Conclusion. En quoi le regard de la psychologie sociale est-il utile ?
p. 167-187
Texte intégral
Je vais seul sur la route
À travers la brume, le chemin de silex brille
La nuit se tait et c’est Dieu qu’ elle écoute
Et les étoiles parlent entre elles
Dans le ciel, tout est solennel et merveilleux
La terre dort dans une splendeur bleue
Quel est cet étrange mélange de souffrance et d’extase
Que puis-je attendre ou regretter ?
Moi, je n’attends plus rien de la vie
Et je ne regrette pas un instant le passé
Je cherche la liberté et le calme
Je voudrais m’endormir dans l’oubli
Mais pas de ce sommeil froid d’ un tombeau
Je souhaiterais m’endormir ainsi pour toujours
Pour que les forces de ma vie sommeillent dans ma poitrine
Pour que ma respiration la fasse doucement se soulever
Pour que toute la nuit et tout le jour en me berçant
Une douce voix me chante des chansons d’amour
Et qu’au-dessus de moi, dans une verdure éternelle
Un chêne sombre se penche et bruisse.
Mikhail Lermontov.
1Pourquoi ce poème, « Je vais seul sur la route » paru en 1841 sous la plume d’un auteur peu connu en France mais adulé en Russie est-il placé là en tête de la conclusion de ce livre1 ? Personnellement, j’ai découvert assez récemment ce poème de Mikhail Lermontov de façon fortuite lors d’une interview télévisée de Mikhail Gorbatchev, ancien président de l’Union des républiques socialistes soviétiques, lequel avait cité un extrait de ce poème. Il parle. « Je vais seul sur la route » et les vers qui suivent résument merveilleusement le sens profond qui a animé l’écriture de cet ouvrage et la grande interrogation qui le sous-tend : comment rester soi-même dans les affres et délices du vivre-ensemble ? Dans l’introduction de ce qui est en fait le troisième tome d’une trilogie sur l’autodéfense intellectuelle, figurent des expressions qui ne sont pas sans susciter beaucoup d’appréhensions : catastrophe, apocalypse, collapsologie, effondrement. En considérant que la peur est une émotion qui n’est pas bonne conseillère, une manière de s’autodéfendre intellectuellement est de ne pas se laisser gagner par elle et de garder son esprit critique et sa capacité de discernement. Dans les flots agités et tumultueux du vivre-ensemble, il est souvent difficile de s’y retrouver, d’être soi-même, de mener sa vie sans pour autant faire abstraction des autres. Il s’agit là d’une subtile et délicate équation à résoudre presque tous les jours. Cela impose, comme les différents chapitres de ce livre ont essayé de le démontrer, de faire la part des choses dans les relations avec autrui, par exemple entre le vrai et le faux altruisme, entre la véritable bienveillance et la bienveillance intéressée ou manipulatrice. Cela nécessite aussi d’être vigilant quand les circonstances de la vie conduisent à emprunter la route d’un pouvoir sur les autres. Il faut l’être aussi quand avec d’autres nous nous regroupons, enthousiastes et convaincus, autour d’une forte identité ou d’un objet commun car cela peut être pour le meilleur comme pour le pire. Enfin, le discernement, l’esprit critique, le goût de la vérité permettent de s’écarter de croyances stéréotypiques prêtes à l’emploi selon lesquelles toutes formes de déviances sont à proscrire et toutes minorités sont nécessairement malfaisantes. Mais, cela n’empêche pas d’avoir un regard objectif sur ce qu’on appelle la réalité appréhendée dans tous ses aspects, positifs comme négatifs. Force est de constater que nous vivons dans un univers trouble et angoissant générant de sérieuses difficultés psychologiques pour nombre de personnes. Alors, une première utilité de la psychologie et de la psychologie sociale, puisque tel est le titre de cette conclusion, est de contribuer à y remédier.
Appel à la psychologie face à une augmentation des troubles mentaux
2Nous vivons dans un monde incertain, anxiogène, troublé. Une conséquence est que de plus en plus de personnes souffrent sur le plan psychologique. S’il est une idée qui fait consensus, c’est bien celle-ci. Les professionnels de la psychologie sont appelés à la rescousse dans des conditions d’urgence qui ne favorisent pas nécessairement un bon exercice de leur activité nécessitant du temps et un minimum de financement. Un homme politique qui n’est pas avare de formules-chocs prédit que la prochaine pandémie sera celle des troubles psychologiques. Comme toujours dans des périodes marquées par de puissants effets médiatiques et des emballements émotionnels collectifs, il faut essayer de garder la raison, de prendre de la distance et de relativiser les propos ou les opinions émises spontanément dans la chaleur du moment et dictées par cette règle médiatique dominante et passablement insupportable : celle du règne de l’instantanéité. Ce phénomène d’accroissement de la souffrance mentale des personnes est de toute évidence en lien avec la pandémie liée au virus Covid-19 et toutes les mesures imposées par la lutte contre lui et ses variants : confinement, port du masque, couvre-feu, vaccination fortement recommandée, télétravail imposé, fermeture de lieux festifs et conviviaux, pass sanitaire. Cependant, il ne peut pas être réduit complètement à cela avec ces optimistes mais peu réalistes prédictions : quand la pandémie sera passée tout ira mieux, tout rentrera dans l’ordre, tout sera comme avant. Cette crise sanitaire agit aussi comme un révélateur de problèmes psychosociaux latents ou peu présents sur la scène médiatique qui se sont ainsi trouvés amplifiés et sont devenus visibles par tous avec notamment des faits divers tragiques. Bien avant 2020 et l’apparition du virus, les psychologues généralistes, les psychologues du travail et des organisations, les psychologues sociaux étaient mobilisés sur des problématiques comme le traitement des personnes victimes d’événements traumatiques, le développement de la résilience, l’épuisement professionnel par affaiblissement des ressources, par un ennui profond ou par une totale perte de sens, les risques psychosociaux au travail et beaucoup d’autres encore comme le harcèlement, la fausse bienveillance, l’espionnage des salariés. Certes le tableau du vivre-ensemble et notamment du travailler-ensemble n’est pas toujours idyllique mais il ne faudrait pas dans une généralisation hâtive en conclure que tout être qui travaille est un souffrant qui s’ignore2. Dans le premier tome, est évoqué ce penchant invétéré pour préférer et mettre en exergue ce qui ne va pas bien. Dans le monde du travail, un ouvrage comme celui de Christophe Dejours, Souffrance en France, paru en 1998, a été davantage plébiscité et s’est plus vendu que celui de Maurice Thévenet, Le plaisir de travailler, diffusé deux ans plus tard. Dans ce troisième tome, ce déséquilibre flagrant et considérable entre les informations négatives et les informations positives au bénéfice des premières a été à nouveau souligné. Il caractérise le monde du journalisme où prédomine ce vieux principe pour favoriser l’audience : « S’il y a du sang, ça fait la une », lequel dérive précisément du constat d’une troublante attirance du public pour les catastrophes, les faits-divers sordides, les malheurs des autres et les exactions à répétition. Il ne s’agit pas d’adopter une vision naïve ou angélique du genre « Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil », titre du film comédie satirique cité plus haut mais, comme cela a été écrit à de multiples reprises, il convient aussi de s’obliger à faire la part des choses, à réfléchir et agir avec discernement.
Une nouvelle sous-discipline : la psychologie positive ?
3À la fin du siècle passé, a émergé en psychologie un nouveau courant de pensée considéré par certains comme une nouvelle discipline : la psychologie positive. Dans la représentation que le public a de la psychologie, celle-ci est de manière évidente fréquemment cantonnée dans le domaine des dépressions, des souffrances, du mal-être, des troubles mentaux affectant des personnes. Sa fonction principale est alors de comprendre ou analyser la source ou les facteurs explicatifs de ces difficultés dans la perspective ensuite d’y remédier. Cette face de la psychologie est la plus visible sur le plan médiatique mais en y regardant de plus près la discipline ne se résume pas seulement à cela comme le démontre d’ailleurs une bonne partie de ce livre et des deux précédents avec des apports de la psychologie sociale cognitive et expérimentale. De cette volonté de ne pas réduire la psychologie à cette seule dimension pathologique est né ce courant de la psychologie positive. À partir du concept de bien-être développé dans le champ de la santé publique au-delà du seul domaine médical, un parallélisme peut être fait à propos de la psychologie positive. Si le bien-être en matière de santé ne se réduit pas simplement à l’absence de maladies et recouvre beaucoup d’autres choses, le bien-être sur le plan psychologique ne se résume pas à l’absence de troubles de nature psychopathologique mais implique de multiples autres aspects de la vie des personnes. Comme évoqué dans le deuxième chapitre et le paragraphe sur l’impuissance acquise et le sentiment d’efficacité personnelle, ce courant de la psychologie positive a été amorcé par Martin Seligman en 1999 lors d’un exposé qui a connu une grande résonnance et a conduit à porter un tout autre regard sur l’utilité et les usages de la psychologie. Cette nouvelle orientation des réflexions, travaux, études et pratiques dans ce domaine connaît un fort succès depuis une vingtaine d’années. Elle se développe sur diverses thématiques comme l’optimisme évidemment, la résilience, l’empathie, les émotions positives, le bien-être, le bonheur ou le sentiment d’efficacité personnelle. La psychologie positive donne aussi matière à une abondante activité de diffusion : articles, conférences, colloques, ouvrages. Elle a un peu partout trouvé ses chantres. Mais derrière cet engouement, se posent quelques questions dont deux méritent d’être traitées. Il est louable de développer une approche en psychologie ne limitant pas son objet à ce qui ne va pas bien, mais est-ce suffisant pour affirmer qu’il s’agit d’une nouvelle branche de la discipline ? En portant un regard sur les méthodes et contenus de la psychologie positive, l’ensemble assez disparate suscite des réserves notamment sur le plan méthodologique. Que peut-on penser de la psychologie positive quand elle fait l’objet d’une présentation sur YouTube ainsi résumée : La psychologie positive : sept exercices magiques, titre qui pourrait amener à penser que nous sommes plus dans le domaine de la croyance que dans celui de la science. Mais je ne dois être le seul à avoir quelques doutes. Michel Hansenne, docteur en psychologie, a publié en 2022 La face cachée de la psychologie positive, un livre dans lequel il souligne les faiblesses théoriques et méthodologiques des travaux et publications estampillés comme relevant de la psychologie positive. De là à parler d’une nouvelle discipline, c’est un peu court même si ce courant de pensée est intéressant à certains égards. Une autre question à son propos est digne d’attention. La promotion de la psychologie positive et de ce qu’elle implique n’est-elle pas une invitation à se recentrer sur soi, son bien-être, son bonheur, ses émotions, sa pleine conscience, son développement personnel sans bien sûr oublier totalement les autres avec lesquelles il faut être personnellement empathique, compatissant, bienveillant et naturellement positif mais… pour son propre bonheur ? Alors, comme le suggèrent quelques auteurs, tout cela ne conduit-il pas à rendre les personnes encore plus autocentrées et ainsi plus éloignées des autres3 ?
Le développement personnel, un nouveau genre littéraire en plein essor
4Dans le deuxième tome, Comment voguer avec discernement sur des mers encombrées d’imposteurs ?, il est rappelé qu’un imposteur est un personnage qui s’attribue des compétences ou connaissances qu’il n’a pas et peut de ce fait exercer une fonction ou une activité de manière usurpée. Un univers médiatique saturé d’informations instantanées, fugaces, déversées de façon intensive et une société de l’apparence où la forme prime sur le fond, créent des champs rêvés pour toutes sortes d’imposteurs opportunistes. Parmi ces champs, celui des relations humaines, du coaching, du développement personnel, du conseil en matière de bien-être ou de bonheur est un bon de terrain de jeu mais surtout un marché florissant pour des imposteurs. Il leur est malheureusement possible de faire illusion avec quelques connaissances techniques rudimentaires souvent d’une grande naïveté et des éléments de langage percutants. Un sociologue, Nicolas Marquis s’est intéressé à ce qu’on pourrait presque appeler un genre littéraire à savoir les livres sur le développement personnel qui connaissent un grand succès et attirent des milliers pour ne pas dire des millions de lecteurs avec des titres ou des sous-titres attractifs au possible4. Il me semble instructif d’en mentionner certains d’entre eux parmi les plus connus et les plus vendus :
- Les cinq blessures qui empêchent d’être soi-même ;
- Ta deuxième vie commence quand tu comprends que tu n’en as qu’une ;
- L’homme qui voulait être heureux ;
- Le jour où j’ai appris à vivre ;
- Osez l’optimisme 10 clefs pour réenchanter votre quotidien ;
- Les quatre accords Toltèques, la voie de la liberté personnelle ;
- Ce livre va changer ta vie.
5Comment est-il possible de résister devant de telles invitations ? Est-ce vraiment un nouveau genre littéraire ou n’est-ce pas aussi un marché économique florissant comme l’écrit également Nicolas Marquis et peut-être même un nouvel « opium du peuple » ? L’étude du profil des auteurs de ces ouvrages révèle aussi une grande hétérogénéité puisque s’y retrouvent une ancienne vendeuse devenue coach, une graphiste reconvertie dans la communication et l’événementiel, un écrivain titulaire d’un doctorat en sciences économiques, la fondatrice d’un mouvement de promotion de l’optimisme se décrivant elle-même comme une self made woman, un chamane ayant vécu une expérience de mort imminente et un coach dans le domaine sportif. Il y a quelques ouvrages rédigés par des auteurs ayant une formation reconnue en sciences humaines et sociales, en psychothérapie par exemple mais ils sont loin d’être majoritaires et leurs livres n’atteignent pas les records de vente des autres. Bien sûr, la liberté d’expression est une loi fondamentale de la démocratie et il n’est nullement question de réserver à un cercle d’initiés le droit de parler du développement personnel. Est attribué à Voltaire un propos que celui-ci n’a d’ailleurs jamais prononcé mais qui a néanmoins du sens dans le cas présent : « Je ne suis pas d’accord avec ce que vous dites, mais je me battrai jusqu’au bout pour que vous puissiez le dire. » Ceci n’empêche pas d’être interrogatif et perplexe quant au succès considérable de ces productions relevant malgré tout du domaine de la psychologie, mais d’une psychologie intuitive, spontanée, empirique, théoriquement et méthodologiquement plus que douteuse.
6À une année d’écart, en 1983 et en 1984, deux professeurs d’université en psychologie sociale ont publié chacun un ouvrage considéré comme des références obligées dans le domaine : Jacques-Philippe Leyens avec Sommes-nous tous des psychologues ? et Jean-Léon Beauvois avec La psychologie quotidienne. L’un et l’autre décrivent et analysent un fait établi et répandu : tout le monde se livre spontanément et constamment à une activité de « psychologue amateur » lorsqu’il s’agit de parler des autres, des groupes, de leur vie, de soi-même, de ses enfants, de son conjoint ou conjointe, de ses collègues de travail, des événements et faits-divers du monde, de la personnalité des gens célèbres, des hommes et femmes politiques, des déboires ou bonheurs amoureux des people… Cette psychologie spontanée se débite dans toutes sortes d’endroits ou de lieux sociaux : au comptoir d’un bar, dans les dîners en ville, à la terrasse d’un restaurant, dans les réunions de famille, dans les groupes ou équipes professionnelles, dans les travées d’un supermarché, à la sortie d’une école maternelle… Personne n’a besoin d’avoir fait de longues études en psychologie pour se livrer à cet exercice quasi naturel. Ainsi, il n’y a guère matière à s’émouvoir du fait que cette « psychologie quotidienne » s’exprime aussi à travers un genre littéraire assez prisé. Toutefois, il convient aussi de savoir faire la part des choses entre ce qui s’appuie sur de véritables données scientifiques, des expériences contrôlées, des observations systématiques, des examens cliniques intensifs et ce qui est en fait une série d’impostures ou de fausses vérités, lesquelles peuvent se révéler toxiques notamment quand elles touchent à la souffrance mentale ou au mal-être.
La psychologie comme science et le psychologue comme professionnel
7L’augmentation de la détresse psychologique des personnes dans les circonstances actuelles pourrait conduire à ce que cette souffrance devienne un « marché du malaise » selon l’expression de Nicolas Marquis, un marché profitable et ouvert à toutes sortes de spécialistes autoproclamés. Sur un réseau professionnel, sévit une Maîtresse de conférences en informatique, chercheuse dans un laboratoire d’informatique du parallélisme, proposant ses services comme… coach de vie, ni plus, ni moins. Face à ce risque, il est nécessaire de rappeler que la profession de psychologue est réglementée. Ce titre est décerné à des personnes titulaires d’une licence de psychologie ou d’un master de psychologie ayant produit et soutenu un mémoire et effectué un stage professionnel. Seules ces personnes sont autorisées à utiliser le titre de psychologue, à le mettre sur une plaque à l’entrée de leur lieu de travail, à le mentionner sur leur carte ou documents professionnels et globalement à en faire état publiquement. Tout le monde ne sait pas cela mais sur ce plan les choses sont parfaitement claires. Par contre, un certain flou, source de confusions ou d’ambiguïtés, entoure le terme de « psychologie » pour lequel il ne saurait y avoir d’AOC, d’appellation d’origine contrôlée, puisqu’il est dans le domaine public et donc d’un usage ouvert à tous. D’un point de vue académique, la psychologie est une discipline scientifique objet de recherche et d’enseignement essentiellement dans les universités qui donne lieu à des diplômes de psychologie aux trois niveaux : licence, master, doctorat. Mais rien ne peut interdire à une personne ne détenant aucun de ces diplômes de se définir comme formateur, consultant, coach, enseignant en psychologie par exemple dans une école de commerce ou dans une société de conseil. Il est de la responsabilité des équipes pédagogiques et des dirigeants de société de faire un tel choix. Comme cela a été rappelé plus haut, chacun se vit un peu comme psychologue avec un possible effet de sur-confiance du type Dunning-Kruger, plus on est ignorant et plus on croit savoir. Alors effectivement tout est possible et il est légitime que le public ait un peu de mal à s’y retrouver, à faire la part des choses, à trier entre une formation universitaire validée avec des compétences avérées et un discours opportuniste manipulant habilement des éléments de langage à la mode. Dans le deuxième tome sur l’autodéfense intellectuelle face à ce qu’il convient d’appeler des imposteurs, est mentionné cet épisode où une consultante d’un cabinet, chargée de promouvoir un nouveau test de personnalité, rembarre une stagiaire-étudiante qui l’interroge sur la validité statistique du test en question5. En bref, son argumentation est édifiante : peu importe qu’il soit valide ou non, du moment que son mode de passation et son packaging plaisent aux utilisateurs. Ces propos vont sans doute passer pour un plaidoyer pro domo ou une position corporatiste dépassée pour certains qui souhaiteraient dans ce domaine-là comme dans d’autres plus de libéralisme, moins d’entraves, un libre champ pour toutes les initiatives individuelles. Mais, c’est une grave erreur de jugement de leur part car ce qui est en jeu n’est pas la liberté d’entreprendre ou d’agir à sa guise mais la valeur et la qualité de l’apport à des populations en relation avec des enjeux de société.
8Cette position unitaire est largement partagée par les professionnels de la psychologie, enseignants, chercheurs, praticiens, mais elle ne doit pas masquer le fait qu’il n’y a pas d’unité de la psychologie. Elle est une discipline d’une grande voire d’une très grande diversité sans parler des confusions avec des fonctions qui sont dans son champ sans l’être totalement. Il faudrait presque consacrer un long paragraphe à ce qui pourrait être désigné comme la « nébuleuse psy » avec les psychiatres qui sont des médecins spécialistes, les psychologues détenteurs d’un titre reconnu, les psychanalystes ayant suivi une cure psychanalytique lesquels psychanalystes peuvent être des médecins, des psychologues, des philosophes et même n’importe qui, les psychothérapeutes pratiquant comme leur nom l’indique des psychothérapies, les psychologues scolaires, les conseillers d’orientation-psychologue, les psychomotriciens titulaires d’un diplôme d’État. On comprend que le public peine parfois à s’y retrouver au milieu de tout ce beau monde.
Derrière une apparence d’unité : des divergences, des ruptures
9Le terme de nébuleuse pourrait très bien s’appliquer aussi à la psychologie tels que sont organisés les recherches et les enseignements dans les universités, lesquels sont d’une telle hétérogénéité qu’il est légitime de se demander ce qui peut rassembler ces disparités sous un seul et même intitulé : la psychologie. Mais, cela doit caractériser aussi d’autres disciplines des sciences humaines et sociales et probablement au-delà y compris dans des domaines des sciences dites exactes. Pour faire court, rappelons que classiquement la psychologie est subdivisée en quatre grandes sous-disciplines : la psychologie générale portant sur les grandes fonctions psychologiques comme la perception, la mémoire, la motivation, l’apprentissage, l’intelligence, l’émotion, etc., la psychologie du développement traitant de la manière dont se développent ces grandes fonctions à partir de la naissance de l’être humain, la psychologie pathologique étudiant comme son nom l’indique les troubles psychiques ou mentaux et la psychologie sociale dont le domaine est celui des interactions entre la personne et son environnement social, les autres, les groupes, les organisations, les idéologies. Chacune des grandes sous-disciplines de la psychologie se subdivise elle-même en sous-sous-disciplines en fonction d’objets plus restreints mais aussi en relation avec des orientations théoriques et méthodologiques différentes sinon divergentes. Il n’est pas indispensable d’aller plus loin dans cette ébauche de classification. Elle n’a rien d’extraordinaire ou d’atypique. C’est une affaire de cuisine interne comme partout ailleurs chez les scientifiques.
10Ce panorama destiné à des non avertis ne serait pas complet si n’était pas mentionné le fait qu’il y a dans ce domaine de la psychologie des divergences fondamentales, des lignes de fracture importante à la fois sur le plan des théories et sur celui des méthodes. Le contenu de celles-ci est tel qu’on peut se demander comment de telles orientations antagonistes peuvent effectivement coexister sous l’intitulé unique de psychologie. Au risque d’apparaître comme un caricaturiste éhonté ou pire un jeteur d’huile sur le feu, d’un point de vue général et cela ne date pas d’hier, la psychologie est écartelée entre deux grands pôles : celui d’une psychologie clinique longtemps influencée par la psychanalyse et ses différentes obédiences dans le traitement des troubles mentaux, celui d’une psychologie d’orientation expérimentale assez proche aujourd’hui des sciences cognitives voire des neurosciences. L’exemple de l’approche de l’autisme est particulièrement significatif. La France a pris plusieurs décennies de retard dans le traitement de l’autisme parce que le modèle prédominant et quasi exclusif d’explication de l’autisme s’appuyait sur une approche d’inspiration psychanalytique supposant un dysfonctionnement majeur et précoce de la relation mère-enfant et entraînant ainsi un certain type de prise en charge des autistes. Il a fallu que des associations de parents d’enfants autistes réagissent vis-à-vis de cette approche exclusive et culpabilisante pour eux afin que les choses bougent. Elles ont pris connaissance de l’existence d’autres formes de prises en charge comme les TCC, techniques cognitivo-comportementales, ailleurs et dans des pays voisins de la France. Elles ont constaté que ces autres formes de traitement donnaient des résultats positifs stables, des améliorations significatives. Les intervenants affiliés à l’approche psychanalytique ont bien sûr objecté que ces nouvelles techniques ne traitent que les symptômes et pas les causes profondes, ce à quoi répondent les tenants des TCC que ce point de vue est totalement erroné compte tenu des résultats obtenus. Cette affaire concernant l’autisme est un exemple de grandes divergences qui fragmentent le domaine de la psychologie et relativise de toute évidence son image unitaire. Un personnage extérieur au monde de la psychologie auquel je faisais état de ces démêlés sur l’autisme en France me demanda pourquoi les tenants de ces deux approches ne pouvaient pas s’entendre au lieu de se quereller sur des questions théoriques. Grande fut mon envie de lui répondre d’abord qu’il avait raison de poser cette interrogation et qu’effectivement entre l’eau chaude et l’eau froide il y a l’eau tiède. Mais, qu’aurait dit Nicolas Copernic si on lui avait dit que sa théorie de l’héliocentrisme est bien intéressante mais qu’il devait essayer de se mettre d’accord avec ceux qui pensent que c’est le soleil qui tourne autour de la terre ? La même question pourrait être posée à propos de la théorie de la relativité d’Albert Einstein par rapport aux théories antérieures. Vus de l’extérieur, ces conflits scientifiques pourraient être perçus comme des guerres de chapelle, des querelles d’égos, ce qui n’est pas impossible dans certains cas mais ne correspond pas à la réalité concernant l’autisme et bien sûr la théorie de Nicolas Copernic et celle d’Albert Einstein. Le philosophe des sciences Thomas Kuhn, dans son ouvrage de 1962 La structure des révolutions scientifiques, soutient l’idée selon laquelle l’évolution des connaissances scientifiques dans un domaine ne suit pas nécessairement un process de type cumulatif, étape par étape, progrès par progrès mais plutôt un cycle révolutionnaire avec des ruptures et des renversements paradigmatiques. Ces nouveaux paradigmes qui donnent lieu à l’instauration d’un nouvel état stabilisé des connaissances, ce que Thomas Kuhn appelle « la science normale », connaîtra à son tour, plus tard, des ruptures ou des renversements paradigmatiques. Ainsi tourne le cycle des révolutions scientifiques et progressent les savoirs sur un objet donné. L’évolution de la discipline psychologie comme les autres a suivi, suit et suivra encore ce cycle au fond vertueux de la connaissance. Un autre grand philosophe français des sciences, Gaston Bachelard, a exprimé une idée très proche puisque pour lui les vérités portées aujourd’hui par certains scientifiques ne sont ni éternelles, ni universelles puisqu’elles pourront être considérées comme fausses et démontrées comme telles par d’autres scientifiques demain.
Et pour finir : retour à cette délicate équation être soi-même et vivre ensemble
11Ce troisième tome de ce qui est une trilogie avec les deux précédents n’a pas comme perspective de proposer une vision globale ou une théorie générale concernant le fonctionnement psychologique des êtres humains dans leur relation les uns avec les autres. Comme pour les deux autres livres, l’objectif est beaucoup plus restreint à savoir extraire du domaine de la psychologie sociale des savoirs reconnus et des résultats expérimentaux dont la connaissance peut constituer un moyen parmi d’autres de s’autodéfendre intellectuellement. Dans cet univers entropique et déroutant de l’information, il est essentiel de réfléchir et d’agir avec discernement face à des situations ambigües voire suspectes, de faire la part des choses entre ce qui relève d’une vérité scientifique même provisoire et ce qui est le produit d’une croyance invérifiable, de distinguer la parole d’un spécialiste reconnu sur un sujet donné de celle d’un imposteur illusionniste s’étant autoproclamé compétent. Néanmoins, il s’agit d’un vaste programme lié à des enjeux de société puisque comme cela a été rappelé dans ce troisième livre, le fait d’avoir ce regard psychosocial sur le monde des humains et de détenir des connaissances sur différents processus sociocognitifs agit positivement sur la prise de conscience de notre vulnérabilité dans certaines situations collectives, sur le développement de l’esprit critique par rapport à un point de vue, sur la capacité de chacun de penser par soi-même. Ce dernier point ne signifie pas penser tout seul dans son coin à l’abri de toute influence des autres ou de l’extérieur. Quant à l’esprit critique, il n’est pas une réfutation systématique ou une remise en cause de tout. Le grand mathématicien et aussi philosophe, Henri Poincaré, a eu cette belle formule : « Douter de tout ou tout croire sont deux solutions également commodes qui, l’une comme l’autre, dispensent de réfléchir. »
12Ce livre et les deux précédents sont nés à la suite de nombreuses conférences données auprès de publics assez larges et surtout non composés de spécialistes de la psychologie sociale. Ces rencontres avec des personnes curieuses, intéressées, animées par la volonté de mieux comprendre le monde dans lequel elles vivent s’inscrivent dans une perspective de vulgarisation ou de diffusion d’une culture scientifique. Cette mission est essentielle car elle est précisément de nature à permettre le développement ou le renforcement de l’esprit critique et de l’art du discernement. Une grande partie des auditeurs de ces conférences découvrent une discipline qu’ils connaissent mal probablement pour plusieurs raisons. La première est qu’ils ont une représentation globale, indifférenciée et stéréotypée de la psychologie très fréquemment et presqu’exclusivement associée au traitement des troubles mentaux et à l’approche psychanalytique. La deuxième est que cette représentation de la psychologie biaisée et tronquée a été longtemps favorisée par les médias. Il fut un temps où pour n’importe quel problème de société ou de relations humaines, il y avait le psychanalyste de service présent sur les plateaux pour donner un avis autorisé et écouté sur n’importe quel sujet. Ceci est moins vrai aujourd’hui en partie parce que la psychanalyse fait moins recette par rapport à d’autres approches plus dans l’air du temps, les neurosciences ou les sciences cognitives par exemple. La troisième raison est imputable aux enseignants et chercheurs en psychologie eux-mêmes qui ne sont sans doute pas suffisamment actifs pour promouvoir leur discipline, leurs recherches, leurs travaux auprès du grand public. Il est vrai que des conférences de ce type, des articles ou des ouvrages de vulgarisation scientifique ne font pas beaucoup avancer une carrière dans le monde universitaire. En fréquentant régulièrement un réseau social professionnel, on peut remarquer la présence assidue de sociologues, de philosophes, de chercheurs en information-communication, de physiciens et d’autres scientifiques mais pas tellement de spécialistes de la psychologie. La discipline éprouve peut-être une répugnance à entrer dans une sorte de démarche d’autopromotion ou de marketing. Dans le champ de la psychologie sociale cognitive et expérimentale, un phénomène d’édition a pourtant marqué les esprits. Robert-Vincent Joule et Jean-Léon Beauvois ont publié en 1987 un livre intitulé Petit traité de manipulation à l’usage des honnêtes gens qui en bref présente et illustre de manière humoristique et vécue les propriétés d’une théorie, celle de l’engagement et de ses conséquences en termes de manipulation des personnes. Cet ouvrage a connu un succès considérable, près d’un demi-million d’exemplaires vendus, des rééditions en 2002 et en 2014. Il me revient qu’avant sa parution, le choix du titre a fait débat chez les deux auteurs et que le titre retenu pour l’ouvrage aurait pu être quelque chose comme Psychologie sociale de l’engagement. Il semble que le succès du livre n’aurait pas été le même avec ce titre plus académique et donc moins attractif pour un public élargi.
13Dans les dernières lignes de ce livre, il faut revenir sur la grande problématique qui le sous-tend et à laquelle la psychologie sociale peut donner quelques éléments ou pistes de réponse à son niveau et dans son champ de compétences. Rappelons-la avec quelques variantes dans la formulation des questions : Comment être soi-même tout en vivant avec les autres ? Comment vivre ensemble tout en devenant ce qu’on est ? Comment se développer personnellement sans s’autocentrer sur soi et oublier les autres ? « Deviens ce que tu es », cette expression souvent répétée en boucle quand on aborde ce genre de sujet est de Friedrich Nietzsche. Mais celui-ci n’en a pas dit beaucoup plus comme le notent Jean-François Dortier et Jean-François Marmion dans leur éditorial d’un numéro des Grands Dossiers des sciences humaines « Devenir soi-même ». Alors, toutes les interprétations sont possibles y compris les plus radicales. C’est par exemple le cas d’un livre de l’ancien Conseiller d’État, Jacques Attali, dont le titre est plus qu’évocateur : Devenir soi. Prenez le pouvoir sur votre vie. Ce livre et son message ont connu une forte audience mais ont aussi suscité quelques émois. Dans la communauté des psys, Christophe André, médecin psychiatre déjà cité, a fait part de son étonnement de lire chez un ancien conseiller d’état, économiste, chef d’entreprise des propos comme : il n’y a rien à attendre de qui que ce soit, il faut se prendre soi-même en main, ne compter que sur ses propres forces et son énergie. Cela donne l’impression qu’être soi-même et vivre ensemble sont comme deux pôles qui ne peuvent que se repousser l’un l’autre. L’apport de la psychologie sociale sur ce qui semble être un insoluble problème pourrait bien être caractérisé par trois termes : la contextualisation, l’interaction et la construction.
14D’innombrables expériences dont beaucoup ont été rapportées dans ce livre montrent que le type de rapport entre une personne et les autres est étroitement dépendant du contexte, de la situation, de l’environnement social. Un être humain ordinaire est capable de se transformer en un tortionnaire, d’être incapable de réagir lorsqu’il est témoin des difficultés d’un autre, de favoriser outrageusement son groupe d’appartenance, d’être pris de folie lorsqu’il accède à un poste de pouvoir. Mais le même être humain tout aussi ordinaire va faire preuve d’une véritable bienveillance ou d’un authentique altruisme sans attente de retour, va prendre le risque pour lui-même de se comporter comme un déviant pour sortir des routines au bénéfice de tous, va s’unir spontanément avec ses ennemis d’hier pour des motifs d’intérêt supérieur transcendant toutes les divergences, va s’engager dans une minorité active pour faire changer les choses. Alors, c’est presqu’à n’y rien comprendre. Il serait tentant d’expliquer ce qui pourrait ressembler à des incohérences par des différences ou des types de personnalité mais des recherches montrent que cette explication ne tient pas comme par exemple pour les expériences sur la soumission à l’autorité où la personnalité n’entre pas en jeu dans le processus d’obéissance à des ordres totalement absurdes ou humainement inacceptables. Le facteur déterminant est le contexte avec ses éléments matériels, ses composantes relationnelles, ses références symboliques ou idéologiques.
15Néanmoins, on peut imaginer l’effet d’une interaction entre le contexte tel qu’il est défini ci-dessus et des composantes de la personnalité. Cette interaction est par exemple assez frappante dans l’innovation et la sérendipité qui sont très souvent une heureuse rencontre entre un style personnel de l’innovateur et un contexte organisationnel propice à l’expression du potentiel de créativité des personnes. Une interaction est une action réciproque entre deux éléments d’un système, l’un agit sur l’autre qui réagit, cette réaction est susceptible de modifier le premier élément qui réagit en conséquence vers le second et ainsi de suite. Ce concept d’interaction est couramment utilisé dans beaucoup de disciplines scientifiques en biologie, en physique, en mathématiques, en médecine… Il a également tout son sens dans les sciences humaines et sociales, donc en psychologie et en psychologie sociale. En effet, est tout à fait appropriée, pertinente et opérationnelle, cette idée d’actions réciproques entre une personne configurée d’une certaine manière et son environnement social également structuré selon certaines caractéristiques.
16Enfin, dans les relations entre soi et les autres, rien n’est jamais déterminé pour toujours. Tout se construit mais peut se déconstruire et se reconstruire autrement suivant le jeu des interactions sociales mais avec quand même une partie nécessairement stable, celle des finalités et du sens que la personne souhaite donner à sa vie. En psychologie, l’orientation théorique dite « constructiviste » est issue de la psychologie du développement et notamment des travaux de Jean Piaget sur la manière dont l’enfant construit ses connaissances sur les objets du monde par ses explorations personnelles, stimulé il est vrai, par son environnent éducatif, familial et scolaire. Dans sa théorie historico-culturelle du fonctionnement psychologique diffusée dans Pensée et langage en 1934, Lev Vygostki, un psychologue-pédagogue soviétique prend en partie le contre-pied de la conception piagétienne. Il souligne l’importance des variables sociales et du contexte culturel dans ce processus de construction des connaissances et globalement de l’intelligence. Le courant dit de l’intelligence sociale, au carrefour de la psychologie du développement et de la psychologie sociale, les travaux de Willem Doise, de Gabriel Mugny et d’Anne-Nelly Perret-Clermont vont dans le même sens. Des expériences faites avec des enfants et mêmes avec des adultes montrent que ceux-ci réussissent mieux des épreuves de raisonnement quand celles-ci sont socialement contextualisés, quand elles sont marquées par des enjeux sociaux ou associées à des valeurs partagées comme l’égalité ou la justice6.
17La question centrale, rester soi-même et vivre ensemble, cette délicate équation à traiter quasi quotidiennement, relève bien de processus psychosociaux impliquant des interactions dynamiques et évolutives entre la personne et son environnement social. Le dernier mot, je souhaite le donner au fascinant romancier et poète d’origine allemande mais devenu suisse Hermann Hesse dont le regard me semble d’une justesse pénétrante lorsqu’il écrit dans un prologue à son roman Demian : « La vie de chaque homme est un chemin vers soi-même, l’essai d’un chemin, l’esquisse d’un sentier. Personne n’est parvenu à être entièrement lui-même ; chacun cependant tend à le devenir, l’un dans l’obscurité, l’autre dans plus de lumière, chacun comme il le peut. »
Notes de bas de page
1Mikhail Lermontov est un poète et romancier russe né en 1814 et mort en 1841 de manière tragique lors d’un duel comme d’ailleurs Alexandre Pouchkine cet autre grand poète, dramaturge et romancier russe décédé dans les mêmes circonstances quatre ans plus tôt.
2Cette formule est inspirée de celle attribuée par l’auteur Jules Romain au docteur Knock : « Tout homme bien portant est un malade qui s’ignore. »
3La question est explicitement posée dans le titre d’un article de Christophe André : « Le développement personnel rend-il égoïste ? ».
4Nicolas Marquis, Du bien-être au marché du malaise. La société du développement personnel, Paris, Presses universitaires de France, 2014.
5À propos de l’étudiante rembarrée sur la validité d’un test voir François Le Poultier, Comment voguer avec discernement sur des mers encombrées d’imposteurs ?, op. cit., p. 30-31.
6Voir sur ce sujet Willem Doise, Logiques sociales dans le raisonnement, Neuchâtel, Delachaux et Niestlé, 1993.

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