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Pour une histoire sociale des villes

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Philippe Haudrère

Première partie. Hommes et institutions municipales

Une famille municipale tourangelle : les Aubry (xviie-xviiie siècles)

Claude Petitfrère

Entrées d'index

Géographique :

France

Texte intégral

1Claude Petitfrère

  • 1 Jacques Maillard, Le pouvoir municipal à Angers de 1657 à 1789, Angers, PU.A., 1984, t. 1, p. 234.
  • 2 Claude Petitfrère, « Les maires de Tours aux xviie-xviiie siècles : patriciens ou hommes nouveaux  (...)
  • 3 Terme utilisé par Philippe Guignet (Le pouvoir dans la ville au xviie siècle. Pratiques politiques (...)
  • 4 C. Petitfrère, « Configuration des réseaux familiaux : l'exemple de Tours (vers 1589-1789) », cont (...)
  • 5 La période dénommée « phase échevinale » par G. Saupin(« Les oligarchies municipales... », p. 110) (...)

2Dans sa thèse sur Le pouvoir municipal à Angers de 1657à 1789, Jacques Maillard, tout en rejetant la caricature qui ferait des membres du corps de ville une caste fermée, reconnaissait l'importance des liens familiaux dans les élections aux magistratures urbaines1. Nous avons eu l'occasion de constater l'exactitude de ce jugement pour la ville voisine de Tours2. Parmi les familles composant la « classe politique3 » tourangelle sous l'Ancien Régime, celle des Aubry figure en bonne place. Elle constitue une des rares dynasties échevinales, une douzaine en tout, qui ont donné au corps de ville au moins trois des leurs pour la période courant de 1589 à 17894. Les Aubry sont en effet représentés à l'hôtel commun par deux maires et deux échevins, pour une « phase échevinale5 » longue de près d'un siècle et demi, 147 années exactement qui, de 1617 à 1763, couvrent une bonne partie des deux derniers siècles de l'Ancien Régime. Le destin municipal de la famille Aubry a même survécu à la Révolution puisqu’un des siens a été nommé à l’hôtel de ville en 1800 et y est resté, titulaire de diverses charges — adjoint, maire, conseiller municipal — jusqu’à son décès en 1832.

3Il parait donc que la famille a fait d’une belle persévérance dans la recherche des charges municipales. Cette contribution aura pour objet d'essayer d'en déterminer les motivations ainsi que les moyens mis au service de ce qui semble bien être une politique volontaire. Mais dans un premier temps, il est nécessaire d'établir la généalogie des Aubry et de préciser quels ont été leurs rapports avec l'hôtel de ville.

Une remarquable longévité édilitaire

  • 6 Selon J.-X. Carré De Busserolle, Armoriai général de Touraine, 1884, rééd. Laffitte, 1978, p. 81.
  • 7 Arch. dép. d'Indre-et-Loire, 3 E 9/247 (notaire René Luillier) : transaction entre les héritiers d (...)
  • 8 Cette supposition est empruntée à Idelette Ardouin-Weiss, Les protestants en Touraine (Les ancien- (...)
  • 9 Arch. dép. d'Indre-et-Loire, 3 E 5/247 (notaire Charles Bertrand), 25 octobre 1589.
  • 10 Arch. mun. de Tours, BB 31 - f° 343 r°.
  • 11 Gilles (I) Aubry est décédé le 5 août 1624 selon les dires de son plus jeune fils (« Avertissement (...)

4La dynastie des Aubry, qui serait originaire du Berry6, est ancrée de longue date dans la bonne bourgeoisie puisque le premier personnage de la famille qui nous soit connu, Gilles Aubry, sieur de La Bouttière, était conseiller au présidial de Tours. Il avait hérité de sa mère, Louise Quinault, le fief de Meslay7. La femme à laquelle il s'unit en 1589, sans doute en secondes noces8, Marie de Longuemort, était également issue de la bonne bourgeoisie. Son père est qualifié sur le contrat de mariage de Gilles et Marie de « Noble Adam de Longuemort sieur de la Goguerie » — l'épithète d'honneur montre qu'il n'appartenait pas, en fait, au deuxième ordre — valet de chambre du roi, et sa mère Jane Syreau, de « damoiselle9 ». Gilles (I) accéda à la charge d'échevin perpétuel le 14 septembre 161710 et mourut en 162411. Quatre fils issus de ce couple atteignirent l'âge adulte : Gilles (II), baptisé à Saint-Pierre-le-Puellier le 26 mai 1593, qui fut sieur de Villiers et hérita de l'office de son père, Jean valet de chambre de Monsieur, Adam dont nous allons reparler, enfin Charles, sieur de La Bouttière.

  • 12 Sur l'acte de transaction de 1658, non seulement les trois enfants survivants de Gilles (I) - Gill (...)
  • 13 À Tours, les charges municipales anoblirent jusqu'en 1657, date de l'abolition complète de ce priv (...)
  • 14 En 1729 encore, lorsqu'il rédige son testament, le lieutenant-général Joseph Aubry n'est pas sûr d (...)

5Dix-neuf ans après la disparition de son père, le 28 octobre 1643, Adam Aubry était élevé à son tour à l'échevinage, à l'âge de 46 ans. Il était alors revêtu du seul titre de sieur de Meslay, mais en 1629, dans l'acte de baptême de son fils Gilles (III) — un prénom en honneur dans la famille - il se parait de celui d'écuyer et se disait « homme d'armes de la compagnie de Monseigneur frère unique de sa Majesté ». À cette génération, la famille prétendait effectivement à la noblesse12. Ces prétentions pouvaient s'appuyer sur l'accession de Gilles (I) à l'échevinage13, mais cette « noblesse de cloche » était mal considérée et nous verrons que les Aubry acquerront d'autres titres qui confirmeront leur intégration au second ordre14.

  • 15 L'unique enfant du couple formé par Adam Aubry et Françoise Favereau qui semble parvenu à l'âge ad (...)
  • 16 Adam Aubry, baptisé le 29 décembre 1596 avait trois ans de moins que Gilles.
  • 17 Sur l'acte de baptême de son fils Gilles (III), né de Catherine Tonnereau, célébré le 3 mai 1630 à (...)
  • 18 Gilles (II) Aubry épousa en 1620 Catherine Tonnereau et en secondes noces Françoise Buret le 13 av (...)
  • 19 Les Leblanc de La Vallière avaient exercé plusieurs charges à la Cour depuis François Ier. L'époux (...)

6Ce n'est pas la descendance d'Adam qui maintint la tradition municipale dans la famille Aubry15, mais celle de son frère aîné, Gilles (II)16, sieur de La Bouttière puis de Villiers, qui avait, comme son cadet, une préten-tion affirmée à la noblesse17. Il hérita de l'office de conseiller au présidial de son père et, à voir les parrainages de ses enfants, l'on comprend qu'il était fort bien intégré dans la meilleure société. C'est ainsi que Léonor, fils qu'il eut de sa première épouse, Catherine Tonnereau18, baptisé le 4 avril 1632 à Saint-Pierre du Chardonnet, a eu pour parrain l'évêque de Chartres Léonor d'Étampes qui lui donna son prénom original et pour marraine Françoise de Bonneau, épouse de Jean Leblanc de La Vallière19.

  • 20 Sur ce total, 3 875 livres concernaient en fait les trois-quarts d'une charge de commissaire des m (...)
  • 21 Arch. mun. de Tours, EE 9 : copie des provisions de l'office de secrétaire du roi accordé à Léonor (...)
  • 22 F. Caillou, Une administration..., p. 485. Léonor Aubry revendit l'année suivante son office de li (...)
  • 23 Arch. dép. d'Indre-et-Loire, 3 E 2/251 (notaire Vacher, 3 février 1665), contrat de mariage de Léo (...)
  • 24 Charles Bigot avait épousé le 4 juin 1640 à Saint-Saturnin Marie Foulon, fille de Louis Foulon con (...)

7Léonor fit une belle carrière comme lieutenant-criminel à Tours, une charge qu'il racheta en 1672 pour 56 875 livres20 à la mort de son beau-père, Charles Bigot. Il ancra plus solidement son lignage dans la noblesse en acquérant, en 1677, une charge de secrétaire du roi qu'il paya 59 000 livres et revendit 83 500 livres en 1698, une fois écoulées les vingt années d'exercice nécessaires à l'obtention de la noblesse21, puis un office de maître en la chambre des comptes de Paris qu'il acquit en 1688 pour 117 100 livres, une somme très considérable qui montre à elle seule ses capacités financières22. Il ne fut pas élevé aux mêmes honneurs munici-paux que son grand-père et son oncle mais, en convolant en 1665 avec Marie Bigot23, il épousait la fille d'un magistrat municipal — Charles Bigot fut maire en 1660 et échevin de 1661 à 1672 — et la petite-fille, par sa mère Marie Foulon, d'un autre magistrat municipal, Louis Foulon, maire de 1646 à 1648 et échevin de 1647 à 165724.

  • 25 Le contrat de mariage fut signé le 1er juillet 1695 à Paris. Marguerite reçut une dot de 120 000 l (...)
  • 26 Alexandre Claude a été baptisé à Saint-Venant le 23 septembre 1674. Sur la famille Le Feuvre de La (...)
  • 27 F. Caillou, Une administration..., p. 1080. François Paris avait épousé Madeleine Forget, dont tro (...)
  • 28 Nous ne connaissons pas la date du baptême de Joseph Aubry, mais il avait 69 ans lors de son décès (...)
  • 29 Comme dans beaucoup d'autres villes, le maire était choisi par le roi (en fait par le gouverneur) (...)
  • 30 Joseph Aubry a donné sa démission de sa place d'échevin tout en restant maire (Arch. mun. de Tours (...)
  • 31 C. Petitfrère, « "Vox populi, vox régis ?" L'élection des maires de Tours aux xviie et xviiie sièc (...)
  • 32 Françoise Élisabeth Aveline était la petite-fille de René Aveline trésorier de France à Tours, frè (...)

8Par son mariage, Léonor Aubry renforçait donc considérablement le prestige municipal de son patronyme et l'on n'est pas surpris d'apprendre que trois des enfants que lui donna Marie Bigot eurent des liens plus ou moins étroits avec l'hôtel de ville. Si une de leurs filles, Marguerite, née en 1674, épousa Eustache Hénin, conseiller au parlement de Paris25, sa soeur, Louise-Thérèse, de sept ans sa cadette, se maria avec le fils d'un maire de Tours en la personne d'Alexandre Claude Le Feuvre de la Falluère26, grand maître des eaux et forêts de France au département de Paris, dont le père, Alexandre, trésorier de France au bureau des finances de Tours, avait été le premier magistrat de la ville en 1668-1669, puis échevin de 1669 jusqu'à sa mort dix ans plus tard. Alexandre Le Feuvre était aussi le gendre de François Paris, prévôt et juge ordinaire de Tours, qui fut maire en 1642-1643 et échevin de 1643 à 164727. Un des aînés des deux filles28, Joseph, seigneur du Plessis, un magistrat comme ses ancêtres puisque lieutenant-général de Touraine, reprit le flambeau municipal du lignage avec la double qualité d'échevin et de maire. Il exerça même cette dernière charge pendant deux ans. Le roi l'éleva au mairat après que l'assemblée électorale du 28 octobre 171929 l'eût placé sur la liste des trois candidats à cette fonction et il fut élu échevin à peine deux mois plus tard, le 23 décembre, en remplacement de François Belgarde qui venait de décéder, mais il démissionna de cette seconde charge le 31 juillet 1720 sans que nous puissions en savoir la raison30. Reconduit à la tête de la municipalité à la suite des élections du 28 octobre 1720, il arriva encore en première position lors du scrutin de l'année suivante avec 3 voix de plus que le second, François Segoin, président au bureau des finances mais dut, cette fois, céder la place31. Il avait épousé en 1706 Françoise Elisabeth Aveline, la petite-nièce d'un autre maire de Tours, Philibert Aveline, mais n'eut pas de postérité32.

  • 33 Baptisé le 13 janvier 1685 à Saint-Hilaire, Joseph (II) hérita de la seigneurie du Plessis après l (...)
  • 34 Arch. mun. de Tours, BB 68, f° 54. Thomas n'appartenait pas à la famille Cottereau qui s'illustra (...)

9Il devait revenir à un autre fils du couple Léonor Aubry-Marie Bigot, prénommé Joseph comme son frère, mais sieur de La Gitonnière33 et premier président au bureau des finances, d'assurer la pérennité de la famille à l'hôtel de ville grâce à sa postérité. Il avait épousé Jeanne Louise Marguerite Frotté, petite-fille par ascendance maternelle de François Milon, assesseur au présidial, maire en 1644-1645, et échevin de 1645 à 1669. Leur fils, Joseph Jean, qui hérita de son père les seigneuries de La Gitonnière et du Plessis ainsi que la charge de président au bureau des finances, continua en effet la tradition édilitaire de la famille. Aux élections du 4 juillet 1762, Joseph Jean obtint 31 voix, le même nombre que le premier échevin en exercice Thomas Cottereau, avocat en parlement et au présidial de Tours, mais c'est lui que Choiseul, le gouverneur, désigna pour maire, sans doute en considération du lustre de sa famille34.

  • 35 Arch. mun. de Tours, BB 68, f° 54 v°, 4 juillet 1762.
  • 36 La vente des offices municipaux fut, au début du xviie siècle, l'occasion de ce que nous avons app (...)
  • 37 Ce double patronyme est, selon une pratique fort usitée dans la bonne société tourangelle, une con (...)

10Le 7 juillet 1749, Joseph Jean Aubry avait épousé Catherine Verrier, la fille d'un négociant, Robert Charles, qui fut élevé à l'échevinage le 5 juillet 1761. Si cette alliance n'était pas particulièrement brillante pour une famille ancrée de si longue date dans lahiérarchie officière, elle ne put que servir le gendre dans son élévation à la mairie, le beau-père ayant participé de fait à l'élection35. Les Verrier étaient d'ailleurs présents à l'hôtel de ville depuis la génération précédente, grâce au père et à l'oncle de Robert Charles. Le premier, Robert René Verrier de La Touche, marchand, avait été échevin de 1706 à 1724, le second, François Verrier, marchand et garde de la monnaie, l'avait été au début de la première décennie du xviiie siècle, de 1701 à (semble-t-il) 1704. Tous deux avaient bénéficié de la vente des offi-ces municipaux par Louis XIV36. Enfin, le fils de Joseph Jean, Joseph Robert Aubry-Patas37, devait renouer avec la tradition municipale par-delà l'époque révolutionnaire puisqu'il fut nommé, sous le Consulat, successivement adjoint en 1800, maire de 1801 à 1803, puis conseiller municipal en l'an XIII, une fonction qu'il conserva jusqu'en 1831 pour le moins (et vrai-semblablement jusqu'à sa mort l'année suivante).

  • 38 C. Petitfrère « Configuration... ».

11Au total la famille Aubry est de celles qui ont mené une réelle politique de présence à l'hôtel de ville38. Cet appétit pour les charges municipales peut sans doute être considéré comme un complément dans la quête de reconnaissance sociale démontrée par le souci d'intégration à la noblesse. Un des premiers moyens mis au service de cette ambition fut une judicieuse politique de mariages avec des familles déjà implantées à l'hôtel de ville, les Aveline, Bigot, Foulon, Forget, Le Feuvre, Milon, Paris, Verrier. Évidem-ment cela supposait une solide assise financière dont nous allons tenter de fournir la preuve maintenant.

Au plus haut niveau de la société tourangelle : fortune et cadre de vie

  • 39 Arch. dép. d'Indre-et-Loire, 3 E 5/247 (notaire Charles Bertrand), contrat de mariage de Gilles (I (...)
  • 40 Arch. dép. d'Indre-et-Loire, 3 E 9/247 (notaire René Luillier) « Mémoire des appretiations des imm (...)

12En 1589, Gilles (I) Aubry avait fait un mariage intéressant par le rang social de son beau-père, valet de chambre du roi, et la dot de son épouse qui n'est pas négligeable pour l'époque : 1600 écus d'or « revenant suyvant l'ancien compte » à 4 800 livres tournois. Lui-même reçut en dot la seigneu-rie de La Bouttière, qui lui venait de sa mère39. Le patrimoine immobilier du couple dans sa maturité ne peut être reconstitué. On sait seulement qu'à la mort des deux époux, c'est-à-dire après qu'ils eurent donné à leurs fils l'essentiel, sans doute, de leurs biens fonciers en avancement d'hoirie, ce patrimoine était encore évalué à 28 277 livres. Il comprenait alors, notam-ment, deux seigneuries, celles de Meslay (paroisse de Draché ?) et de La Channesière près de Châtillon-sur-Indre, la métairie du Grand Villiers paroisse de Luzillé, ainsi qu'une belle propriété de ville, située rue de la Boule peinte, paroisse de Saint-Pierre-le-Puellier. Estimée 7 000 livres, celle-ci se composait d'un grand corps de logis, un plus petit en appentis, une cour et un jardin clos de murs40.

  • 41 Arch. dép. d'Indre-et-Loire, 3 E 2/62 (notaire Vincent Patrix), contrat de mariage de Gilles (II) (...)
  • 42 Arch. dép. d'Indre-et-Loire, 3 E 2/70 (notaire Portays), partage des biens du couple Jacques Tonne (...)

13Le mariage de Gilles (II) avec Catherine Tonnereau, en 1620, n'offrit pas moins d'intérêt. Tandis que le mari apportait en dot l'office de conseiller au présidial que son père avait résilié en sa faveur, d'une valeur de 13 500 livres, l'épouse recevait en avancement de droits successifs 15 600 livres, soit 3 000 en espèces, le reste en diverses rentes foncières et surtout constituées41. Plus tard, Catherine devait hériter du fief de Réchaussé dans la paroisse de Saint-Antoine-du-Rocher évalué 13 500 livres42.

  • 43 Léonor avait au moins une demi-soeur, fille de la seconde épouse de Gilles (II), Françoise Buret ( (...)
  • 44 43292 l 16s 9d de rentes, le surplus, soit 16707 livres 3 sols 3 deniers, payé comptant. Arch. dép (...)
  • 45 F. Caillou, Une administration..., p 511-512. Un bel exemple de cette participation aux traités d' (...)
  • 46 F. Caillou, Une administration..., p 511-512.
  • 47 Cf le tableau réalisé par F. Caillou, Une administration..., p. 512. Les biens ont été divisés en (...)
  • 48 Arch. dép. d'Indre-et-Loire 2B/993, inventaire après décès de Léonor Aubry fait par le lieutenant- (...)
  • 49 Arch. dép. d'Indre-et-Loire, 3E6/510 (notaire Estevou). Le lieu et closerie des Pentes, comportant (...)

14À la génération suivante, Léonor Aubry consolida très largement la fortune de la dynastie. Seul fils de Gilles (II) et Catherine Tonnereau ayant atteint l'âge adulte, il dut hériter de la plupart de leurs biens43. Son épouse, Marie Bigot, apporta en dot 60 000 livres44. Dans sa maturité, le couple dut jouir d'une des fortunes les plus considérables de la ville. Le montant total de leurs biens, calculé par François Caillou à partir du volumineux partage entre les héritiers effectué en juillet 1711, se monte à la somme faramineuse, à l'échelle locale, de 1 349889 livres 2 sols 5 deniers. François Caillou pose à juste titre la question de l'origine d'un « enrichissement aussi prodigieux », supputant mais sans pouvoir apporter de preuves ni même d'indices, une possible participation aux affaires du roi45. Les époux ne jouissaient plus totalement de cette fortune à la fin de leur vie puisque près d'un million de livres (993 800 exactement) avaient été données aux enfants en avancement d'hoirie46. Sur la masse des biens à partager, 57 % environ se composait de rentes foncières et constituées dont une bonne moitié de rentes sur l'hôtel de ville de Paris47. Comparées à ces quelque 200 000 livres, les propriétés foncières - moins de 90 000 livres - feraient assez pâle figure si leur énumération ne permettait de les remettre à leur juste et importante place. Une de leurs particularités est le nombre de maisons urbaines puisqu'on n'en compte pas moins de six : la belle propriété de la rue de la Scellerie où habitait le couple (évaluée 15 000 livres), acquise en 1679, une maison située rue de la Lamproie (3 000 livres), une sise rue du Morier (1 000 livres), deux autres dans l'ancien faubourg de Saint-Pierre-des-Corps (évaluées respectivement 600 et 300 livres), la dernière consistant en fait en la moitié (estimée 1 000 livres) d'une maison partagée avec Monsieur Taschereau de Linières, nommée « les trois coupes d'or » et située dans la Grande Rue près du Grand marché. En campagne, le couple possédait notamment, dans l'étendue de la paroisse de Saint-Antoine du Rocher la seigneurie du Grand Réchaussé et la terre du Plessis héritées du grand-père maternel de Léonor, Jacques Tonnereau, qui étaient évaluées avec les rentes seigneuriales à la coquette somme de 34 000 livres, la maison et fief du Bresseau paroisse de Paulmy, La Peschellerie et le Moulin-de-Méré paroisse de Saunay (ces trois derniers biens estimés ensemble 18 000 livres), la terre de La Gitonnière et ses dépendances avec le moulin de Vilaines (6 800 livres), paroisse de Neuvy-le-Roi, provenant de la succession Tonnereau48, la closerie des Pentes, paroisse de Rochecorbon, acquise en 169149, deux métairies, nommées La Ruire, et Les Bosses que nous n'avons pu localiser, enfin une maison au bourg du Boulay (canton de Châteaurenault) estimée 1 600 livres.

15À Tours le couple Léonor Aubry-Marie Bigot disposait d'une demeure fort spacieuse. La maison de la rue de la Scellerie se composait en effet de trois corps de logis donnant d'un côté sur une cour, de l'autre sur deux jardins. Le corps de logis principal comportait trois pièces au rez-de-chaus-sée — la grande salle à vivre, la cuisine et l'office —, et quatre chambres au premier étage qui était surmonté d'un grenier. Un deuxième corps de logis, donnant sur la cour, renfermait au rez-de-chaussée une salle flanquée d'un cabinet et une petite cuisine, au premier deux chambres, enfin sous les toits une chambre « en galetas » et un grenier. Ce corps de logis semble avoir été réservé à Joseph, le futur maire de Tours, qui était pour quelques mois encore célibataire à la mort de son père. Un troisième petit bâtiment donnant sur l'écurie et sur les jardins, possédait deux chambres basses et, à l'étage, une autre chambre et un petit cabinet.

  • 50 L'inventaire réalisé par le lieutenant particulier Pierre Decop après le décès de Marie Bigot du 9 (...)
  • 51 L'inventaire de Marie Bigot fait état d'un véhicule supplémentaire, un chariot à quatre roues.
  • 52 Par le nombre et la qualité de ses domestiques, la maison devait occuper à Tours le haut du pavé, (...)
  • 53 Arch. dép. d'Indre-et-Loire, 2B 993, inventaire après décès de Léonor Aubry.

16Certains éléments de l'inventaire après décès de Léonor Aubry permettent de se faire une idée de la qualité du décor dans lequel se déroulait le quotidien du couple. La « salle » du rez-de-chaussée était ornée d'une belle tapisserie des Flandres évaluée 1 000 livres lors du décès du propriétaire en 1706. Aux murs étaient accrochés une douzaine de tableaux à thème religieux (un saint Jérôme, une sainte Véronique, un saint Joseph, un saint Louis) ou profanes (une tête d'empereur, une charité romaine, un paysage portuaire, des natures mortes), ainsi qu'un tableau représentant un soldat endormi — au fait peut-être une scène évangélique -, le plus prisé (200 livres) en raison de son cadre doré50. D'autres indices témoignent de l'aisance du couple et du confort dont il jouissait. La valeur de l'argenterie par exemple, estimée à 9 266 livres, ou encore les deux véhicules garés sous les remises, un carrosse garni de velours rouge prisé 400 livres et dont les deux chevaux noirs ont été évalués à 600 livres et une chaise roulante à quatre roues (valant dix fois moins que le carrosse51). Même chose pour le nombre et la qualité des domestiques. Le couple employait dans sa résidence citadine deux cochers, Léveillé et « Lenchvin » (L'Angevin), quatre laquais, parmi lesquels les nommés Tourangeau, La Rose et Jasmin, une fille de chambre, une cuisinière et une servante de cuisine, soit neuf domestiques, dont six hommes qui, mieux que les femmes, mettaient en relief la fortune et le rang de la maison52. S'y ajoutent, en campagne, la gouvernante, la servante et le jardinier du Bresseau, ainsi que la servante du Plessis, ce qui fait un total de 13 domestiques. Enfin l'extraordinaire bibliothèque de Léonor Aubry, dont nous reparlerons, témoigne à la fois de sa culture et de ses possibilités financières53.

  • 54 Charles Léonor, né en février 1666, fut ondoyé le 15 et reçut les rites complémentaires du baptême (...)
  • 55 Arch. nat., Minutier central, XLIX/436 (notaire Doyen), acte du 29 juin 1706 communiqué par Franço (...)
  • 56 Arch. dép. d'Indre-et-Loire 3E 8 (notaire Venier).

17Le futur maire de Tours, Joseph Aubry, en tant que cadet, ne fut pas le plus favorisé des enfants de Léonor et Marie Bigot. Alors que la dot de l'aîné, Charles Léonor54, atteignit la somme colossale de 300 000 livres, Joseph dut se contenter de la moitié quand il épousa à Paris, en juin 1706, Françoise Elisabeth, fille du trésorier de France René Aveline, dotée quant à elle de 92 000 livres55. L'ensemble permettait cependant un départ très confortable dans la vie commune... Quelques mois seulement après les noces, le 25 novembre 1706, les époux passaient un acte de donation mutuelle de tous leurs biens meubles et plus généralement tout ce que la coutume de Touraine permettait de donner en propriété et par usufruit, « pour l'amour qu'ils se portent et espèrent sous le bon plaisir de Dieu se porter cy après l'un à l'autre, et aussi pour donner moyen au survivant d'eux de vivre honnorablement (sic) et selon sa condition56 ».

  • 57 Le tout se montant, comme les quatre autres parts d'héritage, à 58621 livres 3 sols 5 deniers. (Ar (...)
  • 58 Arch. dép. d'Indre-et-Loire, 3 E 5/599 (notaire Ridet), inventaire après décès de Joseph Aubry, ar (...)

18Lors du partage des biens de ses parents, il revint à Joseph, outre une partie des rentes, les seigneuries du Plessis et du Grand Réchaussé, l'hôtel de la rue de la Scellerie ainsi que les deux maisons de Saint-Pierre-des-Corps57. De son côté Françoise Élisabeth Aveline avait hérité de sa mère la seigneurie de La Chassetière, paroisse de Notre-Dame d'Oé, ainsi que le lieu et closerie de La Borde58.

  • 59 Ibid., article GGGG des titres et papiers.
  • 60 Rappelons toutefois que la valeur de la monnaie de compte a subi d'importantes variations jusqu'à (...)
  • 61 Sont aussi représentés Michel-Ange, Rubens, Jacques Callot, Le Titien, Polidoro, Mignard (Pierre ? (...)

19Après son mariage, puis le décès de sa mère Marie Bigot survenu en 1710, Joseph Aubry continua à habiter dans l'hôtel de la rue de la Scellerie dont il agrandit le terrain en acquérant en 1711 dix-sept chaînées supplé-mentaires, situées au bout du jardin où il fit construire une serre et une écurie59. Autant qu'on puisse en juger par l'itinéraire des officiers qui ont procédé aux inventaires, le nombre, la nature et la disposition des pièces dans les trois corps de logis ne semblent pas avoir changé d'une génération à l'autre. Mais Joseph et son épouse, bien que moins fortunés que les parents Aubry, paraissent avoir sacrifié davantage au confort et à l'apparat. Sans doute les tapisseries sont-elles restées en place — dans la chambre où belle - mère et brue se sont succédé, la tapisserie d'Angleterre à personnages est toujours accrochée aux murs et la grande salle du logis principal est encore parée de la tenture des Flandres dans laquelle le notaire a su reconnaître les travaux d'Hercule quand, à la mort de Léonor, le lieutenant particulier n'avait vu que des planètes et des personnages, mais le mobilier est plus abondant et, autant qu'on puisse en juger, plus moderne et de plus grande valeur. Tandis que Marie Bigot se contentait d'un lit de noyer — évalué 200 livres — à grands rideaux de serge verte dont le seul luxe était l'étoffe de soie rayée qui recouvrait le fond et le dossier, Françoise Élisabeth Aveline avait fait disposer autour de sa couche - estimée au total 1 000 livres - une « housse » de velours cramoisi doublé d'un taffetas d'Angleterre garni de galons d'or. Six fauteuils et un sofa assortis au lit, avec leur housse de velours cramoisi rehaussée de galons d'or fin (600 livres), avaient remplacé les huit caquetoires couvertes de tapisserie rayée et le fauteuil garni d'étoffe de soie (90 livres pour le tout) du temps de la belle-mère. À la place du « petit miroir » à cadre gris (5 livres) trônait un « grand miroir de glace » (estimé 400 livres) et la pièce s'était enrichie d'un bureau en marqueterie et d'une pendule enchâssée dans une boîte marquetée elle aussi. Quant à l'argente-rie, elle est évaluée en 1739 à un prix deux fois supérieur à celui de 1709 (18 760 livres)60. Le logis s'est grandement enrichi en oeuvres picturales, puisqu'on y recense désormais 30 tableaux. Ceux de la salle principale ont été presque complètement renouvelés. De l'époque de Léonor et Marie on ne retrouve que la charité romaine ; quatre oeuvres nouvelles représentent la Transfiguration, la descente de croix (deux tableaux) ainsi que Judith et Holopherne. Quatre des tableaux mis à l'honneur au xviie siècle ont été victimes d'une sorte de déclassement, puisqu'ils sont accrochés désormais aux murs d'une antichambre. Les sujets les plus répandus sont, comme à la génération précédente, les thèmes religieux, évocateurs du Nouveau Testament (17), mais aussi de l'Ancien (3). Cependant à côté d'eux des tableaux profanes multipliés (10 oeuvres), notamment inspirés de la mytho-logie - un jugement de Pâris, une Diane, une Galatée - donnent au décor une teinte un peu moins austère qu'à l'époque des parents. Joseph Aubry et/ou son épouse avaient d'ailleurs un goût prononcé pour les beaux-arts, comme en témoignent les 35 recueils d'estampes de la bibliothèque qui dévoilent une certaine prédilection pour les oeuvres de Raphaël et de Poussin (respectivement 7 et 6 recueils)61. Ces tableaux ne se retrouveront pas dans la maison du président Joseph Jean, remplacés par cinq portraits de famille. Faut-il voir dans cette mutation un progrès de la conscience aristocratique chez les Aubry ?

  • 62 Arch. dép. d'Indre-et-Loire, 3E 5/599 (notaire Ridet), testament de Joseph Aubry. Les domestiques (...)

20Comme leurs parents, Joseph et Elisabeth disposent de deux véhicules sur roues, un carrosse « garni de sculptures » (400 livres) et une berline (150 livres), mais aussi d'une chaise à porteurs. Leur domesticité est encore considérable puisqu'elle se compose au total de dix personnes, réparties à égalité entre les deux sexes : un valet de chambre pour chacun des époux, un cocher, un jardinier dans chacune des résidences secondaires du Plessis et de La Chassetière, une certaine demoiselle Charlotte Davonneau qui doit avoir dans la maison un rang important car elle est nommée la première des témoins lors de la déposition du testament de son maître chez le notaire — elle possède d'ailleurs une belle signature -, une cuisinière, deux servantes de basse-cour, l'une au Plessis l'autre à La Chassetière, enfin une « ancienne domestique » de Madame, trop âgée sans doute pour être encore utile, mais que le couple garde par charité à la Chassetière62.

21Joseph Aubry et son épouse possédaient deux gentilhommières. Au Plessis, la maison des maîtres est assez modeste : un corps de logis à deux niveaux surmontés d'un grenier abrite 5 pièces principales et 3 annexes (office, vestibule ou réduit). La salle de réception n'a rien d'impressionnant avec sa tapisserie des Flandres à feuillages estimée seulement 130 livres, et son mobilier rustique composé de deux tables de sapin sur châssis, à la mode ancienne, un lit de salle, 3 fauteuils de « jonc », un autre bourré de crin et couvert de mocade, 8 chaises qui lui paraissent assorties, deux autres sans doute plus ordinaires, deux tabourets, un paravent en quatre feuilles garni de serge verte et un bas d'armoire de chêne à deux fenêtres qui contient les ornements sacerdotaux nécessaires à la desserte de la chapelle. C'est cette chapelle, isolée dans la cour, qui, avec la fuie, donne au lieu son prestige seigneurial. Outre ces deux constructions, la cour renferme un pavillon où demeure le jardinier, un « toit à porcs » qui flanque la fuie et n'abrite qu'un seul occupant au moment où est dressé l'inventaire après décès de Joseph, deux écuries, ce qui est beaucoup pour l'unique « cavale » du lieu, une étable où logent quatre vaches. Greniers et caves complètent le tout. À côté de la maison de maître se trouve la métairie du Plessis où l'on recense 7 vaches, un veau, huit ovins adultes et deux agneaux, enfin deux jeunes porcs. D'autres têtes de bétail sont élevées au lieu du Grand Réchaussé (10 bovins, 27 ovins et deux porcs) et au Petit Réchaussé (4 vaches et 15 ovins). Tous les animaux sont possédés à moitié par le maître et par le métayer.

  • 63 Le métayer est de moitié pour les agneaux et pour deux des veaux.

22Le manoir de La Chassetière semble plus imposant. Le bâtiment principal qu'on peut voir encore aujourd'hui, est tout en longueur. Il comprend 11 pièces à vivre (6 au rez-de-chaussée et 5 à l'étage mansardé) ainsi que 8 pièces annexes (office, vestibule, cabinets, fruiterie ou « garde-meuble »). À cela s'ajoutent 4 greniers, une cave, un cellier, une boulangerie et un pressoir. Dans la cour a été installée « une chaudière à eau-de-vie » avec son chapiteau et son serpentin. C'est là aussi, sans doute, que se trouve la chapelle. Dans la basse-cour on découvre un petit bâtiment d'une seule pièce, ainsi que les étables où l'on recense 66 moutons et brebis, 30 agneaux, 6 vaches, 3 veaux et une « bourrique63 ».

  • 64 Huit ouvrages, soit 20 volumes en tout, sont rangés dans une armoire de chêne du vestibule, dont « (...)

23Le décor et le confort de la salle principale du logis sont nettement plus recherchés qu'au Plessis. La pièce est tendue d'une tapisserie des Flandres à personnages (évaluée 220 livres) et un portrait de Louis XIV en cadre doré trône au mur. Les meubles les plus appréciés sont un sofa en bois de noyer, garni de crin et recouvert d'une étoffe de soie (80 livres), une pendule (60 livres) et un miroir (40 livres). La salle est équipée pour recevoir confortablement des hôtes nombreux, puisqu'outre le sofa, elle contient 4 fauteuils de noyer couverts de tapisserie au point d'Angleterre, 5 autres fauteuils de « jonc », 3 chaises de noyer rembourrées de crin et couvertes de serge bleue et deux petits tabourets revêtus de mocade. Complètent le mobilier un lit de salle, une table en sapin, montée sur quatre « piliers », et son tapis de tapisserie, un « quinola » de noyer, fixe lui aussi avec ses quatre « colonnes », et une petite table de chêne, qui sert peut-être au jeu comme le quinola. À parcourir l'inventaire, on a l'impression que La Chassetière était la résidence secondaire préférée des époux, celle où ils aimaient se retirer, relire leurs livres favoris, une comédie de Molière, Le dialogue des morts de Lucien, L'Ane d'or d'Apulée, L'histoire des oracles ou celle d'Henri le Grand64 celle aussi où ils recevaient volontiers comme le montrent, avec le grand nombre des sièges disposés dans les diverses pièces, la belle batterie de cuisine, l'abondance et la richesse de la vaisselle, notamment la vaisselle d'argent gravée aux armes de la dame Aubry, le quinola et les deux trictracs d'ébène pourvus de leurs dames.

  • 65 F. Caillou, Une administration..., p. 1014.
  • 66 Arch. dép. d'Indre-et-Loire, 3E 5/803 (notaire Carreau), acte du 5 juillet 1749. Le mariage de Jos (...)
  • 67 Les dots sont déséquilibrées puisque celle de l'épouse est près de deux fois supérieure à celle du (...)

24Lorsqu'il épousa Catherine Verrier, en juillet 1749, à près de 30 ans, Joseph Jean Aubry, neveu du couple précédent reçut en dot 57 000 livres, constituées pour 50 000 livres par l'office paternel de premier président au bureau des finances, dont il était pourvu depuis l'année précédente65 les 7 000 livres restantes représentant la valeur d'une maison de la rue de la Scellerie, jouxtant l'hôtel patrimonial que son père avait obtenu en héritage du lieutenant-général à la suite d'une vente sur licitation66. La future épouse de son côté était pourvue d'une dot considérable, 95 000 livres, non compris la valeur du trousseau de la mariée fourni par ses parents (5 000 livres)67.

  • 68 Arch. dép. d'Indre-et-Loire, 3E5/807/a, articles N et R des titres et papiers, et 3 E 8/501 (notai (...)

25Le premier président avait reçu de son frère en héritage la seigneurie du Plessis mais les nouveaux époux ont rapidement investi leur capital dans l'achat d'autres domaines ruraux. En 1757, ils achetaient pour la coquette somme de 36 000 livres la terre, fief et seigneurie de La Bouchardière dite aussi Le Petit Yzernay, située dans la paroisse de Joué près de Tours ; deux ans plus tard ils arrondissaient ce domaine en y adjoignant la terre d'Yzernay en même temps qu'ils achetaient la seigneurie du Breuil, sises l'une et l'au-tre pour la plus grande part dans l'étendue de la paroisse de Chambray mais contiguës à La Bouchardière, le tout moyennant 26 000 livres68.

26Joseph Jean meurt le 10 décembre 1763 dans la maison de la rue de la Scellerie qu'il avait reçue en dot. Il se pourrait que certains éléments du décor y aient été transférés de l'hôtel patrimonial voisin. Ainsi les trois pièces de tapisserie des Flandres (estimées 660 livres) qui revêtent les murs de la « salle » pourraient constituer une partie de la grande tenture de la pièce principale de l'hôtel du temps de Léonor et de Marie, mais il est impossi-ble de l'affirmer. Cette « salle » sert sans doute de chambre à coucher à l'épouse du premier président au bureau des finances car on y trouve un tableau représentant la défunte dame Thérèse Verrier, belle-mère de Joseph Jean, ainsi que le plus beau lit du logis (estimé 800 livres). La pièce contient d'autres meubles de prix comme ce grand miroir à crémaillère dans un cadre de bois doré (350 livres) ou ces 8 fauteuils de noyer couverts de tapisserie à petits points (400 livres). Des meubles à la mode ont fait leur apparition au logis. Ainsi une « commode à bois de placage à quatre tiroirs fermant à clef garnye de sa table de marbre et sa garniture en bronze doré », évaluée 100 livres, ou encore la jolie table de toilette que l'on trouve dans la garde-robe jouxtant la « salle ». Entourée d'une « housse de mousseline brodée en cramoisi », elle comporte tout le nécessaire, notamment un miroir à cadre de bois peint « en vernis de la Chine », avec deux coffrets assortis, une housse de mousseline des Indes brodée, un voile de damas cramoisi bordé de galons d'or à quatre glands, deux flambeaux d'argent, un pot, une cuvette, des gobelets, boîtes et flacons. L'ensemble est estimé 150 livres. Dans l'antichambre qui doit servir de salon de jeu trône, à côté de deux « quinolas », un clavecin, cadeau de Catherine à sa fille.

27Le cabinet de travail du président est équipé de deux bureaux, l'un, à trois tiroirs, de simple bois bouillard peint en noir et couvert de maroquin, l'autre à 18 tiroirs, en ébène. Il est prévu que le magistrat reçoive du monde dans cette pièce puisqu'on y trouve dix-sept sièges : 11 fauteuils, dont un à roulettes qui est sans doute celui du maître des lieux, et 6 chaises. On imagine aussi que Joseph Jean aimait à se retirer en solitaire dans ce cabi-net. Il a rangé dans les tiroirs du petit bureau 4 portraits de famille et quelques-uns de ses objets personnels les plus précieux : outre les provisions de l'office de premier président, une tabatière, un étui et une paire de boutons d'or (le tout estimé 420 livres), une montre à boîte d'or (150 livres) et « un étuy de mathématiques garny de tous ses ustenciles (sic) » (3 livres). Dans l'armoire de chêne à six battants servant de bibliothèque, qu'on a nulle peine à se représenter avec son grillage en fils de laiton et ses rideaux de toile verte, Joseph Jean a déposé, à côté de ses livres, une épée à poignée d'argent avec son fourreau et ceinturon, une canne de jonc à pomme d'or, deux fusils et une paire de pistolets.

  • 69 Le camelot est une étoffe fine, non croisée, de poils de chèvre ou de laine ; la calmande ou cale- (...)
  • 70 Arch. dép. d'Indre-et-Loire, 3E5/807/a.

28L'inventaire de la garde-robe qui jouxte ce cabinet donne une bonne idée de la richesse voire de l'élégance vestimentaire du premier président. Nous n'y trouvons pas moins de 72 chemises dont, il est vrai, douze sont dites « presque usées », ainsi que sept habits, avec leur veste et/ou leur culotte, pour toutes les circonstances, des plus ordinaires aux plus céré-monieuses. Pour les premières Joseph Jean dispose par exemple d'un habit et veste de camelot en poil de chèvre noir avec une culotte de calmande (le tout estimé 6 livres)69. Pour les secondes, il peut choisir, selon son humeur ou selon le temps, un habit de drap gris avec culotte assortie et une veste de soie blanche à fleurs d'or (70 livres au total), ou un habit de gros de Naples noir doublé de fourrure grise (30 livres). Dans un autre endroit, une armoire de la pièce réservée à la femme de chambre, la « robe de cérémonie à l'usage dudit deffunt comme maire, de damas cramoizy garnie de ras de Saint Maur (sic) », estimée 80 livres, est rangée au milieu des vêtements de la maîtresse de maison et des enfants. Pas moins de trente paires de manches, de dentelle - dont la plus chère en dentelle d'Angleterre est évaluée à 80 livres -, mousseline brodée ou « garnie d'effilé », permet-taient au magistrat de mettre une touche de raffinement supplémentaire à sa toilette70.

  • 71 Un premier enfant, déjà prénommé Joseph Robert, né et baptisé le 19 octobre 1750 à Saint-Venant y (...)
  • 72 Ceci ressort de la liste des dettes passives de la succession de Joseph Jean (Arch. dép. d'Indre-e (...)
  • 73 Ce détail ne laisse pas d'être étonnant et sujet à caution, étant donné le souci de Joseph Jean et (...)

29Par rapport aux générations précédentes, celles de l'oncle et du grand-père, la domesticité du couple s'est réduite puisqu'elle ne compte plus que quatre domestiques « d'intérieur » : un seul homme, surnommé Beaulieu, qui sert sans doute de valet de chambre à Monsieur, la femme de chambre de Madame, une cuisinière et la gouvernante des enfants. En effet à l'époque du décès de Joseph Jean, ses trois enfants survivants étaient encore bien jeunes. Le fils aîné, Joseph Robert71, âgé de 13 ans, poursuivait ses études chez un maître de pension à qui l'on devait 635 livres 16 sols à la mort du père. Ses cadets, Thérèse Madeleine Jeanne âgée de 9 ans et Jean Charles, 7 ans, recevaient à domicile les leçons d'un maître d'écriture, d'un maître de musique et d'un maître de danse, ce qui montre que les parents avaient le souci de donner à leur progéniture une éducation soignée, conforme à leur rang. Deux domestiques vivaient à La Bouchardière, un jardinier et une servante de basse-cour72. En 1763, le maire de Tours et sa famille disposaient donc au total de six serviteurs ou servantes contre treize pour Léonor Aubry en 1706 et dix pour l'oncle Joseph en 1739. Pour ses déplacements le couple était, semble-t-il, également moins bien loti que les générations précédentes puisqu'il n'aurait disposé, si l'on en croit l'inventaire, que d'un cabriolet évalué seulement 40 livres et une jument73.

  • 74 Malheureusement le domaine du Plessis ne figure pas dans l'inventaire après décès de Joseph Jean c (...)

30Parmi les résidences campagnardes que Joseph Jean et Catherine possé-daient à la fin de la vie du premier président, ils devaient avoir un faible pour le domaine de La Bouchardière74. La maison de maître, construite sur un seul niveau - si l'on excepte les greniers et une chambre mansardée -, comportait 8 pièces principales, 7 pièces annexes - vestibule, cabinets et boulangerie — et deux greniers. Plusieurs détails de l'inventaire montrent que la maison était réellement habitée. Outre que le maire de Tours y avait laissé une petite partie de sa garde-robe, il y disposait d'un cabinet où étaient entreposés une vingtaine de livres, et dans le vestibule jouxtant la chambre de sa fille, un clavecin, estimé 200 livres, permettait à Mademoiselle Aubry de ne pas perdre la main durant ses séjours en campagne. La famille pouvait recevoir dignement dans ce logis champêtre. Au centre de la salle principale, revêtue d'une tapisserie « à grands personnages » trônait une belle table dans le goût nouveau : faite de bois de chêne à pieds de biche et dessus de marbre, elle est évaluée 100 livres. Des hôtes nombreux pouvaient trouver place sur des sièges élégants et confortables : une duchesse de noyer garnie de clous dorés recouverte de velours d'Utrecht (estimée 60 livres), 8 fauteuils assortis, de couleur citron, 6 fauteuils et 6 chaises plus ordinaires. Deux quinolas à pieds de biche attendaient les joueurs. Mais le plus beau meuble de la salle était sans doute la pendule sur son piédestal évaluée 150 livres.

  • 75 Peut-être s'agissait-il de vin issu du cépage « Noble Joué » (cf. Brigitte Maillard, « Les contrat (...)
  • 76 Arch. dép. d'Indre-et-Loire, 3E 5/807/a.

31Le domaine était en partie consacré à la viticulture comme le montrent plusieurs constructions de la basse-cour : le pressoir, la brûlerie et le cellier où étaient conservées en décembre 1763 trente pièces de vin rouge et six de blanc de la dernière récolte ainsi qu'onze pièces de « vin vieux », c'est-à-dire celui de la récolte précédente75. La terre d'Yzernay comportait également un petit logement de trois pièces, plus un pressoir et un cellier, mais le maître n'y séjournait pas puisque des instruments aratoires sont entreposés dans la « salle » au moment de sa mort. Des domaines de La Bouchardière et Yzernay dépendaient les deux métairies du Grand et du Petit Vaugarny. Avec la vigne, l'élevage paraît avoir été l'activité essentielle de ces quatre exploitations puisqu'on y recense au total pas moins de 17 vaches et 116 ovins, l'ensemble du bétail étant l'entière propriété du maître76.

Des magistrats cultivés

  • 77 Rappelons que Tours était la seule ville de sa généralité à posséder un corps d'officier anoblissa (...)
  • 78 Le nombre exact des volumes est impossible à fournir en raison des dommages subis par le docu-ment (...)
  • 79 Vers la fin de l'inventaire le libraire se borne à mentionner en bloc des nombres de volumes (45, (...)

32Les Aubry, officiers importants à l'échelle locale et même à celle de la généralité77, étaient non seulement riches mais, naturellement, cultivés. Nous avons la chance de posséder les inventaires de bibliothèques appartenant à trois générations successives : celles de Léonor, décédé en 1706, de son fils Joseph (I) mort en 1739, et du neveu de celui-ci Joseph Jean qui disparaît en 1763. À les parcourir, une première surprise nous attend, la diminution progressive du nombre des ouvrages. Mais est-il si surprenant que ce soit Léonor, le plus ancien mais aussi le plus riche, qui possède le plus de livres ? Sa bibliothèque, en tout cas, est d'une importance et d'une qualité exceptionnelles à Tours. Elle comporte plus de 1811 volumes 78 ce qui représente un nombre de titres malheureusement impossible à déterminer car le libraire s'est borné à en citer 72279, ce qui est déjà tout à fait considérable. Les bibliothèques de ses descendants, tous deux maires de la ville, font à côté piètre figure, bien qu'elles soient encore respectables, avec 552 volumes et 225 titres pour celle de Joseph et 237 volumes soit 101 titres pour celle de Joseph Jean.

  • 80 Marcel Marion distingue les cinq thèmes suivants : histoire, théologie, belles-lettres, droit-juri (...)
  • 81 Contrairement à Marcel Marion, nous avons placé dans cette catégorie les histoires de l'Église, de (...)
  • 82 Exactement 36,4 % des 1811 volumes : 62 titres ou noms d'auteur n'ont pu être identifiés et surtou (...)

33Une autre différence majeure entre les trois bibliothèques ressort de la répartition des titres selon les thèmes qu'ils abordent. Reprenant avec quelques nuances la méthode adoptée par Marcel Marion pour le traitement des bibliothèques parisiennes du milieu du xviiie siècle80, nous constatons d'abord l'effondrement de la proportion des ouvrages relatifs à la théologie et plus largement à la religion81. Ils représentent plus de 36 % des titres possédés par Léonor contre à peine 15 % de ceux de Joseph et un peu plus de 8 % de ceux de Joseph Jean. Certes, nous avons pu identifier et classer la quasi-totalité des livres des deux bibliothèques les plus récentes alors que, pour la plus ancienne, nos calculs ne portent que sur 660 litres, soit environ un tiers du total82, mais les proportions auraient-elles été sensiblement différentes si nous avions connu précisément le sujet de tous les livres de Léonor ? Quoi qu'il en soit les chiffres bruts permettent de conclure à la grande richesse de sa bibliothèque dans le domaine religieux et à la pauvreté croissante de celles de ses descendants puisque de 239 titres identifiés dans cette catégorie en 1706 on passe à 32 en 1739 et à 8 seulement en 1763.

  • 83 Il s'agit du pasteur Jean Claude (1619-1687) grande figure de l'apologétique calviniste.

34Léonor possède une bonne partie des textes sacrés, non seulement la Bible en plusieurs exemplaires (neuf en français, en latin ou dans les deux langues parmi les volumes identifiés par le libraire), mais les écrits des principaux Pères de l'Église : saint Jean Chrysostome, saint Basile, saint Athanase, saint Grégoire de Naziance dans des éditions bilingues greclatin, en édition latine saint Ambroise, saint Augustin, saint Jérôme, et aussi des oeuvres de théologiens moins anciens comme saint Thomas ou Guillaume de Saint-Amour (xiiie siècle). Sa bibliothèque renferme également des vies de saints dont, on n'en est pas étonné, celle de saint Martin de Tours mais aussi celles p. 135. de saints modernes comme Thérèse d'Avila ou François Xavier, des ouvrages de liturgie, d'histoire des papes ou de l'Église (histoires générales ou histoires de l'Église de Tours). Nous retiendrons surtout la présence en nombre d'ouvrages d'apologétique catholique ou de combat contre le protestantisme ainsi que le révèlent certains titres, plus ou moins écorchés peut-être par le libraire : « Schisme des calvinistes », « Luther disciple du diable », « Le calvinisme convaincu », « Apologie pour les catholiques » « Réponse à M. Claude83 », « Conférence avec M. Claude », « L'hérésie convaincue », « Traité de la vray Eglise (sic) ». L'orientation idéologique de la bibliothèque religieuse de Léonor semble pencher nettement vers le jansénisme car elle recèle, outre une vie de saint Augustin, 12 ouvrages de ce Père de l'Église, les Essais de morale de Nicole, le Nouveau Testament de Mons auquel ce fidèle défenseur de Port-Royal collabora auprès de Le Maître de Sacy, les 31 volu-mes de la Bible de Sacy, une lettre de Saint-Cyran, etc. Malgré l'évident parti pris de cette bibliothèque, certains livres témoignent d'une volonté de s'in-former sur des croyances combattues, dont le moins étonnant n'est pas cet « alcoran » que l'on ne retrouve dans aucune des deux autres listes de livres.

  • 84 On ne peut manquer de poser la question d'une éventuelle transmission de livres d'une génération à (...)

35La modeste bibliothèque religieuse de Joseph (symboliquement on notera qu'elle ne contient que 4 exemplaires de la Bible et aucun écrit des Pères de l'Église) conserve une teinte fortement janséniste, ce dont on ne sera pas autrement étonné chez ce magistrat, avec la Bible de Sacy en deux éditions, l'une en 33 volumes, l'autre en deux seulement, les Essais de Morale de Nicole, des ouvrages d'Antoine Arnauld comme De la fréquente communion et la Perpétuité de la Foi ainsi qu'une Histoire des Juifs dont la traduction est due à un des frères du Grand Arnauld, Robert Arnauld d'Andilly. La tendance janséniste se retrouve dans la très pauvre bibliothèque religieuse de Joseph Jean avec le Nouveau Testament de Mons et la Perpétuité de la Foi84.

36Une autre caractéristique de la bibliothèque la plus ancienne est la place occupée par la catégorie regroupant les sciences et les arts : elle rassemble 121 titres soit 18,3 % de ceux que nous connaissons contre 20 dans la bibliothèque du premier tiers du xviiie siècle et 10 dans la plus récente (respectivement 9,3 et 10,3 %). Si l'on en juge d'après les titres identifiés, la curiosité d'esprit de Léonor Aubry était fort large, allant des sciences mathématiques - géométrie, astronomie ― à la philosophie (essentiellement les philosophes de l'Antiquité ― Aristote, Platon, Sénèque, Philon ―) en passant par l'architecture et la peinture, avec une très nette attirance pour la médecine - en y comprenant l'anatomie et la chirurgie — (18 titres) et surtout la botanique (47 titres) qui paraissent avoir été ses violons d'Ingres, les deux pouvant d'ailleurs se retrouver dans une commune préoccupation concernant la santé lorsqu'il s'agit de traités sur les plantes médicinales.

  • 85 En ce qui concerne la bibliothèque de Joseph Aubry, nous n'avons pas pris en compte pour le calcul (...)

37Après les différences, les convergences. On ne sera pas étonné de la place importante occupée dans chacune des bibliothèques de ces magistrats par les ouvrages de droit et de jurisprudence. Avec 18,3 % des titres identifiés, cette catégorie vient chez Léonor certes loin derrière les ouvrages religieux mais en deuxième position (ex aequo avec les sciences et arts85), tout comme chez Joseph où elle représente 25,2 % des livres, et chez Joseph Jean (22,7 %). Commun aussi le goût de l'histoire et de la géographie. Même si cette catégorie n'arrive qu'en quatrième position chez Léonor Aubry, avec 16,2 % des titres, elle est évidemment beaucoup plus fournie que dans les bibliothèques plus récentes. La part des histoires de l'Antiquité, qu'elles soient l'oeuvre d'auteurs modernes ou d'historiens de cette époque comme Xénophon, Tacite, Tite-Live, Suétone et autre Flavius Josèphe, est la plus importante, mais sans écraser celle de l'histoire médiévale et moderne, tandis que quelques livres traitant de l'Angleterre, de l'Espagne, des Turcs ou de « l'Occident » plaident pour une ouverture d'esprit vers l'étranger. La bibliothèque de Joseph se caractérise par un renversement des proportions entre histoire ancienne et moderne au profit de la seconde et un premier essor des récits de voyage, deux tendances qui s'amplifient chez Joseph Jean.

  • 86 À l'exception notable du dictionnaire de l'Académie qui pourrait cependant figurer parmi les ouvra (...)

38Toutefois dans les deux bibliothèques les plus récentes ce sont les belles-lettres qui se taillent la part du lion avec respectivement 28,8 % et 33 % des titres, soit 60 ouvrages pour la première et 32 pour la seconde. Les auteurs anciens et modernes sont représentés à part égale chez Joseph, avec une légère prédominance des modernes chez Joseph Jean. Dans ce domaine encore, bien que ne faisant guère plus du dixième des titres identifiés (10,9 %), les ouvrages entrant dans cette catégorie sont plus nombreux chez Léonor que chez ses descendants et sa bibliothèque paraît, à s'en tenir aux titres connus, aussi équilibrée que la leur entre auteurs anciens et modernes, avec un intérêt tout particulier pour les dictionnaires. Il possède pratiquement tous les dictionnaires français parus à son époque, de Nicot à Furetière en passant par Moreri et Richelet86, ainsi qu'une bonne douzaine de dictionnaires bilingues pour la traduction du grec, du latin et aussi de l'italien, la seule langue étrangère vivante à laquelle Léonor semble porter de l'intérêt, tout comme son petit-fils d'ailleurs.

  • 87 Élisabeth Labrousse et Robert Sauzet, « La lente mise en place de la réforme tridentine (1598-1661 (...)
  • 88 I. Ardouin-Weiss, Les protestants en Touraine..., p. 23-24.
  • 89 Arch. dép. d'Indre-et-Loire, 3 E 5/313 (notaire Charles Leroy). Un codicille du 26 avril 1647 conf (...)
  • 90 Selon I. Ardouin-Weiss, Les protestants en Touraine..., p. 23-24, Charles mis à part, l'entière de (...)
  • 91 Arch. dép. d'Indre-et-loire, 3 E 5/599 (notaire Ridet), testament de Joseph Aubry.
  • 92 Elles furent annoncées par toute la ville grâce à deux domestiques priés de rendre les visites de (...)

39L'orientation jansénisante des trois bibliothèques pousse à nous interroger sur la religion de la famille Aubry. Les ouvrages d'apologétique de Léonor, le fait qu'il possédait plusieurs livres ou pamphlets contre le protestantisme, porte à ranger sa famille dans le camp des catholiques intransigeants, voire des dévots, nombreux parmi les officiers, qui ont contribué au succès de la Réforme catholique87. Et pourtant les Aubry ont cotoyé le protestantisme et un des leurs, au moins, s'est même comporté en réformé convaincu. La raison en est le mariage de Gilles (I) avec Marie de Longuemort, de confession protestante88. Un de leurs fils, Charles, vécut dans cette religion. Il le proclame hautement dès le début du testament qu'il a fait rédiger par le notaire la veille de Noël 1646 : « Premièrement je loue et remercie mon Dieu mon créateur de la grâce qu'il m'a faict de m'avoir donné la connoissance de sa vérité ainsy qu'elle est enseignée dans les égli-ses réfformée de ce royaume et le prie qu'il me fasse cette faveur d'y persé-vérer constamment le reste de mes jours (sic) ». Par ailleurs Charles « lègue à l'église et ceux de la religion réfformée du lieu » où il décédera la somme de soixante livres tournois89. L'orientation calviniste ne semble pas avoir perduré dans la famille90, tous les enfants de Léonor Aubry, notamment, ayant été baptisés à l'église catholique. Cependant la tradition augustinienne à l'oeuvre aussi bien dans la Réforme que dans le jansénisme s'est perpétuée, à en juger par le contenu de la bibliothèque du lieutenant criminel ou encore par l'austérité des volontés testamentaires de son fils Joseph, qui demande qu'on l'« enterre sans grande cérémonie, qu'une tenture à la porte de l'église et autant à (sa) porte et qu'on (lui) donne une place dans le cimetierre (sic)91 ». Une telle austérité ne convenait pas à un maire en charge et, contrairement à son oncle, Joseph Jean eut droit à des obsèques en grande pompe92.

***

40Durant les deux derniers siècles de l'Ancien Régime, la famille Aubry, sans jamais quitter l'univers des officiers royaux, a déployé une activité considérable au service de son ascension sociale. Son premier but fut l'intégration à la noblesse, un but poursuivi avec une certaine anxiété par des hommes longtemps taraudés par le doute né d'origines bourgeoises relativement récentes, contre lequel ils se prémunirent en multipliant l'achat des charges anoblissantes. Ce but a été pleinement atteint, les générations pouvant orner leur nom, sans craindre la réprobation publique, du titre d'écuyer dans un premier temps, puis de celui de chevalier, un des leurs y ajoutant même un titre de marquis dès l'époque de Louis XIV. Au service de cette ambition, la famille accumula une richesse considérable grâce, sans doute pour une faible partie, au cumul des offices, plus sûrement aux maria-ges bien calculés, aux revenus fonciers et seigneuriaux de domaines ruraux que chaque génération avait le souci d'acquérir, et aussi grâce aux intérêts des nombreux et importants prêts aux particuliers ou à l'État (les rentes sur l'hôtel de ville de Paris) que révèlent les inventaires après décès. L'enrichissement atteignit son sommet en même temps que le rang social dans la deuxième moitié du xviie siècle avec Léonor, maître en la chambre des comptes de Paris et plus que millionnaire en livres tournois. Après lui, et pour ce que nous en savons, la fortune de chaque couple alla en dimi-nuant, en raison des partages entre des enfants relativement nombreux à survivre aux parents. Par contre le rang paraît maintenu jusqu'à la Révolution, puisqu'après le maître des comptes on trouve des conseillers au parlement parmi les fils et gendres.

  • 93 C. Petitfrère, « Les officiers... », p. 138.
  • 94 F. Caillou, Une administration..., p. 661-666.
  • 95 Le registre des délibérations du corps de ville ne permet pas de savoir si Joseph Jean a, une fois (...)

41En même temps que la famille trouvait sa place dans la noblesse touran-gelle et au plus haut niveau de l'élite urbaine, elle montrait une belle fidé-lité à l'hôtel de ville de la capitale provinciale. Le prestige dû à son rang explique pour une part sa longévité municipale, l'intelligente politique des alliances faisant le reste puisque, rappelons-le, les Aubry ont compté au moins huit familles échevinales parmi leurs alliés les plus proches. Cette fidélité est à souligner car si la recherche, ou l'acceptation, d'une place de maire et même d'échevin allait de soi au xviie siècle pour les plus importants des officiers du roi, trésoriers de France et conseillers au présidial93, il n'en allait plus de même après que « l'invasion marchande » du corps de ville dans le premier xviiie siècle eût quelque peu dévalorisé ces fonctions. En fait la fidélité municipale des Aubry connut bien quelque faiblesse au temps de Louis XV. Joseph Jean Aubry avait été désigné une première fois par le gouverneur, le comte de Charolais, pour occuper la place de maire après les élections de 1754, mais il avait refusé la charge en arguant de l'incompatibilité de cette fonction avec l'office de trésorier de France. C'était la position officielle du bureau des finances qui, affirmant avoir le rang des cours souveraines, prétendait jouir de leur privilège de dispense des charges municipales, qui s'étaient quelque peu démocratisées donc devenues indignes d'elles94. Pourtant, choisi à nouveau pour maire par Choiseul, en 1762, il accepta cette fois la place. Sans doute Joseph Jean a-t-il été tiraillé entre la solidarité de corps et l'intérêt traditionnel de la famille Aubry pour la gestion urbaine95. N'est-il pas significatif cependant qu'il ait choisi de renouer avec la tradition municipale, comme son fils, Joseph Robert, devait encore le faire aux lendemains de la Révolution ?

Notes

1 Jacques Maillard, Le pouvoir municipal à Angers de 1657 à 1789, Angers, PU.A., 1984, t. 1, p. 234.

2 Claude Petitfrère, « Les maires de Tours aux xviie-xviiie siècles : patriciens ou hommes nouveaux ? », Construction, reproduction et représentation des patriciats urbains de l'Antiquité au xxe siècle, (C. Petitfrère dir.), Tours, Cehvi, 1999, p. 123-131. Même point de vue chez Guy Saupin, Nantes au xviie siècle. Vie politique et société urbaine, Rennes, P.U.R., 1996, p. 323-376.

3 Terme utilisé par Philippe Guignet (Le pouvoir dans la ville au xviie siècle. Pratiques politiques, nota-bilité et éthique sociale de part et d'autre de la frontière franco-belge, Paris, E.H.E.S.S., 1990, p. 389 et 395) et repris par Guy Saupin, « Les oligarchies municipales en France sous l'Ancien Régime : réflexion méthodologique sur l'analyse historique de leur reproduction à partir de l'exemple de Nantes », Construction, reproduction et représentation des patriciats urbains..., p. 95-112.

4 C. Petitfrère, « Configuration des réseaux familiaux : l'exemple de Tours (vers 1589-1789) », contri-bution à Les villes de l'Ouest français aux temps modernes : histoire sociale du politique (dir. G. Saupin), à paraître. Le présent article doit beaucoup aux pages consacrées à la famille Aubry par François Caillou dans sa thèse, Une administration royale d'Ancien Régime : le bureau des finances de la géné-ralité de Tours (1577-1790), Université de Tours, 2002, notamment vol. 3, p. 508-515 et vol. 5, p. 1013-1015.

5 La période dénommée « phase échevinale » par G. Saupin(« Les oligarchies municipales... », p. 110) est celle qui s'étend de l'arrivée à l'hôtel commun du premier représentant de la famille au départ de son dernier représentant. Il appelle « temps échevinal » le temps de présence réelle cumulé de chaque membre de la famille. Pour les Aubry ce « temps échevinal » est relativement faible, 38 années.

6 Selon J.-X. Carré De Busserolle, Armoriai général de Touraine, 1884, rééd. Laffitte, 1978, p. 81.

7 Arch. dép. d'Indre-et-Loire, 3 E 9/247 (notaire René Luillier) : transaction entre les héritiers de Gilles Aubry et son épouse Marie de Longuemort pour le partage de leurs biens immobiliers (20 juillet 1658).

8 Cette supposition est empruntée à Idelette Ardouin-Weiss, Les protestants en Touraine (Les ancien-nes familles réformées de Tours aux xve et xvie siècles), Tours, Centre Généalogique de Touraine, t. 1 : A et B, s.d., p. 23-24, qui tire argument de l'absence de toute filiation pour l'époux dans son contrat de mariage avec Marie de Longuemort.

9 Arch. dép. d'Indre-et-Loire, 3 E 5/247 (notaire Charles Bertrand), 25 octobre 1589.

10 Arch. mun. de Tours, BB 31 - f° 343 r°.

11 Gilles (I) Aubry est décédé le 5 août 1624 selon les dires de son plus jeune fils (« Avertissement de Charles Aubry escuier sr de la Boutière ») annexé à la transaction référencée supra, note 7. Sa dernière apparition dans une assemblée du corps de ville date du 26 juin 1624 (Arch. mun. de Tours, BB 34 f° 77 v°), et le 28 octobre de cette année, l'assemblée électorale propose au roi un notable habi-tant de Tours pour remplacer le défunt (Arch. mun. de Tours, BB 34 f° 125 r°). C'est par lettre du 14 novembre de cette année que le roi nomme son successeur (Arch. mun. de Tours, BB 34 f° 135 r°, assemblée du 21 novembre 1624).

12 Sur l'acte de transaction de 1658, non seulement les trois enfants survivants de Gilles (I) - Gilles (II), Adam et Charles - se sont fait donner le titre d'écuyer, mais ils l'ont fait donner rétrospective-ment à leur père.

13 À Tours, les charges municipales anoblirent jusqu'en 1657, date de l'abolition complète de ce privi-lège tant pour les maires que pour les échevins, contrairement à Angers où pareille suppression inter-vint en 1666 mais où le corps de ville put obtenir en 1670 le rétablissement du privilège pour les maires à condition qu'ils aient servi quatre années consécutives (J. Maillard, Le pouvoir municipal à Angers..., t. I, p. 38-39).

14 En 1729 encore, lorsqu'il rédige son testament, le lieutenant-général Joseph Aubry n'est pas sûr de la noblesse pleine et entière de sa famille puisqu'il écrit, avec une scrupuleuse honnêteté — qui a d'ailleurs pour objet d'épargner procès ou brouilles dans la famille - qu'il désire que ses biens soient partagés à égalité entre ses héritiers conformément à la coutume de Touraine : « je suis très instruit que nous ne sommes point d'une condition noble à partager noblement, n'estant en mon particu-lier qu'un annobli (sic) ou tout au plus un noble dont la noblesse ne demande point le partage noble ». Arch. dép. d'Indre-et-Loire 3 E 5/599 (notaire Ridet), testament olographe de Joseph Aubry déposé chez le notaire le 20 avril 1739, jour de son décès, par sa veuve Françoise Élisabeth Aveline. Ce testament a été rédigé à Tours, le 25 février 1729.

15 L'unique enfant du couple formé par Adam Aubry et Françoise Favereau qui semble parvenu à l'âge adulte, Gilles (IV), sieur de Belair, a eu une destinée relativement médiocre (F. Caillou, Une admi-nistration..., p. 509). En 1688, il épouse la fille d'un simple marchand maître teinturier en soie (Arch. dép. d'Indre-et-Loire 3 E 8 194, notaire Venier, 4 septembre, contrat de mariage de Gilles Aubry et Marguerite Benoist, veuve d'Antoine Boutard, bourgeois de Tours).

16 Adam Aubry, baptisé le 29 décembre 1596 avait trois ans de moins que Gilles.

17 Sur l'acte de baptême de son fils Gilles (III), né de Catherine Tonnereau, célébré le 3 mai 1630 à Saint-Pierre-du-Chardonnet, la formule noble homme est barrée et à la suite du nom paternel figure le titre d'écuyer. Par contre ce titre ne figure pas sur l'acte de baptême du petit Léonor.

18 Gilles (II) Aubry épousa en 1620 Catherine Tonnereau et en secondes noces Françoise Buret le 13 avril 1649. Catherine Tonnereau était la fille de Jacques Tonnereau, sieur de Réchaussé et de La Roche du Pin et de Catherine Lorin (ou Loryn), Arch. dép. d'Indre-et-Loire, 3 E 2/62 (notaire Vincent Patrix) contrat de mariage, le 8 mai 1620, de Gilles (II) Aubry et Catherine Tonnereau. Cette dernière devait hériter de la terre de Réchaussé, dans la paroisse de Saint-Antoine-du-Rocher, évaluée 13 500 livres, Arch. dép. d'Indre-et-Loire, 3 E 2/70 (notaire Portays), partage des biens du couple Jacques Tonnereau-Catherine Lorin (14 mars 1634).

19 Les Leblanc de La Vallière avaient exercé plusieurs charges à la Cour depuis François Ier. L'époux de Françoise de Bonneau, Jean de Labaume Leblanc était président au bureau des finances de Tours et avait été maire de la ville en 1618-1619. C'est le grand-père de Louise de La Vallière.

20 Sur ce total, 3 875 livres concernaient en fait les trois-quarts d'une charge de commissaire des mont-res de la prévôté générale de Tours rattachée à celle de lieutenant-criminel, Léonor possédait aussi une charge de contrôleur provincial ancien des décimes de la généralité de Tours qui devait lui rappor-ter quelque 2236 livres à la fin de sa vie (Arch. dép. d'Indre-et-Loire, 2B/1015, inventaire de Marie Bigot, veuve de Léonor Aubry (octobre-décembre 1710), article 101 des titres et papiers).

21 Arch. mun. de Tours, EE 9 : copie des provisions de l'office de secrétaire du roi accordé à Léonor Aubry, lieutenant-général criminel le 11 mars 1677.

22 F. Caillou, Une administration..., p. 485. Léonor Aubry revendit l'année suivante son office de lieutenant-criminel pour 38 000 livres, perdant par conséquent plus de 18 000 livres par rapport au prix d'achat. Quant à la charge de maître ordinaire en la chambre des comptes de Paris, elle fut revendue pour 110 000 livres à la mort de son titulaire (Arch. dép. d'Indre-et-Loire, 2B 1015, inven-taire de Marie Bigot, article 48 des titres et papiers).

23 Arch. dép. d'Indre-et-Loire, 3 E 2/251 (notaire Vacher, 3 février 1665), contrat de mariage de Léonor Aubry, écuyer, sieur de Réchaussé et de la Grande Gitonnière, et de Marie Bigot, fille de Charles Bigot, lieutenant criminel au présidial et de Marie Foulon.

24 Charles Bigot avait épousé le 4 juin 1640 à Saint-Saturnin Marie Foulon, fille de Louis Foulon conseiller au présidial et de Charlotte Delucz.

25 Le contrat de mariage fut signé le 1er juillet 1695 à Paris. Marguerite reçut une dot de 120 000 livres (Arch. dép. d'Indre-et-Loire, 2B 1015, inventaire de Marie Bigot, article 95 des titres et papiers).

26 Alexandre Claude a été baptisé à Saint-Venant le 23 septembre 1674. Sur la famille Le Feuvre de La Falluère, voir F. Caillou, Une administration..., vol. 5, p. 1080.

27 F. Caillou, Une administration..., p. 1080. François Paris avait épousé Madeleine Forget, dont trois ancêtres avaient siégé à l'hôtel de ville : Jean, échevin de 1589 au moins à 1612 et maire en 1598-1599, César, échevin de 1589 au moins à 1619 semble-t-il et maire en 1592-1594 et Pierre Forget, maire en 1530-1531 (Les maires de Tours du xve au xixe siècle. Atelier du Centre Généalogique de Touraine, Tours, s.d., p. 60-61). La formule « 1589 au moins » s'explique par l'absence de docu-ments susceptibles de donner des informations précises sur la composition du corps de ville de Tours antérieurement aux lettres patentes de mai 1589 qui supprimèrent l'ancienne municipalité et nommè-rent de nouveaux magistrats. Ce « coup de majesté » d'Henri III eut essentiellement des raisons poli-tiques, le ralliement à la Ligue de certains membres de l'ancienne municipalité dont le maire Gilles Duverger.

28 Nous ne connaissons pas la date du baptême de Joseph Aubry, mais il avait 69 ans lors de son décès selon l'acte de sépulture du 21 avril 1739 à Saint-Hilaire, ce qui le ferait naître en 1670. Il était mort la veille selon l'acte de dépôt de son testament (Arch. dép. d'Indre-et-Loire, 3 E 5/599 notaire Ridet).

29 Comme dans beaucoup d'autres villes, le maire était choisi par le roi (en fait par le gouverneur) sur une liste de trois noms issus du scrutin. La date des élections municipales resta fixée au 28 octobre, jour de la Saint Simon et de la Saint Jude, jusqu'à la réforme de 1724, qui fixa la date des élections au premier dimanche de juillet.

30 Joseph Aubry a donné sa démission de sa place d'échevin tout en restant maire (Arch. mun. de Tours, BB 63, f° 122 v°, séance du 31 juillet 1720).

31 C. Petitfrère, « "Vox populi, vox régis ?" L'élection des maires de Tours aux xviie et xviiie siècles », Annales de Bretagne et des Pays de l'Ouest, 1999, p. 47-64 ; F. Caillou, « Une famille tourangelle sous l'Ancien Régime : les Segoin », Annales de Bretagne et des Pays de l'Ouest, 1995, p. 25-41.

32 Françoise Élisabeth Aveline était la petite-fille de René Aveline trésorier de France à Tours, frère du maire de 1689-1690, Philibert Aveline, et fils d'un échevin de la ville d'Angers, René Aveline, ces deux derniers également trésoriers de France. (F. Caillou, Une administration..., p. 1016-1017).

33 Baptisé le 13 janvier 1685 à Saint-Hilaire, Joseph (II) hérita de la seigneurie du Plessis après le décès de son frère en 1739.

34 Arch. mun. de Tours, BB 68, f° 54. Thomas n'appartenait pas à la famille Cottereau qui s'illustra au corps de ville de Tours en lui donnant cinq maires. Cf. C. Petitfrère, « Vox populi, vox régis ?... » et « Configuration des réseaux familiaux : l'exemple de Tours... ».

35 Arch. mun. de Tours, BB 68, f° 54 v°, 4 juillet 1762.

36 La vente des offices municipaux fut, au début du xviie siècle, l'occasion de ce que nous avons appelé « l'invasion marchande du corps de ville » (C. Petitfrère, « Les officiers dans le corps de ville de Tours aux xviie et xviiie siècles », Les officiers « moyens » à l'époque moderne. France, Angleterre, Espagne (Études réunies par Michel Cassan), Limoges, Pulim, 1998, p. 121-138).

37 Ce double patronyme est, selon une pratique fort usitée dans la bonne société tourangelle, une consé-quence de son mariage, le 28 janvier 1793, avec Alexandrine Julienne Patas, fille de Julien Patas et Marie Bruley. Alexandrine Julienne, baptisée le 3 juillet 1769 à Saint-Hilaire, est vraisemblablement l'arrière-petite-fille de Nicolas Christophe Patas, un marchand qui accéda à l'échevinage en 1701.

38 C. Petitfrère « Configuration... ».

39 Arch. dép. d'Indre-et-Loire, 3 E 5/247 (notaire Charles Bertrand), contrat de mariage de Gilles (I) Aubry et Marie de Longuemort, 25 octobre 1589. La valeur de la seigneurie de La Bouttière (paroisse de Saint-Senoch ?) n'est pas indiquée dans le document.

40 Arch. dép. d'Indre-et-Loire, 3 E 9/247 (notaire René Luillier) « Mémoire des appretiations des immeubles, contracts et autres effets de la succession de defunt monsieur et mademoiselle de La Bouttière qui sont à partager entre les sieurs de Villiers, du Meslé et de Labouttière (sic) », figurant à la suite de la transaction effectuée
par leurs enfants en règlement de l'héritage, en 1658, c'est-à-dire longtemps après la mort, qui survint pour le mari en 1624 et pour l'épouse en 1632.

41 Arch. dép. d'Indre-et-Loire, 3 E 2/62 (notaire Vincent Patrix), contrat de mariage de Gilles (II) Aubry et Catherine Tonnereau, le 8 mai 1620.

42 Arch. dép. d'Indre-et-Loire, 3 E 2/70 (notaire Portays), partage des biens du couple Jacques Tonnereau-Catherine Lorin (commencé lel4 mars 1634). Le total du lot échu à l'épouse de Gilles (II) Aubry se monte à 15376 livres 10 sols.

43 Léonor avait au moins une demi-soeur, fille de la seconde épouse de Gilles (II), Françoise Buret (F. Caillou, Une administration..., p. 510).

44 43292 l 16s 9d de rentes, le surplus, soit 16707 livres 3 sols 3 deniers, payé comptant. Arch. dép. d'Indre-et-Loire, 3 E 2/251 (notaire Vacher), contrat de mariage du 3 février 1665. L'apport du mari n'est pas précisé, si ce n'est pour les 12 000 livres entrant en communauté - une somme égale à celle de l'épouse - qui font penser à une fortune déjà conséquente.

45 F. Caillou, Une administration..., p 511-512. Un bel exemple de cette participation aux traités d'un officier de province, un simple greffier d'une élection marchoise, a été donné par Michel Cassan, « Isaac Chorllon, un officier « moyen » de finance au xviie siècle », Offices et officiers « moyens » en France à l'époque moderne. Profession, culture (dir. M. Cassan), Limoges, Pulim, 2004, p. 95-126.

46 F. Caillou, Une administration..., p 511-512.

47 Cf le tableau réalisé par F. Caillou, Une administration..., p. 512. Les biens ont été divisés en cinq lots entre Joseph Aubry, sieur du Plessis, lieutenant-général de Touraine, Gilles (V) Aubry, maître en la chambre des comptes de Paris, Louise-Thérèse Aubry, épouse d'Alexandre Claude Lefeuvre de La Falluère, grand maître des eaux et forêts au département de Paris, Joseph Aubry, sieur de La Gitonnière, tous enfants du couple défunt, et les petites-filles Marguerite et Marie Henriette Hénin, enfants mineures des défunts Marguerite Aubry et Eustache Hénin, conseiller au parlement de Paris. Un sixième lot aurait pu être dévolu à un autre fils de Léonor Aubry et Marie Bigot, Charles Léonor, conseiller au parlement et commissaire aux requêtes du palais, si celui-ci n'avait pas mieux aimé s'en tenir aux 300 000 livres qui lui avaient été données dans son contrat de mariage. Le partage fait devant le notaire Charles Boisquet, et portant in fine la date du 26 juillet 1711, est consultable aux Arch. dép. d'Indre-et-Loire sous la cote 3 E 5/570.

48 Arch. dép. d'Indre-et-Loire 2B/993, inventaire après décès de Léonor Aubry fait par le lieutenant-particulier Pierre Decop (daté en son commencement du 12 février 1706), art. 17 des titres et papiers.

49 Arch. dép. d'Indre-et-Loire, 3E6/510 (notaire Estevou). Le lieu et closerie des Pentes, comportant un corps de logis à deux étages et diverses pièces de terre, a été acquis le 11 juin 1691 pour un total de 9855 livres 17 sols.

50 L'inventaire réalisé par le lieutenant particulier Pierre Decop après le décès de Marie Bigot du 9 au 30 décembre 1710, soit quatre ans seulement après la mort de Léonor Aubry recense 17 tableaux accrochés aux murs et non plus 12 (soit 15 dans la salle et deux dans un cabinet du petit corps de logis regardant sur la cour) tandis qu'une dizaine d'autres, tous à sujet religieux à une exception près, dorment dans une caisse de sapin exilée dans une chambre en galetas du troisième corps de logis situé au bout de la cour. Arch. dép. d'Indre-et-Loire, 2B 1015.

51 L'inventaire de Marie Bigot fait état d'un véhicule supplémentaire, un chariot à quatre roues.

52 Par le nombre et la qualité de ses domestiques, la maison devait occuper à Tours le haut du pavé, derrière celles de l'archevêque et, sans doute, de l'intendant (C. Petitfrère, L'oeil du maître. Maîtres et serviteurs de l'époque classique au romantisme, Bruxelles, Complexe, 1986, p. 32). Après la mort de son mari, la veuve Aubry n'a conservé, si l'on en croit les renseignements fournis par son inven-taire après décès, que quatre domestiques : la femme de chambre, la cuisinière, un cocher et un seul laquais.

53 Arch. dép. d'Indre-et-Loire, 2B 993, inventaire après décès de Léonor Aubry.

54 Charles Léonor, né en février 1666, fut ondoyé le 15 et reçut les rites complémentaires du baptême le 27, selon l'acte figurant dans le registre paroissial de Saint-Pierre du Boile. Il se vit attribuer par son père une charge de conseiller au parlement de Paris acquise pour 100 000 livres en 1690. Il obtiendra ultérieurement le titre de marquis de Castelnau (F. Caillou Une administration..., p. 512).

55 Arch. nat., Minutier central, XLIX/436 (notaire Doyen), acte du 29 juin 1706 communiqué par François Caillou que nous remercions ici.

56 Arch. dép. d'Indre-et-Loire 3E 8 (notaire Venier).

57 Le tout se montant, comme les quatre autres parts d'héritage, à 58621 livres 3 sols 5 deniers. (Arch. dép. d'Indre-et-Loire, 3 E 5/570 (notaire Boisquet), partage des biens de Léonor Aubry et Marie Bigot).

58 Arch. dép. d'Indre-et-Loire, 3 E 5/599 (notaire Ridet), inventaire après décès de Joseph Aubry, articles AAAA et HHH des titres et papiers.

59 Ibid., article GGGG des titres et papiers.

60 Rappelons toutefois que la valeur de la monnaie de compte a subi d'importantes variations jusqu'à sa stabilisation de 1726.

61 Sont aussi représentés Michel-Ange, Rubens, Jacques Callot, Le Titien, Polidoro, Mignard (Pierre ?). Le goût de Joseph Aubry semble très « classique », aucun dessinateur ou peintre du xviiie siècle n'ayant été nommé dans l'inventaire, mais tous les auteurs n'ont pas été désignés et peut-être quelques artistes contemporains figurent-il parmi les auteurs de huit autres estampes collées sur toile ou conser-vées, non collées, dans une simple boîte.

62 Arch. dép. d'Indre-et-Loire, 3E 5/599 (notaire Ridet), testament de Joseph Aubry. Les domestiques sont présents à l'ouverture du testament car ils doivent se partager un legs de 1 000 livres.

63 Le métayer est de moitié pour les agneaux et pour deux des veaux.

64 Huit ouvrages, soit 20 volumes en tout, sont rangés dans une armoire de chêne du vestibule, dont « les oeuvres de Molière » en huit tomes. Nous ne les avons pas pris en compte dans le dénombre-ment des livres de la bibliothèque de Joseph Aubry non plus que les « quelques livres de dévotion » trouvés dans un petite armoire-bibliothèque de la chambre de la dame Aubry.

65 F. Caillou, Une administration..., p. 1014.

66 Arch. dép. d'Indre-et-Loire, 3E 5/803 (notaire Carreau), acte du 5 juillet 1749. Le mariage de Joseph Jean et de Catherine Verrier a été célébré deux jours plus tard à Notre-Dame de l'Ecrignole. L'hôtel patrimonial de la rue de la Scellerie a été acquis le 18 janvier 1740 par le premier président Joseph Aubry de l'héritage de son frère le lieutenant-général, décédé l'année précédente, pour 14 000 livres à la suite d'une vente sur licitation entre les héritiers. La vente avait été organisée parce que la maison ne pouvait se diviser « commodément ni sans perte notable » ; le prix de la vente fut partagé entre les co-héritiers battus lors des enchères (Arch. dép. d'Indre-et-Loire, 3E 5/600, notaire Carreau).

67 Les dots sont déséquilibrées puisque celle de l'épouse est près de deux fois supérieure à celle du mari : on peut penser qu'il s'agissait pour le beau-père, riche négociant, de « rattraper » l'infériorité du rang de sa famille. Sur la dot de la future 75 000 livres ont été versées le jour du contrat, en deniers comptant pour 60 000 livres, le reste représentant la valeur des bijoux, diamants, meubles et autres effets en nature de la jeune femme évalués 15 000 livres. Les 20 000 livres restantes devaient être payées dans les deux ans (Arch. dép. d'Indre-et-Loire, 3E 5/803, notaire Carreau, acte du 5 juillet 1749). La liste des diamants et bijoux n'est pas fournie. Elle est vraisemblablement proche de celle que l'on trouve quatorze années plus tard dans l'inventaire après décès de Joseph Jean. Il s'agit alors d'une paire de boucles d'oreille à brillants (évaluée 2 000 livres par le joaillier convoqué dans ce but), un anneau accompagné de sa pendeloque, le tout à brillants (2 700 livres), une montre à répétition à boîte d'or, sa chaîne de cuivre doré et son boîtier couvert de chagrin garni de cuivre doré (300 livres), un étui d'or garni de son étui de chagrin vert (sic) (120 livres), un porte-crayon en or et son étui également couvert de chagrin vert (21 livres), un tire-bouchon à poignée de nacre et de perles garni de son étui en or avec dessus de chagrin vert et un flacon de cristal garni en or et son inévitable étui de chagrin vert (15 livres pour chacun de ces deux objets). Le tout représente 5 171 livres (Arch. dép. d'Indre-et-Loire, 3 E 5/807/a, notaire Carreau, inventaire commencé le 28 décembre 1763)

68 Arch. dép. d'Indre-et-Loire, 3E5/807/a, articles N et R des titres et papiers, et 3 E 8/501 (notaire Gervaize), 17 juillet 1759, contrat d'acquêt d'Yzernay et du Breuil. Le contrat d'acquêt de La Bouchardière ne figure pas dans les liasses 3 E 8/497 et 498 du notaire Gervaize-Pallu relatives à l'année 1757.

69 Le camelot est une étoffe fine, non croisée, de poils de chèvre ou de laine ; la calmande ou cale-mande une étoffe de laine commune (Marcel Lachiver, Dictionnaire du monde rural. Les mots du passé, Paris, Fayard, 1997).

70 Arch. dép. d'Indre-et-Loire, 3E5/807/a.

71 Un premier enfant, déjà prénommé Joseph Robert, né et baptisé le 19 octobre 1750 à Saint-Venant y avait été inhumé deux jours plus tard.

72 Ceci ressort de la liste des dettes passives de la succession de Joseph Jean (Arch. dép. d'Indre-et-Loire, 3E 5/807/a). Les trois enfants ont été baptisés à Saint-Hilaire, Joseph Robert le 25 novem-bre 1751, Thérèse Madeleine Jeanne le 22 juillet 1754 et Jean Charles deux ans plus tard jour pour jour. Ce dernier mourra en juillet 1765. Cf aussi F. Caillou, Une administration..., p. 1014.

73 Ce détail ne laisse pas d'être étonnant et sujet à caution, étant donné le souci de Joseph Jean et de son épouse d'afficher leur rang.

74 Malheureusement le domaine du Plessis ne figure pas dans l'inventaire après décès de Joseph Jean car ce bien ne devait pas être pris en compte dans le partage entre les héritiers : Joseph Robert Aubry en sa qualité d'aîné noble, héritait automatiquement, selon la coutume de Touraine, de la princi-pale terre et seigneurie de la succession en vertu de son droit d'aînesse et préciput.

75 Peut-être s'agissait-il de vin issu du cépage « Noble Joué » (cf. Brigitte Maillard, « Les contrats de location des vignes dans les pays de la Loire moyenne au xviiie siècle », Vivre en Touraine au xviiie siècle, Textes rassemblés par Annie Antoine, Rennes, P.U.R., 2003, p. 121-133).

76 Arch. dép. d'Indre-et-Loire, 3E 5/807/a.

77 Rappelons que Tours était la seule ville de sa généralité à posséder un corps d'officier anoblissant, le bureau des finances, dont furent membres Joseph (II) Aubry, son fils Joseph Jean et son petit-fils Joseph Robert.

78 Le nombre exact des volumes est impossible à fournir en raison des dommages subis par le docu-ment sur la bordure de certaines de ses pages. Pour une époque comparable, les années 1697-1698, la bibliothèque la plus importante recensée par Jean Quéniart dans ses échantillons relatifs à neuf villes de l'Ouest ne comporte que 298 livres (Culture et Société Urbaines dans la France de l'Ouest au xviie siècle, Paris, Klincksieck, 1978, p. 228). Parmi les 54 bibliothèques de Tours étudiées par Armelle Le Beherec pour la seconde moitié du xviiie siècle, cinq seulement ont plus de 800 volumes mes, la plus importante étant celle du lieutenant de police Valentin Loiseau décédé en 1788 avec 1 556 livres (Les bibliothèques privées en Touraine dans la seconde moitié du xviiie siècle, maîtrise, Tours, 1994, t. 1, p. 31 et p. 75).

79 Vers la fin de l'inventaire le libraire se borne à mentionner en bloc des nombres de volumes (45, 109 etc.) « sur toute sorte de matières ».

80 Marcel Marion distingue les cinq thèmes suivants : histoire, théologie, belles-lettres, droit-jurispru-dence, sciences et arts, Les bibliothèques privées à Paris au milieu du xviiie siècle, Paris, Bib. Nat, 1978,

81 Contrairement à Marcel Marion, nous avons placé dans cette catégorie les histoires de l'Église, des papes ou des saints.

82 Exactement 36,4 % des 1811 volumes : 62 titres ou noms d'auteur n'ont pu être identifiés et surtout le libraire a omis de mentionner les titres ou noms d'auteur de 1 089 volumes qui ne représentent cependant pas autant d'ouvrages car lorsque, vers la fin de la liste, il inventorie les volumes de petit format (in 8°, in 12° voire certains in 4°) il compte les volumes et non les ouvrages.

83 Il s'agit du pasteur Jean Claude (1619-1687) grande figure de l'apologétique calviniste.

84 On ne peut manquer de poser la question d'une éventuelle transmission de livres d'une génération à l'autre, mais sans pouvoir apporter de réponse.

85 En ce qui concerne la bibliothèque de Joseph Aubry, nous n'avons pas pris en compte pour le calcul du pourcentage représenté par les « sciences et arts » les recueils d'estampes évoqués ci-dessus avec les tableaux.

86 À l'exception notable du dictionnaire de l'Académie qui pourrait cependant figurer parmi les ouvra-ges dont le libraire n'a pas pris la peine de donner les titres.

87 Élisabeth Labrousse et Robert Sauzet, « La lente mise en place de la réforme tridentine (1598-1661), Histoire de la France religieuse, t. 2, Du christianisme flamboyant à l'aube des Lumières (xive-xviiie siècle) (dir. François Lebrun), Paris, Le Seuil, 1988, p. 418.

88 I. Ardouin-Weiss, Les protestants en Touraine..., p. 23-24.

89 Arch. dép. d'Indre-et-Loire, 3 E 5/313 (notaire Charles Leroy). Un codicille du 26 avril 1647 confirme cette donation, ainsi qu'une rente de 100 livres par an à sa fille naturelle Charlotte, née le 10 mars 1645, jusqu'à ce qu'elle se marie ou ait atteint sa majorité (25 ans). Au contraire ce codi-cille annule le joli legs fait à la servante de Charles, Julienne Voisin qui a quitté son service, de tous ses meubles meublants dans quelque lieu qu'ils puissent se trouver. Julienne Voisin était-elle la mère de Charlotte ?

90 Selon I. Ardouin-Weiss, Les protestants en Touraine..., p. 23-24, Charles mis à part, l'entière descendance de Gilles (I) Aubry et Marie de Longuemort est catholique.

91 Arch. dép. d'Indre-et-loire, 3 E 5/599 (notaire Ridet), testament de Joseph Aubry.

92 Elles furent annoncées par toute la ville grâce à deux domestiques priés de rendre les visites de deuil aux notabilités, et aux 1 500 billets d'enterrement distribués à de moindres personnages. Le corps fut mené à l'église par six porteurs accompagnés de porteurs de chandeliers, torches et bénitiers. Le coût total des obsèques s'éleva à plus de 627 livres : 451 livres 19 sols 6 deniers avaient été réglées au moment de l'inventaire auxquelles s'ajoute le montant des dettes passives : 55 livres 10 sols dues à un marchand cirier et 120 livres à un autre marchand pour la tenture et le catafalque (Arch. dép. d'Indre-et-Loire, 3E 5/807/a). Les frais furent supportés par la famille et non par le corps de ville.

93 C. Petitfrère, « Les officiers... », p. 138.

94 F. Caillou, Une administration..., p. 661-666.

95 Le registre des délibérations du corps de ville ne permet pas de savoir si Joseph Jean a, une fois encore, hésité à accepter la place. Elu le 4 juillet en première position ex aequo avec l'avocat Thomas Cottereau, il est choisi comme maire par le gouverneur Choiseul le 13 de ce mois, l'échevinage dési-gne le 17 deux des siens pour annoncer à l'élu sa nomination et le 27 ces députés font part à leurs collègues du désir de Joseph Jean de prêter le serment traditionnel et d'être installé le dimanche 1er août (Arch. mun. de Tours, BB 54 f° 59 r°, 61 r°, 62 r°).

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