Ni voulu par le peuple, ni élu par le clergé
Le chapitre cathédral de Reims et l’élection contestée de 1106-1108
p. 79-96
Texte intégral
1L’idéal canonique prévoyait l’élection d’un évêque par le clergé et le peuple de son diocèse1. Toutefois, le corps électoral et la procédure d’élection n’ont longtemps pas été fixés, de sorte que l’on peut trouver des manifestations locales très variées. Depuis le milieu du xie siècle, les papes réformateurs ont modifié leur conception de ce que devait être une élection canonique. Leur démarche était double : d’une part, ils tentaient d’empêcher l’influence des laïcs sur les élections épiscopales, d’autre part, ils voulaient eux-mêmes exercer un plus grand contrôle sur l’investiture des évêques. Certes, dans les sources normatives, le clergé et le peuple restaient le corps électoral décisif, mais les papes et leurs légats n’hésitaient pas à passer outre les revendications correspondantes afin d’installer des candidats qui leur étaient favorables2. Après la mort de l’archevêque de Reims Manassès II en septembre 1106, deux candidats du chapitre de la cathédrale de Reims s’affrontèrent : l’archidiacre Gervais de Rethel et le prévôt Raoul le Vert. Dans le contexte des tendances esquissées ci-dessus, ce schisme servira de cas d’étude pour s’interroger sur les forces impliquées dans une élection et sur leurs possibilités d’action3. Un accent particulier sera mis sur le chapitre de la cathédrale de Reims, en tant que communauté la plus directement concernée par le schisme.
Qui influence l’élection d’un archevêque à Reims ?
2Le chapitre cathédral de Reims était une institution fière, comme en témoignent notamment les consuetudines confirmées par Urbain II en 10964 ou la position particulière vis-à-vis de l’archevêque stipulée dans la capitulatio du chapitre5. Mais les chanoines exerçaient également une influence au-delà de leurs propres intérêts. Au plus tard dans la deuxième moitié du xiie siècle, le chapitre se réserva par exemple le droit de confirmer les élections épiscopales dans les évêchés suffragants pendant une vacance de la cathedra archiépiscopale6. L’élection d’un nouvel archevêque n’était toutefois pas uniquement entre les mains de clergé cathédral. Une lettre adressée en 1138 à Innocent II et annonçant l’élection de Barthélémy de Joux, évêque de Laon, comme successeur de l’archevêque Renaud II suggère que les abbés des monastères situés dans le diocèse de Reims ont également participé aux élévations7. Avant même les dignitaires du chapitre – les deux archidiacres, le prévôt, le doyen et le chantre – ainsi que le clergé, l’ordo et le peuple de Reims, sept abbés y sont cités comme auteurs8. En raison de l’importance de l’archevêque de Reims pour la royauté française, les Capétiens n’ont cessé d’influencer les élections locales9. L’étendue réelle de leurs interventions doit cependant être vérifiée au cas par cas.
L’alternance des forces au xie et au début du xiie siècle
3Un examen superficiel des archevêques du xie et du début du xiie siècle permet déjà d’observer une interaction constante entre les forces locales et le roi, mais aussi avec la papauté. Gui Ier (1033-1055) était issu des comtes de Soissons et avait des liens de parenté étroits avec les comtes de Ramerupt et de Roucy ainsi qu’avec Manassès le Chauve, vidame de Reims. C’est justement cette intégration dans la noblesse locale qui a fait de lui, dans la perspective du roi Henri Ier, un candidat approprié pouvant faire contrepoids au comte de Champagne Eudes III10. Gervais de Château-du-Loir (1055-1067) doit, quant à lui, être considéré comme un candidat extérieur. Il fut évêque du Mans à partir de 1035, mais dut quitter son diocèse en raison de conflits avec les comtes d’Anjou, à la suite desquels Henri Ier l’installa comme archevêque de Reims11. Son successeur Manassès Ier (1070-1081) était apparenté aux comtes de Roucy et au vidame Manassès par son arrière-grand-père maternel, le comte de Ramerupt Hilduin I12. Bien que ses parents ne soient pas originaires de la province ecclésiastique de Reims, ces liens de parenté nous permettent de le considérer comme un candidat local. Il doit son élévation au rang d’archevêque à une décision du pape Alexandre II prise à la suite de l’intervention d’Hildebrand, le futur pape Grégoire VII. Durant son épiscopat, il entra dans de violents conflits non seulement avec certains membres du chapitre cathédrale de Reims, mais aussi avec Grégoire et son légat, l’archevêque de Lyon Hugues de Die, ce qui a conduit à sa destitution même s’il entretenait de bonnes relations avec le roi Philippe I13. Les conflits avec Manassès furent suivis d’une vacance de deux ans. Un mandat de Philippe Ier adressé au clergé et au peuple de Reims, à l’abbé de Saint-Remi ainsi qu’au vidame Roger, montre que lors de l’installation de Renaud Ier (1083-1096), de nouveaux conflits ont tenté d’être évités14. Avant de discuter avec Hugues de Die d’éventuels conflits lors de l’investiture de l’« electus vestri15 », le roi voulait attendre le retour de différents envoyés de Rome. Renaud était alors trésorier de l’abbaye Saint-Martin à Tournai depuis environ 1080 et faisait partie d’une famille fidèle au roi, qui avait occupé plusieurs dignités de l’église de Tournai. Il peut être considéré ici à la fois comme un candidat extérieur et comme un candidat royal16. Fils du vidame Manassès le Chauve et de Béatrice de Roucy, et longtemps prévôt du chapitre de Reims, Manassès II (1096-1106) apparaît comme le parfait exemple d’un candidat local. Après son élection apparemment unanime, le chapitre cathédral de Reims s’est empressé de solliciter le soutien de son candidat, qu’il voyait menacé par des ennemis17. Sur intervention d’Yves de Chartres, Urbain II reconnut Manassès18. Les évêques suffragants étaient un peu plus réticents à le reconnaître, de sorte qu’Urbain dut les inviter à deux reprises à assister à la consécration de leur nouveau métropolite19. Cela s’explique aussi très probablement par le contexte politique délicat qui a entouré l’élection, Philippe Ier étant excommunié depuis 1094 en raison de son mariage avec Berthe de Hollande. Parallèlement, l’excommunication peut expliquer pourquoi le roi lui-même n’est pas intervenu davantage dans l’élection20.
Les candidats à l’élection de Reims en 1106
4D’après les sources de la période qui nous sont parvenues, il y avait après la mort de Manassès II quatre candidats potentiels à sa succession. Le premier, Lambert, abbé de Saint-Bertin, se démarque tant des archevêques de Reims précédents que des trois autres candidats au regard de sa charge. La seule source concernant son éventuelle élection est une lettre de l’archevêque Anselme de Cantorbéry, auquel Lambert s’était apparemment adressé pour demander conseil. Anselme rappelle à Lambert son obligation d’obéissance envers l’abbaye de Cluny21. Lambert suivit ce conseil et resta abbé de Saint-Bertin jusqu’à sa mort22.
5Le deuxième candidat dont nous avons connaissance est Richer de Grandpré, archidiacre à Verdun. Les Gesta episcoporum Virdunensium rapportent qu’il gouvernait le comté de Grandpré, à la suite du décès des deux comtes précédents, ses deux frères Henri et Baudoin, étaient déjà décédés23. L’auteur des Gesta, un moine du monastère Saint-Laurent de Liège qui était à Saint-Vanne de Verdun à partir de 1142-1143, écrit que l’église de Reims a choisi Richer comme pasteur après la mort de l’archevêque Manassès24. Le pape Pascal II approuva cette élection et chargea son légat Richer, cardinal-évêque d’Albano, de la consécration de l’archidiacre, mais Richer de Grandpré se serait soustrait au légat. Lorsque l’évêque de Verdun mourut le 8 mars 1107, Richer fut également élu évêque par le chapitre de Verdun. Pour avoir accepté cette élection et s’être fait investir par Henri V, il fut peu après excommunié par Pascal II lors du concile de Troyes, sur lequel nous reviendrons plus tard. Même en se rendant à Rome, il ne réussit pas à faire lever son excommunication25.
6Le candidat Gervais de Rethel présente quelques similitudes avec Richer de Grandpré. Tous deux étaient issus d’une famille de comtes dont le domaine se trouvait au sein du diocèse de Reims ; ils étaient en outre tous deux archidiacres. Le lien entre les comtes de Rethel et l’archevêché de Reims semble toutefois avoir été un peu plus fort. Roger, l’oncle de Gervais, était archidiacre à Reims à partir de 1094, jusqu’à ce que son neveu le remplace en 110026.
7Il n’est plus possible de retracer l’origine exacte de Raoul le Vert. Une lettre de Bruno de Cologne, fondateur de l’ordre des Chartreux, montre que Raoul devait déjà être chanoine à Reims avant 108327. Le fait qu’il soit devenu prévôt du chapitre en 1096, puis archevêque, et qu’il ait ensuite nommé son neveu archidiacre sont selon Patrick Demouy des indices d’une famille établie localement28.
8L’élection de 1106 apparaît, après la procédure réussie de 1096, comme une nouvelle tentative du chapitre de la cathédrale de Reims d’élire comme archevêque une personne issue de son propre milieu. La comparaison avec les évêques en fonction dans la province ecclésiastique de Reims entre 1050 et 1150 montre qu’ils s’intègrent bien dans le tableau général29. Après l’élimination des deux premiers candidats le projet échoua cependant en raison d’un conflit au sein du chapitre, au cours duquel les différentes parties se tournèrent vers différentes forces extérieures.
Le schisme
9Une source historiographique centrale pour le schisme entre Gervais et Raoul se trouve dans les Annales Cameracenses. Avec un peu plus de quarante ans d’écart, Lambert de Waterlos, chanoine régulier à Saint-Autbert de Cambrai, note que Manassès, archevêque de Reims, est mort en 1106. « Mais Gervais, fils du Hugues, comte de Rethel, entra dans l’église de Reims par la main de Philippe et de son fils Louis30. » En ce qui concerne l’année 1107, il écrit :
« Raoul a été consacré archevêque de Reims. Le seigneur Eudes est venu pour la première fois à Cambrai. Le seigneur pape Pascal célébra un concile près de Troyes, lors duquel il condamna Gervais comme indigne d’être archevêque de Reims31. »
10Notamment par le rajout concernant Eudes, évêque de Cambrai depuis 110532, la consécration de Raoul et le jugement de Gervais au concile de Troyes se retrouvent ici juxtaposés sans lien apparent. Il en va autrement dans la présentation d’Albéric de Trois-Fontaines, écrite dans la première moitié du xiiie siècle, mais s’appuyant sur de nombreuses sources, notamment locales :
« Le pape Pascal a tenu un concile à Troyes. Il y cassa l’élection de Gervais, fils du comte Hugues de Rethel, et ordonna le prévôt Raoul archevêque de Reims33. »
11En comparaison avec les passages des Annales Cameracenses, il est particulièrement frappant de constater qu’Albéric ne valorise pas le rôle de Gervais, ce qui pourrait suggérer que la légitimité de Gervais n’était pas contestée, comme en témoigne notamment la référence à l’electio. Sa cassation n’est pas non plus expliquée ni justifiée. Dans sa notice sur Richer de Grandpré qui suit peu après et qui s’appuie très probablement sur les Gesta episcoporum Virdunensium, Albéric ajoute même que Richer « ante Gervasium de Retest electus fuit in archiepiscopum Remensem34 », omettant ainsi rapidement Raoul – le candidat qui s’est finalement imposé35.
12Le concile de Troyes s’est tenu le 23 mai 110736. Cependant, on trouve Raoul dans l’entourage du pape dès le 24 février de la même année : un jugement de Pascal II de Langres mentionne parmi les personnes présentes, outre plusieurs cardinaux, Eudes, évêque de Cambrai, ainsi que « de clericis Radulpho praeposito Remensi37 ». La raison pour laquelle Raoul n’est pas désigné ici comme electus reste pour l’instant inexpliquée. N’avait-il peut-être pas encore été élu archevêque à ce moment-là ou voulait-on rester prudent dans une situation encore indécise ? On peut également se demander si Raoul s’est rendu avec Pascal à Saint-Denis38 en passant par Cluny, au moment où le pape rencontra Philippe Ier et Louis VI39. Il semble toutefois que le schisme de Reims n’ait pas été discuté lors de cette rencontre40. Il est possible que Raoul n’ait rejoint l’entourage du pape qu’à Châlons-en-Champagne41, voire directement à Troyes. Des chanoines de Reims qui auraient pu s’exprimer à Troyes sur le schisme de Reims ne sont pas attestés. Le concile de Troyes n’a pas seulement traité de Raoul et Gervais, mais aussi des deux autres candidats à l’élection de Reims, respectivement Richer de Verdun et Lambert de Saint-Bertin, le premier ayant été excommunié42 tandis que le second reçut une charte pour son monastère43. Enfin, dans le cadre de l’arbitrage d’un litige entre l’abbaye de Saint-Vaast et le chapitre de la cathédrale d’Arras, on trouve trace de deux évêques suffragants de Reims à Troyes : Jean de Thérouanne et Geoffroy d’Amiens. Leur décision, prise avec l’accord de Pascal II et conjointement avec Galon, évêque de Paris, et l’abbé Lambert de Saint-Bertin, fut confirmée par un acte de Lambert, évêque d’Arras44. Les prélats cités sont un groupe proche du pape que l’on retrouve régulièrement dans les sources dans cette configuration ou dans des configurations similaires45.
13Les informations historiographiques sur la déposition de Gervais et l’installation de Raoul comme archevêque de Reims à Troyes peuvent être complétées par une lettre de Pascal II. Selon celle-ci, la consécration de Raoul n’a pas eu lieu lors du concile, mais a été transmise à ses évêques suffragants. Le pape décréta un anathème contre Gervais et ses partisans. Dans la lettre elle-même, datée du 23 novembre 1107, Pascal II fit l’éloge de tous les suffraganei Remensis ecclesie qui avaient consacré Raoul sans crainte. Si l’un de leurs comprovinciaux n’était pas présent et n’avait pas donné son accord par écrit, il devait être exclu de la communion. Il condamna à nouveau Gervais et ses partisans à l’anathème46. Ni l’adresse ni le contenu de la lettre ne permettent de savoir quels évêques ont participé à la consécration de Raoul. Cela montre toutefois qu’il devait y avoir des évêques suffragants qui, avec leur absence, ne voulaient soit pas se positionner, soit souhaitaient véritablement marquer leur opposition à l’élévation de Raoul. Le manuscrit qui transmet la lettre du pape peut au moins donner une petite indication sur un participant à la consécration : Max Sdralek a démontré de manière convaincante qu’en raison de son contenu se référant clairement à Thérouanne et de la datation de certaines pièces, il a dû être composé au milieu du xiie siècle pour Milo Ier, évêque de Thérouanne47. Son prédécesseur Jean aurait donc compté parmi les destinataires de la lettre, ce qui, compte tenu de sa présence au concile de Troyes et de ses relations avec Pascal II, Lambert d’Arras, mais aussi Yves de Chartres, rend probable le fait qu’il ait participé à la consécration de Raoul.
Résistance au sein du chapitre cathédral
14Le schisme de Reims dura encore plus d’un an. Raoul avait certes été consacré, mais Gervais avait toujours des soutiens au sein du chapitre cathédral ainsi que l’appui de Philippe Ier et de Louis VI. Nous examinerons ici deux lettres polémiques dirigées contre Raoul, qui permettent d’approcher davantage le chapitre cathédral en tant que communauté déchirée.
15Il n’existe qu’une seule copie de chacune de ces deux lettres. La première, écrite par le chantre Richer et d’autres prêtres et chanoines de Reims non spécifiés48, a toujours été mentionnée par les chercheurs en relation avec le schisme, mais n’a pas été étudiée en détail ; la seconde, écrite au nom d’un seul clerc, semble être passée inaperçue, bien qu’il existe également une traduction en français49. Dans les manuscrits respectifs, les deux lettres sont précédées d’une lettre de Bruno de Cologne, le fondateur des chartreux, destinée à Raoul le Vert. Bruno fut écolâtre à Reims à partir de 1056, avant de quitter la métropole au plus tard en 1083 pour entamer une vie érémitique. Entre 1096 et 1101, Bruno écrivit à Raoul, lui rappelant qu’ils avaient juré ensemble de prendre l’habit50. De plus, Bruno mettait en garde contre les dangers de la fonction de prévôt pour l’âme de Raoul ; il est donc possible que la lettre de Bruno ait été précédée d’une lettre de Raoul dans laquelle ce dernier informait Bruno qu’il était devenu prévôt à Reims.
16La lettre du chantre Richer nous est parvenue dans un manuscrit de la fin du xiie siècle, qui rassemble surtout des poèmes et des vers, mais aussi des lettres, notamment un grand nombre de lettres d’Yves de Chartres. Une inscription de propriété datant du xiiie siècle indique que le manuscrit est la propriété du monastère de Saint-Arnoul près de Metz51. Après une section contenant plusieurs lettres d’Yves, la lettre de Bruno et la lettre de Richer se suivent directement, classées entre deux lettres à Anselme de Cantorbéry52.
17Richer et les autres clercs désignent Raoul comme prévôt, ce qui laisse supposer qu’ils ont écrit avant sa consécration comme archevêque. La phrase suivante peut également fournir d’autres indices pour la datation : Raoul serait uniquement mû par l’ambition (ambitio), « prétendant en vain que tu dois être contraint par le Seigneur Pape […] qu’elle [l’ambition] ne te pousse pas sur la chaire de celui que tu as accusé53 ». Raoul prétendrait donc, malgré son ambition évidente, que le pape le force en quelque sorte à accepter la dignité d’archevêque. Cela fait certainement allusion au concile de Troyes et à la décision papale qui y a été prise. Sans être directement nommé, Gervais est en outre présenté comme le titulaire légitime du siège archiépiscopal de Reims. Le reproche central de la lettre est que Raoul agirait par ambitio et invidia – ambition et envie – et que sa cruauté causerait de grands dommages à l’église de Reims. L’état de l’ecclesia Remensis est décrit en des termes aussi dramatiques que possible : Raoul s’arroge l’honor par l’épée, par le feu et le sang, par l’oppression des pauvres et le déchirement de l’Église54. Ces déclarations restent toutefois peu concrètes et ne permettent pas de tirer des conclusions sur la situation réelle à Reims – tout comme les deux péchés ambitio et invidia peuvent certainement être considérés comme des accusations générales et assez habituelles, souvent portées contre un évêque. En affirmant que Raoul n’est « ni voulu par le peuple, ni élu par le clergé55 », son élévation est présentée comme non canonique. À cela s’ajoute la référence au rejet par les principes et à un serment du roi pour punir Raoul. Le clergé fait ainsi référence à son rôle de corps électoral et indique clairement que sa position est soutenue par le roi.
18La lettre du clerc individuel à Raoul nous est parvenue dans un manuscrit écrit au monastère de Himmerod, dans l’archidiocèse de Trèves. La paléographie et l’étude des enluminures permettent de dater la copie du texte de la seconde moitié du xiie siècle56. Le manuscrit lui-même est un recueil de textes qui mettent l’accent sur les vertus des dignitaires ecclésiastiques. Il contient surtout le Liber pastoralis curae de Grégoire le Grand ; la lettre de Bruno et la lettre du clerc à Raoul se trouvent plus loin, entre le De Virtutibus et Vitiis d’Alcuin et des extraits de lettres du pape Gélase à l’empereur Anastase Ier (J3 1277) et aux évêques Dardaniens (J3 1278). Les deux premières lettres citées ont donc été incluses dans le manuscrit moins en tant que lettres que pour leur contenu, qui s’inscrit pleinement dans l’objectif de la collection.
19Alors que les liens entre la lettre du chantre Richer et la lettre de Bruno sont plutôt le résultat de la juxtaposition des textes, ici la lettre du fondateur de la Chartreuse, souvent citée littéralement, est un élément central de l’argumentation de l’auteur. Le texte commence immédiatement et sans adresse avec la description d’une situation très personnelle : lors d’une maladie, Raoul aurait menacé le clerc d’être privé de confession, de viatique et de sépulture s’il ne renonçait pas à certains biens ou n’entrait pas dans un couvent. Dans son texte, l’auteur s’oppose fermement au refus d’inhumation, même s’il y avait « des lois, des droits ou des décrets interdisant que tous les damnés soient enterrés57 ». Bien que formulé ici au conditionnel, l’anathème imposé par Pascal II a créé une situation réelle dans laquelle non seulement Gervais mais aussi ses partisans ont dû craindre pour leur sépulture58. Si quelqu’un décédait en ayant été frappé d’excommunication ou d’anathème, il ne pouvait pas être enterré en terre ecclésiastique59. Le point central, que le clerc reproche à Raoul se trouve programmatiquement dans une citation qu’il a tirée de la lettre de Bruno : « Tu sais quelle promesse tu as faite, et à qui. Il est tout-puissant et terrible, le Seigneur à qui tu t’es consacré par vœu pour être moine ; ce n’est ni permis, ni avantageux de lui mentir, car il ne souffre pas qu’on puisse se jouer de lui impunément60. » En rompant la promesse qu’il avait faite avec Bruno de se faire moine, et apparemment aussi de faire un pèlerinage à Jérusalem, Raoul s’attire la colère de Dieu et est abandonné par le Saint-Esprit61.
20Bien que l’élection des partisans de Gervais ait été bafouée, notamment par le pape et les évêques suffragants de Reims, ils rendent dans leurs lettres Raoul seul responsable du schisme. Ce faisant, ils n’avancent certes pas d’arguments juridiques, mais ils montrent clairement que, de leur point de vue, Raoul n’a pas été élu canoniquement. Avec leurs reproches – qu’il s’agisse d’ambition et de jalousie ou de vœux non respectés –, ils visent cependant avant tout l’aptitude de Raoul en tant qu’évêque. En évoquant une élection non canonique et le manque d’aptitude de Raoul, les clercs de Reims se servaient de deux arguments centraux avec lesquels les papes légitimaient leurs interventions dans l’élection des évêques62.
21Les tentatives des partisans de Gervais de gagner spécifiquement des évêques à leur cause ne sont pas documentées. Lors de l’élection de Manassès II, les clercs de Reims avaient fait appel à Lambert d’Arras pour soutenir leur élection63. En 1100, lors d’une double élection à Beauvais, ce sont même les partisans de Galon – un candidat rejeté notamment par Yves de Chartre et donc par le pape – qui se sont adressés à Lambert d’Arras pour lui demander son aide64. Au lieu de cela, l’écolâtre de Reims Odalricus se rendit lui-même à Rome pour protester contre l’élévation de Raoul. Il n’en revint cependant pas, car Pascal II l’éleva au rang de cardinal-prêtre65. Cela montre le prestige de l’écolâtre à la Curie, mais c’était aussi pour le pape une manière élégante d’éloigner un adversaire de Raoul de Reims.
Nouvelles ampleur, solution et retombées
22Avec la mort de Philippe Ier à la fin du mois de juillet 1108, le schisme prit une nouvelle ampleur, car il faisait obstacle au sacre du roi Louis VI dans la cathédrale de Reims66. Le couronnement au mauvais endroit et par un autre évêque que celui de Reims menaçait la légitimité de Louis VI, cependant même après cette situation critique pour la royauté, le conflit à Reims n’était toujours pas résolu. Dans sa lettre de justification, Yves de Chartres avait fermement rejeté les prétentions de l’archevêque de Reims au couronnement du roi67. Pourtant, peu de temps après, Raoul a dû s’adresser à Yves pour lui demander conseil sur une question canonique, sachant probablement qu’il dépendait du soutien de l’évêque de Chartres. Ce qui interpelle dans la réponse d’Yves, c’est la légèreté avec laquelle il promet en conclusion d’intervenir pour la paix de l’église de Reims et pour Raoul auprès de Louis VI68. Aussi la demande de Raoul, à laquelle Yves répond en le nommant expressément venerabilis Remensis archiepiscopus, montre qu’il peut déjà agir sur des fonctions importantes qui incombent à l’archevêque. Comme il semble avoir été capable d’agir pendant le couronnement de Louis VI au point d’envoyer des messagers depuis Reims qui devaient empêcher le couronnement69, on peut supposer que sa position à Reims était déjà relativement consolidée. Néanmoins, il n’était encore pas reconnu par le roi et Gervais représentait une menace permanente. Une lettre de Lambert d’Arras à Pascal II met en lumière les négociations en cours avec Louis : Lambert demande au pape de se charger des envoyés (nuntios) du roi pour « obtenir la paix pour l’Église de Reims, la grâce pour son métropolitain et l’amitié du roi70 ». On ne sait pas précisément si les envoyés avaient déjà pour mission de parvenir à un accord, ni quelle était la force motrice derrière la demande de Lambert. Cependant, tant Raoul que le roi devaient être disposés à trouver un accord ; Lambert d’Arras était certainement considéré comme l’avocat le plus approprié en raison de ses relations avec Pascal et Yves et de sa position dans la province ecclésiastique. Ce sont finalement Yves de Chartres et Thibaud, prieur de Saint-Martin-des Champs, qui organisèrent la rencontre décisive avec Louis : lors d’une assemblée qui se tint le 25 décembre 1108 à Orléans, Louis VI reconnut Raoul comme archevêque de Reims71.
23Il faut attendre l’année 1111 pour que l’on puisse déceler la présence de Raoul dans l’entourage du roi72. Cependant, cela vaut également pour les autres évêques de la province ecclésiastique de Reims, à l’exception d’Hubert de Senlis, seul suffragant rémois à avoir participé au sacre de Louis73. Les deux années suivantes, Raoul est également mentionné dans les actes du roi, mais par la suite il ne l’est plus74. Si l’on considère les datations des chartes archiépiscopales comme indice d’un changement dans les relations entre le métropolite et le roi, on obtient l’image suivante75 : entre 1109 et 1115, la datation regnante Ludovico rege Francorum76 prédomine. Entre 1115 et 1118, on trouve deux fois l’insertion glorioso77. En 1119 et 1120, seule la datation regnante gloriosissimo rege Francorum Ludovico apparaît78, tandis que dans les années suivantes, jusqu’à la mort de Raoul en 1124, différentes formes ont été utilisées79. Cette observation ne permet de tirer que des conclusions limitées, en particulier si l’on considère l’influence des destinataires ou les circonstances des différentes expositions. Néanmoins, au moins jusqu’en 1119, année où le concile de Calixte II s’est tenu à Reims en présence de Louis VI, on constate une tendance qui peut être interprétée comme une proximité accrue entre Raoul et le roi, contrastant ainsi avec la diminution de la présence dans les actes royaux. En outre, la reconnaissance de Raoul par ses comprovinciaux se manifeste par le nombre de participants aux synodes provinciaux qui se tiennent régulièrement80.
24Les premières chartes qui nous sont parvenues de Raoul lui-même ont été établies entre 1109 et 111081. Les listes de témoins permettent de jeter un coup d’œil sur la composition d’une partie du chapitre cathédral de Reims. En effet, on ne constate pas de grand changement par rapport aux dernières chartes de Manassès II82 : il y a un nouvel archidiacre en la personne de Foulques et un nouveau prévôt en la personne d’Ebles. Dans le contexte de la lettre écrite en son nom contre Raoul, on remarque qu’à la place de Richer, c’est désormais un Lambert qui est cité comme chantre. Le nécrologe du chapitre de Reims nous apprend que Richer est devenu moine à Saint-Remi83. L’année de sa mort n’étant pas mentionnée dans les sources, il est impossible de dire quand il a quitté le chapitre et combien de temps après il est décédé. Le fait que les parties en conflit savaient parfaitement s’arranger est patent dans une charte de Raoul pour Saint-Nicaise, émise en 1112/1113. Transmise par une copie, mais ne pouvant en aucun cas être mise en doute, on trouve de façon notable parmi les signatures celle de Gervais de Rethel en sa qualité d’archidiacre84 ! En 1115, lors d’une assemblée présidée par le légat pontifical Conon de Préneste, Gervais dut avouer devant l’archevêque Raoul et les évêques Lisiard de Soissons et Geoffroy d’Amiens que le salvamentum qu’il exerçait, à l’instar de son frère défunt, sur des villages de Saint-Remi situés dans le comté de Rethel, était illégitime85. Sans référence à sa fonction ecclésiastique, il est simplement désigné ici comme frère de Manassès, le fils décédé du comte Hugues de Rethel. Parmi les souscriptions, on trouve celle d’un Nicolaus Archidiaconus, qui a dû remplacer Gervais peu de temps auparavant en tant qu’archidiacre, de sorte que Gervais ne faisait très probablement plus partie du chapitre de la cathédrale à ce moment-là86. Guillaume de Tyr rapporte qu’après la mort de son père Hugues et de son frère Manassès, Gervais a quitté l’archevêché de Reims pour prendre en charge l’héritage comtal87. Comme Guillaume écrivait pour et sur les rois de Jérusalem, il ne pouvait que malmener Gervais, le frère de Baudoin II. C’est pourquoi il parle de son élection comme archevêque de Reims, mais ne mentionne pas le schisme88. En revanche, il lui a semblé important de souligner que Gervais avait pris une femme contre les lois de l’Église89.
Conclusion
25Les élections épiscopales représentent des moments où des groupes d’intérêts actifs à différents niveaux politiques se rencontrent et peuvent exercer une influence sur le paysage politique. Dans le cas de l’archevêché de Reims, les Capétiens ont toujours exercé une influence sur le choix des candidats et ont même nommé archevêques des personnes qui avaient commencé leur carrière dans d’autres provinces ecclésiastiques. Au début du xiie siècle, le chapitre de la cathédrale de Reims réussit à élire l’un de ses propres chanoines – Manassès II – comme archevêque avec le soutien des évêques Lambert d’Arras et Yves de Chartres et grâce à la reconnaissance du pape. Après l’échec de l’élection de Richer de Grandpré en 1106, en raison du candidat lui-même et ce malgré l’approbation pontificale, Gervais de Rethel réussit à obtenir le soutien du roi90. Du point de vue de ses partisans, Gervais était déjà archevêque légitime lorsque Pascal II le déclara « indigne » à Troyes et installa Raoul à sa place. Cette intervention, qui illustre les nouvelles prétentions de la papauté à contrôler les élections épiscopales91, ne pouvait que susciter l’opposition du chapitre. Dans les lettres polémiques contre Raoul, on ne trouve cependant ni attaques contre le pape, ni arguments juridiques – il est néanmoins clair que Raoul n’a pas été élu canoniquement du point de vue de ses adversaires. Il est frappant de constater ici l’importance accordée à l’approbation des principes et du roi. L’objectif central des lettres était de souligner que Raoul n’était pas apte à devenir archevêque.
26Il n’est pas possible de savoir quelles parties du chapitre cathédral soutenaient Raoul. Une analyse précise de la querelle entre les abbayes de Saint-Nicaise et de Saint-Remi pourrait à cet égard fournir des informations supplémentaires, qui éclaireraient également davantage les relations des abbés avec Raoul et le chapitre92. À l’exception des évêques proches du pape autour de Lambert d’Arras, dont l’implication dans la consécration et le processus de reconnaissance de Raoul apparaît ponctuellement dans les sources connues, les autres évêques suffragants semblent s’être montrés plutôt prudents ou avoir exprimé leur désaccord par leur absence, tant lors de la consécration de Raoul que lors du couronnement de Louis VI. Au cours du schisme, dont le statu quo a été maintenu malgré la crise du couronnement de Louis VI, on constate régulièrement des négociations et des moments de conciliation. Le fait notamment que Gervais ait pu continuer à exercer sa fonction d’archidiacre jusque vers 1112, même après son expulsion en tant qu’invasor, en est un exemple patent.
Notes de bas de page
1Je remercie chaleureusement Thomas Billard pour son aide à la traduction du texte. Sur les élections épiscopales au Moyen Âge, voir par exemple Thier Andreas, Hierarchie und Autonomie. Regelungstraditionen der Bischofsbestellung in der Geschichte des kirchlichen Wahlrechts bis 1140, Francfort-sur-le-Main, V. Klostermann, coll. « Recht im ersten Jahrtausend 1 », 2011 ; Keller Hagen, « Wählen im früheren Mittelalter », in Christoph Dartmann, Günther Wassilowsky et Thomas Weller (dir.), Technik und Symbolik vormoderner Wahlverfahren, Munich, R. Oldenbourg, coll. « Historische Zeitschrift. Beihefte, N. F. 52 », 2010, p. 35-52 ; Jarousseau Guy, « Electio, voluntas et ordinatio. Quelques jalons sur les modes de désignation des évêques en Gaule de l’époque mérovingienne au début du xiie siècle », in Stéphane-Marie Morgain (dir.), Libertas Ecclesiae. Esquisse d’une généalogie (1650-1800), Paris, Parole et silence, 2010, p. 33-68.
2Ripart Laurent, « Les grégoriens et les élections épiscopales. L’exemple emblématique d’Hugues de Die », in Michelle Fournié (dir.), La réforme « grégorienne » dans le Midi, milieu xie-début xiiie siècle, Toulouse, Privat, coll. « Cahiers de Fanjeaux 48 », 2013, p. 209-256 ; Schreiner Klaus, « Wahl, Amtsantritt und Amtsenthebung von Bischöfen. Rituelle Handlungsmuster, rechtlich normierte Verfahren, traditionsgestützte Gewohnheiten », in Barbara Stollberg-Rilinger (dir.), Vormoderne politische Verfahren, Berlin, Duncker und Humblot, coll. « Zeitschrift für historische Forschung. Beiheft 25 », 2001, p. 73-117.
3Sur le schisme, voir Becker Alfons, Studien zum Investiturproblem in Frankreich. Papsttum, Königtum und Episkopat im Zeitalter der gregorianischen Kirchenreform (1049-1119). Études sur le problème des investitures en France, Saarbruck, West-Ost-Verlag, coll. « Schriften der Universität des Saarlandes 17 », 1955, p. 123-125 ; Falkenstein Ludwig, « Nikolaus II. oder Paschalis II.? Zum Empfänger des Schreibens eines “Geruasius Remensis dictus episcopus” », in Franz-Reiner Erkens et Hartmut Wolff (dir.), Von sacerdotium und regnum, Cologne/Weimar/Vienne, Böhlau, coll. « Passauer historische Forschungen 12 », 2002, p. 675-704, ici p. 692-695 ; Demouy Patrick, Genèse d’une cathédrale. Les archevêques de Reims et leur église aux xie et xiie siècles, Langres, Éditions Dominique Guéniot, 2005, p. 540-541 et 619.
4Regesta Pontificum Romanorum ab condita ecclesia ad annum post Christum natum MCXCVIII, 2e édition, éd. Philippe Jaffé, Samuel Loewenfeld, Ferdinand Kaltenbrunner et Paul Ewald, 2 vol., Leipzig, Veit, 1885-1888 (cité comme JL), no 5640 ; Recueil des Historiens des Gaules et de la France, 2e édition, 24 vol., Paris, Palmé, 1869-1904 (cité comme RHF), t. XIV, col. 725. Nous reviendrons au cours de cet article sur les trois chanoines cités comme pétitionnaires dans le privilège d’Urbain : le prévôt Raoul (le Vert), le chantre Richer et l’écolâtre Odalricus. Avant de devenir prieur de Cluny et finalement pape, Urbain II avait lui-même été chanoine de Reims.
5Archives administratives de la ville de Reims, éd. Pierre-Joseph Varin, 3 vol., Paris, Crapelet, coll. « Collection de documents inédits sur l’histoire de France 1 », 1839-1848, t. I, p. 224-229. Voir Demouy Patrick, Genèse…, op. cit., p. 59-64 ; Falkenstein Ludwig, « Zur Stellung des Reimser Metropolitankapitels in Stadt, Diözese und Kirchenprovinz während des 12. und 13. Jahrhunderts », in Stephan Kuttner et Kenneth Pennington (dir.), Proceedings of the Sixth International Congress of Medieval Canon Law. Berkeley, California, 28 July-2 August 1980, cité du Vatican, Biblioteca apostolica vaticana, coll. « Monumenta iuris canonici. Series C, Subsidia 7 », 1985, p. 551-562.
6Falkenstein Ludwig, « Stellung des Reimser Metropolitankapitels… », art. cité, p. 558-559.
7Papsturkunden in den Niederlanden: Belgien, Luxemburg, Holland und Französisch-Flandern, éd. Johannes Ramackers, 2 vol., Berlin, Weidmansche Buchhandlung, coll. « Abhandlungen der Akademie der Wissenschaften zu Göttingen. Folge 3, 8-9 », 1933-1934, p. 133-134, no 35 ; Falkenstein Ludwig, « Nikolaus II… », art. cité. Barthélémy avait été pendant une dizaine d’années trésorier du chapitre cathédral de Reims avant son élévation à l’épiscopat à Laon. Innocent II n’a cependant pas approuvé son transfert à Reims.
8Eudes de Saint-Remi est suivi par les abbés non nommés de Mouzon, Hautvillers, Saint-Thierry, Saint-Basle, Saint-Nicaise et de la collégiale augustinienne de Saint-Denis. L’ordre des abbés coïncide en grande partie avec celui de leurs souscriptions dans les chartes archiépiscopales – dans les chartes tardives de Renaud II, seule la position des signatures des abbés de Mouzon et de Hautvillers est inversée, cf. Recueil des actes des archevêques de Reims d’Arnoul à Renaud II (997-1139), éd. Patrick Demouy, 3 vol., Nancy, thèse d’histoire, sous la direction de Michel Bur, université Nancy 2, 1982, nos 239 et 245.
9Voir Becker Alfons, Studien…, op. cit., p. 22-23.
10Demouy Patrick, Genèse…, op. cit., p. 607.
11Ibid., p. 608.
12Ibid., p. 611 et l’arbre généalogique p. 643, tableau 3, selon lequel Manassès descend en ligne paternelle des comtes de Gournay(-en-Bray, Normandie) et en ligne maternelle des comtes de Dammartin (diocèse de Meaux).
13Sur ces conflits, voir les regestes dans Gallia Pontificia online. Reims I: Erzbischöfe, par Ludwig Falkenstein, édition électronique par Robert Friedrich et Sebastian Gensicke, sous la direction de Rolf Große, Paris 2023 (cité comme GPO Reims I: Erzbischöfe), no 306-331, [https://doi.org/10.58137/001-2023-0], consulté le 21 décembre 2023 ; sur la perception que l’archevêque de Reims avait de lui-même dans ce conflit voir Ott John Stephens, « “Reims and Rome are Equals”. Archbishop Manasses I (c. 1069-80), Pope Gregory VII, and the Fortunes of Historical Exceptionalism », in Sigrid K. Danielson et Evan A. Gatti (dir.), Envisioning the Bishop. Images and the Episcopacy in the Middle Ages, Turnhout, Brepols, coll. « Medieval Church Studies 29 », 2014, p. 275-302.
14Recueil des actes de Philippe Ier Roi de France (1059-1108), éd. Maurice Prou, Paris, Imprimerie nationale, coll. « Chartes et diplômes relatifs à l’histoire de France 1 », 1908, p. 416-417, no 171. L’édition replace la lettre dans le contexte du schisme de 1106-1108, mais elle a très certainement été émise dans le contexte de l’élection de Renaud Ier, voir Falkenstein Ludwig, « Zu verlorenen päpstlichen Privilegien und Schreiben », in Lotte Kéry et Monika Gussone (dir.), Eloquentia copiosus, Aix-la-Chapelle, Thouet, 2006, p. 181-224, ici p. 203-204, n. 128.
15Recueil des actes de Philippe Ier…, op. cit., p. 417, no 171 : « Vos scitis […] nos Lugdunensemque archiepiscopum concilium vel colloquium constituisse in quo, si de electi vestri investitura esset controversia, nos sperabamus diffinire ». Voir GPO Reims I: Erzbischöfe, no 334, [https://doi.org/10.58137/001-2023-334], consulté le 21 décembre 2023.
16Demouy Patrick, Genèse…, op. cit., p. 614 ; Becker Alfons, Studien…, op. cit., p. 95-96.
17Le registre de Lambert, évêque d’Arras (1093-1115), éd. Claire Giordanengo, Paris, CNRS Éditions, coll. « Sources d’histoire médiévale 34 », 2007, p. 336-339, E. 7 : « ecclesia nostra […] cepisset laborare periculis, sed et inimici Dei undique terrarum sedentes in insidiis innumeris persecutionibus publice et privatim eam impugnare conarentur ». Voir Ott John Stephens, Bishops, Authority and Community in Northwestern Europe, c. 1050-1150, Cambridge, Cambridge University Press, 2015, p. 114, n. 14.
18Lettres d’Yves de Chartres, éd. Geneviève Giordanengo, Orléans, coll. « Édition électronique TELMA [IRHT] », 2017, ep. 48, [http://telma-chartes.irht.cnrs.fr/yves-de-chartres/notice-acte/20985], consulté le 21 décembre 2023.
19JL 5614 ; Le registre de Lambert…, op. cit., p. 340-343, E. 9 et GPO Reims I: Erzbischöfe, no 361, [https://doi.org/10.58137/001-2023-334], consulté le 21 décembre 2023 (JL 5619) ; Le registre de Lambert…, op. cit., p. 347-349, E. 13.
20Becker Alfons, Studien…, op. cit., p. 95-96.
21S. Anselmi Cantuariensis Archiepiscopi Opera Omnia, éd. Franz Salesius Schmitt, 6 vol., Stuttgart/Bad Cannstatt, Friedrich Frommann Verlag (Günther Holzboog), 1938-1961, t. V, p. 366-367, ep. 421 : « ecclesia Remensis desiderat et petit reverentiam vestram, sicut scripsistis mihi, sibi ad regimen archiepiscopatus ».
22Sur Lambert de Saint-Bertin, voir Sellner Harald, Klöster zwischen Krise und correctio, Regensburg, Schnell und Steiner, coll. « Klöster als Innovationslabore. Studien und Texte 3 », 2016, [https://digi.ub.uni-heidelberg.de/diglitData/pdfOrig/kai3.pdf], consulté le 21 décembre 2023, en particulier la partie I.
23Gesta episcoporum Virdunensium, éd. Georg Waitz, in MGH SS X, éd. Georg Heinrich Pertz, Hanovre, Hahn, 1852, p. 489-525, chap. xv, p. 499. Voir GPO Reims I: Erzbischöfe, n. *383, [https://doi.org/10.58137/001-2023-383], consulté le 21 décembre 2023. Sur Richer, voir Erkens Franz-Reiner, Die Trierer Kirchenprovinz im Investiturstreit, Cologne/Vienne, Böhlau, coll. « Passauer historische Forschungen 4 », 1987, p. 209-217.
24Gesta episcoporum Virdunensium, op. cit., chap. xv, p. 499 : « Ante illos dies Remorum archiepiscopus Manasses vita decesserat, et illa ecclesia Richardum Virdunensem archidiaconum in pastorem sibi elegerat. »
25Ibid., chap. xv, p. 499-500 ; JL *6146.
26Demouy Patrick, Genèse…, op. cit., p. 660.
27Nous reviendrons plus loin sur Bruno et sa lettre.
28Ibid., p. 619-620.
29Ott John Stephens, Bishops…, op. cit., p. 30, table 2.1 et p. 31, table 2.2, montre qu’une bonne moitié des évêques ont exercé des fonctions au sein d’un chapitre cathédrale avant d’être élus évêques. Il serait intéressant de mettre ce tableau en relation avec l’origine géographique des différents candidats et de voir s’il est possible de déterminer l’influence de la domination de certains pouvoirs – roi, comtes, abbés, chapitre – sur le choix des candidats.
30Lambertus Waterlos, Annales Cameracenses, éd. Georg Heinrich Pertz, in MGH SS XVI, éd. Georg Heinrich Pertz, Hanovre, Hahn, 1859, p. 510-554, a. 1106, p. 511 : « Gervasius vero, filius Hugonis comitis de Roistest, ecclesiam Remensem per manum Philippi et filii eius Ludovici invasit. » Voir GPO Reims I: Erzbischöfe, no 384, [https://doi.org/10.58137/001-2023-384], consulté le 21 décembre 2023.
31Ibid., a. 1107, p. 511 : « Radulfus archiepiscopus Remensis consecratur. Domnus Odo primum Cameracum venit. Domnus papa Paschalis apud Trecas concilium celebravit, in quo Gervasium indignum esse archiepiscopatu Remensi iudicavit. »
32Selon cette information, Eudes, alors en conflit avec Galcher, a pu entrer dans sa ville pour la première fois, voir Resnick Irven M., « Odo of Cambrai and the Investiture Crisis in the Early Twelfth Century », Viator: Medieval and Renaissance Studies, no 28, 1997, p. 83-98, ici p. 91-95.
33Albricus Monachus Trium Fontium, Chronica a monacho Novi Monasterii Hoiensis interpolata, éd. Paul Scheffer-Boichorst, in MGH SS XXIII, éd. Georg Heinrich Pertz, Hanovre, Hahn, 1874, p. 631-950, a. 1108, p. 817 : « Paschalis papa concilium tenuit Trecis. Ibi cassavit electionem Gervasii filii comitis Hugonis Reitestensis et Radulfum prepositum ordinavit in Remensem archiepiscopum. »
34Ibid., a. 1108, p. 817, l. 27-29.
35Ibid., a. 1108, p. 817, l. 24-26, on trouve une formulation selon laquelle Louis VI doit rétablir la paix à l’église de Reims « expulso invasore Gervasio ». Il s’agit toutefois d’une citation littérale d’une lettre d’Yves de Chartres à Pascal II et donc pas forcément d’une formulation valorisante émanant d’Albéric, voir Lettres d’Yves de Chartres, op. cit., ep. 190, [http://telma-chartes.irht.cnrs.fr/yves-de-chartres/notice/21128], consulté le 21 décembre 2023.
36Pontal Odette, Les conciles de la France capétienne jusqu’en 1215, Paris, Éditions du Cerf, coll. « Histoire », 1995, p. 250-252 ; Blumenthal Uta-Renate, The Early Councils of Pope Paschalis II. 1100-1110, Toronto, Pontifical Institute of Mediaeval Studies, coll. « Studies and Texts 43 », 1978, p. 74-101.
37Ibid., p. 79-80 sur JL 6125, (1107) 24 février.
38Louis VI le Gros. Annales de sa vie et de son règne (1081-1137), éd. Achille Luchaire, Paris, A. Picard, 1890, p. 26, no 47 (30 avril-3 mai).
39Pour l’itinéraire de Pascal II, voir Schilling Beate, « Zur Reise Paschalis’ II. nach Norditalien und Frankreich 1106/1107 (mit Itineraranhang und Karte) », Francia, no 28, 2001, p. 115-158.
40Becker Alfons, Studien…, op. cit., p. 121-122.
41Louis VI le Gros, op. cit., p. 26, no 48 (3 mai-13 mai).
42Gesta episcoporum Virdunensium, op. cit., chap. xv, p. 500.
43JL 6201, Troyes, 25 mai 1107. Voir pour la datation le supplément dans JL, t. II, p. 714 et Les chartes de Saint-Bertin d’après le grand cartulaire de Dom Charles-Joseph-Dewitte, dernier archiviste de ce monastère, éd. Daniel Haigneré, 4 vol., Saint-Omer, H. d’Homont, coll. « Publication de la Société des antiquaires de la Morinie », 1886-1899, t. I, p. 42, no 109.
44Les chartes des évêques d’Arras (1093-1203), éd. Benoît-Michel Tock, Paris, Comité des travaux historiques et scientifiques, 1991, no 12, Arras, 7 juin 1107.
45Voir Ott John Stephens, Bishops…, op. cit., p. 143-151.
46GPO Reims I: Erzbischöfe, no 388, [https://doi.org/10.58137/001-2023-388], consulté le 21 décembre 2023 ; ibid., n. *385-387 ; Sdralek Max, Wolfenbüttler Fragmente, Münster, Schönigh, coll. « Kirchengeschichtliche Studien 1, 2 », 1891, p. 114, no 4, sur la lettre et sa datation, ibid., p. 66.
47Ibid., p. 3-85.
48Radulfo Remensis Ecclesiae praeposito, fratres qui Remis sunt sacerdotes omnes, R[icherius] cantor, et qui cum eis sunt, quae discordiae sunt fugere, et ad pacis visionem tendere. Imprimé pour la première fois dans Mabillon Jean, Annales Ordinis S. Benedicti Occidentalium Monachorum Patriarchae, 6 vol., Paris, C. Robustel, 1703-1739, t. V, p. 674-675, Appendice, no 64, dont RHF 15, p. 199-200, no 50, en dernier lieu chez Migne Jacques-Paul, Patrologiae cursus completus, 2e édition, 217 vol., Paris, 1844-1855 (cité comme Migne, PL), 163, c. 1417-1419, no 1. Wilmart André, « Deux lettres concernant Raoul le Verd l’ami de Saint Bruno », Revue bénédictine, no 51, 1939, p. 257-274, ici p. 258, n. 3 ainsi que p. 259, également n. 3, corrige les impressions de Mabillon et Migne en les comparant avec la tradition manuscrite.
49Imprimé pour la première fois dans Wilmart André, « Lettres… », art. cité, p. 271-274 ; réédité et accompagné d’une traduction française dans Lettres des premiers chartreux. S. Bruno-Guigues-S. Anthelme, 2e édition revue et corrigée, Paris, Éditions du Cerf, coll. « Sources chrétiennes 88 », 1988, Appendice II, p. 244-255.
50En 1096 Raoul devient prévôt, en 1101 Bruno décède à Calabre, voir ibid., p. 28-30, l’édition et la traduction française de la lettre à Raoul p. 66-81.
51Un lien entre Saint-Arnoul et Reims peut être établi par l’intermédiaire de son abbé Walo. Celui-ci avait été nommé abbé de Saint-Remi par l’archevêque de Reims Manassès Ier en 1073, mais il démissionna de cette fonction après quelques semaines seulement, à la suite d’un violent conflit avec Manassès. Voir sur Walo : Die Briefe des Abtes Walo von St. Arnulf vor Metz, éd. Bernd Schütte, Hanovre, Hahn, coll. « MGH Studien und Texte 10 », 1995, p. 23-26 ; GPO Reims I: Erzbischöfe, no *295-296, [https://doi.org/10.58137/001-2023-295], consulté le 21 décembre 2023.
52Je remercie M. Eef Overgaauw et M. Kurt Heydeck du centre des manuscrits de la Staatsbibliothek de Berlin pour leurs renseignements sur les résultats codicologiques et paléographiques. La lettre de Richer à Raoul se trouve dans Berlin, StaBi PK, Ms. Phill. 1694 sur fol. 29 ro-vo. Voir sur le manuscrit Rose Valentin, Verzeichniss der Lateinischen Handschriften der Königlichen Bibliothek zu Berlin, t. I : Die Meermann-Handschriften des Sir Thomas Phillipps, Berlin, Asher, coll. « Die Handschriften-Verzeichnisse der Königlichen Bibliothek zu Berlin 12 », 1893, p. 397-180, no 180.
53RHF 15, p. 200 : « sed causa sit vehemens sola et impudens ambitio, frustra obtendens quod cogi debeas a domino papa, cui leviter ex ratione excusatum te poteris habere, ne te in ejus quem accusasti cathedram impellat, facile erit et accommodatum rationi compescere ».
54RHF 15, p. 199-200 : « Ille vero sibi sumit honorem, quem per gladios, per ignem et sanguinem, per pauperum oppressiones, per ecclesiarum scissuras, rapit ambitio. »
55RHF 15, p. 200 : « Quem autem nec populus expetit, nec clerus eligit, principes respuunt, regis abjuravit animadversio, eum sese quoquomodo in vocabulum episcopi praecipitare, quid aliud videtur nisi ambitiosus? » De même, ibid. : « tanquam fratres fratri opponimus, quia nec electioni consentimus, nec promotioni congaudemus ».
56Berlin, StaBi PK, Ms. lat. oct. 226 (Görres 52), la lettre au fol. 146 ro-148 vo. Sur le manuscrit, voir Schillmann Fritz, Verzeichnis der Lateinischen Handschriften der Preussischen Staatsbibliothek zu Berlin, t. III : Die Görreshandschriften, Berlin, Behrend, coll. « Die Handschriften-Verzeichnisse der Königlichen Bibliothek zu Berlin 14 », 1919, p. 56-58, Görres 52 ; Fingernagel Andreas, Die illuminierten lateinischen Handschriften deutscher Provenienz der Staatsbibliothek Preussischer Kulturbesitz Berlin, 8.-12. Jahrhundert, 2 vol., Wiesbaden, O. Harrassowitz, coll. « Staatsbibliothek Preussischer Kulturbesitz. Kataloge der Handschriftenabteilung. Dritte Reihe: Illuminierte Handschriften 1 », 1991, t. I, p. 18, no 15, avec illustration d’une initiale et d’un extrait de texte de la main principale dans t. II, p. 32, fig. 36.
57Lettres des premiers chartreux, op. cit., p. 246-247 : « Quodsi qua sunt jura, si leges, si decreta, quae obstent, quae sanciant, quae denegent damnatos quosque sepeliri, alicui tamen angustus debet esse aditus per quem ingrediatur humanitas, et viventis pietatem in abjecti corporis sepultura spiritus experiatur. »
58Voir sur l’imposition de l’anathème, GPO Reims I: Erzbischöfe, no 388, [https://doi.org/10.58137/001-2023-388], consulté le 21 décembre 2023 ; Sdralek Max, Wolfenbüttler Fragmente…, op. cit., p. 114, no 4.
59Dès la fin du xie siècle, on observe des tendances à attribuer l’anathème non seulement à des personnes individuelles, mais aussi à des régions entières, voir par exemple les canons du concile provincial de Soissons 1093-1094, ibid., no 21, c. 5, p. 141 ; voir Keygnaert Frederik, « The Meaning of Ecclesiastical Exclusion in the Archdiocese of Reims, c. 1100 », in Joseph Ward Goering, Stephan Dusil et Andreas Thier (dir.), Proceedings of the Fourteenth International Congress of Medieval Canon Law, cité du Vatican, Biblioteca apostolica vaticana, coll. « Monumenta iuris canonici. Series C 15 », 2016, p. 767-778. Au moins jusqu’à la fin du xie siècle, les termes excommunication et anathème étaient synonymes, voir ibid., p. 772.
60Lettres des premiers chartreux, op. cit., p. 248. L’auteur a modifié le passage de la lettre de Bruno (ibid., p. 74, § 12 : « cui teipsum munus gratum et omnino acceptabile devovisti ») afin de mettre en évidence le vœu de devenir moine : « cui te monachum devovisti ».
61Le Saint-Esprit jouait un rôle central dans l’élection des évêques, c’est donc une constatation tout à fait grave, voir Ripart Laurent, « Grégoriens… », art. cité, p. 231-232. La phrase « Cum ergo constet, ut praelibaturn est, a Sancto Spiritu te deseri, necessario subinfertur in eo quod usurpasti officio te per eum nec posse nec debere quidquam operari, et idcirco ut patrem non volumus, non debemus aut cognoscere aut revereri » (Lettres des premiers chartreux, op. cit., p. 250-251) suggère que cette lettre – contrairement à celle de Richer – a été rédigée après la consécration de Raoul ; peut-être dans une phase du schisme où il pouvait déjà assumer des fonctions épiscopales, voir plus loin.
62Celles-ci étaient en outre souvent liées à l’accusation de simonie, que l’on ne reprochait apparemment pas ici à Raoul. Kohl Thomas, « Frankreich, das Reich und die Investitur », in Tristan Martine et Jérémy Winandy (dir.), La Réforme grégorienne, une « révolution totale » ?, Paris, Classiques Garnier, coll. « Civilisation médiévale 42 », 2021, p. 29-42, montre que ce n’est qu’à partir de 1111 environ que l’investiture des laïcs a été considérée comme un problème central, mais qu’elle a ensuite souvent été projetée sur des conflits plus anciens.
63Cependant, il y a bien eu une relation personnelle entre Manassès et Lambert, voir Le registre de Lambert, op. cit., p. 342-343, E. 10.
64Voir à ce sujet Ott John Stephens, « Clerical Networks and Canon Law: The Beauvais Election Controversy of 1100-04 », in Christof Rolker (dir.), New Discourses in Medieval Canon Law Research. Challenging the Master Narrative, Leyde/Boston, Brill, coll. « Medieval Law and Its Practice 28 », 2019, p. 58-81, ici p. 68-71.
65Meinert Hermann, « Libelli de discordia inter monachos S. Remigii et S. Nicasii Remenses agitata tempore Paschalis II. papae », in Leo Santifaller (dir.), Festschrift Albert Brackmann: dargebracht von Freunden, Kollegen und Schülern, Weimar, Böhlau, 1931, p. 259-292, I, chap. xx, p. 277 ; voir Kouamé Thierry, De l’office à la dignité. L’écolâtre cathédral en France septentrionale du ixe au xiiie siècle, Leyde/Boston, Brill, coll. « Education and society in the Middle Ages and Renaissance 57 », 2021, [https://doi.org/10.1163/9789004449060], consulté le 21 décembre 2023, p. 120-121.
66Voir Bournazel Éric, Louis VI le gros, Paris, Fayard, 2007, p. 89-91 ; Demouy Patrick, Genèse…, op. cit., p. 568-570 ; Becker Alfons, Studien…, op. cit., p. 124.
67GPO Reims I: Erzbischöfe, no 389, [https://doi.org/10.58137/001-2023-389], consulté le 21 décembre 2023. Voir Rolker Christof et Schawe Marcel, « Das Gutachten Ivos von Chartres zur Krönung König Ludwigs VI. Quellenstudium und Edition von Epistola 189 », Francia, no 34, 2007, p. 147-157 avec une édition de la lettre ; Lettres d’Yves de Chartres, op. cit., ep. 189, [http://telma-chartes.irht.cnrs.fr/yves-de-chartres/notice-acte/21127], consulté le 21 décembre 2023. Voir Große Rolf, « Suger. An Abbot’s Fame », in M. Cecilia Gaposchkin et Jay Rubenstein (dir.), Political Ritual and Practice in Capetian France. Studies in Honour of Elizabeth A. R. Brown, Turnhout, Brepols, coll. « Cultural Encounters in Late Antiquity and the Middle Ages 34 », 2021, p. 23-54, ici p. 35-39, à propos d’un diplôme falsifié à Saint-Denis au nom de Charlemagne (MGH D K. d. Gr. † 286), selon lequel Saint-Denis est notamment désigné comme lieu de couronnement. Le fait que ce diplôme prétende avoir été délivré in generali concilio pourrait être une réaction à la lettre d’Yves.
68Lettres d’Yves de Chartres, op. cit., ep. 188, [http://telma-chartes.irht.cnrs.fr/yves-de-chartres/notice-acte/21126], consulté le 21 décembre 2023.
69Suger, Vie de Louis VI le gros, éd. Henri Waquet, Paris, Les Belles Lettres, coll. « Les classiques de l’histoire de France au Moyen Âge 11 », 1929, chap. xiv, p. 86. Même si, selon Suger de Saint-Denis, Raoul se serait attiré les inimitiés les plus graves et les plus dangereuses du roi, puisqu’il aurait été élu et intronisé sans son consentement, il le qualifie de « venerabilis et emeritus vir », voir ibid., p. 86-88.
70GPO Reims I: Erzbischöfe, no 390, [https://doi.org/10.58137/001-2023-390], consulté le 21 décembre 2023 ; Le registre de Lambert, op. cit., E. 95, p. 460-461, voir Louis VI le Gros. Annales…, op. cit., no 60, p. 32.
71Voir Bournazel Éric, Louis VI le gros, op. cit., p. 93-94. Sur le serment per manum et sacramentum et sa justification par Yves, voir Lettres d’Yves de Chartres, op. cit., ep. 190, [http://telma-chartes.irht.cnrs.fr/yves-de-chartres/notice-acte/21128], consulté le 21 décembre 2023 ; GPO Reims I: Erzbischöfe, no 391, [https://doi.org/10.58137/001-2023-391], consulté le 21 décembre 2023.
72Recueil des actes de Louis VI roi de France (1108-1137), éd. Robert-Henri Bautier et Jean Dufour, 4 vol., Paris, Diffusion de Boccard, coll. « Chartes et diplômes relatifs à l’histoire de France », 1992-1993, nos 52 et 53.
73C’est ce que laisse supposer la signature d’Hubert sur le premier diplôme de Louis en tant que roi qui nous soit parvenu, ibid., no 19 (Bourges, 1108 peu après le 3 août) ; voir Louis VI le Gros. Annales…, op. cit., no 57, p. 30-31 ; Bournazel Éric, Louis VI le gros, op. cit., p. 91.
74Recueil des actes de Louis VI…, op. cit., no 64 (Paris, avril 1112) et la fondation de l’abbaye Saint-Victor, ibid., no 80 (Châlons-en-Champagne, 1113).
75Comme l’a fait Führer Julian, König Ludwig VI. von Frankreich und die Kanonikerreform, Francfort-sur-le-Main/Berlin/Berne/Vienne, Lang, coll. « Europäische Hochschulschriften Reihe 3, 1049 », 2008, p. 273 pour Renaud II.
76Actes des archevêques de Reims, op. cit., nos 152, 153, 156, 159, 162 et 163, avec la seule exception regnante venerabili rege Francorum HLUDOVICO en no 160.
77Ibid., nos 164 et 167, sans adjectif nos 166, 169 et 170.
78Ibid., nos 172, 173, 174 et 176.
79Ibid., nos 180, 181, 183, 185, 187 et 188 (sans adjectif) ; 178 et 182 (venerabilis) ; 184 (glorioissimus) ; 186 (piissimus).
80Voir aussi à ce sujet la liste de Demouy Patrick, Genèse…, op. cit., p. 651-653.
81Actes des archevêques de Reims, op. cit., no 150 pour Saint-Remi ; no 151 pour Saint-Nicaise.
82Voir pour la suite les listes des dignitaires dans Demouy Patrick, Genèse…, op. cit., p. 660-668.
83Reims, BM, ms. 15, fo 4 ro ; Archives législatives de la ville de Reims. Collection de pièces inédites pouvant servir à l’histoire de la cité, éd. Pierre-Joseph Varin, 4 vol., Paris, Imprimerie nationale, coll. « Collection de documents inédits sur l’histoire de France. Première série, Histoire politique », 1840-1852, t. I, partie II, p. 80 aux 14es calendes de juin : « Richerus huius ecclesie cantor et canonicus, et postea S. Remigii monachus. » Dans le nécrologe de Saint-Remi lui-même, on trouve l’inscription d’un Richerus aux 13es calendes de juin ; Reims, BM, ms. 346, fol. 156 vo.
84Actes des archevêques de Reims, op. cit., no 156. Falkenstein Ludwig, « Nikolaus II… », art. cité, a montré que la lettre de Gervais à Pascal II (RHF 15, p. 42-43, no 63) est un fantôme apparu lors de la constitution des collections de sources des xviie et xviiie siècles.
85Marlot Guillaume, Metropolis Remensis historia, 2 vol., Insulis, ex officina Nicolai de Rache, 1666-1679, t. II, p. 258.
86Voir Demouy Patrick, Genèse…, op. cit., p. 660 ; en tant que deuxième archidiacre à cette date, Foulques était encore en fonction. Nicolas est aussi mentionné dans Actes des archevêques de Reims, op. cit., no 163, également attesté en 1115.
87Hugues, comte de Rethel, est attesté en dernier lieu par une charte délivrée par lui en 1117, voir Trésor des chartes du comté de Rethel, éd. Gustave Saige et Henri Lacaille, 5 vol., Monaco, Imprimerie de Monaco, coll. « Collection de documents historiques publiés par ordre de S.A.S. le prince Albert Ier, prince souverain de Monaco », 1902-1916, t. I, p. 6, no 3. Dans le nécrologe de Saint-Remi, on trouve l’inscription de son décès aux ve calendes de janvier, voir Reims, BM, ms. 346, fol. 186 ro. D’après les constatations précédentes, Gervais a donc quitté le chapitre avant la mort de son père, peut-être à l’occasion du décès de son frère.
88Willelmi Tyrensis Archiepiscopi Chronicon/Guillaume de Tyr. Chronique, éd. Robert B. C. Huygens, 2 vol., Turnhout, Brepols, coll. « Corpus Christianorum continuatio mediaevalis 63-63A », 1986, livre XII, chap. i : « Nomen alterius fratrum Gervasius, qui postea fuit electus ad ecclesiam Remensem ; alterius Manasses. » S’appuyant probablement sur Guillaume de Tyr, Albéric de Trois-Fontaines rapporte lui aussi que Gervais, ayant quitté l’état ecclésiastique, a pris possession de son héritage en tant que comte de Rethel, a pris femme et a eu une fille. En congruence avec ses entrées citées ci-dessus, il a au moins ajouté l’information : « ab archiepiscopatu cassatus Remensi », voir Albricus Monachus Trium Fontium, Chronica, op. cit., a. 1117, p. 822.
89Willelmi Tyrensis Archiepiscopi Chronicon, op. cit., livre XII, chap. i : « Gervasius frater eorum, dimisso Remensi archiepiscopatu, uxorem contra instituta ecclesiastica ducens, eumdem comitatum jure possedit haereditario. »
90Il est possible que sa parenté avec Baudoin, devenu entre-temps comte d’Édesse, l’ait rendu intéressant pour Philippe.
91Voir Ripart Laurent, « Grégoriens… », art. cité ; Thier Andreas, Hierarchie…, op. cit.
92Voir Meinert Hermann, « Libelli de discordia… », art. cité.
Auteur
-
Sebastian Gensicke
Université de Leipzig.
Sebastian Gensicke a étudié l’histoire médiévale et moderne à l’université de Leipzig et prépare une thèse sur les actes épiscopaux dans la province ecclésiastique de Reims à l’université de Bochum. De 2021 à 2022, il a été collaborateur scientifique de la Gallia Pontificia à l’Institut historique allemand de Paris. Depuis 2023, il fait partie du projet « Die Formierung Europas durch Überwindung der Spaltung im 12. Jahrhundert » à Aix-la-Chapelle.

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