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    Plan détaillé Texte intégral La logistique française vers les Antilles Trafics entre la France et les Antilles : opportunités économiques Rochefort, un modèle portuaire introuvable Notes de bas de page Auteur

    Les Européens et les Antilles

    Ce livre est recensé par

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    Table des matières

    À propos de Rochefort et des Antilles au xviiie siècle : anatomie d’une économie portuaire née à l’ombre de la logistique coloniale de la France

    Rochefort in the 18th century: a French naval base supplying the Caribbean

    Sébastien Martin

    p. 219-231

    Résumés

    À partir du cas français, le texte entend mettre en évidence l’existence d’un pan méconnu de l’économie transatlantique, né des activités logistiques de la Marine pour approvisionner les Antilles et assurer la préparation des opérations militaires combinées organisées dans le cadre de l’impérialité. L’enjeu est d’apprécier, dans la globalité des liens entre les Européens et les Antilles, les effets de l’ouverture au monde dont peuvent profiter les habitants d’une ville-arsenal comme Rochefort, ville étroitement dépendante de la politique de puissance conduite par la monarchie française. La compréhension fine de cette réalité invite à s’intéresser plus que jamais aux ports secondaires et aux ports militaires que l’on ne soupçonne pas de pratiquer le commerce avec les Antilles, et qui se montrent pourtant actifs en la matière.

    Examining the French case, this chapter explains a poorly-known part of the transatlantic economy: the logistic activities of the Navy. The purpose of contribution is to assess the effects of this openness to the world and its benefits for the population of Rochefort. Fine-grained understanding of this case encourages us to focus more than ever on secondary ports and military ports.

    Texte intégral La logistique française vers les Antilles Trafics entre la France et les Antilles : opportunités économiques Rochefort, un modèle portuaire introuvable Notes de bas de page Auteur

    Texte intégral

    1Au sein de l’arc antillais, déjà réduit à l’échelle de la planète, les possessions françaises – Saint-Domingue, Martinique, Guadeloupe et ses dépendances – ne sont que des « points imperceptibles dans le vaste océan1 » atlantique. Cette réalité ne saurait faire oublier que ces territoires appartiennent à un archipel propulsé par des Européens au cœur de l’économie-monde de l’époque moderne, au point de faire du commerce transatlantique un élément moteur de la croissance du Vieux-Continent et de la plupart de ses ports qui connaissent ainsi une prospérité certaine2. Objet de convoitises après avoir été un enjeu de conquête au temps des pionniers, les Antilles sont dès le xviie siècle un théâtre où s’expriment les rivalités européennes, et où l’appropriation des ressources de l’économie de plantation et le contrôle des trafics nécessaires à l’acheminement des productions antillaises vers l’Europe imposent de dépasser les modèles impériaux ibériques de la première mondialisation3. Dans ce cadre, à l’âpre concurrence que se livrent planteurs et négociants de chacune des nations en présence se surimposent des opérations d’ordre militaire dont l’autonomisation par rapport aux affrontements du continent européen, spécialement à partir de la guerre de la Ligue d’Augsbourg (1688-1697), exige une militarisation de la région. Leur réussite repose sur la possibilité de soutenir une mobilisation logistique de nature à dépasser les contraintes régionales parmi lesquelles la faiblesse des ressources locales et l’éloignement ne sont pas les moindres4. N’oublions pas aussi qu’atteindre la Guadeloupe et la Martinique depuis la France demande plus de 40 jours de mer. Le climat et la végétation compliquent en outre la mise en défense de ces territoires, comme la construction d’infrastructures portuaires et le stationnement des troupes. Le xviiie siècle est la période d’une première projection permanente de forces à travers l’Atlantique, qui aboutit à la constitution d’un « système de défense » dont l’étude reste à mener dans le cadre d’une histoire militaire du monde atlantique toujours à écrire faute d’avoir suscité l’intérêt des historiens de l’Atlantic history5. Investissement de longue haleine, le processus est complexe, protéiforme, en raison de la perméabilité entre les différents facteurs mis en jeu, et il évolue nécessairement selon une trajectoire sensible aux disponibilités financières, aux tensions entre nations européennes, ou encore aux variations de la pensée stratégique hésitant entre transfert des modèles militaires métropolitains et adaptation aux réalités de l’outre-mer. La France et l’Angleterre, qui sont concernées au premier chef, en offrent deux exemples intéressants, les Antilles servant de surcroît de base avancée à leurs opérations militaires sur le continent américain6. Bien que le dispositif mis en place par les Anglais se soit révélé supérieur à celui de la France, grâce notamment au Victualling Board et aux bases d’English Harbor et de Port-Royal, l’engagement repose des deux côtés sur la mise en œuvre d’un dispositif logistique chargé de projeter vers les Antilles appareil d’État et moyens militaires7. Dans le cas français, cette logistique à double visées s’opère de façon assez cohérente sous l’autorité du secrétariat d’État de la Marine ; Marine et colonies dépendent du même département ministériel. Or, s’il appartient à la Marine d’assurer la continuité de l’État et la défense des intérêts français dans les Antilles, le processus convoque aussi nombre d’acteurs de l’économie de la façade atlantique, et en particulier ceux qui gravitent autour des arsenaux.

    2Dans la perspective offerte par la thématique « Les Européens et les Antilles », l’objet de cette contribution n’est pas tant de proposer une synthèse portant sur l’organisation de la logistique coloniale française du xviiie siècle, que de mettre en évidence l’existence d’un pan méconnu de l’économie transatlantique, formé à partir des activités de la Marine pour approvisionner les Antilles et assurer la préparation des opérations militaires combinées destinées à défendre les positions de la France dans cette région du monde. À partir de ce cas particulier, l’enjeu est d’apprécier, dans la globalité des liens entre les Européens et les Antilles, les effets de l’ouverture au monde dont peuvent profiter les habitants d’une ville comme Rochefort, ville née à l’ombre de son arsenal et étroitement dépendante de la politique de puissance conduite par la monarchie française.

    La logistique française vers les Antilles

    3Assurer le ravitaillement des territoires ultra-marins dépendants d’une métropole constitue une mission nécessaire au succès de toute politique impériale. Pour la France, les choix décisifs s’opèrent au cours des premières années du ministère Maurepas lorsque le jeune secrétaire d’État de la Marine saisit que « le soutien et la conservation des colonies éloignées, qui ne pouvant se maintenir par elles-mêmes, ont un besoin indispensable de l’appui et du secours des États de qui elles dépendent ». Et d’ajouter : « cet appui et ce secours ne peuvent leur être fournis que par le moyen des forces navales8 ». Cette prise de conscience, finalement tardive et formulée a posteriori pour justifier l’augmentation des crédits de la Marine, intervient après un xviie siècle caractérisé par l’absence d’une politique suivie alors que le défi logistique s’impose déjà comme une donnée fondamentale de la montée en puissance des enjeux antillais. Si les sources sont malheureusement peu bavardes sur le basculement qui s’opère au début du xviiie siècle, l’expression « Service des colonies » par laquelle elles désignent l’organisation mise en place pour assurer le transfert des hommes et du matériel vers les outre-mer, montre bien que la monarchie française abandonne alors les solutions de ravitaillement ponctuelles, mises en œuvre en gré de la conjoncture géostratégique, au profit d’une organisation structurée et permanente. Bien qu’il ne soit pas encore question de logistique à proprement parler, la praxie logistique apparaissant au xixe siècle avec les contraintes organisationnelles de l’industrie, les attendus propres à toute supply chain management sont posés : comment dépasser la distance entre la France et ses territoires ultra-marins, spécialement les Antilles, organiser des flux d’hommes et de marchandises entre un arrière-pays producteur et un avant-pays à mettre en défense et à administrer, et ainsi obtenir le bien ou la personne souhaité(e) à l’endroit adéquat dans les meilleurs délais possibles9. Au fil de la réflexion et des premières mises en œuvre, l’arsenal de Rochefort devient le point névralgique d’un dispositif réticulaire centré sur la métropole, celle-ci concentrant ressources et centre de décision opérationnel ; un choix qui doit se comprendre dans la double perspective du réinvestissement d’un site portuaire loin des hauts niveaux d’activités pour lequel il a été édifié, et de la volonté de la monarchie de dissocier ses intérêts et ceux du privé en distinguant ravitaillement d’État et trafics commerciaux10. Arsenal rêvé par un Jean-Baptiste Colbert désireux d’offrir au Roi-Soleil un instrument de puissance sur mer, Rochefort devient avec Maurepas la « porte des colonies » de la monarchie française. Et sur les rives de la Charente, l’on dispose d’un point de vue original sur les relations entre les Européens et les Antilles. La somme des efforts déployés ici aboutit en effet à l’armement et au départ de près d’un millier de navires ravitailleurs11. Au cours de la période, la route antillaise est donc un axe de structuration majeur de l’Atlantique militaire français, et sur l’ensemble du xviiie siècle, les Antilles profitent d’un effort logistique considérable. La documentation permet d’avoir une idée assez fine du maillage portuaire mis en place et de la logique réticulaire qu’il offre à la France : la Guadeloupe et ses dépendances – Marie-Galante et les Saintes – aux « isles sous le vent », Martinique, Sainte-Lucie aux « isles du vent », et Saint-Domingue dans les Grandes Antilles, cette dernière possession constituant une pièce maîtresse12. À l’échelle infra, les ports antillais sont des relais essentiels entre la longue distance et la proximité. Leur opérativité est déterminante car ils sont à la fois des zones de débarquement et des points d’éclatement des flux dans chacun des sous-ensembles de l’arc antillais. L’examen minutieux des rotations organisées au xviiie siècle montre que l’ensemble ne subit pas de modifications majeures au cours de la période, et que la France profite d’un dispositif doté d’une forte capacité de résilience qui invite à nuancer l’idée ancienne de la faillite permanente du ravitaillement français face à une Royal navy dont la prééminence est bien réelle en la matière malgré tout13. Ravitailler les colonies consiste à expédier depuis Rochefort des produits dont la variété pourrait laisser penser à un trafic similaire en de nombreux points à ceux organisés à la même époque par les négoces à partir des ports marchands de la façade ponantaise, et parmi lesquels l’on trouve aussi des farines, des vins et eaux-de-vie, des meubles, du « lard », des « aiguilles à coudre », des outils, du bois, des métaux, des « éponges », des plantes, de l’argent, ou encore des animaux14. Les « marchandises et munitions » expédiées depuis Rochefort sont bigarrées et composites, et leur énumération a tout d’un inventaire presque sans limite. De cette diversité émergent les orientations et les ressorts de la politique d’impérialité de la France dans les Antilles. Ainsi l’exercice de la souveraineté et la mise en défense sont-elles deux constantes, auxquelles s’ajoutent l’effort de guerre au moment des conflits, au moins lorsque les liaisons entre les Antilles et la métropole ne sont pas rompues comme ce fut le cas au cours de la guerre de Sept Ans15. Bien que les données, qui sont éparses et fragmentaires, ne permettent pas toujours de préciser la volumétrie exacte des envois ni l’état dans lequel les effets sont reçus aux Antilles, il s’avère que le ravitaillement est avant tout militaire. Rien d’étonnant à ce que « fusils », « poudre », « canons », « uniformes » dominent très largement les envois et que d’imposants transports de troupes soient aussi le quotidien du service des colonies au xviiie siècle. Pour assurer les opérations logistiques qu’exige la politique de défense de la France, la Marine se dote d’un écosystème d’une étonnante modernité qui se nourrit de sous-traitance et d’emprunts permanents aux capacités de l’arsenal de Rochefort, ce dernier se trouvant être parfois son propre fournisseur16. En matière de vecteurs de transport, le constat pouvant être dressé est du même ordre : la « flotte des colonies » se révèle un instrument d’une grande adaptabilité en raison de l’emploi combiné des unités de la Marine – « flûtes » et navires de guerre – et de navires marchands affrétés auprès des armateurs des trois grands ports voisins de Rochefort : Bordeaux, La Rochelle et Nantes17. Si ce choix autorise une progression qualitative de la logistique française de la Régence à la guerre de Sept Ans, il favorise aussi localement l’émergence d’un tissu économique aux mains d’entrepreneurs capables de répondre aux commandes et aux attentes de la Marine, ce qui conduit tout naturellement à s’interroger sur les retombées économiques induites par les liens entre Rochefort et les Antilles.

    Trafics entre la France et les Antilles : opportunités économiques

    4Le renouvellement historiographique intervenu à partir de la formulation du concept fiscal military state, synonyme de militarisation et de renforcement de l’État, a inscrit à l’agenda des historiens un aspect longtemps négligé par les travaux de l’histoire navale : l’économie de la guerre sur mer18. La logistique coloniale de la France est à la fois un observatoire privilégié de la question et un exemple supplémentaire des effets d’entraînement que peuvent produire les dépenses d’un État, spécialement à l’échelle d’une ville-arsenal. Sur la façade atlantique, Rochefort présente un cas de figure atypique, en comparaison de Brest, puisque la ville-port saintongeaise ne bénéficie pas du privilège d’entrepôt accordé par les lettres patentes d’avril 1717 ; une exclusion qui prolonge dans le temps le principe, cher à Colbert, de la stricte séparation entre activités marchandes et militaires interdisant par conséquent tout « commerce des isles » à Rochefort19. Or, les produits que l’on trouve indistinctement sur les quais de l’arsenal et du port de commerce prouvent que la réalité est bien différente et qu’il existe bel et bien des trafics commerciaux avec les colonies, plus particulièrement avec les Antilles. Indépendamment de la trilogie sucre, café, cacao, Rochefort profite de l’éventail complet des productions coloniales qui font la richesse des ports européens à l’époque. La cargaison retour de la flûte du roi La Charente en offre un bel exemple avec « 214 300 livres de sucre », « 6 quarts de cacao », du « caffé », mais également du « tabac », du « coton », des « piastres », du « rocou », de l’« indigot », du bois de « coumarou », de « gayac », de « sinarouba »20. Si l’on s’en tient aux seuls déchargements de sucre de la décennie 1730, les quantités arrivées à Rochefort à bord des navires du roi varient entre 300 000 livres et 1 million de livres, soit largement moins qu’à Nantes au cours de la même période mais bien plus qu’à Brest21. Si la contrebande est la principale cause expliquant la présence de ces produits dans la ville-arsenal bretonne, elle n’est que l’une des sources d’apports. La situation est bien plus complexe en raison de la fréquence des retours mêlant contrebande, marchandises embarquées en fret et « pacotille » relevant de la pratique du port-permis autorisé à bord des navires du roi22. Dans le second cas, le fret, l’opération revêt des formes régulières fixées contractuellement et le paiement d’une taxe de 3 % ad-valorem au titre des droits du Domaine d’Occident, le déchargement devant s’opérer à La Rochelle, seul port de la région autorisé à recevoir des marchandises coloniales23. Le port-permis est plus problématique, mais aussi plus intéressant à l’égard de notre propos. Les contentieux qu’occasionne cette pratique montrent que le phénomène est loin d’être marginal et que le succès de ces trafics gris, à la limite de l’illicite, repose avant tout sur la complicité de tous, officiers de plume et d’épée, marins, hommes de l’arsenal. Grâce à cela, certains n’hésitent pas à embarquer des quantités si indécentes qu’elles contraignent les autorités à intervenir. En 1739, plus de 67 000 livres de sucre et 2 300 livres d’indigo sont ainsi découvertes à bord de L’Orox à son retour de Saint-Domingue sans que leur chargeur ne puisse être identifié, évidemment24. Parfois le sort déjoue les plans des marins : le gardien Jean Peluchon et le second maître Simon Bardet sont pris, sans doute après avoir été dénoncés, avec « 34 andouilles de tabac pesant 154 livres » alors qu’ils tentaient nuitamment de les débarquer du Héros en 172325. Grâce aux sources, l’on sait que les marins maîtrisent la plupart des astuces des contrebandiers, du simple paquet dans la poche au ballot dissimulé à l’intérieur d’une cache savamment pratiquée dans le calage de la cargaison des navires navigant entre la France et les Antilles. Le plan d’arrimage de La Fille Unique, l’un des rares à nous être parvenus, est un témoignage précieux des multiples possibilités offertes par la plasticité des aménagements intérieurs d’un navire26. Les chiffres avancés précédemment au sujet des produits coloniaux débarqués à Rochefort doivent donc être vus comme des minimas n’étant que la face visible d’une activité dont les profits irriguent toute l’économie d’une ville et autorisent quelques belles réussites individuelles. Le pilote du roi Jean Garnier est visiblement de ceux qui ont su saisir cette ouverture sur le commerce transatlantique27. Dans sa demeure, rue Royale, les stocks de « deux cents livres de cacao » et « cinq cents livres de café » – respectivement pour une valeur de « 250 livres » et « 450 livres » – témoignent de son implication et des possibilités que lui offre chaque voyage aux Antilles. La liste des débiteurs à qui Jean Garnier prête de l’argent donne en outre un aperçu éclairant du spectre social des personnes impliquées dans ce petit commerce : « plusieurs personnes de l’équipage du vaisseau du roi La Gironde », « le sieur Baron sous-ingénieur », « le Sieur Legrand lieutenant de compagnie », un « secrétaire », un « officier des troupes ». La complexité du cas rochefortais tient à la deuxième source des trafics antillais, les affrètements au roi. Loin de pouvoir assurer le transport des marchandises et des personnels nécessaires à la politique de défense des Antilles, la Marine appuie son effort sur les capacités des ports de la façade atlantique, et cette sous-traitance de la guerre sur mer offre aux armateurs la possibilité de réduire les coûts d’armement de certains de leurs navires destinés aux îles. Le corpus des contrats d’affrètement, toujours conservés dans les archives de la Marine, permet de se faire une idée assez précise des conditions de ce trafic original. Compte-tenu des conditions tarifaires particulièrement avantageuses – de l’ordre de 90 à 200 livres/tonneau selon les périodes – proposées par la Marine entre la France et les Antilles, fréter au roi permet de couvrir une partie de la mise-hors d’un armement en droiture28. À cela s’ajoute l’exemption d’assurance, le roi s’engageant à régler à l’affréteur le montant de la valeur du navire en cas de perte ; une clause qui est particulièrement avantageuse au regard du coût parfois prohibitif des primes d’assurance29. Avec de telles conditions, chaque affrètement est un moyen très avantageux d’acheminer un navire aux Antilles avec la perspective d’effectuer un voyage retour dont le produit est toujours rémunérateur. L’estimation du volume des produits coloniaux ainsi acheminés à Rochefort demeure extrêmement délicate. Les sources sont lacunaires et les fausses déclarations brouillent forcément les pistes. Les rôles de désarmement du port de Rochefort attestent de retours bien que les cargaisons nous échappent en partie sauf lorsqu’un incident intervient et laisse des traces écrites. Pour les années 1760-1780, ces rôles permettent d’estimer le phénomène à 12 unités/an30. Au-delà de la seule question des échanges, les affrètements jouent un rôle d’entraînement indéniable sur l’économie portuaire. Alors que ces opérations sont pour les grandes maisons de commerce – les Gradis de Bordeaux ou les Chaurand de Nantes, par exemple – un simple élément de diversification de leurs portefeuilles d’activités, elles ouvrent l’horizon antillais à des acteurs locaux très modestes qui n’ont ni les capitaux nécessaires à l’aventure antillaise, ni la connaissance des rythmes du marché et des espaces lointains. Pour les Rochefortais, ces trafics constituent une ouverture sur les réseaux de financement du commerce antillais qui fait la fortune des grandes places portuaires françaises, encore que les mécanismes de répartition financière et les marges de manœuvre induites soient encore à examiner dans le détail. Dans le paysage local, quel meilleur exemple que celui de la réussite de la famille Hèbre qui, au mitan du xviiie siècle, devient un acteur incontournable de l’économie rochefortaise31.

    Rochefort, un modèle portuaire introuvable

    5Si les produits coloniaux débarqués à Rochefort demeurent évidemment très modestes comparées aux arrivées bordelaises ou nantaises de la même époque, ils confirment néanmoins combien est variée la mosaïque portuaire de la France où chaque entité s’individualise en développant des combinaisons originales – si ce n’est des stratégies – afin de tirer son épingle du jeu. Le constat conduit évidemment à relativiser ici la portée des fameuses lettres patentes de 1717. Plus largement, il confirme que nombre d’entorses ont existé. En 1775, l’arrêt « qui permet aux négociants de Rochefort de faire directement par le port de cette ville le commerce des îles et des colonies » ne modifie pas fondamentalement l’activité du port marchand de Rochefort32. Le texte n’est ni l’acte de naissance d’un grand port, ni le signal d’un second décollage économique après celui de 1666, entraîné initialement par la création de l’arsenal. Selon toute vraisemblance, les trafics vers les Antilles n’explosent pas à Rochefort à partir de 1775 ; concurrence des ports ponantais déjà solidement positionnés oblige, modestie d’un tissu économique extrêmement dépendant des commandes de la Marine aussi33. Les trafics informels, entre contrebande et activité légale, l’infra-économie qu’ils autorisent aussi dans les interstices de la mono-activité caractérisant Rochefort, invitent à questionner le mode de développement du port marchand, d’abord à partir du profit qu’ont pu en tirer les acteurs de la cité saintongeaise. Comme le soulignait à juste titre Guillaume Daudin dans son remarquable travail de thèse sur la croissance française au xviiie siècle, le sujet ne manque pas de difficultés lorsqu’il s’agit d’utiliser les archives des négociants : lacunes documentaires, fragilité de celles disponibles en raison de la culture marchande du « flou », insuffisance de savoir-faire technique pour retracer une activité où tout se fait « simultanément ou successivement, suivant le temps et les occasions » pour reprendre des mots de Pierre Léon34. À bien des égards, les archives de la Marine sont un recours et offrent un matériau neuf qui a l’avantage de permettre la reconstitution de nombre d’opérations commerciales à l’origine du profit qui nous intéresse. Le cas de Jean Garnier et celui de la maison de commerce Hèbre de Saint-Clément peuvent être examinés. Dans le premier cas, la liste des débiteurs mentionnée dans l’inventaire après-décès que fait dresser la veuve de Jean Garnier, en 1741, met en lumière des pratiques s’apparentant à une activité de banque. Les dettes actives du couple se montent en effet à 838 lt 10 sols. Si l’on s’en tient à une somme prêtée à plusieurs membres d’équipage de la flûte du roi La Gironde selon une formule inspirée du « prêt à la grosse » et à un taux d’intérêt moyen de 5 %, le profit potentiel enregistré pour le simple prêt avoisine les 42 lt sur la base d’un seul voyage35. Dans le cas d’un partage à mi-fruit d’une vente de sucre, le gain était sans doute bien plus élevé. À cela faut-il ajouter le petit commerce auquel s’adonne sa femme en vendant café et chocolat au domicile. Cet éclairage ponctuel dévoile des modalités d’accumulation du capital fort singulières, qui font qu’un simple « maître pilote entretenu pour le service du roi au port de Rochefort » se trouve à la tête d’un capital dépassant les 19 000 livres alors que sa carrière est tout juste entamée ; somme qui n’a rien d’exceptionnelle – notre pilote est loin d’appartenir à l’élite de la société rochefortaise – mais qui fait de Jean Garnier un animateur de l’économie locale36. Pour les Hèbre, la question du profit est à replacer dans la perspective longue d’une affaire familiale intimement liée à l’approvisionnement de l’arsenal à partir des premières années de la Régence. Sortie du monde de la boutique, la famille change définitivement d’envergure après le traité de Paris (1763). C’est dans le cadre de la sous-traitance voulue par les autorités qu’intervient le très intéressant affrètement de La Bonne-Mère37. Appartenant à la maison Chaurand Frères de Nantes, ce navire de 550 tx est frété au roi en septembre 1779 au prix de 25 lt/tonneau, ce qui est loin des tarifs très élevés – de l’ordre de 100 à 150 lt/tonneau – qui seront pratiqués quelques mois plus tard en pleine guerre d’Indépendance américaine. Conformément au contrat, l’affrètement vaut aux Rochefortais une commission de 721 lt car ils agissent en qualité de commissionnaires. Pas de quoi pavoiser. Si l’opération est prise dans son ensemble, telle qu’elle a sans doute été imaginée par les frères Chaurand, et si l’on considère que les Hèbre sont aussi intéressés au financement de l’armement, le profit est d’un autre ordre. En se fondant sur le retour d’une cargaison de sucre vendue en métropole et sur une marge basse de l’ordre de 30 lt/tonneau, l’opération produit un gain net – recettes de l’affrètement et vente du sucre – qui dépasse les 21 200 lt, soit un taux de profit de 3,4 % pour une durée d’immobilisation de dix-huit mois. À 75 lt/tonneau, soit une marge de 55 lt/tonneau, le taux de profit tutoie les 58 %38 ! L’hypothèse d’un naufrage intervenant lors de la traversée aller n’est pas dénuée d’intérêt car le contrat d’affrètement prévoit alors une indemnisation à hauteur de 200 lt/tonneau, soit 110 000 lt. L’affrètement n’aurait certes produit aucun profit, mais la somme se serait révélée suffisante pour couvrir la mise-hors, les gages dus à l’équipage, rendant ainsi l’opération financièrement neutre. À partir de ces exemples, il est évident que les relations entre Rochefort et les Antilles ont un effet d’entraînement sur l’économie portuaire, le profit étant au cœur des inter-relations entre trafics et croissance économique39. À l’époque de Jean Garnier et des Hèbre, le port marchand est scindé en deux entités bien distinctes : le « Chenal au vivres » et « La Cabane carrée ». Tandis que le premier doit son nom à sa proximité avec l’arsenal et vit des trafics liés à l’approvisionnement de la Marine, le second reste un port de transbordement des produits traditionnels – eaux-de-vie, blés et pierres de taille – qui transitent sur la Charente et qui sont caractéristiques des trafics fluvio-maritimes du bassin picto-charentais40. La montée en puissance des affrètements, liée à la politique de sous-traitance engagée massivement par la Marine à partir de la guerre de Succession d’Autriche (1740-1748), favorise néanmoins la maritimisation d’un lieu qui semble s’être progressivement modernisé. Jean-Pierre Bec y signale, à la veille de la guerre d’Indépendance américaine, cale de raboub et magasins, même si l’ensemble reste très probablement sommaire en raison du coût de telles installations et surtout de l’opposition de la Marine à voir s’implanter un pôle marchand si prêt de ses propres installations41. Les rôles de désarmement sont là encore très utiles. Ils confirment l’inscription progressive du commerce des îles dans l’activité portuaire de Rochefort, au même titre que le « grand cabotage » et le « cabotage », c’est-à-dire les navigations vers les autres ports ponantais et les relations de proximité à l’échelle de la rivière de Charente et des pertuis saintongeais42. Pour la seule année 1769, le tonnage moyen des navires désarmés – autour de 300 tx – à « La Cabane Carrée » traduit bien le phénomène. Plus intéressant encore, onze des treize unités proviennent de la Guadeloupe, de la Martinique, et de Saint-Domingue. Dans le détail, le rythme des désarmements est à contretemps de l’économie des autres ports ponantais, les trafics s’opérant ici dans un cadre militaire. L’ouverture antillaise se montre néanmoins fragile, et elle est sérieusement compromise lorsqu’intervient la réorientation du dispositif colonial français après la guerre d’Indépendance américaine, privant Rochefort des affrètements au roi, et donc le port de toute possibilité de diversification. À cet égard, les expéditions de traite organisées à la toute fin du xviiie siècle ne doivent pas faire illusion43. Rochefort reste un port de commerce off-shore, étroitement dépendant des activités de la Marine, et l’un des rares qui ne file pas vers l’aval. Si grâce aux Antilles, les Rochefortais ont pu s’enrichir, acquérir quelques biens, vivre mieux, ou encore doter leur port d’infrastructures nouvelles, l’épargne qui a éventuellement pu être constituée à l’échelle de la ville-arsenal se révèle au final insuffisante pour soutenir le financement de trafics transatlantiques d’initiative locale.

    ***

    6Les relations entre un port, une ville, et la mer, sont toujours complexes à analyser, spécialement si l’on s’attache à saisir cette réalité dans la perspective des changements de hiérarchies portuaires qui s’opèrent sur la longue durée, du xviie au xixe siècle44. Si le cas de Rochefort confirme la forte adaptabilité qui caractérise les organismes vivants que sont les ports, il invite aussi à reprendre à nouveaux frais la place de la ville-arsenal dans le Monde atlantique, soixante-dix ans après la publication des premiers travaux de Jacques Godechot sur le sujet et vingt ans après ceux de Paul Butel45 ; cette fameuse ville-arsenal qui est à la fois une base de projection de la puissance d’un État et un pôle d’entrainement aux avant-postes de la nouvelle économie de l’époque et des bouleversements qu’elle implique. Ces remarques renvoient nécessairement aux limites communes à toute étude de cas comme l’est cette contribution, où la question de la représentativité se pose de façon insoluble. La focalisation sur Rochefort impose une grande prudence lorsqu’il s’agit de généraliser. Néanmoins l’économie informelle présentée ici fait écho au fait que la Marine participe, directement ou indirectement, à la croissance de pans entiers de l’économie d’Ancien Régime. À la charnière de deux mondes, la réalité des villes-arsenaux appelle aussi à nuancer l’interprétation traditionnelle du modèle de développement portuaire apparu avec la première mondialisation et à se défier de la valeur universelle d’un take-off fondé sur le seul développement du commerce46. De nombreuses niches économiques sont aussi à prendre en compte. Ressurgit au passage le vieux débat sur l’impossibilité d’un développement marchand lorsque la Marine est présente dans un port. Rochefort montre bien qu’une voie existe et que son appréhension passe obligatoirement par l’échelle micro-économique. Les éléments présentés ici invitent naturellement à un retour aux archives pour étayer plus solidement la question de l’économie informelle, sans pour autant négliger l’approche sérielle, qui est la seule à même de réellement positionner un port dans le large éventail des réalités de l’économie du xviiie siècle. La combinaison des deux approches est indispensable pour mieux comprendre comment la guerre a pu être parfois un élément moteur du développement portuaire alors que l’historiographie en a globalement fait un élément perturbateur des trafics et des économies portuaires. Reste que cette micro-histoire est la seule qui autorise à saisir très concrètement certaines opportunités offertes aux acteurs des ports, d’autant que celles-ci passent le plus souvent sous les radars des historiens des villes portuaires et de ceux de l’Atlantic history. Dans un article passé relativement inaperçu en dépit de son caractère fort stimulant, Silvia Marzagalli insistait déjà sur la nécessité de mettre en lumière de telles opportunités, comme les limites de la méthode, en focalisant sur les acteurs, en pratiquant une histoire par le bas, pour vraiment saisir les dynamiques économiques de l’Atlantique français, parce que les taux de croissance et la répartition des trafics ne peuvent pas tout dire47. Étudier les dessous de Rochefort, et ceux des villes-arsenaux en général, relève de ce parti-pris heuristique. La compréhension fine de l’économie atlantique invite donc à s’intéresser plus que jamais aux ports secondaires, à ceux qui régressent dans la hiérarchie portuaire, à ceux que l’on ne soupçonne pas non-plus de pratiquer le commerce avec les Antilles, comme Rochefort, et qui se montrent pourtant actifs.

    Notes de bas de page

    1Butel Paul, Histoire des Antilles françaises, Paris, Perrin, 2007 (2e édition), p. 9.

    2Guillaume Daudin nuance néanmoins les effets du commerce atlantique en insistant sur le fait qu’ils portent davantage sur la baisse des coûts de transaction que sur la croissance en elle-même, Daudin Guillaume, « Le commerce maritime et la croissance européenne au xviiie siècle », in Christian Buchet et Gérard Le Bouëdec (dir.), La mer dans l’histoire, la période moderne, Woodbridge, Boydell et Brewer, 2017, p. 9-18.

    3Plouviez David, « Relais, bases et ports coloniaux militaires : une projection mondiale à l’époque moderne ? », Enquêtes et documents, no 50, Bruno Marnot et Jean-François Klein (dir.), Les Européens dans les ports en situation coloniale, xvie-xxe siècle, Presses universitaires de Rennes, 2014, p. 71-106.

    4Les travaux de Christian Buchet ont parfaitement mis en évidence, dans une perspective comparatiste, la compétition qui oppose Français et Anglais pour suppléer ces handicaps à partir des capacités de leurs ports métropolitains : Buchet Christian, La lutte pour l’espace caraïbe et la façade atlantique de l’Amérique centrale et du Sud, 1672-1763, Paris, Librairie de l’Inde, 1991.

    5À l’exception notoire de l’université de Nantes à qui l’on doit un cycle d’études sur le sujet : Enquêtes et documents, no 49, David Plouviez (dir.), Défense et colonies dans le monde atlantique, xve-xxe siècle, Presses universitaires de Rennes, 2014.

    6L’épisode de la guerre de Sept Ans (1756-1763) constitue à cet égard un révélateur dont la connaissance a considérablement progressé ces dernières années : Dull Jonathan R., La guerre de Sept Ans. Histoire navale, politique et diplomatique, Bécherel, Les Perséides, 2009 ; Baugh Daniel A., The global Seven Years War, 1754-1763 : Britain and France in a Great Power Contest, London/New York, Routledge, 2011.

    7Voir la synthèse française sur le sujet : Martin Sébastien, Rochefort, arsenal des colonies au xviiie siècle, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2015.

    8AN, France, Fonds Marine, G 222, « Réflexions sur le commerce et la Marine », Maurepas, 1745.

    9Guillerme André, « L’émergence du concept de réseau, 1820-1830 », in Gabriel Dupuy (dir.), Réseaux territoriaux, Paris, Paradigme, 1988, p. 34.

    10Si le ravitaillement d’État échappe officiellement au principe de l’Exclusif, son organisation très centralisée aboutit à un système logistique qui s’inscrit dans la pensée mercantiliste au point de négliger le potentiel d’approvisionnent du continent américain, spécialement au moment de la guerre d’Indépendance américaine (1775-1783) au cours de laquelle la France rencontre de vraies difficultés en la matière, Bodle Wayne, « La logistique et l’armée française en Amérique », in Olivier Chaline, Philippe Bonnichon et Charles-Philippe de Vergennes (dir.), La France et l’Indépendance américaine, Paris, Presses de l’université Paris-Sorbonne, 2008, p. 99-114.

    11Martin Sébastien, op. cit., p. 70.

    12La France dispose de cinq ports à Saint-Domingue : Port-au-Prince, Petit Goave, Léogane à l’ouest, Fort Saint-Louis sur la côte sud, et Le Cap français au nord.

    13Plouviez David (dir.), op. cit., p. 10.

    14Martin Sébastien, op. cit., p. 49.

    15Villiers Patrick, Marine royale, corsaires et trafic dans l’Atlantique de Louis XIV à Louis XVI, Dunkerque, Société dunkerquoise d’histoire et d’archéologie, 1991, p. 408 ; Id. Le commerce colonial atlantique et la guerre d’Indépendance des États-Unis d’Amérique : 1778-1783, New-York, Arno Press, 1977, p. 304.

    16Les deux « magasins des colonies » successivement installés dans l’arsenal de Rochefort sont des plus modestes comparés au reste des installations du port – « magasin général », « magasin particuliers », ou encore « corderie » – et sont notoirement sous-dimensionnés. La documentation mentionne à de nombreuses reprises des prélèvements dans les stocks de l’arsenal.

    17En moyenne, sur l’ensemble du xviiie siècle, la flotte des colonies se compose à 17 % de flûtes, 11 % de navires de guerre, 72 % d’affrètements, ce dernier chiffre témoignant d’un recours massif à la sous-traitance, notamment lors des conflits. Néanmoins, l’écart entre navires du roi et affrètements est à relativiser. Ici, l’usage intensif des flûtes compense évidemment leur faible représentation numérique.

    18Brewer John, The Sinews of power. War, money and the English State, 1688-1783, Londres, Unwin Hyman, 1989. L’auteur est à l’origine d’un courant historiographique dont les historiens français peinent encore à s’emparer en dépit des jalons posés par Buchet Christian, Marine, économie et société, un exemple d’interaction : l’avitaillement de la Royal Navy durant la guerre de Sept Ans, Paris, Honoré Champion, 1999 et, plus récemment, Revue d’histoire maritime, no 22-23, David Plouviez (dir.), L’économie de la guerre navale de l’Antiquité au xxe siècle, Presses de l’université Paris-Sorbonne, 2017.

    19Lettres patentes du roy pour le commerce des colonies françaises, données à Paris au mois d’avril 1717

    20SHD Rochefort, 1 R 2, non-folioté.

    21Brouard Emmanuel et Godelaine Florent, « La Loire fleuve “sucré” : voiture par eau d’une denrée exotique et relations entre le bassin fluvial, Nantes et les Antilles aux xviie et xviiie siècles », Cahiers des Anneaux de la Mémoire, no 16, La Loire et le commerce atlantique, xviie-xixe siècle, 2015, p. 93 ; Fernand Braudel estimait quant à lui la consommation annuelle de chaque Français à 1 kg/pers./an : Braudel Fernand, Civilisation matérielle, économie et capitalisme, xve-xviiie siècle, Paris, Armand Colin, 1979, p. 254.

    22Les autorités tolèrent que chaque marin puisse embarquer à titre personnel quelques marchandises dont le volume varie en fonction du rang. Ce fret reste néanmoins soumis au paiement du Domaine d’Occident.

    23Sur le Ponant, seuls Calais, Dieppe, Le Havre, Rouen, Saint-Malo, Morlaix, Brest, Nantes, La Rochelle, Bordeaux, Bayonne profitent du privilège d’entrepôt en vertu de l’article premier des lettres patentes de 1717.

    24SHD Rochefort, 1 E 130, fo 277.

    25SHD Rochefort, 1 E 102, fo 477.

    26SHD Rochefort, 1 E 206, fo 12.

    27Acerra Martine, « Fortune de mer au xviiie siècle ou comment s’enrichir quand on est un modeste pilote du roi à Rochefort », Enquêtes et documents, no 35, Dominique Le Page (dir.), Usages et images de l’argent dans l’Ouest atlantique aux temps modernes. Étude de documents, Presses universitaires de Rennes, 2007, p. 231.

    28Soit un peu moins de la moitié des frais de mise-hors (hors amortissement) d’un navire de 550 tx comme La Bonne-Mère, Meyer Jean, L’armement nantais dans la deuxième moitié du xviiie siècle, Paris, SEVPEN, 1969, p. 283.

    29Sur cette question, se reporter à Ducoin Jacques, Naufrages, conditions de navigation et assurances dans la marine de commerce du xviiie siècle : le cas de Nantes et de son commerce colonial avec les îles d’Amérique, Paris, Librairie de l’Inde, 1993. Voir aussi Roulet Éric et Borde Christian (dir.), L’assurance maritime, xive-xixe siècle, coll. Les sources de l’histoire maritime, Shaker Verlag, Aachen, 2017.

    30SHD Rochefort, 7 P 8-1 à 3.

    31Martin Sébastien, « Les Hèbre de Rochefort. Portrait d’une famille d’entrepreneurs au service de la Marine au xviiie siècle », in Christian Borde et Éric Roulet (dir.), L’entreprise maritime. Essai de définition, xvie-xxie siècle, Villeneuve-d’Ascq, Presses universitaires du Septentrion, à paraître.

    32Arrêt qui permet aux négociant de Rochefort de faire directement, par le port de cette ville, le commerce avec les îles et les colonies d’Amérique, et de jouir des privilèges d’entrepôts et autres exemptions portées dans les lettres patentes d’avril 1717.

    33La documentation est en effet incomplète, ce qui impose la prudence.

    34Daudin Guillaume, Commerce et prospérité. La France au xviiie siècle, Paris, Presses de l’université Paris-Sorbonne, 2005, p. 241.

    35Le cas de Jean Garnier mérite une recherche à lui seul. Dans l’hypothèse d’une opération commerciale visant à rapporter et vendre du sucre en mettant en commun l’ensemble des sommes prêtées, avec un partage à mi-fruit du produit de la vente, le profit bondit à plus de 40 % de la somme investie (avec un prix moyen de 20 lt/cent et un prix de vente en métropole de 50 lt/cent).

    36L’appointement d’un pilote est compris entre 36 et 50 lt par mois, selon l’Ordonnance de Louis XIV pour les armées navales et arsenaux de Marine, Paris, Michallet, 1689, p. 159.

    37SHD Rochefort, 1 R 31, contrat d’affrètement de La Bonne-Mère.

    38Martin Sébastien, op. cit., p. 331.

    39Daudin Guillaume, art. cité, p. 16.

    40Sauzeau Thierry, « Les petits ports, animateurs de l’économie maritime de la mer des Pertuis saintongeais (xve-xviiie siècles) », Rives méditerranéennes, no 35, 2010, p. 85.

    41Bec J.-P., L’activité du port de Rochefort à la fin du xviiie siècle (1780-1789), maîtrise d’histoire, dactyl., université de Poitiers, 1970.

    42Sauzeau Thierry, art. cité, p. 86.

    43Gandouet Denis, « Rochefort et la traite négrière au xviiie siècle », in Mickaël Augeron et Olivier Caudron (dir.), La Rochelle, l’Aunis et la Saintonge face à l’esclavage, Paris, Les Indes Savantes, 2012, p. 55-64.

    44Saupin Guy, « Mondialisation et modification des hiérarchies des grands ports de commerce, mi xviie-mi xixe siècle : une comparaison entre l’Espagne, la France et la Grande-Bretagne », Nuevo Mundo Mundos Nuevos [en ligne], Colloques, mis en ligne le 16 décembre 2016, consulté le 11 décembre 2017 [http://journals.openedition.org/nuevomundo/69917].

    45Godechot Jacques, Histoire de l’Atlantique, Paris, Bordas, 1947 ; Butel Paul, Histoire de l’Atlantique de l’Antiquité à nos jours, Paris, Perrin, 1997. Il faut évidemment aussi mentionner le colloque organisé par Guy Saupin en 2003 à Nantes dont les travaux ont été suivis d’une très belle publication : Saupin Guy (dir.), Villes atlantiques dans l’Europe occidentale du Moyen Âge au xxe siècle, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2006.

    46Pétré-Grenouilleau Olivier, « Commerce colonial et développement économique en France au xviiie siècle », in Reynald Abad, Jean-Pierre Bardet et Jean-François Dunyach (dir.), Les passions d’un historien. Mélanges en l’honneur de Jean-Pierre Poussou, Paris, Presses de l’université Paris-Sorbonne, 2010, p. 641-651

    47Marzagalli Silvia, « Opportunités et contraintes du commerce colonial dans l’Atlantique français au xviiie siècle : Le cas de la maison Gradis de Bordeaux », Outre-Mers. Revue d’histoire, t. 97, no 362-363, p. 87-110.

    Auteur

    • Sébastien Martin

      Maître de conférences en histoire moderne à l’université du Littoral-Côte d’Opale, membre du Centre de recherche en histoire atlantique et littorale – Unité de recherche sur l’histoire, les langues, les littératures et l’interculturel (CRHAEL-HLLI-EA 4030). Ses recherches portent sur les activités des marines de guerre, leurs retombées socio-économiques et culturelles, ainsi que sur les sociabilités et l’économie du quotidien des villes-arsenaux. Il a notamment publié Rochefort arsenal des colonies au xviiie siècle, aux Presses universitaires de Rennes (2015).

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    1Butel Paul, Histoire des Antilles françaises, Paris, Perrin, 2007 (2e édition), p. 9.

    2Guillaume Daudin nuance néanmoins les effets du commerce atlantique en insistant sur le fait qu’ils portent davantage sur la baisse des coûts de transaction que sur la croissance en elle-même, Daudin Guillaume, « Le commerce maritime et la croissance européenne au xviiie siècle », in Christian Buchet et Gérard Le Bouëdec (dir.), La mer dans l’histoire, la période moderne, Woodbridge, Boydell et Brewer, 2017, p. 9-18.

    3Plouviez David, « Relais, bases et ports coloniaux militaires : une projection mondiale à l’époque moderne ? », Enquêtes et documents, no 50, Bruno Marnot et Jean-François Klein (dir.), Les Européens dans les ports en situation coloniale, xvie-xxe siècle, Presses universitaires de Rennes, 2014, p. 71-106.

    4Les travaux de Christian Buchet ont parfaitement mis en évidence, dans une perspective comparatiste, la compétition qui oppose Français et Anglais pour suppléer ces handicaps à partir des capacités de leurs ports métropolitains : Buchet Christian, La lutte pour l’espace caraïbe et la façade atlantique de l’Amérique centrale et du Sud, 1672-1763, Paris, Librairie de l’Inde, 1991.

    5À l’exception notoire de l’université de Nantes à qui l’on doit un cycle d’études sur le sujet : Enquêtes et documents, no 49, David Plouviez (dir.), Défense et colonies dans le monde atlantique, xve-xxe siècle, Presses universitaires de Rennes, 2014.

    6L’épisode de la guerre de Sept Ans (1756-1763) constitue à cet égard un révélateur dont la connaissance a considérablement progressé ces dernières années : Dull Jonathan R., La guerre de Sept Ans. Histoire navale, politique et diplomatique, Bécherel, Les Perséides, 2009 ; Baugh Daniel A., The global Seven Years War, 1754-1763 : Britain and France in a Great Power Contest, London/New York, Routledge, 2011.

    7Voir la synthèse française sur le sujet : Martin Sébastien, Rochefort, arsenal des colonies au xviiie siècle, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2015.

    8AN, France, Fonds Marine, G 222, « Réflexions sur le commerce et la Marine », Maurepas, 1745.

    9Guillerme André, « L’émergence du concept de réseau, 1820-1830 », in Gabriel Dupuy (dir.), Réseaux territoriaux, Paris, Paradigme, 1988, p. 34.

    10Si le ravitaillement d’État échappe officiellement au principe de l’Exclusif, son organisation très centralisée aboutit à un système logistique qui s’inscrit dans la pensée mercantiliste au point de négliger le potentiel d’approvisionnent du continent américain, spécialement au moment de la guerre d’Indépendance américaine (1775-1783) au cours de laquelle la France rencontre de vraies difficultés en la matière, Bodle Wayne, « La logistique et l’armée française en Amérique », in Olivier Chaline, Philippe Bonnichon et Charles-Philippe de Vergennes (dir.), La France et l’Indépendance américaine, Paris, Presses de l’université Paris-Sorbonne, 2008, p. 99-114.

    11Martin Sébastien, op. cit., p. 70.

    12La France dispose de cinq ports à Saint-Domingue : Port-au-Prince, Petit Goave, Léogane à l’ouest, Fort Saint-Louis sur la côte sud, et Le Cap français au nord.

    13Plouviez David (dir.), op. cit., p. 10.

    14Martin Sébastien, op. cit., p. 49.

    15Villiers Patrick, Marine royale, corsaires et trafic dans l’Atlantique de Louis XIV à Louis XVI, Dunkerque, Société dunkerquoise d’histoire et d’archéologie, 1991, p. 408 ; Id. Le commerce colonial atlantique et la guerre d’Indépendance des États-Unis d’Amérique : 1778-1783, New-York, Arno Press, 1977, p. 304.

    16Les deux « magasins des colonies » successivement installés dans l’arsenal de Rochefort sont des plus modestes comparés au reste des installations du port – « magasin général », « magasin particuliers », ou encore « corderie » – et sont notoirement sous-dimensionnés. La documentation mentionne à de nombreuses reprises des prélèvements dans les stocks de l’arsenal.

    17En moyenne, sur l’ensemble du xviiie siècle, la flotte des colonies se compose à 17 % de flûtes, 11 % de navires de guerre, 72 % d’affrètements, ce dernier chiffre témoignant d’un recours massif à la sous-traitance, notamment lors des conflits. Néanmoins, l’écart entre navires du roi et affrètements est à relativiser. Ici, l’usage intensif des flûtes compense évidemment leur faible représentation numérique.

    18Brewer John, The Sinews of power. War, money and the English State, 1688-1783, Londres, Unwin Hyman, 1989. L’auteur est à l’origine d’un courant historiographique dont les historiens français peinent encore à s’emparer en dépit des jalons posés par Buchet Christian, Marine, économie et société, un exemple d’interaction : l’avitaillement de la Royal Navy durant la guerre de Sept Ans, Paris, Honoré Champion, 1999 et, plus récemment, Revue d’histoire maritime, no 22-23, David Plouviez (dir.), L’économie de la guerre navale de l’Antiquité au xxe siècle, Presses de l’université Paris-Sorbonne, 2017.

    19Lettres patentes du roy pour le commerce des colonies françaises, données à Paris au mois d’avril 1717

    20SHD Rochefort, 1 R 2, non-folioté.

    21Brouard Emmanuel et Godelaine Florent, « La Loire fleuve “sucré” : voiture par eau d’une denrée exotique et relations entre le bassin fluvial, Nantes et les Antilles aux xviie et xviiie siècles », Cahiers des Anneaux de la Mémoire, no 16, La Loire et le commerce atlantique, xviie-xixe siècle, 2015, p. 93 ; Fernand Braudel estimait quant à lui la consommation annuelle de chaque Français à 1 kg/pers./an : Braudel Fernand, Civilisation matérielle, économie et capitalisme, xve-xviiie siècle, Paris, Armand Colin, 1979, p. 254.

    22Les autorités tolèrent que chaque marin puisse embarquer à titre personnel quelques marchandises dont le volume varie en fonction du rang. Ce fret reste néanmoins soumis au paiement du Domaine d’Occident.

    23Sur le Ponant, seuls Calais, Dieppe, Le Havre, Rouen, Saint-Malo, Morlaix, Brest, Nantes, La Rochelle, Bordeaux, Bayonne profitent du privilège d’entrepôt en vertu de l’article premier des lettres patentes de 1717.

    24SHD Rochefort, 1 E 130, fo 277.

    25SHD Rochefort, 1 E 102, fo 477.

    26SHD Rochefort, 1 E 206, fo 12.

    27Acerra Martine, « Fortune de mer au xviiie siècle ou comment s’enrichir quand on est un modeste pilote du roi à Rochefort », Enquêtes et documents, no 35, Dominique Le Page (dir.), Usages et images de l’argent dans l’Ouest atlantique aux temps modernes. Étude de documents, Presses universitaires de Rennes, 2007, p. 231.

    28Soit un peu moins de la moitié des frais de mise-hors (hors amortissement) d’un navire de 550 tx comme La Bonne-Mère, Meyer Jean, L’armement nantais dans la deuxième moitié du xviiie siècle, Paris, SEVPEN, 1969, p. 283.

    29Sur cette question, se reporter à Ducoin Jacques, Naufrages, conditions de navigation et assurances dans la marine de commerce du xviiie siècle : le cas de Nantes et de son commerce colonial avec les îles d’Amérique, Paris, Librairie de l’Inde, 1993. Voir aussi Roulet Éric et Borde Christian (dir.), L’assurance maritime, xive-xixe siècle, coll. Les sources de l’histoire maritime, Shaker Verlag, Aachen, 2017.

    30SHD Rochefort, 7 P 8-1 à 3.

    31Martin Sébastien, « Les Hèbre de Rochefort. Portrait d’une famille d’entrepreneurs au service de la Marine au xviiie siècle », in Christian Borde et Éric Roulet (dir.), L’entreprise maritime. Essai de définition, xvie-xxie siècle, Villeneuve-d’Ascq, Presses universitaires du Septentrion, à paraître.

    32Arrêt qui permet aux négociant de Rochefort de faire directement, par le port de cette ville, le commerce avec les îles et les colonies d’Amérique, et de jouir des privilèges d’entrepôts et autres exemptions portées dans les lettres patentes d’avril 1717.

    33La documentation est en effet incomplète, ce qui impose la prudence.

    34Daudin Guillaume, Commerce et prospérité. La France au xviiie siècle, Paris, Presses de l’université Paris-Sorbonne, 2005, p. 241.

    35Le cas de Jean Garnier mérite une recherche à lui seul. Dans l’hypothèse d’une opération commerciale visant à rapporter et vendre du sucre en mettant en commun l’ensemble des sommes prêtées, avec un partage à mi-fruit du produit de la vente, le profit bondit à plus de 40 % de la somme investie (avec un prix moyen de 20 lt/cent et un prix de vente en métropole de 50 lt/cent).

    36L’appointement d’un pilote est compris entre 36 et 50 lt par mois, selon l’Ordonnance de Louis XIV pour les armées navales et arsenaux de Marine, Paris, Michallet, 1689, p. 159.

    37SHD Rochefort, 1 R 31, contrat d’affrètement de La Bonne-Mère.

    38Martin Sébastien, op. cit., p. 331.

    39Daudin Guillaume, art. cité, p. 16.

    40Sauzeau Thierry, « Les petits ports, animateurs de l’économie maritime de la mer des Pertuis saintongeais (xve-xviiie siècles) », Rives méditerranéennes, no 35, 2010, p. 85.

    41Bec J.-P., L’activité du port de Rochefort à la fin du xviiie siècle (1780-1789), maîtrise d’histoire, dactyl., université de Poitiers, 1970.

    42Sauzeau Thierry, art. cité, p. 86.

    43Gandouet Denis, « Rochefort et la traite négrière au xviiie siècle », in Mickaël Augeron et Olivier Caudron (dir.), La Rochelle, l’Aunis et la Saintonge face à l’esclavage, Paris, Les Indes Savantes, 2012, p. 55-64.

    44Saupin Guy, « Mondialisation et modification des hiérarchies des grands ports de commerce, mi xviie-mi xixe siècle : une comparaison entre l’Espagne, la France et la Grande-Bretagne », Nuevo Mundo Mundos Nuevos [en ligne], Colloques, mis en ligne le 16 décembre 2016, consulté le 11 décembre 2017 [http://journals.openedition.org/nuevomundo/69917].

    45Godechot Jacques, Histoire de l’Atlantique, Paris, Bordas, 1947 ; Butel Paul, Histoire de l’Atlantique de l’Antiquité à nos jours, Paris, Perrin, 1997. Il faut évidemment aussi mentionner le colloque organisé par Guy Saupin en 2003 à Nantes dont les travaux ont été suivis d’une très belle publication : Saupin Guy (dir.), Villes atlantiques dans l’Europe occidentale du Moyen Âge au xxe siècle, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2006.

    46Pétré-Grenouilleau Olivier, « Commerce colonial et développement économique en France au xviiie siècle », in Reynald Abad, Jean-Pierre Bardet et Jean-François Dunyach (dir.), Les passions d’un historien. Mélanges en l’honneur de Jean-Pierre Poussou, Paris, Presses de l’université Paris-Sorbonne, 2010, p. 641-651

    47Marzagalli Silvia, « Opportunités et contraintes du commerce colonial dans l’Atlantique français au xviiie siècle : Le cas de la maison Gradis de Bordeaux », Outre-Mers. Revue d’histoire, t. 97, no 362-363, p. 87-110.

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    Martin, Sébastien. « À propos de Rochefort et des Antilles au xviiie siècle : anatomie d’une économie portuaire née à l’ombre de la logistique coloniale de la France ». In Les Européens et les Antilles, édité par Bernard Michon. Rennes: Presses universitaires de Rennes, 2019. https://doi.org/10.4000/13si8.
    Martin, Sébastien. « À propos de Rochefort et des Antilles au xviiie siècle : anatomie d’une économie portuaire née à l’ombre de la logistique coloniale de la France ». Les Européens et les Antilles, édité par Bernard Michon, Presses universitaires de Rennes, 2019, https://doi.org/10.4000/13si8.

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