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Les villes et le roi

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David Rivaud

Introduction

Texte intégral

  • 1 Il convient de remarquer la simultanéité entre la formulation, au début des années 1980, des thèse (...)
  • 2 Tous les titres relatifs aux colloques relatifs à l'Action Thématique Programmée mise en place par (...)
  • 3 La perspective établie par H. Sèe (Louis XI et les villes, Paris, Hachette, 1891, 426 p.) a été re (...)
  • 4 B. Chevalier, « L'État et les bonnes villes au temps de leur accord parfait (1450-1550) », dans La (...)

1L'analyse de la vie politique dans les cités de l'espace français à la fin du Moyen Âge a largement été ébauchée voici une vingtaine d'années presque simultanément par Bernard Chevalier et Albert Rigaudière autour du concept de la « bonne ville1 ». Si l'expression a un usage variable et en soi ne veut pas dire grand chose, son utilisation grandissante au milieu du xive siècle marque l'apparition d'un nouveau modèle d'urbanisation après l'extraordinaire période de croissance urbaine des xiie et xiiie siècles. Selon celui-ci, les crises démographiques et politiques du xive siècle marquent l'ouverture en Europe et en France en particulier d'un contexte socio-politique dans lequel les villes et les collectivités bourgeoises gagnent une place certaine dans l'ordre général des royaumes. Une nouvelle dialectique entre la monarchie et les villes voit le jour alors qu'émergent les structures d'une nouvelle forme d'État. Avec le développement depuis le milieu des années quatre-vingt du xxe siècle de travaux collectifs sur la genèse de ce dernier2, il n'existe plus aujourd'hui de véritables défenseurs de l'ancien modèle de la bonne ville inféodée à un souverain autoritaire, thèse développée en France par une historiographie héritée du Louis XI et les villes de H. Sée3. Si encore en 1974, dans les pages de sa longue thèse (d'histoire sociale avant tout) sur la bonne ville de Tours, B. Chevalier faisait des villes un relais de l'administration publique, déjà il jetait les bases de ce qu'il appellera en 1982, dans sa description générale des bonnes villes, une « entente cordiale », avant d'adhérer quelques années plus tard au concept « d'accord parfait4 », accord basé avant tout sur l'échange de services entre la puissance souveraine et les responsables municipaux.

  • 5 L'expression est de B. Chevalier lui-même, dans une de ses dernières contributions de portée génér (...)

2Dans ses grands traits, cette « articulation systémique avec l'État5 »se fonde sur l'emboîtement de caractéristiques singulières et complémentaires, à savoir le potentiel militaire des villes et la capacité législative du pouvoir royal. D'un côté donc il y aurait des citadins, seuls à pouvoir assurer efficacement la défense et l'entretien des murailles alors que le pouvoir souverain ne semble pouvoir assumer son rôle militaire. De l'autre, le monarque, source de toute autorité, distribuerait selon son intérêt avantages privés ou publics afin d'obtenir le soutien des collectivités. À lui alors d'accorder au mieux des statuts réglementant la vie collective dans les cités, d'octroyer la noblesse à ceux qui se seraient portés aux affaires communes, d'exonérer les villes de taille et d'accorder aux collectivités bourgeoises le droit de lever l'impôt ou de recevoir les substantiels rapports des aides et barrages urbains. À la ville, exemptée et privilégiée, d'apporter une véritable aide féodale à son souverain, ce qu'elle remplit par le versement d'une contribution financière ou par l'envoi de gens de guerre, de vivres ou d'armes. C'est donc autour du fait militaire que cette articulation se construit et trouve sa raison d'être. S'y limite-t-elle pour autant ?

  • 6 Il s'agit des conclusions du bilan historiographique dressé par J. Cornette sur les études réalisé (...)
  • 7 En effet, la problématique de l'enquête dirigée par le CNRS s'est plutôt organisée autour des élém (...)
  • 8 Nous pensons ici en particuliers aux développements proposés par Th. Dutour qui fait de la communa (...)
  • 9 Il s'agit en effet du but d'un des groupes de travail constitué à l'occasion de l'enquête européen (...)

3Ce modèle, marqué par une forte réciprocité politique et basé sur une entente tacite entre les deux pouvoirs, est largement validé par la recherche sur la genèse de l'État moderne. Si cette recherche fructueuse et fédératrice ne cesse de traquer toujours plus haut les origines de la souveraineté politique et rejette la vision « absolutiste »jusqu'au cœur de la monarchie du roi Soleil6, elle conduit surtout à s'interroger sur la nature de la monarchie française à la fin du Moyen Âge et au début des Temps modernes. Curieusement, il convient de remarquer que cette question n'a pas vraiment connu le bouillonnement intellectuel observé par ailleurs et que, pour des raisons qui tiennent autant au découpage universitaire qu'à la nature des sources documentaires, rares sont les travaux qui ont tenté d'apprivoiser cette liaison apparemment dangereuse entre le Moyen Âge et les Temps modernes7. De même, les relations ville-roi dans les études les plus récentes ont été considérées soit comme une question subalterne au développement de l'État8, soit pour mettre en perspective des similitudes structurelles, la commune bourgeoise étant considérée alors comme une « matrice constitutionnelle » contribuant à l'émergence d'une communitas nationale9.

  • 10 Voir par exemple les pages rédigées par Ph. Hamon dans La monarchie entre Renaissance et Révolutio (...)
  • 11 J. R. Major, From Renaissance Monarchy to Absolute Monarchy. French Kings, Nobles and Estates, Bal (...)
  • 12 Dans le chapitre qu'il développe au sein de l'ouvrage collectif dirigé par J. Cornette, La monarch (...)
  • 13 Terminologie formulée dans Les États généraux de Normandie, Caen, 1925-1927, 3 vol., t. II, p. 469 (...)
  • 14 S Mastellone, « Osservazioni sulla "Rennaissance monarchy" in Francia », dans Annali della Fondazi (...)

4Aujourd'hui les quelques synthèses récentes qui se risquent à théoriser cette relation sont celles qui tournent leurs regards vers la définition de l'État moderne. Elles empruntent les voies du renouveau de l'histoire politique et poussent d'une part à oublier les interrogations désormais anciennes de Y. Chabod10 et d'autre part à ne pas donner d'emblée à l'État monarchique qui se construit une vocation délibérément absolutiste. Toutefois plusieurs pistes d'interprétation restent encore ouvertes : d'un côté, avec J. R. Major11, certains voient la monarchie française des xve et xvie siècles avant tout comme une monarchie consultative et populaire, basée sur un certain dialogue entretenu avec des représentants. Sans doute, il faut rappeler en suivant les réflexions plus récentes de Ph. Hamon12 que le modèle conciliaire en France n'est jamais parvenu à s'implanter durablement et que malgré l'institutionnalisation d'un dialogue politique dans le royaume, il s'agit d'une monarchie où le roi s'appuie sur des instances locales, « mais qui souvent entérinent ses choix plus qu'elles n'y consentent pleinement ». Cet auteur préfère malgré cela parler de « monarchie de consensus », nouvelle formulation de ce que H. Prentout désignait lui être une « monarchie de contrat13 ». L'intérêt récent et stimulant pour les officiers (grand serviteurs de l'État comme pour les officiers « moyens ») réactualise quant à lui le modèle d'une royauté qui s'appuie avant tout sur un corps d'officiers dévoués et puissants, suivant en cela les écrits déjà anciens de S. Mastellone14. Ainsi, alors qu'il est parfois question encore ici ou là d'autoritarisme, ces qualifications s'avèrent hésitantes, se répondent imparfaitement, traduisent un certain désarroi conceptuel pour qualifier l'ordre politique au tournant des xve et xvie siècles et peinent à intégrer le modèle de la bonne ville dans toute sa complexité politique.

5C'est donc dans la volonté d'harmoniser le répertoire idéal et la réalité du terrain, comme diraient les sociologues, que l'on tentera ici d'apporter quelques observations sur l'ordonnancement politique de la monarchie de France à l'extrême fin du Moyen Âge. Le sujet est conséquent et demanderait l'étude synchro- nique des multiples milieux de pouvoir qui font la réalité de l'ordre monarchique, ne se limitant pas ainsi aux seules villes, charge démesurée pour un chercheur isolé. C'est un choix partial et partiel qui pousse donc à poser deux conditions méthodologiques préalables.

  • 15 La principale critique que l'on peut faire aux importantes synthèses sur l'État qui encore récemme (...)
  • 16 B. Chevalier, Les bonnes villes..., op. cit., 1982 ; Ph. Guignet, Le pouvoir dans la ville. Pratiq (...)
  • 17 Pour cela l'outil informatique a été largement mis à contribution. Les séries de délibérations du (...)

6Tout d'abord, c'est implicite, concentrer l'analyse sur les corps de villes pour changer les points de vue traditionnels sur l'État en se décentrant et placer ainsi le regard depuis le référentiel municipal vers le centre monarchique15. C'est dans le quotidien de l'action politique des corps de ville que l'on peut tenter de percevoir l'ordre qui prévaut au fonctionnement de la grande monarchie de France. À la suite de Ph. Guigner étudiant des exemples plus septentrionaux, de R. Descimon autour de la Ligue parisienne et de B. Chevalier dans sa synthèse sur les « bonnes villes16 », il faut remettre en scène le régime des échevinages, aller explorer ses logiques internes de gouvernement pour saisir l'importance des convergences politiques qui s'expriment entre le centre et la périphérie. Ainsi, les pages qui suivent résultent d'une relecture supplémentaire de ces riches fonds documentaires municipaux et en particuliers des registres de délibérations des corps de ville et des comptes des deniers communs. Ces documents, très souvent exploités en raison de leur prolixité, ont cependant rarement été considérés pour eux-mêmes, à part peut-être par les historiens des institutions. C'est ainsi dans l'objectif de les réinvestir dans leur fonction première que ceux-ci ont fait l'objet d'un dépouillement systématique, méthodique17 et intégral, afin de suivre pas à pas le développement de chaque affaire traitée devant les conseils et de déterminer, par-delà des procédures bien établies, la nature d'un ordre politique dont les implications dépassent les murs de la cité.

7La seconde condition est de mener une analyse sur deux siècles que les études rechignent souvent à considérer comme une période à part entière. Il faudra donc tenter ce pont généralement évité entre le Moyen Âge et les Temps modernes, sans faire le choix d'en laisser un de côté, pour sonder les logiques politiques dans toutes leur continuité et saisir les étapes d'une évolution multiséculaire.

  • 18 Ce constat est réalisé par B. Chevalier à partir de l'étude d'un Estat des villes du royaume réali (...)
  • 19 On peut raisonnablement estimer que la population de ces trois villes tourne autour des 15000 habi (...)

8Un choix géographique s'imposait également. Sièges de sénéchaussées ou de bailliages, cités de rang épiscopal (au moins) aux nombreuses fondations monaca les et closes par un rempart sévèrement réhabilité au milieu du xive siècle (lorsqu'il n'est pas créé de toutes pièces comme à Tours), les villes de Bourges, Poitiers et Tours se sont présentées comme d'excellents objets d’étude pour mener une analyse à la fois comparatiste et complémentaire de cette histoire du fait politique aux xve et xvie siècles. Dès le xive siècle, elles constituent de solides capitales à la tête de provinces dont elles recueillent sinon les richesses économiques du moins les instances politiques et juridiques voire culturelles et artistiques. Les événements qui les secouent conjointement d'ailleurs entre 1356 et 1440 vont contribuer à renforcer encore leur rôle provincial et leur conférer de plus une dimension nationale selon des lignes de force aujourd'hui bien établies. Ainsi, tiennent-elles une place originale auprès d'une monarchie en pleine recomposition. Sans aucun doute, par leur rapport privilégié au roi elles forment aussi successivement des cas quelque peu particuliers. Chacune est devenue, à un moment ou un autre, capitale royale mais aucune n'a pu attirer durablement dans ses murs tous les attributs du pouvoir souverain. Toutes les trois, d'une certaine façon aussi, ont vu s'éloigner parfois avec nostalgie cette présence royale et sont redevenues des « bonnes villes »ordinaires du royaume de France. Capitales, toutes le resteront, mais cette fois d'une province, plus ou moins étendue, qu'elles dominent de leur poids économique, culturel et surtout administratif. Au xvie siècle, ces cités s'affirment toujours à la tête du réseau urbain provincial et semblent également garder une position éminente au sein du royaume18. Il s'agit, et elles le demeureront tout au long de la période, de fières bonnes villes aux antécédents illustres et de taille assez semblable19.

  • 20 L. Raynal, Histoire du Berry depuis les temps les plus anciens jusqu'en 1789, Bourges, 4 vol., XC- (...)
  • 21 À savoir la Société historique du Cher, devenue par la suite Société des Antiquaires du Centre, do (...)
  • 22 Pour Poitiers, R. Favreai, La ville de Poitiers à la fin du Moyen Âge. Une capitale régionale, Poi (...)

9Ces trois villes présentent de plus des avantages historiographiques non négligeables et même essentiels. Données incontournables, s'y développent dès le début du xve siècle au moins de longues séries documentaires de plus en plus souvent continues (voir la présentation des sources en fin de volume) et qui permettent de suivre véritablement le déroulement de la vie municipale. La qualité de ces fonds explique aussi que toutes les trois ont fait l'objet de travaux historiques conséquents qui ont largement défriché le terrain documentaire et posé les jalons nécessaires à toute entreprise historiographique. Il s'agit des travaux vieillis, mais particulièrement riches, de Louis Raynal qui, au milieu du xixe siècle, a écrit une conséquente histoire du Berry dans laquelle Bourges tient bien sûr une place de choix20. Recherches complétées par les nombreux articles parus dans différentes sociétés locales d'érudition, très productives21. Pour Poitiers et Tours, les travaux de Robert Favreau et Bernard Chevalier constituent de substantielles synthèses d'une historiographie érudite elle aussi particulièrement riche. L'ampleur des dépouillements documentaires qu'ils ont entrepris leur a permis de fournir de solides études du paysage social dans ces deux cités22, travaux qui aujourd'hui forment un socle incontournable et essentiel, facilitant largement l'approche du fait politique.

10Le cheminement que nous allons essayer de suivre va tenter de s'intégrer dans une certaine périodisation. S'il ne faut pas prendre véritablement le découpage chronologique proposé comme un cadre trop strict et voir des ruptures qui n'en sont pas, un croisement thématique essaiera de sélectionner étape par étape les principaux facteurs explicatifs et structurants des relations entre les villes et le roi. Bien que le point de départ de notre analyse se situe vers les années 1440, il faudra cependant envisager l'héritage de la période précédente. La situation des années 1380-1430 constituera donc le premier temps de la réflexion. Il semble que cependant ce soit avec le recul des opérations militaires, avec le retour des centres névralgiques du royaume vers Paris ou la vallée de la Loire, que, au sortir de la guerre de Cent Ans donc, les bases d'une nouvelle coopération politique se dessinent. S'ouvre alors le temps de convergences originales qui auraient pu rester très circonstanciées (deuxième partie). La paix est alors un vecteur essentiel de la recomposition politique qui s'élabore. Un nouvel investissement du champ politique a lieu par des collectivités et des hommes qui en profitent pour voir affermir leurs responsabilités personnelles et leurs compétences collectives dans une étroite relation avec l'autorité souveraine. La seconde moitié du xve siècle et le début du xvie siècle constituent une période où les notions de chose publique et de bien commun, voire de bon gouvernement, trouvent depuis le centre comme de la périphérie une certaine résonance. Un modèle participatif s'affirme alors, dont les implications modifient en profondeur, et c'est là le fait remarquable, les mentalités municipales et les formes du gouvernement urbain (deuxième partie). C'est une époque originale qui émerge dans laquelle un nouvel équilibre politique se traduit par le développement d'un véritable discours entre centre et périphérie et qui prend des formes traditionnelles ou rituelles, chargées de marques d'affectivité (quatrième partie). C'est toute la question de la pérennité de cet équilibre qui se pose au milieu du xvie siècle. D'insensibles traces de rupture apparaissent dans les villes et dans un modèle de gouvernement en place depuis alors plus d'un siècle, avant même que les conflits religieux ne le fassent voler en éclats (cinquième partie).

Notes

1 Il convient de remarquer la simultanéité entre la formulation, au début des années 1980, des thèses de B. Chevalier (Les bonnes villes de France du xiv au xvie siècle, Paris, Aubier, 1982, 344 p. [Collection historique]) et de A. Rigaudière qui, tous les deux, convergent vers la définition de la bonne ville dans son rapport avec le roi (A. Rigaudière, « Qu'est-ce qu'une bonne ville dans la France du Moyen Âge ? »dans La charte de Beaumont et les Franchises entre Loire et Rhin, Nancy, Presses universitaires de Nancy, 1988, p. 59-105, Actes du colloque du huit centième anniversaire de la charte de Beaumont-en-Argonne, sept. 1982, repris dans Gouverner la ville au Moyen Age, Paris, Anthropos, 1993).

2 Tous les titres relatifs aux colloques relatifs à l'Action Thématique Programmée mise en place par le CNRS à partir de 1984 sont rapportés dans le bibliographie en fin de volume. Il faut encore ajouter à ces colloques les imposantes contributions collectives qui paraissent dans le programme des recherches organisées sous l'égide de la Fondation européenne de la Science, sur Les origines de l'État moderne en Europe, xiiie-xiiie siècle, sous la direction de W Blockmans et J.-P. Genet (voir Bibliographie).

3 La perspective établie par H. Sèe (Louis XI et les villes, Paris, Hachette, 1891, 426 p.) a été reprise par l'historiographie de la première moitié du xxe siècle qui a vu dans l'histoire des villes après le milieu du xive siècle le début d'une longue décadence et l'éclatement, sous le joug de l'État moderne naissant, de la conjuratio médiévale qui aurait, aux xie et xiie siècles, conditionné l'essor des communes dans le royaume de France. Il semble que la dernière synthèse sur l'histoire urbaine se raccrochant encore à ces vues soit celle de M. Boulet-Sautel publiée dans le t. VI des recueils de la Société Jean Bodin en 1954 (« L'émancipation urbaine dans les villes du centre de la France », p. 371-406).

4 B. Chevalier, « L'État et les bonnes villes au temps de leur accord parfait (1450-1550) », dans La ville, la bourgeoisie, et la genèse de l'État moderne (xiie-xiiie siècles), Actes du colloque de Bielefeld (30 novembre- 1er décembre 1985), Paris, 1988, Éd. du CNRS, p. 71-85.

5 L'expression est de B. Chevalier lui-même, dans une de ses dernières contributions de portée générale sur l'histoire urbaine (dans L'histoire médiévale en France, bilan et perspectives, M. Balard [dir.], Paris, Seuil, 1991, p. 29-48, actes du congrès de la Société des historiens médiévistes de l'enseignement supérieur public tenu en 1989).

6 Il s'agit des conclusions du bilan historiographique dressé par J. Cornette sur les études réalisées depuis vingt ans autour du siècle de Louis XIV (« L'histoire au travail. Le nouveau "siècle de Louis XIVe : un bilan historiographique depuis vingt ans [1980-2000] », dans Histoire, Économie, Société, 2000, p. 561-605).

7 En effet, la problématique de l'enquête dirigée par le CNRS s'est plutôt organisée autour des éléments précoces contribuant à la genèse de l'État, alors que l'entreprise menée au niveau européen cherchait davantage à déterminer les formes précoces de l'État-nation en vigueur aujourd'hui. Entre les deux, il existe un certain hiatus qui a du mal à être comblé par des études sur la Renaissance animées avant tout par des considérations culturelles et artistiques.

8 Nous pensons ici en particuliers aux développements proposés par Th. Dutour qui fait de la communauté urbaine un relais de l'autorité royale (La ville médiévale. Origine et triomphe de l'Europe urbaine, Paris, O. Jacob, 2003, notamment p. 246-252).

9 Il s'agit en effet du but d'un des groupes de travail constitué à l'occasion de l'enquête européenne sur les origines de l'État moderne en Europe (voir P. Blickle [dir.], Résistance, représentation et communauté, Paris, PUF, 1998, notamment la cinquième partie de ce travail, « La ceinture urbaine et l'État moderne naissant », particulièrement l'introduction, p. 291-300, rédigée par G. Dilcher). On peut noter cependant que tout ce chapitre ne se construit qu'autour d'exemples germaniques, hollandais ou italiens.

10 Voir par exemple les pages rédigées par Ph. Hamon dans La monarchie entre Renaissance et Révolution. 1515-1792,J. Cornette (dir.), Paris, Seuil, 2000,203 p. (coll. Histoire de la France politique). F. Chabot, « Y a-t-il un état de la renaissance ? », dans Colloque sur la renaissance organisé par la société d'histoire moderne (Sorbonne, 30 juin-1er juillet 1956), Paris, 1958, p. 66-69.

11 J. R. Major, From Renaissance Monarchy to Absolute Monarchy. French Kings, Nobles and Estates, Baltimore, J. Hopkins Univ. Press, 1994.

12 Dans le chapitre qu'il développe au sein de l'ouvrage collectif dirigé par J. Cornette, La monarchie entre Renaissance et Révolution (1515-1792), Paris, Seuil, 2000, particulièrement p. 29-31.

13 Terminologie formulée dans Les États généraux de Normandie, Caen, 1925-1927, 3 vol., t. II, p. 469-474. Outre à la synthèse de Ph. Hamon, on se référera aussi sur ce point aux propos de R.-J. Knecht dans Un prince de la Renaissance. François ier et son royaume, Paris, Fayard, 1994, en particulier au chap. XXVI (« Monarque absolu ? »), p. 521-546.

14 S Mastellone, « Osservazioni sulla "Rennaissance monarchy" in Francia », dans Annali della Fondazione Italiana per la Storia Amministratica, t.I, 1964, p. 421-430. Ces deux visions de la monarchie françaises sont critiquées par B. Guénée dans « Espace et État dans la France du bas Moyen Âge », dans Annales ESC, 1964, p. 744-758. Pour une présentation récente de la recherche sur les officiers « moyens », voir Offices et officiers « moyens »en France à l'époque moderne. Profession, culture, Études réunies par M. Cassan, Limoges, Pulim, 2004, 358 p.

15 La principale critique que l'on peut faire aux importantes synthèses sur l'État qui encore récemment ont tenté d'en retracer la genèse est sans doute celle de placer trop exclusivement le champ d'analyse depuis le centre oubliant les processus politiques qui concourent à l'adhésion de la périphérie (par exemple Y.-M. Bercé, Les monarchies, Paris, PUF, 1997, volume de l'Histoire générale des systèmes politiques, M. Duverger, J.-F. Sirinelli [dir.], ou encore J. Le Goff, L'État et les pouvoirs, dans A Burguière, J. Revel [dir.], Histoire de France, Paris, Seuil, 1989).

16 B. Chevalier, Les bonnes villes..., op. cit., 1982 ; Ph. Guignet, Le pouvoir dans la ville. Pratiques politiques, notabilité et éthique sociale de part et d'autre de la frontière franco-belge, Paris, 1990, 591 p. ; R. Descimon, Qui étaient les XVI ? Mythes et réalités de la Ligue parisienne (1585-1594), Paris, 1983, 302 p.

17 Pour cela l'outil informatique a été largement mis à contribution. Les séries de délibérations du corps de ville de Poitiers ont été systématiquement informatisées sous forme d'analyses succinctes, insérées dans une base de données (sous 4D d'ACI) permettant indexations multiples et tris croisés. Pour les documents tourangeaux et berruyers un même traitement n'a pu être réalisé, faute de temps. De la même façon cependant, toutes les délibérations ont été systématiquement reprises afin de garder une vision globale de l'activité des corps de ville. Elles ont été indexées manuellement.

18 Ce constat est réalisé par B. Chevalier à partir de l'étude d'un Estat des villes du royaume réalisé dans un but fiscal en 1538 et qui fait la synthèse des sommes imposées sur chacune des villes. Ce document place les villes de Poitiers, Bourges et Tours, respectivement aux 11e et 13e rangs nationaux (B. Chevalier, « Les bonnes villes du Centre-Ouest au xvie siècle : constellation ou nébuleuse ? », dans Les réseaux urbains dans le Centre-Ouest atlantique de l'Antiquité à nos jours, Ph. Guignet, J. Hiernard [éd.], Poitiers, 1995, p. 109-126).

19 On peut raisonnablement estimer que la population de ces trois villes tourne autour des 15000 habitants au début du xvie siècle. À Tours, B. Chevalier hésite quelque peu en proposant dans ces divers travaux entre 12 000 et 20 000 habitants (Histoire de Tours, Éd. Privat, p. 144). C'est à l'occasion de la crise militaire de 1512 qu'il est possible à Poitiers d'estimer assez précisément le chiffre de la population. Le maire pense pouvoir mobiliser 3 000 personnes (Poitiers, arch. comm., registre de délibérations n° 11, p. 170-171, 19 avril 1512). En 1552 un rôle d'imposition dénombre 3065 chefs de familles (voir G. Jarousseau, « Un rôle d'imposition de Poitiers en 1552 : étude des structures sociales et économiques de la ville », dans Bull. phil hist., 1962, p. 481-492). À Bourges, l’importante collection des rôles fiscaux du milieu du xvie siècle permet aussi d'apporter des éléments chiffrés : celui de 1556 identifie ainsi 3661 feux (Bourges, arch. comm., CC 6).

20 L. Raynal, Histoire du Berry depuis les temps les plus anciens jusqu'en 1789, Bourges, 4 vol., XC-490 p. (1845), 604 p. (1844), 584 p. (1844), 630-14 p. (1847), ill., cartes h.-t.

21 À savoir la Société historique du Cher, devenue par la suite Société des Antiquaires du Centre, dont l'héritage est assuré aujourd'hui par la Société d'archéologie et d'histoire du Berry (pour les différents articles publiés dans les pages de ces revues, voir la Bibliographie).

22 Pour Poitiers, R. Favreai, La ville de Poitiers à la fin du Moyen Âge. Une capitale régionale, Poitiers, 1977, 720 p. (Mém. Soc. ant. Ouest, 4e série, t. XIV et XV, 1977-1978). Pour Tours, les références qui sont faites à la thèse de B. Chevalier renvoient à la version reproduite par l'Atelier national de reproduction des thèses (B. Chevalier, La ville de Tours et la société tourangelle à la fin du Moyen Âge [1356-1520], Paris, 1975, 2 vol. de 529 et 366 p.). L'auteur a publié de grandes parties de ce travail dans plusieurs collections qui ne reprennent pas cependant la totalité du texte et des notes.

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