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    Plan détaillé Texte intégral L’eau, une ressource limitée pour des villes en expansion La concession, un outil d’attribution entre les villes et le roi La concession d’eau, reflet de la société Conclusion Notes de bas de page Auteurs

    La nature sous contrat

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    Table des matières

    « Sans porter préjudice au public » ?

    Concéder l’eau à Marseille et Paris au xviie siècle

    Raphaël Morera et Lavinia Maddaluno

    p. 57-74

    Texte intégral L’eau, une ressource limitée pour des villes en expansion La concession, un outil d’attribution entre les villes et le roi La concession d’eau, reflet de la société Conclusion Notes de bas de page Auteurs

    Texte intégral

    1La distribution de l’eau en ville s’inscrit dans une histoire longue. Depuis Rome, au moins, l’approvisionnement puis la répartition de l’eau mobilise l’attention des techniciens, des juristes et administrateurs comme des citadins1. La mise à disposition d’une eau de qualité apparaît en effet comme une nécessité évidente du développement urbain. L’historiographie a pourtant longtemps négligé ce point pour la période moderne. En 1984, pour Daniel Roche, le xviiie siècle correspondait aux temps l’eau rare2. Dans cette optique, également présente dans les rapports hygiénistes du xixe siècle, les puits tenaient une place considérable3. Longtemps l’histoire de l’approvisionnement est ainsi restée associée à celle du progrès technique et de la diffusion des machines hydrauliques capables de remonter l’eau depuis les rivières le long desquelles les villes étaient construites. Deux modèles d’approvisionnement ont ainsi été identifiés4. À la France, le modèle d’une innovation contrôlée par la Monarchie où l’eau a d’abord un sens politique. À l’Angleterre, celui d’une innovation orientée vers la quête du profit, où l’eau devient rapidement un produit. Ce n’est que très récemment que cette opposition schématique a été questionnée et battue en brèche par Patrick Fournier dont les travaux ont montré la forte dynamique de changement à l’œuvre en matière d’approvisionnement dans les villes françaises5.

    2L’approvisionnement fait émerger la question de la distribution : à qui sont destinées ces eaux apportées à grands frais dans les enceintes urbaines ? Bénéficient-elles aux villes et à leur population « en général », ou sont-elles destinées à certains plus qu’à d’autres ? Même s’il semble intuitivement difficile de considérer que, dans une société d’ordres les usages urbains de l’eau n’expriment aucune hiérarchie, l’historiographie reste très pauvre sur ce point. La thèse récente de Constance de Font-Réaulx porte à juste titre l’attention sur les porteurs d’eau et la logistique des derniers mètres de l’approvisionnement tout en laissant ouverte la question de la distribution à domicile6. Le travail de Florian Horrein, questionnant d’emblée les concessions, s’attache essentiellement aux enjeux techniques de l’acheminement de l’eau. Ces recherches récentes ouvrent ainsi des perspectives intéressantes quant à la répartition de la ressource en eau et incitent à discerner à qui, finalement, l’eau captée et conduite en ville était destinée7.

    3Les cas marseillais et parisien constituent deux terrains d’observations remarquables. Les archives regorgent de mentions de concessions : un parcours dans les délibérations des échevinages parisiens et marseillais fait rapidement comprendre que l’eau était répartie grâce à des concessions et qu’elle ne bénéficiait pas à tous de la même manière8. De même, les deux villes sont à partir des années 1660 affectées par la mise en œuvre d’une « nouvelle politique de la ville9 ». Louis XIV promeut en effet un modèle de gestion urbaine plus centralisé et davantage soucieux de bonne police10. La création de la lieutenance de police à Paris et le renforcement du pouvoir de l’intendant à Marseille sont les marqueurs de cette dynamique institutionnelle et politique11. Dans les deux villes, ces mutations justifient la conduite d’enquêtes administratives sur la répartition de l’eau et sur les concessions accordées, signe d’un nouveau regard sur la question de l’eau.

    4La politique urbaine du jeune Louis XIV, dans sa dimension pratique et administrative, offre ainsi l’occasion de cerner les contours du régime concessionnaire de l’eau urbaine : comment fonctionnait-il ? Quels en étaient les fondements juridiques, mais aussi pratiques et symboliques ? En quoi les concessions d’eau participaient-elles d’une affirmation de la ville elle-même ? Pour aborder ces questions, il nous faudra en premier lieu mesurer les difficultés spécifiques d’approvisionnement dans des contextes de croissance urbaine, avant de revenir sur le fonctionnement concret du régime concessionnaire et de voir en quoi il exprimait une vision de la ville elle-même.

    L’eau, une ressource limitée pour des villes en expansion

    5Les armatures urbaines de Paris et Marseille ont été dessinées au cours du Moyen Âge. Si leurs rythmes de croissance ont été assez tôt différenciés, en raison du dynamisme parisien, toutes deux ont dû s’équiper pour aller chercher de l’eau au-delà des strictes limites de la ville. Paris bénéficiait certes de la présence de la Seine et de nombreux puits, mais tout comme Marseille, la construction d’aqueducs s’est rapidement avérée nécessaire. L’extension urbaine impliquait la mobilisation toujours plus importante de ressources distantes. L’environnement urbain ne peut ainsi être compris sans ses liens profonds son arrière-pays12.

    6Vieux port méditerranéen, Marseille doit au Moyen Âge et à l’époque moderne faire face à des difficultés spécifiques en matière d’approvisionnement en eau : il s’agit à la fois de fournir de l’eau de boisson aux Marseillais et aux artisans. Or, la ville ne bénéficie pas en son sein de ressources suffisantes. Les puits ne sont pas fiables et l’Huveaune, dans le bassin versant duquel elle se trouve, ne fait que contourner l’espace urbanisé. Dans ces conditions, les édiles marseillais ont dès le xiiie siècle choisi de faire construire un aqueduc captant une partie de l’Huveaune pour l’amener directement au centre de la ville à proximité des lieux de consommation et d’usage. L’étude récente des vestiges archéologiques confirme la datation de la construction de cet aqueduc, sans doute sur un nouvel itinéraire13. Les historiens de l’époque moderne précisent davantage les conditions dans lesquelles son tracé a été décidé. En 1246, Charles d’Anjou, dans le sillage de la croisade menée par son frère, prend la ville de Marseille. Soucieux d’asseoir son autorité, il entreprend d’unifier l’espace marseillais en négociant avec l’épiscopat local, très richement doté. Le processus, tout à la fois juridique et politique, prend plusieurs années et se consolide à la faveur d’une convention. Le texte fixant les conditions de la prise de contrôle de la ville par Charles d’Anjou prévoit « que les forteresses, qu’ils [les Marseillais] avoient bâties aux confins de leur terroir seroient rasées, & leurs fossés comblés, & que neanmoins les pierres, bois & merrein qui proviendroient de cette demolition leur demeureroit, pour en païer leurs dettes, ou pour la construction de leurs aqueducs14 ». L’aqueduc de la ville s’ancre ainsi dans l’histoire d’une négociation entre les pouvoirs urbains et le comte Charles d’Anjou qui, en autorisant les élites économiques de la ville à accroître leur approvisionnement en eau, s’assurait en retour d’une certaine fidélité de leur part. Selon cette version, la construction de l’aqueduc apparaît bien être le fruit d’une initiative urbaine qui ne serait toutefois arrivée à terme qu’au cours de la première moitié du xive siècle.

    7Érigé au xiiie siècle, l’aqueduc marseillais fait en tout cas clairement partie des attributs de la ville au xvie siècle. Aucun plan dressé à l’époque ne l’omet, permettant ainsi de bien saisir son tracé et sa destination. Le plan Negri le fait ainsi jaillir de l’est de la ville, soutenu par de puissantes arches, et achevant son trajet à la porte des Carmes15. Dessiné 54 ans plus tard, le plan Maretz confirme son parcours sans apporter de précisions sur le parcours de l’eau à l’intérieur de l’enceinte urbaine16. Les archives du début du xviie siècle ne permettent pas de saisir davantage les modalités de distribution dans la ville. Les textes ultérieurs montrent en revanche assez clairement que l’échevinage marseillais utilisait l’infrastructure pour distribuer l’eau via des fontaines publiques en considérant leur utilité au service de la collectivité.

    8Le recours à des grandes infrastructures hydrauliques participent d’une logique dans un premier temps tout à fait comparable à Paris. L’héritage de Lutèce gallo-romaine était encore clairement visible dans le Paris médiéval : les thermes de Cluny et l’aqueduc de Rungis, construit dans sa première version au iiie siècle, étaient tous deux encore visibles17. Reprendre ces équipements était cependant impossible pour les édiles parisiens du Moyen Âge qui choisirent de recourir aux sources plus facilement accessibles du Nord-Est parisien. Au xiiie siècle, les échevins entreprennent la construction des aqueducs de Belleville et du Pré Saint-Gervais dont les conduites alimentent la rive droite de la ville18. Les eaux du Pré Saint-Germain sont prioritairement orientées vers le quartier des Halles et celles de Belleville vers le Marais. En matière d’aménagement parisien, le roi n’est jamais bien loin, mais la construction de ces aqueducs relève bien directement de l’autorité de la municipalité, jalouse de ses prérogatives sur l’eau de la ville. Tout comme à Marseille, l’approvisionnement en eau relève bien d’une compétence de type public, en ce qu’elle est une absolue nécessité pour la vie collective.

    9Le cas parisien se distingue par contre fortement du cas marseillais en ce que l’intervention royale n’est pas uniquement normative ou administrative. En effet, la présence du roi dans la ville prend une dimension très concrète et très monumentale y compris en matière d’hydraulique. La fin du règne d’Henri IV et le début de la Régence de Marie de Médicis sont ainsi marqués par deux réalisations d’importance19. En 1608, Henri IV confie à Jean Lintlaër, mécanicien brabançon, l’édification de la machine de la Samaritaine, à proximité immédiate du Pont-Neuf20. Inspiré par une pratique répandue dans les villes de l’espace germanique, le roi souhaite faire pomper l’eau de la Seine par une machine hydraulique afin d’accroître substantiellement la quantité disponible dans la capitale, notamment rive droite21. En lien avec le programme somptuaire du palais du Luxembourg, Marie de Médicis prolonge cette initiative par la construction de l’aqueduc Médicis dont le but était, tout en reprenant un tracé antique, d’accroître très fortement la quantité d’eau de bonne qualité disponible rive gauche, et notamment aux alentours de son palais nouvellement construit. Dès 1620, les eaux de Rungis sont ainsi directement acheminées à Paris contribuant à accroître l’eau disponible. Cet augmentation est d’autant plus significative que les besoins en eau de production sont, à la différence de Marseille, couverts par des cours d’eau locaux, la Seine et la Bièvre22.

    10À Paris comme à Marseille, et même si les puits ou les porteurs approvisionnent la population, l’économie de l’eau est structurée par l’intervention des pouvoirs municipaux ou politiques. La conception et l’entretien des infrastructures sont entre leurs mains si bien qu’il leur revient également de répartir la ressource. La concession est dans ce cadre leur outil préférentiel.

    La concession, un outil d’attribution entre les villes et le roi

    11Dans le droit coutumier du royaume de France, la propriété de l’eau dérive de celle de la terre dont elle est une servitude. Les propriétaires de fonds peuvent jouir librement de l’eau s’y écoulant, à la réserve toutefois de ne pas nuire à leurs voisins. Ce cadre assez lâche est fortement contraint par une autre règle beaucoup moins évidente. Les coutumes et le droit monarchiques distinguent les écoulements naturels des écoulements artificiels ou canalisés. À défaut d’intervention humaine, un cours d’eau, quel que fût sa nature, n’est pas susceptible d’appropriation. En revanche, les canalisations transforment la nature de l’eau. En empruntant une voie construite de mains d’hommes, l’eau devient la propriété de son auteur. Ce point juridique est d’une importance fondamentale dans le système français. En cas de litige, elle permet de partager les responsabilités. Dans le cadre de projets d’aménagement, elle permet d’assurer un minimum de rentabilité. En ville, elle a des effets immédiats : en empruntant des aqueducs construits par les villes de Paris ou Marseille, ou par le roi, l’eau devient de jure leur chose. Par leurs investissements dans des équipements puis par leur entretien, les villes et le roi acquièrent la capacité de disposer à leur guise d’une ressource nécessaire au développement urbain.

    12La pratique de la concession s’immisce à cet instant précis où l’institution doit rendre au public ce qu’elle a acquis et où, finalement, elle trouve sa justification. À Marseille comme à Paris, il appartient à l’échevinage de concéder l’eau aux particuliers qui en font la demande. Les registres de délibérations du Bureau de la Ville décrivent pour Paris une procédure bien rodée. Les échevins reçoivent les demandes qu’ils instruisent avant d’y accéder ou non. La décision, collective, est prise à l’issue d’une délibération et d’un vote. Les concessions sont systématiquement accordées pour un temps et pour une quantité limitée. Tout est fait pour que la ville garde le contrôle sur la ressource : il ne s’agit pas que le bénéficiaire d’une concession ne devienne le propriétaire de fait de la quantité d’eau autorisée, même si les contrôles sont en réalité difficiles à mettre en œuvre. Malgré les précautions prises, la facilité technique avec laquelle les détournements pouvaient être réalisés entraînait des abus multiples dont la sanction révèle bien le fonctionnement. Florian Horrein a retranscrit le compte rendu de la commission du Bureau de la Ville réunie à cette fin le 12 août 165423. Le prévôt de marchands, trois échevins et un commissaire de la ville examinent les demandes en lot et concèdent douze prises d’eau en une seule séance. Les concessions profitent à des profils sociaux différents, le duc de la Vieuville comme les habitants de la commune de Pantin, vivant à proximité du passage de l’aqueduc du pré Saint Gervais. La commission s’appuie sur des informations précises et sur une connaissance préalable des concessions accordées. Ainsi, le seigneur de Maudine, se voit accorder deux lignes d’eau supplémentaires aux deux lignes qui avaient été accordées à son père en 1628.

    13Le cadre coutumier marseillais apparaît plus lâche et moins contrôlé. Les statuts de la ville de Marseille se montrent assez laconiques sur la question de la distribution de l’eau. Son chapitre 60 dispose seulement que :

    « Sur la distribution des eaux, entre les jardiniers, les prés, les moulins & autres engins utiles & necessaires au public, est intervenu reglement, qui contient les jours & les heures assignées à chacun pour son usage. De cette matière, voyez la constitution de Justinien […] traduite du Grec en Latin, dont voicy les paroles, eosdem etiam ea, que vocantur leges aquae, quae ex divina forma à quibusdam facta sunt inquirere volumus, ne ille quidem plus habeat, hic vero minus, quam conveniat24, ce qui doit être religieusement observé, par raison et par équité25. »

    14La double origine des eaux distribuées à Paris conduit à la coexistence de deux systèmes d’entretien des réseaux d’adduction d’eau et donc deux systèmes de concessions. Dès 1609, la Ville de Paris reprend ainsi à son compte la gestion des fontaines de la ville en passant un marché d’entretien global avec un maître fontainier. Elle est également rapidement de nouveau sollicitée par les anciens bénéficiaires de ces dérivations qui souhaitent retrouver les usages qu’ils s’étaient arrogés. En 1612, la ville confie ainsi au Maître des Œuvres de la ville la tâche de rétablir les prises dont l’ancienneté est jugée avoir été suffisante. Parallèlement à cette remise en ordre, l’arrivée de nouvelles ressources en eau permet à la régente, puis au roi lui-même, de faire bénéficier de sa générosité ceux dont il estime le mérite suffisant. Les eaux royales, qu’elles viennent de Rungis ou de la machine de la Samaritaine, sont concédées sur une procédure tout à fait similaire, mais par la Maison du roi. Dans ce cadre, c’est le roi lui-même qui procède aux concessions. Elles sont accordées directement en Conseil du roi et bénéficient très majoritairement aux grands du royaume qui peuvent, en retour, jouir de ce bien comme bon leur semble, si bien que l’eau s’apparente à une libéralité, et la concession à un véritable don. Dans ce cadre, le roi lui-même assure l’entretien des infrastructures, qu’il s’agisse de l’aqueduc ou d’une machine élévatoire, mais les concessionnaires sont responsables des conduites qui acheminent l’eau jusqu’à leur résidence.

    15Un dossier conservé aux Archives nationales témoigne ainsi de l’existence d’un véritable commerce de l’eau courante, érigé sur le fondement des concessions monarchiques26. En 1655, Gaston d’Orléans, frère de Louis XIII, tient en concession un droit de vingt pouces d’eau issus de Rungis. La quantité allouée excédant sans doute ses besoins réels, Gaston valorise son droit de tirage en vendant son eau à des particuliers intéressés27. Il monnaye son droit le 26 novembre 1654 à Claude Robillard, seigneur de Brie, qui se livre par la suite à un commerce lucratif. Le 20 février 1655, Robillard vend 10 pouces d’eau pour un montant total de 10 000 livres divisés entre plusieurs acquéreurs prestigieux : François Fouquet, conseiller du roi, évêque et comte d’Agde en acquiert cinq pouces, Catherine de la Rochefoucauld, veuve d’Henri de Beauffremont, marquise de Sennecey et dame d’honneur d’Anne d’Autriche achète 2,5 pouces, les Capucines 1,8 pouces les Feuillants un pouce et les Jacobins un demi pouces. Enfin les deux financiers Séraphin de Mauroy et Nicolas Mignot en détournent quatre lignes chacun. Le 26 février 1655, ce contrat est complété par une autre transaction : Robillard vend un demi pouce d’eau à Nicolas de Villiers, marchand de soie et bourgeois de Paris, demeurant rue Saint-Denis pour un montant conséquent de 2 650 livres tournois payables en louis d’argent.

    16Au xviie siècle, le roi joue donc un rôle de plus en plus important dans la distribution d’eau dans la capitale et les droits qu’il accorde sont aussi des sources de revenus substantiels. Il n’éclipse cependant pas les municipalités qui, à Paris comme à Marseille, conservent leurs prérogatives sur les aqueducs les plus anciens, mais qui éprouvent les plus grandes difficultés à contrôler la réalité des usages et des usurpations. Elles ont pour cela besoin de l’appui d’autres juridictions. C’est en tout cas ce que laissent supposer les enquêtes lancées par la monarchie au sujet de l’état réel des prises d’eau dans les deux villes. En 1609, le pouvoir royal ordonne deux enquêtes concomitantes. Henri IV publie ainsi un édit sanctionnant toutes les prises d’eau pirates réalisées à Paris. Il ordonne en effet

    « que toutes lesdites fontaines privées et particullieres ès maisons de nostredicte bonne Ville, faulxbourgs et ès maisons de nostredicte bonne Ville, faulxbourgs et ès environs, qui ne servent aucunement au publicq, soient rompues et cassées reellement et de faict, et le cours d’icelle remis au conduict et canal publiq, excepté celles dont les conduits et canaulx distillent ès maisons de notre très cher et très amé cousin le conte de Soissons, les ducs de Guise et de Montmorancy, notre très chere et amée sœur la duchesse d’Angoulesme, celles des pauvres filles de l’ave Maria, des filles Dieu, Filles Penitentes et l’hospital de la Trinité en la rue Saint Denis, ensemble celle des Cordeliers reformez dicts recolletz aux faulxbourg Saint-Martin28 ».

    17La chronologie est identique à Marseille. Au sortir des temps particulièrement troublés des guerres de Religion, la municipalité recourt à l’autorité de la Cour de Parlement d’Aix pour lancer une enquête afin d’inventorier les concessions effectivement attribuées aux Marseillais29. L’enquête est ordonnée en 1599, mais elle n’est réalisée qu’en 1609. Elle s’étire sur près de 500 pages et recense 294 bénéficiaires de ces prises d’eau plus ou moins légales30.

    18Dans les archives marseillaises, la question de l’Huveaune et de ses usages occulte cependant celle de la distribution de l’eau, qui ne réapparaît clairement dans la documentation que dans les années 1680, à la faveur d’un épisode de sécheresse nécessitant un meilleur contrôle des usages de l’eau31. Dans ce contexte, le recours à l’autorité royale du roi apparaît de manière encore plus franche. En 1682,

    « Monsieur de Forville des Pilles […] gouverneur viguier, et messieurs les échevins de la ville de Marseille [enjoignent] à tous les habitants de cette ville et faux-bourg qui ont de fontaines dans leurs maisons ou jardins, de raporter aux archives de la communauté les titres qu’ils ont pour avoir prins de l’eau des aqueducs, ou des bourneaux et conduits qui sont dans la ville et avoir des fontaines32 ».

    19Sous la protection du gouverneur, c’est-à-dire du représentant du roi, la Ville procède donc à un contrôle des titres qu’elle était censée avoir accordés. En effet, l’eau est concédée par les échevins en réponse à une pétition, c’est-à-dire à une demande formulée directement à l’échevinage. L’intendant, qui réside à Aix, n’est pas mobilisé pour cette affaire, pourtant civile, en raison de la surveillance étroite dont la ville fait l’objet depuis 1660 et la nomination d’un gouverneur dédié. Dans les années 1690, l’intendant s’immisce de plus en plus directement dans les attributions de la Ville, dans un contexte où la fiscalité sur l’eau fait son apparition. Les édiles se tournent en premier lieu vers l’intendant afin qu’il les soutienne dans la reprise en main des conduites d’eau et, dans un second temps, un arrêt du Conseil du roi commet l’intendant « pour le soin et rétablissement des fontaines publiques de Marseille33 ».

    20La tutelle de l’État monarchique apparaît également assez forte en matière d’entretien. En effet, l’échevinage doit bien traiter avec l’intendant avant d’appointer un maçon titulaire afin de travailler sous la responsabilité du fontainier en charge de la supervision du réseau :

    « Joseph Chaulier chargé du soin et entretien des fontaines de la ville ne peut pas luy seul fournir à cet employ et mettre de l’eau à suffisance aux dites fontaines sous a la fois lors que le cas le requiert attendu l’agrandissement de la ville de quoy le public en souffre un notable préjudice […] nous maire Échevins de cette ville de Marseille après en avoir conféré avec M. l’Intendant de justice avons nommé […] sous le bon plaisir du Conseil Benoît Sevaud Me maçon de cette ville pour avoir le soin des fontaines de la ville sous les ordres du dit Chaulier34. »

    21De prime abord, le volontarisme monarchique dans la gestion des eaux marseillaises pourrait apparaître comme une mesure de rétorsion à l’égard d’une ville volontiers réfractaire à l’autorité du roi. En ce sens, l’histoire de la gestion de l’eau viendrait à l’appui d’une historiographie opposant le roi et Marseille. Une telle lecture se heurte cependant à une autre réalité : les modalités de gestion des concessions d’eau de Marseille sont remarquablement proches de celles de Paris. Cela signifie en d’autres termes que l’eau urbaine intéresse le roi, qu’il s’agisse de la capitale du royaume ou d’une ville rétive à son autorité. De la sorte, ces enquêtes mettent en lumière les fondements juridiques des concessions d’eau : les villes ne les octroient qu’en vertu d’une délégation de pouvoir. Dans ce cadre, la distribution de l’eau se fait à l’image de la société.

    La concession d’eau, reflet de la société

    22À Paris comme Marseille, l’eau circule dans un univers contrôlé et normé : l’outil de la concession offre apparemment une grande souplesse et laisse deviner les contours d’une économie fortement différenciée où chacun accède à l’eau de manière distincte en fonction de son rang et de son statut social. Il convient donc à ce stade de s’interroger sur l’utilisation de la concession d’eau dans la fabrique de la ville et de se demander si les similitudes observées dans les modalités de gestion valent également dans les conditions de distribution. En d’autres termes, les concessionnaires marseillais et parisiens ont-ils les mêmes profils économiques, sociaux et politiques ? La répartition de l’eau répond-elle aux mêmes logiques dans les deux villes ?

    23L’enquête sur la distribution des eaux de l’aqueduc au sein de la ville de Marseille réalisée à partir de 1682 sous l’égide du Gouverneur de Forville à la demande de la municipalité montre un usage de la concession orienté vers l’économie et la production artisanale. L’eau apportée dans la cité phocéenne par son aqueduc est en effet répartie de manière très favorable aux ateliers :

    Tableau 1. – Répartition des fontaines à Marseille, d’après l’enquête de 1682.

    Lieux

    Nombre de fontaines

    Artisans

    75

    Public

    57

    Établissements religieux

    32

    Hôpital

    6

    Officier du roi

    2

    AMM, DD 277.

    24L’approvisionnement des fontaines doit ainsi en premier lieu soutenir l’activité économique de la ville35. Tanneurs, teinturiers, bourreliers, savonniers, chamoiseurs, raffineurs et blanchisseurs emploient tous beaucoup d’eau dans leurs procédés de fabrication. Le travail du cuir occupe une place prépondérante dans cet ensemble, avec 35 installations sur 75. Les teinturiers, avec 27 emplacements, sont les deuxièmes destinataires. Dans ce panorama, les fontaines destinées au public et l’approvisionnement des Marseillais, sont le deuxième type d’installations. Elles sont assez équitablement distribuées dans la ville et dans de lieux apparemment accessibles : coins de rues, cours, parcs ou places. Les établissements religieux, réguliers ou séculiers, sont également bien représentés. Parmi eux figurent notamment six hôpitaux qui, par la force des choses, utilisaient leur dotation au service de la population. La faiblesse des autorités urbaines ou royale dans les lieux de distribution de l’eau confirme l’orientation principale de la logique de distribution de l’eau en direction des habitants et de l’économie urbaine36. Deux fontaines seulement sont ainsi situées dans des bâtiments civils officiels : la prison de la ville d’une part, et le fort d’autre part. Dans un contexte où les concessions sont orientées vers la production, une petite partie seulement de l’eau de l’aqueduc est mise au service de l’expression de l’autorité. D’autres sources sont disponibles dans la ville mais elles sont plus locales et leur gestion n’est pas institutionnalisée.

    25La distribution de l’eau des fontaines parisiennes s’inscrit dans un environnement très différent. À Paris, la Seine et la Bièvre offrent une ressource en eau abondante aux nombreuses activités artisanales de la capitale, au service de la production de biens manufacturés comme de la meunerie37. Les berges de la Seine font à ce titre l’objet de concession, pour les blanchisseries comme pour les moulins38. La Bièvre est quant à elle gérée de manière de plus en plus coordonnée au fil du siècle mais sans recours à l’outil de la concession. Les propriétaires riverains s’organisent en vertu des règles coutumières jusqu’aux années 1670 où se met progressivement en place une gestion syndicale aux mains des usagers eux-mêmes. La disponibilité en eau courante destine les fontaines parisiennes à de tous autres usages que celles de Marseille : les fontaines de Paris sont exclusivement dédiées à la boisson et à l’agrément.

    Tableau 2. – Répartition de l’eau des fontaines en lignes d’eau en 1669.

    Statuts

    Eaux de Belleville

    Eaux du Pré-Saint-Gervais

    Eaux de Rungis

    Total

    Public

    385

    540

    972

    1 897

    Étab. Rel. Réguliers

    66

    52

    307

    425

    Aristocratie

    32

    32

    309

    373

    Robe

    200

    48

    65

    313

    Hôpitaux

    35

    132

    167

    Bâtiments officiers

    63

    63

    Étab. Rel. Séculiers

    4

    6

    23

    33

    Indéfinis

    24

    24

    Bourgeois

    5

    15

    20

    Militaires

    3

    6

    9

    Financiers

    6

    6

    Scientifiques, artistes

    4

    4

    Nobles

    3

    3

    Total

    696

    737

    1 904

    3 337

    Une ligne équivaut à une ouverture 1/12 de pouce de diamètre soit 0,23 cm.

    AN, Q3 93.

    26Deux rôles de distribution de l’eau, dressés respectivement en 1669 et 1673 donnent une image détaillée des usages des fontaines de la ville, d’une part, et des concessions d’autre part. Les informations de ces enquêtes sont très précises mais ne tiennent pas compte de la pompe du Pont Neuf, pourtant construite depuis une soixantaine d’années. De même, ces enquêtes ont été dressées dans un contexte très particulier qui en explique les limites. La fin des années 1660 et le début des années 1670 sont tout d’abord marqués par une diminution des approvisionnements que l’on peut concurremment imputer à une relative sécheresse mais aussi à un défaut d’entretien. De même, la période est marquée par un très fort investissement du pouvoir monarchique dans l’espace parisien. Cette évolution est perceptible aussi bien du point de vue monumental que par la mise en œuvre d’une importante réforme de la police urbaine. Les enquêtes de 1669 et 1673, toutes deux conservées dans les archives du domaine du roi, sont donc une conséquence de ces évolutions et expriment l’effort produit par le roi pour s’affirmer dans l’espace parisien.

    27Ce contexte rend en grande partie compte des changements observés dans la distribution de l’eau entre deux enquêtes pourtant conduites à seulement quatre années d’intervalle. Le tableau de répartition de 1669 montre tout d’abord un très net déséquilibre entre les fontaines. Les deux-tiers de l’eau sont apportés par l’aqueduc de Rungis qui offre une eau de meilleure qualité. Or, l’eau de Rungis n’est qu’à 50 % distribuée vers les fontaines publiques contre près de 70 % pour les eaux de Belleville et du Pré-Saint-Gervais. L’aqueduc de Rungis, d’une construction plus récente, rive gauche de la capitale, bénéficie essentiellement aux plus proches du pouvoir et il est en ce sens le signe d’une distinction éminente. À l’inverse, les quelques roturiers qui bénéficient d’une concession privative n’y ont pas accès. À Paris, les concessions d’eau sont ainsi des outils politiques : elles permettent de dire un ordre social. De manière schématique, les aqueducs de la ville fournissent le public et l’aqueduc du roi dessert les personnalités éminentes, sans pour autant négliger les citadins. Cela permet en retour de saisir toute la valeur accordée à la jouissance privative de l’eau, qui n’est pas une fantaisie mais un confort apprécié et recherché.

    28La dimension apparemment politique de la concession d’eau parisienne s’accentue au cours du règne de Louis XIV. En 1673, une deuxième enquête sur la distribution laisse apparaître un panorama assez différent, illustrant la souplesse et la puissance de la concession, considérée en tant qu’outil de gestion (tableau 3).

    Tableau 3. – Répartition de l’eau des fontaines en lignes d’eau en 1673.

    Sources

    Eaux de Belleville

    Eaux du Pré-Saint-Gervais

    Eaux de Rungis

    Machine de Notre-Dame

    Total

    Eaux publiques

    72

    120

    168

    656

    1 016

    Aristocratie

    36

    112

    64

    425

    637

    Établ rel. réguliers

    70

    54

    295

    208

    627

    Robe

    231

    34

    70

    186

    521

    Hôpitaux

    6

    22

    112

    16

    156

    Bâtiments officiels

    12

    104

    116

    Indéfini

    8

    4

    2

    72

    86

    Étab. Rel. Séculiers

    16

    12

    44

    72

    Ville

    72

    72

    Bourgeois

    10

    12

    6

    10

    38

    Financiers

    32

    32

    Fondations royales

    24

    24

    Manufactures, artisans

    20

    20

    Militaires

    9

    6

    15

    Scientifiques, artistes

    4

    6

    10

    Métiers divers

    6

    6

    Noblesse

    6

    6

    Total

    453

    358

    800

    1 843

    3 454

    Une ligne équivaut à une ouverture 1/12 de pouce de diamètre soit 0,23 cm.

    AN, Q3 93.

    29Les quantités d’eau distribuées par les trois sources déjà existantes ont sensiblement évolué puisque le volume de liquide issu de Rungis a été divisé par deux et que la part de l’aristocratie a fortement décru. Plus, en dépit de la construction de la pompe Notre-Dame, le nombre de lignes d’eau potentiellement distribuées demeure étonnamment stable, puisque l’on passe en quatre ans de 3 337 lignes à 3 454 lignes. L’apparition de la machine Notre-Dame n’avait donc pas vocation à augmenter l’eau disponible pour les Parisiens. Il est même significatif de noter que le nombre de lignes destinées au public, c’est-à-dire dans les fontaines librement accessibles, diminuent de presque 50 % en passant de 1 897 à 1 016 lignes. Cette évolution défavorable au public est redoublée par le fait que désormais, l’eau du public est très majoritairement une eau de la Seine, et par conséquent une eau de médiocre qualité. Ce changement, qui traduit une conception de la ville, est rendu possible par la simplicité des techniques hydrauliques utilisées. Les conduits, souvent en plomb, sont enterrés à une faible profondeur, et la modification de leur parcours est assez aisée, d’autant qu’ils nécessitent un entretien régulier.

    30Les changements dans l’attribution des concessions n’affectent pas exclusivement le public : toutes les catégories de bénéficiaires sont en fait concernées. Entre 1669 et 1673, leur nombre augmente significativement en passant de 149 concessionnaires privés à 186. Dans le même temps toutefois, 23 d’entre eux perdent leurs droits et disparaissent du rôle. Cette évolution concerne notamment le Parlement de Paris, comme des aristocrates à l’image du duc de Conty ou du duc de Villeroy. Sans disparaître des tablettes, le Prince de Condé voit quant à lui sa quantité d’eau mise à disposition divisée par 12, passant de 144 à seulement 12 lignes. Des établissements religieux et des hôpitaux subissent également le même sort. À l’inverse, le rôle de 1673 fait apparaître 54 nouveaux concessionnaires. Ces évolutions accompagnent des changements notables dans l’administration de la ville. Parmi les bâtiments officiels, les droits de l’Hôtel de Ville sont augmentés tandis que les prisons apparaissent parmi les nouveaux destinataires. Dans cette logique, il s’agit bien de marquer la préférence accordée au Châtelet sur le Parlement, désormais privé d’eau. Au sein de l’aristocratie, les fidèles de Louis XIV sont gratifiés d’un accès à une eau privée. Le marquis de Louvois symbolise cette dynamique socio-politique. Pilier de la nouvelle armée développée sous l’égide du Roi-Soleil, il se voit nanti de 312 lignes d’eau, soit près de 10 % de la disponibilité potentielle39. Autre nouvel arrivant, le duc de Chevreuse, un éminent militaire, conseiller privé de Louis XIV et gendre de Colbert, est doté de 30 lignes d’eau seulement40. Cela représente dix fois moins que le marquis de Louvois mais correspond à la quantité accordée au duc de la Meilleraye (36 lignes) qui se trouve aussi être duc de Mazarin et petit-neveu de Richelieu41. Enfin, le bénéfice de 42 lignes accordées au gouverneur de Paris participe également de ce mouvement. En effet, entre 1669 et 1675 cette charge incombe à Gabriel de Rochechouart, duc de Mortemart, fidèle de Louis XIII, de Richelieu puis de Mazarin, érigé au rang de duc et pair en 1650, en pleine Fronde42. Un constat similaire peut être fait au sujet des gens de robe et des financiers. Les nouveaux arrivants dans le rôle que sont François Jérôme Tambonneau, Bouthillier, Nicolas Nicolay, Guillaume de Nesmond ou Henry de Fourcy sont tous issus de familles fidèles au pouvoir monarchique. En 1673, Tambonneau est président de la Chambre des comptes43 ; Nicolay est alors premier président de la Chambre des comptes de Paris et conseiller d’État en ses conseils privés et d’État44 ; de Nesmond a quant lui succédé à son père en tant que président à mortier du Parlement de Paris depuis 166445 ; de Fourcy, fils et petit-fils de surintendant des Bâtiments du roi est président aux enquêtes du Parlement depuis 165346 ; Marie de Bragelongne, fille de Léon de Bragelongne de son vivant Conseiller au Parlement de Paris, veuve de Claude Bouthillier, ancien surintendant des finances, diplomate et conseiller au Parlement de Paris, continue de jouir de quelques pouces d’eau acheminé en son hôtel47. Les financiers Berryer et Hervarth, fidèles de Mazarin puis de Colbert, sont également bien pourvus en eau48. L’évolution sociale de la distribution se traduit également géographiquement. L’enquête de 1673 ne livre aucune information sur les fontaines du Marais, ce qui correspond sans doute au rééquilibrage des dotations aristocratiques. Dans le même temps, elle fait apparaître une augmentation des lignes d’eau disponibles en rive gauche. Ce processus renvoie au renforcement relatif des dotations en faveur des établissements religieux.

    31En d’autres termes, les deux enquêtes réalisées à quatre ans d’intervalle permettent de mesurer à quel point les concessions ont bel et bien un caractère provisoire et limité dans le temps. Les clauses des concessions telles qu’elles sont formulées dans les documents officiels distinguent bien la concession du don : l’eau concédée reste la possession de la Ville ou du roi, dans le cas de Paris. Il ressort également qu’au tournant des années 1670 la politisation de l’eau s’est substantiellement renforcée : en quatre années seulement le paysage des fontaines parisiennes a considérablement évolué, signifiant ainsi la puissance démonstrative de la jouissance de l’eau. Alors qu’il promeut une nouvelle police urbaine et une surveillance plus étroite de la ville par la création d’une administration dédiée, Louis XIV montre avec l’eau l’autre facette de son projet politique. La ville policée à la population contrôlée est une ville fortement hiérarchisée où les établissements religieux et les proches du pouvoir tiennent une place éminente. Il ne s’agit nullement d’une ville au service de ses habitants et de son économie. Le principe d’ordre s’impose sur les logiques de la vie urbaine. Les concessions d’eau relaient ainsi à leur échelle les changements observés par ailleurs dans l’administration de la ville, notamment à la faveur de la création de la Lieutenance de police.

    Conclusion

    32Envisager l’histoire de la distribution des eaux parisiennes et marseillaises révèle la large diffusion de la gestion par voie de concession. Si les différences sont fortes entre les deux villes, les conditions d’approvisionnement en eau comme les usages et les sociétés urbaines, l’outil de la concession est communément mis en œuvre. Dans les deux villes, le pouvoir échevinal contrôle aussi étroitement qu’il le peut la distribution de l’eau auprès des particuliers et des institutions laïques et religieuses. À Paris toutefois, la présence du roi d’une part, et le fait qu’il possède lui-même un réseau d’autre part, cantonne le pouvoir des échevins. La concession, en son principe, assure une clause de revoyure permettant aux propriétaires de l’eau de rappeler régulièrement leur autorité et de surveiller les usages de la ressource. La concession permet ainsi le contrôle du passage de l’eau du domaine vers le privé et le particulier. En temps normal, le caractère collégial assure une forme de légitimité aux concessions accordées et permet aussi de les ancrer dans un temps juridique et dans une mémoire des institutions. À Paris et à Marseille, les édiles semblent bien avoir contrôlé les concessions jusqu’aux années 1670 où les autorités monarchiques s’immiscent davantage. Dans le cadre parisien l’importance des eaux royales apporte une nuance : pour le roi, le don d’eau est bien une libéralité propre. Il est aussi significatif de relever les limites rencontrées par les pouvoirs urbains qui mobilisent à Paris comme à Marseille les ressources du pouvoir monarchique pour dégager une vision d’ensemble et mettre un terme aux concessions accordées trop libéralement ou bien encore chasser les contrevenants.

    33L’alliance entre la pratique de la concession, les pouvoirs urbains et le pouvoir monarchique assure également une grande plasticité dans la gestion de l’eau. Le bref aperçu que nous avons dressé dans cet article montre une réelle capacité d’adaptation de la distribution de l’eau aux évolutions de la société de sorte qu’elles évoluent conjointement. Les bénéficiaires des concessions marseillaises et parisiennes occupent des positions sociales très différentes, mais dans les deux cas elles reflètent les sociétés urbaines qu’elles alimentent. En ce sens, l’extrême politisation des concessions d’eau parisienne attire l’attention sur une dimension infra-juridique de la concession. En effet, si elle est bien un droit, la concession demeure un don, un geste de libéralité par lequel le pouvoir, dans un même mouvement, accorde et transforme une ressource en bien lui donnant ainsi une valeur, éventuellement marchande, mais aussi symbolique.

    Notes de bas de page

    1Vitruve, De l’architecture, livre VIII, Paris, Les Belles Lettres, 1973, traduction de Louis Callebat ; Frontin ; Vitruve, Les aqueducs de la ville de Rome, Paris, Les Belles Lettres, 1961, traduction de Pierre Grimal.

    2Roche Daniel, « Le temps de l’eau rare du Moyen Âge à l’époque moderne », Annales ESC, 39/2, 1984, p. 383-399.

    3Parent-Duchâtelet Alexandre, Essai sur les cloaques ou égouts de la ville de Paris, Paris, Crevot, 1824.

    4Jenner Mark, « L’eau changée en argent ? La vente de l’eau dans les villes anglaises au temps de l’eau rare », xviie siècle, no 221/4, 2003, p. 637-651.

    5Fournier Patrick, « Entre technique et politique : les adductions dans les capitales provinciales en France du xvie au xviiie siècle », Histoire, économie & société, 3, 2016, p. 76-96 ; voir aussi Groussard David, La gestion de l’eau dans les villes bretonnes aux xviie et xviiie siècles, thèse d’histoire, université Rennes 2, 2010.

    6Font-Réaulx Constance de, The Power of Water: The Politics of the Parisian Waterworks (1660-1799), PhD thesis, Johns Hopkins University, Baltimore.

    7Horrein Florian, L’hydraulique à Paris à l’époque moderne : élaboration, transmission et évolutions d’un savoir-faire (v. 1612-v. 1733), thèse de l’École des chartes, Paris, 2015.

    8La série DD des archives municipales de Marseille et les Registres de délibérations du Bureau de la Ville de Paris regorgent de mentions en ce sens.

    9Vidoni Nicolas, La Police des Lumières, xviie-xviiie siècles, Paris, Perrin, 2018 ; Dyonet Nicolas, Nicolas Delamare, théoricien de la police, Paris, Garnier, 2018.

    10Lyon-Caen Nicolas et Morera Raphaël, À vos poubelles citoyens ! Environnement urbain, salubrité publique et investissement civique (Paris, xvie-xviiie siècle), Ceyzérieu, Champ-Vallon, 2020.

    11Antoine Michel, « Genèse de l’institution des intendants », Journal des savants, 3/4, 1982, p. 283-317 ; Hénin Béatrice, « L’agrandissement de Marseille (1666-1690). Un compromis entre les aspirations monarchiques et les habitudes locales », Annales du Midi, 98/173, 1986, p. 7-22.

    12Fournier Patrick et Massounie Dominique, « Eau et salubrité dans le Midi de la France à l’époque moderne », Siècles, 14, 2001, p. 63-80.

    13[https://multimedia.inrap.fr/atlas/marseille/sites/2867/Aqueduc-de-l-Huveaune#.ZADbsLSZOZw], consulté le 15 février 2023.

    14Ruffi Antoine de, Histoire de la ville de Marseille, Marseille, 1696, livre VII, p. 148.

    15Plan de Marseille par Ercole Negri, 1591, [https://multimedia.inrap.fr/atlas/marseille/sites/2867/Aqueduc-de-l-Huveaune#.ZADb_rSZOZx], consulté le 15 février 2023.

    16Plan de Marseille par Maretz, 1644, [https://multimedia.inrap.fr/atlas/marseille/sites/2867/Aqueduc-de-l-Huveaune#.ZADb_rSZOZx], consulté le 15 février 2023.

    17Desguine André, L’aqueduc Médicis à Arcueil-Cachan, Cachan, Bibliothèque de l’École des travaux publics, 1971 ; Laporte Philippe, L’aqueduc Médicis : ses souterrains entre Rungis et le Palais du Luxembourg : visite historique et contemporaine, Paris, Ocra, 1998.

    18Belgrand Eugène, Les travaux souterrains de Paris, t. 3 : Les anciennes eaux, Paris, Dunod, 1877.

    19Morera Raphaël, « Surveying Conflicts over the Briare Canal: Local Contractors, Dutch Engineers, Paris masons and the State (1604-1612) », in Rabier Christelle (dir.), Fields of Expertise. A Comparative History of Expert Procedures in Paris and London, 1600 to Present, Cambridge, Cambridge Scholars Press, 2007, p. 237-260.

    20Ongini Jessica, Les pompes élévatoires appliquées à Paris : le cas de la pompe royale aspirante et foulante de la Samaritaine, xviie-xviiie siècles, mémoire de maîtrise, université Paris 1, 2000.

    21Hoffman Albrecht (éd.), Wasserversorgung in der Renaissancezeit, Mayence, Philipp von Zabern, 2000, p. 113-135.

    22Morera Raphaël, Une histoire au fil de l’eau. Paris et son environnement, xvie-xviiie siècle, Paris, Éditions de l’EHESS, 2024.

    23Archives nationales (AN), H 1812, f. 308, cité par Horrein Florian, L’hydraulique à Paris à l’époque moderne, op. cit., p. 232.

    24Ibid., loc. cit. : « Nous souhaitons nous enquérir de ce que l’on appelle les lois de l’eau qui sont de forme divine, afin que chacun n’en ait ni plus ni moins que ce qu’il convient. »

    25Aix François d’, Les Statuts municipaux et coustumes anciennes de la ville de Marseille, Marseille, chez Claude Garcin, 1656, p. 176.

    26AN, Minutier central, LIII 13, 20 et 26 février 1655.

    27Le pouce désigne le diamètre du tuyau dérivation et qualifie donc une quantité maximale d’eau qui peut varier selon les saisons ou la pluviosité. Un pouce mesure environ 2,7 centimètres et se divise en 12 lignes.

    28Ordonnance portant que les lettres patentes pour le retranchement des fontaines particulières seront enregistrées au Greffe de la Ville, RDBV, p. 322-323.

    29Archives municipales de Marseille (AMM), DD 273 et DD 274.

    30AMM, DD 274.

    31AMM, DD 293, Ordonnance du 9 juillet 1680.

    32AMM, DD 271.

    33AMM, CC 57, Requeste à Monsieur le premier président, intendant pour l’application, 27 novembre 1694 ; et DD 272, arrêt du Conseil du roi, par lequel l’intendant de justice est commis pour le soin et rétablissement des fontaines publiques de Marseille, 1er novembre 1699.

    34AMM, DD 284.

    35Buti Gilbert, « La naissance de la fonction industrielle du port de Marseille, 1650-1830 », in Daumalin Xavier, Girard Nicole et Raveux Olivier (dir.), Du savon à la puce. L’industrie marseillaise du xviie siècle à nos jours, Marseille, Jeanne Laffitte, 2003, p. 17-117.

    36Maddaluno Lavinia, « “Faire participer le publique de la bonté de la dite eau”. Negotiating urban waters in 17th-century Marseille », in Bini Elisabetta, Carnevale Diego et Cecere Domenico (dir.), L’acqua : risorsa e minaccia, Naples, fedOAPress, 2023, p. 41-61.

    37Morera Raphaël, « La rivière comme bien commun. Exploiter la Bièvre du xvie au xviiie siècle », in Locher Fabien (dir.), La Nature en communs. Ressources, environnement et communauté (France et Empire français xviie-xviiie siècle), Seyssel, Champ Vallon, 2020, p. 103-124.

    38Le Roux Thomas et Morera Raphaël, « Blanchisseuses du propre, blanchisseurs du pur. Les mutations genrées de l’art du linge à l’âge des révolutions textiles et chimiques (1750-1820) », Genre & Histoire, 22, automne 2018, [http://journals.openedition.org/genrehistoire/3706], consulté le 15 février 2023.

    39Cénat Jean-Philippe, Louvois : le double de Louis XIV, Paris, Tallandier, 2015.

    40Levantal Christophe, Ducs et pairs et duchés-pairies laïques à l’époque moderne (1519-1790), Paris, Maisonneuve & Larose, 1996, p. 521.

    41Cavaillès Maria, Clairand Arnaud, Supiot Raphaël et Verdon Albéric (dir.), La Meilleraye, destin d’une famille aux xviie et xviiie siècles, Parthenay, Archives municipales et musée municipal, 2014.

    42Bachelet Théodore et Dezobry Charles, Dictionnaire général de biographie et d’histoire, de mythologie de géographie ancienne, moderne et comparée, partie 2, 1889, p. 1960.

    43Bonneserre de St-Denis M., Revue nobiliaire, héraldique et biographique, t. 1, 1862, p. 123.

    44Boislisle A. M. de, Histoire de la maison de Nicolay, Pièces justificatives, t. 1, Nogent le Rotrou, 1875, p. 390 sq.

    45Popoff Michel, Prosopographie des gens du Parlement de Paris (1266-1753), Saint-Nazaire-le-Désert, Références, 1996, p. 154.

    46La Chesnaye Des Bois François-Alexandre Aubert de, Dictionnaire de la noblesse, contenant les généalogies, l’histoire et la chronologie des familles nobles de France, Paris, Veuve Duchesne et M. Badier, 1773, p. 615.

    47Ibid., p. 961-962.

    48Dulong Claude, Mazarin et l’argent : banquiers et prête-noms, Paris, École des chartes, 2002.

    Auteurs

    • Raphaël Morera

      Centre de recherches historiques (CNRS-EHESS).

      Raphaël Morera est chargé de recherche au CNRS et il codirige le Centre de recherches historiques (UMR 8558, CNRS-EHESS). Spécialiste de l’histoire environnementale de l’Europe moderne, il a publié avec Nicolas Lyon-Caen aux éditions Champ Vallon en 2020, À vos poubelles citoyens ! Environnement urbain, salubrité publique et investissement civique (Paris, xvie-xviiie siècle). En 2024, il a publié Une histoire au fil de l’eau. Paris et son environnement, xvie-xviiie siècle aux Éditions de l’EHESS.

    • Lavinia Maddaluno

      Université de Venise.

      Lavinia Maddaluno est maître de conférences contractuelle en histoire moderne à l’université de Venise (Ca’ Foscari). Ses recherches portent sur les Lumières et l’histoire environnementale en Europe (xvie-xviiie siècle). Elle est l’auteure du livre Science and Political Economy in Enlightenment Milan (1760s-1805), Voltaire Foundation, Oxford University Studies in the Enlightenment, 2024.

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    1Vitruve, De l’architecture, livre VIII, Paris, Les Belles Lettres, 1973, traduction de Louis Callebat ; Frontin ; Vitruve, Les aqueducs de la ville de Rome, Paris, Les Belles Lettres, 1961, traduction de Pierre Grimal.

    2Roche Daniel, « Le temps de l’eau rare du Moyen Âge à l’époque moderne », Annales ESC, 39/2, 1984, p. 383-399.

    3Parent-Duchâtelet Alexandre, Essai sur les cloaques ou égouts de la ville de Paris, Paris, Crevot, 1824.

    4Jenner Mark, « L’eau changée en argent ? La vente de l’eau dans les villes anglaises au temps de l’eau rare », xviie siècle, no 221/4, 2003, p. 637-651.

    5Fournier Patrick, « Entre technique et politique : les adductions dans les capitales provinciales en France du xvie au xviiie siècle », Histoire, économie & société, 3, 2016, p. 76-96 ; voir aussi Groussard David, La gestion de l’eau dans les villes bretonnes aux xviie et xviiie siècles, thèse d’histoire, université Rennes 2, 2010.

    6Font-Réaulx Constance de, The Power of Water: The Politics of the Parisian Waterworks (1660-1799), PhD thesis, Johns Hopkins University, Baltimore.

    7Horrein Florian, L’hydraulique à Paris à l’époque moderne : élaboration, transmission et évolutions d’un savoir-faire (v. 1612-v. 1733), thèse de l’École des chartes, Paris, 2015.

    8La série DD des archives municipales de Marseille et les Registres de délibérations du Bureau de la Ville de Paris regorgent de mentions en ce sens.

    9Vidoni Nicolas, La Police des Lumières, xviie-xviiie siècles, Paris, Perrin, 2018 ; Dyonet Nicolas, Nicolas Delamare, théoricien de la police, Paris, Garnier, 2018.

    10Lyon-Caen Nicolas et Morera Raphaël, À vos poubelles citoyens ! Environnement urbain, salubrité publique et investissement civique (Paris, xvie-xviiie siècle), Ceyzérieu, Champ-Vallon, 2020.

    11Antoine Michel, « Genèse de l’institution des intendants », Journal des savants, 3/4, 1982, p. 283-317 ; Hénin Béatrice, « L’agrandissement de Marseille (1666-1690). Un compromis entre les aspirations monarchiques et les habitudes locales », Annales du Midi, 98/173, 1986, p. 7-22.

    12Fournier Patrick et Massounie Dominique, « Eau et salubrité dans le Midi de la France à l’époque moderne », Siècles, 14, 2001, p. 63-80.

    13[https://multimedia.inrap.fr/atlas/marseille/sites/2867/Aqueduc-de-l-Huveaune#.ZADbsLSZOZw], consulté le 15 février 2023.

    14Ruffi Antoine de, Histoire de la ville de Marseille, Marseille, 1696, livre VII, p. 148.

    15Plan de Marseille par Ercole Negri, 1591, [https://multimedia.inrap.fr/atlas/marseille/sites/2867/Aqueduc-de-l-Huveaune#.ZADb_rSZOZx], consulté le 15 février 2023.

    16Plan de Marseille par Maretz, 1644, [https://multimedia.inrap.fr/atlas/marseille/sites/2867/Aqueduc-de-l-Huveaune#.ZADb_rSZOZx], consulté le 15 février 2023.

    17Desguine André, L’aqueduc Médicis à Arcueil-Cachan, Cachan, Bibliothèque de l’École des travaux publics, 1971 ; Laporte Philippe, L’aqueduc Médicis : ses souterrains entre Rungis et le Palais du Luxembourg : visite historique et contemporaine, Paris, Ocra, 1998.

    18Belgrand Eugène, Les travaux souterrains de Paris, t. 3 : Les anciennes eaux, Paris, Dunod, 1877.

    19Morera Raphaël, « Surveying Conflicts over the Briare Canal: Local Contractors, Dutch Engineers, Paris masons and the State (1604-1612) », in Rabier Christelle (dir.), Fields of Expertise. A Comparative History of Expert Procedures in Paris and London, 1600 to Present, Cambridge, Cambridge Scholars Press, 2007, p. 237-260.

    20Ongini Jessica, Les pompes élévatoires appliquées à Paris : le cas de la pompe royale aspirante et foulante de la Samaritaine, xviie-xviiie siècles, mémoire de maîtrise, université Paris 1, 2000.

    21Hoffman Albrecht (éd.), Wasserversorgung in der Renaissancezeit, Mayence, Philipp von Zabern, 2000, p. 113-135.

    22Morera Raphaël, Une histoire au fil de l’eau. Paris et son environnement, xvie-xviiie siècle, Paris, Éditions de l’EHESS, 2024.

    23Archives nationales (AN), H 1812, f. 308, cité par Horrein Florian, L’hydraulique à Paris à l’époque moderne, op. cit., p. 232.

    24Ibid., loc. cit. : « Nous souhaitons nous enquérir de ce que l’on appelle les lois de l’eau qui sont de forme divine, afin que chacun n’en ait ni plus ni moins que ce qu’il convient. »

    25Aix François d’, Les Statuts municipaux et coustumes anciennes de la ville de Marseille, Marseille, chez Claude Garcin, 1656, p. 176.

    26AN, Minutier central, LIII 13, 20 et 26 février 1655.

    27Le pouce désigne le diamètre du tuyau dérivation et qualifie donc une quantité maximale d’eau qui peut varier selon les saisons ou la pluviosité. Un pouce mesure environ 2,7 centimètres et se divise en 12 lignes.

    28Ordonnance portant que les lettres patentes pour le retranchement des fontaines particulières seront enregistrées au Greffe de la Ville, RDBV, p. 322-323.

    29Archives municipales de Marseille (AMM), DD 273 et DD 274.

    30AMM, DD 274.

    31AMM, DD 293, Ordonnance du 9 juillet 1680.

    32AMM, DD 271.

    33AMM, CC 57, Requeste à Monsieur le premier président, intendant pour l’application, 27 novembre 1694 ; et DD 272, arrêt du Conseil du roi, par lequel l’intendant de justice est commis pour le soin et rétablissement des fontaines publiques de Marseille, 1er novembre 1699.

    34AMM, DD 284.

    35Buti Gilbert, « La naissance de la fonction industrielle du port de Marseille, 1650-1830 », in Daumalin Xavier, Girard Nicole et Raveux Olivier (dir.), Du savon à la puce. L’industrie marseillaise du xviie siècle à nos jours, Marseille, Jeanne Laffitte, 2003, p. 17-117.

    36Maddaluno Lavinia, « “Faire participer le publique de la bonté de la dite eau”. Negotiating urban waters in 17th-century Marseille », in Bini Elisabetta, Carnevale Diego et Cecere Domenico (dir.), L’acqua : risorsa e minaccia, Naples, fedOAPress, 2023, p. 41-61.

    37Morera Raphaël, « La rivière comme bien commun. Exploiter la Bièvre du xvie au xviiie siècle », in Locher Fabien (dir.), La Nature en communs. Ressources, environnement et communauté (France et Empire français xviie-xviiie siècle), Seyssel, Champ Vallon, 2020, p. 103-124.

    38Le Roux Thomas et Morera Raphaël, « Blanchisseuses du propre, blanchisseurs du pur. Les mutations genrées de l’art du linge à l’âge des révolutions textiles et chimiques (1750-1820) », Genre & Histoire, 22, automne 2018, [http://journals.openedition.org/genrehistoire/3706], consulté le 15 février 2023.

    39Cénat Jean-Philippe, Louvois : le double de Louis XIV, Paris, Tallandier, 2015.

    40Levantal Christophe, Ducs et pairs et duchés-pairies laïques à l’époque moderne (1519-1790), Paris, Maisonneuve & Larose, 1996, p. 521.

    41Cavaillès Maria, Clairand Arnaud, Supiot Raphaël et Verdon Albéric (dir.), La Meilleraye, destin d’une famille aux xviie et xviiie siècles, Parthenay, Archives municipales et musée municipal, 2014.

    42Bachelet Théodore et Dezobry Charles, Dictionnaire général de biographie et d’histoire, de mythologie de géographie ancienne, moderne et comparée, partie 2, 1889, p. 1960.

    43Bonneserre de St-Denis M., Revue nobiliaire, héraldique et biographique, t. 1, 1862, p. 123.

    44Boislisle A. M. de, Histoire de la maison de Nicolay, Pièces justificatives, t. 1, Nogent le Rotrou, 1875, p. 390 sq.

    45Popoff Michel, Prosopographie des gens du Parlement de Paris (1266-1753), Saint-Nazaire-le-Désert, Références, 1996, p. 154.

    46La Chesnaye Des Bois François-Alexandre Aubert de, Dictionnaire de la noblesse, contenant les généalogies, l’histoire et la chronologie des familles nobles de France, Paris, Veuve Duchesne et M. Badier, 1773, p. 615.

    47Ibid., p. 961-962.

    48Dulong Claude, Mazarin et l’argent : banquiers et prête-noms, Paris, École des chartes, 2002.

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    Morera, R., & Maddaluno, L. (2025). « Sans porter préjudice au public » ?. In T. Le Roux & R. Morera (éds.), La nature sous contrat (1‑). Presses universitaires de Rennes. https://doi.org/10.4000/13t3y
    Morera, Raphaël, et Lavinia Maddaluno. « “Sans porter préjudice au public” ? ». In La nature sous contrat, édité par Thomas Le Roux et Raphaël Morera. Rennes: Presses universitaires de Rennes, 2025. https://doi.org/10.4000/13t3y.
    Morera, Raphaël, et Lavinia Maddaluno. « “Sans porter préjudice au public” ? ». La nature sous contrat, édité par Thomas Le Roux et Raphaël Morera, Presses universitaires de Rennes, 2025, https://doi.org/10.4000/13t3y.

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    Le Roux, T., & Morera, R. (éds.). (2025). La nature sous contrat (1‑). Presses universitaires de Rennes. https://doi.org/10.4000/13t5r
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    Le Roux, Thomas, et Raphaël Morera, éditeurs. La nature sous contrat. Presses universitaires de Rennes, 2025, https://doi.org/10.4000/13t5r.
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