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    Plan détaillé Texte intégral Des « bâtisseurs de cathédrales » dans la ville-arsenal L’expérience maçonnique La loge, un laboratoire de la nouveauté Notes de bas de page Auteur

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    « Le vrai maçon est entre l’équerre et le compas » : le fait maçonnique dans la ville-arsenal

    L’exemple de Rochefort à la fin du xviiie siècle

    Sébastien Martin

    p. 447-460

    Texte intégral Des « bâtisseurs de cathédrales » dans la ville-arsenal L’expérience maçonnique La loge, un laboratoire de la nouveauté Notes de bas de page Auteur

    Texte intégral

    1En 2016, la Bibliothèque nationale de France consacrait une exposition à la franc-maçonnerie1, point d’orgue d’une série de manifestations scientifiques et d’évènements culturels à propos de l’Art royal marquant le tricentenaire de l’émergence du fait maçonnique en France au xviiie siècle. Si dans la plupart des cas, la question des origines de la maçonnerie occupait une place de choix avec celle des rites et symboles, les liens précocement établis et durablement entretenus – selon les mots de Gilbert Buti – entre la franc-maçonnerie et la mer n’ont guère retenu l’attention, à l’exception notoire de la très belle exposition « Les francs-maçons et la mer, de la loge au quai », présentée au siège du Grand Orient de France et dont Éric Saunier assurait le commissariat2. Or, la sociabilité maçonnique présente des aspects d’une évidente proximité avec les processus de circulations et d’interculturalité propres au monde maritime en général et aux villes portuaires en particulier3. Encore marginale dans le cadre de l’histoire dite maritime, l’étude du fait maçonnique ouvre pourtant des perspectives de recherche particulièrement stimulantes au regard de la connaissance du lien étroit entre l’homme et la mer, encore qu’il ne faille pas faire de la maritimité un paradigme indépassable4. Le Siècle des Lumières se situe d’une certaine manière au carrefour des idées nouvelles et du processus de mondialisation qu’approfondissent alors les Européens à leur profit, celui-ci ayant pour corollaire une montée en puissance des enjeux navals au sein desquels la ville-arsenal occupe une place centrale. Cette dernière présente l’avantage d’être aussi bien marquée par l’État que par la mer, l’un et l’autre imposant leurs rythmes aux acteurs individuels et collectifs, selon une intensité dont les effets échappent encore en partie aux historiens en dehors des grandes respirations socio-économiques et de l’originalité de la société urbaine qui résulte de la rencontre avec l’élément marin. Qui plus est, ce terrain de recherche offre la possibilité d’apprécier la réalité du fait maçonnique en des lieux où ne se retrouvent pas les équilibres traditionnels de la société d’Ancien Régime. À Rochefort, par exemple, la bourgeoisie est peu représentée.

    2Le choix de focaliser sur la ville-arsenal charentaise – Rochefort – constitue une sorte d’hommage à Martine Acerra, car c’est à elle que nous devons le concept de « ville-arsenal », et conséquemment l’émergence d’un questionnement socioculturel à échelle d’homme. Sans crier gare, Martine Acerra a permis un profond renouvellement de l’histoire des arsenaux à partir de l’étude sur la longue durée de Rochefort. Grâce à elle, le cas charentais est désormais l’un des mieux connus de l’Europe moderne5. Passé les aspects militaires, Rochefort constitue aussi un observatoire privilégié de la nébuleuse de sociabilités et de pratiques qui, dans le contexte du Siècle des Lumières, apparaissent ou se transforment. Ville du temporaire soumise aux choix maritimes de l’État royal, ville de passage entre la France et ses colonies, ville de l’innovation technique et scientifique, Rochefort est un territoire de l’altérité où le concret nourrit l’abstrait, le lointain rencontre la proximité, la France d’Ancien Régime se confronte à la nouveauté des sociétés extra-européennes. En dépit de son envergure plutôt modeste à l’échelle du royaume, la cité portuaire compte davantage de loges que bon nombre de villes de taille équivalente dans les années qui suivent le projet de régénération de la franc-maçonnerie française, porté par le duc de Montmorency-Luxembourg6. Comment expliquer que des hommes que rien ne destine à se rapprocher hors du cadre professionnel, des officiers de plume, des techniciens, des médecins, des capitaines marchands, des religieux et des négociants, se retrouvent dans une sociabilité initiatique et fraternelle, à la fois enracinée dans l’Ancien Régime et marquée de manière inédite par une ambition politique qui ne dit pas vraiment son nom ?

    3Loin de livrer une réponse définitive, cette contribution a pour ambition de nourrir la réflexion autour de l’histoire socioculturelle des villes portuaires militaires dont l’essentiel reste à écrire. Évoquer la franc-maçonnerie dans la ville-arsenal impose de s’intéresser à l’expérience maçonnique, d’examiner les liens entre la loge et la nouveauté, et d’abord de revenir sur l’empreinte de la franc-maçonnerie dans la ville-arsenal.

    Des « bâtisseurs de cathédrales » dans la ville-arsenal

    4L’allusion aux statuts des maçons médiévaux à partir desquels les francs-maçons du xviiie siècle définissent leurs pratiques symboliques et rituéliques permet de souligner combien le fait maçonnique n’est pas un simple problème de dénombrement, et combien la compréhension de cette sociabilité exige de croiser les échelles micro, méso, macro, autrement dit de considérer tout à la fois, le frère, la loge et l’obédience. La dichotomie entre pratique opérative et spéculative renvoie aussi au lien indissociable entre art de bâtir et mémoire administrative – le fameux « palais de mémoire » de Saint-Augustin – qui est à l’origine de la documentation aujourd’hui disponible. Le fonds maçonnique, conservé au département des manuscrits de la Bibliothèque nationale de France7, constitue un témoignage précieux de l’édifice administratif bâti par le Grand Orient à partir de 1773, et offre la possibilité de restituer la réalité du territoire maçonnique de l’époque, à commencer par celui de Rochefort. Le travail de Francis Masgnaud sur la franc-maçonnerie saintongeaise n’aurait d’ailleurs pas pu être mené à bien sans cette mine d’informations, encore qu’un long travail d’identification et d’exploitation des sources locales soit encore nécessaire pour vraiment saisir la richesse de ces archives8. Le fait est qu’après la promulgation des statuts du Grand Orient, six loges régulières ou actives peuvent être dénombrées à Rochefort : l’Aimable Concorde, la Constante Société, l’Accord Parfait, les Frères Unis, l’Étroite Observance, la Parfaite Harmonie9. S’y ajoutent des loges flottantes, et au moins cinq loges militaires attachées aux régiments en garnison à Rochefort et dans la région10 ; des loges qui encouragent les maçons locaux à se perfectionner quand elles ne sont pas à l’origine de la création d’un nouvel atelier11. Dans cet ensemble, la Parfaite Harmonie et l’Aimable Concorde occupent une place à part. La première – la Parfaite Harmonie – est ce qu’il convient d’appeler une loge de la Marine. Installée par le chevalier Beufvier de la Louerie en 1762, elle se distingue par son recrutement exclusivement militaire puisque tous les frères qui participent à ses travaux sont officiers de marine ou officiers dans les troupes des colonies, le régiment Suisse de Karrer12. La mise en sommeil de cet atelier en 1776, après que le Grand Orient ait répondu défavorablement à la demande de constitution formulée par ses membres, mérite d’être signalée car elle met concrètement en évidence les effets locaux des dynamiques croisées de la structuration de la franc-maçonnerie à l’échelle du royaume et des activités de la Marine qui sont, quant à elles, intimement liées aux choix militaires de la monarchie, en l’occurrence ici sa décision de soutenir les Insurgents des colonies anglaises d’Amérique et d’engager des préparatifs de guerre contre l’Angleterre. Quant à l’Aimable Concorde, elle est sans doute la plus ancienne loge installée à Rochefort. À la date de sa reconstitution par le Grand Orient, en 1774, les frères de cet atelier revendiquent une installation par la Grande Loge en 1755 et une ancienneté d’une trentaine d’années, ce qui en fait l’une des toutes premières loges d’Aunis et de Saintonge, au même titre que la Concorde de La Rochelle constituée pour sa part en 1744. Dans les deux cas, la mobilité des hommes, et avec eux celle des idées, fonde une franc-maçonnerie avant tout portuaire dont la vivacité ne se dément pas sur l’ensemble de la seconde moitié du xviiie siècle13. Le bilan à la veille de la Révolution consacre cette situation avec une quinzaine de loges sur le littoral – pour l’essentiel à La Rochelle et Rochefort – pour seulement quatre dans l’arrière-pays, à Saint-Jean d’Angély, Saintes, Aulnay et Barbezieux. Pascal Even estime que la présence des étrangers constitue l’autre facteur déterminant du fait maçonnique sur le littoral14. Encore faut-il sur ce point disjoindre la trajectoire des deux grandes villes portuaires, car si La Rochelle est une interface ouverte sur le Monde atlantique, la ville-arsenal voit quant à elle passer des voyageurs français traversant l’Atlantique sur ordre du roi entre la France et les colonies, ce qui a pour effet de réduire considérablement le cosmopolitisme inhérent à toute présence étrangère. La composition socioprofessionnelle de l’Aimable Concorde de Rochefort confirme d’ailleurs la nécessité de distinguer les deux villes. Alors que les négociants tiennent le haut du pavé dans la capitale aunisienne, ils sont ici numériquement derrière les personnels de la Marine qui représentent presque la moitié des frères15.

    Fig. 1. – Composition de l’Aimable Concorde en 1776.

    Réalisation de S. Martin.

    5Pour autant, le négoce n’est pas tout à fait marginal sur les rives de la Charente puisqu’il ressort une nette congruence entre appartenance au milieu des affaires et exercice des fonctions d’officiers ou de dignitaires dans les loges rochefortaises. En 1776, par exemple, Simon Gaschinard, Bernard Faurès, Louis Charrier, François Serre, et Joseph Lusseau, sont respectivement vénérable de l’Aimable Concorde, orateur, premier surveillant, second surveillant, trésorier. Tous appartiennent au négoce local. Tous sont en affaires avec la Marine16. Loin d’être le théâtre d’une rivalité entre les personnels de la Marine et les négociants, la franc-maçonnerie rochefortaise doit plutôt être vue comme un lieu d’émancipation des individus à qui le fait de travailler dans l’arsenal, ou pour la Marine, procure une vraie reconnaissance sociale. L’absence des officiers de Marine – officiers de plume et officiers d’épée – est d’ailleurs assez significative du fait que la descente sociale de la franc-maçonnerie s’est opérée concomitamment à la désertion de la noblesse. Aucun des frères de la Parfaite Harmonie ne semble en effet avoir sollicité une affiliation à l’Aimable Concorde, ni à la Constante Société ou à l’Accord Parfait non plus17. La noblesse d’épée de Rochefort goûte visiblement assez peu les obligations liées au caractère initiatique et démocratique de la sociabilité maçonnique, et elle privilégie à l’inverse la fréquentation du théâtre et des salons dont les usages distinctifs sont plus à même de satisfaire le goût des mondanités et de l’entre-soi du second ordre18. Le succès de la franc-maçonnerie auprès du Tiers état reste néanmoins incomplet car l’absence des métiers de la construction navale – professions du bois, du fer, du chanvre, de la toile, de la peinture – et plus largement de ceux nécessaires à l’opérativité de la flotte – bouchers et boulangers par exemple – montre qu’à l’autre extrémité du spectre social le rapport entre organisation du travail dans l’arsenal et tissage social produit un espace relationnel, si ce n’est des solidarités, dont l’attrait est bien supérieur à celui des loges ; une sorte de sociabilité d’atelier qui tend à confirmer que franc-maçonnerie et « Devoirs » des corporations n’ont pas le même recrutement en dépit des analogies formelles que présentent ces deux types de sociétés19. Compte tenu de ces limites, les loges rochefortaises comptent un peu moins d’une centaine de frères20. L’effectif peut sembler modeste au regard du vivier que constitue une ville de 19 000-20 000 habitants, mais avec un ratio de 1 frère pour 200 habitants, Rochefort se caractérise par une présence maçonnique qui dépasse de loin une moyenne française que Pierre-Yves Beaurepaire juge déjà très honnête avec 1 frère pour 1 500 habitants21. Pour une sociabilité dépourvue de toute reconnaissance officielle, la franc-maçonnerie rochefortaise présente un réel dynamisme, surtout si l’on considère que l’absentéisme des frères est un frein aux travaux de l’Aimable Concorde et donc à son attractivité. À titre d’exemple, le tableau de loge de l’année 1776 fait état de plus de 30 % de frères « éloignés de l’orient ». Certains sont loin de Rochefort, partis pour affaires. D’autres sont « en congé » ou embarqués pour le service du roi22. Dès lors, se pose la question des motivations à « passer sous le bandeau », pour reprendre l’expression consacrée qui désigne l’admission d’un nouveau frère en maçonnerie.

    L’expérience maçonnique23

    6La sociabilité maçonnique ouvre une fenêtre sur la vie des hommes de la Marine à la ville, hors de tout cadre professionnel, là où le travail de l’historien se heurte à des sources rares et peu loquaces, à l’inverse de ce que sont les archives du secrétariat d’État de la Marine si utiles lorsqu’il s’agit du quotidien de l’arsenal en lui-même24. Examiner cette facette des villes-arsenaux passe nécessairement par une histoire sensible qui, à partir des quelques « tranches de vie » disponibles, de ces rares éléments de connaissances sur ce qui se passe en ville une fois le labeur dans l’arsenal terminé, exige d’historiciser l’outillage mental des individus, leur imaginaire, les interactions sociales aussi, afin de cerner les contours de l’agréable et du désagréable, du fascinant et du repoussant, du toléré et du refusé, cet ensemble de configurations qui conditionne tant la pratique de l’échange et le lien social. S’agissant d’une sociabilité qui revendique la discrétion à cause de la place centrale accordée à l’initiation, le choix de la franc-maçonnerie peut sembler paradoxal. Or, les apparences sont trompeuses et l’expérience maçonnique est à considérer à bon compte comme une catégorie d’analyse, particulièrement parce qu’il est possible de dépasser le rite adopté par le Grand Orient qui fait du symbolisme un élément structurant de la vie du frère25. Au seuil de la loge, l’étroit filtrage qu’effectue le frère-tuileur pour protéger le temple de l’hybris des hommes pose à lui seul les enjeux de compréhension des pratiques socioculturelles de la ville-arsenal, ville du roi certes, mais aussi ville des Lumières et donc « ville sociable », ne l’oublions pas26. L’usage du mot de passe, ou la production d’un certificat de maçon27, illustre d’une certaine manière la profusion des formes d’association que suscitent les Lumières et la place nouvelle qu’occupe l’acceptation volontaire des règles – fixées de l’intérieur – dans le processus d’agrégation de l’individu au groupe. De ce point de vue, la franc-maçonnerie rochefortaise participe, à son échelle, à l’élaboration des nouvelles formes d’être ensemble qui voient le jour à l’époque. Ce processus novateur d’hybridation entre sphères privée et publique ne va pas sans poser quelques problèmes de voisinage ; preuve que la franc-maçonnerie n’est pas la société secrète que dénoncent les libelles antimaçonniques nourris des divulgations des « secrets des francs-maçons28 ». Preuve surtout qu’il est bien difficile d’échapper au regard des voisins, en dépit des précautions prises pour que les tenues se fassent « toujours le plus tard que faire se pourra afin de se soustraire à la vue des profanes29 ». Ainsi l’Aimable Concorde semble-t-elle avoir été confrontée, au moins une fois, à un conflit de voisinage, rapidement résolu malgré tout grâce à la mise au point d’un modus vivendi définissant les conditions de fermeture de la ruelle d’accès à la loge30. Dans cette histoire par le bas, l’aridité des archives de l’obédience ne permet pas d’aller au-delà du tuilage, et il faut se rendre à La Rochelle pour en savoir davantage. Un acte de justice nous apprend ici que la loge est une pièce

    « de vingt-six pieds de longueur sur vingt-sept de large à l’entrée d’icelle deux colonnes sur l’une desquelles il y a un B sur l’autre un J […] il y a dessiné des compas des équerres des marteaux, clefs, balances, un soleil, une lune […] que au fond et en face de la porte d’entrée il s’y trouvait une espèce de trone en forme de baldaquin de bois doré, soutenu par trois colonnes, peintes en bleu et or, une lampe triangulaire peinte en bleu avec trois G, que l’on monte sur ledit trone par trois marches, un fauteuil de tapisserie au-devant duquel est une petite table triangulaire31 ».

    7Ce document est précieux à double titre. D’abord parce qu’il constitue l’un des rares témoignages écrits de l’aménagement et de la décoration des loges maçonniques en Aunis et Saintonge au xviiie siècle, dévoilant à parts égales la matérialité du lieu et les usages qui en sont fait, même si le notaire et les visiteurs qui l’accompagnent semblent être des profanes – encore que – et « ignorent […] l’usage et l’explication de ses differents objets ». L’autre apport de ce document tient au fait qu’il met parfaitement en évidence le contraste prononcé entre une loge maçonnique et tous les autres intérieurs de la ville moderne. Dépourvu de fenêtre, habillé de symboles, organisé autour du tapis de loge, le temple est un lieu qui matérialise le caractère initiatique et anhistorique de la franc-maçonnerie. Partant, sa singularité marque nettement la frontière qui sépare le monde profane de l’espace sacré où chaque frère recherche en lui la pleine lumière, pour reprendre les mots des francs-maçons, encore que l’iconographie prouve qu’en nombre de cas le tapis de loge « est » la loge.

    Fig. 2. – « Assemblée de francs-maçons pour la réception des Apprentis : entrée du récipiendaire dans la loge ».

    Gravure extraite de la série dite « Gravures de Gabanon », xviiie siècle, éditée par Martin Engelbrecht à Augsbourg, eau-forte coloriée au pochoir, papier, 300x420, BnF, département des Estampes et de la photographie, réserve QB-201 (109)-FOL.

    8La tradition historiographique maçonne a beaucoup insisté sur la cosmogonie des lieux au détriment du vécu du frère, quel que soit son grade, apprenti, compagnon, maître. Il faut reconnaître que les sources se montrent assez peu bavardes sur ce point. Comment vit-on l’initiation ? Dans quelle mesure le rituel participe à la transformation intérieure de l’initié ? Peut-il vraiment laisser ses métaux à la porte du temple, c’est-à-dire rompre avec le quotidien de la ville-arsenal ? Pour répondre, laissons la parole au frère Alexandre Thibaut qui s’exprime en 1774, lors de la fête de la Saint-Jean, à l’occasion de l’installation du duc de Chartres dans la fonction de grand-maître du Grand Orient :

    « Le frère Thibault a dit : Mes chers frères lorsque vous me destinâtes à la place épineuse que j’occupe depuis un an [il est « adjoint au vénérable »] parmi vous, je sentis d’abord toute la difficulté d’en remplir dignement les devoirs. Je ne trouvais aucune des qualités personnelles si nécessaires pour répondre à vos vues. Prudence, sagacité, élocution, tout me faisait connaitre mon insuffisance. Cependant, rassuré par vos bons mots et votre indulgence, j’ai surmonté ma timidité. […] qu’il est flatteur pour moi de pouvoir vous remettre sous les yeux la sublimité de notre institution […] C’est à nous à employer tous les moyens de mériter l’amitié de cet auguste prince [le duc de Chartres] et concourir autant que nous le pourrons au soutien de l’ordre et à arrêter tout ce qui pourrait y nuire32. »

    9Si l’assaut de fidélité envers le nouveau dignitaire de l’obédience – dont la venue est annoncée pour le mois de juillet suivant – n’a rien de très original, on sent l’homme sincèrement comblé d’avoir trouvé auprès de l’Aimable Concorde bien plus qu’une sociabilité protectionnelle, lui l’élève commissaire de la Marine alors âgé de 25 ans.

    10En se réclamant de l’Art des bâtisseurs, les francs-maçons sont légataires d’un héritage symbolique qui se retrouve à la fois en loge et dans la tradition héraldique et sigillographique de la maçonnerie. La mise en cohérence rationnelle de l’ensemble des représentations et leur sensibilité aux évolutions de l’horizon intellectuel européen du xviiie siècle contribuent également à l’expérience maçonnique, bien au-delà de la simple satisfaction du goût des hommes pour les titres et décorations. Certains privilégient l’Antiquité égyptienne, d’autres préfèrent les religions à mystères ou l’imaginaire chevaleresque33. Les sceaux de cire qui nous sont parvenus donnent un aperçu du mille-feuille symbolique qui accompagne l’initié, mais aussi de l’érudition nécessaire pour en percevoir le sens.

    11La plupart des compositions utilisées par l’Aimable Concorde reprennent les motifs génériques des emblèmes maçonniques : le compas pour la tempérance et la dynamique constructive ; l’équerre pour la droiture ; le niveau pour l’horizontalité au sein de la loge ; la perpendiculaire pour l’équité ; la corde à nœuds pour la fraternité entre frères ; le rameau d’acacia pour l’arbre de vie ; les colonnes de Jakin et Boaz pour l’initiation ; le delta rayonnant pour la connaissance ; la première lettre de l’alphabet Rose-Croix pour l’Alpha ; l’étoile à cinq pointes pour l’univers (les 5 éléments et l’esprit) ; la couronne pour la voûte étoilée. Ajoutons à cela l’usage des mots abrégés dont l’initiale est suivie de trois points disposés en triangle dans tous les écrits, un calendrier maçonnique calé sur la datation biblique de la création du monde, soit 4 000 ans avant Jésus-Christ, l’emploi d’expressions souvent imagées comme « passer la truelle » pour oublier les griefs, « l’orient » pour désigner la ville où se trouve l’atelier, « planche » pour correspondance, et l’on comprend mieux combien les activités en loges ouvrent la conscience des hommes à une réalité plus subtile que celle du quotidien de la ville-arsenal. Or, le symbole donne à penser et les effets du symbolisme dont usent les maçons sont particulièrement ambigus, car derrière les métaphores et les monogrammes du langage maçonnique, c’est bien d’égalité, de consentement volontaire et de fraternité, dont il est question.

    Fig. 3. – Sceau de l’Aimable Concorde.

    BnF, FM 2, 374, fo 119, cliché de l’auteur.

    La loge, un laboratoire de la nouveauté

    12L’individualisation de la démarche du frère par rapport aux structures encadrantes de l’Ancien Régime invite naturellement à questionner le rapport entre sociabilité maçonnique et diffusion des idées nouvelles. La fameuse gravure « La nuit, à Londres, un franc-maçon en goguette », de William Hogarth, fait de la franc-maçonnerie une sociabilité de la nuit, à la fois rebelle, bachique, voire débauchée, à contre-courant de ses normes et bien peu en rapport avec la régularité revendiquée par les obédiences de l’époque34.

    Fig. 4. – La nuit, à Londres, un franc-maçon en goguette.

    William Hogarth, The fout Times of Day. Night, Londres, 1738, eau-forte, burin, 510 × 423, BnF, département des Estampes et de la photographie, CD-13-FOL (t. II).

    13La documentation rochefortaise invalide en partie ce type de représentations mais confirme néanmoins que la tension entre les espace-temps maçonnique et profane a bien alimenté un processus de redéfinition du lien social à l’échelle de la ville. À Rochefort comme ailleurs, la loge est bien évidemment traversée par les contradictions d’une époque en transition, entre fidélité à l’Ancien Régime et nouveauté politique. Assujettissement d’abord. Conformément à l’article premier des « Statuts et règlements généraux de la maçonnerie », les frères de l’Aimable Concorde ne manquent aucune occasion de manifester leur attachement à la royauté et s’affichent comme un corps loyal, fidèle, composé de bons chrétiens35. Quelques semaines après l’avènement du nouveau souverain Louis XVI, en 1774, ils décident par exemple que lors de la Saint Jean, « la loge célébrerait par la fête la plus brillante qu’elle pourrait […] et pour que le profane sache à l’extérieur que le premier devoir que nous [les francs-maçons] nous prescrivons est notre attachement invincible pour notre roi, que le bruit du canon militaire lui annonce par trois fois sept applaudissements36 ». À partir de là, lors des agapes, la première santé est portée en l’honneur « de Louis XVI, de son auguste épouse, et de toute la famille royale ». La présence en loge de Jean Lebée et Claude Chicoineau, tous deux « aumoniers des vaisseaux », prouve très concrètement qu’être franc-maçon n’est pas incompatible avec le service du roi ni avec le sacerdoce37. Comme l’a très justement fait remarquer Pierre-Yves Beaurepaire, cette question de l’adhésion à la franc-maçonnerie, et plus largement celle de la structuration du Grand Orient, est à considérer au regard du double contexte des années 1770, lorsque la seule réponse aux désordres au sein de la Grande Loge et à l’opposition soulevée par la réforme Maupeou semble être une réforme pensée par le haut, régénération de la franc-maçonnerie et ajournement du « nouveau parlement » ayant en commun d’apparaître comme des initiatives capables de rétablir l’ordre naturel des choses38. Pour ce qui nous intéresse, en réduisant l’autorité des maître-vénérables sur leur loge et en restaurant une autorité centrale, le Grand Orient initie un projet bien plus politique et institutionnel que les apparences ne le laissent penser. Localement, à Rochefort, ce travail de rationalisation fait naturellement écho aux premières mesures de relance de l’outil naval qu’engage Sartine en prévision d’une nouvelle guerre contre l’Angleterre. Les frères de l’Aimable Concorde, en majorité des personnels de la Marine, applaudissent donc « avec les plus vifs transports à toutes les opérations sages et avantageuses » du Grand Orient, même s’ils n’approuvent pas sans réserve les nouveaux statuts de l’obédience39. Les articles portant sur l’octroi des lettres de constitution, la reconnaissance de la régularité des loges, le monopole de la délivrance des « certificats de maçons », et surtout l’organisation administrative centralisée autour des instances parisiennes de l’obédience, concentrent plus particulièrement les « observations ». Significativement, et bien qu’une partie des débats nous échappent, cette réception sous conditions témoigne de la méfiance que suscite toute idée de centralisation malgré les avantages d’une telle démarche, les maçons y voyant un risque de despotisme. La même remarque peut être formulée à l’égard de la justice que le Grand Orient tente d’imposer aux loges du royaume pour régler les litiges qui opposent les frères et ainsi rétablir l’harmonie dans l’ordre maçonnique. La demande de reconstitution de la Sage liberté – une loge rochefortaise en sommeil – offre une illustration des difficultés que présente l’exercice. Pour l’Aimable Concorde, le frère Lucadou, à l’origine de la démarche de reconstitution, est un « membre retiré », « mécontent de l’avis d’une loge [l’Aimable Concorde] composée de 40 membres », et qui en raison de son « penchant pour le sexe […] s’est mis à la tête d’une société de femmes » en profitant de son statut d’« officier honoraire du Grand Orient40 ». En retour, Antoine Lucadou considère que sa demande est parfaitement légitime et que la constitution obtenue auprès de la Chambre des provinces lui permet de rallumer les feux de la Sage Liberté. Tout à la fois conflit de personnes, manifestation du clivage que représente la place des femmes en franc-maçonnerie41, résultat d’une concurrence locale pour la légitimité maçonnique, l’affaire révèle surtout la position centrale qu’occupe le consentement dans la sociabilité maçonnique. Et si la franc-maçonnerie reste assujettie aux normes de l’Ancien Régime, l’adhésion volontaire de l’individu au groupe se traduit par un processus décisionnaire plutôt inédit, où chacun – du moins les compagnons et les maîtres – est libre d’acquiescer ou, au contraire, de manifester ses réticences voire son opposition, pourvu qu’il soit en mesure d’argumenter son choix. Livrée au détour d’une planche adressée au Grand Orient, une phrase est révélatrice de l’esprit qui anime les frères de l’Aimable Concorde : « la maçonnerie est une espèce de république, ou plutôt chaque loge est elle-même une espèce de république volontaire composée d’êtres libres42 ». L’omniprésence du recours au « scrutin juste, libre et parfait » et la fréquence de la « matière mise en délibération », avec la convocation des principes de liberté et d’égalité que cela suppose, traduisent très concrètement le fait que la nouveauté politique trouve en loge un terreau particulièrement fertile. Néanmoins, le caractère disruptif de l’expérience maçonnique n’est pas encore suffisamment franc pour vraiment concurrencer l’Ancien Régime, et encore moins pour conduire à la Révolution comme l’entendait Ran Halevi, qui voyait dans la franc-maçonnerie une « sociabilité démocratique43 ». Que les francs-maçons se reconnaissent comme pairs et fassent un usage collectif de leur raison fait de la loge un carrefour des dynamiques socioculturelles du Siècle des Lumières plus qu’un lieu où s’amorce l’éclatement de l’Ancien Régime. D’ailleurs, le fait de privilégier la sanior pars – négociants et officiers de plume de l’arsenal – aux dignités maçonniques, pour mettre en avant une composition flatteuse et asseoir ainsi la réputation de la loge, traduit un vrai conformisme social ; une stratégie qui renvoie nécessairement à l’argent et aux dépenses qu’exige la vie de franc-maçon. Comment les petits métiers de l’arsenal, les ouvriers ou commis, peuvent-ils raisonnablement régler les 140 lt. exigées lors de l’initiation, puis les 24 sols annuels pour la capitation maçonnique, alors que leur traitement dépasse rarement 40 sols par journée de travail ? La question se passe de réponse. Dans le prolongement du travail initié par Cécile Revauger et Éric Saunier sur les interactions entre la loge et le port, l’interrogation invite au moins à réfléchir au rapport entre la ville et le fait maçonnique, en ce qu’il a d’utopique, comme aux effets concrets que les pratiques libres et égalitaires des francs-maçons peuvent avoir sur l’urbanité44. À l’échelle de Rochefort, les premières années de la Révolution montrent qu’aucun bilan tangible ne peut raisonnablement être dressé en l’état actuel de la connaissance. Tout juste sait-on que dès 1789, les francs-maçons investissent la vie politique qui s’ouvre aux Français avec les premières réformes de l’Assemblée constituante, au point que les « travaux civils qui ont dans ce moment de régénération occupé […] la plus grande partie des membres de notre atelier […] nous avons été forcés de suspendre nos assemblées », comme le déplore François Dupont, vénérable de l’Aimable Concorde45. Dans son travail sur l’Aunis et la Saintonge, Francis Masgnaud dresse conséquemment le portrait d’une franc-maçonnerie sortie gagnante de l’effondrement de la société d’ordres, comme si la Révolution avait été préparée en loge46. À vrai dire, l’absence de consigne émanant du Grand Orient conduit plus sûrement les frères à s’engager en ordre dispersé selon l’idéal et les intérêts personnels de chacun. Ensuite, leur marginalisation progressive doit sans doute autant à la radicalisation des discours révolutionnaires qu’à la faible diffusion des idées dont s’inspirent les principes maçonniques, à commencer par l’égalité. Accusés de « modérantisme » au moment de la Terreur, les maçons qui s’affichent encore comme tels souffrent du regard de Rochefortais qui voient en la franc-maçonnerie une sociabilité marquée du sceau de l’Ancien Régime, incapable de porter des revendications populaires.

    ⁂

    14Pour une histoire sociale des pratiques culturelles : l’invitation formulée par Pierre-Yves Beaurepaire voilà une bonne quinzaine d’années, en écho aux travaux de Maurice Agulhon et de Daniel Roche, demeure d’une parfaite actualité s’agissant des villes-arsenaux47 ; un domaine d’investigation où le progrès de la connaissance passe nécessairement par l’approfondissement du champ historique avec l’examen de toutes les formes de sociabilités, parmi lesquelles la franc-maçonnerie figure évidemment en bonne place, à condition de ne pas renouer avec l’histoire internaliste de la maçonnologie ni de négliger la spécificité de cette sociabilité. Articulant idées et acteurs, le sujet invite à une recherche trans-périodique qui, sans gommer la complexité des continuités et des ruptures de la période révolutionnaire, met en résonance la ville-arsenal de l’époque moderne avec celle du xixe siècle, lorsque les mutations de la technologie navale bouleversent profondément l’urbanité de tous les ports militaires. Entre les deux, la Révolution pose encore actuellement bien plus de questions que la documentation n’accorde de réponses. À Rochefort, si l’Aimable Concorde se met en sommeil en 1791, la vigueur avec laquelle ses feux sont rallumés une dizaine d’années après laisse penser que les frères ont investi d’autres formes de sociabilités pour préserver le lien maçonnique en attendant des jours meilleurs, preuve que l’hétérogénéité des Lumières permet tous les positionnements politiques48. Rien n’explique non plus comment s’est opéré le virage vers une franc-maçonnerie de notables sous le Consulat et l’Empire. Alors que l’ambiguïté entre société de talents et société élitiste n’a jamais été réglée avant la Révolution, la nouvelle composition de l’Aimable Concorde en fait une loge solidement arrimée au pouvoir en 1804, où se retrouvent nombre d’autorités civiles et militaires de Rochefort, notamment le contre-amiral Savary, l’inspecteur de la Marine Fourcroy, le maire de la ville Hèbre, le juge au tribunal civil Maureau, l’architecte du département de Charente-Maritime Defortair, le « directeur de la poste aux lettres » Arondel49. Pour autant, brûle-t-on en loge l’encens devant l’autel impérial, pour paraphraser Pierre-François Pinaud50 ? La question reste ouverte.

    15Reste l’affinité supposée entre la loge et le monde de la mer que les historiens explorent depuis plusieurs années maintenant51. Ici, tout se passe comme si les idées nouvelles qui animent les discussions en ville et la philosophie de la loge ne convergeaient pas. Comme si la franc-maçonnerie était une micro-société ne cimentant pas au-delà de ce que nous pourrions appeler bien maladroitement aujourd’hui la « classe moyenne supérieure ». Comme si Rochefort n’était pas un port. Les marins sont, il est vrai, presque aussi rares en loge que les ouvriers, et la cité charentaise fait pâle figure en comparaison du dynamisme des loges de la Marine de Brest et Toulon52. La vie en loge diffère finalement peu de celle qui s’épanouit dans les autres orients : limite du concept de franc-maçonnerie maritime, ou spécificité supplémentaire d’une ville déjà singulière en tant de domaines ? Difficile à dire sans dépasser le seul cas rochefortais, sachant que toute micro-histoire n’est jamais qu’une fenêtre ouverte sur une réalité toujours très vaste. La matérialité de la loge, la dimension relationnelle de la franc-maçonnerie, ou son cosmopolitisme, constituent des pistes de recherche particulièrement sérieuses et stimulantes pour faire avancer ce vaste chantier qu’est l’étude des pratiques socioculturelles et du quotidien matériel de la ville-arsenal53. « Gloire au travail » répète le franc-maçon dès lors qu’il a commencé à polir sa pierre brute.

    Notes de bas de page

    1Présentée du 12 avril au 24 juillet 2016 sur le site François Mitterrand en partenariat avec le musée de la franc-maçonnerie, l’exposition mettait en valeur la richesse du dépôt de documents maçonniques de la Bibliothèque nationale de France, qui est sans doute l’un des plus exceptionnel au monde.

    2Voir le catalogue de l’exposition, Les francs-maçons et la mer, de la loge au quai, Paris, musée de la franc-maçonnerie, 2015.

    3Révauger Cécile et Saunier Éric, La franc-maçonnerie dans les ports, Pessac, Presses universitaires de Bordeaux, 2012.

    4Cabantous Alain, « L’histoire maritime : objet de recherche ou leurre historiographique ? », in Christiane Villain-Gandossi et Éric Rieth, Pour une histoire du « fait maritime », sources et champs de recherche, Paris, CTHS, 2001, p. 33-45.

    5Acerra Martine, Rochefort et la construction navale française, 1661-1815, Paris, Librairie de l’Inde, 1992.

    6Le Bihan Alain, Loges et chapitres de la Grande Loge et du Grand Orient de France (2e moitié du xviiie siècle), Paris, CTHS, 1990. L’auteur a dressé une très belle carte de l’implantation du fait maçonnique en France reprise à maintes reprises. Voir sa version actualisée dans Beaurepaire Pierre-Yves, La France des Lumières, 1715-1789, Paris, Belin, coll. « Histoire de France », 2011, p. 362.

    7Bibliothèque nationale de France, département des manuscrits, fonds maçonnique (désormais BnF, FM).

    8Masgnaud Francis, Franc-maçonnerie et francs-maçons en Aunis et Saintonge sous l’Ancien Régime et la Révolution, La Rochelle, Rumeur des âges, 1989.

    9L’Étroite Observance est seulement mentionnée par Francis Masgnaud sur la foi d’une pièce d’archives qui n’est plus dans le dossier mentionné par l’auteur (BnF, FM 2, 375, fo 24). Il est probable qu’elle soit en sommeil à l’époque qui nous intéresse, Masgnaud Francis, op. cit., p. 22.

    10Six loges militaires peuvent être dénombrées les années précédentes, Kerjean Daniel et Le Bihan Daniel, Dictionnaire du Grand Orient de France au xviiie siècle. Les cadres et les loges, Rennes, PUR, 2012, p. 180.

    11Le cas de la Sagesse, à l’orient de Saint-Martin-de-Ré, est à cet égard emblématique puisque l’atelier rétais est fondé en 1776 par des membres de la Parfaite Union du régiment de Vermandois alors stationné sur l’île de Ré, Even Pascal, « Le rôle des loges portuaires dans un province littoral atlantique français », in Cécile Révauger et Éric Saunier, op. cit., p. 69.

    12Van Hille Jean-Marc, Dictionnaire des marins francs-maçons, gens de mer et professions connexes aux xviiie, xixe et xxe siècles, Paris, SPM-Kronos, 2011, p. 61.

    13La tradition maçonnique semble remonter à 1709 à La Rochelle, Flouret Jean, « Les origines de la franc-maçonnerie rochelaise d’après des documents inédits », Actes du Collège d’Histoire de la franc-maçonnerie d’Aunis et Saintonge, 2003, p. 5-14.

    14Even Pascal, art. cité, p. 83.

    15Au sein de la Constante société, la présence des personnels de la Marine est encore plus marquée (61 %).

    16Martin Sébastien, Rochefort, arsenal des colonies au xviiie siècle, Rennes, PUR, 2015, p. 181.

    17BnF, FM 2 375, fo 17.

    18À Brest, côtoyer des roturiers pose moins de difficultés, Saunier Éric, « Réseaux, Marine et sociabilité maçonnique », Rochefort et la mer, t. 34, Les réseaux de la Marine, 2018, p. 8-20.

    19Agulhon Maurice, Pénitents et francs-maçons de l’ancienne Provence. Essai sur la sociabilité méridionale, Paris, Fayard, 1968, et plus récemment Marraud Mathieu, « La confrérie dans le métier. Spirituel et temporel corporatif à paris aux xviie et xviiie siècles », Revue d’histoire moderne et contemporaine, 2018, 65-1, p. 118-143.

    20Entre 88 et plus de 110 selon que l’on dénombre ou non les frères des loges militaires.

    21Beaurepaire Pierre-Yves, op. cit., p. 361.

    22BnF, FM 2 375, fo 17.

    23Auque Jean-Charles, « L’expérience maçonnique », Esprit, 2013, no 6, p. 11-21.

    24Les archives notariales constituent l’une des sources les plus utiles sur le sujet, avec des résultats tout à fait intéressants : Acerra Martine, « Fortune de mer au xviiie siècle ou comment s’enrichir quand on est un modeste pilote du roi à Rochefort », in Dominique Le Page, Usages et images de l’argent dans l’Ouest Atlantique aux Temps Modernes, coll. « Études et documents », Rennes, PUR, 2007, p. 231, et Martin Sébastien, « Les Hèbre de Rochefort. Portrait d’une famille d’entrepreneurs au service de la Marine au xviiie siècle », in Christian Borde et Éric Roulet, L’entreprise maritime. Essai de définition, xvie-xixe siècle, Villeneuve-d’Ascq, Septentrion (à paraître).

    25Sur les rites, voire l’ensemble des articles consacrés au sujet dans Saunier Éric (dir.), Encyclopédie de la franc-maçonnerie, Paris, Le livre de poche, 2008 (rééd.), p. 734 sqq.

    26Poulot Dominique, Les Lumières, Paris, PUF, 2000, p. 167.

    27Le tuilage consiste en un échange stéréotypé de demandes et de réponses qui permettent d’attester de la qualité maçonnique de la personne tuilée.

    28Les premières divulgations publiques suivent de près la création de la franc-maçonnerie à Londres. En France, Le secret des francs-maçons, publié en 1745, inaugure une série de publications de cette nature, Mollier Pierre, Bourel Sylvie et Portes Laurent, La franc-maçonnerie, Paris, Bibliothèque nationale de France, 2016, p. 132.

    29BnF, FM 2, 374, fo 8.

    30Archives départementales de la Charente-Maritime, 1 J 029.

    31Masgnaud Francis, op. cit., p. 47. Les maquettes de temple conservées aujourd’hui permettent de visualiser l’aménagement du lieu, notamment la très belle pièce présentée lors de l’exposition consacrée à la franc-maçonnerie à la Bibliothèque nationale de France en 2016 (Maquette de temple, xixe siècle, bois, 135x430x235, musée de la GLDF, inv. ODIV. 015.0.2.) et toujours visible sur le site internet de l’exposition, [http://expositions.bnf.fr/franc-maconnerie/icono/index.htm], consulté le 23 juin 2023.

    32BnF, FM 2, 374, fo 28.

    33Mainguy Irène (dir.), GODF, deux siècles et demi d’histoire du Grand Orient de France, Paris, Éditions internationales du patrimoine, 2016, p. 337-364.

    34L’image appartient à une série de quatre scènes de genre (The four Times of Day) peintes en 1736. Elles décrivent avec humour quatre moments de la journée dans les rues de Londres, dont la nuit qui abrite les désordres de Charing Cross, sous la figure tutélaire d’un franc-maçon éméché.

    35BnF, FM 1, 14, fo 44.

    36BnF, FM 2, 375, fo 28.

    37BnF, FM2, 375, fo 17.

    38Mainguy Irène (dir.), op. cit., p. 11.

    39BnF, FM 2, 375, fo 8.

    40BnF, FM 2, 375, fo 26.

    41Voir sur ce point Hivert-Missica Yves et Hivert-Missica Gisèle, Femmes et franc-maçonnerie. Trois siècles de franc-maçonnerie féminine et mixte en France (1740 à nos jours), Paris, Éditions Dervy, 2015.

    42BnF, FM 2, 374, fo 8.

    43Halévy Ran, Les loges maçonniques dans la France d’Ancien Régime : aux origines de la sociabilité démocratique, Cahiers des annales, no 40, Paris, Armand Colin, 1984.

    44Révauger Cécile et Saunier Éric, op. cit.

    45BnF, FM 2, 375, fo 47.

    46Masgnaud Francis, op. cit., p. 226. L’auteur reprend à son compte la thèse de Barruel d’un franc-maçonnerie instigatrice des évènements révolutionnaires sous la forme d’un complot fomenté en loge.

    47Beaurepaire Pierre-Yves, L’espace des francs-maçons. Une sociabilité européenne au xviiie siècle, Rennes, PUR, 2003 ; Agulhon Maurice, op. cit. ; Roche Daniel, Le siècle des Lumières en province. Académies et académiciens provinciaux, Paris, EHESS, 1973.

    48Aucune correspondance ni aucun tableau de loge ne sont adressés au Grand Orient par l’Aimable Concorde après 1791.

    49BnF, FM 2, 375, fo 53.

    50Pinaud Pierre-François, Cambacérès. Le premier surveillant de la franc-maçonnerie impériale, Paris, Éditions maçonniques de France, 2000, p. 116.

    51Outre les références déjà évoquées, signalons : La franc-maçonnerie en Méditerranée (xviiie-xxe siècles), Les Cahiers de la Méditerranée, no 72, 2006 ; Delors Francis, Histoire d’une loge maçonnique bordelaise. La loge anglaise 204, Bordeaux, Connaissances historiques, 2007 ; Guengant Jean-Yves, Brest et la franc-maçonnerie. Les Amis de Sully des origines à nos jours, Brest, Armeline éditions, 2008 ; Sommers Susan, Thomas Dunckerley and English Free-masonry, Londres, Pickering & Chatto, 2012 ; Saunier Éric, « Espaces portuaires et nouvelles sociabilités. La Franc-maçonnerie au xviiie siècle », in Marie-Laure Griffaton (dir.), Ports d’Europe en quête de nouveaux monde, Dunkerque, musée portuaire, 2013, p. 85.

    52Van Hille Jean-Marc, op. cit.

    53Even Pascal, Trois siècles de franc-maçonnerie en Charente-Maritime, La Rochelle, conseil général de la Charente-Maritime, 2001 ; Beaurepaire Pierre-Yves, L’espace des francs-maçons, op. cit. ; Beaurepaire Pierre-Yves, L’autre et le frère. L’étranger et la franc-maçonnerie en France, Paris, Honoré Champion, 1997.

    Auteur

    • Sébastien Martin

      Université du Littoral-Côte d’Opale.

      Sébastien Martin est maître de conférences en histoire moderne à l’université du Littoral-Côte d’Opale et membre du Centre de recherche en histoire atlantique et littorale (HLLI-CRHAEM, UMR 4030). Ses recherches portent actuellement sur l’histoire croisée des infrastructures maritimes et de la constriction de l’État royal en France à l’époque moderne.

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    1Présentée du 12 avril au 24 juillet 2016 sur le site François Mitterrand en partenariat avec le musée de la franc-maçonnerie, l’exposition mettait en valeur la richesse du dépôt de documents maçonniques de la Bibliothèque nationale de France, qui est sans doute l’un des plus exceptionnel au monde.

    2Voir le catalogue de l’exposition, Les francs-maçons et la mer, de la loge au quai, Paris, musée de la franc-maçonnerie, 2015.

    3Révauger Cécile et Saunier Éric, La franc-maçonnerie dans les ports, Pessac, Presses universitaires de Bordeaux, 2012.

    4Cabantous Alain, « L’histoire maritime : objet de recherche ou leurre historiographique ? », in Christiane Villain-Gandossi et Éric Rieth, Pour une histoire du « fait maritime », sources et champs de recherche, Paris, CTHS, 2001, p. 33-45.

    5Acerra Martine, Rochefort et la construction navale française, 1661-1815, Paris, Librairie de l’Inde, 1992.

    6Le Bihan Alain, Loges et chapitres de la Grande Loge et du Grand Orient de France (2e moitié du xviiie siècle), Paris, CTHS, 1990. L’auteur a dressé une très belle carte de l’implantation du fait maçonnique en France reprise à maintes reprises. Voir sa version actualisée dans Beaurepaire Pierre-Yves, La France des Lumières, 1715-1789, Paris, Belin, coll. « Histoire de France », 2011, p. 362.

    7Bibliothèque nationale de France, département des manuscrits, fonds maçonnique (désormais BnF, FM).

    8Masgnaud Francis, Franc-maçonnerie et francs-maçons en Aunis et Saintonge sous l’Ancien Régime et la Révolution, La Rochelle, Rumeur des âges, 1989.

    9L’Étroite Observance est seulement mentionnée par Francis Masgnaud sur la foi d’une pièce d’archives qui n’est plus dans le dossier mentionné par l’auteur (BnF, FM 2, 375, fo 24). Il est probable qu’elle soit en sommeil à l’époque qui nous intéresse, Masgnaud Francis, op. cit., p. 22.

    10Six loges militaires peuvent être dénombrées les années précédentes, Kerjean Daniel et Le Bihan Daniel, Dictionnaire du Grand Orient de France au xviiie siècle. Les cadres et les loges, Rennes, PUR, 2012, p. 180.

    11Le cas de la Sagesse, à l’orient de Saint-Martin-de-Ré, est à cet égard emblématique puisque l’atelier rétais est fondé en 1776 par des membres de la Parfaite Union du régiment de Vermandois alors stationné sur l’île de Ré, Even Pascal, « Le rôle des loges portuaires dans un province littoral atlantique français », in Cécile Révauger et Éric Saunier, op. cit., p. 69.

    12Van Hille Jean-Marc, Dictionnaire des marins francs-maçons, gens de mer et professions connexes aux xviiie, xixe et xxe siècles, Paris, SPM-Kronos, 2011, p. 61.

    13La tradition maçonnique semble remonter à 1709 à La Rochelle, Flouret Jean, « Les origines de la franc-maçonnerie rochelaise d’après des documents inédits », Actes du Collège d’Histoire de la franc-maçonnerie d’Aunis et Saintonge, 2003, p. 5-14.

    14Even Pascal, art. cité, p. 83.

    15Au sein de la Constante société, la présence des personnels de la Marine est encore plus marquée (61 %).

    16Martin Sébastien, Rochefort, arsenal des colonies au xviiie siècle, Rennes, PUR, 2015, p. 181.

    17BnF, FM 2 375, fo 17.

    18À Brest, côtoyer des roturiers pose moins de difficultés, Saunier Éric, « Réseaux, Marine et sociabilité maçonnique », Rochefort et la mer, t. 34, Les réseaux de la Marine, 2018, p. 8-20.

    19Agulhon Maurice, Pénitents et francs-maçons de l’ancienne Provence. Essai sur la sociabilité méridionale, Paris, Fayard, 1968, et plus récemment Marraud Mathieu, « La confrérie dans le métier. Spirituel et temporel corporatif à paris aux xviie et xviiie siècles », Revue d’histoire moderne et contemporaine, 2018, 65-1, p. 118-143.

    20Entre 88 et plus de 110 selon que l’on dénombre ou non les frères des loges militaires.

    21Beaurepaire Pierre-Yves, op. cit., p. 361.

    22BnF, FM 2 375, fo 17.

    23Auque Jean-Charles, « L’expérience maçonnique », Esprit, 2013, no 6, p. 11-21.

    24Les archives notariales constituent l’une des sources les plus utiles sur le sujet, avec des résultats tout à fait intéressants : Acerra Martine, « Fortune de mer au xviiie siècle ou comment s’enrichir quand on est un modeste pilote du roi à Rochefort », in Dominique Le Page, Usages et images de l’argent dans l’Ouest Atlantique aux Temps Modernes, coll. « Études et documents », Rennes, PUR, 2007, p. 231, et Martin Sébastien, « Les Hèbre de Rochefort. Portrait d’une famille d’entrepreneurs au service de la Marine au xviiie siècle », in Christian Borde et Éric Roulet, L’entreprise maritime. Essai de définition, xvie-xixe siècle, Villeneuve-d’Ascq, Septentrion (à paraître).

    25Sur les rites, voire l’ensemble des articles consacrés au sujet dans Saunier Éric (dir.), Encyclopédie de la franc-maçonnerie, Paris, Le livre de poche, 2008 (rééd.), p. 734 sqq.

    26Poulot Dominique, Les Lumières, Paris, PUF, 2000, p. 167.

    27Le tuilage consiste en un échange stéréotypé de demandes et de réponses qui permettent d’attester de la qualité maçonnique de la personne tuilée.

    28Les premières divulgations publiques suivent de près la création de la franc-maçonnerie à Londres. En France, Le secret des francs-maçons, publié en 1745, inaugure une série de publications de cette nature, Mollier Pierre, Bourel Sylvie et Portes Laurent, La franc-maçonnerie, Paris, Bibliothèque nationale de France, 2016, p. 132.

    29BnF, FM 2, 374, fo 8.

    30Archives départementales de la Charente-Maritime, 1 J 029.

    31Masgnaud Francis, op. cit., p. 47. Les maquettes de temple conservées aujourd’hui permettent de visualiser l’aménagement du lieu, notamment la très belle pièce présentée lors de l’exposition consacrée à la franc-maçonnerie à la Bibliothèque nationale de France en 2016 (Maquette de temple, xixe siècle, bois, 135x430x235, musée de la GLDF, inv. ODIV. 015.0.2.) et toujours visible sur le site internet de l’exposition, [http://expositions.bnf.fr/franc-maconnerie/icono/index.htm], consulté le 23 juin 2023.

    32BnF, FM 2, 374, fo 28.

    33Mainguy Irène (dir.), GODF, deux siècles et demi d’histoire du Grand Orient de France, Paris, Éditions internationales du patrimoine, 2016, p. 337-364.

    34L’image appartient à une série de quatre scènes de genre (The four Times of Day) peintes en 1736. Elles décrivent avec humour quatre moments de la journée dans les rues de Londres, dont la nuit qui abrite les désordres de Charing Cross, sous la figure tutélaire d’un franc-maçon éméché.

    35BnF, FM 1, 14, fo 44.

    36BnF, FM 2, 375, fo 28.

    37BnF, FM2, 375, fo 17.

    38Mainguy Irène (dir.), op. cit., p. 11.

    39BnF, FM 2, 375, fo 8.

    40BnF, FM 2, 375, fo 26.

    41Voir sur ce point Hivert-Missica Yves et Hivert-Missica Gisèle, Femmes et franc-maçonnerie. Trois siècles de franc-maçonnerie féminine et mixte en France (1740 à nos jours), Paris, Éditions Dervy, 2015.

    42BnF, FM 2, 374, fo 8.

    43Halévy Ran, Les loges maçonniques dans la France d’Ancien Régime : aux origines de la sociabilité démocratique, Cahiers des annales, no 40, Paris, Armand Colin, 1984.

    44Révauger Cécile et Saunier Éric, op. cit.

    45BnF, FM 2, 375, fo 47.

    46Masgnaud Francis, op. cit., p. 226. L’auteur reprend à son compte la thèse de Barruel d’un franc-maçonnerie instigatrice des évènements révolutionnaires sous la forme d’un complot fomenté en loge.

    47Beaurepaire Pierre-Yves, L’espace des francs-maçons. Une sociabilité européenne au xviiie siècle, Rennes, PUR, 2003 ; Agulhon Maurice, op. cit. ; Roche Daniel, Le siècle des Lumières en province. Académies et académiciens provinciaux, Paris, EHESS, 1973.

    48Aucune correspondance ni aucun tableau de loge ne sont adressés au Grand Orient par l’Aimable Concorde après 1791.

    49BnF, FM 2, 375, fo 53.

    50Pinaud Pierre-François, Cambacérès. Le premier surveillant de la franc-maçonnerie impériale, Paris, Éditions maçonniques de France, 2000, p. 116.

    51Outre les références déjà évoquées, signalons : La franc-maçonnerie en Méditerranée (xviiie-xxe siècles), Les Cahiers de la Méditerranée, no 72, 2006 ; Delors Francis, Histoire d’une loge maçonnique bordelaise. La loge anglaise 204, Bordeaux, Connaissances historiques, 2007 ; Guengant Jean-Yves, Brest et la franc-maçonnerie. Les Amis de Sully des origines à nos jours, Brest, Armeline éditions, 2008 ; Sommers Susan, Thomas Dunckerley and English Free-masonry, Londres, Pickering & Chatto, 2012 ; Saunier Éric, « Espaces portuaires et nouvelles sociabilités. La Franc-maçonnerie au xviiie siècle », in Marie-Laure Griffaton (dir.), Ports d’Europe en quête de nouveaux monde, Dunkerque, musée portuaire, 2013, p. 85.

    52Van Hille Jean-Marc, op. cit.

    53Even Pascal, Trois siècles de franc-maçonnerie en Charente-Maritime, La Rochelle, conseil général de la Charente-Maritime, 2001 ; Beaurepaire Pierre-Yves, L’espace des francs-maçons, op. cit. ; Beaurepaire Pierre-Yves, L’autre et le frère. L’étranger et la franc-maçonnerie en France, Paris, Honoré Champion, 1997.

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