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    Plan détaillé Texte intégral Les réseaux Foccart et la mise en place d’une chaîne logistique de projection des mercenaires Les contrats mercenaires : un monde d’intermédiaires entre les états en soutien à cette cause et le Biafra Notes de bas de page Auteur

    L’Europe et l’Afrique

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    Les acteurs de « l’arrière » dans la guerre du Biafra : circulations d’armes, contrats mercenaires et géopolitique

    The “behind” actors in the Biafra war: arms circulation, mercenary contracts and geopolitics

    Walter Bruyère-Ostells

    p. 29-43

    Résumés

    La présence de mercenaires au Biafra est rendue possible par la mise en place par les réseaux Foccart d’une chaîne logistique en faveur de la sécession. L’approvisionnement en armes se fait via la Côte d’Ivoire ou le Gabon : rôles de Maurice Robert, Maurice Delaunay ou Philippe Letteron avec la SOGEXI. Pour le transport, de petites sociétés appartenant à des Anglo-Saxons (Hank Wharton ou Jack Malloch) utilisent Sao Tomé comme principal hub. Ils embarquent notamment les hommes recrutés en Europe au Portugal avant de les emmener jusqu’au Biafra. Cette organisation est rendue possible par le recours à des mercenaires qui constituent leurs équipes, tandis qu’un second cercle de confiance issu de la Résistance s’est occupé de l’achat d’avions. Pierre Laureys est ainsi en capacité avant le conflit de proposer au colonel Ojukwu avions et combattants. Avec la volonté française de se désengager, les mercenaires passent au premier plan à partir de 1968 : Rolf Steiner au combat, Bob Denard par exemple pour l’approvisionnement désormais plus directement porté par les États africains (Côte d’Ivoire ou Gabon).

    The mercenaries were present in Biafra by the implementation by Foccart networks of a logistics chain serving the secession. Arms were supplied via Côte d’Ivoire or Gabon thanks to Maurice Robert, Maurice Delaunay or Philippe Letteron with SOGEXI. For transport, small companies belonging to Anglo-Saxons (Hank Wharton or Jack Malloch for example) used Sao Tome as the main hub. They notably embarked the men recruited in Europe in Portugal before taking them to Biafra. Mercenaries constituted their teams before leaving, while a second circle of trust issued from the Resistance took care of the purchase of planes. Pierre Laureys was thus able before the conflict to offer Colonel Ojukwu planes and combatants. When the French government wanted to disengage, the mercenaries came to the fore from 1968: Rolf Steiner in combat, Bob Denard for example for the supply more directly carried by the African States (Ivory Coast or Gabon).

    Texte intégral Les réseaux Foccart et la mise en place d’une chaîne logistique de projection des mercenaires La France et ses relais auprès du Biafra Les hommes de Foccart sur le continent et le Biafra Une logique de sous-traitance dans la logistique maritime et aérienne Les contrats mercenaires : un monde d’intermédiaires entre les états en soutien à cette cause et le Biafra Un « marché » ouvert à une poignée de prestataires jugés fiables De la matrice de la résistance aux facilités accordées aux marchands d’armes des réseaux Foccart Des intermédiaires de plus en plus adossés aux partenaires africains de la France Notes de bas de page Auteur

    Texte intégral

    1La guerre du Biafra (1967-1970) est un conflit archétypal des mécanismes de crises dans l’histoire des jeunes États indépendants africains. Elle implique des acteurs locaux aux identités différenciées (ethnico-religieuses) dans une logique infra-étatique d’affrontement pour dominer le nouvel État ; elle implique également des luttes économiques entre l’ancien colonisateur et des concurrents dans la logique postcoloniale d’accès à des ressources stratégiques. Enfin, la guerre implique un positionnement des parties prenantes du conflit dans le contexte de guerre froide (soutien de l’URSS à l’État fédéral). Pour le dire autrement, l’affrontement se joue dans des configurations à plusieurs échelles. Quelle que soit l’échelle à laquelle on lit le conflit, la victoire se joue sur le terrain militaire. C’est pourquoi des combattants représentent les intérêts de chacun des acteurs. Du point de vue de la France dans sa stratégie de consolidation d’un « pré carré » en Afrique, les mercenaires sont l’ultime maillon d’une chaîne descendante pour s’ingérer dans le conflit ; ils sont au contact immédiat des acteurs locaux (les sécessionnistes biafrais) que Paris choisit de soutenir. Ainsi les mercenaires s’inscrivent-ils dans un système géopolitique dans lequel la France dispose de partenaires étatiques sur le continent mais s’appuie aussi sur des acteurs privés pour soutenir le Biafra. Ils s’inscrivent dans ce système au bout d’une chaîne logistique qui leur permet notamment de disposer d’armes et de munitions pour mener à bien leur contrat. Ce « système mercenaire » français, comme on pourrait l’appeler, suppose une articulation entre « le front » et « l’arrière ». Cet « arrière » se compose d’une série d’intermédiaires. Parmi ces acteurs de l’ombre, Jean-Pierre Bat a notamment contribué à éclairer le rôle d’un groupe d’hommes sous l’appellation de « réseaux Foccart1 ». Au sens strict du terme, ces réseaux se composent d’anciens militaires ou de représentants de l’État français. Dans un système élargi, ils mobilisent des intermédiaires, des trafiquants d’armes ou encore des mercenaires. Les acteurs à l’arrière du front sont indispensables pour la conduite de la guerre par le camp biafrais. Le schéma général d’implication de la France, via ses partenaires africains gabonais et ivoirien est assez bien connu. À l’échelle plus fine des hommes, il s’agit ici de comprendre concrètement comment s’organise le montage entre les différents acteurs (services des États, militaires, mercenaires, marchands d’armes pour les principaux) ; d’analyser les interactions, les tensions, rapprochements objectifs ou de circonstance de ces acteurs, les logiques qui guident ces interactions et de mesurer les effets géopolitiques que cela peut entraîner au-delà des contrats pour le colonel Ojukwu en question. Pour cela, nous porterons dans un premier temps notre attention sur la chaîne d’acteurs entre Paris et le terrain biafrais avant de recentrer l’analyse sur les contrats signés par les chefs mercenaires.

    Les réseaux Foccart et la mise en place d’une chaîne logistique de projection des mercenaires

    2Dans l’esprit du général de Gaulle, le soutien au Biafra correspond aux intérêts français. La mise en œuvre de l’appui à la sécession relève ensuite du pilotage par Jacques Foccart depuis l’Élysée et de ses réseaux sur le continent africain.

    La France et ses relais auprès du Biafra

    3Il s’agit tout d’abord de fractionner cet « éléphant d’Afrique » qu’est le Nigéria anglophone. Un autre objectif consiste à s’ouvrir la possibilité d’une position privilégiée pour une compagnie hexagonale sur les gisements locaux du nouvel État. En effet, le Biafra atteint une production pétrolière de 20 millions de tonnes en 1966, permettant au Nigéria de se classer au 10e rang mondial des pays producteurs. La BP, Shell et une compagnie française, la Société anonyme française de recherche et d’exploitation du pétrole (SAFRAP), se partagent l’exploitation. Enfin, soutenir le colonel Ojukwu, très anticommuniste et les Ibos chrétiens en lutte contre un pouvoir fédéral dominé par des musulmans séduits par le modèle soviétique, est une façon de prévenir l’action de ce gouvernement nigérian dans la région. La France ne souhaite pas voir son ingérence se développer au sein de son « pré carré ».

    4Dès 1966, Paris comprend la dynamique sécessionniste en préparation. En décembre, l’ambassadeur en poste à Lagos rend compte au Quai d’Orsay de l’évolution de la province orientale : « Celle-ci prend chaque jour des libertés plus grandes vis-à-vis du pouvoir central et s’organise dans la perspective d’une autonomie de fait2. » Le SDECE observe que des livraisons sont opérées par les États-Unis :

    « Les États-Unis fourniraient des armes à la région Est par l’intermédiaire d’Israël. Dans leur esprit, ces armes seraient destinées à équiper une police solide et non à alimenter une guerre civile. Ils exercent du reste des pressions discrètes pour décourager les velléités des dirigeants d’Enugu de se lancer dans l’aventure d’une sécession. Qui pourrait engendrer un conflit meurtrier3. »

    5Des représentants officieux de la France appuient les démarches du colonel Ojukwu. La SAFRAP fournit des devises aux sécessionnistes au début du conflit4. Puis, Paris gère les approvisionnements en armes à destination du Biafra, la quantité et les circuits par lesquels ils doivent parvenir à destination. La fourniture de matériels militaires se fait essentiellement à partir de l’automne 1967, d’abord à partir de stocks d’armes allemandes et italiennes de la Seconde Guerre mondiale. Les correspondances entre le Secrétariat aux Affaires africaines et malgaches et ses différents interlocuteurs pendant le conflit l’attestent5. Un télégramme du 29 juillet 1968 évoque ainsi « 84 tonnes métriques » qu’il faut déplacer d’Abidjan à Libreville avant leur entrée finale chez les sécessionnistes6. De façon plus large, les différents collaborateurs de Jacques Foccart (Vincent Balesi, Gérard Barrère, Guy Devernois, […]) assurent des missions et produisent des notes sur l’évolution du soutien au Biafra7. Tout au long du conflit, Paris soutient donc les sécessionnistes. Même après le repli de l’aide directe de la France, l’appui diplomatique, qui prend alors plutôt la forme d’un discours humanitaire, laisse entendre à tous les observateurs que la ligne politique du général de Gaulle n’a pas vraiment changé. En 1969, Washington prend note des déclarations de Maurice Schumann, ministre des Affaires étrangères :

    «French backing of Biafra […] will continue at about the same level, according to Foreign minister Schumann. In recently expressed private views, Schumann showed himself emotionnaly committed to the Biafran cause and disappointed that the US has not given more help8.»

    6Paris donne également l’impulsion aux autres acteurs dans le dossier biafrais, offrant aux mercenaires exfiltrés du Congo la perspective de contrats au Biafra, s’appuyant sur la Côte d’Ivoire et le Gabon pour envisager un appui indirect. Politiquement, la Côte d’Ivoire appuie les sécessionnistes dans la logique de « balkanisation » des ensembles géopolitiques hors influence française. Partagée par de Gaulle et Jacques Foccart, cette logique est d’abord prônée par Félix Houphouët-Boigny9. L’anticommunisme est également une puissante motivation chez lui. Elle l’amène d’ailleurs à se rapprocher de Pretoria dès ce moment10. Le président ivoirien continue d’ailleurs cette volonté de « dialogue » avec le régime de l’apartheid, comme l’illustre par exemple en 1975 l’envoi de l’un de ses plus proches conseillers, Laurent Donald Fologo en voyage officiel en Afrique du Sud11. Du côté gabonais, Omar Bongo vient d’accéder au pouvoir sous le contrôle des réseaux Foccart et leur est largement redevable. Il espère que l’aboutissement de la cause biafraise, qu’il reconnaît officiellement, légitimera sa place sur la scène régionale. Il se perçoit comme un frère protecteur pour Ojukwu et soutient très activement sa cause. Armand Ianarelli, mercenaire qui sert au Biafra, raconte dans le premier chapitre de ses mémoires, comment, alors qu’il doit rejoindre Uli depuis Libreville, il rencontre sur le tarmac Omar Bongo qui accompagne le colonel Ojukwu de retour après une conférence à l’OUA à Addis-Abeba12. Cette approche « par le haut » des soutiens au Biafra et de l’articulation entre Paris et ses relais africains est aujourd’hui largement connue grâce de nombreux travaux. Il convient donc plutôt d’en analyser les mécanismes par l’étude des acteurs de niveau inférieur ou intermédiaire dans la chaîne entre les décideurs politiques et les combattants sur le théâtre du conflit biafrais.

    Les hommes de Foccart sur le continent et le Biafra

    7La géographie de ce soutien est celle des réseaux Foccart en Afrique. Dès le mois d’août 1967, le conseiller français auprès de Félix Houphouët-Boigny, Jean Mauricheau-Beaupré, accompagné de Gildas Lebeurrier, monte les premières antennes en Angola et en Rhodésie pour regrouper les mercenaires. Il s’agit également de récupérer les avions utilisés par les Katangais pour emmener les mercenaires vers le Biafra13. Même si les flux en armement et munitions se font en large partie la nuit pour être moins visibles, la CIA observe attentivement le rôle du Gabon et de la Côte d’Ivoire : « Militarily, Biafra is almost entirely dependent on a clandestine night airlift mainly from Libreville and Abidjan for arms and munitions14. » Le chrétien Jean Mauricheau-Beaupré n’est pas non plus étranger au développement d’un soutien du Vatican au Biafra15.

    8À Libreville, sous l’égide de Maurice Robert, les armes reçues de la coopération française sont désormais officiellement gabonaises ; elles sont réexpédiées vers le Biafra via différentes compagnies aériennes16. Ambassadeur de France, Maurice Delaunay prend des positions beaucoup plus favorables au Biafra que le Quai d’Orsay et est une cheville ouvrière du soutien militaire aux sécessionnistes, comme il l’expliquera plus tard :

    « Moi j’étais un transitaire, un transitaire particulier mais un transitaire tout de même. J’étais le bras armé de l’aide française au Biafra puisque pratiquement toute l’aide française passait par Libreville : des mitrailleuses, des fusils-mitrailleurs, des fusils, des grenades, des bazookas, des petits canons également mais pas d’armes lourdes. Pas d’armes lourdes pourquoi ? Parce que tout cela était transporté par avion. Et je dois vous dire que dans cette affaire je n’ai jamais eu affaire à mon ministre de tutelle mais je n’ai obéi et je n’ai agi qu’en fonction des instructions qui m’étaient données par l’Élysée17. »

    9Toujours à Libreville, le conseiller politique d’Omar Bongo pour Foccart, Philippe Letteron, créé une compagnie fantoche, la SOGEXI18. Équipée de quelques vieux DC3, elle constitue le « courrier régulier » vers le Biafra19. L’arrivée des mercenaires se fait donc via le Gabon. Dans un rapport adressé à Bob Denard, Jean-Louis Domange indique être parti de France par Air Afrique (ligne régulière) à destination de Libreville le 21 août 1968. Il prend ensuite place sur un DC3 de la SOGEXI vers Uli au Biafra. Sur place il est chargé de « monter cette radio dans un local affecté aux réseaux vers Abidjan et Paris aux mains d’un opérateur biafrais, cet opérateur devait effectuer les liaisons avec Libreville20 ». Ainsi les mercenaires engagés au combat peuvent exprimer leurs besoins et faire remonter de l’information vers Philippe Letteron et la SOGEXI.

    10Plus directement en charge de ce dossier, Philippe Letteron devient conseiller politique auprès d’Ojukwu, représentant le « circuit court » entre le chef sécessionniste et Foccart. Pour les transferts de personnels depuis l’Europe, les schémas expérimentés pour le Katanga et le Congo sont globalement reconduits. On crée à Paris un Centre de documentation et d’Histoire du Biafra confié aux sécessionnistes, lequel sert notamment au recrutement de mercenaires. Sur ordre de Foccart, Faulques regroupe ses hommes « qui ignoraient que Faulques travaillait pour Foccart » à Lisbonne, pays ami dans la logique du maintien d’un contrôle néocolonial anti-communiste en Afrique21. L’embarquement se fait de nuit à Lisbonne ; Sao Tomé et Bissau sont choisies comme « escales techniques » avant atterrissage à Port-Harcourt puis Uli à partir de 196822.

    Une logique de sous-traitance dans la logistique maritime et aérienne

    11Au moins dans la première phase du conflit jusqu’à la chute de Port-Harcourt en mai 1968, la voie maritime est utilisée, malgré les efforts de blocus de l’armée fédérale :

    «One ship carrying arms may have succeeded in eluding the federal blockade of Earstern ports. It reportedly arrived at Port-Harcourt on 9 July carrying rifles, machine guns and munitions […]. One of the two additional ships reported en route to Port-Harcourt with heavy military equipment23…»

    12Toutefois les flux aériens sont beaucoup plus importants dans l’approvisionnement au camp biafrais. Le transport logistique est très largement sous-traité et assuré par des Anglo-Saxons. En réalité, ces Anglo-Saxons ont déjà établi des liens avec les réseaux Foccart. Dès octobre 1966, alors que la sécession n’a pas encore été officiellement proclamée, un appareil de la North American Aircraft Trading Company, société dont le patron est l’Américain Hank Wharton, doit acheminer vers la Province orientale 3 600 fusils automatiques depuis Rotterdam. Sans autorisation d’exportation du gouvernement néerlandais, l’avion qui devait atterrir en Grande-Bretagne se dirige en réalité vers le Nigéria. Sans doute en raison d’un problème de carburant, il est toutefois obligé de tenter de se poser en urgence au Cameroun et se crashe à l’atterrissage (sans pertes humaines). Le pilote Paul Favier, un homme associé aux réseaux Foccart, donnera ensuite à Wharton de quoi racheter un nouvel appareil24. La compagnie Air Trans Africa a, pour sa part, été fondée par le Rhodésien Jack Mallock en 1964. Probablement protégé par les services rhodésiens, la Central Intelligence Organization (CIO) qui le met en contact avec le SDECE, le Rhodésien pilote son Constellation entre Lisbonne et le Biafra25. Un Français, Roland Raucoules (ex-OAS dit Duverney) lui sert régulièrement de copilote. Au cours du conflit, avec des départs souvent depuis Lisbonne, Sao Tomé devient un « hub » essentiel car c’est de là que décolle également l’Américain Hank Wharton dont la compagnie sert toujours à soutenir matériellement le Biafra26. Or, sous couvert également de transport de fourniture humanitaire confié à Wharton par le CICR, ce dernier fait passer des armes et des hommes dans ces avions « humanitaires ». Il demande d’ailleurs des autorisations tardives de décollage, n’ayant pu obtenir de pouvoir le faire de nuit27. Ce marché de la logistique aérienne aux États qui souhaitent soutenir le Biafra semble particulièrement rémunératrice. Même si son parti pris est évident, un auteur soviétique dont l’article est archivé par la CIA l’évalue à 25 000 dollars net par voyage28.

    13En fait, cette sous-traitance tient à la discrétion qu’elle assure pour les États commanditaires mais s’explique aussi par les risques pris par les pilotes pour pouvoir entrer dans l’espace aérien du Biafra. Au nom de la souveraineté de l’État fédéral, l’armée nigériane essaie d’empêcher ces flux aériens. La capacité de pilotes militaires comme le Suédois Gustave von Rosen, ancien pilote de la Première et Seconde Guerre mondiale pour l’Allemagne, seuls capables de forcer les défenses anti-aériennes de l’armée fédérale, leur confère une place privilégiée dans le secours humanitaire aux Biafrais et offre l’opportunité d’instaurer une porosité entre transport humanitaire et transport d’armes29. Celle-ci va être largement exploitée au cours du conflit30. Par ailleurs, les conditions d’atterrissage sur des pistes plus ou moins provisoires à Uli ou dans d’autres villes tenues par les sécessionnistes demandent une dextérité particulière.

    14Le fonctionnement des réseaux Foccart atteint ainsi au Biafra une forme d’apogée dans la politique d’influence déployée depuis 1960 avec des relais en place auprès de chacun des acteurs, tant politiques que militaires, impliqués dans la chaîne logistique qui amène armes et mercenaires au Biafra. Pourtant, ces réseaux ne forment pas un ensemble homogène. À la périphérie de ce système, les mercenaires en constituent la piétaille au combat. La position de leurs chefs est, en revanche, plus intéressante à observer car ils entrent dans cette catégorie d’intermédiaires, au contact des réseaux Foccart sans y appartenir eu sens plein.

    Les contrats mercenaires : un monde d’intermédiaires entre les états en soutien à cette cause et le Biafra

    15Les prestations que les chefs mercenaires peuvent offrir aux clients (au sens antique du terme) de la France font l’objet d’un contrat, d’une condotta comme on le disait dans l’Italie des xve-xvie siècles. Ces hommes sont à la fois fortement liés aux réseaux Foccart mais ont leurs propres logiques, leurs propres objectifs. L’attrait pour le Biafra des mercenaires s’explique en partie par l’échec final au Congo en cette même année 1967. Il n’est pas sans avoir amené ces hommes à réfléchir à leur dépendance vis-à-vis des aléas de la politique de Paris. Il convient donc d’analyser les modalités concrètes de leur implication au Biafra (intermédiaires, montages financiers).

    Un « marché » ouvert à une poignée de prestataires jugés fiables

    16Comme dans la plupart des opérations clandestines dans les relations internationales de la période, la Suisse est une place centrale des flux discrets d’argent31. Le Biafra ouvre par exemple un compte à l’Union des banques suisses, officiellement pour recueillir les dons destinés à la population locale. En réalité, ces moyens financiers doivent permettre d’acquérir des moyens militaires (hommes et matériels) susceptibles aux forces du colonel Ojukwu de pouvoir tenir tête à l’armée fédérale. L’exemple du Katanga au début de la décennie a installé dans les esprits l’idée qu’à la tête d’une armée sécessionniste, une « poignée » de mercenaires tenant lieu d’officiers et encadrant des soldats locaux pouvait tenir tête à une armée nationale s’ils recevaient suffisamment de matériel militaire. Pour le dire autrement, ce précédent du Congo-Léopoldville laisse penser que les jeunes États africains sortis de la décolonisation ne disposent pas d’un outil militaire très performant. Toutefois, dans le cas nigérian, l’armée fédérale reçoit un puissant appui de l’extérieur, notamment en termes de matériels. Après avoir vendu pour 5 millions de dollars d’équipement à Gowon en 1967, l’URSS accélère ses livraisons à partir de l’été avec dix MiG et trois patrouilleurs. La CIA observe également le déploiement de coopérants militaires soviétiques mais également polonais et tchécoslovaques32.

    17En réponse, les besoins humains et matériels du Biafra sous-entendent donc le recours à du mercenariat mais aussi à l’économie grise de l’armement. Peu de prestataires, d’autant plus si l’on considère qu’ils doivent être adoubés par les services français, sont capables de répondre à une demande relativement substantielle. Cela ne peut guère passer par des aventures individuelles d’hommes inexpérimentés. Or, le précédent du Congo a fortement structuré le milieu du mercenariat. Sous la houlette de John Peeters, l’ancien second de Mike Hoare au 5th codo congolais, les Rhodésiens répondent aux appels de Londres et encadrent l’armée fédérale. Après l’échec de Schramme qui est allé s’enfermer à Bukavu, les Belges n’ont plus de figure de premier plan et passent sous l’autorité de Français comme Bob Denard. Tout en continuant à s’impliquer sur la scène congolaise où Bukavu résiste encore à l’automne 1967, le Français propose ses services à Ojukwu.

    18La préparation d’un contrat d’assistance à l’armée biafraise peut ainsi être observée au prisme du dossier que Bob Denard présente. Entamées à l’automne 1967, les discussions entre son représentant et le colonel Ojukwu montrent l’importance pour ce dernier de la capacité à fournir des armes (notamment de gros calibres) et du matériel en complément des mercenaires exigées par les Biafrais33. Le dossier de Bob Denard repose ainsi sur le partenariat avec un marchand d’armes, Pierre Laureys, et sur un acteur du transport logistique, l’Américain Hank Wharton. Du côté du mercenaire, l’exigence porte essentiellement sur les garanties financières de son potentiel client. Le Français veut l’assurance d’un approvisionnement du compte ouvert en Suisse en amont du déploiement, de 900 000 dollars (soit 6 mois de salaires pour ses hommes)34.

    19Structuré par l’expérience congolaise, le milieu français du mercenariat s’organise cependant de telle sorte que Bob Denard se trouve en concurrence avec d’autres personnalités comme Roger Faulques ou Michel de Clary, également capables de recruter un nombre important de supplétifs expérimentés. Dans ce jeu, chacun doit dégager des avantages comparatifs. Présentée sous le nom de Groupe d’assistance technique indépendant (GATI), l’offre de Denard se place bien dans la perspective d’une assistance technique comparable à celle qui pourrait être fournie à un État reconnu sur la scène internationale. Replacé dans le contexte de l’automne 1967 et de la chute en cours de Bukavu, le qualificatif d’« indépendant » laisse penser que le contrat qu’il propose n’est pas le plus directement adossé à l’État français. Alors que Denard est personnellement obligé de rester au repos après la grave blessure à la tête reçue au Congo en juillet, il insiste sur la position de son délégué, Guy Cardinal, dans les négociations avec les Biafrais : « Seuls les officiers du GATI mandatés par mon autorité sont habilités à me représenter, afin d’éviter toute ingérence extérieure35. » Face à Cardinal, Ojukwu insiste sur le fait qu’il « est comme un malade à qui l’on propose divers médecins ». Il répond au délégué de Denard que « le GATI serait l’un de ces médecins. Il voudrait obtenir une réponse rapide ». Il réclame l’envoi rapide de mercenaires, sans forcément que le montage du transfert de fonds soit bouclé36. Plus que Cardinal, Pierre Laureys est considéré par le colonel Ojukwu comme l’interlocuteur le plus important car la fourniture d’armes est plus délicate que la question des mercenaires. Le marchand de canons propose, en fait, un plan ambitieux comprenant une aviation et une marine capable de rompre le blocus. Il facilite les contacts avec Cardinal mais sollicite également Michel de Clary ou Faulques.

    20De leur côté, les Biafrais continuent de faire leur choix sur le marché des offres de matériel et d’hommes dans une logique de garantie de qualité de la prestation. Ils préfèrent un appui logistique directement sous le contrôle des services des États amis (SOGEXI avec la France et le Gabon ou la Côte d’Ivoire). Une seconde rencontre à Lisbonne met en contact Arturo Mbaneffo, représentant du Biafra, Guy Cardinal et Pierre Laureys37. La négociation ne peut être menée à terme et Guy Cardinal écrit à Bob Denard pour faire porter la responsabilité de l’échec sur le marchand d’armes :

    « Laureys a ensuite un compte à sa façon pour notre groupe. J’ai dit à Arturo de le prendre comme nul. J’ai relancé l’idée d’un compte commun avec co-signature. Arturo est d’accord mais devait aller à un autre RDV. Je dois le revoir le lendemain soir. J’ai perdu contact avec les Biafrais, Jean François [Brun] faisant écran38. »

    21Son compte-rendu laisse également voir le rôle des représentants des services français, sans que l’on puisse les identifier.

    22« Intime de Foccart », Laureys n’est officiellement qu’un marchand d’armes39. En réalité, cet ancien pilote de la France libre élevé compagnon de la Libération, a noué d’excellentes relations avec Jacques Foccart. En 1960, il est d’ailleurs désigné pour servir de pilote privé à Philibert Tsiranana, premier président de Madagascar est également proche du secrétaire aux affaires africaines. Même s’il n’est pas officiellement lié aux services, Pierre Laureys réunit un certain nombre de caractéristiques d’un agent. Disposant de compétences militaires, il est resté proche de l’Armée de l’Air, participant par exemple aux premières heures de la Patrouille de France. Il est même rappelé comme chef du service de presse Air en 1956-1957 en Algérie. Editeur de journaux comme Aviation magazine, il est amené à faire de nombreux déplacements à l’étranger. En 1964-1965, il commence à se faire un nom comme vendeur d’armes au Yémen où sont engagés des mercenaires travaillant pour le MI6 avec l’aval de Paris. À minima, il incarne assez bien ce second cercle du système mis en place par Jacques Foccart. Le premier cercle est constitué par les « missi dominici » comme Mauricheau-Beaupré ou Letteron, cheville ouvrière de tous les flux à destination du camp biafrais.

    De la matrice de la résistance aux facilités accordées aux marchands d’armes des réseaux Foccart

    23Dans ce second cercle, le lien avec le passé résistant reste ainsi le socle fondamental. Le système repose sur les relations interpersonnelles autour de Foccart et Messmer. Pilote de la France Libre, compagnon de la Libération, Laureys utilise l’argent des Biafrais pour l’achat d’avions40. Il fournit les premiers avions dès juin 1967. Le 2 février 1966, un marchand de vieux métaux, Jean Godet, a reçu de René Bloch, directeur des affaires internationales au ministère des Armées, une très officielle autorisation de faire commerce de matériels d’aviation. Le 17 août 1967, le ferrailleur Godet reçoit la visite du colonel d’aviation Hubert Cournal, aide de camp du général Martial Valin. Ce dernier est l’ancien chef des Forces aériennes françaises libres et chef d’état-major de l’Armée de l’air à la Libération, compagnon de la Libération. Pour l’heure, Martial Valin est membre du Conseil supérieur de l’air.

    24Le colonel Coumal met en contact Godet avec trois proches d’Ojukwu, dont Chijioke I. Dike (futur représentant du Biafra à Paris) et Igwe Nwokedi, chef des services de renseignement d’Ojukwu. Ceux-ci se présentent comme les mandataires de Marcos Zaguri, directeur d’une agence de transport portugaise. Trois jours après cette visite, le PDG d’Air France Georges Galichon signe le contrat de vente d’un long-courrier Super-Constellation à Jean Godet, pour 150 000 à 200 000 dollars41. L’avion a eu un problème de défaillance du train lors d’un atterrissage à New York. Cependant Laureys considère à tort que sa place dans les réseaux Foccart font d’Ojukwu un client captif. Il revend l’avion en question 350 000 dollars aux Biafrais. Jacques Languillaume, également ancien aviateur de la France libre, signe un contrat de trois mois avec Godet pour piloter le Super-Constellation entre Lisbonne et Sao Tomé. Dès le 17 août 1967, les premières livraisons d’armes commencent.

    25Pierre Laureys est ainsi en position de force lorsqu’il négocie à l’automne avec Ojukwu. En plus des « fantassins » mercenaires, il montre l’étendue des compétences qu’il peut mettre à disposition de son client. Pour cela, il utilise les mêmes cercles de connaissances conservées depuis la période la résistance à Londres. Le Polonais Jan Zumbach, décoré comme Laureys de la Distinguished Flying Cross, prend officiellement la tête de l’aviation de combat du Biafra et mène des raids aériens contre les forces fédérales42. Un autre ancien de la France libre, Jacques Languillaume, trouve la mort d’ailleurs quelques semaines plus tard aux commandes d’un Fokker 27 biafrais abattu durant un bombardement de Lagos43.

    Des intermédiaires de plus en plus adossés aux partenaires africains de la France

    26Cependant, cet engagement direct d’hommes dont le lien avec le Secrétariat aux Affaires africaines et malgaches ou avec le ministère des Armées ne dure qu’une partie du conflit. Dès le printemps 1968, les hommes trop directement associés aux réseaux Foccart se retirent des opérations directes de combat. Tel est notamment le cas des équipes de mercenaires sous les ordres de Faulques. Conduits par Picot d’Assignies, les irréguliers envoyés par la France font route par voie terrestre vers le Cameroun. Seuls demeurent sur place des mercenaires qui en font individuellement le choix. Le Bosco témoigne de l’annonce faite par Faulques :

    « Je suis, hélas, au regret de vous faire savoir que j’ai rompu le contrat qui nous liait au colonel Ojukwu pour diverses raisons, dont des promesses non tenues. En conséquence, je démonte l’opération et nous rentrons en France. Ceux d’entre vous qui désirent à titre personnel rester ici me le feront savoir ; je les présenterai moi-même au colonel Ojukwu demain matin44. »

    27Désormais les chefs étrangers déployés à la tête de troupes biafraises sont des hommes dont le lien avec Paris est beaucoup moins direct. L’Allemand Rolf Steiner devient ainsi la figure de proue des mercenaires soldés par le Biafra45. Dans les airs, le pilote Raucoules reste en base arrière. Ce retrait du soutien français est entériné par Georges Pompidou à son arrivée à l’Élysée en 1969.

    28Pour autant, les partenaires africains demeurent un appui puissant au Biafra. Incarnant le maintien de l’assentiment français à sa politique, Omar Bongo accueille à Libreville le capitaine Varret qui commande une compagnie de parachutistes. Sa mission consiste à protéger l’aéroport où continue à transiter l’aide française, notamment les armes, acheminées également par bateaux46. À une date inconnue mais avant la fin du conflit au Biafra, la compagnie de Jack Mallock, Air Trans Africa, est immatriculée au Gabon. Omar Bongo regrette d’ailleurs le désengagement français :

    « Cette situation est d’autant plus préoccupante que le peuple gabonais qui a donné sa complète adhésion à notre choix [soutenir le Biafra] et qui a fait et pris fait et cause pour les malheureux Biafrais constate que ceux-ci vont être écrasés […]. Il s’interroge et se sent lui-même vaincu et abandonné. Par un réflexe naturel, il se tourne vers la France, son soutien et son amie de toujours47. »

    29Au premier rang des soutiens à Ojukwu, vient Félix Houphouët-Boigny. Celui-ci essaie également de ranimer le soutien français. En février 1969, il écrit à de Gaulle :

    « Monsieur le Président, me voici à nouveau dans l’obligation de solliciter votre aide en faveur du peuple biafrais qui lutte non seulement pour son indépendance mais aussi pour limiter la dangereuse implantation du communisme en Afrique48. »

    30Le retour de Bob Denard sur le dossier biafrais est également éclairant. Soldé comme membre de la GP gabonaise par Omar Bongo à partir de 1969, il travaille en parfaite intelligence avec la Côte d’Ivoire sur le dossier biafrais. Alors qu’il a finalement été tenu à l’écart dans le montage des appuis au colonel Ojukwu sous l’égide de Paris, il reprend une place significative dans les dispositifs de mercenaires en soutien au Biafra sur la fin du conflit. Ayant racheté un vieux navire à l’automne 1968 avec l’argent ivoirien, Bob Denard le rebaptise Mi Cabo Verde et crée une société au Panama. Il va effectuer cinq allers-retours du Gabon vers Port-Harcourt au Nigéria. Pour chaque voyage, c’est 20 à 30 tonnes de matériels militaires qui peuvent être acheminés. Il essaie les armes en mer avant de les confier aux Biafrais et prend sa marge sur ces livraisons. Le Mi Cabo Verde assure ensuite des liaisons depuis Walvis Bay en Namibie, où il charge du matériel sud-africain à destination du Biafra. Ce cabotage pour fournir le matériel aux forces du colonel Ojukwu se poursuit jusqu’à la fin du conflit49. Certes sans l’accord de Paris mais pour le compte de la Côte d’Ivoire, les mercenaires français de Denard établissent ainsi des liens directs avec les services sud-africains. Le général Lutz, chef des services sud-africains a d’ailleurs été reçu à Yamoussoukro pour mettre en place cette coopération.

    ***

    31Pour conclure, il convient tout d’abord de remarquer que le Biafra constitue une bonne illustration de l’ampleur et de l’organisation rationnelle de flux clandestins d’armes et de matériels vers un théâtre de combat dans l’Afrique postcoloniale. Le Biafra traduit ainsi l’efficience des réseaux Foccart pour mettre en œuvre la nouvelle politique africaine souhaitée par de Gaulle et pilotée par le Secrétariat aux Affaires africaines et malgaches. Cette mise en œuvre est d’autant plus remarquable qu’elle relève de la guerre secrète et qu’elle mobilise une série d’acteurs dont les intérêts ne sont pas complètement convergents, ni pleinement alignés sur ceux de l’État français. Dans une approche « par le haut », on ne peut que valider le fonctionnement du système géopolitique dirigé par Paris grâce à la coopération avec les partenaires africains du « pré carré » (Gabon et Côte d’Ivoire) et des relais (Portugal et ses territoires africains, Afrique du Sud) confirmant ainsi l’historiographie sur le sujet. Toutefois, une échelle plus fine d’analyse permet ici de montrer les tensions permanentes dans ce système. Sur le dossier biafrais, les États africains ne sont pas que de simples relais de Paris. Ils poursuivent leur propre logique et font pression sur la France pour que celle-ci maintienne un appui indirect au Biafra. Surtout, les « réseaux Foccart » ne doivent pas être mythifiés comme une chaîne unique et linéaire parfaitement aux ordres de l’Élysée. Si les services mettent bien en œuvre la politique de Foccart en tenant compte des infléchissements souhaités par le général de Gaulle, des sollicitations plus ponctuelles peuvent intégrer des hommes dans les dispositifs de l’action secrète de la France. Pierre Laureys et des pilotes militaires de la France libre jouent un rôle important dans la logistique aérienne et la mise sur pied d’une aviation biafraise de combat. Plus mouvant, ce second cercle des réseaux joue de relations interpersonnelles anciennes et répond à des intérêts personnels. Des formes de mise en concurrence pour apporter l’aide la plus large et la plus complémentaire possible aux Biafrais est également organisée, incluant à la marge des Anglo-Saxons dans la logistique aérienne. Le Biafra montre également que Bob Denard appartient encore dans cette période à ce second cercle, plutôt qu’au premier, et que lui-même souhaite entretenir une position indépendante. Roger Faulques demeure pour Paris le chef idéal du milieu mercenaire. Les distorsions entre la logique de l’État français, celles des Africains et les objectifs propres aux acteurs de terrain non institutionnalisés expliquent que les mercenaires, en bout de chaîne et dépendant des autres acteurs (les États, leurs services secrets, les agents ponctuellement insérés dans les réseaux mais aussi les marchands d’armes) cherchent dans les années 1970 une position plus sécurisée. Partant du principe que la meilleure voie est constituée par les GP des partenaires privilégiés par Paris, une large partie fait le choix du Gabon. Plus ambitieux, Bob Denard sera le seul à parvenir à en créer une dont il aura le contrôle aux Comores.

    Notes de bas de page

    1Bat J.-P., Le syndrome Foccart. La politique française en Afrique de 1959 à nos jours, Paris, Gallimard, coll. « Folio Histoire », 2012.

    2Archives nationales (AN), Fonds Foccart, 5 AG/3041, télégramme diplomatique du 7 décembre 1966.

    3AN, Fonds Foccart, 5 AG/2234, note SDECE D 52734/N du 24 novembre 1966.

    4Foccart J., Foccart parle, entretiens avec Philippe Gaillard, Paris, Fayard, vol. 1, 1995, p. 728-729.

    5AN, Fonds Foccart, 5 AG/3041.

    6Idem. Télégramme à l’arrivée du 29 juillet 1968 à Lagos.

    7AN, Fonds Foccart, 5 AG/2854-3041.

    8CIA, The Président’s daily Brief, 27 July 1969, [https://www.cia.gov/library/readingroom/docs/DOC_0005976901.pdf], consulté le 24 février 2019.

    9Bat J.-P., Le syndrome Foccart. La politique française en Afrique de 1959 à nos jours, op. cit., p. 342.

    10AN, FPU/2432, lettres au général de Gaulle notamment celle du 9 février 1969.

    11Wauthier C., « Jacques Foccart et les mauvais conseils de Félix Houphouët-Boigny », Les Cahiers du Centre de Recherches Historiques, no 30, 2002.

    12Captain Armand, Biafra vaincra, Paris, éditions France-Empire, 1969.

    13Dossier dactylographié et intitulé « Informations confidentielles à utiliser sans mention de la source » apparemment rédigé le 30 janvier 1968 (mention ajoutée au stylo), archives privées Bob Denard, carton 74.

    14CIA, Special Memorandum. Nigerai : How the Civil War may End, 2 February 1969, [https://www.cia.gov/library/readingroom/docs/CIA-RDP79R00967A000800030007-4.pdf], consulté le 22 février 2019.

    15Bat J.-P. et Geneste P., « Jean Mauricheau-Beaupré : de Fontaine à Mathurin, jmb au service du Général », Relations internationales, 142-2, 2010, p. 87-100.

    16Voir le témoignage notamment de Maurice Delaunay dans le documentaire de Joël Calmettes, Histoires secrètes du Biafra, Paris, Beta digital, film documentaire de 55 minutes.

    17Calmettes J., Histoires secrètes du Biafra, Paris, Beta digital, film documentaire de 55 minutes.

    18AN, Fonds Letteron, 90 AJ 76-79.

    19Captain Armand, Biafra vaincra, op. cit., p. 137.

    20Dossier dactylographié et intitulé « Informations confidentielles à utiliser sans mention de la source » apparemment rédigé le 30 janvier 1968 (mention ajoutée au stylo), archives privées Bob Denard, carton 74. Les cotes indiquées pour le fonds Denard correspondent à la numérotation lors de leur consultation en des mains privées. Déposé aux AN et actuellement en cours de classement, ce fonds devrait avoir pour côte 770 AP et une numérotation de cartons différente.

    21Dossier dactylographié et intitulé « Informations confidentielles à utiliser sans mention de la source » apparemment rédigé le 30 janvier 1968 (mention ajoutée au stylo), archives privées Bob Denard, carton 74.

    22Idem.

    23CIA, Central Intelligence Bulletin, 15 juillet 1967, [https://www.cia.gov/library/readingroom/docs/CIA-RDP79T00975A010100120001-5.pdf], consulté le 8 mai 2017.

    24Calmettes J., Histoires secrètes du Biafra, op. cit.

    25Baxter P., « Biafra. The Nigerian Civil War 1967-1970 », Africa@War, volume 16, 2014.

    26Draper M. I., Shadows : airlift and airwar in Biafra and Nigeria, 1967-1970, Indianapolis, Indiana University Press, 2010.

    27Desgrandchamps M.-L., L’humanitaire en guerre civile : une histoire des opérations de secours au Nigéria-Biafra 1967-1970, thèse sous la direction de Pierre Boilley et Mathias Schulz, Paris 1, université de Genève, 2014.

    28CIA charged with complicity in Southeast Asian, African opium Trade, 17 janvier 1970, [https://www.cia.gov/library/readingroom/document/520037a0993294098d517384] consulté le 25 février 2019.

    29Desgrandchamps M.-L., L’humanitaire en guerre civile : une histoire des opérations de secours au Nigéria-Biafra 1967-1970, op. cit., p. 341.

    30Idem.

    31Compte rendu de mission du 23 octobre 1967 où Guy Cardinal rapporte à Denard son entrevue avec le colonel Ojukwu et des intermédiaires pour tenter d’obtenir un contrat pour le GATI, archives privées Bob Denard, carton 74.

    32CIA, Intelligence Memorandum. Nigeria : Communist influence and aid, 8 décembre 1967, [https://www.cia.gov/library/readingroom/docs/CIA-RDP79T00826A003000300001-9.pdf], consulté le 12 mars 2019.

    33Compte rendu de mission du 23 octobre 1967, archives privées Bob Denard, carton 74.

    34Lunel P., Bob Denard. Le roi de fortune, Paris, Éditions no 1, 1991.

    35Ibid., p. 398.

    36Compte rendu de mission du 23 octobre 1967 où Guy Cardinal rapporte à Denard son entrevue avec le colonel Ojukwu et des intermédiaires pour tenter d’obtenir un contrat pour le GATI, archives privées Bob Denard, carton 74.

    37Rapport de Cardinal du 30 octobre 1967, archives privées Bob Denard, carton 74.

    38Ibid.

    39Dossier dactylographié et intitulé « Informations confidentielles à utiliser sans mention de la source » apparemment rédigé le 30 janvier 1968 (mention ajoutée au stylo), archives privées Bob Denard, carton 74.

    40[http://www.ordredelaliberation.fr/fr/les-compagnons/552/pierre-laureys], consulté le 19 mai 2017.

    41Les chiffres diffèrent selon les sources. Bob Denard parle de 150 000 dollars. Lunel P., Bob Denard. Le roi de fortune, op. cit., p. 398. La plupart des ouvrages évoquent la somme de 200 000 dollars.

    42Zumbach J., Mister Brown. Aventures dans le ciel, Paris, Robert Laffont, 1973.

    43Faligot R., Guisnel J. et Kauffer R., Histoire politique des services secrets français, Paris, La Découverte, coll. « Les cahiers libres », 2012.

    44Loiseau M. dit le Bosco, Mémoires inédits de Bosco, mémoire dactylographié, 12 chapitres dont certains comportent plusieurs versions.

    45Steiner R., Carré rouge. Du Biafra au Soudan, le dernier condottiere, Paris, Robert Laffont, 1976.

    46Interview du général Jean Varret pour le dossier La guerre du Biafra, diffusé sur la chaîne Histoire le 10 décembre 2003.

    47AN, 5 AG FPU/574, lettre du 30 août 1968.

    48AN, 5 AG FPU/2432, lettre du 9 février 1969.

    49Archives privées Bob Denard, journal de bord du Mi Cabo Verde, carton 74.

    Auteur

    Walter Bruyère-Ostells

    Professeur d’histoire contemporaine à Sciences Po Aix et directeur du CHERPA (EA 4261). Spécialiste de l’histoire des circulations de combattants irréguliers, il a notamment publié Dans l’ombre de Bob Denard. Les mercenaires français de 1960 à 1989 (2014) et Volontaires armés. Ces Français qui ont combattu pour une cause étrangère depuis 1945 (2018) chez Nouveau Monde éditions.

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    1Bat J.-P., Le syndrome Foccart. La politique française en Afrique de 1959 à nos jours, Paris, Gallimard, coll. « Folio Histoire », 2012.

    2Archives nationales (AN), Fonds Foccart, 5 AG/3041, télégramme diplomatique du 7 décembre 1966.

    3AN, Fonds Foccart, 5 AG/2234, note SDECE D 52734/N du 24 novembre 1966.

    4Foccart J., Foccart parle, entretiens avec Philippe Gaillard, Paris, Fayard, vol. 1, 1995, p. 728-729.

    5AN, Fonds Foccart, 5 AG/3041.

    6Idem. Télégramme à l’arrivée du 29 juillet 1968 à Lagos.

    7AN, Fonds Foccart, 5 AG/2854-3041.

    8CIA, The Président’s daily Brief, 27 July 1969, [https://www.cia.gov/library/readingroom/docs/DOC_0005976901.pdf], consulté le 24 février 2019.

    9Bat J.-P., Le syndrome Foccart. La politique française en Afrique de 1959 à nos jours, op. cit., p. 342.

    10AN, FPU/2432, lettres au général de Gaulle notamment celle du 9 février 1969.

    11Wauthier C., « Jacques Foccart et les mauvais conseils de Félix Houphouët-Boigny », Les Cahiers du Centre de Recherches Historiques, no 30, 2002.

    12Captain Armand, Biafra vaincra, Paris, éditions France-Empire, 1969.

    13Dossier dactylographié et intitulé « Informations confidentielles à utiliser sans mention de la source » apparemment rédigé le 30 janvier 1968 (mention ajoutée au stylo), archives privées Bob Denard, carton 74.

    14CIA, Special Memorandum. Nigerai : How the Civil War may End, 2 February 1969, [https://www.cia.gov/library/readingroom/docs/CIA-RDP79R00967A000800030007-4.pdf], consulté le 22 février 2019.

    15Bat J.-P. et Geneste P., « Jean Mauricheau-Beaupré : de Fontaine à Mathurin, jmb au service du Général », Relations internationales, 142-2, 2010, p. 87-100.

    16Voir le témoignage notamment de Maurice Delaunay dans le documentaire de Joël Calmettes, Histoires secrètes du Biafra, Paris, Beta digital, film documentaire de 55 minutes.

    17Calmettes J., Histoires secrètes du Biafra, Paris, Beta digital, film documentaire de 55 minutes.

    18AN, Fonds Letteron, 90 AJ 76-79.

    19Captain Armand, Biafra vaincra, op. cit., p. 137.

    20Dossier dactylographié et intitulé « Informations confidentielles à utiliser sans mention de la source » apparemment rédigé le 30 janvier 1968 (mention ajoutée au stylo), archives privées Bob Denard, carton 74. Les cotes indiquées pour le fonds Denard correspondent à la numérotation lors de leur consultation en des mains privées. Déposé aux AN et actuellement en cours de classement, ce fonds devrait avoir pour côte 770 AP et une numérotation de cartons différente.

    21Dossier dactylographié et intitulé « Informations confidentielles à utiliser sans mention de la source » apparemment rédigé le 30 janvier 1968 (mention ajoutée au stylo), archives privées Bob Denard, carton 74.

    22Idem.

    23CIA, Central Intelligence Bulletin, 15 juillet 1967, [https://www.cia.gov/library/readingroom/docs/CIA-RDP79T00975A010100120001-5.pdf], consulté le 8 mai 2017.

    24Calmettes J., Histoires secrètes du Biafra, op. cit.

    25Baxter P., « Biafra. The Nigerian Civil War 1967-1970 », Africa@War, volume 16, 2014.

    26Draper M. I., Shadows : airlift and airwar in Biafra and Nigeria, 1967-1970, Indianapolis, Indiana University Press, 2010.

    27Desgrandchamps M.-L., L’humanitaire en guerre civile : une histoire des opérations de secours au Nigéria-Biafra 1967-1970, thèse sous la direction de Pierre Boilley et Mathias Schulz, Paris 1, université de Genève, 2014.

    28CIA charged with complicity in Southeast Asian, African opium Trade, 17 janvier 1970, [https://www.cia.gov/library/readingroom/document/520037a0993294098d517384] consulté le 25 février 2019.

    29Desgrandchamps M.-L., L’humanitaire en guerre civile : une histoire des opérations de secours au Nigéria-Biafra 1967-1970, op. cit., p. 341.

    30Idem.

    31Compte rendu de mission du 23 octobre 1967 où Guy Cardinal rapporte à Denard son entrevue avec le colonel Ojukwu et des intermédiaires pour tenter d’obtenir un contrat pour le GATI, archives privées Bob Denard, carton 74.

    32CIA, Intelligence Memorandum. Nigeria : Communist influence and aid, 8 décembre 1967, [https://www.cia.gov/library/readingroom/docs/CIA-RDP79T00826A003000300001-9.pdf], consulté le 12 mars 2019.

    33Compte rendu de mission du 23 octobre 1967, archives privées Bob Denard, carton 74.

    34Lunel P., Bob Denard. Le roi de fortune, Paris, Éditions no 1, 1991.

    35Ibid., p. 398.

    36Compte rendu de mission du 23 octobre 1967 où Guy Cardinal rapporte à Denard son entrevue avec le colonel Ojukwu et des intermédiaires pour tenter d’obtenir un contrat pour le GATI, archives privées Bob Denard, carton 74.

    37Rapport de Cardinal du 30 octobre 1967, archives privées Bob Denard, carton 74.

    38Ibid.

    39Dossier dactylographié et intitulé « Informations confidentielles à utiliser sans mention de la source » apparemment rédigé le 30 janvier 1968 (mention ajoutée au stylo), archives privées Bob Denard, carton 74.

    40[http://www.ordredelaliberation.fr/fr/les-compagnons/552/pierre-laureys], consulté le 19 mai 2017.

    41Les chiffres diffèrent selon les sources. Bob Denard parle de 150 000 dollars. Lunel P., Bob Denard. Le roi de fortune, op. cit., p. 398. La plupart des ouvrages évoquent la somme de 200 000 dollars.

    42Zumbach J., Mister Brown. Aventures dans le ciel, Paris, Robert Laffont, 1973.

    43Faligot R., Guisnel J. et Kauffer R., Histoire politique des services secrets français, Paris, La Découverte, coll. « Les cahiers libres », 2012.

    44Loiseau M. dit le Bosco, Mémoires inédits de Bosco, mémoire dactylographié, 12 chapitres dont certains comportent plusieurs versions.

    45Steiner R., Carré rouge. Du Biafra au Soudan, le dernier condottiere, Paris, Robert Laffont, 1976.

    46Interview du général Jean Varret pour le dossier La guerre du Biafra, diffusé sur la chaîne Histoire le 10 décembre 2003.

    47AN, 5 AG FPU/574, lettre du 30 août 1968.

    48AN, 5 AG FPU/2432, lettre du 9 février 1969.

    49Archives privées Bob Denard, journal de bord du Mi Cabo Verde, carton 74.

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    Bruyère-Ostells, Walter. « Les acteurs de “l’arrière” dans la guerre du Biafra : circulations d’armes, contrats mercenaires et géopolitique ». In L’Europe et l’Afrique, édité par Michel Catala. Rennes: Presses universitaires de Rennes, 2020. https://doi.org/10.4000/13vtc.
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