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  • Chapitre XVII. Munich 1972
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    Plan

    Plan détaillé Texte intégral La large victoire de Munich sur Madrid et Montréal Waldi le teckel et le spectacle conservateur des jeunesses du monde Les mises en scène de l’Ostpolitik et du mariage d’Olga et Harold Le déni de Brundage face à l’attentat contre la délégation israélienne Des concessions aux sportives en athlétisme et l’introduction du canoë slalom Les retours du tir à l’arc et du handball La revanche soviétique sur les États-Unis Le sport est-allemand et le dopage d’État sous le contrôle de la Stasi Boxeurs de Colombie et du Niger, et premiers médaillés nord-coréens Lord Killanin : un homme de médias conservateur-libéral Bibliographie

    Les Jeux olympiques de 1892 à 2024

    Ce livre est recensé par

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    Table des matières

    Chapitre XVII. Munich 1972

    Une impossible Détente sportive

    p. 211-222

    Texte intégral La large victoire de Munich sur Madrid et Montréal Waldi le teckel et le spectacle conservateur des jeunesses du monde Les mises en scène de l’Ostpolitik et du mariage d’Olga et Harold Le déni de Brundage face à l’attentat contre la délégation israélienne Des concessions aux sportives en athlétisme et l’introduction du canoë slalom Les retours du tir à l’arc et du handball La revanche soviétique sur les États-Unis Le sport est-allemand et le dopage d’État sous le contrôle de la Stasi Boxeurs de Colombie et du Niger, et premiers médaillés nord-coréens Lord Killanin : un homme de médias conservateur-libéral Bibliographie

    Texte intégral

    1Quatre ans après le massacre de la place des Trois Cultures à Mexico, la cité olympique de Munich connaît à son tour, en 1972, un épisode tragique et sanglant : la prise d’otages et l’exécution de onze athlètes israéliens par les membres du commando palestinien Septembre noir. Le symbole est terrible pour le bourgmestre social-démocrate Hans-Jochen Vogel. Avec sa candidature à l’organisation des XXe Jeux olympiques, ce dernier voulait contribuer à la Détente tout en effaçant des mémoires le titre honorifique de « capitale du mouvement » que le Führer avait conféré à Munich en 1935. C’est en effet dans la capitale bavaroise qu’Hitler a créé le parti nazi, qu’il a tenté un premier putsch en 1923, qu’il a fait imprimer Mein Kampf, et non loin de là, à Dachau, que fut construit le premier camp de concentration en mars 1933 sur ordre d’Himmler.

    2Le symbole est également terrible pour l’Allemagne de l’Ouest tout entière qui voulait faire oublier les Jeux de Berlin organisés en 1936 par le IIIe Reich et manifester devant le monde entier son attachement à la démocratie. Depuis l’édification du mur de Berlin en 1961, la partie occidentale de l’ancien Empire allemand devenue RFA se dresse, il est vrai, telle un rempart face à la partie orientale qui a été soviétisée sous le nom de RDA. Quoique endeuillée, Munich aura toutefois montré à ses visiteurs et aux téléspectateurs le visage florissant et libre de la nouvelle Allemagne qui est alors portée par une croissance économique exceptionnelle.

    La large victoire de Munich sur Madrid et Montréal

    3Lors de la session olympique tenue à Rome en avril 1966, seulement deux tours de scrutin sont nécessaires à Munich pour l’emporter avec trente et une voix sur Madrid et Montréal qui totalisent respectivement seize et treize suffrages. Ces trois villes, qui sont candidates pour la première fois, ont assurément retenu la leçon des Jeux de Rome et de Tokyo retransmis en mondovision et identifié le formidable levier promotionnel que peut offrir l’accueil d’un tel événement. Une fois sa victoire acquise, Hans-Jochen Vogel va immédiatement lancer un programme de développement des infrastructures de sport, de transport et de communication pour faire de Munich le cœur battant de l’olympisme.

    4Mais le Canada et l’Espagne ne seront pas oubliés pour autant. La candidature de Madrid est portée par Juan Antonio Samaranch, le tout nouveau membre espagnol du CIO agissant alors pour le compte du caudillo Francisco Franco qui en fera son secrétaire des sports en 1967. Devenu président du CIO en 1980, Samaranch parviendra à ses fins en 1987 en imposant, non pas Madrid, mais sa propre ville Barcelone comme ville hôte des Jeux de 1992. Quant à Montréal, qui prend exemple sur les candidatures des métropoles américaines des Grands Lacs, elle verra sa candidature couronnée de succès quatre ans plus tard pour l’accueil des Jeux de 1976. À peine est-il besoin de signaler que Detroit est éliminée pour la sixième fois consécutive en recueillant ses habituels six bulletins du premier tour.

    Waldi le teckel et le spectacle conservateur des jeunesses du monde

    5La dimension folklorique de la cérémonie d’ouverture, qui reste de courte durée (une centaine de minutes dont la majeure partie est encore occupée par le défilé des équipes), est davantage accusée à Munich puis à Montréal pour une bonne et simple raison que ces deux cités-hôtes ne sont pas des capitales d’État mais des métropoles provinciales (Québec, Bavière) au fort particularisme culturel par rapport à la capitale fédérale. Les danses folkloriques, déjà apparues à Mexico, les ballets gymniques et les mascottes s’ajoutent désormais au protocole et au défilé des athlètes pour constituer un troisième acte spectaculaire dans le contexte des nombreux Mai 68 où les jeunesses du monde, y compris celles de RFA et de RDA, ont réclamé l’avènement d’une nouvelle ère « peace and love ». Ce n’est donc pas un hasard si « Waldi le teckel », un animal de compagnie prisé par la bourgeoisie bavaroise, est devenu la première mascotte officielle de l’histoire des Jeux olympiques d’été. La marque en a été déposée, des agences publicitaires en ont délivré la licence, et le comité d’organisation des Jeux en espérait à tort des bénéfices élevés. L’idée est bien de jouer sur la proximité affective entre les enfants et leurs peluches pour créer une familiarité avec le mouvement olympique. Par la suite, il s’agira aussi de faire passer des messages davantage politiques comme avec l’ours Misha lors des Jeux de Moscou en 1980.

    6Pour la première fois entre le défilé et les discours des présidents, des enfants (3 200 écoliers bavarois) viennent saluer les athlètes dans une chorégraphie simple et souriante aux antipodes des levées en masse du stade berlinois en 1936. Mais les traditions vestimentaires sont conservées avec des fillettes en jaune arborant un bouquet de fleurs et des garçonnets en bleu clair levant un petit arc vert, à l’opposé donc des vêtements unisexes et du rejet des armes revendiqués par les jeunes des Mai 68. Le conditionnement des genres se retrouve aussi dans l’entrée en scène des claqueurs de fouets puis des danseurs bavarois en lederhose (pantalon de cuir à bretelles et chapeau surmonté d’un plumet de poils de chamois) et danseuses en dirndl (robe à corset avec blouse et tablier). Le choix des musiques folkloriques, et non des standards du rock’n’roll qui circulent à l’échelle des radios du monde, est tout à fait révélateur du conservatisme politique des organisateurs allemands qui souhaitent s’ouvrir à la jeunesse mais sans en adopter les codes culturels et les passions anticonformistes.

    7L’augmentation du nombre d’épreuves et d’athlètes est tel que le matériel de télévision, vite insuffisant, est complété par du matériel de cinéma. Le succès est au rendez-vous avec une hausse parallèle du volume des retransmissions, de la qualité des images et du nombre de téléspectateurs. Pour la première fois, les journalistes reçoivent directement par ordinateur toutes les informations concernant la cérémonie, jusqu’au profil des porte-drapeaux, et les compétitions, au grand dam de certains d’entre eux qui dénoncent leur éloignement des athlètes et une possible déshumanisation de l’information sportive. À la demande du centre de radio et de télévision munichois, le défi a consisté à éviter au maximum la projection d’ombres, d’où la découpe du toit en tronçons de verre acrylique et l’élaboration d’une structure en câbles tendus pour une surface totale de 75 000 m², dont 35 000 m² au-dessus du stade.

    Les mises en scène de l’Ostpolitik et du mariage d’Olga et Harold

    8La disparition des références militaires s’explique par la volonté de rejeter la mémoire nazie des Jeux de Berlin, et de promouvoir l’Ostpolitik du chancelier social-démocrate Willy Brandt qui a ouvert au printemps 1970 une nouvelle phase de relations directes avec la RDA, puis avec l’URSS et la Pologne, au point d’obtenir le prix Nobel de la paix en octobre 1971. Le Rapport officiel des Jeux de Munich en témoigne : « La cérémonie d’ouverture ne devait pas avoir un caractère solennel, militaire, chauvin, pompeux ou imposant. Elle devait être spontanée, détendue. » Le drapeau olympique n’est plus porté par des soldats, mais par des médaillés olympiques de nationalité et d’âge différents. Le défilé des athlètes est toujours censé se faire au pas, mais il est moins strict et les athlètes sont autorisés à saluer comme ils le veulent le public du stade, tout autant que la tribune des officiels. Et les marches militaires sont remplacées par des chansons folkloriques et des mélodies célèbres du monde entier comme En passant par la Lorraine pour la délégation française et When the Saints Go Marching In pour celle des États-Unis.

    9D’ailleurs, le CIO a dû intervenir pour conserver le lâcher de pigeons, après l’échange du drapeau traditionnel olympique et avant la salve d’artillerie qui a remplacé les coups de canon, contre l’avis du Comité d’organisation qui considérait que « sa force symbolique s’effaçait à l’époque de la transmission simultanée des communications ». La dimension religieuse, d’inspiration fortement chrétienne, est fortement atténuée par l’adoption de musiques expérimentales pour l’arrivée du dernier porteur de la flamme et pour l’hymne Ekecheiria (trêve en grec) qui clôt la cérémonie sur ces mots : « Restez attachés aux anciennes traditions, protégez votre pays, préservez-le de la guerre et livrez au monde un message d’amitié fraternelle. » L’allumage de la flamme est symptomatique de cette volonté des organisateurs de favoriser « la compréhension entre les peuples, l’égalité sociale et la joie de vivre » puisque l’espoir de l’athlétisme allemand Günther Zahn est accompagné de l’Américain Jim Ryun, du Kenyan Kipchoge Keino, du Japonais Kenji Kimihara et de l’Australien Derek Clayton.

    10De façon symbolique, les États-Unis ont choisi comme porte-drapeau la lanceuse de disque tchécoslovaque Olga Fikotova qui est devenue américaine en 1957 après son mariage avec le lanceur de marteau Harold Connoly. Leur romance est une illustration de l’intrusion de la guerre froide dans la vie des couples binationaux. Tous deux se sont connus à Melbourne en 1956 où ils sont devenus champions olympiques. Fille d’un membre de la garde des présidents Masaryk puis Benes emprisonné par le gouvernement communiste, elle poursuit des études de médecine tout en jouant pour l’équipe nationale et du Sparta Prague en basket-ball. Initiée au lancer du disque à peine deux ans avant les Jeux par le spécialiste Zdenek Cihak, elle bat le record olympique à Melbourne avec un jet à 53,69 m. Quant à Harold, né avec un bras gauche plus court d’un tiers, il est diplômé en éducation physique du Boston College et de UCLA et enseigne dans les écoles de Santa Monica.

    11Leur noce a lieu à Prague avec l’autorisation de se marier avec un étranger qui aurait été donnée à Olga par le président Antonin Zapotocky qui passe pour plus humain que son prédécesseur Klement Gottwald et son successeur et premier ministre Antonin Novotny. Accompagnés des époux Zatopek comme témoins, leur mariage draine la foule dans la capitale tchèque. Empêchée de concourir par le CNO tchécoslovaque, qui a fait courir le bruit qu’elle avait trahi son pays, Fikotova représente les États-Unis à tous les Jeux de Rome à Munich. Diplômée en thérapie et fitness, divorcée en 1975, elle enseignera un programme de remise en forme à la University of California à Irvine avant de rejoindre en 2017 comme coach un club de fitness à Las Vegas. Revenue en République tchèque pour la première fois en 2006, elle y sera honorée du prix Fair Play par son CNO. Connoly, de son côté, continuera à enseigner tout en étant responsable des espoirs américains au lancer du marteau.

    Le déni de Brundage face à l’attentat contre la délégation israélienne

    12En terre allemande, vint-sept ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale, et la révélation de l’horreur de la Shoah, onze athlètes israéliens trouvent la mort lors d’une prise d’otages perpétrée par le commando palestinien du nom de Septembre noir en référence à la décision prise par le roi Hussein du 16 septembre 1970 de réprimer les fedayin de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) dirigée par Yasser Arafat et de les expulser hors de Jordanie. Ce groupe avait déjà organisé des actions terroristes mais c’est à Munich qu’il va se faire connaître des opinions publiques occidentales et médiatiser ses revendications. L’assaut donné par les forces de l’ordre allemandes est un échec total : les onze otages israéliens sont exécutés par les Palestiniens, un policier bavarois est tué, et cinq des huit terroristes sont éliminés.

    13En rétorsion, la première ministre israélienne Golda Meir déclenche l’opération « Colère de Dieu » qu’elle confie au Mossad, et qui consiste à éliminer une trentaine de Palestiniens considérés comme responsables de l’attentat. Steven Spielberg portera à l’écran cette traque dans son film de 2005 intitulé tout simplement Munich. Entre l’incompétence de la police sous-armée et des services de renseignement pourtant informés d’un danger imminent, la logistique fournie par des militants allemands d’extrême droite, l’implication de l’OLP, et le rôle éventuellement joué par le Mossad dans l’assaut, la clarté n’est toujours pas faite sur cette affaire au point que le chancelier allemand a missionné en 2023 une commission d’historiens auxquels on devrait enfin ouvrir les archives.

    14De son côté, le CIO est exposé pour la première fois à une menace terroriste qui l’oblige à prendre ses responsabilités publiquement et immédiatement. Sans en référer à sa commission exécutive, Brundage a décidé de suspendre les compétitions durant la journée du 6 septembre et de lire une déclaration qu’il a rédigée seul. À quelques heures de céder sa présidence à Killanin, devant les 80 000 spectateurs assemblés pour la cérémonie d’hommage aux victimes de l’attentat, il dénonce effectivement « l’horreur après l’intrusion criminelle et barbare de terroristes dans l’environnement olympique pacifique » et « pleure nos amis israéliens victimes de cet assaut brutal ». C’est davantage la suite qui va choquer ses contemporains : « Les Jeux de la XXe olympiade ont été exposés à deux attaques sauvages. Nous avons perdu la bataille rhodésienne contre le chantage politique. Nous n’avons que la force d’un grand idéal. Je suis sûr que le public approuvera que nous ne pouvons laisser une poignée de terroristes détruire ce noyau de coopération internationale. Les Jeux doivent continuer – “The Games must go on” – et nous devons continuer nos efforts pour les garder clairs, purs et honnêtes et essayer d’étendre l’esprit du sport à d’autres domaines. » En jouant de la neutralité politique que l’on prête au sport, Brundage ne met pas seulement sur le même plan le drame de Munich et l’exclusion du mouvement olympique de la Rhodésie pour cause d’apartheid, il exprime aussi, en un seul mouvement, et son antisémitisme et son racisme contre les noirs.

    15Sur le moment, il n’est désavoué publiquement ni par ses collègues, ni par Lord Killanin qui va lui succéder. À Londres, en 2012, pour le 40e anniversaire du massacre de Munich, le président Jacques Rogge refusera la demande d’une minute de silence au cours de la cérémonie d’ouverture formulée par Israël, les États-Unis et le ministre allemand des Affaires étrangères, mais il participera à une minute de silence à la mémoire des onze victimes, en dehors du stade, et au cours d’une cérémonie consacrée à la trêve olympique. En revanche, son successeur, l’Allemand Thomas Bach, fera observer cette même minute de silence lors de la cérémonie d’ouverture des Jeux de Tokyo en 2021 après d’être rendu quatre ans plus tôt à l’inauguration d’un mémorial au sein du parc olympique de Munich.

    Des concessions aux sportives en athlétisme et l’introduction du canoë slalom

    16Engagé au début des années 1950 à propos du professionnalisme, le bras de fer entre le président du CIO et l’AGFIS continue après Mexico. En 1969 encore, Brundage réclame que les sports qui ne sont pas encore commercialisés soient prioritaires dans le programme des Jeux olympiques. Après avoir rencontré les FI en 1969, le CIO rejette d’abord l’idée d’inclure des sports additionnels comme le roller-skating, l’aviron pour les femmes, ou le softball, la version du baseball dévolue aux femmes. Dans le même ordre d’idées, le badminton et le ski nautique, pour hommes et pour femmes, ne sont promus qu’au rang de sports de démonstration. Mais, peu après, il autorise 21 sports pour Munich, et non plus seulement 18. On pourrait y voir une concession de la part du CIO, tout autant que la possibilité de faire entrer des sports dont les FI seraient plus dociles. Le retour du judo répond à cette lecture avec deux nouvelles catégories de poids : les mi-moyens en moins de 78 kg et les mi-lourds en moins de 95 kg.

    17En lutte avec l’AGFIS, le CIO ne peut se permettre de perdre le soutien de fédérations historiques comme celles de natation et d’athlétisme dont les disciplines sont les plus médiatisées. Aussi, après les concessions faites en natation pour les Jeux de Mexico, le président Brundage doit céder aux pressions de l’IAAF. La féminisation des épreuves d’athlétisme s’accélère donc avec le 1 500 m, le 100 m haies et le 4 × 400 m. Cette tendance se retrouve plus timidement en tir sportif où le skeet hommes est remplacé par une épreuve de skeet mixte de 1972 à 1992. En outre, deux nouvelles épreuves sont instituées au sanglier courant et à la fosse olympique tandis que l’épreuve avec fusil à 300 m connaît ses derniers instants olympiques. En sus des trois nouvelles épreuves de slalom en canoë-kayak pour les hommes (K1, C1, C2), apparaît une épreuve femmes en K1 qui disparaîtra tout après et ne fera son retour qu’en 1992. Apparu en 1934 en Suisse, le canoë slalom est devenu une nouvelle épreuve olympique à la suite des pressions exercées par Charles de Coquereaumont, le président français de la Fédération internationale de canoë créée en 1946 à la place de l’ancienne organisation qui était passée aux mains des nazis. Les céistes de RDA l’emportent dans la première édition du canoë slalom car ils ont pu bénéficier de la construction à l’identique à Zwickau de l’Eiskanal d’Augsbourg où a lieu cette épreuve. Dès lors, les organisateurs vont devoir modeler le lit des rivières pour maintenir l’équité entre les concurrents et assurer leur sécurité. À compter des Jeux de Sydney en 2000, les villes organisatrices, qui ne disposent pas de rivières adéquates pour la pratique du canoë slalom, devront investir dans des rivières artificielles et utiliser les obstacles modulables inventés en 1991 par la société Hydrostadium du groupe français EDF.

    Les retours du tir à l’arc et du handball

    18Concernant le handball et le tir à l’arc, Brundage les juge compatibles avec sa conception de l’olympisme, parce qu’ils sont des sports authentiquement amateurs présidés par des dirigeants fidèles au CIO. Le retour tardif du handball dans le programme olympique s’explique aussi par l’effacement du passé nazi de ce sport. En 1946, la nouvelle Fédération internationale de handball (FIH), qui s’était constituée à la suite de la dissolution de la fédération nazie passée aux mains des Suédois, avait tenté en vain d’obtenir que son sport figure au programme des Jeux de Londres en 1948. Dans la perspective de l’organisation des Jeux à Munich, Willy Daume, le président de la fédération allemande de ce sport de 1949 à 1955 qui avait adhéré au parti nazi en 1937 et fut employé comme informateur par le Service de sécurité de la SS à compter de 1943, et le président suisse de la FIH Hans Baumann obtiennent la reconnaissance olympique de leur sport. Cela aura un net impact sur la mondialisation de cette FI qui passera de 41 fédérations nationales affiliées en 1969 à 68 en 1976.

    19Quant au tir à l’arc qui avait disparu du programme en 1924, il frappait en vain à la porte des JO depuis les années 1930, et plus régulièrement encore depuis 1950. Le CIO concède en 1966 l’épreuve du chapelet à 50 m pour les hommes et celle du tir à plus petite distance pour les femmes. Cette réintroduction est généralement portée au crédit de la Danoise naturalisée britannique Inger Pragholm Frith, qui préside la FI de tir à l’arc (FITA) de 1961 à 1971, car le CIO a rendu un avis favorable lors de sa session à Rome en 1966. Si Frith a montré une constante détermination pour qu’il y ait un concours olympique ouvert aux femmes, ses prédécesseurs n’ont pas cessé d’en faire la demande depuis la sortie de guerre au point que le président Brundage et ses collègues avaient déjà accepté en 1957 d’inclure le tir à l’arc dans la liste officielle des sports olympiques. Structuré en FI depuis sa réunion fondatrice à Lviv en 1931, à l’initiative des Polonais, le tir à l’arc est en plein renouveau dans les années 1960 sur des bases amateures, contrairement à sa réputation ancienne de jeux de prix et de paris. Il a également effectué sa mue sportive par la standardisation des pratiques anciennes en une épreuve unique, celle du tir sur cible anglaise à 70 m. Les évolutions technologiques du nouvel arc « recurve » (viseur, repose-flèche, et contrôleur d’allonge ou clicker) et l’adoption par les Américains en 1972 des premiers arcs démontables en duralumin, et non plus en bois, accroissent la qualité du spectacle.

    20On pourrait ajouter que la personnalité de Frith a pu plaire au président Brundage car c’est une femme qui, en tout cas selon son principal concurrent suédois Lars Ekergren, exerce sa présidence de manière autoritaire et a pris position en faveur de l’apartheid en Afrique du Sud. Ce qui est certain, c’est qu’elle a acquis l’habitude du commandement dans ses fonctions d’officier météorologiste auprès de la Royal Air Force qu’elle a occupées durant la guerre en Afrique du Sud, puis au Caire, jusqu’à atteindre le rang de capitaine de l’armée britannique. Première femme à présider une FI et à prendre la parole devant l’assemblée masculine du CIO, Frith avait découvert la pratique du tir à l’arc une fois établie avec son mari en Angleterre, et elle avait fini 14e des premiers championnats du monde à Copenhague en 1950, avant de grimper un à un tous les échelons des fédérations britannique puis internationale.

    La revanche soviétique sur les États-Unis

    21Après un cru américain exceptionnel à Mexico quatre ans plus tôt, le tableau des médailles consacre de nouveau l’URSS (50 médailles d’or) qui devance les États-Unis (43) et la surprenante RDA (20). Alors que les États-Unis sont passés de 21 à 14 médailles d’or en natation et de 15 à 6 en athlétisme, et ne remportent la palme que dans 8 sports, la suprématie soviétique rayonne dans 18 disciplines avec des victoires marquantes dans des épreuves où les Américains triomphaient jusque-là comme les 100 m et 200 m ou en basketball. En natation toutefois, le Californien Mark Spitz écrase la compétition avec 7 médailles d’or, un record qui ne sera battu que par Michael Phelps à Pékin en 2008 avec 8 titres. Déçu de n’avoir gagné aucune médaille d’or en individuel à Mexico, il a rejoint l’équipe des Hoosiers de l’Indiana University entraînés par le fameux coach James « Doc » Counsilman, un pionnier de l’analyse des rushs de ses nageurs sous l’eau et de l’entraînement en hypoventilation c’est-à-dire en bloquant sa respiration quelques secondes durant l’effort. Spitz s’était d’abord fait connaître en remportant 4 médailles d’or aux Maccabiah Games de 1965 où il accomplira un nouvel exploit en 1969.

    22Quatre sports en particulier permettent à l’URSS de faire la différence : neuf victoires en athlétisme et en lutte, et six autres en gymnastique comme en canoë. Valeriy Borzov est la tête de proue d’un athlétisme en émergence avec deux titres sur 100 et 200 m mais en bénéficiant de l’absence des deux meilleurs sprinters américains arrivés en retard pour les quarts de finale. Membre dirigeant du komsomol d’Ukraine, il deviendra président du CNO ukrainien durant la décennie 1990, ministre des Sports de Boris Eltsine puis de l’Ukraine indépendante, et sera coopté au sein du CIO en 1994. Il sera élu député en 1998 et siégera dans les rangs du parti social-démocrate qui plaide pour une Ukraine neutre. Mais, c’est surtout la victoire à l’ultime seconde de l’équipe soviétique en basket-ball sur les États-Unis qui a marqué l’histoire à la fois du fait des contestations multiples qui ont émaillé la fin du match et de la dimension symbolique de ce triomphe dans un sport génétiquement américain.

    23Tandis que les Américaines remportent dix médailles d’or dont huit en natation, une en plongeon et une autre en tir à l’arc, les sportives soviétiques en raflent une de plus mais dans cinq sports différents : quatre en gymnastique, trois en athlétisme, deux en canoë, une en escrime et aussi en volley-ball. Pour les champions et championnes de l’URSS, c’est le résultat d’un soutien à la performance sportive féminine qui remonte aux années 1930. Du côté américain où le rôle de l’État est quasi inexistant, les universités n’investissent pas encore suffisamment dans la performance de leurs championnes. Néanmoins les nageuses Melissa Belote de l’Arizona State University et Sandra Neilson de la University of California Santa Barbara remportent trois médailles d’or chacune, tout comme l’Australienne Shane Gould qui vit aux Fidji. Âgée de 16 ans, cette dernière arrêtera la compétition juste après Munich car elle ne supportait plus la pression sportive et médiatique.

    24Avec ses trois médailles d’or et sa médaille d’argent obtenues à l’âge de 17 ans, Olga Korbut chute aux barres asymétriques et ses pleurs touchent le public bavarois au point qu’elle fera figure d’ambassadrice de la Détente dans la presse occidentale. C’est aussi l’époque où les dirigeants hommes de la FI de gymnastique (FIG) fixent en 1971 une limite d’âge de 14 ans visant les Américains puisqu’ils sont les premiers à avoir présenté de très jeunes compétitrices. L’idée n’est pas tant de condamner le forçage des enfants mais plutôt d’imposer une normativité masculine de la féminité en effaçant un éventuel « charme féminin » de filles prépubères. Il en est de même pour l’interdiction en 1974 du « Korbut flip », une sortie arrière aux barres asymétriques, qui n’a pas seulement pour origine le rejet de l’acrobatisation de la gymnastique, mais le refus que des femmes puissent réaliser des prouesses de cette nature.

    25Par ailleurs, la RFA dépasse le Japon au nombre total de médailles (quarante contre vingt-neuf) mais ces deux pays n’obtiennent que treize médailles d’or avec une nette prévalence côté ouest-allemand pour l’athlétisme et côté nippon pour la gymnastique (quinze médailles sur un total de vingt) et aussi le judo. La montée en puissance des démocraties populaires est illustrée par le coude à coude entre la Pologne, la Hongrie et la Bulgarie qui surclassent l’Australie au nombre total de médailles, et qui évincent la Grande-Bretagne (12e) et la France (17e) des dix nations les mieux classées. On pourrait évoquer également la figure moins médiatisée du coureur de fond Lasse Artturi Virén qui, avec ses victoires sur 5 000 et 10 000 m, renoue avec la tradition des « Finlandais volants » de l’entre-deux-guerres. Enfin, on doit signaler le gymnaste japonais Sawao Katō qui renouvelle son exploit de Mexico avec trois médailles d’or.

    Le sport est-allemand et le dopage d’État sous le contrôle de la Stasi

    26La RDA communiste, qui monte sur la troisième marche du podium olympique, est la grande surprise de ces Jeux d’autant qu’elle devance symboliquement la RFA chez elle à Munich. Alors que ses sportives n’avaient gagné qu’une médaille en or et cinq en argent à Mexico, elles sont neuf championnes olympiques (dont six athlètes), et obtiennent également treize secondes places (dont quatre en natation). On y ajoutera chez les hommes trois titres en canoë et en aviron, et deux médailles d’argent en cyclisme. De fait, la RDA a misé sur des sports de force qui nécessitent une très grande dépense énergétique et a ciblé des disciplines où les records féminins étaient peu élevés.

    27Dans sa constitution de 1949, la RDA avait inscrit le sport comme « une priorité nationale ». Et, entre 1968 et 1988, elle remporte au total 409 médailles (dont 153 en or) contre 204 pour la RFA (dont 46 en or). Aux Jeux de Séoul, son rendement sera exceptionnel avec 35 % d’athlètes médaillés et un second rang sur le podium devant les États-Unis, pour un pays de tout juste 17 millions d’habitants. On y lira, en négatif, le résultat de performances produites grâce aux stéroïdes anabolisants. Pourtant, seulement sept cas positifs ont été recensés pour 2 079 athlètes testés : un haltérophile autrichien et iranien, un cycliste néerlandais et espagnol, un nageur américain, un judoka mongol et un basketteur portoricain.

    28C’est lié à l’usage de produits masquants, au fait que les contrôles que le professeur Raymond Brooks avait testés en 1974 lors des Jeux du Commonwealth, ne concernaient que certains anabolisants, au remplacement des stéroïdes par des prises de testostérone quelques semaines avant les Jeux. Un ouvrage comme The Underground Steroid Handbook publié en 1981 par l’haltérophile américain Dan Duchaine explique comment consommer des stéroïdes et échapper aux contrôles. En revanche, dix cas de prise de tranquillisants ont été identifiés à Munich, mais qui n’ont pas donné lieu à des sanctions car ces produits du type Valium, fonctionnant comme un substitut à l’alcool ou au cannabis, n’étaient pas sur la liste des substances interdites.

    29Les passages à l’Ouest de la sprinteuse Renate Neufeld en 1978, et de la nageuse Renate Vogel-Heinrich l’année suivante, sont venus confirmer ce que les spécialistes soupçonnaient depuis un moment : l’Allemagne de l’Est avait organisé un système de dopage d’État à l’échelle de ses dix mille athlètes. Avec la chute du mur de Berlin, les témoignages se multiplieront et l’hebdomadaire Der Stern finira par publier en 1990 une enquête qui a révélé comment le service de médecine sportive de Berlin-Est, avec ses 2 600 employés dont 600 médecins, coordonnait un système qui reposait sur les études menées à l’Institut de recherche en culture physique et sport de Leipzig, et sur les contrôles préventifs conduit par le laboratoire Kreischa avant chaque compétition internationale. Enfin, le dépouillement des archives de la Stasi, le ministère de la Sécurité d’État en charge du renseignement, de l’espionnage et du contre-espionnage, a permis d’établir que la police politique de la RDA avait pris le contrôle du système sportif un an avant les Jeux de Munich 1972. Certains des meilleurs médecins, biologistes et chercheurs spécialistes du dopage de l’ancienne RDA retrouveront, très vite ensuite, du travail aux États-Unis ou bien en Allemagne de l’Ouest.

    Boxeurs de Colombie et du Niger, et premiers médaillés nord-coréens

    30À Munich, 73 comités nationaux olympiques sur 121 n’ont obtenu aucune médaille. Quoique participant aux Jeux olympiques depuis 1932, la Colombie a attendu quarante années avant de décrocher ses premières médailles au tir sportif et en boxe, qui, outre le football, sont les deux sports nationaux. Né dans une famille aisée de Baranquilla, d’origine allemande et vénézuélienne, Helmut Bellingrodt Wolff a reçu un accueil si enthousiaste après sa médaille d’argent que sa célébration a dû être déplacée à l’université autonome du Caribe où il faisait alors ses études d’architecture. Initié au tir sportif par son père dès l’âge de 10 ans au polygone de la Police nationale, il remportera une nouvelle médaille d’argent à Los Angeles en 1984. Les trajectoires sociales de ses deux compatriotes médaillés de bronze sont à l’évidence beaucoup plus modestes. Clemente Rojas et Alfonso Pérez passeront d’ailleurs très vite professionnels et connaîtront des succès mitigés durant la dizaine d’années qui suivit.

    31Issake Dabore apporte son premier podium au Niger avec sa médaille de bronze en boxe pour sa troisième participation aux Jeux olympiques. Durant cette période, la délégation nigérienne n’est d’ailleurs composée que de boxeurs qui sont les seuls espoirs de médailles de ce pays parmi les plus pauvres d’Afrique. Dabore a commencé sa carrière sportive aux Jeux de l’Amitié organisés en 1961 à Abidjan dans le cadre de la Communauté française. Alors que cette association politique entre la France et son empire colonial était devenue caduque un an plus tôt du fait de l’accession de la plupart de ces pays à l’indépendance, son versant sportif a connu trois éditions avant d’être remplacé en 1965 par les Jeux africains mis en place par l’Union africaine.

    32Pour sa première participation olympique, la Corée du Nord remporte une médaille d’or en tir à la carabine à 50 m, une médaille d’argent en boxe, et trois médailles de bronze en lutte, judo et volley-ball. Hormis ce dernier sport collectif dont l’implantation remonte à la présence des YMCA américains dans la péninsule à la fin du xixe siècle, ces sports font totalement sens pour un pays dont toute la population est mobilisée militairement contre son voisin du sud depuis 1948. Sa victoire en tir sportif a valu à Ri Ho-jun d’obtenir peu après le titre de Maître d’honneur des sports de l’URSS dans le cadre de la coopération sportive entre les deux régimes communistes et à l’occasion du 50e anniversaire de la création de l’État soviétique. Ho-jun sera recruté comme garde du corps par le chef suprême Kim Jong-il une fois arrivé au pouvoir en 1994, après avoir été son entraîneur en tir sportif.

    Lord Killanin : un homme de médias conservateur-libéral

    33À l’issue des Jeux de Munich, Michael Morris 3e baron Killanin (1914-1999) devient le sixième président du CIO par 39 voix contre 29 au comte français Jean de Beaumont, le Soviétique Vitaly Smirnov et le roi Constantin de Grèce étant scrutateurs. Sa candidature avait déjà été poussée en 1968 par le membre américain Douglas Roby et par Reginald Alexander, l’ancien maire blanc de Nairobi et président de la Compagnie des pétroles du Kenya, mais il avait préféré se contenter de la vice-présidence et attendre que Brundage se rapproche de ses 85 ans. Il a bénéficié pleinement du soutien de David Burghley marquis d’Exeter mais pas des Soviétiques qui attendaient de Brundage qu’il prolonge son mandat encore deux années pour des raisons qui restent à éclaircir. Malade et affaibli, Killanin ne se représentera pas en 1980, n’ayant donc pu achever les transformations d’importance qu’il avait entreprises comme la réforme de la règle impitoyable de l’amateurisme, le financement du CIO par les droits de télévision (23,6 millions de dollars perçus en 1980 contre 10,5 en 1976), et une plus grande ouverture aux sportives et aux dirigeantes.

    34Dès 1973, il organise un congrès olympique à Varna, dans le fleuron touristique du dictateur bulgare Todor Jivkov, le premier depuis quarante-trois ans et dont Brundage avait toujours repoussé la perspective. Il s’agit d’abord de juguler la fronde des FI qui réclament d’être représentées au sein du CIO et s’émancipent déjà, pour certaines, grâce à l’argent des télévisions et du marketing, et celle des athlètes racisés puisque le principe d’une admission aux Jeux « sans discrimination de religion, de race ou d’appartenance politique » est alors introduit explicitement dans la Charte olympique. Il en va aussi d’une éventuelle réforme de l’organisation pour introduire davantage de transparence dans la cooptation des membres, limiter la durée de leurs mandats, mieux associer les CNO même ceux qui ne sont pas représentés au sein du CIO. Killanin ne le sait pas encore, mais sur le plan diplomatique, il aura à affronter les grands boycotts de l’histoire olympique, à savoir celui de Montréal en 1976 par les pays africains et celui de Moscou en 1980 par le camp américain. Par ses méthodes et sa vision, il se situe à l’opposé de la démarche rugueuse et inflexible de son prédécesseur Avery Brundage même s’il fait preuve d’une main de fer dans un gant de velours selon sa directrice administrative Monique Berlioux. Sa marge de manœuvre reste toutefois très étroite entre l’influence française, l’entrisme soviétique et les assauts tiers-mondistes des membres issus des nations africaines et asiatiques.

    35Ce ne sont pas ses titres de gloire sportifs ni sa carrière de dirigeant, qui se réduisent à peu de choses avant 1950, qui expliquent son arrivée à la tête du CIO, mais bien plutôt son origine sociale, sa trajectoire professionnelle, ses engagements politiques et ses réseaux. Killanin a d’abord pour lui d’être parvenu à éviter la scission en deux du Comité olympique d’Irlande qu’il préside depuis 1950, ce qui le range dans le camp des loyalistes à la Couronne britannique. Pour y parvenir, il a donné le choix aux athlètes d’Irlande du Nord de représenter soit la république d’Irlande soit le Royaume-Uni. Son ascension au sein du CIO, à compter de sa cooptation en 1952, a peut-être été freinée par le président Brundage puisqu’il a dû attendre plus d’une décennie pour y occuper des postes à responsabilité : chef du protocole et président de la commission Presse en 1965, membre de la commission exécutive en tant que troisième vice-président en 1967, premier vice-président en 1970.

    36Par son père tué au front durant la Grande Guerre, il se rattache à une lignée de grands propriétaires terriens (landlords) catholiques fidèles à la couronne britannique, et par sa mère, à des banquiers et à des exploitants miniers partis faire fortune en Australie. Au cours de ses études d’art et d’histoire dans des établissements prestigieux (Eton, Sorbonne, Magdalene College à Cambridge), il pratique en sportsman la boxe, le rugby, l’aviron et les sports équestres, mais sans atteindre des niveaux d’excellence. Le décès de son oncle en 1927 en fait le 3e baron Killanin, ce qui lui permet de siéger à sa majorité en 1935 au Parlement britannique comme pair du royaume.

    37À compter de son arrivée à Londres, il embrasse une carrière de journaliste au sein des grands tabloïds de l’époque, le Daily Express du conservateur et isolationniste baron Beaverbrook, puis le Daily Mail du vicomte Rothermere dont la ligne éditoriale ultraconservatrice, impérialiste et antiféministe louvoie entre diplomatie d’apaisement envers le IIIe Reich et soutien admiratif à Hitler. Il se fait surtout connaître comme correspondant de guerre en Chine en 1937 alors qu’il travaille pour le magazine dominical Dispatch. Engagé volontaire sur le front de Normandie avec le grade de major, il bifurque en sortie de guerre vers le monde des affaires en intégrant la direction de plusieurs sociétés irlandaises : la compagnie pétrolière Shell Ireland, l’Ulster Bank ou la société leader en brasserie Beamish and Crawford. Il participe également au financement et à la production de plusieurs films du réalisateur républicain d’origine irlandaise John Ford. Très introduit dans de nombreux cercles, il est par exemple membre du Conseil de la Croix-Rouge depuis 1947, de l’Association internationale des critiques d’art et consul général honoraire de Monaco depuis 1961.

    38En 1945, il a épousé Sheila Cathcart Dunlop qu’il a rencontrée aux fameuses Galway Races. Cette dernière avait pour père Douglas, un pasteur de l’Église protestante d’Irlande, et pour grand-père paternel Henry qui avait fondé en 1872 l’Irish Champion Athletic Club et financé le stade de rugby de Lansdowne Road. Son épouse avait été honorée tout comme lui de l’ordre de l’Empire britannique pour avoir travaillé au centre de décodage de Bletchley. Comme Brundage gérait le CIO à distance depuis Chicago ou San Francisco, Killanin mobilise un téléphone, un télécopieur et les services d’un secrétariat en nette croissance de 18 à 27 employés, dont il confie en 1969 la direction à l’ancienne nageuse française Monique Berlioux qui était l’attachée de presse du Comité depuis deux ans.

    Bibliographie

    Large David, Munich 1972. Tragedy, Terror, and Triumph at the Olympic Games, Lanham, Rowman & Littlefield Publishers, 2012.

    Schiller Kay et Young Chris, The 1972 Munich Olympics and the Making of Modern Germany, Berkeley, University of California Press, 2010.

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