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    Plan détaillé Texte intégral Le concile ou la communauté ecclésiale en démonstration Dramatique conciliaire et règlements de comptes collectifs Une géographie conciliaire Notes de bas de page Auteur

    Communautés déchirées ?

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    Table des matières

    Église ordonnée ou Église déchirée ?

    Une cartographie de l’action conciliaire au concile de Reims (1049)

    Laurent Jégou

    p. 27-44

    Texte intégral Le concile ou la communauté ecclésiale en démonstration Dramatique conciliaire et règlements de comptes collectifs Une géographie conciliaire Notes de bas de page Auteur

    Texte intégral

    1Le concile qui se tint à Reims du 3 au 5 octobre 1049 passe pour être le premier concile réformateur de l’ère grégorienne. Il ne s’agit pourtant ni du premier concile réformateur, ni même du premier du genre à avoir été présidé par Léon IX : en avril 1049, à Rome, en présence d’une douzaine d’évêques, le pape avait déposé plusieurs évêques simoniaques, rompu des unions consanguines, interdit le commerce des autels et s’en était pris aux prêtres concubinaires1. Malgré ce précédent, le synode de Reims occupe une place privilégiée dans l’historiographie de la Réforme grégorienne, pour trois raisons majeures. Le pape s’aventurait pour la première fois depuis bien longtemps au-delà des Alpes pour porter son message réformateur ; par ailleurs, les jugements prononcés le furent sans concession pour les évêques et abbés incriminés. Enfin et surtout, l’assemblée réunie à Reims a fait l’objet d’un récit d’une rare précision : les chapitres xxvi à xxxiii de l’Histoire de la dédicace de saint Remi2. Le texte est exceptionnel à plus d’un titre, mais il est particulièrement fécond en raison du tableau vivant qu’il fait de l’assemblée, où s’observe toute la dramatique conciliaire qui pouvait se déployer à l’occasion de ces synodes. Il donne à voir l’Église – dont il est un miroir ou une métonymie – en action, régie par la liturgie, la norme canonique et la hiérarchie, marquée par des tensions où se mêlent intérêts individuels et collectifs, actions personnelles et mobilisation des réseaux.

    2Cette Dedicatio ecclesiae beati Remigii est l’œuvre d’Anselme, moine de Saint-Remi de Reims, à qui l’abbé Hérimar (1046-1071) et l’archevêque Gervais de Château-du-Loir (1055-1067) confièrent la mission de dépeindre le déroulement des festivités qui avaient jalonné la cérémonie de dédicace de l’église abbatiale dédiée au saint patron de la cité. Outre qu’il avait été témoin des événements, Anselme était un bon grammairien, de surcroît dévoué au saint. Le moine a composé son récit quelques années après, vraisemblablement dans les années 1056-1058, pour la rédaction duquel il pouvait s’appuyer sur sa propre mémoire et celle d’autres témoins, notamment son abbé Hérimar3. Comme son titre l’indique, il ne s’agit pas d’un procès-verbal du concile. L’objet de l’œuvre est la translation des reliques du saint et la consécration de l’église Saint-Remi par le pape Léon IX, venu à Reims pour l’occasion. Elle ne semble pas avoir été destinée à une large diffusion (seuls quatre manuscrits ont été conservés), mais avait pour objectif de grossir le dossier hagiographique de Remi. Pour cette raison, le personnage principal n’est pas Léon IX, qui est placé en retrait, mais le saint, qui préside le concile et, à une moindre mesure, Hérimar, commanditaire du texte. Le pape choisit d’associer aux cérémonies un concile réformateur, qui se tint du 3 au 5 octobre. Le concile n’était nullement un événement improvisé : depuis Toul, le pape avait convoqué archevêques, évêques, de même que le roi Henri I4. Le récit détaillé de l’assemblée trouve sa place dans le dossier dans la mesure où elle fut réunie sous le patronage de saint Remi, dont les reliques furent placées sur l’autel principal5.

    3Notre objectif n’est pas de refaire l’histoire du concile, ni de reprendre l’économie générale du récit, mais de reconsidérer la description détaillée qu’en fit Anselme pour analyser la communauté ecclésiale telle qu’elle se mit en scène à l’occasion de cette réunion synodale. Dans la perspective d’une réflexion sur les communautés déchirées, notre propos se concentrera sur ce qui fait l’une des spécificités du concile de Reims : la contradiction qui se fait jour entre, d’une part, le discours sur l’institution conciliaire, censée incarner l’Église unie, unanime et rassemblée, image de la perfection de l’ordre céleste et, d’autre part, le déroulement du concile de 1049, qui s’est traduit par une perturbation des cadres conciliaires traditionnels, propres à bouleverser l’ordre ecclésial. En raison de son caractère exceptionnel, le document donne l’opportunité d’appréhender la configuration dans laquelle s’est tenue l’assemblée, ce qu’on peut appeler la « cartographie » de l’action conciliaire, dans la mesure où la position des individus dans l’espace, ainsi que le placement des uns par rapport aux autres se sont révélés déterminants dans son déroulement et dans l’issue des débats. Dans un cadre contraint, régi par le protocole et la liturgie, les acteurs ont exploité l’espace comme une ressource, un moyen stratégique pour s’imposer dans le jeu de pouvoir que représentait le concile.

    Le concile ou la communauté ecclésiale en démonstration

    4Le concile est le rassemblement du corps ecclésial. Il est l’image harmonieuse de l’Église en action, conforme à la vision évangélique du concile de Jérusalem, considéré comme un protoconcile6. Les discours cléricaux sur le concile diffusent cette idée, reprenant notamment la fameuse expression d’Isidore de Séville, pour qui concilium a pour étymologie cilium (cils), car les participants agissent et délibèrent d’un seul mouvement, comme les cils de l’œil7. Ainsi, l’institution conciliaire incarne la cohésion, celle du groupe clérical qui parle d’une seule voix et agit uniment. L’action solidaire de cette communauté conciliaire est mise en scène dans un cadre protocolaire, dont témoignent les ordines de celebrando concilio, lesquels décrivent avec une grande précision ce qu’il faut dire, faire, chanter, par qui, à quel moment, à quel endroit… Bien qu’il soit très difficile de savoir si ces ordines ont été appliqués, avec quelle régularité et quelle précision, ni lesquels furent adoptés, ces textes fournissent un modèle de célébration, qui fait la part belle à l’unanimité et à l’action solidaire. Ainsi, à Reims, l’entrée des prélats dans l’église telle qu’elle est décrite au chapitre xxvi était une application de l’ordo wisigothique, le plus célèbre8. D’autres éléments, tels que les antiennes comme l’Exaudi nos domine ou le Veni creator, plus rare, furent empruntés aux ordines romani9. Quoi qu’il en soit, ces ordines de celebrando concilio avaient pour objectif de fixer un cadre précis de déroulement, et constituaient un gage de respect de la discipline liturgique, validée par la tradition. L’ordonnancement dans l’espace, comme le rythme donné (avec l’alternance de chants, de discours, de moments silencieux, de prises de parole, etc.) jouaient un rôle dans l’autorité des décisions prises car ils émanaient d’une communauté ordonnée, fédérée par le rituel10. Les gestes étaient également orchestrés pour démontrer l’action commune tout au long de l’assemblée : les participants se prosternaient à terre, se levaient, s’asseyaient, priaient de concert ; une fois le concile terminé, les canons étaient relus publiquement en présence de tous et tous répondaient en chœur Amen.

    5Parmi les pratiques définies par les ordines dès le viie siècle figure la disposition que doivent adopter les participants. Les pères du concile de Reims se conformèrent ainsi à l’Ordo 1 wisigothique, puisqu’Anselme relate que le pape prescrivit que « les sièges des évêques seront disposés en forme de couronne11 ». Bien que cette forme prise par les participants fût courante durant tout le haut Moyen Âge, Alexander Denomy, la prenant pour un fait exceptionnel, y a vu l’archétype de la table ronde, quand d’autres l’interprètent comme la transposition ecclésiastique d’une arène où s’affrontent les combattants12. Il s’agit en définitive d’une pratique qu’on observe dans les textes liturgiques dès le viie siècle, mais aussi dans les comptes rendus de conciles ou les représentations figurées à partir du ixe siècle, comme dans le célèbre folio 90 du psautier d’Utrecht, qui illustre une assemblée ecclésiastique carolingienne du milieu du ixe siècle13. Plus près de l’assemblée de Reims, on a conservé un schéma d’ordonnancement assez proche de celui que propose Anselme au premier folio d’un manuscrit du Décret de Burchard de Worms, où la liste des sièges des suffragants de l’archevêque de Milan est placée dans un cercle symbolisant l’assemblée14. Cet ordonnancement s’inscrit dans une mise en ordre de l’Église, ainsi qu’en témoigne une source d’un autre genre, les Gestes des évêques de Cambrai, contemporaine de la Dédicace. La couronne est cette fois formée des reliques ordonnées par l’évêque Gérard de Cambrai, à l’occasion de la dédicace de l’église Saint-Géry, « chacun selon son ordre » : les saints évêques d’abord, puis les abbés, les martyrs et enfin les confesseurs et les vierges15.

    6Car ce qui fait du concile un modèle d’ordre, c’est aussi la hiérarchie qui structure l’assemblée. Anselme distingue bien parmi les nombreux participants le pape, les archevêques, les évêques, les abbés, les prêtres et les diacres. Chacun se caractérise par son titre et son rang, qui s’observent également dans la prise de parole, qui est codifiée : on s’adresse d’abord aux archevêques, puis aux évêques et aux abbés16. Les clercs sont présents, mais restent debout, en principe silencieux. Cependant, dès l’ouverture du concile, ce bel ordonnancement ecclésial se fissure ; l’assemblée devient le lieu de tensions, se trouve soumise à des logiques factionnelles.

    Dramatique conciliaire et règlements de comptes collectifs

    7Le concile qui s’ouvre le 3 octobre 1049 s’inscrit, chez Anselme, dans le prolongement des journées précédentes, consacrées aux festivités en l’honneur de la translation des reliques de saint Remi et de la dédicace de la nouvelle abbatiale. Elles ont été marquées par une liesse populaire, une atmosphère qui rappelle beaucoup les récits de déroulement des assemblées de paix de Dieu qu’on lit chez Adémar de Chabannes, Raoul Glaber ou sous la plume anonyme de l’auteur des Miracles de saint Usmer. Ces auteurs partagent avec Anselme le souci de la dramatisation des translations de reliques, accordent une importance à la foule comme protagoniste de ces actions, inscrivent ces événements dans une atmosphère empreinte de sacré, propice aux miracles et à l’exaltation des saints et des clercs qui les servent. Ils associent également à ces célébrations liturgiques des synodes de paix, placés sous la protection et la menace du saint17. À Reims, ces jours d’allégresse se prolongent par le concile, que le pape choisit de tenir dans la basilique Saint-Remi fraîchement dédicacée, et qu’il place sous le patronage du saint, dont le reliquaire est installé sur l’autel majeur. Remi se révèle donc un acteur du concile, partie prenante dans les débats, ainsi qu’il l’avait été de son vivant, selon la vita composée par Hincmar de Reims qui le décrit faisant taire un arien par un miracle18. Outre le saint, figure tutélaire indiscutable, le pape est l’autre personnalité dominante, garante de l’unité de l’Église assemblée.

    8Toutefois, la description du concile marque une rupture indéniable dans le récit d’Anselme : l’assemblée est loin d’avoir été le moment d’exaltation ecclésiale qu’elle était censée représenter, qui prolongerait la ferveur des festivités qui l’ont précédée. Car comme à Rome en avril, le pape entendait faire du concile un instrument de réforme, où devaient être dénoncés les crimes commis par les évêques et les abbés, lesquels avaient vocation à être déposés si les infractions étaient confirmées publiquement. Toutefois, les tensions et les déchirures au sein du clergé étaient antérieures aux actes d’accusation ; elles se manifestèrent dès l’ouverture, et même en amont, ainsi qu’en témoigne la composition de l’assemblée. L’auteur prend grand soin de souligner le grand nombre de prélats présents, avec 20 évêques, 17 abbés et un grand nombre de clercs présents, venus de France, de Germanie et de Bourgogne19 ; son énumération masque mal d’importantes défections. Bien qu’il s’agît d’un concile général, à l’échelle de la chrétienté occidentale, il ne réunit qu’un métropolitain du royaume germanique, en la personne de l’archevêque de Trèves. Les archevêques de Mayence, de Cologne étaient absents, comme ceux de Hambourg ou Salzbourg, il est vrai plus éloignés géographiquement. Faisaient également défaut les chefs des provinces de Tours et de Rouen, sans compter les représentants des territoires méridionaux, qui participaient peu aux grandes assemblées du royaume. Mais le grand absent était surtout le roi de Francie Henri Ier, à qui avait pourtant été envoyée une invitation à se présenter à Reims. Avant le pontificat de Grégoire VII (1073-1085), les souverains avaient leur place dans les assemblées conciliaires, ne serait-ce que parce qu’ils étaient chargés de l’application des décisions canoniques. Or, Henri Ier était, en 1049, en guerre contre le comte d’Anjou Geoffroy Martel. Il entraîna avec lui plusieurs évêques et abbés, contraints par le service d’ost : les évêques de Sens, Beauvais, Amiens20. D’autres, comme l’évêque Gibuin de Laon, étaient sans doute trop heureux d’échapper à l’accusation publique de simonie et rejoignirent les armées royales21. Du point de vue de la mobilisation, le concile était un échec, dans la mesure où le pape ne parvint pas à faire l’unité autour de lui, ni à réunir des participants nombreux et représentatifs de l’Église d’Occident. Pour comparaison, le concile tenu à Reims en 1129 par Calixte II réunit 420 dignitaires ecclésiastiques22.

    9Un autre vecteur de division, qui allait avoir des conséquences sur la marche de l’assemblée et gripper la mécanique conciliaire, concerne l’ordre de préséance au sein de l’assemblée23. Sur ce point, le conflit éclata dès l’ouverture du concile :

    « Le jour suivant, c’est-à-dire le cinq des nones d’octobre, tous se rassemblent dans la mémorable basilique ; il y a des évêques au nombre de vingt, avec environ cinquante abbés (sic) et autres de l’ordre ecclésiastique, très nombreux. Alors la vieille querelle entre les clercs des archevêques de Reims et de Trèves se renouvelle aussitôt. Les uns assurent que Reims était primat en Gaule, et par conséquent à lui revient l’ordonnancement du synode. Les autres, au contraire, s’efforcent d’attribuer à l’archevêque de Trèves cette même dignité, et d’acquérir le premier siège, après le prélat de l’église romaine, dans la célébration du concile24. »

    10Ce conflit de préséance n’était pas récent ; il remontait à près de deux siècles. En effet, au milieu du ixe siècle, l’archevêque de Trèves Teutgaud s’était heurté à Hincmar de Reims sur ce sujet. Il s’appuyait, pour réclamer la primatie, sur la Notitia provinciarum transmise par les collections pseudo-isidoriennes, qui plaçait, dans l’énumération, la province de Trèves avant celle de Reims25. Les prétentions d’Eberhard de Trèves s’appuyaient sur un document beaucoup plus récent : le privilège, obtenu à Rome le 13 avril 1049, par lequel le pape confirma le primat de Trèves sur la province de Belgique26. C’était, pour l’ancien évêque de Toul Brunon, une occasion de récompenser son ancien métropolitain ; pour ce dernier, le synode de Reims offrait une occasion rêvée d’éprouver la dignité dont il venait d’être investi.

    11Avant d’observer en détail comment se régla ce conflit de préséance entre les archevêques de Reims et de Trèves, il convient d’aborder la teneur des débats, qui se tinrent dans un climat délétère au moment où furent examinées les situations canoniques des différents protagonistes. L’atmosphère du récit rompt nettement avec celle de la première partie, qui fait la part belle à l’harmonie, l’enthousiasme et l’unanimité dans la dévotion des clercs et des laïcs pour saint Remi. Au contraire, l’assemblée ecclésiastique s’apparente à un « grand déballage », alimenté par les rumeurs, la délation, la désignation de boucs émissaires, les menaces, la calomnie27…

    12La première journée fut occupée à traiter des conditions d’accession aux charges ecclésiastiques. Après que le pape eut averti les participants que quiconque avait été ordonné par simonie serait excommunié, le diacre Pierre, chancelier du pape (1036-1050), interrogea un à un les prélats pour qu’ils se disculpent, lesquels « se lèvent dans l’ordre28 ». Les archevêques s’y plièrent, puis les évêques et enfin les abbés. À ce moment-là, l’évêque de Langres Hugues de Bréteuil se leva et accusa publiquement l’abbé de Pothières, dont il était l’évêque diocésain, de se livrer à la débauche, de ne pas payer le cens dû à saint Pierre et, surtout, de continuer à célébrer la liturgie alors qu’il était sous le coup d’une peine d’excommunication. Mis en accusation, l’abbé se révéla incapable de se défendre et fut déposé sur-le-champ. C’était clairement une tentative de diversion de la part de l’évêque, et un moyen de se venger d’un abbé qui revendiquait l’exemption. À partir de ce moment, le concile semble s’être emballé : les accusations, les disculpations se succédèrent sans aucun respect du protocole en vigueur, ni de la procédure accusatoire classique, dans ce qu’on imagine davantage comme un lieu de vacarme plutôt qu’un cénacle feutré. L’ordre conciliaire s’en trouvait détraqué. Ainsi, au chapitre xxix voit-on les clercs de Tours, « par la voix de l’archevêque de Lyon » introduire devant le concile l’affaire de Bretagne qui, depuis le milieu du ixe siècle et la création d’une province ecclésiastique à Dol, minait l’autorité de l’archevêque de Tours29. Ce sont également des clercs qui se dressèrent pour dénoncer le comportement simoniaque de l’évêque de Langres, l’accusant de surcroît d’homicide, de tyrannie, de pratiques sodomites30. Hugues de Bréteuil recourut, pour se défendre, à des juges élus (judices electi), chargés de recevoir sa confession et de négocier un compromis, mais il choisit finalement de quitter le concile, brisant le protocole qui interdisait à quiconque de quitter le concile avant la clôture des débats31. Les rumeurs n’épargnèrent pas l’évêque local, qui fut mis en difficulté dès l’ouverture des débats. Guy de Chatillon sollicita un délai jusqu’au lendemain et réclama de parler au pape en privé. Le lendemain matin, quelques-uns des participants se retirèrent dans l’oratoire de la Sainte-Trinité pour l’entendre en un privatum colloquium. Revenus en synode, le chancelier pontifical rappela les rumeurs de simonie, ce qui donna lieu à un nouvel effet de séance : l’archevêque de Reims réclama de prendre conseil auprès de plusieurs de ses collègues, l’archevêque Hugues de Besançon, les évêques de Soissons, d’Angers, de Nevers, de Senlis et de Thérouanne, entretien à l’issue duquel l’évêque de Senlis prit la parole publiquement pour affirmer que son métropolitain était exempt du crime de simonie. Là encore, l’archevêque Guy réclama un nouveau délai, refusant de prêter le serment qu’on lui imposait. L’auteur, s’il reconnaît que l’archevêque quitta l’assemblée dégagé de toute condamnation, semble prendre un certain plaisir à décrire les hésitations et faux-fuyants empruntés par l’homme d’Église, qui ne manquèrent pas de jeter la suspicion sur les conditions de son élection quand, dans le même temps, l’abbé Hérimar, compétiteur de Guy dans la cité de saint Remi, se purgeait sans ambiguïté de toute accusation.

    13Le climat conciliaire délétère engendré par ces accusations et purgations créa une indéniable perturbation de l’ordre conciliaire. Cette perturbation peut-elle expliquer que certains participants, normalement astreints au silence, trouvèrent l’audace de prendre la parole pour accuser leur évêque, inversant la discipline en vigueur dans les assemblées synodales ? Ce fut le cas des clercs de Langres, qui se mirent en contradiction avec les canons qui interdisaient à un clerc d’accuser un évêque32. Toutefois, comme dans les assemblées de paix, la présence du saint, le contexte liturgique et pénitentiel ont pu pousser les clercs à dénoncer publiquement les coupables de crimes réprouvés par les canons. On peut aussi lire dans cette prise de parole impromptue un alignement des positions du bas clergé sur les orientations du concile, qui aboutirent à une unanimité pour condamner les prélats indignes. Mais l’intervention des clercs n’était peut-être pas si éloignée des canons que cela, si l’on prend en considération le contexte, qui est celui de la dénonciation de la simonie. En effet, le Décret de Burchard de Worms, compilé au début du xie siècle, mentionne que l’errance dans la foi – dont fait clairement partie la simonie, considérée comme une hérésie depuis le concile de Tours (567) et le pontificat de Grégoire le Grand (590-604) – autorise les prêtres à dénoncer leur évêque33. Ce rôle déterminant attribué aux clercs peut aussi être interprété comme un effet rhétorique sorti de la plume d’Anselme, qui minimise dans le même temps l’autorité des évêques (désignés par leur siège, quand les abbés le sont par leur nom) et évoque à de nombreuses reprises les clercs comme une personnification de leur église. Ainsi, lorsqu’il évoque la querelle de préséance qui opposa les sièges de Reims et de Trèves, l’auteur ne présente pas un différend opposant les archevêques, mais une question intéressant leurs clercs34. Cette passe d’armes a donné lieu à une compétition au cours de laquelle l’espace conciliaire et son occupation ont été exploités par les parties.

    Une géographie conciliaire

    14L’expression « géographie conciliaire » adoptée ici ne concerne pas la représentativité des différents sièges, provinces, royaumes dans les assemblées ecclésiastiques, qui ont pu influer sur les rapports de force en leur sein. Ce qu’on a appelé ici la géographie conciliaire a un tout autre sens ; elle concerne le positionnement des individus, dans l’espace et les uns par rapport aux autres, et interroge la « dimension spatiale du social35 ». Même lorsqu’il n’est accompagné d’aucun discours, un rassemblement induit une performativité, qui peut être accompagnée de gestes, d’interactions, de signes d’appartenance permettant d’exprimer la ferveur, l’indignation, la solidarité, la distance… Ce qui vaut pour les funérailles ou les assemblées politiques vaut aussi pour les conciles, avec le même constat : l’occupation de l’espace est un instrument pour s’imposer dans les débats36. Le mécanisme de se placer ensemble dicte les comportements schismatiques ; la manière dont les groupes sont formés peut prédire la manière dont ils agissent, car elle renforce les clivages et les lignes d’appartenance37. La proximité des individus est également déterminante pour comprendre le processus d’alignement : un individu isolé dans un groupe cohérent choisira de s’aligner sur la position de ses voisins38.

    15Cette importance de l’ordonnancement dans l’espace était d’autant plus marquée dans les conciles médiévaux que c’était un lieu où se tissaient les liens de pouvoir. Dès lors, la position des individus les uns par rapport aux autres pouvait déterminer leur capacité à agir, à interagir. Nonobstant, il est généralement impossible de reconstituer cette organisation spatiale conciliaire, en l’absence de sources suffisamment détaillées. L’Histoire de la dédicace de saint Remi offre, de ce point de vue, un témoignage exceptionnel puisque l’auteur fournit, au chapitre xxvi, la position des protagonistes dans l’espace conciliaire, qu’il retranscrit à l’aide d’un aide-mémoire : « Le seigneur pape est en effet, comme on l’a dit, du côté du chœur, le visage face au sépulcre de saint Remi. Il a sous les yeux, du côté oriental, Reims à droite, et Trèves assis du côté gauche. Après Reims, selon l’ordre que nous avons noté, sont assis Bérold de Soissons, Drogon de Thérouanne, Roland de Senlis39. » Cette description a fait l’objet de plusieurs reconstitutions : celle de l’éditeur, Jacques Hourlier, me semble fautive, en raison d’une tendance à tordre le récit pour aboutir à un respect de l’organisation par province40. Le schéma proposé par Pierre-Paul Brucker, repris par Henri Leclercq et Karl-Joseph Hefele au tome iv de l’Histoire des conciles, se révèle plus fidèle au récit d’Anselme41 ; c’est celui que j’ai utilisé et ajusté pour construire ma propre interprétation graphique. Le schéma et l’ordonnancement que propose le moine obligent à nous interroger sur les logiques qui ont pu guider l’adoption de cette géographie conciliaire : liturgique, hiérarchique, institutionnelle, affinitaire, stratégique ?

    Figure 1. – Reconstitution de la disposition des participants au concile de Reims (1049) d’après Anselme.

    16Les ordines de celebrando concilio déterminent l’ordre d’entrée dans l’église, puis la forme que doit prendre l’assemblée, qui est concentrique et guidée par le rang hiérarchique. L’ordo wisigothique, le plus diffusé, est aussi le plus précis sur ce point : les évêques sont assis en cercle, ont dans leur dos les prêtres et, debout, les diacres qui les accompagnent, ce qu’on observe à Reims, où s’ajoute un rang intermédiaire, occupé par les abbés42. En revanche, l’ordo ne donne aucun renseignement sur la place occupée par les métropolitains et le positionnement des évêques les uns par rapport aux autres.

    17L’ancienneté dans l’ordination joue également un rôle dans certains conciles. La reconstitution de ce critère d’ancienneté ne permet pas davantage d’affirmer qu’il fut adopté pour définir le positionnement des pères conciliaires.

    Figure 2. – Ancienneté des évêques dans le rang épiscopal (ordre croissant).

    18On ne voit pas davantage un placement par province ecclésiastique, hormis pour les prélats de la province de Reims et de Rouen, qui se présentent comme un groupe resserré et formant un ensemble cohérent, au contraire des évêques et abbés des autres provinces ecclésiastiques, qui ne sont pas regroupés selon cette logique institutionnelle.

    Figure 3. – Ordonnancement des participants par province ecclésiastique.

    19Doit-on alors postuler que les participants adoptaient un placement aléatoire, par ordre d’arrivée, ou qu’ils choisissaient de se regrouper par affinité ? Ces propositions ne peuvent pas davantage être tenues, car elles entrent en contradiction avec ce qu’écrit l’auteur lorsqu’il présente l’organisation spatiale du concile. Anselme affirme en effet que le placement des participants fut un choix délibéré, défini par l’archevêque de Reims. Au début de la première séance, lorsque tous les participants pénétrèrent dans la basilique, s’éleva la querelle entre les archevêques de Reims et de Trèves, qui portait sur l’ordre de préséance. Le pape, refusant d’arbitrer, définit la forme à adopter (la couronne), de même que sa propre position (au centre, sur une estrade, face à l’autel et aux reliques de saint Remi) et laissa à l’archevêque Guy de Chatillon, en qualité d’hôte du concile, le soin d’ordonner l’assemblée. « Après quoi, tous prennent place, dans l’ordre que l’archevêque a décidé43. » C’est donc bien l’archevêque du lieu qui disposa les participants selon son bon vouloir, définissant un ordonnancement conforme à ses intérêts. Guy a en effet utilisé le placement comme une stratégie de communication, un instrument politique. Ses motivations étaient multiples, mais la première d’entre elles visait à mettre son rival, Eberhard de Trèves, en difficulté, lui qui avait revendiqué la primatie et réclamé la première place au concile. Guy s’évertua à respecter son rang, le plaçant à la droite de saint Remi, mais déploya les armes qui étaient en sa possession – en l’occurrence, son « plan de table » – pour prendre l’ascendant sur son rival. L’archevêque germanique se trouva ainsi entouré d’évêques et d’abbés anglais, éloigné de ses suffragants ; face à lui se dressait un bloc compact d’évêques et d’abbés, resserré autour de l’archevêque de Reims. Car Eberhard était une menace, même s’il se trouvait dans un royaume voisin, de surcroît en territoire rémois, et qu’il n’était paré que de deux de ses suffragants. Il pouvait revendiquer de solides soutiens, ainsi que le montre l’analyse prosopographique des protagonistes du concile : Eberhard était l’ancien métropolitain de Brunon de Toul ; il entretenait des relations privilégiées avec les archevêques de Besançon, de Lyon, auxquels s’ajoutaient les liens institutionnels avec ses suffragants de Metz et Verdun44. Guy redoutait peut-être que, fort de ces soutiens, l’archevêque de Trèves ne réclamât la confirmation du privilège de primatie accordé quelques mois plus tôt à Rome par Léon IX. L’archevêque de Reims était aussi conscient qu’il serait mis en difficulté lorsque le pape s’en prendrait aux évêques simoniaques. Il disposa ainsi les participants de telle sorte qu’il soit en position de force : face à son adversaire, isolé, il était entouré de soutiens, au premier rang desquels figurait l’évêque Bérold de Soissons, et s’entoura d’abbés de renom, comme Hugues de Cluny ou Sigefroid de Gorze. Par ailleurs, il n’est sans doute pas anodin que les prélats mis en accusation se soient trouvés éloignés de sa position, créant une bulle de sainteté autour de sa personne, distante des clercs indignes pointés du doigt par l’assemblée.

    20Si l’on en croit l’auteur, cette stratégie se révéla efficace. Lorsque Guy de Reims fut mis en difficulté et se trouva obligé de révéler si oui ou non il avait obtenu son siège par des procédés simoniaques, il obtint exceptionnellement un délai, puis un deuxième, puis une audience secrète avec six évêques, un entretien avec le pape et, enfin, l’ajournement de sa confession, reportée à une entrevue à Rome. Il faut dire que Guy n’était pas seulement favorisé par son statut d’hôte et par l’isolement de son rival. Il disposait aussi d’une capacité de nuisance et de perturbation non négligeable, puisqu’il était l’oncle du vicedominus Manassès de Reims, en charge de la police de la cité, mais aussi cousin du comte de Soissons Renaud ; il était en outre proche du roi Henri I45.

    21L’archevêque Guy de Chatillon disposait ainsi de multiples atouts, qui lui donnèrent l’opportunité de contrer les prétentions de son rival Eberhard à la primatie, d’échapper à la déposition ou du moins aux accusations qui déstabilisèrent les évêques et abbés soupçonnés. Cette géographie conciliaire que Guy a orchestrée pour mieux se protéger et isoler l’archevêque de Trèves permet de mieux appréhender les liens, les rapprochements entre les participants ; elle forme moins un réseau social qu’un échiquier, sur lequel l’archevêque de Reims a disposé les pièces, en respectant les règles du jeu conciliaire, mais en plaçant stratégiquement les pièces maîtresses pour mieux maîtriser le terrain.

    ⁂

    22L’Histoire de la dédicace de saint Remi apporte des éclairages originaux sur les communautés conciliaires ainsi que sur les tensions que connurent ces communautés au cours de la Réforme grégorienne. Faut-il faire le constat qu’à l’issue du concile, cette communauté conciliaire était déchirée ? Si l’on se place du point de vue du pape, il n’y eut nulle déchirure, même si l’auteur attribue au pape la crainte que ne s’élève le « scandale d’une querelle46 ». Son attitude révèle même tout l’inverse : c’est d’une mise en ordre qu’il s’agit, qui consista à exclure pour ordonner. Le concile plaça hors de la communauté ecclésiale les brebis galeuses afin de fortifier et assainir le troupeau ecclésial47. Dans ce contexte, Léon IX peut être assimilé au porteur du sceptre homérique, brandi par celui qui a l’autorité pour parler et orienter les décisions48. Il contrôla les délibérations avec force, accorda ou refusa aux évêques le droit de parler. Il fit du bâton pastoral un objet qui permettait d’intégrer ou sortir de la communauté conciliaire. C’est le cas avec l’évêque de Nevers qui, après avoir avoué son investiture simoniaque, abandonna sa crosse avant de la récupérer une fois restauré dans sa dignité.

    23Du point de vue des participants, en revanche, l’assemblée de 1049 a laissé des traces profondes. L’Église franque est loin d’avoir été décapitée, puisque seuls quatre évêques sur 20 et deux abbés sur 17 présents furent condamnés, mais elle connut et éprouva, c’est certain, un certain bouleversement. Le haut clergé franc sortit affaibli, mais davantage encore, dut être stupéfait de la conduite des événements. La simonie était en effet une pratique ancrée dans les mœurs sociales du haut clergé franc. Si elle était condamnée depuis des siècles, comme en témoigne le serment prêté à Grégoire le Grand par Maxime de Salone, dont la lecture fut imposée à l’archevêque Guy de Chatillon, pour la première fois, les coupables furent déposés. C’est surtout la manière dont se déroulèrent les débats qui laissa des traces. Sur les trois jours que dura le concile, deux jours et demi furent consacrés à l’examen des pratiques simoniaques, dans un climat délétère, marqué par des menaces, des rumeurs, la calomnie.

    24Nonobstant, le concile incarne l’unité de l’Église ; il constitue un miroir de l’ordonnancement de la société. Dans l’esprit des réformateurs, cet ordre passait par un assainissement de l’institution ecclésiastique, qu’il fallait laver de la macule du siècle. Les condamnations prononcées participèrent ainsi d’un retour à l’ordre, comme le fut la prononciation de 14 canons, qui clôtura les débats, rassemblés au chapitre xxxiv de l’Histoire de la dédicace de saint Remi49. Définir les comportements idoines, protéger la sacralité des églises, des sacrements, condamner l’hérésie ne pouvaient que susciter l’adhésion unanime des participants et restaurer l’harmonie au sein de l’assemblée. C’est ainsi, à mon sens, qu’il faut entendre la réitération des canons conciliaires, qui étaient parfois repris de conciles tenus au ve siècle : un instrument de restauration de la cohésion conciliaire et de retour à l’unité autour de principes reconnus et acceptés par tous.

    Notes de bas de page

    1Rome (9-15 avril 1049), Die Konzilien Deutschlands und Reichsitaliens, 1023-1059, éd. Detlev Jasper, Hanovre, Hahnsche Buchhandlung (MGH, Concilia, 8), 2010, p. 207-220.

    2Anselme de Saint-Remi, Historia dedicationis ecclesiae beati Remigii Remensis, éd. et trad. Jacques Hourlier, « Anselme de Saint-Remy. Histoire de la dédicace de Saint-Remy », in La Champagne bénédictine. Contribution à l’année Saint-Benoît (480-1980), Reims, Travaux de l’Académie nationale de Reims, 1981, p. 179-279 (désormais : Anselme). Les citations proposées ici sont adaptées de la traduction (vieillie) de Jacques Hourlier.

    3Isaïa Marie-Céline, Remi de Reims. Mémoire d’un saint, histoire d’une Église, Paris, Éditions du Cerf, coll. « Histoire religieuse de la France », 2010, p. 713. La mise en accusation de l’archevêque Guy lors du concile, évoquée plus loin, peut expliquer que l’auteur ait attendu sa mort, en 1055, pour livrer le récit.

    4Anselme, c. 14, p. 216-217.

    5Ibid., c. 25, p. 232-233.

    6Le récit transmis par les Actes des apôtres évoque l’objet de l’assemblée – les controverses portant sur l’usage des pratiques juives comme la circoncision – qui divisent la communauté et les apôtres. Toutefois, le texte évangélique ne transmet que les discours unilatéraux de Pierre, de Jacques puis la lettre des apôtres « d’accord avec l’Église tout entière » (Ac, 15, 22) pour envoyer des délégués à Antioche s’adresser aux nouveaux convertis. Sur le concile de Jérusalem, Taylor Justin, « The “Council” of Act 15 », in Alberto Melloni et Silvia Scatena (dir.), Synod and Synodality: Theology, History, Canon Law and Ecumenism in New Contact, Münster, LIT Verlag, coll. « Christianity and history », 2005, p. 107-114 ; Valliere Paul, Conciliarism. A History of Decision-Making in the Church, Cambridge, Cambridge University Press, 2012, p. 28-45.

    7Isidore de Séville, Etymologies, livre VI, 14, 12, éd. César Chaparro Gómez, Paris, Les Belles Lettres, coll. « Auteurs latins du Moyen Âge », 2012, p. 85-87. L’expression est reprise dans le prologue de la collection des fausses décrétales : Decretales pseudo-isidorianae et Capitula Angilramni, éd. Paul Hinschius, Leipzig, B. Tauchnitz, 1863, p. 17.

    8Ordo 1, Die Konzilordines des Früh- und Hochmittelalters, éd. Herbert Schneider, Hanovre, Hahnsche Buchhandlung, 1996 (MGH, Ordines de celebrando concilio, 1), p. 138-141. Sur cet ordo, Munier Charles, « L’ordo de celebrando concilio wisigothique. Ses remaniements jusqu’au xe siècle », Revue des sciences religieuses, no 37, 1963, p. 250-271.

    9Anselme, c. 21, p. 226-227.

    10Hermann Joseph Sieben, « Consensus, unanimitas und maior pars auf Konzilien, von der Alten Kirche bis zum Ersten Vatikanum », Theologie und Philosophie, no 67, 1992, p. 192-229. Sur le silence et la prise de parole autorisée comme garantie d’ordre : Ott John, « Speech and Silence. Ritual and Memory at the Council of Reims (1049) », in Tristan Sharp (dir.), From Learning to Love: Schools, Law, and Pastoral Care in the Middle Ages. Essays in Honour of Joseph W. Goering, Toronto, Pontifical Institute of Medieval Studies, 2017, p. 293-314.

    11Anselme, c. 26, p. 236-237.

    12Denomy Alexander J., « The Round Table and the Council of Rheims, 1049 », Mediaeval Studies, no 14, 1952, p. 143-148 ; Dufrenne Suzy, Les illustrations du psautier d’Utrecht. Sources et apport carolingien, Paris, Association des publications près l’université de Strasbourg, 1978, p. 150.

    13Utrecht, Bibliotheek der Rijksuniversiteit, MS 32, fo 90 von [https://bc.library.uu.nl/utrecht-psalter.html] (erreur en 2025), consulté le 14 décembre 2022.

    14Ordo de sedendi in concilio, Burchard de Worms, Decretorum libri XX, Monza, Biblioteca capitolare, H5, fo 1 vo. Sur le document, voir Fransen Gérard, « Papes, conciles généraux et œcuméniques », in Collectif, Istituzioni ecclesiastiche della Societas christiana dei secoli XI-XII Papato, cardinalato ed episcopato, Milan, Vita e pensiero, coll. « Miscellanea del Centro di studi medievali », 1974, p. 203-228, ici p. 207. Sur l’adoption de la forme circulaire dans les conciles de l’époque grégorienne, Laudage Johannes, « Ritual und Recht auf päpstlichen Reformkonzilien (1049-1123) » Annuarium Historiae Conciliorum, no 29, 1997, p. 287-334.

    15« Il appartient à la piété la plus insigne de saluer et de raconter aux pieux auditeurs de quelle manière le seigneur évêque [Gérard] avait ordonné les saints corps autour de l’autel. En effet, celui-ci avec l’abbé Richard, tous deux revêtus d’or, élevant avec le plus grand respect le très saint Géry – vu qu’il était le plus grand évêque et le maître particulier de la sainte dédicace – placèrent [ses reliques] sur le trône pontifical, comme il l’était auparavant, tandis que des louanges étaient chantées et qu’en vérité le clergé et le peuple pleuraient de joie alors qu’ils admiraient ces choses. À côté de lui [Géry] [qui était] au centre, ils établirent aussi d’un côté et de l’autre les saints évêques Aubert, Vindicien, Hadulphe qui avaient été confrères de cette même église, après avoir aussi intercalé le bâton de saint Vaast avec ses reliques. Ensuite, il mit ensemble tous les autres, c’est-à-dire les martyrs, confesseurs et vierges, autour, chacun selon son ordre », Gesta episcoporum Cameracensium, livre III, c. 49, éd. Ludwig Bethmann, Hanovre, Hahnsche Buchhandlung, 1846 (MGH, Scriptores, 7), p. 483-484.

    16On peut noter que les évêques sont désignés non par leur nom, mais par leur siège : « Nantes prend la parole », « Lyon et Besançon, se levant… », etc.

    17Sur la paix de Dieu et ses liturgies, Barthélemy Dominique, L’an mil et la paix de Dieu. La France chrétienne et féodale, 980-1060, Paris, Fayard, 1999 ; Head Thomas et Landes Richard (dir.), The Peace of God. Social Violence and Religious Response in France around the Year 1000, Ithaca, Cornell University Press, 1992. Sur le mouvement dans la province de Reims, Janssens Sam, « A Pattern of alternating Interests. The Peace of God in the Archdiocese of Reims in the first Half of the Eleventh Century », in Peter Coss, Chris Dennis, Melissa Julian-Jones et Angelo Silvestri (dir.), Episcopal Power and Personality in Medieval Europe, c. 900-c. 1480, Brepols, Turnhout, coll. « Medieval Church Studies », 2020, p. 203-222.

    18Hincmar de Reims, Vita Remigii episcopi Remensis, c. 21, éd. Bruno Krusch, Hanovre, 1896 (MGH, Scriptores rerum Merovingicarum, 3), p. 313-315.

    19Deux passages font état de la composition de l’assemblée, qui prêtent à des interprétations contradictoires quant au nombre d’abbés : « episcopi videlicet numero viginti, cum quinquaginta fere abbatis, et aliis ecclesiastici ordinis quam plurimis » (Anselme, c. 26, p. 234) ; « Post haec consederunt omnes [suit la liste des évêques et abbés] » ; « deinde ceteri qui, ut superius relatum est, simul fuerunt numero fere quinquaginta » (ibid., p. 238). Les noms et les sièges des évêques (20) et abbés (17) étant donnés avec précision, le chiffre de 50 abbés n’est pas envisageable ; le chiffre ne peut que concerner les diacres et prêtres qui accompagnent les prélats. Peut-être faut-il y voir un artifice rhétorique de la part de l’auteur, qui entendait masquer les défections de plusieurs hommes d’Église d’envergure, par cette expression volontairement obscure.

    20Halphen Louis, Le comté d’Anjou au xie siècle, Paris, Picard, 1906, p. 71-74.

    21Bur Michel, « Léon IX et la France », in Georges Bischoff et Benoît-Michel Tock (dir.), Léon IX et son temps, Brepols, Turnhout, coll. « ARTEM », 2006, p. 233-257, ici p. 244-247.

    22Gresser Georg, Die Synoden und Konzilien in der Zeit der Reformpapsttums in Deutschland und Italien von Leo IX. bis Kalixt II., 1049-1123, Paderborn, Ferdinand Schöningh, coll. « Konziliengeschichte. Reihe A. Darstellungen », 2006, p. 451-466.

    23Sur l’ordo sedendi, Delivré Fabrice, « Les évêques face au pape. Les conflits de préséance en concile général (xie-xve siècle) », in François Foronda, Christine Barralis et Bénédicte Sère (dir.), Violences souveraines au Moyen Âge. Travaux d’une école historique, Paris, Éditions du Seuil, coll. « Le nœud gordien », 2010, p. 175-183 ; Goetz Hans-Werner, « Der “rechte” Sitz. Die Symbolik von Rang und Herrschaft im Hohen Mittelalter im Spiegel der Sitzordnung », in Gertrud Blashitz, Helmut Hundsbichler, Gerhard Jaritz et Elisabeth Vavra (dir.), Symbole des Alltags – Alltag der Symbole. Festschrift für Harry Kühnel zum 65. Geburtstag, Graz, Akademische Druck- und Verlagsanstalt, 1992, p. 11-47.

    24« Die vero altera, quae est quinto nonas Octobris, congregati sunt in memorata basilica episcopi videlicet numero viginti cum quinquaginta fere abbatibus et aliis ecclesiastici ordinis quam plurimis. Ubi statim vetus querela inter Remensis ac Treverensis archiepiscopi clericos est renovata: his astruentibus, quia Remensis primas esset in Gallia, ideoque illi dispositio competeret synodica; e contra vero illi archiepiscopo Treverensis eandem dignitatem conabantur adscribere, primamque sedem post Romanae ecclesiae praesulem in celebrando concilio adquirere », Anselme, c. 26, p. 234-237.

    25Notitia provinciarum, éd. Theodor Mommsen, Berlin, Weidmann, 1892 (MGH, Auctores antiquissimi, 9), p. 584-612, ici p. 589-590. Sur le document et son utilisation à l’époque carolingienne, Mazel Florian, L’évêque et le territoire. L’invention médiévale de l’espace (ve-xiiie siècle), Paris, Éditions du Seuil, coll. « L’univers historique », 2016, p. 38-40.

    26Rome (1049), Die Konzilien Deutschlands und Reichsitaliens, 1023-1059, op. cit., p. 216-218. Sur ce privilège et son substrat pseudo-isidorien, Ewig Eugen, « Kaiserliche und apostolische Tradition im mittelalterlichen Trier », in Spätantikes und fränkisches Gallien. Gesammelte Schriften, t. II, Munich, Artemis Verlag, coll. « Beihefte der Francia », 1979, p. 51-90.

    27Sur ces comportements conciliaires, Rauwel Alain, « La rumeur dans le psychodrame grégorien : autour d’Hugues de Breteuil », in Myriam Soria et Maïté Billoré (dir.), La rumeur au Moyen Âge. Du mépris à la manipulation, ve-xve siècle, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2011, p. 223-230.

    28« ceteri omnes surrexerunt in ordine », Anselme, c. 27, p. 238.

    29« Tunc Turonenses clerici per Lugdunensem archiepiscopum querelam intulerunt super Dolensi episcopo Britanniae », Anselme, c. 29, p. 242. Sur cette affaire, Duine François, « Le schisme breton », Annales de Bretagne, no 30, 1915, p. 424-468 ; Chédeville André et Guillotel Henri, La Bretagne des saints et des rois, ve-xe siècle, Rennes, Ouest-France Éditions, 1984, p. 266-273 et Guillotel Henri, « Bretagne et papauté au xie siècle », in Rolf Grosse (dir.), L’Église de France et la papauté (xe-xiiie siècle)/Die französische Kirche und das Papsttum (10.-13. Jahrhundert), Bonn, Bouvier Verlag, coll. « Studien und Dokumente zur Gallia Pontificia », 1993, p. 265-286. L’affaire a pris un tour nouveau au xie siècle, avec la mobilisation de l’argument simoniaque pour justifier la déposition des évêques en 849 (Guillotel Henri, « Genèse de l’“Indiculus de episcoporum depositione” », in Catherine Laurent, Bernard Merdrignac et Daniel Pichot [dir.], Mondes de l’Ouest et villes du monde. Regards sur les sociétés médiévales. Mélanges en l’honneur d’André Chédeville, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 1998, p. 129-138).

    30Anselme, c. 30, p. 244-245. Sur ces accusations, Drioux Georges, « Un diocèse de France à la veille de la réforme grégorienne : le pape Léon IX et les évêques de Langres Hugues et Hardouin », Studi gregoriani per la storia di Gregorio VII e della riforma gregoriana, no 2, 1947, p. 31-41.

    31Ordo 1, c. 8, op. cit., p. 141.

    32Capitula Angilramni, c. 13 bis, éd. Karl-Georg Schon, Die Capitula Angilramni. Eine prozessrechtliche Falschung Pseudoisidors, Hanovre, Hahnsche Buchhandlung, 2006 (MGH, Studien und Text, 39), p. 161. Sur la parole autorisée, Ott John, « Speech and Silence… », art. cité, p. 299.

    33Burchard de Worms, Libri Decretorum, éd. Jacques-Paul Migne, Patrologia Latina, 140, col. 589-590. Je remercie Isabelle Rosé de m’avoir indiqué cette référence. Sur l’assimilation de la simonie à une hérésie, Rosé Isabelle, « Simon le Magicien hérésiarque ? L’invention de la simoniaca heresis par Grégoire le Grand », in Franck Mercier et Isabelle Rosé (dir.), Aux marges de l’hérésie. Inventions, formes et usages, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2018, p. 201-238.

    34« Ubi statim vetus querela inter Remensis et Treverensis archiepiscopi clericos est renovata », Anselme, c. 26, p. 234.

    35Lévy Jacques, « Géographie », in Jacques Lévy et Michel Lussault (dir.), Dictionnaire de la géographie et de l’espace des sociétés, Paris, Belin, 2003, p. 399.

    36Butler Judith, Notes Toward a Performative Theory of Assembly, Cambridge, Harvard University Press, 2015 ; Hallensleben Markus, « Introduction », in Markus Hallensleben (dir.), Performative Body Spaces: Corporeal Topographies in Literature, Theatre, Dance, and the Visual Arts, Amsterdam/New York, Brill, 2010, p. 9-27, qui rejoint la pensée de Walter Benjamin sur le corps comme instrument d’occupation de l’espace.

    37White Harrison C., Boorman Scott A. et Breiger Ronald L., « Social Structure from Multiple Networks. I. Blockmodels of Roles and Positions », American Journal of Sociology, no 81, 1976, p. 730-780.

    38Le concept d’alignement a été théorisé par le sociologue américain Ivan Ermakoff, à partir d’une étude sociohistorique de deux « abdications collectives », celles des parlements allemands et français qui votèrent les pleins pouvoirs à Adolf Hitler en 1933 et au maréchal Pétain en 1940. Parmi les multiples critères qui conduisent à un alignement collectif, c’est-à-dire l’alignement de la position d’un individu sur celle de ses voisins figurent la configuration spatiale et le positionnement des individus les uns par rapport aux autres : Ermakoff Ivan, Ruling Oneself Out. A Theory of Collective Abdication, Durham, Duke University Press, 2008, p. 313-314.

    39« domnus quidem papa in medio, ut dictum est, chori, verso vultu ad sepulchrum beati Remigii; ante oculos autem ejus, ad orientalem plagam, Remensis in dextera, Treverensis vero in parte recedit sinistra. Post Remensem deinde secundum subnotatum ordinem resederunt Beroldus Suessionensis, Drogo Morinensis, Frolandus Silvanectensis », Anselme, c. 26, p. 236-238.

    40Ibid., p. 285, repris dans Iogna-Prat Dominique, La Maison-Dieu. Une histoire monumentale de l’Église, v. 800-v. 1200, Paris, Éditions du Seuil, coll. « L’univers historique », 2006, p. 375. Pour une critique de cette représentation, Delivré Fabrice, « Les évêques face au pape… », art. cité, p. 176.

    41Brucker, Pierre-Paul, L’Alsace et l’Église au temps du pape saint Léon IX (Brunon d’Eguisheim), vol. 2, Strasbourg, Le Roux, 1889, p. 9 ; Hefele Carl-Joseph et Leclercq Henri, Histoire des conciles d’après les documents originaux, vol. IV-2, Paris, Letouzey, 1911, p. 1018, n. 1.

    42Ordo 1, c. 1-2, op. cit., p. 138-140.

    43« Post haec consederunt omnes, ordine quo Remensis archipraesul disposuit », Anselme, c. 26, p. 236.

    44Struve Tilman, art. « Eberhard, Erzbischof von Trier (1047/† 1066) », in Lexikon des Mittelalters, vol. 3, Munich, Artemis Verlag, 1986, p. 1522-1523. Sur les relations avec Hugues de Besançon, Vregille Bernard de, Hugues de Salins, archevêque de Besançon, 1031-1066, Besançon, Cêtre, 1981, p. 132-139.

    45Mathieu Jean-Noël, « L’origine de l’archevêque de Reims Guy (1033-1055) et les comtes de Soissons du xie siècle », Mémoires de la Société d’agriculture commerce sciences et arts du département de la Marne, no 111, 1996, p. 15-22. Sur l’influence de Guy, on consultera également Desportes Pierre, « Les archevêques de Reims et les droits comtaux aux xe et xie siècles », in Collectif, Économies et sociétés au Moyen Âge. Mélanges offerts à Édouard Perroy, Paris, Publications de la Sorbonne, « coll. Études », 1973, p. 79-89, ici p. 85-86 ; Bur Michel, La formation du comté de Champagne (vers 950-vers 1150), Nancy, Annales de l’Est, « coll. Mémoires », 1977, p. 514-515 ; Demouy Patrick, Genèse d’une cathédrale. Les archevêques de Reims et leur Église aux xie et xiie siècles, Langres, Guéniot, 2005, p. 397-398 et annexe I, p. 607-608.

    46« metuens hujusmodi controversiam prorumpere ad scandalum contentionis », Anselme, c. 26, p. 236.

    47Cushing Kathleen G., Reform and Papacy in the Eleventh Century. Spirituality and social Change, Manchester, Manchester University Press, 2005, p. 111-120.

    48Bourdieu Pierre, Langage et pouvoir symbolique, Paris, Éditions du Seuil, 2001, p. 159-173.

    49Anselme, c. 34, p. 250-253.

    Auteur

    • Laurent Jégou

      Université Paris Nanterre (Arscan, UMR 7041/équipe Themam).

      Laurent Jégou est agrégé d’histoire, professeur d’histoire du Moyen Âge à l’université Paris Nanterre (Arscan, UMR 7041/équipe Themam). Ses travaux portent sur l’histoire sociale de l’Église aux viiie-xiie siècles.

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    1Rome (9-15 avril 1049), Die Konzilien Deutschlands und Reichsitaliens, 1023-1059, éd. Detlev Jasper, Hanovre, Hahnsche Buchhandlung (MGH, Concilia, 8), 2010, p. 207-220.

    2Anselme de Saint-Remi, Historia dedicationis ecclesiae beati Remigii Remensis, éd. et trad. Jacques Hourlier, « Anselme de Saint-Remy. Histoire de la dédicace de Saint-Remy », in La Champagne bénédictine. Contribution à l’année Saint-Benoît (480-1980), Reims, Travaux de l’Académie nationale de Reims, 1981, p. 179-279 (désormais : Anselme). Les citations proposées ici sont adaptées de la traduction (vieillie) de Jacques Hourlier.

    3Isaïa Marie-Céline, Remi de Reims. Mémoire d’un saint, histoire d’une Église, Paris, Éditions du Cerf, coll. « Histoire religieuse de la France », 2010, p. 713. La mise en accusation de l’archevêque Guy lors du concile, évoquée plus loin, peut expliquer que l’auteur ait attendu sa mort, en 1055, pour livrer le récit.

    4Anselme, c. 14, p. 216-217.

    5Ibid., c. 25, p. 232-233.

    6Le récit transmis par les Actes des apôtres évoque l’objet de l’assemblée – les controverses portant sur l’usage des pratiques juives comme la circoncision – qui divisent la communauté et les apôtres. Toutefois, le texte évangélique ne transmet que les discours unilatéraux de Pierre, de Jacques puis la lettre des apôtres « d’accord avec l’Église tout entière » (Ac, 15, 22) pour envoyer des délégués à Antioche s’adresser aux nouveaux convertis. Sur le concile de Jérusalem, Taylor Justin, « The “Council” of Act 15 », in Alberto Melloni et Silvia Scatena (dir.), Synod and Synodality: Theology, History, Canon Law and Ecumenism in New Contact, Münster, LIT Verlag, coll. « Christianity and history », 2005, p. 107-114 ; Valliere Paul, Conciliarism. A History of Decision-Making in the Church, Cambridge, Cambridge University Press, 2012, p. 28-45.

    7Isidore de Séville, Etymologies, livre VI, 14, 12, éd. César Chaparro Gómez, Paris, Les Belles Lettres, coll. « Auteurs latins du Moyen Âge », 2012, p. 85-87. L’expression est reprise dans le prologue de la collection des fausses décrétales : Decretales pseudo-isidorianae et Capitula Angilramni, éd. Paul Hinschius, Leipzig, B. Tauchnitz, 1863, p. 17.

    8Ordo 1, Die Konzilordines des Früh- und Hochmittelalters, éd. Herbert Schneider, Hanovre, Hahnsche Buchhandlung, 1996 (MGH, Ordines de celebrando concilio, 1), p. 138-141. Sur cet ordo, Munier Charles, « L’ordo de celebrando concilio wisigothique. Ses remaniements jusqu’au xe siècle », Revue des sciences religieuses, no 37, 1963, p. 250-271.

    9Anselme, c. 21, p. 226-227.

    10Hermann Joseph Sieben, « Consensus, unanimitas und maior pars auf Konzilien, von der Alten Kirche bis zum Ersten Vatikanum », Theologie und Philosophie, no 67, 1992, p. 192-229. Sur le silence et la prise de parole autorisée comme garantie d’ordre : Ott John, « Speech and Silence. Ritual and Memory at the Council of Reims (1049) », in Tristan Sharp (dir.), From Learning to Love: Schools, Law, and Pastoral Care in the Middle Ages. Essays in Honour of Joseph W. Goering, Toronto, Pontifical Institute of Medieval Studies, 2017, p. 293-314.

    11Anselme, c. 26, p. 236-237.

    12Denomy Alexander J., « The Round Table and the Council of Rheims, 1049 », Mediaeval Studies, no 14, 1952, p. 143-148 ; Dufrenne Suzy, Les illustrations du psautier d’Utrecht. Sources et apport carolingien, Paris, Association des publications près l’université de Strasbourg, 1978, p. 150.

    13Utrecht, Bibliotheek der Rijksuniversiteit, MS 32, fo 90 von [https://bc.library.uu.nl/utrecht-psalter.html] (erreur en 2025), consulté le 14 décembre 2022.

    14Ordo de sedendi in concilio, Burchard de Worms, Decretorum libri XX, Monza, Biblioteca capitolare, H5, fo 1 vo. Sur le document, voir Fransen Gérard, « Papes, conciles généraux et œcuméniques », in Collectif, Istituzioni ecclesiastiche della Societas christiana dei secoli XI-XII Papato, cardinalato ed episcopato, Milan, Vita e pensiero, coll. « Miscellanea del Centro di studi medievali », 1974, p. 203-228, ici p. 207. Sur l’adoption de la forme circulaire dans les conciles de l’époque grégorienne, Laudage Johannes, « Ritual und Recht auf päpstlichen Reformkonzilien (1049-1123) » Annuarium Historiae Conciliorum, no 29, 1997, p. 287-334.

    15« Il appartient à la piété la plus insigne de saluer et de raconter aux pieux auditeurs de quelle manière le seigneur évêque [Gérard] avait ordonné les saints corps autour de l’autel. En effet, celui-ci avec l’abbé Richard, tous deux revêtus d’or, élevant avec le plus grand respect le très saint Géry – vu qu’il était le plus grand évêque et le maître particulier de la sainte dédicace – placèrent [ses reliques] sur le trône pontifical, comme il l’était auparavant, tandis que des louanges étaient chantées et qu’en vérité le clergé et le peuple pleuraient de joie alors qu’ils admiraient ces choses. À côté de lui [Géry] [qui était] au centre, ils établirent aussi d’un côté et de l’autre les saints évêques Aubert, Vindicien, Hadulphe qui avaient été confrères de cette même église, après avoir aussi intercalé le bâton de saint Vaast avec ses reliques. Ensuite, il mit ensemble tous les autres, c’est-à-dire les martyrs, confesseurs et vierges, autour, chacun selon son ordre », Gesta episcoporum Cameracensium, livre III, c. 49, éd. Ludwig Bethmann, Hanovre, Hahnsche Buchhandlung, 1846 (MGH, Scriptores, 7), p. 483-484.

    16On peut noter que les évêques sont désignés non par leur nom, mais par leur siège : « Nantes prend la parole », « Lyon et Besançon, se levant… », etc.

    17Sur la paix de Dieu et ses liturgies, Barthélemy Dominique, L’an mil et la paix de Dieu. La France chrétienne et féodale, 980-1060, Paris, Fayard, 1999 ; Head Thomas et Landes Richard (dir.), The Peace of God. Social Violence and Religious Response in France around the Year 1000, Ithaca, Cornell University Press, 1992. Sur le mouvement dans la province de Reims, Janssens Sam, « A Pattern of alternating Interests. The Peace of God in the Archdiocese of Reims in the first Half of the Eleventh Century », in Peter Coss, Chris Dennis, Melissa Julian-Jones et Angelo Silvestri (dir.), Episcopal Power and Personality in Medieval Europe, c. 900-c. 1480, Brepols, Turnhout, coll. « Medieval Church Studies », 2020, p. 203-222.

    18Hincmar de Reims, Vita Remigii episcopi Remensis, c. 21, éd. Bruno Krusch, Hanovre, 1896 (MGH, Scriptores rerum Merovingicarum, 3), p. 313-315.

    19Deux passages font état de la composition de l’assemblée, qui prêtent à des interprétations contradictoires quant au nombre d’abbés : « episcopi videlicet numero viginti, cum quinquaginta fere abbatis, et aliis ecclesiastici ordinis quam plurimis » (Anselme, c. 26, p. 234) ; « Post haec consederunt omnes [suit la liste des évêques et abbés] » ; « deinde ceteri qui, ut superius relatum est, simul fuerunt numero fere quinquaginta » (ibid., p. 238). Les noms et les sièges des évêques (20) et abbés (17) étant donnés avec précision, le chiffre de 50 abbés n’est pas envisageable ; le chiffre ne peut que concerner les diacres et prêtres qui accompagnent les prélats. Peut-être faut-il y voir un artifice rhétorique de la part de l’auteur, qui entendait masquer les défections de plusieurs hommes d’Église d’envergure, par cette expression volontairement obscure.

    20Halphen Louis, Le comté d’Anjou au xie siècle, Paris, Picard, 1906, p. 71-74.

    21Bur Michel, « Léon IX et la France », in Georges Bischoff et Benoît-Michel Tock (dir.), Léon IX et son temps, Brepols, Turnhout, coll. « ARTEM », 2006, p. 233-257, ici p. 244-247.

    22Gresser Georg, Die Synoden und Konzilien in der Zeit der Reformpapsttums in Deutschland und Italien von Leo IX. bis Kalixt II., 1049-1123, Paderborn, Ferdinand Schöningh, coll. « Konziliengeschichte. Reihe A. Darstellungen », 2006, p. 451-466.

    23Sur l’ordo sedendi, Delivré Fabrice, « Les évêques face au pape. Les conflits de préséance en concile général (xie-xve siècle) », in François Foronda, Christine Barralis et Bénédicte Sère (dir.), Violences souveraines au Moyen Âge. Travaux d’une école historique, Paris, Éditions du Seuil, coll. « Le nœud gordien », 2010, p. 175-183 ; Goetz Hans-Werner, « Der “rechte” Sitz. Die Symbolik von Rang und Herrschaft im Hohen Mittelalter im Spiegel der Sitzordnung », in Gertrud Blashitz, Helmut Hundsbichler, Gerhard Jaritz et Elisabeth Vavra (dir.), Symbole des Alltags – Alltag der Symbole. Festschrift für Harry Kühnel zum 65. Geburtstag, Graz, Akademische Druck- und Verlagsanstalt, 1992, p. 11-47.

    24« Die vero altera, quae est quinto nonas Octobris, congregati sunt in memorata basilica episcopi videlicet numero viginti cum quinquaginta fere abbatibus et aliis ecclesiastici ordinis quam plurimis. Ubi statim vetus querela inter Remensis ac Treverensis archiepiscopi clericos est renovata: his astruentibus, quia Remensis primas esset in Gallia, ideoque illi dispositio competeret synodica; e contra vero illi archiepiscopo Treverensis eandem dignitatem conabantur adscribere, primamque sedem post Romanae ecclesiae praesulem in celebrando concilio adquirere », Anselme, c. 26, p. 234-237.

    25Notitia provinciarum, éd. Theodor Mommsen, Berlin, Weidmann, 1892 (MGH, Auctores antiquissimi, 9), p. 584-612, ici p. 589-590. Sur le document et son utilisation à l’époque carolingienne, Mazel Florian, L’évêque et le territoire. L’invention médiévale de l’espace (ve-xiiie siècle), Paris, Éditions du Seuil, coll. « L’univers historique », 2016, p. 38-40.

    26Rome (1049), Die Konzilien Deutschlands und Reichsitaliens, 1023-1059, op. cit., p. 216-218. Sur ce privilège et son substrat pseudo-isidorien, Ewig Eugen, « Kaiserliche und apostolische Tradition im mittelalterlichen Trier », in Spätantikes und fränkisches Gallien. Gesammelte Schriften, t. II, Munich, Artemis Verlag, coll. « Beihefte der Francia », 1979, p. 51-90.

    27Sur ces comportements conciliaires, Rauwel Alain, « La rumeur dans le psychodrame grégorien : autour d’Hugues de Breteuil », in Myriam Soria et Maïté Billoré (dir.), La rumeur au Moyen Âge. Du mépris à la manipulation, ve-xve siècle, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2011, p. 223-230.

    28« ceteri omnes surrexerunt in ordine », Anselme, c. 27, p. 238.

    29« Tunc Turonenses clerici per Lugdunensem archiepiscopum querelam intulerunt super Dolensi episcopo Britanniae », Anselme, c. 29, p. 242. Sur cette affaire, Duine François, « Le schisme breton », Annales de Bretagne, no 30, 1915, p. 424-468 ; Chédeville André et Guillotel Henri, La Bretagne des saints et des rois, ve-xe siècle, Rennes, Ouest-France Éditions, 1984, p. 266-273 et Guillotel Henri, « Bretagne et papauté au xie siècle », in Rolf Grosse (dir.), L’Église de France et la papauté (xe-xiiie siècle)/Die französische Kirche und das Papsttum (10.-13. Jahrhundert), Bonn, Bouvier Verlag, coll. « Studien und Dokumente zur Gallia Pontificia », 1993, p. 265-286. L’affaire a pris un tour nouveau au xie siècle, avec la mobilisation de l’argument simoniaque pour justifier la déposition des évêques en 849 (Guillotel Henri, « Genèse de l’“Indiculus de episcoporum depositione” », in Catherine Laurent, Bernard Merdrignac et Daniel Pichot [dir.], Mondes de l’Ouest et villes du monde. Regards sur les sociétés médiévales. Mélanges en l’honneur d’André Chédeville, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 1998, p. 129-138).

    30Anselme, c. 30, p. 244-245. Sur ces accusations, Drioux Georges, « Un diocèse de France à la veille de la réforme grégorienne : le pape Léon IX et les évêques de Langres Hugues et Hardouin », Studi gregoriani per la storia di Gregorio VII e della riforma gregoriana, no 2, 1947, p. 31-41.

    31Ordo 1, c. 8, op. cit., p. 141.

    32Capitula Angilramni, c. 13 bis, éd. Karl-Georg Schon, Die Capitula Angilramni. Eine prozessrechtliche Falschung Pseudoisidors, Hanovre, Hahnsche Buchhandlung, 2006 (MGH, Studien und Text, 39), p. 161. Sur la parole autorisée, Ott John, « Speech and Silence… », art. cité, p. 299.

    33Burchard de Worms, Libri Decretorum, éd. Jacques-Paul Migne, Patrologia Latina, 140, col. 589-590. Je remercie Isabelle Rosé de m’avoir indiqué cette référence. Sur l’assimilation de la simonie à une hérésie, Rosé Isabelle, « Simon le Magicien hérésiarque ? L’invention de la simoniaca heresis par Grégoire le Grand », in Franck Mercier et Isabelle Rosé (dir.), Aux marges de l’hérésie. Inventions, formes et usages, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2018, p. 201-238.

    34« Ubi statim vetus querela inter Remensis et Treverensis archiepiscopi clericos est renovata », Anselme, c. 26, p. 234.

    35Lévy Jacques, « Géographie », in Jacques Lévy et Michel Lussault (dir.), Dictionnaire de la géographie et de l’espace des sociétés, Paris, Belin, 2003, p. 399.

    36Butler Judith, Notes Toward a Performative Theory of Assembly, Cambridge, Harvard University Press, 2015 ; Hallensleben Markus, « Introduction », in Markus Hallensleben (dir.), Performative Body Spaces: Corporeal Topographies in Literature, Theatre, Dance, and the Visual Arts, Amsterdam/New York, Brill, 2010, p. 9-27, qui rejoint la pensée de Walter Benjamin sur le corps comme instrument d’occupation de l’espace.

    37White Harrison C., Boorman Scott A. et Breiger Ronald L., « Social Structure from Multiple Networks. I. Blockmodels of Roles and Positions », American Journal of Sociology, no 81, 1976, p. 730-780.

    38Le concept d’alignement a été théorisé par le sociologue américain Ivan Ermakoff, à partir d’une étude sociohistorique de deux « abdications collectives », celles des parlements allemands et français qui votèrent les pleins pouvoirs à Adolf Hitler en 1933 et au maréchal Pétain en 1940. Parmi les multiples critères qui conduisent à un alignement collectif, c’est-à-dire l’alignement de la position d’un individu sur celle de ses voisins figurent la configuration spatiale et le positionnement des individus les uns par rapport aux autres : Ermakoff Ivan, Ruling Oneself Out. A Theory of Collective Abdication, Durham, Duke University Press, 2008, p. 313-314.

    39« domnus quidem papa in medio, ut dictum est, chori, verso vultu ad sepulchrum beati Remigii; ante oculos autem ejus, ad orientalem plagam, Remensis in dextera, Treverensis vero in parte recedit sinistra. Post Remensem deinde secundum subnotatum ordinem resederunt Beroldus Suessionensis, Drogo Morinensis, Frolandus Silvanectensis », Anselme, c. 26, p. 236-238.

    40Ibid., p. 285, repris dans Iogna-Prat Dominique, La Maison-Dieu. Une histoire monumentale de l’Église, v. 800-v. 1200, Paris, Éditions du Seuil, coll. « L’univers historique », 2006, p. 375. Pour une critique de cette représentation, Delivré Fabrice, « Les évêques face au pape… », art. cité, p. 176.

    41Brucker, Pierre-Paul, L’Alsace et l’Église au temps du pape saint Léon IX (Brunon d’Eguisheim), vol. 2, Strasbourg, Le Roux, 1889, p. 9 ; Hefele Carl-Joseph et Leclercq Henri, Histoire des conciles d’après les documents originaux, vol. IV-2, Paris, Letouzey, 1911, p. 1018, n. 1.

    42Ordo 1, c. 1-2, op. cit., p. 138-140.

    43« Post haec consederunt omnes, ordine quo Remensis archipraesul disposuit », Anselme, c. 26, p. 236.

    44Struve Tilman, art. « Eberhard, Erzbischof von Trier (1047/† 1066) », in Lexikon des Mittelalters, vol. 3, Munich, Artemis Verlag, 1986, p. 1522-1523. Sur les relations avec Hugues de Besançon, Vregille Bernard de, Hugues de Salins, archevêque de Besançon, 1031-1066, Besançon, Cêtre, 1981, p. 132-139.

    45Mathieu Jean-Noël, « L’origine de l’archevêque de Reims Guy (1033-1055) et les comtes de Soissons du xie siècle », Mémoires de la Société d’agriculture commerce sciences et arts du département de la Marne, no 111, 1996, p. 15-22. Sur l’influence de Guy, on consultera également Desportes Pierre, « Les archevêques de Reims et les droits comtaux aux xe et xie siècles », in Collectif, Économies et sociétés au Moyen Âge. Mélanges offerts à Édouard Perroy, Paris, Publications de la Sorbonne, « coll. Études », 1973, p. 79-89, ici p. 85-86 ; Bur Michel, La formation du comté de Champagne (vers 950-vers 1150), Nancy, Annales de l’Est, « coll. Mémoires », 1977, p. 514-515 ; Demouy Patrick, Genèse d’une cathédrale. Les archevêques de Reims et leur Église aux xie et xiie siècles, Langres, Guéniot, 2005, p. 397-398 et annexe I, p. 607-608.

    46« metuens hujusmodi controversiam prorumpere ad scandalum contentionis », Anselme, c. 26, p. 236.

    47Cushing Kathleen G., Reform and Papacy in the Eleventh Century. Spirituality and social Change, Manchester, Manchester University Press, 2005, p. 111-120.

    48Bourdieu Pierre, Langage et pouvoir symbolique, Paris, Éditions du Seuil, 2001, p. 159-173.

    49Anselme, c. 34, p. 250-253.

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    Jégou, L. (2025). Église ordonnée ou Église déchirée ?. In T. Martine (éd.), Communautés déchirées ? (1‑). Presses universitaires de Rennes. https://doi.org/10.4000/13m6g
    Jégou, Laurent. « Église ordonnée ou Église déchirée ? ». In Communautés déchirées ?, édité par Tristan Martine. Rennes: Presses universitaires de Rennes, 2025. https://doi.org/10.4000/13m6g.
    Jégou, Laurent. « Église ordonnée ou Église déchirée ? ». Communautés déchirées ?, édité par Tristan Martine, Presses universitaires de Rennes, 2025, https://doi.org/10.4000/13m6g.

    Référence numérique du livre

    Format

    Martine, T. (éd.). (2025). Communautés déchirées ? (1‑). Presses universitaires de Rennes. https://doi.org/10.4000/13met
    Martine, Tristan, éd. Communautés déchirées ?. Rennes: Presses universitaires de Rennes, 2025. https://doi.org/10.4000/13met.
    Martine, Tristan, éditeur. Communautés déchirées ?. Presses universitaires de Rennes, 2025, https://doi.org/10.4000/13met.
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