Le ministre Castries et la réorganisation de la présence française aux Indes orientales après la guerre de l’indépendance des États-Unis, 1783-1788
p. 255-266
Texte intégral
1Dans l’accord préliminaire de paix passé le 20 janvier 1783 entre la France et la Grande-Bretagne quatre articles concernent les Indes orientales. Les Français retrouvent leurs établissements de l’Inde dont les Anglais s’étaient emparés au début du conflit, c’est-à-dire leurs comptoirs de la côte de Coromandel (Pondichéry et Karikal), de l’Orissa (Yanaon), du Malabar (Mahé), et du Bengale avec Chandernagor, et les « loges » ou entrepôts sur divers marchés de cette province. De plus, les négociateurs français ont habilement fait spécifier une liberté commerciale complète :
« Article 13. Sa Majesté Britannique s’engage à prendre les mesures qui seront en son pouvoir pour assurer aux sujets de la France un commerce libre, sûr et indépendant, tel que le faisait l’ancienne Compagnie française des Indes orientales, soit qu’ils le fassent individuellement ou en corps de Compagnie1. »
2En outre, les Français conservent l’archipel des Mascareignes avec l’île de France (île Maurice) et l’île Bourbon (île de La Réunion) qui n’avaient pas été inquiétées par les Britanniques. Dès qu’il a connaissance de ces dispositions, le maréchal de Castries2, ministre de la Marine et des Colonies, notifie une ligne de conduite politique au gouverneur des Mascareignes, François de Souillac3 :
« La paix actuelle nous replace dans cette partie du monde aux mêmes conditions que celles que nous avions par la paix de 1763 [après la guerre de Sept-Ans]. Ainsi nous ne pourrons espérer de plus grands avantages dans le commerce tant que les Anglais y auront l’excessive prépondérance qu’ils y ont acquises ; il faut donc préparer sourdement une meilleure situation pour la développer à la première guerre, tirer de celle actuelle le meilleur parti que nous pourrons et faire nos dispositions de manière à pouvoir frapper vigoureusement les Anglais dès la première campagne4. »
3Il faut insister sur l’intérêt porté par le maréchal de Castries au développement de la présence française dans l’océan Indien. Syndic des actionnaires de la Compagnie des Indes de 1764 à 1768, il avait vainement tenté de maintenir l’activité de celle-ci malgré la liquidation décidée par Choiseul5. En 1780, dès son arrivée au secrétariat d’État de la Marine, il prépare l’envoi d’une escadre dans l’océan Indien et il en confie le commandement à Suffren dont il avait reconnu la valeur combative, et, en même temps, il écrit au commandant du port de Brest :
« Quoi qu’il fût très important de faire marcher les deux expéditions [pour l’Inde et pour l’Amérique] de front, je sais que bien des motifs m’arrêteront, et obligé d’opter, je préférerai l’Inde à l’Amérique, non que cette dernière partie ne fût plus pressante, mais parce que la première a un caractère plus important et dont le succès conduirait davantage à la paix6. »
Une domination continentale française a minima aux Indes orientales
4Après la ratification du traité, Castries propose et obtient du conseil du roi un accroissement des pouvoirs de Souillac, promu « Gouverneur général des établissements français au-delà du Cap et chef d’escadre des armées navales7 ». Dès réception de ses pouvoirs, le nouveau gouverneur se rend en Inde sans plus attendre afin de régler la rétrocession des comptoirs par les Britanniques, car ceux-ci sont peu pressés d’y renoncer : Pondichéry est restitué le 1er février 1785, Karikal à la fin du même mois, Chandernagor et Yanaon le 27 juillet, Mahé le 8 août. La difficulté majeure réside dans la remise de Trinquemalé, port hollandais de la colonie de Ceylan dont les Anglais s’étaient emparés, puis après eux les Français. Les diplomates avaient prévu un mouvement inverse avec une remise par les Français aux Britanniques, puis par ceux-ci aux Hollandais. Charles-Nicolas Coutenceau, commandant de la garnison du port puis de l’armée française en Inde en remplacement de Charles Joseph de Bussy après le décès de celui-ci, ayant refusé de remettre Trinquemalé aux Anglais et proposé de s’adresser directement aux Hollandais, Souillac, Castries et Louis XVI l’approuvent et la cour de Londres donne satisfaction à leur demande8. À la suite de la prise de possession, il faut choisir un chef-lieu, siège de l’administration civile et principale garnison pour les établissements français. Traditionnellement celui-ci était situé à Pondichéry sur la côte orientale de l’Inde (côte de Coromandel), mais Castries souhaite une installation militaire sur la côte occidentale (côte de Malabar) au voisinage de la domination du sultan du Mysore, seul allié des Français :
« Je vous ai marqué positivement que Sa Majesté vous autorisait à traiter pourvu que nous ne nous engagions pas à des conditions qui pourraient occasionner une rupture entre les deux couronnes, écrit-il à Souillac. Dans tous les cas il est avantageux de s’assurer d’un point à la côte de Malabar où nous puissions porter des troupes à la première guerre. Cette vue ne peut qu’être utile à Tippou Saïb [de Mysore] et s’il veut céder un établissement convenable dans cette partie le Roi balancera mieux alors laquelle des deux parties il lui convient de préférer9. »
5Le gouverneur y est hostile et il accumule les arguments contraires : l’espoir d’obtenir une concession de la part de Tippou est vaine ; bien sûr il y a sur la côte de Malabar le petit établissement français de Mahé, mais la superficie disponible y est réduite et il ne peut être fortifié car il est entouré de hauteurs. De plus, la rade est médiocre, le commerce se limite à quelques cargaisons de poivre, et le voisinage du comptoir anglais de Telichery est une gêne. Souillac oppose « les avantages réels » qui militent en faveur de l’installation à la côte de Coromandel et notamment à Pondichéry : la rade est sûre pendant huit mois, la barre est moins dangereuse qu’ailleurs ; le comptoir est à portée de recevoir des secours des Hollandais, neutres ou alliés ; il peut disposer de la ressource de Trinquemalé pour recevoir des approvisionnements ; il peut ruiner le commerce des Anglais par des croisières sur Madras, les bouches du Gange, le Bengale « dont la révolution plus facile qu’on ne l’imagine serait leur ruine » ; il offre :
« Les plus belles toiles bleues de la côte, peut-être par l’effet des eaux, et celles-ci sont un objet essentiel du commerce avec les îles de l’Amérique ; il fournit aussi des toiles écrues ayant les mêmes débouchés et d’aussi belles perses que celles de Madras. La côte Malabar ne peut offrir ni la même sûreté, ni les mêmes ressources extérieures, ni les mêmes plans d’attaque et de conquête, ni le même objet de commerce10. »
6Dès son arrivée à Pondichéry, Souillac met à profit l’effet général favorable provoqué par les mouvements de l’escadre de Pierre André de Suffren pour faire commencer la construction d’un fossé et d’une enceinte de terre sur le tracé de celle qui avait été détruite par les Britanniques lorsqu’ils s’étaient emparés de la ville en 176111. Les artisans tisserands viennent s’y installer : il y avait 24 000 habitants avant la guerre, et il y en a 21 000 dès le milieu de 1785. Pour repeupler les environs ravagés par les passages des troupes, Souillac décide une avance de 5 pagodes pour les artisans chef de famille qui viendraient s’y établir. Pour le territoire de Karikal, essentiel pour le ravitaillement de Pondichéry et décimé par les combats et les pillages, il accorde des exonérations fiscales temporaires. Pour Mahé, il donne ordre de faire construire quelques maisons pour abriter les Européens envoyés dans ce comptoir, les installations de celui-ci ayant été totalement détruites au cours de la guerre. La répartition des militaires est importante d’autant que l’entretien des soldats est le principal poste de dépense. Le roi ayant fixé l’effectif des troupes françaises « au-delà du Cap » à 2 600 hommes, dont moitié de cipayes recrutés sur place. Il y a 400 cipayes à Pondichéry, 300 à Karikal, autant à Mahé, 200 à Chandernagor, et 100 Européens dans chacun de ces quatre établissements. Les autres troupes « blanches », soit un millier d’hommes, sont positionnées aux Mascareignes mais peuvent être envoyées en cas de nécessité à Pondichéry12, bien que cette position soit à deux mois de mer avec la condition d’une mousson favorable. Au même moment les Britanniques disposent en Inde d’une armée de 20 600 hommes dont 14 000 cipayes13. Les Français hésitent encore sur le choix du chef-lieu. Souillac, dans une longue dépêche envoyée à Castries en 1785, propose l’île de France au terme d’un raisonnement bien argumenté14. Pour Pondichéry : « La principale masse de force qui y serait fixée, les travaux qu’il y aurait à faire, la correspondance avec les puissances européennes et indiennes plus rapprochées, tout semblerait ne laisser aucune indétermination sur cet objet. » Pour l’île de France :
« Le point capital et essentiel sur lequel j’ai insisté dans le cours de cette dépêche est d’attirer à nous les Indiens par l’opinion de notre puissance. C’est l’objet vers lequel nous devons tendre, celui qui pendant la paix doit préparer les esprits et assurer la révolution à l’époque de la guerre […] La faiblesse de nos possessions comparée à l’énormité de celles des Anglais laissent une idée d’infériorité qui ne peut être couverte que par l’opinion, déjà installée et qu’il ne faut pas affaiblir, que l’île de France est un établissement de la plus grande importance sous tous les rapports, un arsenal, un centre d’entrepôt de troupes, de munitions et de moyens de tous genres. Le siège du gouvernement général y étant établi fortifie cette opinion, et nécessairement elle y serait affaiblie s’il était transporté à Pondichéry […] Au surplus le gouverneur général peut faire des tournées marines tous les deux ans […] L’habitude qu’on aurait du gouverneur général venir faire des inspections dans l’Inde ferait qu’on ne serait pas étonné, si d’après des vues de guerre, il aurait ordre de s’y transporter sur le champ. »
7Le Port-Louis de l’île de France est donc choisi pour le siège du gouvernement général15.
8La poursuite de l’entente entre les Hollandais et les Français, alliés durant la guerre, est un élément très important de force pour les deux nations. Peu avant sa disparition, Bussy, commandant de l’armée française en Inde, insiste beaucoup sur ce point dans un compte rendu envoyé au Secrétaire d’État de la Marine :
« Il faut faire une confédération avec la Hollande. Cette puissance a tout à craindre de la part de l’Angleterre et elle ne peut sauver ses établissements en Asie qu’en s’unissant avec la France. L’union avec la Hollande permettrait d’en imposer à la compagnie anglaise et d’obtenir la liberté du commerce selon les traités. Il faudrait une place de dépôt dans Ceylan ou du moins une sureté de pouvoir y entrer en cas de guerre. Cet accord permettrait de menacer l’Angleterre en cas de guerre et de la contenir en temps de paix16. »
9Dans la suite de sa dépêche, il précise sa pensée et propose une installation momentanée à Trinquemalé. En raison de la profonde division politique à l’intérieur des États-Généraux et du refus du stathouder, il n’est pas possible, pour le moment, d’aller plus loin, mais Souillac dans ses instructions pour David Charpentier de Cossigny, gouverneur particulier des établissements français de l’Inde, s’attache à maintenir une bonne entente : « Il est nécessaire que M. de Cossigny entretienne une correspondance amicale et suivie avec le gouverneur de Ceylan et en général avec les chefs hollandais. C’est du concert établi entre eux et nous que dépendront nos succès à la première guerre17. » Les Français peuvent aussi chercher une entente avec les princes de l’Inde hors des régions contrôlées par les Britanniques. Dans ses instructions d’octobre 1785 Souillac annonce :
« Les deux seules puissances indépendantes de l’Inde avec lesquelles nous sommes en relations suivies sont Tippou Saïb et les Mararathes de Pounah. Sans entrer dans les détails dont M. de Cossigny a une parfaite connaissance18, je me borne à dire qu’il faut les ménager toutes les deux, éviter de leur donner mutuellement de l’ombrage et chercher à les maintenir ensemble autant que ce sera possible. Les instructions de Sa Majesté sont de n’être point puissance territoriale dans l’Inde. Il faut en bien persuader les princes et marquer en toute occasion beaucoup de modération à cet égard. »
10Un an plus tard, dans le cahier annuel d’instructions adressées à Souillac, Castries observe :
« Le doute dans lequel nous sommes nous force à rester dans un état précaire dans l’Inde qui est très désavantageux. Il faut se borner à soutenir la haine contre les Anglais sans prendre d’engagements avec les princes. Il ne serait ni juste, ni politique, de leur conseiller par des espérances prochaines de s’engager dans une guerre dont l’illusion se dissipe peu après et dont le discrédit le plus entier serait la suite indispensable. Les succès que nous avons eu sur mer dans la dernière guerre, la révolution de l’Amérique qui nous intéressait davantage dans ce moment-là, toutes ces bases doivent leur présenter l’espérance qu’un jour nous chasserons les Anglais de l’Asie. Il importe de leur persuader que nous ne voulons rien pour nous, que la liberté du commerce est notre seul but, mais que ce but ne peut exister tant qu’une nation de l’Europe aura des possessions territoriales dans le continent et que les autres n’en auront pas19. »
11Pour intervenir auprès du sultan du Mysore et du régent des Marates, les Français disposent de diplomates et de détachements de « partisans ». Les Marates sont éloignés des régions de l’Inde dans lesquelles les Français sont établis, mais ils ont une armée importante d’environ 100 000 hommes commandés par Sindia, chef très réputé et en même temps vizir du Grand Moghol Shah Alam. Le prestige de celui-ci demeure très considérable bien qu’il soit, observe Souillac, un « être presque imaginaire sans force et sans argent ». François Emmanuel Dehaies de Montigny, envoyé français auprès des Marates et du Moghol, est compétent mais manque d’argent. Il y a un « parti » peu nombreux de soldats français vagabonds échappé de Pondichéry après la capitulation. Commandés un temps par l’aventurier Sombre, ils échappent à peu près totalement à l’autorité de Montigny. Les relations entre Tippou, sultan de Mysore, et le gouverneur de Pondichéry sont régulières et poursuivies par des waquils, brahmes spécialisés dans les négociations entre souverains, mais il n’est guère possible d’avoir confiance dans la parole du souverain. Après une rencontre très spectaculaire avec Suffren, il négocie avec les Anglais le traité du 11 mars 1784 par lequel il abandonne toutes ses conquêtes dans le Carnatic au profit des Britanniques. Puis il se rapproche des Français, accueille un détachement militaire commandé par Montigny, et entretient deux « partis » français placés sous l’autorité des officiers Duchemin et Piveron. Alors que Bussy était tout à fait hostile à ces « partis », affirmant que l’honneur de la nation exige leur suppression, Souillac les tolère et demande à Castries, qui accepte, l’inscription de plusieurs de leurs officiers dans les effectifs du détachement français20. De plus, Tippou propose d’envoyer une ambassade en France ; celle-ci obtient une audience royale, mais la rencontre est vaine car Louis XVI refuse tous les projets d’alliance contre l’Angleterre21. En somme, les Français se trouvent dans la même situation qu’avant le conflit. La seule modification importante est l’affirmation de la liberté de commerce reconnue par les Britanniques avec l’article 13 du traité de paix. Souillac y attache beaucoup d’importance :
« Cet article qui nous assure un commerce libre, sûr et indépendant, doit faire la base unique de nos réclamations dans toutes les parties de l’Inde qui dépendent des Anglais. Il est de la plus grande importance de ne pas souffrir qu’on lui donne la moindre atteinte […] Elle est d’un avantage inappréciable pour nous, puisque la compagnie d’Angleterre possède toute la partie de l’Inde commerçante à l’exception de la côte Malabar où ils sont très restreints. Cette garantie nous donne un très grand avantage sur toutes les autres nations européennes22. »
12Or, les commis de l’East India Co refusent d’en tenir compte, et dès la fin de l’année 1785, le gouverneur Cossigny reçoit plusieurs plaintes de commerçants Français. Leurs achats de toiles à Yanaon et au Bengale sont gênés. Ils ne peuvent se procurer de l’opium et du salpêtre à Patna. Et surtout, l’entrée dans le Gange est refusée aux navires français portant du sel marin provenant de Pondichéry et Yanaon où il est récolté. Pire encore, le bot l’Espérance portant le pavillon du roi de France est coulé à l’entrée du Gange par un tir de canon provenant du fort britannique situé à l’entrée du fleuve et un matelot indien attaché au service de ce bâtiment est tué. « Tout est donc rentré dans la confusion au Bengale » assure Cossigny. Pour régler ces contentieux, le gouverneur général de l’Inde – nommé par le Parlement britannique et donc indépendant de la Compagnie – envoie un officier auprès de Souillac avec des pleins pouvoirs pour « traiter les points relatifs à la sureté, liberté et indépendance du commerce des Français dans l’Inde », et la négociation aboutit à une convention approuvée le 30 avril 1786. Selon celle-ci, les navires de la marine de guerre française pourront circuler librement sur le Gange ; les vaisseaux de commerce français seront assujettis aux mêmes droits locaux que les vaisseaux britanniques ; ils pourront circuler librement sous réserve de ne pas être suspects de porter des armes ou des munitions de guerre ou bien du sel en quantité supérieure à celle convenue par la présente convention ; la visite d’un bâtiment suspect sera faite en présence de l’agent de la nation française ou de son représentant par des officiers indiens du nabab du Bengale portant une marque distinctive de leur fonction ; les effets frauduleux seront confisqués ; le commerce français peut apporter annuellement 200 000 mans de sel23, et il peut charger 18 000 mans de salpêtre et 200 caisses d’opium au prix convenu avant la saison. Cette convention est approuvée par le gouverneur général, mais refusée par le conseil de la Compagnie des Indes. Elle est envoyée à Londres pour obtenir une décision définitive ; elle est approuvée et entre en vigueur en août 1787.
Développement de la puissance militaire et commerciale de la marine française dans l’océan Indien
13Calonne, Contrôleur général des finances, se préoccupe aussi de la reprise du commerce français dans l’Inde et il demande un rapport confidentiel (« Pour vous seul, Monseigneur ») à l’armateur et financier lorientais, Jacques Alexandre Gourlade (1735-1803). Cet expert habile et compétent prévoit une reprise difficile du commerce en raison de la concurrence anglaise et il propose de créer avec quelques financiers une nouvelle Compagnie des Indes ayant un monopole limité à l’Inde et à la Chine. Une telle entreprise devrait permettre l’ouverture de relations commerciales régulières et un approvisionnement correct du marché français, tout en donnant aux actionnaires un revenu élevé. La question est l’objet de discussions acharnées et d’intrigues entre des groupes financiers rivaux et protégés par les ministres Calonne, Castries et Vergennes. Ce dernier appuie le projet de Calonne, dont il conseille l’adoption immédiate par le roi, alors que Castries est favorable à une compagnie commerçante, intermédiaire entre le monopole exclusif et le commerce libre pour tous les négociants sur le modèle de celle qu’il avait connue entre 1764 et 1768. Il est obligé de s’incliner devant la volonté du roi mais il propose des amendements de grande importance dont il informe Souillac : « Le roi s’est déterminé à remettre le commerce de l’Asie au privilège exclusif […] J’ai défendu les intérêts de l’île de France autant qu’il a été possible de le faire contre l’esprit exclusif qui domine la nouvelle Compagnie […] J’espère qu’on ajoutera cette partie afin de donner plus d’étendue au commerce des dites îles24. » Sa demande est satisfaite. Selon l’article 3 de l’arrêt du 14 avril 178525 : « La nouvelle Compagnie des Indes jouira du privilège de commercer seule, à l’exclusion de tous autres sujets du Roi […] depuis le Cap de Bonne-Espérance, jusque dans toutes les mers des Indes orientales », toutefois « les îles de France et de Bourbon ne seront point comprises dans le privilège exclusif ci-dessus accordé […] il sera permis à nos sujets d’approvisionner directement, des divers ports de notre royaume, lesdites îles et d’importer en retour […] les productions de leur sol. » (article 5) ; « Le commerce d’Inde en Inde restera libre pour les dites Isles de France et de Bourbon. » (article 6) « sauf celui de la mer Rouge, de la mer de Chine et du Japon ». Ces dispositions répondent au projet proposé par les négociants des Mascareignes à Souillac et dont il donne connaissance à Castries :
« La situation de l’île de France semble faite pour réunir toutes les branches de commerce des Indes branches de commerce des Indes orientales et en être l’entrepôt. Les bâtiments du pays conduits par des lascars ou matelots indiens, pourraient faire à bon marché les transports de marchandises diverses à l’île de France où les vaisseaux d’Europe trouveraient des cargaisons assorties. Ces idées se réaliseront peut-être un jour26. »
14Elles reprennent un plan élaboré par La Bourdonnais en 173627, perfectionné par Turgot en 1774 :
« Il pensait que cette colonie bien administrée pourrait devenir l’entrepôt de tout le commerce de l’Inde et que nos négociants, assurés d’un point de relâche entre l’Hindoustan et la métropole, risqueraient plus facilement de s’engager dans le commerce colonial et prouveraient d’eux-mêmes l’inutilité de tout monopole28. »
15Cette nouvelle organisation permet un développement rapide des échanges commerciaux au profit des îles comme en témoigne l’évolution du mouvement maritime :
Tableau 1. – Armements au-delà du Cap, 1785-1789.
Îles | Inde/Chine | |||
Année | Nombre de navires | Tonnage (tonneaux) | Nombre de navires | Tonnage (tonneaux) |
1785 | 13 | 3 850 | 11 | 5 020 |
1786 | 32 | 9 027 | 9 | 5 550 |
1787 | 41 | 15 965 | 10 | 6 747 |
1788 | 52 | 16 304 | 11 | 6 325 |
1789 | 54 | 15 276 | 7 | 4 333 |
Chaptal Jean-Antoine, De l’industrie française, Paris, Antoine Augustin Raynouard, 1819, p. 129 ; Archives des Affaires étrangères (Paris), Mémoires et documents Asie 11, fo 15-16 ; Conan Jules, La dernière Compagnie française des Indes, 1785-1875, Paris, Marcel Rivière, Librairie des sciences politiques et sociales, 1942 ; Toussaint Auguste, La route des Îles. Contribution à l’histoire maritime des Mascareignes, Paris, SEVPEN, 1967.
16Jamais la vente des produits de l’Inde et de la Chine en France n’a connu un tel chiffre d’affaires avec des profits aussi élevés. Ainsi la Constance-Pauline, envoyée en 1785 à l’île de France par la maison Rabaud de Marseille avec un capital de 1 100 000 lt., donne-t-elle 80 % de profit net29. Assurément, il y a la reprise du mouvement commercial après dix années de guerre et la moindre durée des campagnes maritimes, car on met quatre à cinq mois pour aller de France aux îles au lieu de sept à huit mois pour aller de France en Asie. Surtout, la réorganisation du commerce entre la France et l’Asie autour des Mascareignes entraîne l’intervention de nouveaux armateurs. Les Bretons, et surtout les Malouins, majoritaires jusqu’alors, sont rejoints par les Bordelais qui envoient en moyenne une vingtaine de navires, et par les Marseillais qui en arment une douzaine. Le mouvement s’accélère avec la suspension du monopole de la Compagnie des Indes par la Constituante en 1790. Et cet engouement des armateurs des deux plus grands ports français pour le trafic de l’océan Indien rejoint une nouvelle orientation du grand commerce international. Dans toute l’Europe, l’intérêt glisse du commerce des Antilles, dont les profits diminuent, vers celui de l’océan Indien où des bénéfices élevés peuvent encore être réalisés. L’évolution favorise la croissance économique des îles, et en particulier celle du Port-Louis en passe de devenir une place maritime et commerciale essentielle entre l’Orient et l’Occident selon le vœu des négociants de l’île de France en 1785 : « Peut-être un jour jugera-t-on qu’en rendant libre le port de l’île de France les nations étrangères trouveront avantageux de venir s’y approvisionner des marchandises de l’Inde et de la Chine. » Cet enthousiasme est tempéré par Castries :
« Tout ceci est encore subordonné aux forces de mer que l’on aura dans l’Inde, écrit-il. Il faut le concours de la terre et de la mer pour se promettre du succès et l’attention la plus particulière à avoir sera de conserver au moins l’égalité en vaisseaux car on ne peut se dispenser de se tenir en mesure d’attaquer à la première guerre, sous peine de laisser l’Asie aux Anglais et de la regarder comme une de leur possession30. »
17En mai 1785, le Conseil du roi refuse, sur avis de Castries, une proposition du gouvernement britannique de ne laisser aucun vaisseau de guerre dans la « mer des Indes ». Le ministre de la Marine suivi par le roi, « après s’être assuré que la Hollande conserve une escadre suffisante pour protéger ses établissements et donner par notre alliance plus de force à ceux que nous y conservons », confirme son attachement à l’accord antérieur et conserve dans cette région des bâtiments militaires portant des canons de 18 et au-dessous. En même temps, Castries entreprend la réorganisation de la station navale de l’océan Indien, toujours établie au Port-Louis et il en donne le commandement à Antoine Bruny d’Entrecasteaux31, promu chef de division. Cet officier, précédemment directeur-adjoint des Ports et arsenaux, c’est-à-dire le plus proche collaborateur du ministre, est chargé d’une mission de confiance. Avec une instruction détaillée32 et le commandement de la frégate la Résolution armée à Brest en mai 1785, Castries lui prescrit de se rendre à l’île de France et il l’informe que les Cours de Versailles et de Londres se sont accordées pour envoyer dans l’océan Indien uniquement des frégates et autres bâtiments inférieurs. En conséquence, il surveillera l’arrivée des vaisseaux britanniques venant d’Europe et il s’assurera que les navires de la compagnie anglaise des Indes ne peuvent être transformés en vaisseaux de guerre. Il s’entendra avec le commandant de l’escadre hollandaise pour combiner les mouvements dans l’attente de nouveaux ordres. Il examinera l’état du port de l’île de France et « le travail qu’il y aura à faire pour le rendre utile aux escadres du roi en temps de guerre », ainsi que les ressources disponibles en bois et le nombre des ouvriers capables de mettre en état les escadres. Il se rendra ensuite à Ceylan pour prendre connaissance des dispositions à faire pour défendre l’île et il se déclarera prêt à concourir avec le commandant hollandais pour la sûreté des deux nations. Il dirigera vers la côte de Coromandel, paraîtra à Pondichéry, et se rapprochera de l’embouchure du Gange après avoir embarqué un officier du génie pour lever des plans et rendre plus utile sa navigation sur la côte de l’est et au Bengale. Il reconnaîtra soigneusement Malacca et les détroits ; il pourra envoyer jusqu’à Manille pour reconnaître l’état des forces de mer et de terre de Luçon, et voir si une combinaison de forces serait possible en cas de guerre contre l’Angleterre. Il s’occupera des moyens de faire réparer et ravitailler ses vaisseaux dans les mers où il stationnera sans avoir besoin de revenir à l’île de France. Il pourra se rendre avec confiance dans les établissements hollandais pour se ravitailler et procéder aux réparations de ses bâtiments. Il protégera le commerce de la nouvelle Compagnie des Indes en imposant le respect des traités et il devra « conserver au pavillon français toute la considération qu’il s’est acquis dans ces mers. » Castries accompagne cette instruction d’un ordre pour Souillac :
« M. d’Entrecasteaux sera chargé de la station qui sera établie dans les mers d’Asie. Vous pouvez lui donner votre confiance, il a toute la mienne. Il vous sera d’ailleurs subordonné, mais lorsque le service n’exigera pas sa présence auprès de vous ou partout ailleurs il conviendra que vous lui laissiez remplir les services qui seront consignés dans ses instructions afin d’acquérir sur toutes les mers d’Asie les connaissances qui nous manquent33. »
18Bruny d’Entrecasteaux suit fidèlement ces instructions. Mieux, il les développe, ainsi qu’il y est autorisé, par une navigation hardie, ouvrant une nouvelle route – « à contre-mousson » – vers la Chine par la Nouvelle-Guinée et les îles Mariannes jusqu’à Canton à travers des régions inexplorées et dangereuses. Il appuie ainsi le renouveau du commerce français en Chine.
19De 1785 à 1787, la station navale française multiplie les missions de reconnaissance et lève des cartes des littoraux mal connus : la Vénus, commandée par Rosily, parcourt le golfe Persique et la mer Rouge ; la flûte le Marquis de Castries, du capitaine Richery, lève des cartes du golfe du Bengale et des îles Andaman ; la corvette la Subtile – capitaine Scipion de Castries – accompagne la Résolution dans son voyage à contre-mousson, puis reconnaît le littoral des Philippines. Au même moment, la Boussole et l’Astrolabe sous le commandement de La Pérouse parcourent le Pacifique. Et le 28 février 1787, Pierre Pigneaux34, évêque missionnaire d’Adran, accompagné de Nguyen Anh, fils du roi de Cochinchine et futur empereur d’Annam, obtient une audience de Louis XVI. Celle-ci est suivie du recrutement d’ingénieurs et de médecins qui accompagnent Pigneaux lors de son retour en Cochinchine.
20Castries poursuit sa politique de reconstruction de la présence française dans l’océan Indien par la nomination, en février 1787, de Bruny d’Entrecasteaux au gouvernement général des établissements français à l’est du Cap de Bonne-Espérance en remplacement de Souillac qui avait demandé son retour en Europe. Il accompagne sa dépêche d’une instruction par laquelle il élargit la mission du nouveau gouverneur :
« Les îles de France et de Bourbon ont été établies pour servir de relâche aux vaisseaux français qui vont en Asie […] La position de ces îles ne se borne pas à l’utilité de la relâche. Des vues plus étendues ont fait sentir que l’île de France placée à l’entrée de la mer des Indes et à l’orient de tous les détroits de cette partie du monde pouvait être un entrepôt de forces capables d’opposer en temps de guerre, à des armements affaiblis par une longue navigation, des troupes fraiches et des vaisseaux bien équipés et d’en disposer avec autant de promptitude que de secret35. »
21Il s’agit donc de couper la longue route maritime et commerciale entre les Indes orientales et la Grande-Bretagne. La poursuite de ce projet est interrompue par la démission de Castries le 24 août 1787. Ce dernier quitte le gouvernement après le refus par Loménie de Brienne d’une aide militaire aux « patriotes » hollandais désireux de maintenir leurs libertés traditionnelles contre le Stathouder Guillaume V assisté par l’Angleterre. Après la période révolutionnaire, ce programme de guerre maritime et de contrôle de la route maritime entre l’Europe et l’Inde est repris par Bonaparte, suscitant une vive réaction de la marine britannique. Après la victoire française du Grand Port, seule bataille navale victorieuse durant le Premier Empire, les Anglais reprennent le contrôle de cette voie maritime essentielle pour leur commerce et leur domination coloniale.
Notes de bas de page
1Martens Wilfried, Recueil des principaux traités de paix, de trêve, de neutralité, de commerce, de limites, d’échanges, conclus par les puissances de l’Europe…, Gottingue, Jean Chrétien Dieterich, 1791, p. 318-319.
2Charles-Eugène-Gabriel de la Croix, marquis de Castries (25 février 1727-11 janvier 1801) entre dans l’armée royale en 1739, nommé Lieutenant général en 1758, puis Secrétaire d’État de la Marine du 13 octobre 1780 au 27 août 1787. Il est maréchal de France en 1783, selon Castries René de, Le Maréchal de Castries, Paris, Flammarion, 1956.
3François de Souillac, vicomte (2 juillet 1732-11 mars 1803), entre dans la Marine comme enseigne de vaisseau en 1755. Il est nommé Gouverneur général des Mascareignes 1er mai 1779, puis Gouverneur général des établissements français au-delà du Cap le 15 août 1784, et enfin chef d’escadre des armées navales en novembre 1787, commandeur de l’Ordre de Saint-Louis le 25 août 1788.
4Archives nationales de l’Outre-mer (désormais ANOM), C2 161, fo 111, Castries à Souillac, Versailles, 25 janvier 1783.
5Haudrère Philippe, La Compagnie française des Indes au xviiie siècle, 2nd édition revue et corrigée, Paris, Les Indes Savantes, 2005, p. 762-782 et Tarrade Jean, Le commerce colonial de la France à la fin de l’Ancien Régime, Paris, PUF, 1985, p. 485.
6Archives nationales, Marine (désormais AN, Marine), B4 217, fo 23, Castries au comte d’Hector, Versailles, 9 janvier 1782.
7ANOM, C2 168, fo 31, Versailles, 15 août 1784.
8ANOM, C4 95, fo 18, Castries à Souillac, Versailles, 30 mars 1786 : « Sur le compte que j’ai rendu au roi de l’opposition que cet officier a constamment formé à ce que les forts de Trincomalé fussent remis aux Anglais, Sa Majesté a jugé à propos pour lui en marquer sa satisfaction de le continuer dans les fonctions de son grade… [avec] les appointements qui y sont attachés. »
9ANOM, C2 168, fo 45, Castries à Bussy, Versailles, 16 septembre 1784.
10ANOM, C2 168, fo 61, Souillac à Castries, Pondichéry, 8 octobre 1784.
11ANOM, C2 169, fo 34, Souillac à Castries, Pondichéry, 15 septembre 1785.
12ANOM, C2 168, fo 37-38 ; C2 169, fo 26 et 44 ; C2 190 ; C2 266 ; C2 167 ; C4 95.
13Il faut préciser que les Britanniques ayant pris le diwani – ou fermes des impôts du Bengale – doivent maintenir un personnel assez nombreux afin de poursuivre les contribuables récalcitrants.
14ANOM, C2 169, fo 45, Castries à Souillac, Versailles, 14 février 1787 : « J’ai reçu votre lettre du 15 septembre 1785 qui contient des détails très étendus sur l’Inde. Sa Majesté qui les a lus avec attention en a été très contente, et c’est avec plaisir que je vous transmets sa satisfaction ainsi que celle de son conseil », et AN, Marine, C4 95.
15ANOM, C2 170, fo 78, Castries à Bussy, Versailles : « L’express et positive volonté du roi étant que l’Inde soit subordonnée à l’île de France, celle-ci a le droit de commander à l’autre sans acception de personne. »
16ANOM, C2 170, fo 285, Bussy à Castries, Pondichéry, janvier 1785.
17ANOM, C2 168, fo 97, Souillac à Cossigny, Pondichéry, 8 octobre 1785.
18Il commandait le détachement français auprès de Tipu durant le précédent conflit.
19ANOM, C4 95, Castries à Souillac, Versailles, 3 octobre 1786.
20Ainsi Bint et Royer, selon AN, Marine, C4 95.
21Tipu est tué au cours de la troisième guerre du Mysore en 1792.
22ANOM, C2 168, fo 32, Souillac à Castries, Pondichéry, 15 septembre 1785.
231 man vaut 46 lt.
24ANOM, C4 95, fo 83, Castries à Souillac, Versailles, 13 mai 1786.
25Le commerce de l’océan Indien est déclaré libre pour tous les Français par décrets de l’Assemblée Constituante des 3 avril et 7 juillet 1790.
26ANOM, C2 159, fo 34, Souillac à Castries, Pondichéry, 6 juin 1785.
27Haudrère Philippe, La Bourdonnais. Marin et aventurier, Paris, Desjonquères, 1992, p. 120-125.
28Cité par Mossion Édouard, Dupont de Nemours et la question de la Compagnie des Indes, Paris, Société française d’imprimerie et librairie, 1919, p. 3.
29Morellet André, Mémoires relatifs à la discussion du privilège de la nouvelle Compagnie des Indes, Amsterdam, Chez Demonville imprimeur, 1787, p. 47.
30ANOM, C2 178, fo 53, Versailles, 1785.
31Antoine Bruny d’Entrecasteaux (7 novembre 1737-20 juillet 1793) : garde de la Marine en 1754, puis enseigne de vaisseau en 1757, lieutenant de vaisseau en 1770, capitaine de vaisseau en 1779, il est nommé directeur adjoint des Ports et arsenaux en 1783, selon Dupont Maurice, D’Entrecasteaux : rien que la mer, un peu de gloire, Paris, Éditions maritimes et d’outre-mer, 1983.
32ANOM, C2 170, fo 12-18, Versailles, 12 avril 1785.
33ANOM, C4 95, fo 3, Castries à Souillac, Versailles, 28 avril 1785.
34Mantienne Frédéric, Pierre Pigneaux, évêque d’Adran et mandarin de Cochinchine, 1741-1799, Paris, Les Indes savantes, 2012.
35ANOM, C4 94, fo 19, Castries à Souillac, Versailles, 3 février 1787.
Auteur
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Philippe Haudrère (†)
Université d’Angers.
Philippe Haudrère († 2021) a été professeur émérite d’histoire moderne à l’université d’Angers et membre de l’Académie de Marine. Grand spécialiste de l’histoire de l’océan Indien et des compagnies de commerce qui y exerçaient leurs activités à l’époque moderne. Sa thèse d’État, soutenue en 1987 à la Sorbonne, a été consacrée à la Compagnie des Indes française (La Compagnie française des Indes au xviiie siècle, Paris, Les Indes savantes, coll. « Asie », 2005 [1989]). Pendant une trentaine d’années, il a promu l’histoire maritime et coloniale à l’université et dans de nombreuses institutions et associations. Président de la Commission française d’histoire maritime de 1994 à 2000, il était également ancien secrétaire général et membre titulaire de l’Académie de Marine. En 2014, une sélection de ses meilleurs articles a été publiée : Les Français dans l’océan Indien, Rennes, PUR, 2014.

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