Représenter la concession du pouvoir
Le roi en Roi mage à Cologne vers l’an 1200
p. 55-73
Texte intégral
1Sur la façade de la châsse des Rois mages, qui se trouve dans le chœur de la cathédrale Saint-Pierre de Cologne, l’on peut voir dans le registre inférieur à droite le Baptême du Christ, et à gauche une Adoration des Mages (fig. 1).
2Cette dernière est particulièrement intéressante car, à part les figures que l’on retrouve habituellement dans ce type de représentation, à savoir la Vierge à l’Enfant et les trois Mages qui apportent leurs dons, un autre personnage apparaît derrière les Mages. Il s’agit d’une silhouette qui suit les Rois avec un don similaire à celui porté par le premier d’entre eux (fig. 2).
3En dépit de cette similitude évidente, qui fait de cette figure un quatrième Roi mage, ce personnage reste distinct des trois autres par des détails iconographiques importants : il n’est pas couronné et son vêtement est moins fastueux, puisque manque le manteau royal qui revêt les trois Mages. On a cependant affaire à un roi, car il est identifié en tant que « Otto Rex » par une inscription située au-dessus de sa tête. Les autres personnages de la scène sont également identifiés par le même type d’inscription, qui mentionne les noms traditionnels des Rois mages, « Balthasar », « Melchior » et « Caspar », et celui de la Vierge, « Sancta Maria Mater Domini ». Puisque ce reliquaire fut sans doute réalisé entre 1190 et 12251, le quatrième personnage qui apporte un don derrière les trois Mages est le roi du Saint-Empire romain germanique, Otton IV de Brunswick (1198-1215).
Fig. 1. – Façade de la châsse des Rois mages, Cologne, cathédrale Saint-Pierre, chœur.

Cliché de l’auteur, 2014.
4Cette assimilation du roi à un Roi mage a poussé les chercheurs à considérer cette image comme une commande d’Otton IV, censée montrer sa dévotion2 ou affirmer sa légitimité après son accession difficile au trône, en 11983. Considérant la situation politique des années où le reliquaire est réalisé, on pourrait voir cette image comme une commande royale, car Otton IV a certainement besoin de ce type de soutien. Il est élu en 1198 par seulement une partie des électeurs, alors qu’une autre partie élit la même année Philippe Ier de Souabe. Les deux rois revendiquent simultanément le titre de « roi des Romains » jusqu’en 1208. L’interprétation de la façade du reliquaire comme une commande d’Otton IV est favorisée en outre par le fait que ce roi tient l’assemblée des princes à Cologne, le 6 janvier 1200, et à cette occasion fait une offrande de trois couronnes d’or au reliquaire des Rois mages4.
Fig. 2. – Les trois Rois mages et le roi Otton, détail de l’Adoration des Mages.

5Si ces événements sont incontestables car bien documentés, aucune source n’atteste en revanche l’intervention du roi pour financer la décoration de la châsse ou pour influencer son iconographie, voire pour y inclure sa propre représentation en Roi mage5. En outre, même si le contexte de l’accession au trône d’Otton IV est favorable à une interprétation de la façade comme une commande royale pour affirmer sa légitimité, il est difficile de comprendre pourquoi le roi choisirait de se faire représenter sans couronne ni manteau royal. Ces insignes royaux seraient fondamentaux pour représenter un roi légitime et vainqueur, tel qu’Otton IV chercherait à se montrer vers l’an 1200 par le biais de cette commande artistique. Les commanditaires et significations de cette image seraient donc à reconsidérer.
6Le manque de couronne et manteau a été interprété de différentes manières par les chercheurs. Axel et Martina Werbke considèrent que la scène rappelle l’offrande faite par Otton IV au reliquaire des Mages le 6 janvier 1200, et que le manque de couronne est le signe de l’humilité du roi, qui se présente devant les Rois mages comme un pèlerin6. Elle sert également à l’archevêque de Cologne pour souligner la faiblesse du pouvoir royal face à l’autorité des électeurs7. De même, Jürgen Petersohn interprète ces détails iconographiques prenant en compte l’offrande royale de l’an 1200. L’auteur affirme qu’Otton IV a fait don de sa propre couronne et de son propre manteau royal pour fabriquer les trois couronnes qu’il offre au reliquaire à l’Épiphanie 1200. La représentation du roi sans manteau ni couronne serait ainsi l’illustration de cette offrande8.
7Sans mettre en doute la pertinence de ces différentes interprétations, nous pensons pouvoir formuler une autre hypothèse, qui s’ajouterait aux précédentes, pour expliquer ces choix iconographiques. Ces derniers prennent tout leur sens après une analyse approfondie du contexte de production de cette image, celui de l’accession au trône du roi Otton IV. Cet événement et les années qui le suivent sont marqués par une réflexion complexe concernant le droit d’accès au trône des rois des Romains et par une revendication du pouvoir décisionnel des électeurs, formulée notamment par l’archevêque de Cologne. Cet article cherchera donc à montrer comment la représentation d’Otton IV en Roi mage se fait le signe de l’importance fondamentale de certains électeurs, et plus spécifiquement de cet archevêque, dans la question de la dévolution du pouvoir au roi des Romains. Plus généralement, cette étude explore l’utilisation de l’association entre le roi et les Rois mages par les archevêques de Cologne pour souligner leur propre poids dans les processus et les cérémonies qui marquent l’avènement du futur empereur du Saint-Empire romain germanique.
8Nous abordons donc ici les deux significations du terme « représentation », qui se trouve au cœur de ce volume et dont les différentes acceptions sont détaillées dans un article d’Yves Sintomer9. Notre objet d’étude est la représentation du roi en Roi mage, nous analysons la « représentation symbolique » du pouvoir royal, mais les significations de l’image sont intimement liées à la « représentation juridico-politique ». Nous allons montrer de quelle manière l’image fonctionne comme assertion et rappel constant du fait que le roi est représentant du peuple uniquement grâce au mandat qu’il a reçu de la part des électeurs, et plus particulièrement de la part de l’archevêque de Cologne.
L’évolution de la situation politique (1198-1205)
9L’élection d’Otton IV et celle de son rival Philippe de Souabe en 1198 ont lieu à une période où le droit d’accession au trône des rois des Romains est une question intensément débattue. Le Saint-Empire romain germanique reste tout au long du Moyen Âge une monarchie élective – ce principe n’est jamais ouvertement mis en question – mais au xiie siècle, les Hohenstaufen promeuvent l’élection des membres de leur famille, créant ainsi un rapprochement avec un système de succession héréditaire10. Le demi-siècle qui précède la double élection de 1198 est en effet marqué par l’influence des rois sur l’élection de leurs successeurs. Ainsi, avant son voyage en vue du couronnement à Rome, le roi Conrad III (1138-1152) fait des démarches pour assurer l’élection de son neveu Frédéric, qui a lieu effectivement en mars 1152, peu après la mort du roi. Frédéric Ier Barberousse (1152-1190), quant à lui, va encore plus loin en 1169, en faisant élire de son vivant son successeur, son fils Henri VI (1169-1197)11. Enfin, ce dernier cherche à poursuivre la politique du père, et à faire élire son propre fils Frédéric Roger, mais il se heurte à une forte opposition de la part de l’archevêque de Cologne, Adolphe d’Altena (1193-1205). Celui-ci empêche une première tentative d’élection de Frédéric à Noël 119512 mais, malgré sa résistance, l’élection a finalement lieu à Francfort, à Noël 1196. L’archevêque de Mayence, Conrad Ier de Wittelsbach (1183-1200), joue un rôle important dans l’organisation de cet événement13.
10L’attitude hostile d’Adolphe d’Altena en 1195 et 1196 est sans aucun doute une tentative de bloquer ce qui devenait déjà une habitude des Hohenstaufen, le fait d’assurer la succession de leur progéniture sur le trône des rois des Romains14. Certes, c’est l’élection qui permettait l’avènement du nouveau roi, mais un seul candidat étant proposé, cette élection était devenue un simple accord que les grands du royaume étaient censés donner concernant l’accession du fils du roi au trône. Nul ne doutait de la réelle portée de l’intervention du roi dans ce processus, fait visible dans les documents de l’époque, qui parlent de l’événement de 1196 comme du moment où Henri VI avait désigné (designaverat) le roi des Romains15. C’est contre cette atteinte aux droits des électeurs que l’archevêque s’insurge.
11Sans aucun doute, cette limitation des droits des électeurs mise à part, d’autres raisons participent à aggraver le désaccord entre l’archevêque de Cologne et les Hohenstaufen. La conduite d’Adolphe d’Altena est conforme aux actions de ses prédécesseurs, Renaud de Dassel (1159-1167) et Philippe de Heinsberg (1167-1191), qui avaient manifesté de plus en plus leurs prétentions territoriales, provoquant parfois des conflits avec le roi16. Philippe de Heinsberg s’était ouvertement opposé à Frédéric Barberousse entre 1184 et 1188 pour augmenter ses droits territoriaux en Basse-Rhénanie17. C’est cet archevêque qui a également posé les bases d’une collaboration avec l’Angleterre, tout d’abord commerciale, mais également politique, coopération qu’Adolphe d’Altena alimente tout au long de son règne, parfois à l’encontre des coalitions préférées par les Hohenstaufen18. Enfin, Henri VI s’était attiré l’aversion de l’archevêque par ses tentatives de choisir ses propres conseillers et d’écarter ainsi les personnages qui participaient traditionnellement à la prise de décision dans le royaume19.
12Très déterminé, mais appuyé uniquement par le duc de Saxe dans cette mobilisation contre l’élection de Frédéric20, l’archevêque de Cologne finit par reconnaître cette élection en août 119721. Cependant, l’occasion de rester fidèle à ses idées politiques se présente à l’automne de la même année, quand Henri VI meurt subitement, sans pouvoir réellement assurer la prise de pouvoir de son successeur. Frédéric II n’ayant même pas trois ans et n’étant pas encore baptisé, l’élection de 1196 est annulée22, ce qui ouvre la voie à de longues disputes concernant l’élection d’un nouveau roi. Le candidat préféré par la plupart des électeurs est sans aucun doute Philippe de Souabe, fils cadet de Frédéric Barberousse et frère de Henri VI. Il est élu roi des Romains à Mühlhausen, le 8 mars 1198, par une large assemblée dont fait partie le duc de Saxe, qui avait cessé de soutenir Adolphe d’Altena23.
13Pour sa part, l’archevêque de Cologne compte profiter de l’annulation de l’élection de Frédéric pour écarter les Hohenstaufen du trône des rois des Romains. L’avènement de Philippe de Souabe n’est certainement pas conforme à ses plans. Il s’y oppose ouvertement et déclare l’élection invalide, invoquant l’absence de figures de poids parmi les électeurs, comme lui-même, l’archevêque de Mayence, l’archevêque de Trèves ou le comte palatin24. À la différence de l’élection de 1196, aux yeux d’Adolphe d’Altena, ce n’est plus le droit des électeurs qui est ici piétiné, mais l’importance fondamentale de certaines figures, qui sont selon lui indispensables pour la nomination d’un roi. Or, en invoquant l’absence de ces personnages, Adolphe d’Altena fait discrètement référence à sa propre autorité dans la matière. En effet, en 1198, il est la figure dominante parmi les trois archevêques, car il avait acheté la voix de celui de Trèves et était le suppléant de celui de Mayence, parti en croisade. Certes, l’attitude hostile aux Hohenstaufen manifestée par l’archevêque de Cologne est contraire aux opinions politiques de l’archevêque de Mayence, qui, nous l’avons vu pour l’élection de 1196, avait apporté son soutien à Frédéric II25. Cependant, Adolphe d’Altena profite du contexte pour promouvoir un autre candidat.
14Après d’intenses négociations, l’archevêque finit par accepter le candidat proposé par la ville de Cologne, le Welf Otton de Brunswick, neveu du roi d’Angleterre Richard Cœur de Lion (1189-1199)26. C’est ainsi qu’Otton IV est élu roi des Romains à Cologne, le 9 juin 119827 et est couronné par Adolphe d’Altena à Aix-la-Chapelle, le 12 juillet de la même année28. Son adversaire est également couronné le 8 septembre 1198, mais à Mayence, par l’archevêque Aimo de Tarentaise et en présence de l’archevêque Jean de Trèves, qui avait entre-temps abandonné Adolphe d’Altena29.
15Si l’élection ne peut pas départager les deux candidats, les références symboliques pour revendiquer la légitimité sont également difficiles à mobiliser pour l’un autant que pour l’autre. Otton IV est couronné par l’archevêque qui accomplit traditionnellement cette cérémonie (celui de Cologne), à l’endroit où le couronnement a lieu habituellement (Aix-la-Chapelle)30, mais sans les insignes royaux authentiques. Ceux-ci sont en possession de Philippe de Souabe, qui les emploie pour son propre couronnement deux mois plus tard. En revanche, cet événement a lieu dans une ville inappropriée (Mayence) et est célébré par l’archevêque inadéquat (Aimo de Tarentaise)31.
16Pourtant, la possession des regalia ne semble pas être l’élément fondamental pour la reconnaissance d’Otton IV comme roi des Romains. En effet, en 1199, le pape Innocent III (1198-1216) confirme l’élection de ce dernier et le soutient contre son adversaire, en contrepartie des promesses du Welf concernant sa politique italienne et notamment sicilienne32. Cette situation favorable à Otton IV change quelques années plus tard, tout d’abord à cause de la perte du soutien matériel de son oncle Richard Cœur de Lion, qui meurt en 119933. Un deuxième moment significatif dans ces événements est l’année 1204, quand l’archevêque de Cologne change de camp pour soutenir Philippe de Souabe.
17Si la volonté de ce dernier de s’allier avec Adolphe d’Altena est facile à comprendre, le choix politique de l’archevêque est plus énigmatique. Le roi cherche en l’archevêque de Cologne non seulement le soutien d’un électeur, mais plus particulièrement celui de la figure fondamentale dans la cérémonie du couronnement du roi des Romains. En effet, comme nous l’avons mentionné plus haut, pour être entièrement légitime, le sacre du roi des Romains devait être accompli par l’archevêque de Cologne dans la ville d’Aix-la-Chapelle. Enfin allié avec Adolphe d’Altena, Philippe de Souabe peut espérer à une nouvelle cérémonie du couronnement qui se déroulerait selon ces coutumes et assurerait sa légitimité.
18Pour sa part, le choix d’Adolphe d’Altena est sans doute lié à son isolation politique et probablement à l’attitude du pape. Après le passage du duc de Saxe, puis de l’archevêque de Trèves du côté du Hohenstaufen, l’archevêque de Cologne se retrouve seul à soutenir le Welf, même si Innocent III est partisan de cette élection. Ce dernier confirme non seulement l’avènement d’Otton IV (et le couronne empereur en 1209), mais il fait savoir que sa propre position en faveur de ce candidat était une réalité bien avant que l’archevêque décide de le soutenir34. Selon Hugo Stehkämper cette insistance du pape pour souligner son influence dans le choix du candidat est perçue par Adolphe d’Altena comme une nouvelle menace à la liberté des électeurs et détermine le retournement de l’archevêque du côté du Hohenstaufen35. Vraisemblablement, Philippe de Souabe paraît en 1205 plus inoffensif que le pape et plus à même de respecter la libre décision des électeurs. Mais, nous l’avons vu, pour Adolphe d’Altena la décision de ces derniers concernant l’institution d’un roi est valable uniquement si lui-même y participe.
19En effet, le 6 janvier 1205, l’archevêque organise à Aix-la-Chapelle une nouvelle cérémonie de couronnement pour Philippe de Souabe. Or, si l’on croît aux sources rédigées à Cologne, ce roi n’est pas seulement couronné à nouveau, mais, avant la cérémonie, il renonce au titre de roi et dépose sa couronne obtenue à Mayence pour être réélu :
« Ici [à Aix-la-Chapelle] le roi, après avoir pris conseil auprès des siens, pour que les princes ne compromettent pas leur droit d’élection selon la coutume d’autrefois, dépose le titre de roi ainsi que la couronne et sollicite que de concorde tous l’élisent36. »
20Vu la provenance de la source, on peut douter qu’une vraie réélection a lieu en 120537. Il peut s’agir en réalité simplement d’une confirmation de l’élection de 119838 ou bien seulement d’un nouveau couronnement39. Cependant, l’explication de la nécessité d’une nouvelle élection donnée par la source colonaise nous paraît emblématique pour la conception de l’archevêque de Cologne concernant les droits des électeurs. Le respect du droit de libre élection selon les anciennes coutumes et la concorde en faveur de Philippe de Souabe sont les préoccupations centrales le 6 janvier 1205 selon cette source. Le roi lui-même en a conscience car c’est lui qui sollicite la nouvelle élection. Mais pour accomplir ces deux conditions il ne manquait en 1205 que la participation de l’archevêque de Mayence, de Cologne et du comte palatin. En réalité, tout comme en 1198, la perspective colonaise concernant l’élection et le couronnement tournent autour d’Adolphe d’Altena, car la chaire épiscopale de Mayence est partagée entre deux candidats et aucun des deux n’est présent40.
21Qu’il s’agisse d’une réélection ou seulement d’un nouveau couronnement, la cérémonie de 1205 montre sans aucun doute que le soutien de l’archevêque de Cologne et l’accomplissement du rituel du couronnement par ce dernier à Aix-la-Chapelle sont des éléments fondamentaux sans lesquels ni Philippe de Souabe ni l’archevêque ne conçoivent la légitimité du roi des Romains. Selon Hugo Stehkämper, Adolphe d’Altena démontre ainsi que son pouvoir en tant qu’électeur et archevêque coronator ne peut pas être contourné par les Hohenstaufen, en dépit des tentatives d’Henri VI et des autres électeurs41. Pour sa part, Franz-Reiner Erkens considère qu’autant le soutien apporté par l’archevêque à Otton IV en 1198 que celui apporté à Philippe de Souabe en 1205 sont des occasions pour Adolphe d’Altena de tenir le rôle principal, non seulement dans la cérémonie du couronnement, mais aussi dans celle de l’élection. En effet, l’archevêque de Mayence qui organise traditionnellement l’élection et détient la prima vox est absent autant en 1198 qu’en 1205 et c’est Adolphe d’Altena qui le remplace, étant ainsi dans les deux cas la figure centrale des cérémonies d’institution du roi des Romains42. Dans ce contexte politique très complexe, déterminé en grande partie par les intérêts de l’archevêque de Cologne et sa lutte pour participer librement à l’avènement du roi des Romains, on ne peut pas ignorer l’apparition de l’association entre le roi contemporain et les Rois mages.
Le roi des Romains et les Rois mages dans le contexte du couronnement
22L’analogie est très claire au moment du second couronnement de Philippe de Souabe, qui a lieu justement le 6 janvier 1205, jour de l’Épiphanie43. On célébrait le même jour le Baptême du Christ, les Noces de Cana et la Multiplication des pains, mais la prédication médiévale et la messe de l’Épiphanie mettent au cœur de cette fête la figure des Mages et le passage de l’Évangile de Matthieu qui les mentionne (Mt 2, 1-12)44.
23De surcroît, au début du xiiie siècle, toute cérémonie de couronnement du roi des Romains est suivie par la messe du jour45. En choisissant donc le 6 janvier pour le second couronnement de Philippe de Souabe, on choisit également la continuation de la cérémonie par la messe de l’Épiphanie. Le roi étant présent lors de la messe, les premières références bibliques qui lui sont transmises tout de suite après l’acquisition de son nouveau statut sont les Rois mages. L’importance de ces figures bibliques lors de cet événement est devenue encore plus claire à partir du xive siècle, quand le nouvel ordo du couronnement des rois des Romains lie définitivement cette cérémonie et la messe de l’Épiphanie46. Si, en 1205, pour célébrer cette messe lors d’un couronnement, cet événement devait avoir lieu le 6 janvier, le nouvel ordo stipule l’utilisation de l’office de l’Épiphanie pour tout couronnement des rois des Romains, indépendamment du jour où il a lieu47.
24En outre, l’importance des Rois mages à ce moment fort de l’institution du roi est confirmée à partir du milieu du xiiie siècle par le voyage à Cologne que chaque roi des Romains fait après le couronnement à Aix-la-Chapelle48. À quelques exceptions près, cette coutume est respectée par tous les rois jusqu’à Maximilien II (1562-1564), et prend fin uniquement avec le changement de la ville de couronnement, qui est désormais Francfort49.
25Tout comme le nouvel ordo du xive siècle ou le voyage à Cologne des rois récemment couronnés, il n’y a pas de doute que le choix du 6 janvier pour le second couronnement de Philippe de Souabe est censé créer une association entre le nouveau roi et les Rois mages. Or, vu le contexte analysé plus haut, nous avons de fortes raisons de considérer que ce n’est pas le roi mais l’archevêque de Cologne qui décide de créer cette analogie, au moment où il donne son consentement pour l’avènement de Philippe de Souabe. C’est le même archevêque qui, nous le croyons, après avoir soutenu l’élection d’Otton IV en 1198 avait décidé vers 1200 de le faire représenter en Roi mage sur la façade de la châsse conservée dans la cathédrale de Cologne. En effet, après l’analyse approfondie du contexte politique de ces années, force est de constater qu’aux deux moments où l’on crée un rapprochement entre le roi des Romains et les Rois mages, l’archevêque de Cologne détient une importance décisive dans l’institution des rois. C’est sans doute Adolphe d’Altena qui crée ces associations – les premières de ce type dans le Saint-Empire romain germanique –, les Rois mages étant jusqu’alors la préoccupation des archevêques de Cologne. En effet, c’est l’archevêque Renaud de Dassel qui avait disposé la translation des reliques de Milan à Cologne, sans que le roi Frédéric Barberousse n’y intervienne véritablement, et aucun des Hohenstaufen n’avait utilisé ces figures à des fins politiques50. Si c’est l’archevêque qui crée l’association du roi des Romains avec les Rois mages quelle signification lui donne-t-il en 1198 et puis en 1205 ?
26Axel et Martina Werbke sont les auteurs qui se penchent le plus minutieusement sur la question des commanditaires et des significations de l’iconographie du reliquaire conservé à Cologne. Ils y voient la participation d’un ensemble d’acteurs (le roi, la ville de Cologne, l’archevêque, l’école cathédrale et le chapitre cathédral) qui cherchent à déjouer les tentatives de Philippe de Souabe de souligner sa légitimité et tentent de montrer dans l’iconographie du reliquaire la légitimité d’Otton IV51. Quant à l’image « peu royale » du Welf sur la façade, ils la considèrent comme un détail qui souligne l’humilité du roi, qui offre les trois couronnes en 1200. Selon les auteurs, ce détail est décidé non pas par le roi, mais par l’archevêque dans le contexte de l’élection de 1198, pour montrer en outre un pouvoir royal inférieur à celui des électeurs, représentés, eux, par les trois Rois mages52. Retenant le lien entre l’iconographie du reliquaire et l’avènement d’Otton IV, très bien argumenté dans cet article, nous proposons une nouvelle interprétation de cette image, qui prend en compte les possibles significations de la Vierge à l’Enfant, ignorées jusqu’ici.
La Vierge à l’Enfant, représentation de l’Église
27De nombreux chercheurs ont montré l’association très aisée qui est faite entre la Vierge et l’Église à partir des écrits de saint Augustin53. Plusieurs conceptions théologiques participent à la construction de cette association, mais le statut de mère est celui qui favorise le plus souvent ce rapprochement. Tout comme la Vierge est mère par excellence car elle a enfanté le Christ, de même l’Église, par le Baptême, fait naître les non-chrétiens au christianisme54.
28En outre, cette mission de l’Église liée à l’enfantement des chrétiens est rapidement mise en lien avec la figure des Mages, eux-mêmes prototypes des premiers convertis55. Marie-Louise Thérel montre que la fête de l’Épiphanie est le moment où s’exprime le mieux la maternité de l’Église comme réitération de celle de Marie, et l’Adoration des Mages devient la scène la plus adaptée à illustrer cette analogie56. Ainsi, dans plusieurs œuvres analysées par l’auteure, la Vierge à l’Enfant recevant les Mages fonctionne comme image de l’Église qui convertit les païens au christianisme ou qui prend soin de ses fils chrétiens57. Et puisqu’à partir du ixe siècle, le terme ecclesia désigne le plus souvent les membres du clergé58, l’Adoration des Mages devient le lieu privilégié pour exprimer le rapport entre les clercs et le reste de la société chrétienne.
29Souvent, la relation entre la Vierge à l’Enfant et les Mages dans cette scène est vue comme le rapport entre un pape ou un évêque et une communauté de croyants, ou bien comme la relation entre un pape et un empereur. Mathieu Beaud a montré le fonctionnement de cette analogie sur le portail de l’abbatiale de Nonantola, sculpté dans la première moitié du xiie siècle, où la scène de l’Adoration des Mages répond parfaitement à celle où saint Anselme et les frères de l’abbaye s’agenouillent devant un pape (fig. 3 et fig. 4)59.
Fig. 3. – Adoration des Mages, Nonantola, abbatiale San Sylvestro, portail occidental, jambage droit.

Cliché M. Beaud, 2009.
Fig. 4. – Anselme et les frères demandant au pape la reconnaissance de leur abbaye, Nonantola, abbatiale San Sylvestro, portail occidental, jambage gauche.

Cliché M. Beaud, 2009.
30L’identification de la Vierge à l’Enfant avec les représentants de l’Église est encore plus claire sur le portail de la cathédrale de Vérone sculpté à la même période, où l’Adoration des Mages est selon le chercheur une illustration des relations entre l’évêque et la cité. Ainsi, la Vierge à l’Enfant est une image de l’évêque et du pouvoir épiscopal, auquel les Mages, représentants du pouvoir laïc, rendent hommage60.
31En outre, selon Richard Trexler, dans deux visions d’Élisabeth de Schönau (c. 1129-1165), la figure de la Vierge à l’Enfant se superpose à celle du pape, alors que les Mages sont décrits à l’image de l’empereur contemporain61. Le 6 janvier 1153 et le même jour de l’année suivante, Élisabeth de Schönau voit les Mages adorant le Christ et la Vierge : ils donnent leurs couronnes à l’Enfant pour les recevoir de ses mains et lui offrent des monnaies d’or à l’effigie d’un roi62. Ces détails sont interprétés par l’auteur comme des références au rituel du couronnement impérial. Dans cette perspective, la Vierge à l’Enfant est l’image du pape qui couronne l’empereur, ce dernier représenté par les Mages63. C’est dans un sens similaire que nous proposons d’interpréter la scène de l’Adoration des Mages sur la châsse des Rois mages conservée à Cologne.
Otton IV représenté en Roi mage vers 1200
32Cette scène nous paraît un renvoi au couronnement d’Otton IV, qui a eu lieu le 12 juillet 1198, ou bien une promesse du couronnement impérial, auquel la cérémonie à Aix-la-Chapelle permettait de songer. Comme nous l’avons montré, celui qui accomplit la cérémonie en 1198 est Adolphe d’Altena, personnage que nous proposons ici de voir sous les traits de la Vierge à l’Enfant. En revanche, Otton IV est représenté comme un quatrième Roi mage qui apporte l’or, nature du don qu’on peut déduire en observant la forme de son coffret. En effet, elle est identique à celle de la cassette portée par le premier Mage, qui apporte traditionnellement l’or. Le texte de l’ordo qui a été probablement utilisé pour la cérémonie de 1198 ne permet pas d’établir si Otton IV avait apporté une offrande d’or à l’archevêque, mais il est très probable qu’il en soit ainsi.
33Comme nous l’avons montré plus haut, le très sommaire ordo précise les étapes du rituel du couronnement jusqu’au début de la messe, mais le moment où le roi récemment couronné pouvait apporter une offrande est celui de l’offertoire, qui n’est pas inclus dans ce texte64. En revanche, quelques indices pour comprendre la possible participation du roi au déroulement de la messe donnent les deux ordines du couronnement de l’empereur, contemporains à celui utilisé pour Otton IV. En effet, l’ordo Cencius II et l’ordo Staufen mentionnent une offrande d’or apportée par l’empereur récemment couronné au pape. Pour faire cette offrande, l’empereur enlève son manteau royal et sa couronne65, détail qui expliquerait la représentation d’Otton IV sans ces deux insignes royaux sur la façade de la châsse des Rois mages.
34Ces indices iconographiques mis à part, l’insistance sur la royauté visible dans l’ensemble de l’iconographie du reliquaire nous paraît être un autre détail à prendre en compte66. Les références à la royauté nous semblent essentielles pour appréhender la manière dont le reliquaire reflète les événements de l’année 1198 et les intérêts d’Adolphe d’Altena dans le contexte politique détaillé plus haut. Pour démontrer la même idée, Axel et Martina Werbke ont relevé les similitudes entre l’iconographie du reliquaire et celle de la couronne des rois des Romains : sur les plaques émaillées de cette dernière se trouvent des représentations des rois David et Salomon, ainsi que celle du Christ en trône entouré de deux anges, figures qui apparaissent également sur la châsse, respectivement sur les faces latérales et dans la partie supérieure de la façade67. En outre, l’iconographie du reliquaire regorge de références à la royauté : la représentation des Mages est déjà un renvoi car, selon le texte biblique, ces personnages cherchent le « roi des Juifs » ; ils sont en outre couronnés, tout comme la Vierge, et l’ange à gauche du Christ en trône représenté dans la partie supérieure de la façade tient une couronne68.
35Ces nombreuses références à la royauté nous paraissent un message très puissant que les commanditaires cherchent à transmettre, une preuve de légitimité de celui qui est promu par la ville qui abrite le reliquaire et par son archevêque. L’appui de ces acteurs, fondamental en 1198, nous semble un élément sur lequel l’iconographie de la façade insiste en particulier. Ainsi, les personnages qui composent la scène de l’Adoration des Mages représentent vraisemblablement les personnages qui participent en 1198 à l’avènement du roi. Nous l’avons vu, Adolphe d’Altena est représenté par la Vierge à l’Enfant, alors que les trois Rois mages qui ouvrent au roi la voie vers l’archevêque qui le couronne nous paraissent les représentants de la communauté urbaine de Cologne. Il n’est donc pas étonnant que la Vierge à l’Enfant et les trois Rois mages soient couronnés, alors que le roi ne l’est pas. La couronne ainsi que les dimensions plus imposantes de la Vierge et des Rois mages montrent le poids de l’archevêque et de la ville dans le processus d’institution du roi des Romains. C’est pour montrer leur importance et leur participation primordiale à l’avènement d’Otton IV que cette image est sans doute créée.
36En outre, il est important de remarquer que parmi les cinq personnages qui composent la scène de l’Adoration des Mages, la Vierge à l’Enfant tient la position privilégiée. Située au centre de la façade, c’est envers elle que se dirigent les trois Mages et Otton IV. Sans aucun doute, en tant que symbole de l’Église et de son représentant Adolphe d’Altena, la Vierge à l’Enfant domine la scène, place qui correspond, en effet, au poids que l’archevêque prétend tenir dans l’avènement du roi des Romains. Lui-même avait souligné cette place de première importance à l’occasion de l’élection de Philippe de Souabe en 1198, qu’il considérait comme invalide car lui et d’autres électeurs n’avaient pas donné leur accord. Comme nous l’avons montré plus haut, son consentement, qui arrive seulement en 1204, est également marqué par une association entre ce roi et les Rois mages.
37Cette analogie, qui se manifeste pour les deux premières fois vers 1200 et en 1205 nous paraît donc une conception de l’archevêque de Cologne pour montrer son propre poids dans l’avènement du roi des Romains. Elle exprime la légitimité du roi, mais cette légitimité est garantie aux yeux de l’archevêque uniquement grâce à son propre assentiment, car c’est lui qui tient le rôle le plus important dans l’Adoration des Mages sur la châsse de Cologne et pour l’accession au trône d’Otton IV, puis de Philippe de Souabe.
38La représentation iconographique apparaît ici comme un instrument fondamental pour transmettre cette conception propre à l’archevêque au sujet de la représentation politique. Le roi est ainsi montré comme ayant acquis le statut de représentant du peuple uniquement grâce au mandat qu’il a reçu de la part de l’archevêque de Cologne. Nous avons donc affaire à une image fortement politisée, qui porte une réflexion complexe concernant la position du roi et les éléments qui lui confèrent la légitimité en tant que représentant politique. Et ce message est constamment rappelé à tous ceux qui entrent dans la cathédrale de Cologne et s’approchent du cœur, où le reliquaire est placé depuis les années 1200 jusqu’à aujourd’hui. En effet, la façade portant l’image d’Otton IV en Roi mage est tournée vers l’intérieur de l’église et les figures sont assez grandes pour que tous les détails soient perceptibles à l’œil nu.
39Sans être les seuls à qui cette image est censée transmettre ce message, les rois médiévaux sont sans aucun doute ses destinataires privilégiés. En effet, il n’est peut-être pas anodin qu’à partir du milieu du xiiie jusqu’à la fin du xvie siècle, immédiatement après le couronnement à Aix-la-Chapelle, chaque roi des Romains fait un voyage à Cologne, comme nous avons montré plus haut. Mais une entrée royale dans une ville n’est pas concevable à cette époque sans une visite de l’église principale et de ses reliques69. C’est ainsi que, après le couronnement, chaque roi des Romains est amené à voir le reliquaire des Mages et cette image d’Otton IV en Roi mage. Cette image semble donc avoir une importante portée politique, elle semble transmettre à chaque roi, et à toutes les personnes qui entrent dans la cathédrale, la conception de l’archevêque de Cologne concernant la représentation politique et le mandat que lui-même, sa ville et les autres électeurs ont donné au roi des Romains.
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Notes de bas de page
1Lauer Rolf, Der Schrein der Heiligen Drei Könige, Cologne, Kölner Dom, 2006, p. 7 sq. Aucun document ne permet de savoir le moment précis où la façade est réalisée.
2Petersohn Jürgen, « Der König ohne Krone und Mantel », in Jürgen Petersohn (dir.), Überlieferung – Frömmigkeit – Bildung als Leitthema der Geschichtsforschung. Vorträge beim wissenschaftlichen Kolloquium zum Anlaß des 80. Geburtstages von Otto Meyer, Würzburg 25. Oktober 1986, Wiesbaden, Ludwig Reichert, 1987, p. 66 sq.
3Torsy Jakob, « Achthundert Jahre Dreikönigsverehrung in Köln 1164-1964 », in Joseph Hoster (dir.), Kölner Domblatt, Cologne, J. P. Bachem, 1964, p. 28-31 ; Hoster Joseph, « Zur Form der Stirnseite des Dreikönigenschreins », in Peter Bloch et Joseph Hoster (dir.), Miscellanea pro arte Hermann Schnitzler zur Vollendung des 60. Lebensjahres an 13. Januar 1965, Düsseldorf, L. Schwann, 1965, p. 206 sq ; Hofmann Hans, Die Heiligen drei Könige : zur Heiligenverehrung im kirchlichen, gesellschaftlichen und politischen Leben des Mittelalters, Bonn, L. Röhrscheid, 1975, p. 303-307 ; Stehkämper Hugo, « Könige und Heilige Drei Könige », in Rainer Budde (dir.), Die Heiligen Drei Könige, Darstellung und Verehrung : Katalog zur Ausstellung des Wallraf-Richartz-Museums in der Josef-Haubrich-Kunsthalle Köln, 1. Dezember 1982 bis 30. Januar 1983, Cologne, Wallraf-Richartz-Museum, 1982, p. 37-38 ; Trexler Richard C., The Journey of the Magi : Meanings in History of a Christian Story, Princeton, Princeton University Press, 1997, p. 79 ; Schwedler Gerald, « Ritualinnovation. Zur Gestaltung politischliturgischer Zeremonien im Spätmittelalter am Beispiel der Pariser Dreikönigsmesse im Jahre 1378 », in Burckhard Dücker et Gerald Schwedler (dir.), Das Ursprüngliche und das Neue : zur Dynamik ritueller Prozesse in Geschichte und Gegenwart, Münster, Lit, 2008, p. 158.
4Knipping Richard (dir.), Die Regesten der Erzbischöfe von Köln im Mittelalter, Bonn, P. Hanstein, 1901, vol. 2, p. 322.
5Aucun document ne permet de savoir qui a conçu l’iconographie et qui a financée la décoration de cette partie du reliquaire. La meilleure étude concernant la question des commanditaires est celle de Werbke Axel et Werbke Martina, « Theologie, Politik und Diplomatie am Dreikönigenschrein : die Ikonographie der Frontseite », Wallraf-Richartz-Jahrbuch, 1985, vol. 46, p. 7‑73.
6Ibid., p. 44-45.
7Ibid., p. 48.
8Petersohn Jürgen, « Der König ohne Krone und Mantel », art. cité, p. 58 sq.
9Sintomer Yves, « Les sens de la représentation politique : usages et mésusages d’une notion », Raisons politiques, no 50, 2013, p. 13-34.
10Pour ces évolutions, voir notamment Schmidt Ulrich, Königswahl und Thronfolge im 12. Jahrhundert, Cologne, Böhlau, 1987.
11Ibid., p. 173-224.
12Ibid., p. 227-230, Stehkämper Hugo, « Der Kölner Erzbischof Adolf von Altena und die deutsche Königswahl (1195-1205) », in Theodor Schieder (dir.), Beiträge zur Geschichte des mittelalterlichen deutschen Königtums, Munich, Oldenbourg Wissenschaftsverlag, 1973, p. 21-22.
13Schmidt Ulrich, op. cit., p. 256.
14La meilleure analyse de la position de cet archevêque contre les Hohenstaufen est faite par Stehkämper Hugo, « Der Kölner Erzbischof Adolf von Altena und die deutsche Königswahl (1195-1205) », art. cité.
15Schmidt Ulrich, op. cit., p. 259-260.
16Erkens Franz-Reiner, Der Erzbischof von Köln und die deutsche Königswahl : Studien zur Kölner Kirchengeschichte, zum Krönungsrecht und zur Verfassung des Reiches Mitte 12. Jahrhundert bis 1806, Siegburg, Franz Schmitt, 1987, p. 19-21.
17Stehkämper Hugo, « Der Kölner Erzbischof Adolf von Altena und die deutsche Königswahl (1195-1205) », art. cité, p. 15-17.
18Erkens Franz-Reiner, Der Erzbischof von Köln und die deutsche Königswahl, op. cit., p. 21-23.
19Stehkämper Hugo, « Der Kölner Erzbischof Adolf von Altena und die deutsche Königswahl (1195-1205) », art. cité, p. 34-35.
20Erkens Franz-Reiner, Der Erzbischof von Köln und die deutsche Königswahl, op. cit., p. 25 ; Stehkämper Hugo, « Der Kölner Erzbischof Adolf von Altena und die deutsche Königswahl (1195-1205) », art. cité, p. 44-45.
21Schmidt Ulrich, op. cit., p. 258.
22Stehkämper Hugo, « Der Kölner Erzbischof Adolf von Altena und die deutsche Königswahl (1195-1205) », art. cité, p. 40.
23Ibid., p. 44-45. Pour les autres participants à l’élection, voir Rodenberg Carl, Über wiederholte deutsche Königswahlen im 13. Jahrhundert, Breslau, W. Koebner, 1889, p. 6 et Erkens Franz-Reiner, Kurfürsten und Königswahl : zu neuen Theorien über den Königswahlparagraphen im Sachsenspiegel und die Entstehung des Kurfürstenkollegiums, Hannovre, Hahnsche Buchhandlung, 2002, p. 55.
24Stehkämper Hugo, « Der Kölner Erzbischof Adolf von Altena und die deutsche Königswahl (1195-1205) », art. cité, p. 48.
25Erkens Franz-Reiner, Der Erzbischof von Köln und die deutsche Königswahl, op. cit., p. 29.
26Stehkämper Hugo, « England und die Stadt Köln als Wahlmacher König Ottos IV. (1198) », in Hugo Stehkämper (dir.), Köln, das Reich und Europa : Abhandlungen über weiträumige Verflechtungen der Stadt Köln in Politik, Recht und Wirtschaft im Mittelalter, Cologne, P. Neubner, 1971, p. 213‑244.
27Knipping Richard (dir.), op. cit., p. 314-315. Pour les autres participants à l’élection, voir également Rodenberg Carl, op. cit., p. 15.
28Knipping Richard (dir.), op. cit., p. 315-316.
29Stehkämper Hugo, « Der Kölner Erzbischof Adolf von Altena und die deutsche Königswahl (1195-1205) », art. cité, p. 48.
30Le droit de couronnement des rois des Romains a été concédé à l’archevêque de Cologne par un privilège du pape Léon IX, le 7 mai 1052. À ce sujet, voir Heinz Wolter, « Das Privileg Leos IX. für die Kölner Kirche vom 7. Mai 1052 (JL. 4271) », in Egon Boshof et Heinz Wolter (dir.), Rechtsgeschichtlich-diplomatische Studien zu frühmittelalterlichen Papsturkunden, Cologne/Vienne, Böhlau, 1976, p. 101-151 et Franz-Reiner Erkens, « Ex jure regni debitus coronator : Zum Krönungsrecht des Kölner Erzbischofs », Zeitschrift des Aachener Geschichtsvereins, 2002/2003, no 104/105, p. 25-49.
31Stehkämper Hugo, « Der Kölner Erzbischof Adolf von Altena und die deutsche Königswahl (1195-1205) », art. cité, p. 58.
32Sur la réaction du pape aux événements de 1198, voir notamment Stehkämper Hugo, « Der Kölner Erzbischof Adolf von Altena und die deutsche Königswahl (1195-1205) », art. cité, p. 59-70.
33Petersohn Jürgen, « Der König ohne Krone und Mantel », art. cité, p. 54.
34Stehkämper Hugo, « Der Kölner Erzbischof Adolf von Altena und die deutsche Königswahl (1195-1205) », art. cité, p. 61-62.
35Ibid., p. 63, 78-79.
36Ibi rex, consilio cum suis habito, ut principes suam liberam electionem secundum antiquitatis institutum non perdant, regium nomen, et coronam deponit et ut concorditer ab omnibus eligatur precatur, Knipping Richard (dir.), op. cit., p. 341. La source reprise dans cet ouvrage est une chronique rédigée à Cologne, Georg Waitz (dir.), Chronica regia Coloniensis (Annales maximi Colonienses), cum continuationibus in monasterio S. Pantaleonis scriptis aliisque historiae Coloniensis monumentis, Hannovre, Impensis bibliopolii Hahniani, 1880, p. 219-220.
37La majeure partie des historiens considèrent qu’il s’agit en effet d’une nouvelle élection. À ce sujet, voir notamment Stehkämper Hugo, « Der Kölner Erzbischof Adolf von Altena und die deutsche Königswahl (1195-1205) », art. cité, p. 71-75 ; Erkens Franz-Reiner, Kurfürsten und Königswahl, op. cit., p. 66 sq.
38Pour cette hypothèse, voir Rodenberg Carl, op. cit., p. 6-14 et Erkens Franz-Reiner, Der Erzbischof von Köln und die deutsche Königswahl, op. cit., p. 37.
39Les sources qui mentionnent l’événement comme un couronnement sont citées par Rodenberg Carl, op. cit., p. 9, n. 3.
40Erkens Franz-Reiner, Der Erzbischof von Köln und die deutsche Königswahl, op. cit., p. 37-38. Pour les autres participants à cette cérémonie, voir également Rodenberg Carl, op. cit., p. 8.
41Stehkämper Hugo, « Der Kölner Erzbischof Adolf von Altena und die deutsche Königswahl », art cité, p. 75 sq.
42Erkens Franz-Reiner, Der Erzbischof von Köln und die deutsche Königswahl, op. cit., p. 28-39.
43Knipping Richard (dir.), op. cit., p. 341.
44Torsy Jakob, « Achthundert Jahre Dreikönigsverehrung in Köln 1164-1964 », art. cité, p. 35-41.
45L’ordo utilisé pour les couronnements des rois des Romains à cette époque est édité par Elze Reinhard et Vogel Cyrille (dir.), « Incipit ordo ad regem benedicendum quando novus a clero et populo sublimatur in regnum », in Le Pontifical romano-germanique du xe siècle, Cité du Vatican, Biblioteca apostolica vaticana, 1963, p. 246‑259.
46Ce nouvel ordo a été tout d’abord daté de 1273, puis de 1309. Nous suivons ici l’hypothèse plus récente et bien argumentée d’Andreas Büttner, qui date cet ordo des années 1325. Büttner Andreas, Der Weg zur Krone : Rituale der Herrschererhebung im spätmittelalterlichen Reich, Ostfildern, Jan Thorbecke, 2012, vol. 1, p. 131-141.
47Pertz Georg Heinrich (dir.), « Coronatio Aquisgranensis. Ordo coronationis », in Georg Heinrich Pertz (dir.), MGH LL, Hannovre, Hahn, 1837, vol. 2, no 1, p. 384‑393.
48Sur ces voyages, voir notamment Helmrath Johannes, « Die Stadt Köln im Itinerar der Könige des Mittelalters », Geschichte in Köln, 1979, no 4, p. 51‑94 et Stehkämper Hugo, « Könige und Heilige Drei Könige », art. cité.
49Le contexte du changement du lieu du couronnement est analysé par Dotzauer Wilfried, « Die Ausformung der frühneuzeitlichen deutschen Thronerhebung. Stellenwert, Handlung und Zeremoniell unter dem Einfluß von Säkularisation und Reformation », in Egon Boshof (dir.), Archiv für Kulturgeschichte, Cologne/Vienne, Böhlau, 1986, vol. 68, no 2, p. 70.
50Stehkämper Hugo, « Könige und Heilige Drei Könige », art. cité, p. 37-38.
51Werbke Axel et Werbke Martina, « Theologie, Politik und Diplomatie am Dreikönigenschrein : die Ikonographie der Frontseite », art. cité, passim.
52Ibid., notamment p. 31, 47-48.
53Dans la vaste littérature du sujet, voir notamment Plumpe Joseph C., Mater Ecclesia, an Inquiry into the Concept of the Church as Mother in Early Christianity, Washington, The Catholic University of America Press, 1943 ; Laurentin René, Maria, Ecclesia, sacerdotium. 1. Essai sur le développement d’une idée religieuse, Paris, Nouvelles éditions latines, 1953 ; De Lubac Henri, Méditation sur l’Église, Paris, Aubier/Montaigne, 1968, p. 266-324 ; Thérel Marie-Louise, Le Triomphe de la Vierge-Église : à l’origine du décor du portail occidental de Notre-Dame de Senlis sources historiques, littéraires et iconographiques, Paris, Éd. du CNRS, 1984, p. 78-202.
54De nombreux textes sont cités par De Lubac Henri, op. cit., p. 270-279 ; Thérel Marie-Louise, op. cit., notamment p. 78-88.
55Baynast Agnès, « Les Mages comme figure de la conversion dans l’Antiquité tardive », in Jean-Marc Vercruysse (dir.), Les (Rois) mages, Arras, Artois Presses université, 2011, p. 39‑57.
56Ibid., p. 90-92.
57Ibid., p. 99-116.
58Sans pouvoir approfondir dans cette étude la question très complexe de l’évolution du terme ecclesia nous tentons ici un très bref résumé, suivant l’étude de Congar Yves, L’Église : de saint Augustin à l’époque moderne, Paris, Cerf, 1996, notamment p. 19-49, 89-122. L’auteur montre l’évolution de ce terme de l’acception que lui donne saint Augustin (communauté des croyants) vers un sens plus restreint, paru au ixe siècle mais développé notamment au xie siècle. À cette époque, ecclesia désigne le plus souvent les membres du clergé, bien différenciés du reste de la société chrétienne, appelée christianitas ou populus christianus. Certes, cette acception du terme n’écarte pas complètement la première, les deux fonctionnant en parallèle tout au long du Moyen Âge. À ce sujet, voir également Idem, « “Ecclesia” et “populus (fidelis)” dans l’ecclésiologie de saint Thomas », in Yves Congar, Église et papauté : regards historiques, Paris, Cerf, 1994, p. 212‑227.
59Beaud Mathieu, Iconographie et art monumental dans l’espace féodal du xe au xiie siècle : le thème des Rois mages et sa diffusion, Dijon, thèse soutenue à l’université de Bourgogne, 2012, p. 209. Les principales conclusions de ce travail sont reprises dans Beaud Mathieu, « Les Rois mages. Iconographie et art monumental dans l’espace féodal (xe-xiie siècle) », Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre, vol. 17, no 1, 2013, p. 1-28.
60Beaud Mathieu, Iconographie et art monumental, op. cit., p. 211-213.
61Trexler Richard C., « Dreams of the Three Kings », in Richard C. Trexler (dir.), Religion in Social Context in Europe and America, 1200-1700, Tempe, Arizona Center for Medieval and Renaissance Studies, 2002, p. 93 sq. L’auteur retrouve cette même configuration également dans une vision de Françoise Romaine (1384-1440), trop complexe pour être détaillée ici.
62De Schönau Élisabeth, Visions, traduit par Jean-Pierre Troadec, Paris, Cerf, 2009, p. 71, 89-90.
63Trexler Richard C., « Dreams of the Three Kings », art. cité, p. 94‑100.
64Elze Reinhard et Vogel Cyrille (dir.), « Incipit ordo ad regem benedicendum quando novus a clero et populo sublimatur in regnum », art. cité. Une offrande du roi à ce moment de la messe est explicitement mentionnée dans le nouvel ordo rédigé vers 1325, Pertz Georg Heinrich, « Coronatio Aquisgranensis. Ordo coronationis », art. cité, p. 392.
65Elze Reinhard, « Der Ordo Cencius II », in Reinhard Elze (dir.), Die » Ordines « für die Weihe und Krönung des Kaisers und der Kaiserin : [ » Ordines coronationis imperialis « ], Hannover, Hahnsche Buchhandlung, 1960, p. 46 ; dans le même volume, « Der Staufische Ordo », p. 68.
66Pour l’ensemble du programme iconographique, voir notamment Lauer Rolf, op. cit., p. 16 sq.
67Werbke Axel et Werbke Martina, « Theologie, Politik und Diplomatie am Dreikönigenschrein : die Ikonographie der Frontseite », art. cité, p. 30-31.
68Ibid., p. 30, 41.
69Gerrit Jasper Schenk, Zeremoniell und Politik. Herrschereinzüge im spätmittelalterlichen Reich, Cologne/Weimar/Vienne, Böhlau, 2003, p. 373-381. Pour les voyages des rois des Romains et les entrées dans les villes, voir également Anna Maria Drabek, Reisen und Reisezeremoniell der römischdeutschen Herrscher im Spätmittelalter, Vienne, H. Geyer, 1964.
Auteur
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Doina-Elena Craciun
Chercheuse indépendante et travaille principalement sur les liens entre religion et politique au Moyen Âge. Elle a soutenu sa thèse intitulée Les Rois Mages, images du pouvoir des rois en Occident (xiie-xvie siècles) à l’École des hautes études en sciences sociales.

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