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Les villes et le roi

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David Rivaud

Troisième partie. Affirmation du modèle participatif (fin XVe-début XVIe siècle)

Chapitre VIII. Enraciner l'accord militaire et fiscal

Texte intégral

1Si les premières décennies du xvie siècle révèlent une aptitude militaire municipale tout à fait originale, il faut en chercher la raison d'être au cœur du système de correspondances fiscales et militaires mis en place sous Charles VII et dont le fonctionnement assure de notables services à la monarchie. C'est à l'occasion des conflits princiers de la seconde moitié du xve siècle que ces contreparties se trouvent entérinées et plus encore conduisent, au-delà du fait militaire, à un véritable accord de gouvernement. Les documents financiers des corps de villes sont les portées qui permettent de suivre de cette nouvelle orchestration. Ils en révèlent les multiples nuances et montrent que les capacités de manœuvres du roi comme des corps de ville se répondent et travaillent à redéfinir l'ordre politique du royaume.

Une nouvelle étape dans la redistribution fiscale

2Sans qu'il n'y ait de véritables innovations, le transfert de l'argent du roi vers les caisses municipales va atteindre, quelque part entre 1480 et 1520, un nouveau palier. Comme la consommation et le marché ne semblent pas suffisamment gonfler le rapport des octrois anciennement concédés, Louis XI, suivi en cela par Charles VIII puis Louis XII, vont mettre en place de nouvelles formes de redistribution.

L'âge d'or du don royal

  • 1 Poitiers, arch. comm., Registre n° 11, f° I v°.
  • 2 C'est du moins ce qui semble être stipulé dans un acte de 1474 dans lequel le roi fait état de tou (...)
  • 3 Id., registre de délibérations n° 16, p. 65, 17 novembre 1517.
  • 4 Il semble que cette somme soit à prendre sur le droit de « barrage » (ibid., p. 159, 29 mars 1518)
  • 5 La première mention de ce droit pour le pavage apparaît en 1510. 300 livres sont alors données par (...)
  • 6 Id, registre de délibérations n° 11, p. 89 (1511), mais aussi, H 34, H 35, H 37, H 38, H 39 (1561)
  • 7 Id., H 33, 28 janvier 1506. Peut-être s'agit-il d'une allusion aux 1000 livres données depuis le r (...)
  • 8 Somme donnée par le receveur du roi en Touraine (Martin Berthelot) sur demande du roi pour défraye (...)
  • 9 Somme cédée en deux fois (id., CC 42, f° 12).
  • 10 Il s'agit certainement pour le roi de récompenser la ville dont le budget est alors largement grev (...)
  • 11 Id., CC 57, f° 97.

3C'est en effet sous la forme simple et déjà utilisée par Charles VII (ou d'autres avant lui, on l'a vu à Poitiers) du don en argent directement effectué aux corps de ville que passe d'abord cet activisme royal. Le fait s'illustre particulièrement à Poitiers où le corps de ville, depuis 1487 au moins, reçoit 1 000 livres par an de Charles VIII, somme accordée en réponse aux requêtes formulées par les bourgeois lors de sa première entrée en ville1. Ce versement, demandé « pour aider a supporter les fraiz et charges de la ville », est peut-être la suite d'une ancienne concession (de mille livres également) accordée au milieu des années 1460 par Louis XI pour assurer la mise en navigation du Clain2. Bien que les versements ne soient pas mentionnés dans les rares (et trop hétérogènes) registres de comptes conservés pour le début du xvie siècle, il en est toujours question en 1517 et 1518 lorsque les bourgeois tentent d'obtenir le renouvellement de ce droit qui semble s'être alors perdu3. L'enquête menée dans les archives (désormais répertoriées et collationnées) permet aux membres du conseil de la ville de retrouver les lettres originales, puis de déléguer un représentant urbain vers le roi. En mars 1518, une nouvelle fois, un acte de confirmation est obtenu4. À côté de cette concession, importante mais irrégulièrement mentionnée, la ville reçoit également de l'autorité souveraine la somme de 100 livres par an affectée plus précisément au pavage de la ville5. Prélevée sur la taille (ou en 1526, sur la recette d'un barrage), elle est régulièrement signalée après 1511 et la ville obtiendra son renouvellement jusqu'en 15616. Enfin, dans cette liste d'aides directes à la commune de Poitiers, il conviendrait peut-être également d'ajouter certaines sommes qui semblent accordées au coup par coup par le roi. C'est du moins ce qu'une attache du sénéchal du Poitou (André de Vivonne) laisse supposer en 15067. La situation ne semble pas singulière à Poitiers. Malgré une position financière plus favorable, le corps de ville de Tours bénéficie aussi de quelques apports directs en numéraire, et cela dès le règne de Louis XI (500 livres en 14708). Le don fait en 1476 (1 000 livres) a comme objectif d'aider la ville dans le rachat d'un héritage pour fournir une pièce de bœuf tous les ans aux lépreux9. Si les versements de 1487 et 1488 (100 et 280 livre10) relèvent de procédures exceptionnelles, le don de 2 000 livres accordées annuellement après 1507 (et au moins jusqu'en 1511) atteste clairement l'intention du roi d'aider la ville pour la réalisation des fontaines11. Comme le montre ce dernier cas, les sommes sont de plus en plus conséquentes et ces dons dépassent le cadre des concessions ponctuelles qui prévalaient jusque-là dans de pareils cas. Ils acquièrent une certaine régularité et deviennent des recettes de plus en plus stables à partir desquelles les corps de villes peuvent véritablement bâtir leur politique.

Bourges après le grand incendie de 1487 : entre don et concession d'octrois

  • 12 Ch. Felicelli, « Le feu, la ville et le roi : incendie de la ville de Bourges en 1252 », dans Étud (...)
  • 13 Bourges, arch. comm., CC 152. Ce document qui semble essentiel pour comprendre l'urbanisme berruye (...)
  • 14 C'est du moins ce que stipulent les comptes en 1492 (id., CC 264, « Voyages »). Ce droit de 5 deni (...)

4Avant d'entrer dans l'analyse des traditionnelles concessions de droits royaux, il convient de faire une place particulière à Bourges restée jusque-là, faute de documents, à l'écart de l'analyse fiscale. Avec le grand incendie de juillet 1487, la ville, alors à son apogée, ayant récupéré les fameuses foires de Lyon et voyant prospérer sa société marchande, retombe brutalement dans l'atonie économique. Catastrophe sans précédent (bien que la ville soit coutumière du fait et que plusieurs autres grands incendies aient déjà rythmé son histoire12) et qui laisse une bonne partie de la ville détruite. Si, on peut le penser, les bourgeois entreprennent rapidement la reconstruction de leur cité, il convient de souligner l'attention exceptionnelle portée par le roi à cette grande entreprise. Avec le don pour 5 ans (1488-1492) du rapport de 5 deniers (ou « quintal ») sur le droit de gabelle prélevé sur l'ensemble des greniers du royaume, Charles VIII offre à la ville une situation tout à fait privilégiée. L'aide est conférée pour la reconstruction et n'est pas gérée par les responsables municipaux. Les comptes de recettes et de dépenses qui sont conservés13 montrent que globalement, 11 500 livres sont cédées par le roi et permettent de mener promptement la reconstruction de la cité (et au passage l'édification d'un nouvel hôtel de ville). Concession substantielle et exceptionnelle dont les bourgeois vont chercher le renouvellement14. S'ils ne l'obtiennent pas, ils auront, comme ceux de Tours, la cession de plusieurs autres octrois qui vont constituer sur un plus long terme la principale source de revenus de la municipalité.

De nouvelles concessions d'octrois

5Pour en comprendre la portée et la nature, il convient d'analyser celles-ci à la croisée de l'histoire fiscale de chaque ville et des différents types d'octrois concédés.

  • 15 Id., CC 121 et CC 262.
  • 16 Id., CC 121, 11 décembre 1493.
  • 17 Id., CC 293 et CC 294, chapitre « recettes ».
  • 18 La collectivité ne doit pas cependant avoir l'entière gestion de cet approvisionnement étant donné (...)
  • 19 Id., CC 121.
  • 20 L'acte est octroyé pour huit ans (id., CC 121, 26 novembre 1500).

6À Bourges, les droits sur le sel constituent la grande avancée fiscale de la fin du xve siècle même si bien avant 1488 la ville semble tirer quelques revenus de son grenier. En effet, dès 1471, Louis XI attribue aux bourgeois la quatrième partie des dix deniers du droit de gabelle sur le grenier de la ville (soit 2 sous 6 deniers) qui revient traditionnellement aux caisses royales, cession que Charles VIII confirme en 1482 pour quatre ans, puis en 1483 pour dix ans et renouvelle dès 149015. En 1493, alors que la levée exceptionnelle du « quintal »s'achève, le roi accorde un doublement du droit de 2 sous 6 deniers, qui passe désormais à 5 sous16. Ce revenu qui entre alors dans le patrimoine urbain est renouvelé sans contestation par Louis XII, puis par François Ier17. À ce droit de gabelle détourné au profit des corps de ville s'ajoute à Bourges comme à Tours celui de l'approvisionnement du grenier. Mentionné dans la capitale berruyère autour de 1490 (date à laquelle la ville en recueille une faible quantité d'argent18), l'approvisionnement du grenier semble renouvelé par Charles VIII19. C'est Louis XII qui, cette fois, bouleverse les choses en en récupérant le profit et demandant qu'il soit désormais affermé à un particulier. Il s'agit d'une perte sèche pour la ville qui est comblée cependant par la concession (en dédommagement pour ainsi dire) d'un droit de 100 sous à prendre par muid vendu au grenier de Bourges20. Si le rapport financier reste modeste (autour de 400 livres par an), il est sans aucun doute plus régulier et permet aux bourgeois de se dégager de la lourde charge de l'approvisionnement.

  • 21 La ville tente d'obtenir la franchise de cette imposition à partir de janvier 1493. Cette franchis (...)
  • 22 Id., CC 52, f° 56. Louis XII stipule en fait qu'il a voulu reprendre en main ce droit de 12 denier (...)
  • 23 C'est autour de 1512 que celui-ci est officiellement versé dans les comptes municipaux. Il semble (...)

7La redistribution locale des impositions royales indirectes se fait aussi par la cession de droits sur la circulation des marchandises. Tours, comme Bourges, vont en obtenir au tournant des xve et xvie siècles. Avant 1500, la démarche du corps de ville tourangeau consiste à demander un complet affranchissement de ces aides et notamment de celle de 12 deniers pour livres qui pèse sur les marchandises vendues en ville. Après de délicates et coûteuses négociations, le conseil obtient en 1493 satisfaction21. De cet affranchissement, la collectivité n'en tire pas d'avantages financiers. Louis XII, encore fois, bouleverse cet équilibre lors- qu'en janvier 1500 il décide de céder le produit de cette taxe à la collectivité, à concurrence toutefois de 1 500 livres au maximum22, façon de ne pas perdre la totalité du revenu et de légitimer son rétablissement. De semblables mutations ont lieu à Bourges toujours sous le règne de Louis XII autour de « l'imposition foraine ». Levée sur le bois, le charbon, les bêtes vivantes et les poissons, comme sur la quincaillerie, la chaux, la ferronnerie, ou encore la garance, le chanvre et les cuirs, cette aide fait l'objet de tractations depuis plus de quinze ans lorsqu'en 1512 le roi en accorde le revenu à la ville23.

Un incontestable gonflement des recettes urbaines

8Malgré le caractère anecdotique de certains octrois, et même si le bilandemanderait de singulières nuances (à l'instar du rapport de l'approvisionnement des greniers à sel), il est difficile de nier la réalité : les corps de villes sont riches. Les comptes tourangeaux et berruyers permettent de dresser un état précis du rapport de ces différentes concessions royales et l'évolution ne laisse pas de doute(voir tableaux suivants).

  • 24 À savoir, les rapports du 13e du vin, de l'imposition foraine et des droits à prendre sur le sel.

Tableau 6 - Rapport des octrois royaux24 à la ville de Bourges entre 1487 et 1535 (en moyennes quinquennales).

Tableau 6 - Rapport des octrois royaux24 à la ville de Bourges entre 1487 et 1535 (en moyennes quinquennales).
  • 25 Si les comptes tourangeaux présentent une remarquable continuité sur la période, certains manques (...)

Tableau 7 - Rapport des octrois royaux à la ville de Tours entre 1460 et 1535 (en moyennes semi- décennales25 ).

Tableau 7 - Rapport des octrois royaux à la ville de Tours entre 1460 et 1535 (en moyennes semi- décennales25 ).
  • 26 En effet, à part les revenus sur le sel directement en prise avec l'activité économique puisqu'ils (...)
  • 27 Le rapport financier de ce nouveau droit est tout à fait conséquent puisqu'en 1501, il permet à la (...)
  • 28 Les marchands de Tours, par la bouche de Claude Quetier et d'Antoine Buré, en juin 1501, offrent e (...)
  • 29 Id., CC 2, 13 mars 1514, avec ordonnance d'enregistrement du 26 janvier 1515. Ces taxes qui semble (...)
  • 30 Id., CC 59, f° 82 v°. Ce droit est acheté pour 500 livres.

9Sans même entrer dans le détail, l'analyse révèle clairement l'existence de paliers. L'indexation du revenu des octrois royaux sur le trafic économique (selon un mode dont il resterait encore à déterminer les ressorts26) n'explique pas la croissance de ces différents paliers. Leur évolution résulte plutôt d'une accumulation successive des concessions royales. Le doublement des droits sur le sel en 1495 rapporte à la ville de Bourges 800 livres en moyenne et l'imposition foraine obtenue en 1512 permet aux revenus berruyers d'augmenter de 1 200 livres en moyenne, gain légèrement inférieur à celui que procure le droit de 12 deniers accordé autour des mêmes dates aux bourgeois tourangeaux (1 500 livres de 1511 à 152627). Si, les marchands de la ville se plaignent collectivement de ce dernier octroi et vont jusqu'à offrir au souverain un curieux échange pour le voir disparaître28, leur contestation ne prend pas véritablement d'ampleur et n'est en tout cas pas relayée par le corps de ville qui comprend vite où se trouve son intérêt. Ces revenus placent la collectivité dans une aisance tout à fait appréciable et lui permettent de se lancer dans la réfection (et la reconstruction) des tueries, des poissonneries ou encore des fontaines avant d'envisager la construction d'un hôpital. Dans le même temps (en mars 1514), la ville obtient pour 900 livres l'aliénation pure et simple des taxes que le souverain levait sur un certain nombre de produits jusque-là épargnés29 et rachète au roi quelques mois plus tard le droit de police traditionnellement exercé par le prévôt de la ville30.

Des prélèvements fiscaux contrastés

  • 31 Des demandes fiscales sont adressées aux villes à la suite des États de janvier 1464 (certainement (...)

10À partir des mêmes documents, les demandes fiscales du souverain dès le règne de Louis XI peuvent être étudiées avec plus de sécurité qu'auparavant. Celles-ci arrivent désormais directement aux villes et les aides consenties par les États se réduisent d'autant plus que leurs réunions s'espacent31. Désormais, la remontée d'argent des villes vers le roi se fait presque exclusivement sous la forme d'emprunts. Il conviendrait certainement d'ajouter certaines sommes payées au roi en échange d'un service comme c'est le cas en 1469 puis en 1472 à Poitiers pour obtenir une chambre de Parlement et assurer (en vain) son maintien. Fiscalité détournée, sans aucun doute, mais limitée dans les faits même si, autour de ces dates, des sommes conséquentes sont versées (8000 et 2000 livres). Si l'on s'en tient strictement aux prélèvements fiscaux, entre 1460 et 1520, à partir d'une documentation urbaine qui ne cesse de s'étoffer, il est possible de dresser des états comparatifs et complémentaires entre les villes de Bourges, Poitiers et Tours (voir tableaux n° 8). Seul, pour des raisons documentaires, le début du règne de Charles VIII demeure difficilement analysable.

Règne de Louis XI

Règne de Louis XI

Règne de Charles VIII

Règne de Charles VIII
  • 32 Certains de ces tableaux ont déjà été réalisés par B. Chavalier pour Tours. Ils ont été vérifiés m (...)

Règne de Louis XII
Tableau n° 8 - État des sommes données au roi par les villes (1488-1525) au titre d'emprunt ou de don gratuit32.

Règne de Louis XIITableau n° 8 - État des sommes données au roi par les villes (1488-1525) au titre d'emprunt ou de don gratuit32.

D'un règne à l'autre : de fortes variations

  • 33 L'exemple poitevin présente des données tout aussi fiables mais les calculs globaux sont tronqués (...)

11En raison de l'inégale durée de chaque règne, l'analyse à partir des totaux bruts n'est pas significative, mais l'étude des sommes moyennes levées annuellement permet de mener de plus intéressantes comparaisons. Si l'on en croit l'exemple tourangeau, le seul qui fournisse des données véritablement analysables entre 1461 et 149833, la pression fiscale pendant le règne de Louis XI s'avère toute relative. Avec 690 livres en moyenne à Tours, ces prélèvements sont nettement inférieurs aux levées enregistrées pendant le règne suivant (plus de 950 livres toujours à Tours, seul exemple où la comparaison est significative). Il est clair cependant qu'il faut dégager deux parties dans le règne de Louis XI. Avant 1470, les villes semblent peu soumises à la pression de la fiscalité tandis que par la suite celle-ci s'alourdit pour rejoindre les niveaux les plus élevés de la seconde moitié du xve siècle. Sur à peine onze ans, Poitiers doit alors s'acquitter de 12 500 livres (soit 1 130 livres par an en moyenne) et Tours plus de 11 800 (soit plus de 1 070 livres par an). Incontestablement les hautes eaux de la pression fiscale sont bien là. Malgré les lacunes documentaires qui affectent la première moitié du règne de Charles VIII, il ne semble pas qu'elle se relâche considérablement avant 1496.

12Les moyennes réalisées sur l'ensemble des règnes font incontestablement de celui de Louis XII un temps où les corps de ville sont les moins sollicités. À Tours, Poitiers ou Bourges, l'évolution adopte les mêmes termes. Les chiffres chutent brutalement, sont parfois divisés par deux (à Tours, avec 424 livres levées par an et aussi à Bourges, avec 363 livres) par rapport à la période précédente et particulièrement par rapport aux années 1470-1483 (voir l'exemple de Poitiers). Si les pratiques fiscales de Charles VIII s'inscrivaient dans la droite ligne de celles de Louis XI, après 1498 (et peut-être même dès 1496) une rupture a lieu et ne peut pas s'expliquer par d'éventuelles lacunes documentaires. Bourges en atteste avec exactitude puisque tous les comptes municipaux sont conservés sur cette période et laissent apparaître une situation en tous points semblable à celle des deux autres villes.

13Le contraste serait encore plus grand si ces moyennes ne tenaient pas compte des dernières années du règne de Louis XII qui, replacées dans une analyse dia- chronique, se rattachent pleinement sur le plan fiscal à la première moitié du règne de François Ier. La crise militaire de 1512-1513 ouvre une nouvelle période dans l'histoire des prélèvements. Celle-ci se définit par des demandes royales plus conséquentes (les moyennes annuelles en attestent) qui portent la fiscalité royale à un degré jamais atteint, dépassant largement les niveaux enregistrés lorsqu'au milieu des années 1470 il fallait occuper la Picardie et mener des dernières campagnes militaires contre la Bourgogne princière.

14La mise en phase de ces prélèvements soulève cependant le problème de l'uniformisation du traitement fiscal. Si l'on peut comprendre les variations quantitatives d'une ville à l'autre, une certaine disparité de traitement dans le temps est plus surprenante. Il est en effet curieux de constater que des sommes sont fournies certaines années dans certaines villes mais pas dans d'autres. Particulièrement nette avant 1512, cette variation peut déjà être observée sous Charles VII. Bien qu'avant la fin du règne de Louis XII, véritablement charnière, la documentation soit encore parfois bien lacunaire, ce manque de concordance est difficilement interprétable à partir du référentiel urbain et doit certainement beaucoup à l'organisation même de la fiscalité royale.

L'art de négocier. Les pratiques de contoumement fiscal des municipalités

15Cet état de fait relève aussi de la nature même des relations financières entre les villes et le roi. En effet, les sommes réellement fournies par les villes doivent encore être comparées à celui des demandes formulées par le roi. Ce rapprochement laisse apparaître de conséquentes disparités qu'il convient d'interpréter. Les différences qui apparaissent révèlent la nature profonde d'un système fiscal basé sur de constants échanges de points de vue, de discussions qui n'ont d'autre but que de trouver un équilibre entre ce que veut le roi et ce que peut la ville. Les registres des corps de ville, comme de nombreuses lignes des comptes révèlent l'importance et la permanence de négociations entre la ville et le roi, négociations dont le cours arrive à modifier notablement le poids de la fiscalité. Ces emprunts sont en effet entièrement négociables. Ils le sont d'autant plus que le souverain agit dans l'urgence (en réaction généralement à une agression armée) et que sa marge de coercition en est d'autant réduite.

  • 34 En 1503, la ville de Bourges dépense plus de 74 livres pour les frais des commissaires venus pour (...)
  • 35 Tours, arch. comm., BB 32, f° 77 v°, 30 avril 1468.
  • 36 En 1496, les bourgeois berruyers vont présenter aux généraux des finances leurs propositions à la (...)

16Ces négociations s'ouvrent en fait dès l'arrivée des commissaires porteurs de lettres patentes qui annoncent personnellement aux corps de ville leur quote-part dans la levée générale. Ensuite, les corps de ville développent toute leur attention à faire bonne figure auprès des mandatés royaux. La prise en charge de leurs frais s'inscrit dans l'objectif précis d'obtenir d'éventuelles remises34 Selon un discours assez stéréotypé, les délégués urbains essaient de leur « remontrer »la pauvreté ou les difficultés récentes de la cité (épidémie de peste, poids des religieux, des étudiants...). Il semble rare que de leur propre autorité les commissaires accordent un rabais, mais du moins, ils doivent faire rapport de la réponse municipale au roi, ce qui laisse un certain temps aux corps de ville pour organiser des tractations supplémentaires. Une seconde phase s'engage alors au cours de laquelle les municipalités développent un activisme déterminé afin d'obtenir du roi ou des généraux des finances quelques « rabais ». Le plus souvent celui-ci prend la forme d'ambassades ou de délégations municipales directement adressées au souverain. À Tours, l'affaire est régulière notamment après 1470 lorsque Louis XI séjournera de plus en plus souvent aux environs de la ville. En avril 1468, le maire et plusieurs échevins partent dès la réception des lettres du roi « et sentiront se ils pourraient diminuer ladite somme35 ». En 1488, les mêmes iront vers l'évêque de Bordeaux, le général Bidault et Jean Briçonnet pour voir réduire les 5 000 livres qui sont demandées pour aider l'armée qui s'avance en Bretagne. Ils obtiendront alors un substantiel rabais de 2 000 livres à condition toutefois de réunir la somme restante le plus rapidement possible. De semblables ambassades et délégations sont attestées également dans les comptes berruyers dans le dernier quart du xve siècle36.

  • 37 Les comptes révèlent que cette somme (qui fait partie d'une cotisation plus générale répartie sur (...)
  • 38 Bourges, arch. comm., CC 273, p. 52 et 102 et CC 1. Il faut noter que la même année le corps de vi (...)
  • 39 Le cas des impositions indirectes serait peut-être à reconsidérer. On sait que la « detestable com (...)

17Ce qui est remarquable, c'est que les corps de ville réussissent relativement souvent à obtenir la révision de leur cas, qu'ils aient ou non l'appui de représentants du roi qui leur sont proches. La ville de Tours obtient une réduction au moins pour les levées de 1488, 1489, 1494, 1496 et 1512 (levées pour lesquelles les montants demandés par le roi sont connus). Poitiers obtient des rabais en 1503, en 1512 et peut-être en 1513 et à Bourges, un semblable phénomène est observable en 1500 et en 1503. Si toutes ces négociations permettent à chaque fois aux villes de gagner 1 000 à 2 000 livres, le record semble pouvoir être attribué aux bourgeois tourangeaux qui en 1493 voient leur imposition passer de 12 000 à 3 000 livres37, devant leurs homologues berruyers qui, en juillet et août 1503, négocient la concession de 3 200 livres au lieu des 7 000 demandées à l'origine38. Remises conséquentes qui montrent tout l'intérêt qu'ont les corps de ville à pousser encore plus loin leur politique de relations et leur volonté de négocier. Elles témoignent de l'existence d'un véritable rapport de force entre les villes et le roi, rapport de force dans lequel le souverain doit parfois se contenter d'un strict minimum peu glorieux. Les corps de ville résistent tant qu'ils peuvent mais finissent à chaque fois par remplir leurs engagements. Aucune marque de révolte urbaine ne peut être mise en relation sur toute la période avec ces prélèvements directs39. Ils se conforment à ces prélèvements, et cela d'autant plus que ces emprunts restent par définition remboursables.

Emprunts royaux et restitution des sommes prêtées au roi

  • 40 Tours, arch. comm, CC 48, fos 5 et 209.
  • 41 Poitiers, arch. comm, K 9, f° 22.
  • 42 Bourges, arch. comm, CC 262 « Dons et récompenses », CC 263 et CC 264 « recettes ».
  • 43 Elle le sera bien (id., CC 267, « dons et récompenses »). En fait, la somme a été avancée au nom d (...)
  • 44 Ph. Hamon, L'argent du roi. Les finances sous François Ier, Paris, 1994,p. 188-191.
  • 45 B. Ledain, Les maires de Poitiers..., op. cit., p. 482.

18Puisque le roi annonce des emprunts, comme sous Charles VII, ceux-ci appellent un remboursement. Le terme ne relève pas que d'une rhétorique de circonstance et les remboursements doivent bien être pris en compte. Plusieurs exemples en révèlent l'importance particulièrement entre 1488 et 1503. L'imposition levée à Tours à la suite des lettres du 3 février 1489 est ainsi remboursée en décembre par le roi sur les recettes des tailles40. Le corps de ville de Poitiers, en 1492, obtient une décharge des généraux des finances qui autorisent que pour la moitié (au moins) des sommes « prestees au roy [...] [soit] assignez la recette des tailles en Poitou41 ». De même, les 1 000 livres levées en 1491 à Bourges sont bien à rembourser et la ville qui s'attache à obtenir la décharge des généraux des finances voit la somme finalement restituée en 149342. Les 2 000 livres levées à Bourges en août 1496 ne constituent qu'une avance fiscale puisque la somme est à prendre sur les recettes du domaine de l'année suivante43. Toutefois ce crédit contraint imposé par le roi aux corps de ville (selon l'expression de Ph. Hamon44) est parfois détourné en « don royal », c'est-à-dire en sommes versées en pure perte par la ville. Tel est le cas en avril 1500 lorsque Louis XII annonce à la ville de Poitiers qu'il ne pourra pas s'acquitter des 1 000 livres levées précédemment au titre de l'emprunt45.

19Malgré cela, les relations fiscales entre les villes et le roi ont connu une période tout à fait exceptionnelle, limitée certes, mais qui marque la véritable nature des relations fiscales entre les villes et le souverain.

Autres « depenses pour les affaires du roi »: le couronnement du système ?

  • 46 Après la première mention de cette rubrique en 1479 (Tours, arch. comm, CC 43, fos 170 et suivants (...)
  • 47 La rubrique « dons et récompense »des registres des deniers communs de la ville de Bourges rassemb (...)

20Dans la seconde moitié du xve siècle, les budgets urbains prennent en charge bien d'autres dépenses effectuées autour de certaines affaires royales. S'il ne s'agit pas d'une fiscalité au sens propre du terme, les frais engagés par les villes sont parfois conséquents et pour de nombreux observateurs des budgets municipaux ils constituent une marque incontestable de l'aliénation des finances municipales au profit de la monarchie. Sans aucun doute de lourdes sommes vont y être affectées, notamment à l'occasion des crises militaires qui marquent la seconde moitié du xve siècle. Les registres des deniers communs de la ville de Tours offrent une occasion exceptionnelle de saisir l'importance de ces contributions financières annexes, par l'existence entre 1478 et 1494 d'une véritable ligne budgétaire « Deniers payés pour les affaires du roi46 ». Sans les formaliser aussi ouvertement dans leurs documents fiscaux, les communautés poitevine ou berruyère présentent de nombreux exemples qui s'inscrivent dans la même démarche47.

Dépenses pour fait de guerre

  • 48 Poitiers, arch. comm, registre de délibérations n° 6, p. 42 et 52, octobre et décembre 1466 ; n° 5 (...)
  • 49 Le Conseil demande que le souverain nomme des commissaires pour dresser ce constat (id., registre (...)
  • 50 Tours, arch. comm, BB 33, f° 139, 7 février 1488, ou f° 214 v°, 3 septembre 1490. Les troubles de (...)
  • 51 Paris, Bibliothèque nationale de France, ms. fr. 32511, f° 243 v°.
  • 52 Respectivement : Poitiers, arch. comm., registre de délibérations n° 6, p. 17 et registre de délib (...)
  • 53 Bourges, arch. comm., EE 3 (22 juillet 1487, Pierre de Rohan présente des lettres qui indiquent qu (...)
  • 54 Pour toutes les demandes de poudre à Poitiers voir : Poitiers, arch. comm., registre de délibérati (...)

21Dans cette rubrique, les dépenses militaires constituent les plus grosses sommes engagées par les corps de villes en dehors de la solde des gens de guerre ordinaires installés sur les provinces. L'effort est d'autant plus conséquent que le problème du passage des bandes armées ne disparaît pas complètement avec la fin de la guerre de Cent Ans. En 1472, est ainsi attribué à la ville de Poitiers le logement de 20 lances sur les 100 que compte la compagnie de Louis de Beaumont, le sénéchal48. À chaque fois, le passage des troupes est d'autant plus mal ressenti que les soldats sont logés chez les particuliers ou dans les principales hôtelleries (qu'il faut rétribuer) et que les violences ne sont pas rares. En 1470, les heurts vont si loin que la ville demande au roi de venir constater les abus49 même si globalement les troubles de l'ordre public provoqués par les gens d'armes sont moins nombreux et souvent gérés conjointement par l'autorité urbaine et les représentants royaux50. L'emprunt ou plutôt la réquisition de l'artillerie communale représente également un coût pour les villes. Il s'agit d'une sollicitation royale assez courante. En 1464, les artilleries de Poitiers et de Tours sont prises et déplacées sur la Loire, aux frais des villes51. En 1466, l'artillerie poitevine est menée à Orléans et en 1475 vers Les Sables-d'Olonne puis Bordeaux52 et des ordres semblables sont signifiés à Bourges en 1478, 1484 et 148653. De même, les demandes royales qui portent sur la fourniture de poudre et de salpêtre sont conséquentes54.

  • 55 Ibid, p. 13-15 et 26.
  • 56 Ibid, p. 184-188.
  • 57 Ibid., p. 222-223.
  • 58 Tours, arch. comm., CC 43, f° 80 v°.
  • 59 Id., CC 44, fos 148-149 v°.
  • 60 Des vivres sont également envoyés vers Craon, Dinan et diverses places bretonnes. Il n'est pas que (...)
  • 61 Tours, arch. comm., CC 48, fos 103 à 107. Le montant de la cotisation est fixé par les officiers d (...)

22Enfin, les réquisitions de victuailles pour les troupes en campagne ou pour l'entretien de la cavalerie royale, elles aussi se multiplient au milieu des années 1470. Dès février 1472, Poitiers reçoit l'ordre de nourrir les chevaux de l'artillerie du roi. En juillet de la même année, Louis XI réclame des céréales pour l'armée de Bretagne55. Deux ans plus tard, le roi sollicite de nouveau du blé pour nourrir Dieppe56 puis en mars 1476, 100 charges de froment et 100 autres d'avoine sont envoyées en Biscaye57, alors que le corps de ville de Tours en 1478 doit fournir 120 bœufs pour ravitailler l'armée royale58. Le record de la plus grosse demande revient cependant à la ville de Tours qui, en 1480, doit dépenser plus de 1 300 livres pour fournir sur ordre du roi 2 000 piques59. Ce n'est encore rien par rapport à la charge que reçoit cette même ville à l'occasion des guerres de Bretagne mais sur une période plus longue cependant. Entre 1488 et 1491, en effet, Tours devient un des centres à partir desquels s'organise le ravitaillement de l'armée royale qui stationne autour du Mans et de Laval, avant d'aller vers Nantes60. Plus de 4200 livres sont dépensées en vivres et fournitures au cours de ces quatre années. Dans les comptes de la seule année budgétaire 1489 près de 3000 livres sont affectées « aux affaires du roi » (c'est-à-dire l'ost), somme comprenant les 2 000 livres demandées au cours de l'année en espèces. Encore faudrait-il, pour mener une comptabilité précise de tous les frais liés cette année- là à la guerre, ajouter les dépenses inhérentes aux les coûts de transport des marchandises également à la charge des villes. En 1487, les comptes tourangeaux révèlent qu'aux 1 777 livres dépensées pour l'achat de blé, d'avoine, de moutons et de lard, il faut ajouter le coût du transport (en partie en bateau, vers Angers) et en 1488-1489 la prise en charge l'acheminement (sur plusieurs mois) de 2450 setiers de froment, 620 d'avoine, 50 « coustez de lard », 900 livres de chandelles, sans compter le vin, les fèves et le poisson, quantités qui correspondent à la part de la ville par rapport à l'élection de Touraine61.

  • 62 En février 1488, un délégué de la ville de Tours part vers le roi (« hastivement, jour et nuit ») (...)
  • 63 C'est du moins ce que stipulent les registres de délibérations. Les registres de comptes rapporten (...)

23Les registres de délibérations révèlent de plus tous les à-côtés dont il faudrait aussi tenir compte pour établir un bilan financier au plus juste : frais de messagers et d'ambassade (vers le roi), coûts de réunions et d'écriture liés à la collecte de ces vivres, de maréchaussée pour surveiller les passages des étrangers ou des « chevaucheurs »et arrêter tous ceux qui portent préjudice au roi62. Les troupes génèrent toujours de substantielles dépenses, tels ces « Suisses » (ils sont 160) qui en novembre 1487 sont annoncés à Tours et « descendent »en Bretagne sur ordre du roi. « Ils n'avoient point de conduicte »et obligèrent le corps de ville à resserrer la garde aux portes63.

  • 64 Bourges, arch. comm, CC 261, chapitre « Dons et récompenses ». En juillet 1500 Louis XII qui fait (...)
  • 65 Il s'agit d'Antoine de Luxembourg, comte de Roussy (Tours, arch. comm., CC 42, f° 108 v° ; L. Rayn (...)
  • 66 Tours, arch. comm., CC 42, f° 193 et v°. En 1477, Colmée de La Chaussée est gardé prisonnier au ch (...)
  • 67 Id., CC 43 f° 73 v°.
  • 68 Id., CC 43, f° 74, il semble arriver en novembre 1477.
  • 69 Id., CC 44, fos 87 v°, 143 et 144.
  • 70 Id., CC 44, f° 93 v°.
  • 71 C'est le cas de Caute qui en janvier 1481 devait être remis au comte de Castres, mais ce dernier r (...)
  • 72 C'est le cas en décembre 1481, lorsque le roi demande que deux Turinois soient conduits à Lyon pui (...)
  • 73 En 1476 la commune dépense près de 300 livres pour mener les diverses réparations du château et fa (...)

24La transformation des châteaux urbains en vastes prisons, le transfert progressif de leur capitainerie aux corps de ville font peser directement sur les budgets communaux les frais de garde des détenus royaux et transforment les corps de ville en geôliers du roi. C'est ainsi à la ville de Bourges qu'il revient en 1489 pendant plus de six mois de subvenir aux besoins de Louis d'Orléans emprisonné dans la Grosse Tour qu'il convient alors d'équiper de tapisseries, d'un lit, de vaisselle et de linge, avant que des frais identiques soient engagés pour l'accueil du cardinal Ascanio Sforza en 150064. C'est à Tours que cette fonction est cependant la plus régulièrement reconduite. Après la reddition du vicomte d'Aunay (1477), les prisonniers se succèdent et sont directement confiés à la ville qui parfois doit les entretenir de longues années sans obtenir un quelconque remboursement. À peu près en même temps que Aunay et sa compagnie le corps de ville doit prendre en charge le comte de Roussy (qui vient d'ailleurs de la Grosse Tour de Bourges65), puis très vite d'autres sont annoncés66. Le château seul n'y suffit plus, puisque c'est dans la maison d'un des clercs de la ville que se trouvent prisonniers en 1478 Pierre de Ponts et Guillaume Chastellain, « prisonniers du roi67 », alors qu'au même moment le bâtard Baudoin de Bourgogne est retenu au Plessis68. Deux ans plus tard, il semble que tous les lieux stratégiques soient occupés : Simon de Quinge est placé dans une cage de fer située dans l'hôtel du maire ; un certain Caute est retenu depuis un an dans l'hôtel de ville69 ; le château, déjà lui aussi bien chargé, reçoit François et Michaut de Leschansonnerie70. La gestion de ces prisonniers donne parfois du fil à retordre au maire car malgré les ordres royaux certains font des séjours plus longs que prévus71. À la ville d'assurer leur logement, leur alimentation, voire de les conduire hors du royaume lorsque le roi le juge nécessaire72. Des sommes conséquentes sont également engagées par la collectivité pour effectuer diverses réparations aux prisons de la ville ou au château73.

  • 74 Le 11 mai 1487 après les premières demandes royales de ravitaillement, ces tailles sont envisagées (...)
  • 75 Les recettes de l'année 1486-1487 rapportent ainsi l'emprunt de plus de 1310 livres à Jean Burdelo (...)
  • 76 Même si cela n'est pas précisé dans les comptes, on peut penser aussi que les bourgeois prêtent co (...)

25Il est cependant difficile (sinon impossible) d'établir leur montant global et leur poids sur le budget municipal. La chose est rendue d'autant plus ardue que très vite des tailles spéciales sont envisagées74. Leur poids repose donc parfois directement sur les habitants. En fait, la collectivité urbaine joue le rôle de relais financier, puisqu'elle emprunte à des particuliers pour acheter le ravitaillement. Sa vente permet de les rembourser avec peut-être parfois un certain bénéfice75. Le jeu n'est peut-être donc pas si inintéressant que cela, même pour les marchands qui en assurent le transport, payés pour ce faire et régulièrement remboursés des pertes enregistrées au cours de leurs voyages76. Sans aucun doute le volume de ces dépenses s'amenuise en période de calme militaire. S'expriment alors d'autres formes de dépenses qui correspondent à une participation accrue des corps de ville à la politique royale.

Les frais d'accompagnement de la politique royale

26Les sommes qui correspondent à l'engagement municipal aux côtés du roi en dehors des préoccupations militaires sont très variables. Elles peuvent mobiliser plusieurs milliers de livres comme seulement quelques deniers. Elles correspondent indistinctement à la mise en place, à l'exécution ou au suivi de la politique royale par les corps de ville. À Tours entre 1478 et 1494, il s'agit d'aider au repeuplement d'Arras ou de pourvoir à l'installation de la soierie.

  • 77 Pour les villes de la Loire moyenne (d'Angers à Nevers), une grande réunion a lieu à Tours en juin (...)
  • 78 R. Favreau, La ville de Poitiers..., op. cit., p. 358.
  • 79 Bourges, arch. comm., CC 258, comptes de 1487 et CC 260, « Dépenses extraordinaires »comptes de 14 (...)
  • 80 Lettres rapportées et commentées par H. Boyer, « Lettres de Charles VII au bailli de Berry. 1484.  (...)
  • 81 Toutes ces pièces sont conservées sous la cote CC 850 des archives communales (actes du 26 juin 14 (...)
  • 82 Tours, arch. comm., CC 43, fos 94-99. D'autres pièces conservées dans les liasses relatives aux af (...)
  • 83 En février, plusieurs délégués du corps de ville partent vers le roi à Victry-en-Partoys pour avoi (...)
  • 84 Ibid., f° 97. Des pièces conservées dans les liasses relatives aux affaires militaires laissent pe (...)
  • 85 Id., CC 42, fos131-132. Soit 3207 1. 6 s. 8 d., levées sur les paroisses de la ville.
  • 86 La ville de Poitiers en 1479 n'a envoyé qu'un marchand (Poitiers, arch. comm., registre de délibér (...)
  • 87 Id., CC 45, f° 50 v°.
  • 88 Le corps de ville ordonne en août l'emprisonnement d'une dizaine de « ménagers »qui étaient sur le (...)

27Si la question d'organiser le repeuplement d'Arras est présentée aux corps de ville en juin ou en juillet77, les coûts vont se répercuter sur plusieurs années. Poitiers dépense 1 800 livres en 1481, 1375 encore en 1482 pour équiper un certain nombre de « menagiers »- la seconde demande formulée par le roi en septembre 1480 contraint la ville à en fournir vingt, ainsi que quatre « gros marchands »- mais multiplie aussi les frais d'ambassade vers le roi pour en obtenir une certaine réduction78. À Bourges, les premiers comptes des deniers communs conservés - pour 1487 et 1489 - révèlent que la collectivité rembourse encore les emprunts contractés presque 10 ans auparavant pour le départ de plusieurs ouvriers79. Des lettres de Charles VIII écrites en 1484 au bailli de Berry laissent penser que 40 « menagiers »et deux marchands auraient dû être envoyés80. En fait, les rares documents municipaux conservés avant 1487 sont relatifs à l'envoi du contingent berruyer. Il apparaît qu'en juin 1479, 2 000 écus d'or sont levés sur l'ensemble des « villes estant en deça de la riviere de Chair du costé de Bourges ». La capitale berrichonne est alors sollicitée pour plus de 1 800 livres, dont une partie au moins est empruntée à des particuliers81. À Tours, les registres de comptes répertorient précieusement les noms de 39 personnes qui, avec leur famille, sont désignées pour quitter la ville dès juillet 147982. Le départ des premières personnes (dont les frais de voyage sont pris en charge par la ville) est attesté dès le mois de février suivant, même si les bourgeois ne désespèrent pas non plus d'obtenir rabais de leur charge83. Une taille spéciale est envisagée dès novembre 147984 et s'ajoute à une autre somme (2 000 écus d'or) levée au titre d'emprunt royal dès 147785. Comme à Poitiers, à Tours aussi les choses traînent et contraignent le roi durant l'hiver 1480-1481 à formuler de nouvelles sollicitations86. En août 1481, la ville de Tours reçoit des lettres lui demandant l'envoi d'un autre quota de personnes87 alors que les premiers nommés ne semblent pas tous partis88.

  • 89 Voir en particulier : abbé L.-A. Bosseboeuf, « Histoire de la fabrique de soieries de Tours des or (...)
  • 90 Tours, arch. comm., BB 32, f° 99 et f° 99 v°, 12 juin 1470. La moitié de la somme est prêtée par d (...)
  • 91 L'état de cette levée est conservé dans le registre de comptes CC 40, f° 5 à f° 7. Elle se monte e (...)
  • 92 Tours, arch. comm., BB 32, f° 102 v° et f° 103, 3 et 7 août 1470.
  • 93 Les comptes de 1471-1472 manquent et ne peuvent permettre une lecture linéaire des coûts induits p (...)
  • 94 Id, BB 32, f° 99, 12 juin 1470.

28Quant à la soierie tourangelle, qui fait l'objet d'une historiographie détaillée89, on ne peut que souligner l'importance des frais engagés par la ville. Lorsque Pierre Doriole présente les premières lettres patentes faisant part du projet de Louis XI de créer « une association commerciale »pour faire venir les « ouvriers de soie », une somme de 6 000 écus est à prélever sur la ville. Pour aider les bourgeois à en accepter le principe, le roi accorde d'ailleurs trois ans de dettes à la ville90. Les documents restent ambigus quant à l'éventuelle restitution de cette somme, dont une partie (après une prompte négociation : 2 000 écus, soit 2 750 livres) est levée sur les habitants91. Des particuliers (Jacques de Beaune en tête) offrent de la soie pour que les premiers ouvriers puissent commencer leur travail, et 1 000 écus supplémentaires (suite à la réduction de la cotisation qui pèse sur la totalité de la ville) sont trouvés auprès d'autres qui reçoivent des cédules des officiers royaux assurant leur remboursement futur92. Pour eux, il ne s'agit donc pas d'investissements à fonds perdus. Quant à la municipalité, elle n'attend pas un retour direct d'argent93. Mais le roi a été clair : il agit dans l'objectif « d'augmenter la ville94 ».

Frais pour représentation royale

  • 95 Id., BB 32, f° 57. La ville s'accorde pour prendre à sa charge tous les frais de son entrée. Les r (...)
  • 96 Tours, arch. comm, CC 42, fos 101 v° et 107 v°.
  • 97 Poiriers, arch. comm, K 62, fos 14 v° à 22 v°.
  • 98 Tours, arch. comm, CC 54, fos 67 v° à 71. Il est indiqué aussi que ces princes sont accueillis au (...)

29La présence soutenue du roi dans la vallée de la Loire implique l'afflux et le passage d'un certain nombre de représentants étrangers qui se doivent d'être accueillis au nom du roi. Tours, capitale de Louis XI, voit ainsi s'organiser plusieurs accueils. Après celui de la comtesse de Wurtemberg95 en 1466, les principales solennités sont organisées pour la venue d'Alphonse V du Portugal qui en 1476 vient auprès de Louis XI solliciter son appui dans le conflit l'opposant à Ferdinand d'Aragon. Sur l'avis du roi, les bourgeois ont été le trouver aux Forges. Alphonse V est accueilli par des joueurs de musique et placé comme le veut la coutume sous un dais, certainement construit pour l'occasion. Il est de taffetas bleu doublé de bougran de la même couleur, avec une grange et des bâtons ferrés et son intérieur est peint par Fouquet96. Poitiers en 1501 recevra également avec tous les honneurs qui lui reviennent l'infante d'Espagne, Jeanne, sur laquelle sera porté comme de coutume un dais97. D'ailleurs, elle semble à Tours rejointe par son mari, l'archiduc d'Autriche, et est accueillie en sa compagnie. La ville dépense alors plus de 180 livres pour les différents cadeaux de nourriture mais aussi les théâtres qui semblent dressés dans les rues98. Ils rejoignent la grande série des entrées solennelles qui marquent un des temps forts de sociabilité politique autour du pouvoir royal.

  • 99 Le détail d'une de ces délégations vers le roi à Tours est fourni par J. de Croy, « Une ambassade (...)
  • 100 Cette ambassade fait donc suite à la convocation par le pape de tous les princes d'Empire pour avi (...)
  • 101 Tours, arch. comm, CC 44, f° 99 à 102.
  • 102 Respectivement : Id., CC 46, f° 87, f° 87 v° et f° 91.
  • 103 Id., BB 32, f° 98 v° et CC 47, f° 101.
  • 104 À cette date, on enregistre la dernière ambassade dont l'accueil est salué par de nombreux cadeaux (...)
  • 105 À l'aller, vingt livres sont distribuées en poisson (Bourges, arch. comm., CC 258, « Dons »), Au r (...)
  • 106 Id, CC 261, « Dons ».
  • 107 Id,CC 268, « Dons ».
  • 108 Les registres de comptes restent allusifs mais évoquent des dépenses faites tant à l'entrée du roi (...)
  • 109 Id, CC 272, p. 55 et p. 204. Il semble d'ailleurs que la reine ait dû attendre à Mehun-sur-Yèvre a (...)
  • 110 D'autres ambassades anglaises et espagnoles sont annoncées en 1526 et reçoivent du vin de Sancerre (...)

30Les ambassades sont quant à elles plus nombreuses, notamment à Tours et à Bourges où elles passent et restent parfois plusieurs jours auprès du roi99. Des sommes importantes peuvent alors être engagées en vin, victuailles ou torches. À Tours, celle des princes d'Empire, venus de Metz en décembre 1480 après la diète convoquée par Sixte IV100, est particulièrement soignée. Ses représentants reçoivent non seulement de conséquents présents de nourriture (500 livres de dragées, des confitures, du sucre...), mais surtout, sont conviés à plusieurs substantiels dîners dont les comptes rapportent le détail des denrées et des achats faits pour l'occasion101. Il faudrait encore ajouter à Tours les frais liés à la présence en ville pendant plus de huit jours de représentants bretons en 1483, puis la même année, ceux engagés à la suite de l'arrivée de nombreuses délégations qui viennent assister aux noces du dauphin ou encore le coût, pris en charge par la ville, du linge porté à Amboise pour recevoir l'ambassade de Flandres en avril 1483102. En mai 1487, l'ambassade de Hongrie est annoncée par des lettres closes du roi et recevra pour plus de 47 livres de cadeaux103. Régulièrement, jusqu'en 1501104 au moins, des frais conséquents seront ainsi engagés par les échevins tourangeaux. La ville de Bourges reçoit parfois, autour des mêmes dates, les mêmes ambassades. Celle de Hongrie en 1487 est reçue à l'occasion de son voyage vers Tours, puis à son retour quelques mois plus tard105 ; les ambassadeurs du Languedoc, conduits par l'évêque d'Albi reçoivent aussi en 1490 de nombreux présents en vin et épices106, la ville de Bourges espérant peut-être leur soutien pour récupérer les fameuses foires qui ont quitté la ville après l'incendie de 1487 ; en 1498, l'ambassadeur d'Espagne reçoit plus de 16 livres dans un présent de tartes, gaufres et beignets107 ; au début de l'année suivante plus de 425 livres sont payées pour accueillir le duc de Valentinois « ensuivant lettres du roi »et sur l'ordonnance de plusieurs officiers royaux. Il s'agit presque alors d'une entrée solennelle, des théâtres étant peut-être construits108. De même, la reine de Hongrie, en mai 1502, à la tête d'une ambassade qui va vers le roi est accueillie selon tous les honneurs dus à son rang, avec un dais richement décoré. C'est d'ailleurs à Bourges que viennent la recevoir au nom du roi l'archevêque d'Aix et le sénéchal d'Estain109. Par la suite, les réceptions étrangères seront plus rares, mais auront lieu dans les mêmes conditions110.

Au-delà de l'accord fiscal et militaire, un engagement politique aux côtés du roi

31L'analyse financière ne doit pas également laisser de côté les engagements urbains moins coûteux qui traduisent la place que progressivement les villes prennent au sein du gouvernement du royaume. Dans la lignée de ce qu'ils ont fait au cours de la guerre de Cent Ans, les conseils municipaux assurent une véritable mission de surveillance du territoire et de maintien de l'ordre.

  • 111 Tours, arch. comm., BB 30, f° 329 v°.
  • 112 Certains mendiants sont accusés de diffuser une propagande contraire aux intérêts royaux. C'est ce (...)
  • 113 Dans des lettres du 3 janvier [1485-1487], du 9 janvier 1485 ou encore du 3 février 1485, le roi r (...)
  • 114 Il est difficile de connaître le contenu de ces lettres. Les délibérations qui accompagnent la men (...)
  • 115 C'est du moins ce que laisse penser l'analyse proposée par les registres de délibérations de Tours (...)
  • 116 Le 8 novembre 1485, un « chevaucheur »du duc de Bretagne est arrêté par le maire car il porte des (...)
  • 117 Lettres des rois de France..., op. cit., B. Ledain (éd.), p. 151.

32Il s'agit tout d'abord de contrôler les hommes et les informations qui circulent d'un camp à l'autre, d'un clan à un autre. Le problème se pose dès les dernières années de la guerre de Cent Ans ou la paix relative qui s'installe ouvre les chemins à la circulation. Ainsi, en avril 1449, l'assemblée des bourgeois de Tours soupçonne les Normands, autrefois installés en ville, d'être repartis dans leur pays et d'avoir prêté serment aux Anglais tout en gardant de forts liens avec leurs compatriotes restés à Tours. La collectivité par prudence demande alors un serment à ces derniers111. La guerre du Bien public, si elle n'a pas d'implications directes sur Poitiers ou Tours, révèle toutefois l'attention des cités face aux troubles qui agitent le royaume. Poitiers reçoit ainsi l'ordre par lettres closes de veiller aux vagabonds et autres itinérants que sont les lépreux et les frères mendiants. Très tôt certains d'entre eux sont soupçonnés de transporter des informations entre les coalisés112. Pour les corps de ville, il s'agit de faire remonter vers le centre monarchique toutes les pièces de correspondance des coalisés. Le cas est attesté à l'occasion des guerres bretonnes tant à Bourges qu'à Tours. Le roi en est d'ailleurs content et l'écrit à sa bonne ville de Bourges dès 1485113. Déjà les bourgeois de Tours, en 1445, avaient tenu ce rôle en adressant à Charles VII certaines lettres envoyées par son fils aux gens des États de Touraine114. Après 1485, sur ordre royal115, l'ensemble des corps de ville fait de même avec les courriers envoyés par les princes bretons. Ils n'hésitent pas non plus à arrêter les messagers qui les détiennent, voire à soupçonner certains étrangers qui se présentent en ville d'être des ambassadeurs secrets aux objectifs peu avouables116. Cette surveillance quotidienne se traduit également par une attention plus soutenue vis-à-vis de certaines possessions seigneuriales dans la région. À Poitiers en 1465, les échevins s'enquièrent (sur demande royale) de la garde de la ville de Montmorillon de peur que celle-ci revienne au comte de la Marche, Jean d'Armagnac117.

  • 118 Lettres de Charles VIII et Louis XII..., op. cit., D. Rivaud (éd.), p. 63-64, 22 et 29 juillet 148 (...)
  • 119 Ibid., p. 98-99, 9 mars 1501.
  • 120 Lettres des rois de France..., op. cit., B. Ledain (éd.), p. 183-184, lettres du 29 mars 1479.
  • 121 Ibid, p. 152-153, lettres du 4 avril 1465.

33En dehors de ce contexte militaire les corps de ville se mobilisent aux côtés des officiers royaux dans et autour du gouvernement des provinces. C'est le cas à Bourges en 1484 pour lutter contre les pillages qui ont lieu en Berry118, puis en mars 1501 pour assister avec les commissaires royaux à l'ouverture des greniers de la ville pour effectuer « au prouffit et soulaigement de notredit peuple »la distribution des blés qui y sont conservés119. La volonté d'associer les deux pouvoirs vient même du centre monarchique. C'est celle qui devait déjà animer Louis XI lorsque celui-ci demandait en 1479 aux échevins poitevins d'assurer la sûreté générale du royaume et de régler le problème du faux monnayage120. Lentement, le rôle urbain se dégage de la lutte contre les « mauvaises et dampna- bles entreprinses et machinations »de ceux qui s'en prennent à la légitimité du pouvoir royal121. Les corps de ville se transforment ainsi en des agents pérennes du maintien de l'ordre dans le territoire.

34Après la guerre de Cent Ans qui avait vu de fortes convergences et une première coopération militaire et fiscale entre les villes et le roi, la seconde moitié du xve siècle apparaît être une période tout aussi importante dans leurs relations, sinon plus encore. L'enracinement dans la durée des réciprocités fiscales, la concession aux corps de ville de véritables charges militaires qui ne relèvent plus seulement de la gestion d'un espace géographique restreint conduisent à la reproduction d'un accord de gouvernement ébauché par Charles VII et plus encore en développe les termes. Ce qui est remarquable c'est que la transformation des finances urbaines est véritablement le fait du prince, alors que les prélèvements extraordinaires ou les demandes de crédits ne constituent pas un lourd fardeau et qu'une partie de la bourgeoisie en tire habilement profit. Collectivement il faut apprécier, à côté d'un bilan financier que l'on a dit difficile à établir, l'impact politique de toutes ces demandes fiscales. En faisant reposer sur les budgets urbains des contraintes liées à sa propre gestion du royaume, le roi a ouvert les collectivités bourgeoises à des préoccupations extérieures et travaille à lier le destin municipal à celui de la cause souveraine. Dans la ville, le pouvoir municipal ne peut que se trouver encore renforcé. Ses marges de manœuvre financières sont désormais non négligeables et de fait on observe une prise en main nouvelle de la police.

Notes

1 Poitiers, arch. comm., Registre n° 11, f° I v°.

2 C'est du moins ce qui semble être stipulé dans un acte de 1474 dans lequel le roi fait état de toutes les sommes qui ont été levées sur le Poitou et reversées à la ville (id., L 2, 28 décembre 1474).

3 Id., registre de délibérations n° 16, p. 65, 17 novembre 1517.

4 Il semble que cette somme soit à prendre sur le droit de « barrage » (ibid., p. 159, 29 mars 1518).

5 La première mention de ce droit pour le pavage apparaît en 1510. 300 livres sont alors données par le roi (id., registre de délibérations n° 10, p. 44, 27 janvier 1511).

6 Id, registre de délibérations n° 11, p. 89 (1511), mais aussi, H 34, H 35, H 37, H 38, H 39 (1561).

7 Id., H 33, 28 janvier 1506. Peut-être s'agit-il d'une allusion aux 1000 livres données depuis le règne de Charles VIII ?

8 Somme donnée par le receveur du roi en Touraine (Martin Berthelot) sur demande du roi pour défrayer la ville du salaire de certains commissaires payés pour effectuer des procédures fiscales (Tours, arch. comm., CC 39, f° 11 v°).

9 Somme cédée en deux fois (id., CC 42, f° 12).

10 Il s'agit certainement pour le roi de récompenser la ville dont le budget est alors largement grevé par des remboursements liés aux affaires du roi. La première année, les 100 livres sont prises sur les 744 levées sur la Touraine, la seconde, il s'agit de rembourser le voyage des délégués urbains qui ont été vers le roi sur sa demande (id., CC 47, 135 v° et CC 48, f° 20 v°).

11 Id., CC 57, f° 97.

12 Ch. Felicelli, « Le feu, la ville et le roi : incendie de la ville de Bourges en 1252 », dans Études urbaines, n° 5 (2002), p. 105-131.

13 Bourges, arch. comm., CC 152. Ce document qui semble essentiel pour comprendre l'urbanisme berruyer à la fin du xve siècle n'a jamais fait l'objet d'une étude spécifique.

14 C'est du moins ce que stipulent les comptes en 1492 (id., CC 264, « Voyages »). Ce droit de 5 deniers sur chaque minot de sel se rencontre dans les sources également sous le nom de « quint ».

15 Id., CC 121 et CC 262.

16 Id., CC 121, 11 décembre 1493.

17 Id., CC 293 et CC 294, chapitre « recettes ».

18 La collectivité ne doit pas cependant avoir l'entière gestion de cet approvisionnement étant donné le faible rapport mentionné par les premiers registres de comptes (entre 185 et 160 livres). Une parue de celui-ci semble plutôt affermé (id., CC 259, 260, 261 « recettes »).

19 Id., CC 121.

20 L'acte est octroyé pour huit ans (id., CC 121, 26 novembre 1500).

21 La ville tente d'obtenir la franchise de cette imposition à partir de janvier 1493. Cette franchise lui coûte plus de 700 livres que le corps de ville doit emprunter à plusieurs particuliers (sans doute des marchands). L'argument qui semble avoir été décisif dans cette négociation est la « contemplacion de la fructueuse et joyeuse nativité de monseigneur le daulphin », Charles-Orland, qui est né en octobre au Plessis (Tours, arch. comm., CC 49, fos 85 v° à 86 et f° 97 v°). Les lettres patentes du roi qui accordent cette franchise datent du mois de février (id., CC 2), mais un acte de Louis XII montre que cette cession ne fut effective qu'à partir de 1495 et qu'elle est alors cédée pour dix ans (id., CC 52, f° 56).

22 Id., CC 52, f° 56. Louis XII stipule en fait qu'il a voulu reprendre en main ce droit de 12 deniers (qui est affermé), mais que pour dédommager les échevins qui ont préjudice de cinq années sur la concession de Charles VIII il met celui-ci au profit de la ville (pour un maximum de 1 500 livres, somme qui semble régulièrement dépassée par le rapport total de la ferme).

23 C'est autour de 1512 que celui-ci est officiellement versé dans les comptes municipaux. Il semble que dès 1496 le sujet soit d'actualité (Bourges, arch. comm, CC 267). En 1503, Bochetel est délégué à Paris pour obtenir du roi le don de l'imposition foraine à la ville. Il n'est pas impossible que celle-ci soit cédée alors par le roi mais attribuée uniquement aux travaux pour rendre les rivières navigables (d'après id., CC 273, p. 95). En 1508, la ville offre de nombreux cadeaux à ceux qui lui ont permis d'obtenir sa reconduction ainsi que celle des droits sur le sel (id., CC 279, « Dons »).

24 À savoir, les rapports du 13e du vin, de l'imposition foraine et des droits à prendre sur le sel.

25 Si les comptes tourangeaux présentent une remarquable continuité sur la période, certains manques ponctuels ainsi que les caractères propres de ces comptes obligent l'analyse à rester globale et par conséquent à établir des moyennes sur une période chronologique assez large. De plus, la ville ayant obtenu l'approvisionnement du grenier à sel, il peut y avoir de grosses variations d'une année à l'autre, non pas en raison de la vente du sel (assez régulière) mais plutôt de l'achat par la collectivité de celui-ci aux marchands en gros. Certaines années, la ville conserve des stocks importants ce qui lui rend inutile de multiplier les achats. D'autres années, une situation inverse se produit et nécessite de gros investissements. Ces décomptes ont été faits à partir des fermes « muables »de la ville (octroi du vin et des barrages), des dons éventuels faits par le roi, des sommes récupérées sur la vente du sel auxquelles ont été défalquées les sommes engagées par la commune pour l'achat du sel nécessaire au grenier.

26 En effet, à part les revenus sur le sel directement en prise avec l'activité économique puisqu'ils sont prélevés sur les ventes, il est difficile de déterminer dans quelle mesure ils sont en relation avec le trafic réel des marchandises étant donné que la majorité de ces octrois sont mis à ferme.

27 Le rapport financier de ce nouveau droit est tout à fait conséquent puisqu'en 1501, il permet à la ville d'augmenter ces recettes de 1192 livres ; en 1502 de 930 ; en 1510, 1514, puis régulièrement de 1516 à 1526 d'atteindre le maximum de 1 500 livres par an (voir aux comptes correspondants).

28 Les marchands de Tours, par la bouche de Claude Quetier et d'Antoine Buré, en juin 1501, offrent en échange de la remise de cette taxe « de bastir à leurs frais des salles, chambres de conseils, prisons et autres choses necessaires pour tenir en ceste ville la juridiction du roi de monseigneur le bailli, la prevosté et les eslus » (Tours, arch. comm., BB 33, f° 317 v°).

29 Id., CC 2, 13 mars 1514, avec ordonnance d'enregistrement du 26 janvier 1515. Ces taxes qui semblent nouvellement imposées portent sur : les chevaux, les cochons de lait, les oies, lapereaux, lièvres, perdrix, bécasses, chapons, poules, mais aussi sur le poisson blanc péché à la ligne, la marée fraîche, les œufs, le fromage, comme sur le fil de laine à revendre en ville, la ferronnerie, les vêtements, etc. Il semble que la ville obtienne le même type d'aliénation en juillet 1517 pour le pain vendu au détail et « les manufactures de laynes » (id., CC 61, f° 106 v° et CC 62, f° 128 v°).

30 Id., CC 59, f° 82 v°. Ce droit est acheté pour 500 livres.

31 Des demandes fiscales sont adressées aux villes à la suite des États de janvier 1464 (certainement pour le rachat des villes de Normandie) et de l'hiver 1466-1467. Dans le premier cas, Tours verse 1 200 livres (Tours, arch. comm, CC 2, 5 septembre 1466). À la même date, plus de 14000 livres sont à prendre sur le Poitou et ses bonnes villes. Dès l'arrivée de cette nouvelle, une délégation municipale est adressée au roi par la ville de Poitiers. Celle-ci œuvre au nom des États. Aucune suite n'apparaît dans les registres de délibérations ce qui ne signifie pas forcément une exemption pour la ville. La part attribuée à la ville n'est pas de plus évoquée (Poitiers, arch. comm, registre de délibérations n° 5, p. 12, 19 janvier 1464). En 1467, l'affaire est portée devant le Conseil mais les archives municipales ne donnent pas de suite ni d'indications précises sur les sommes qui auraient dû être levées (ibid., p. 87, 16 janvier 1467, ainsi que quelques mentions dans le registre de délibérations n° 6, p. 52, 15 décembre 1466).

32 Certains de ces tableaux ont déjà été réalisés par B. Chavalier pour Tours. Ils ont été vérifiés mais ne sont pas repris entièrement ici car cet auteur a comptabilisé toutes les sommes levées pour pourvoir aux frais demandés par le roi. Il s'agit en l'occurrence des demandes d'emprunt bien sûr mais aussi des tailles autorisées par le roi à l'occasion de ses entrées solennelles ou pour la fabrication de certaines armes. Ces dernières ne lui reviennent donc pas entièrement (même indirectement) et ne peuvent être comptabilisées au titre de la fiscalité royale.

33 L'exemple poitevin présente des données tout aussi fiables mais les calculs globaux sont tronqués par le fait que le montant de la levée de 1464 est inconnu. De plus les sommes versées pour l'obtention d un Parlement (non comptabilisées ici) viennent certainement tronquer cette fiscalité.

34 En 1503, la ville de Bourges dépense plus de 74 livres pour les frais des commissaires venus pour organiser l'emprunt cette année-là. Les comptes rapportent bien que cette somme est attribuée « pour que les dits commissaires fassent modération »(Bourges, arch. comm., CC 273, p. 52). De même, en 1512, la commune de Poitiers prend en charge les frais des commissaires royaux qui sont toutefois restés à Mirebeau carla peste sévit dans la ville (Poitiers, registre de délibérations n° 11, p. 354-355 et 364, septembre 1512).Elle dépense alors près de 63 livres. À Bourges, en juin 1518, 32 livres sont dépensées pour recouvrir lesfrais de Pierre Audry, commis de Jean Sapin, venu chercher les deniers demandés par le roi (Bourges, arch.comm., CC 288, p. 75).

35 Tours, arch. comm., BB 32, f° 77 v°, 30 avril 1468.

36 En 1496, les bourgeois berruyers vont présenter aux généraux des finances leurs propositions à la suite de la demande de 2000 livres (voyage de Ursin de Sauzay, Bourges, arch. comm., CC 266, « Voyages »).

37 Les comptes révèlent que cette somme (qui fait partie d'une cotisation plus générale répartie sur l'ensemble du diocèse) est réduite car la ville a eu à subir de grandes inondations (au cours desquelles plusieurs prés, ponts et varennes ont été perdus), et qu'elle possède de nombreux exemptés ainsi qu'un nombre important de pauvres « qui lorsque le roi n'est pas là ne gagnent rien »(id., CC 49, fos 248-249, voir aussi fos 106-108).

38 Bourges, arch. comm., CC 273, p. 52 et 102 et CC 1. Il faut noter que la même année le corps de ville de Poitiers obtient lui aussi un rabais très important et très proche (2 000 livres sont fournies au lieu des 5 000 demandées, Poitiers, arch. comm., I 13).

39 Le cas des impositions indirectes serait peut-être à reconsidérer. On sait que la « detestable commocion »de Bourges de 1474 prend racine autour de droits levés pour le roi dans la ville même s'il ne faut pas en faire une simple révolte fiscale (voir le chap. VI). À Poitiers, il y a peut-être aussi quelques traces de conflits vers 1470 entre les citadins et les officiers royaux qui lèvent certaines taxes.

40 Tours, arch. comm, CC 48, fos 5 et 209.

41 Poitiers, arch. comm, K 9, f° 22.

42 Bourges, arch. comm, CC 262 « Dons et récompenses », CC 263 et CC 264 « recettes ».

43 Elle le sera bien (id., CC 267, « dons et récompenses »). En fait, la somme a été avancée au nom de la collectivité par le receveur des aides de Berry (Philippon Lauvergnat). Pour cela il reçoit 10 livres de récompense sur les deniers communs (ibid.).

44 Ph. Hamon, L'argent du roi. Les finances sous François Ier, Paris, 1994,p. 188-191.

45 B. Ledain, Les maires de Poitiers..., op. cit., p. 482.

46 Après la première mention de cette rubrique en 1479 (Tours, arch. comm, CC 43, fos 170 et suivants), celle-ci est isolée dans les registres de 1481, 1482 (CC 45, f° 22 à 24 et 103 et suivants), 1483 (CC 46, 69 et suivants). Après une lacune des registres entre 1483 et 1486, elle est encore d'actualité en 1487, 1488 (CC 47, fos 77 à 87 et f° 212 v°), 1489 (CC 48, fos 103 à 107), 1490 (CC 48,fos 220 et 221) et 1494 (CC 49, fos 248-249). Entre 1490 et 1492 les registres ont disparu.

47 La rubrique « dons et récompense »des registres des deniers communs de la ville de Bourges rassemble entre autre toutes les dépenses effectuées pour le roi.

48 Poitiers, arch. comm, registre de délibérations n° 6, p. 42 et 52, octobre et décembre 1466 ; n° 5, p. 142, avril 1469 ; n° 7, p. 5-11, février 1472.

49 Le Conseil demande que le souverain nomme des commissaires pour dresser ce constat (id., registre de délibérations n° 6, p. 156).

50 Tours, arch. comm, BB 33, f° 139, 7 février 1488, ou f° 214 v°, 3 septembre 1490. Les troubles de cette nature rapportés par les registres de délibérations de la ville de Tours se limitent à quelques exemples entre 1495 et 1490.

51 Paris, Bibliothèque nationale de France, ms. fr. 32511, f° 243 v°.

52 Respectivement : Poitiers, arch. comm., registre de délibérations n° 6, p. 17 et registre de délibérations n°7, p. 182.

53 Bourges, arch. comm., EE 3 (22 juillet 1487, Pierre de Rohan présente des lettres qui indiquent qu'il a la charge de réunir l'artillerie des bonnes villes), EE 7 (commission du 20 avril 1486 qui ordonne à Michel le Vacher d'emmener l'artillerie de Bourges à Montargis).

54 Pour toutes les demandes de poudre à Poitiers voir : Poitiers, arch. comm., registre de délibérations n° 7, p. 32, 190 et 422-427.

55 Ibid, p. 13-15 et 26.

56 Ibid, p. 184-188.

57 Ibid., p. 222-223.

58 Tours, arch. comm., CC 43, f° 80 v°.

59 Id., CC 44, fos 148-149 v°.

60 Des vivres sont également envoyés vers Craon, Dinan et diverses places bretonnes. Il n'est pas question ici de rapporter toutes les références relatives à cette mobilisation matérielle. Étant donné l'importance des données fournies par les registres de délibérations de la ville de Tours, le sujet appellerait à lui seul une étude particulière (les problèmes liés à la mobilisation des vivres, de la nourriture pour les troupes et autour des autres problèmes posés par cette guerre, occupent l'ensemble des fos 21 à 212 du registre n° 23 (BB 33)).

61 Tours, arch. comm., CC 48, fos 103 à 107. Le montant de la cotisation est fixé par les officiers du roi. Par exemple, le 14 août 1484, deux délégués municipaux (dont le juge de Touraine) rapportent des lettres missives du roi qui définissent les quantités de farine et d'avoine qu'il convient de lever sur la Touraine (id., BB 33, f° 108).

62 En février 1488, un délégué de la ville de Tours part vers le roi (« hastivement, jour et nuit ») pour accompagner un moine qui venait de Vannes et qui portait des lettres de Monsieur de Rohan vers le toi (id, BB 33, f° 144, 29 février).

63 C'est du moins ce que stipulent les registres de délibérations. Les registres de comptes rapportent qu'ils passent par la ville pour retourner chez eux (id, BB 33, f° 129 à f° 131 v° et CC 47, f° 217 v°). D'autres s'annonceront à la ville en juillet 1488 (id., BB 33, f° 155). CC 47, f° 217. C'est certainement eux qu'évoquent les délibérations du 2 décembre en parlant de mauvais garçons « qui a present courrent » (id., BB 33, f° 133 v°).

64 Bourges, arch. comm, CC 261, chapitre « Dons et récompenses ». En juillet 1500 Louis XII qui fait emprisonner à Bourges le cardinal Ascanio Sforza, s'en remet à la ville pour prendre en charge tous les frais inhérents à cette garde (id., EE 4, lettres du 2 juillet 1500, éditées dans Lettres de Charles VIII et de Louis XII..., op. cit., D. Rivaud [éd.], p. 97-98).

65 Il s'agit d'Antoine de Luxembourg, comte de Roussy (Tours, arch. comm., CC 42, f° 108 v° ; L. Raynal, Histoire du Berry..., op. cit., t. III, p. 126).

66 Tours, arch. comm., CC 42, f° 193 et v°. En 1477, Colmée de La Chaussée est gardé prisonnier au château 28 jours et plusieurs autres prisonniers sont annoncés par le roi, dont un venant d'Aragon (ibid., f° 208 v°).

67 Id., CC 43 f° 73 v°.

68 Id., CC 43, f° 74, il semble arriver en novembre 1477.

69 Id., CC 44, fos 87 v°, 143 et 144.

70 Id., CC 44, f° 93 v°.

71 C'est le cas de Caute qui en janvier 1481 devait être remis au comte de Castres, mais ce dernier refuse de le prendre en charge ce qui oblige le maire à l'emmener lui-même vers Poitiers après deux ans passés par ce prisonnier dans l'hôtel particulier du maire (id., CC 45, f° 18 et f° 24).

72 C'est le cas en décembre 1481, lorsque le roi demande que deux Turinois soient conduits à Lyon puis hors du royaume (id., CC 42, f° 103 v°). Le dernier prisonnier adressé par Louis XI à la ville de Tours sera Pierre Leclerc en avril 1483.

73 En 1476 la commune dépense près de 300 livres pour mener les diverses réparations du château et faire garder les prisonniers du roi (id., CC 42, f° 113).

74 Le 11 mai 1487 après les premières demandes royales de ravitaillement, ces tailles sont envisagées et présentées sur l'avis de Jean Briçonnet, le receveur général des finances royales. Elles ne sont pas indiquées par la suite cependant, l'emprunt étant un mode certainement plus profitable à tous (ibid., f° 95).

75 Les recettes de l'année 1486-1487 rapportent ainsi l'emprunt de plus de 1310 livres à Jean Burdelot notaire et secrétaire du roi ainsi qu'à d'autres habitants. La ville récupère plus de 1 600 livres auprès de ceux qui ont mené les vivres en Bretagne, ce qui laisse apparaître une marge dont le bénéfice est certainement utilisé l'année suivante (id., CC 47, fos 16 à 17 v°). Il apparaît cependant dans les délibérations que des comptes spéciaux ont été réalisés (certainement pour toute la Touraine) pour ces « vivres ». Certains sont auditionnés en octobre 1487 (id. BB 33, f° 113, 23 octobre).

76 Même si cela n'est pas précisé dans les comptes, on peut penser aussi que les bourgeois prêtent contre un certain intérêt. En mars 1489, deux marchands de Notre-Dame-la-Riche sont remboursés à hauteur de 20 livres pour leur salaire et pertes (id., CC 48, f° 104). Ils en recueillent au moins à titre individuel un certain bénéfice.

77 Pour les villes de la Loire moyenne (d'Angers à Nevers), une grande réunion a lieu à Tours en juin en présence de l'évêque d'Angers, du sire de Plessis-Bouré, du juge de Touraine entre autre, qui convoquèrent les représentants des marchands de ces villes et les incitèrent à envoyer un grand nombre de personnes (Tours, arch. comm., CC 43, fos 180 et v°).

78 R. Favreau, La ville de Poitiers..., op. cit., p. 358.

79 Bourges, arch. comm., CC 258, comptes de 1487 et CC 260, « Dépenses extraordinaires »comptes de 1488-1489. Dans ces derniers comptes, le corps de ville rembourse encore des prêts contractés pour pourvoir aux demandes royales de 1473 et 1480.

80 Lettres rapportées et commentées par H. Boyer, « Lettres de Charles VII au bailli de Berry. 1484. », dans Mémoires de la Commission historique du Cher, t.I, 1857, p. 215-225. Les deux marchands sont François Jonchère et Jean Crochet qui auraient dû recevoir chacun 2 000 livres. En 1490, la ville attente un procès en Parlement contre ces deux personnages pour récupérer une partie des sommes engagées (Bourges, arch. comm., CC 261, « Dons et récompenses »).

81 Toutes ces pièces sont conservées sous la cote CC 850 des archives communales (actes du 26 juin 1479 et 20 janvier 1480). Les autres villes du Berry sont « cotisées »à des sommes largement inférieures (Mehun, 130 I.., Vierzon, 250 I., Menetou-sur-Cher, 117 I., Dun, 255 1. Sancerre, 250 1., Aubigny, 280 1., La Chapelle-d'Angillon, 117 1.).

82 Tours, arch. comm., CC 43, fos 94-99. D'autres pièces conservées dans les liasses relatives aux affaires militaires font état de 44 personnes pour la ville et de neuf autres pour le pays environnant (id., EE 3).

83 En février, plusieurs délégués du corps de ville partent vers le roi à Victry-en-Partoys pour avoir diminution du nombre de personnes à envoyer (id., CC 43, f° 168 et CC 44, fos 78-79).

84 Ibid., f° 97. Des pièces conservées dans les liasses relatives aux affaires militaires laissent penser qu'une levée de 1 500 livres a été préparée en 1481 alors que plus de 1 885 livres ont été prises sur 35 corporations différentes de la ville (id, EE 3).

85 Id., CC 42, fos131-132. Soit 3207 1. 6 s. 8 d., levées sur les paroisses de la ville.

86 La ville de Poitiers en 1479 n'a envoyé qu'un marchand (Poitiers, arch. comm., registre de délibérations n° 7, p. 404). En 1480, le roi lui en demande quatre supplémentaires ainsi que vingt « menagiers »(ibid, p. 414 et p. 417). La situation est toute aussi proche et confuse à Tours (voir Tours, arch. comm., CC 45, fos 30 et 50 v°).

87 Id., CC 45, f° 50 v°.

88 Le corps de ville ordonne en août l'emprisonnement d'une dizaine de « ménagers »qui étaient sur les listes autrefois préparées (sans doute en juillet 1479), mais qui ne sont jamais partis (id., CC 45, f° 51). Les derniers départs sont mentionnés en 1483, plusieurs marchands se plaignent alors et les échevins d'Arras viennent encore chercher des draps en juin 1483 (CC 46, f° 69 et 85 v°).

89 Voir en particulier : abbé L.-A. Bosseboeuf, « Histoire de la fabrique de soieries de Tours des origines au xixe siècle », dans Mém. Soc. arch. Touraine, t. XLI, 1900, p. 193-528.

90 Tours, arch. comm., BB 32, f° 99 et f° 99 v°, 12 juin 1470. La moitié de la somme est prêtée par des particuliers sur le champ.

91 L'état de cette levée est conservé dans le registre de comptes CC 40, f° 5 à f° 7. Elle se monte en tout à 4 125 livres, dont une partie est attribuée d'ailleurs aux réparations des fossés.

92 Tours, arch. comm., BB 32, f° 102 v° et f° 103, 3 et 7 août 1470.

93 Les comptes de 1471-1472 manquent et ne peuvent permettre une lecture linéaire des coûts induits par cette installation. Les registres de délibérations font penser qu'en 1472 la ville récupère une partie de la vente des draps de soie (id., BB 32, f° 132 v°, 21 décembre 1472) ainsi que peut-être en 1474 (id., CC 41, année 1473-1474, recettes).

94 Id, BB 32, f° 99, 12 juin 1470.

95 Id., BB 32, f° 57. La ville s'accorde pour prendre à sa charge tous les frais de son entrée. Les registres des comptes relatifs à l'exercice 1467 sont malheureusement perdus.

96 Tours, arch. comm, CC 42, fos 101 v° et 107 v°.

97 Poiriers, arch. comm, K 62, fos 14 v° à 22 v°.

98 Tours, arch. comm, CC 54, fos 67 v° à 71. Il est indiqué aussi que ces princes sont accueillis au Plessis pour un dîner et logent chez Bohier.

99 Le détail d'une de ces délégations vers le roi à Tours est fourni par J. de Croy, « Une ambassade de Lucerne à Tours près de Louis XI en 1480 », dans Bull. Soc. arch. Touraine, t. XVIII, 1912, p. 353-393.

100 Cette ambassade fait donc suite à la convocation par le pape de tous les princes d'Empire pour aviser d'une paix générale et pour arrêter la progression du sultan Mahomet II. Arrivent à Tours les représentants de cette assemblée.

101 Tours, arch. comm, CC 44, f° 99 à 102.

102 Respectivement : Id., CC 46, f° 87, f° 87 v° et f° 91.

103 Id., BB 32, f° 98 v° et CC 47, f° 101.

104 À cette date, on enregistre la dernière ambassade dont l'accueil est salué par de nombreux cadeaux. Il s'agit de celle des ambassadeurs de l'Empire que les députés municipaux vont chercher à La Ville-aux-Dames. Les registres précisent même qu'il y faisait grand vent et grand froid (id., CC 53, f° 66 et f° 68).

105 À l'aller, vingt livres sont distribuées en poisson (Bourges, arch. comm., CC 258, « Dons »), Au retour, une semblable somme est dépensée en vin blanc et clairet « pour l'honneur de ladicte ville »(id., CC 259, « Dons »). Quelques sommes supplémentaires sont engagées pour plusieurs voyages effectués vers celle-ci (ibid., « Voyages »).

106 Id, CC 261, « Dons ».

107 Id,CC 268, « Dons ».

108 Les registres de comptes restent allusifs mais évoquent des dépenses faites tant à l'entrée du roi que sur le portail de la porte Gordaine (id., CC 269, « Dons »).

109 Id, CC 272, p. 55 et p. 204. Il semble d'ailleurs que la reine ait dû attendre à Mehun-sur-Yèvre avant d entrer à Bourges car le dais n'était pas entièrement terminé.

110 D'autres ambassades anglaises et espagnoles sont annoncées en 1526 et reçoivent du vin de Sancerre (id., CC 296, p. 45). Par la suite, il est possible qu'un certain nombre de ces « gens de biens »qui passent et qui reçoivent quelques présents soient parfois des ambassadeurs étrangers.

111 Tours, arch. comm., BB 30, f° 329 v°.

112 Certains mendiants sont accusés de diffuser une propagande contraire aux intérêts royaux. C'est ce que révèlent les lettres adressées par le roi aux bourgeois de Poitiers à la suite de la capture d'un frère cordelier missionné par Charles de France. Le souverain fait d'ailleurs accompagner sa lettre d'un cahier de 24 pages qui relate le procès et le jugement du religieux, afin que « tous se rendent bien compte de ce que veut faire Charles et ses alliés »(Poitiers, arch. comm., C 16 et Lettres des rois de France..., op. cit., par B. Ledain, p. 152-15, lettres du 4 avril 1465). Le cahier a été publié par H. Stein dans Charles de France, frère de Louis XI..., Paris, 1919, p. 638-652.

113 Dans des lettres du 3 janvier [1485-1487], du 9 janvier 1485 ou encore du 3 février 1485, le roi remercie la ville de Bourges d'avoir arrêté les messagers du duc et de lui avoir fait parvenir les courriers qu'ils portaient (voir Lettres de Charles VIII et de Louis XII..., op. cit., D. Rivaud [éd.], p. 66-70). Des notes du xixe siècle, conservées dans les liasses des archives communales de Tours, font état de la réception par cette municipalité de plusieurs lettres du même genre, autour de dates différentes (Tours, arch. comm, EE 3). Charles VIII aurait ainsi remercié les bourgeois de Tours d'avoir fait parvenir les courriers du héraut de Bretagne (lettres du 7 août 1487, acte aujourd'hui disparu).

114 Il est difficile de connaître le contenu de ces lettres. Les délibérations qui accompagnent la mention de celles-ci font état des levées fiscales de Charles VII et indiquent qu'il n'est pas possible de lever une quelconque somme supplémentaire. Rien ne sera donc répondu au dauphin auquel il sera rappelé cependant l'attitude toujours favorable de la ville à son égard. Propos de circonstance donc (Tours, arch. comm, BB 28, f° 276, 8 mars 1445).

115 C'est du moins ce que laisse penser l'analyse proposée par les registres de délibérations de Tours d'une lettre reçue du roi en février 1487 (id., BB 33, f° 89 v°).

116 Le 8 novembre 1485, un « chevaucheur »du duc de Bretagne est arrêté par le maire car il porte des lettres « mal sonnant du roi ». Celles-ci sont envoyées au souverain (Tours, arch. comm, BB 33, f° 57). À peine huit jours plus tard la ville reçoit l'ordre du roi de libérer Pierre David, père chapelain de Dunois, arrêté pour avoir été trouvé en train de faire de fausses lettres (ibid, f° 57 v°, 15 novembre, l'original est conservé dans la liasse EE 3, 11 novembre 1485). D'autres arrestations ont lieu en 1487 (ibid., f° 106), date à laquelle le corps de ville intercepte et lit tous les courriers qui passent par la ville (ibid., f° 134).

117 Lettres des rois de France..., op. cit., B. Ledain (éd.), p. 151.

118 Lettres de Charles VIII et Louis XII..., op. cit., D. Rivaud (éd.), p. 63-64, 22 et 29 juillet 1484.

119 Ibid., p. 98-99, 9 mars 1501.

120 Lettres des rois de France..., op. cit., B. Ledain (éd.), p. 183-184, lettres du 29 mars 1479.

121 Ibid, p. 152-153, lettres du 4 avril 1465.

Table des illustrations

Titre Tableau 6 - Rapport des octrois royaux24 à la ville de Bourges entre 1487 et 1535 (en moyennes quinquennales).
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Titre Tableau 7 - Rapport des octrois royaux à la ville de Tours entre 1460 et 1535 (en moyennes semi- décennales25 ).
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Titre Règne de Louis XI
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Titre Règne de Charles VIII
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Titre Règne de Louis XIITableau n° 8 - État des sommes données au roi par les villes (1488-1525) au titre d'emprunt ou de don gratuit32.
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