Actes du colloque d’Aix-en-Provence de mai 2002, PU d’Aix-Marseille, 2003. Pour un état des lieux, Podlech Adalbert, « La représentation : une histoire du concept », Trivium, no 16, 2014.

    2Chartier Roger et Richet Denis (dir.), Représentation et vouloir politiques. Autour des États généraux de 1614, Paris, EHESS, 1982.

    3Giesey Ralph E., Le roi ne meurt jamais. Les obsèques royales dans la France de la Renaissance, Paris, Flammarion, 1987 (éd. anglaise, 1960) ; Jackson Richard A., Vivat Rex ! Histoire des sacres et couronnements en France, Strasbourg, université de Strasbourg, 1984 ; Bryant Lawrence M., The King and the City in the Parisian Royal Entry Ceremony. Politics, Ritual and Art in the Renaissance, Genève, Droz, 1986 ; Hanley Sarah, Le Lit de Justice des Rois de France. L’idéologie constitutionnelle dans la légende, le rituel et le discours, Paris, Aubier, 1991 ; Fogel Michèle, Les cérémonies de l’information dans la France du xvie au xviiie siècle, Paris, Fayard, 1989.

    4Sabatier Gérard, Versailles ou la figure du roi, Paris, Albin Michel, 1999.

    5Sur toute cette question, Cosandey Fanny, Le rang. Préséances et hiérarchies dans la France d’Ancien Régime, Paris, Gallimard, 2016.

    6Ray Alain (dir.), Dictionnaire historique de la langue française, Paris, Le Robert, 1994, entrée « Représentation ».

    7Voir par exemple Bart Jean, Histoire du droit privé, de la chute de l’Empire romain au xixe siècle, Paris, Montchrestien, 1998.

    8Bonte Pierre et Izard Michel (dir.), Dictionnaire de l’ethnologie et de l’anthropologie, Paris, PUF, 1991, entrée « Systèmes de représentation ».

    9Bourdieu Pierre, « L’identité et la représentation », Actes de la Recherche en sciences sociales, no 35, 1980, p. 63-72 ; id., « La représentation politique », Actes de la Recherche en sciences sociales, no 36-37, 1981, p. 3-24.

    10Marin Louis, Le portrait du roi, Paris, Minuit, 1987 ; id., De la représentation, Paris, Gallimard/Seuil, 1994.

    11Marin Louis, « Les voies de la carte », in Giulio Macchi, Cartes et figures de la terre, Paris, Centre Georges-Pompidou, 1980, p. 47-54 (citation p. 53). Pour une analyse critique de cette approche de Louis Marin, cf. Chartier Roger, « Pouvoirs et limites de la représentation. Sur l’œuvre de Louis Marin », Annales HSS, 1994, vol. 49, no 2, p. 407-418.

    12À titre d’exemple, l’article de Roy Lyse, « Espaces urbains et systèmes de représentation. Les entrées du Dauphin et de François Ier à Caen en 1532 », in Marie-France Wagner, Louise Frappier et Claire Latraverse (dir.), Les jeux de l’échange : entrées solennelles et divertissements du xve au xviie siècle, Paris, Honoré Champion, 2007, est éclairant. L’auteur introduit son sujet en se fondant sur les analyses de Bourdieu concernant les opérations mentales de représentation et achève sa présentation en affirmant que « le récit des entrées de Caen met en valeur toutes les dimensions du rituel ».

    13En des expressions telles que : « Messieurs les Princes du sang […] osent encore representer au Roy que […] », BnF, Mss Fr. 16214, fo 49 vo ; ou encore « Mr luy dit de representer au Roy que… », BnF, Mss Clair 515, p. 585.

    14Montchal Charles de, Sommaire des moyens de l’Archevesque de Tholose contre les pretentions de Monsieur le premier President, et autres du Parlement, imprimé l’an 1629, « épitre au roi », p. 1.

    15Ibid., p. 22-23.

    16Ibid., p. 23.

    17Ibid., p. 27-28.

    18Ceriziers abbé René de, Reflexions chétiennes et politiques sur la vie des Roys de France, Paris, 1641, p. 4.

    19Montchal Charles de, Sommaire des moyens…, op. cit., p. 26.

    20Cosandey Fanny, « Participer au cérémonial. De la construction des normes à l’incorporation dans les querelles de préséances », in Antoine Roullet, Olivier Spina et Nathalie Szczech (dir.), Trouver sa place. Individus et communautés dans l’Europe moderne, Madrid, Publication de la Casa de Velazquez, 2011, p. 135-152.

    21Montchal Charles de, Sommaire des moyens…, op. cit., p. 24.

    22Ibid.

    23BnF, Mss Clair 515, p. 554.

    24Labatut Jean-Pierre, Les ducs et pairs de France au xviie siècle, Paris, PUF, 1972, p. 55 ; Jackson Richard A., Vivat Rex ! Histoire des sacres et couronnements en France, op. cit.

    25BnF, Mss Fr. 20824, fo 179.

    26BnF, Mss Clair 515, p. 561 ; voir aussi BnF, Mss Clair 719, « Memoire pour la preseance des princesses du sang servant de responses », p. 213-214.

    27BnF, Mss Fr. 20825, fo 8.

    28Cosandey Fanny, « Préséances et sang royal à la cour de France à l’époque moderne », Cahiers de la Méditerranée, no 77, décembre 2008, p. 19-26.

    29BnF, Mss Clair. 444, « Memoires sur les questions de préséances (1664) », fo 477.

    30Ibid., fo 477 vo.

    31BnF, Mss NAF 1426, « Memoire de ce qui s’est observé dans les lits de justice », fo 229.

    32Ibid., fo 221.

    33Valensise Marina, Le droit royal à l’époque absolutiste. La légitimation des bâtards de Louis XIV et leur habilitation à succéder à la couronne, thèse de doctorat, Paris, EHESS, 1991.

    34BnF, Mss Fr. 16214, « Memoire », fo 47 & vo.

    35BnF, Mss Clair 515, p. 667.

    36BnF, Mss Fr. 16214, fo 87.

    37Ferriere Claude Joseph de, Dictionnaire de droit et de pratique, Paris, Veuve Brunet, 1769, t. 2, p. 496-497.

    38Ibid.

    39Furetière Antoine, Dictionnaire universel, La Haye/Rotterdam, Arnout et Reinier Leers, 1690.

    40De nombreux exemples dans Lancelot Antoine, Recueil des ecrits qui ont été faits sur le differend entre les pairs de France et les presidents à mortier du parlement de Paris pour la manière d’opiner aux lits de justice, 2e édition, Paris, chez Urbain Coustellier, 1720.

    41BnF, Mss NAF 1426, « Memoire de ce qui s’est observé dans les lits de justice », fo 218.

    42BnF, Mss Clair. 444, « Memoires sur les questions de préséances (1664) », fo 477.

    43BnF, Mss Fr. 4336, « Memoires pour la suite du Parlement, appelé communement depuis 330 ans, la Cour des Pairs », fo 28.

    44Bibliothèque de l’Institut, Mss God. 395, fo 287.

    45BnF, Mss Fr. 20825, fo 24.

    46BnF, Mss Fr. 18515, fo 21, « Du Rang des Cardinaux, selon le Dignité des Rois qui les deputent ».

    47Descimon Robert, « La dignité du dignitaire », in Hervé Drévillon et Diego Venturino (dir.), Penser et vivre l’honneur à l’époque moderne, Rennes, PUR, 2011, p. 351-358 ; Nagle Jean, Un orgueil français, la vénalité des offices sous l’Ancien Régime, Paris, Odile Jacob, 2008.

    48Le Gendre Louis, Requête de la noblesse contre les fausses pretentions de messieurs les ducs et pairs, 1716, p. 8.

    49BnF, Mss Clair 444, « Memoires sur les questions de préséances (1664) », fo 473.

    50Amelot de la Houssaye Abraham-Nicolas, Mémoires historiques, critiques et littéraires, Amsterdam, M. Le Cène, 1722, p. 254.

    51Le Gendre Louis, Requête de la noblesse…, op. cit., p. 8.

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    Cosandey, F. (2020). La représentation dans le cérémonial. In S. Hayat, C. Péneau, & Y. Sintomer (éds.), La représentation avant le gouvernement représentatif (1‑). Presses universitaires de Rennes. https://doi.org/10.4000/13z2b
    Cosandey, Fanny. « La représentation dans le cérémonial ». In La représentation avant le gouvernement représentatif, édité par Samuel Hayat, Corinne Péneau, et Yves Sintomer. Rennes: Presses universitaires de Rennes, 2020. https://doi.org/10.4000/13z2b.
    Cosandey, Fanny. « La représentation dans le cérémonial ». La représentation avant le gouvernement représentatif, édité par Samuel Hayat et al., Presses universitaires de Rennes, 2020, https://doi.org/10.4000/13z2b.

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    Hayat, S., Péneau, C., & Sintomer, Y. (éds.). (2020). La représentation avant le gouvernement représentatif (1‑). Presses universitaires de Rennes. https://doi.org/10.4000/13zc2
    Hayat, Samuel, Corinne Péneau, et Yves Sintomer, éd. La représentation avant le gouvernement représentatif. Rennes: Presses universitaires de Rennes, 2020. https://doi.org/10.4000/13zc2.
    Hayat, Samuel, et al., éditeurs. La représentation avant le gouvernement représentatif. Presses universitaires de Rennes, 2020, https://doi.org/10.4000/13zc2.
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