Entre histoire et mémoire
Les sermons commémoratifs urbains, xvie-xviiie siècle
p. 41-52
Texte intégral
1Étudier le monde urbain en historien attentif aux apports de la sociologie et de l’anthropologie, ou encore de la géographie, exige de ne pas faire l’économie d’une prise en compte de la double dimension de l’héritage et du patrimoine. L’enquêteur se doit en effet d’entretenir le souci aiguisé des représentations et des discours construits dont la ville est un théâtre permanent. Pour formuler les choses autrement, comme en écho à la problématique générale de ce volume, au visible il lui faut savoir ajouter le moins visible. L’idée ici poursuivie consiste à pister les différentes manières de rapporter un événement, récent ou passé, à l’identité réelle ou rêvée d’une petite patrie citadine. De la sorte, il devient possible d’envisager la part occupée à différentes époques par un hier dans l’exaltation urbaine du présent.
2Certaines expressions en sont immédiates et partagées, accessibles au grand nombre et aisément décodables. Songeons particulièrement à l’érection statuaire du grand personnage, ce marqueur mémoriel singulier, figure ayant tellement contribué à faire la ville qu’elle finit parfois par l’illustrer et la résumer à elle seule1. D’autres messages sont moins directement abordables mais tout autant constitutifs d’une identité commune. Il faut aller les chercher dans l’écrit et les archives manuscrites, plonger au cœur des « villes de papier2 ». Une approche d’un patrimoine collectif fondé sur les réalités, notamment religieuses, peut être menée, offrant un potentiel commémoratif fait de mémoires sinon officielles du moins à ambition consensuelle. La ville baigne alors dans une série de références visibles que nous pourrions qualifier de mémoires vives et chaudes. Une fois ces mémoires politico-religieuses inventoriées, il reste à les classer en plusieurs catégories. Elles peuvent d’abord être douloureuses, voire partiellement effacées ou l’objet d’une réécriture car reposant sur un événement « honteux », devenu une réalité encombrante qu’il faut apprendre à dépasser au nom d’une vision plus apaisée, une faute à gommer pour permettre un retour à la normale. Les repérer n’est pas toujours aisé. Il est en revanche plus facile d’appréhender les mémoires glorieuses et heureuses, fruits d’une résistance regardée comme héroïque, d’un haut fait dont la ville peut sans vergogne s’enorgueillir afin de l’exhiber aux yeux de tous, habitants comme forains, telle une incomparable fierté urbaine. Il va sans dire que les enjeux confessionnels, faits de défis et de rivalités, éléments si importants aux temps modernes, jouent un rôle dans ce jeu d’affirmations.
3Exprimer et mettre en scène ces pages (re)fondatrices de l’identité urbaine exige de la part des diverses autorités, politiques et religieuses, d’accorder leurs visions afin d’investir dans un sacré susceptible d’entretenir un véritable éloge de la cité bien inscrit dans le calendrier et dans les territoires3. Plusieurs chemins en permettent une concrétisation, à commencer par l’expression processionnelle, si fondamentale, la mise en place de lieux ou de marqueurs mémoriels, enfin la prise de parole autorisée, laquelle est le plus souvent associée aux autres formes. C’est une modalité d’autant plus intéressante à observer que, dans la droite ligne des apports médiévaux4, la période moderne constitue un nouvel âge d’or de la prédication. C’est pourquoi le temps et l’espace sont pratiquement saturés par les oralités publiques, strictement organisées et soumises à un contrôle permanent. Leur audience comme leur impact réel en font une sorte d’outil de formation d’une opinion publique urbaine5. Les sermons ou discours commémoratifs envisagés ci-après relèvent très bien de ces oralités assumées et confiées à des clercs choisis, généralement commandités car ils expriment un point de vue autorisé.
4Une limite existe toutefois à leur étude, d’ordre quantitatif. Les sermons sont en effet rares, leur conservation assez inégale – on compte plus de mentions que de textes mêmes –, enfin leur dispersion dans le temps crée parfois un important décalage entre le moment du propos et celui du fait l’autorisant. Difficile alors de prétendre à une étude suivie avec des conclusions fortes, appuyées sur des séries. Pour autant, même si les leçons restent nécessairement prudentes, il n’en demeure pas moins intéressant d’envisager l’apport d’un petit corpus, rassemblé à partir d’exemples de l’Est de la France, à la mise en visibilité de la religion urbaine.
Commémorer les sauvegardes
5Quoi de plus risqué dans l’histoire d’une ville que de faire face à une grande menace, naturelle, épidémiologique ou militaire, dont la conséquence redoutée pourrait être la chute des territoires et la désagrégation des corps urbains. Dans une étude un peu pionnière sur les situations de crise d’origine guerrière, Gabriel Audisio insistait sur un point crucial : la prise de ville est « un fait presque anodin dans l’Europe de la Renaissance, et pourtant central6 ». Car derrière les faits avérés surgissent très rapidement interprétations et regards générés après coup, un processus évoquant la mise en place de véritables « stratégies apologétiques7 ». Ainsi, lorsque la tentative de prise échoue, lorsque les faits tournent en faveur de la cité presque contre toute attente raisonnable, c’est alors qu’une épopée locale est prête à se déployer. Celle-ci dépend d’une relecture providentielle de l’événement, ce terreau fécond dont il faut tirer un profit visible. En empruntant les termes d’un récent programme de recherche8, on peut parler d’un investissement volontaire dans le sacré civique, démarche dont on attend beaucoup de fruits en termes de cohésion politique et d’identité urbaine.
6La fin du xve siècle lorrain compte deux épisodes de ce genre, proches par la chronologie quoique différents dans leur déroulement : l’échec du siège de Metz par les Lorrains en 1473 et, quatre ans plus tard, la célèbre Bataille de Nancy. Dans le premier cas, le duc Nicolas tente de prendre la riche et importante ville de Metz, à la fois carrefour économique sur la Moselle et verrou frontalier vers le Nord. Or, contre toute attente et malgré une ruse employée par le capitaine Krantz introduisant des troupes afin de faire ouvrir les portes au petit matin, le siège échoue. Découvert par un boulanger – Harelle, devenu depuis une figure protectrice de la cité et honoré sur la Porte Serpenoise érigée au début du xxe siècle – la tentative tourne au fiasco et le siège est rapidement levé9. Cette victoire inespérée « sans verge ny bastons de deffense » est aussitôt regardée comme le fruit de l’intervention de Dieu « Nisi Deus custodierit civitatem ». Le sermon prononcé sur les lieux mêmes de la victoire par un prédicateur connu, le dominicain Nicolas Claussequin, résume l’opinion générale : il « declaira la graice que Dieu leur avoit faicte de les avoir préservez de leurs ennemis et leur avoir donné une telle et honnorable victoire contre telles et si iniques et perverses entreprinses faictes par ledict duc de Lorraine ». Que Metz soit préservée est une chose, qu’elle saisisse en profondeur le sens de l’épreuve à peine subie en est une autre ! Car dans une perspective providentielle, l’épreuve n’a pu être envoyée que par Dieu, et il faut se ressaisir collectivement pour la dépasser. On entre alors dans une seconde phase destinée à perdurer au-delà de l’événement, si bien qu’une fondation commémorative voulue conjointement par les autorités politiques et religieuses est nécessaire : le chapitre cathédral s’engage à organiser une procession annuelle, le Magistrat décide de l’érection d’une chapelle dédiée à la Vierge et aux saints patrons de Metz en 1478, mais en un point éloigné du site du combat, près de la cathédrale, au cœur de la ville. Devenu un lieu symbole du regain d’un patriotisme municipal, l’oratoire permet en effet de « redduire à mémoire la grande victoire que Dieu pour lors donnait au peuple de la cité de Mets et affin auci que lez jonnes qui veuront après nous en soient plus plainement informés en temps a advenir ». Dans cette mise en œuvre aux forts accents patrimoniaux, le sermon du souvenir s’impose comme un rendez-vous incontournable, chargé de faire naître et entretenir une mémoire officielle de l’événement10.
7Grâce à un document isolé, sorte de cahier des charges dévolues à l’orateur, nous sommes très bien éclairés sur l’objectif premier de la prise de parole. Au citadin messin contemporain puis à celui vivant après les événements, il faut faire entendre les bienfaits procurés par une double obéissance, politique et religieuse, de façon à l’ancrer dans un imaginaire collectif puissant. Sur le plan politique, c’est l’allégeance à l’empereur, bien normale pour une ville libre d’Empire, qui est avancée comme la principale vertu civique ; sur le plan religieux aussi on prône la fidélité à la religion des pères, un attachement à la tradition présenté comme le principal moyen de ne pas errer. Certes, un tel avertissement vaut en tout temps, pourtant la date d’après 1525 qui est proposée pour ce document démontre le souci d’actualisation des menaces. Sont formellement avertis les Messins tentés de se détourner de Charles Quint et d’accorder une attention au message luthérien alors en pleine diffusion dans la cité et le Pays, juste après l’épisode de la guerre des Paysans. De leur capacité à résister aux séductions et nouveautés extérieures dépend pour partie l’avenir de la cité. Par son aggiornamento, le discours garde bien en vue le souhait ou de fournir à la ville une nouvelle virginité ou de restaurer son image de cité sainte. Cette leçon a cours pendant plusieurs décennies, jusqu’à l’occupation française consécutive à la « Chevauchée d’Austrasie » de 155211.
8Le scénario nancéien diffère, tout en aspirant au même but. La bataille du 5 janvier 1477 se déroule aux portes de la capitale du duché de Lorraine, opposant une coalition formée des troupes de René II et de Louis XI à celles du duc de Bourgogne Charles le Téméraire12. Or, ce dernier n’est pas seulement défait, il meurt et avec lui c’est la construction d’un vaste état d’entre-deux qui s’effondre13. Aussitôt l’événement passé, une même dynamique commémorative publique se fonde, matérialisée par un triptyque. Cela commence par un marquage de l’espace péri-urbain avec l’élévation de deux sites commémoratifs : la chapelle de Bonsecours (dite des Bourguignons), hors les murs de la ville, sur le champ de bataille14, et le couvent des Cordeliers15, à l’intérieur de Nancy. Le souvenir de la bataille est encore perpétué par la plantation d’une croix, dite « de Bourgogne », là où le corps de Charles le Téméraire a été retrouvé16. La victoire est enfin commémorée chaque 5 janvier par la « Procession des Rois », cortège fondé par René II en 1501. Son lien étroit avec la dynastie ducale en général et avec la bataille de Nancy en particulier fait de ce cortège un événement plus politique que religieux, bien que ces deux aspects soient indissociables à l’époque. Cette dimension permet certes de la comparer à d’autres processions urbaines, telle celle d’Orléans rappelant la libération de la ville par Jeanne d’Arc17, mais son impact va au-delà. Elle fait en effet figure de fête nationale et travaille le lien des Nancéiens et des Lorrains à leur souverain. On le mesure particulièrement au retour du duc Léopold dans ses états en 1698, la procession des Rois reparaissant alors avec un éclat particulier, celui d’une liturgie civico-politique refondatrice. Un sermon accompagne la cérémonie en Ville Vieille, payé par la municipalité, toutefois aucun exemplaire de son contenu ne semble avoir été conservé pour l’Ancien Régime18.
9Une seconde série d’exemples significatifs de sermons commémoratifs s’observe au tout début des guerres de Religion (1562-1563), autre moment de violences urbaines pour lequel un retour par les gestes et les mots n’est pas superflu. Plusieurs études ont mis en valeur le cas de Toulouse, théâtre d’émeutes confessionnelles en mai 1562 qui marquent durablement l’histoire de la ville rose19. Une situation comparable a concerné Verdun, à l’autre bout du royaume, quelques mois plus tard20. Dans la nuit du 2 au 3 septembre 1562, Verdun échappe à une tentative de surprise par des troupes huguenotes. Préparée avec discrétion, certainement grâce à des complicités de l’intérieur – on incrimine des membres de la garnison française21 –, l’opération est toutefois éventée par l’évêque-comte Nicolas Psaume qui, anticipant la menace, la jugule et l’éloigne. Or, en cette année 1562 où, comme il a été écrit, les murailles des villes catholiques semblent tomber comme celles de Jéricho face aux offensives protestantes22, la crainte fut considérable et donc la victoire regardée comme inespérée. Dès lors la « délivrance » devient un élément fort de la préservation de l’identité verdunoise. Pendant plusieurs décennies, la célébration fait coexister le fait de guerre avec l’intervention providentielle, puis la part religieuse et pour tout dire miraculeuse de la sauvegarde, en particulier par l’intercession de la Vierge Marie, première patronne de la ville, prend le dessus et finit par prédominer dès le début du xviie siècle. Faute de sources régulières évoquant les sermons donnés annuellement en accompagnement de la procession des « huguenaulx », l’historien doit hélas se contenter d’un seul discours, passé à la postérité grâce à l’imprimerie et souvent commenté, celui du récollet Urbain Quillot en 1671. Né à Verdun, gardien du couvent local de son ordre, le locuteur considère sa mission oratoire comme un « devoir » à rendre à la cité, à l’évêque à qui il le dédie23, enfin à la fidélité de sa protectrice céleste24.
10À plus d’un siècle de distance, le sermon n’omet pas une récapitulation de l’histoire du fait aux peuples, mais il va bien au-delà en sommant ses compatriotes de tirer des leçons fondatrices pour Verdun. Il s’agit tout à la fois d’une question d’identité et de vocation, en bref d’un enjeu de fidélité et de constance politiques et confessionnelles. Pour le régulier en effet, depuis que la cité est sortie des ténèbres du paganisme, elle ne serait jamais tombée dans les filets des hérésies : « on peut dire qu’il y a toujours eu de la fermeté à Verdun, pour ny point donner d’entré à ce monstre de l’Heresie, la doctrine y est pure, la Religion y est catholique, et Romaine, Dieu mercy, sans erreur25 ». Sans occulter le rôle classique joué par l’évêque Psaume, une démonstration du defensor civitatis adressée aussi à ses successeurs confrontés à leur tour aux défis du rigorisme et du jansénisme, Quillot donne un puissant crédit à une tradition née après coup, un récit annexé par le temps, celui de l’épisode des clés :
« j’ay ouy dire bien des fois, et des personnes entendues me l’ont confirmé que les bourgeois de la ville mirent les clés des portes aux pieds de Notre dame […]. Quelqu’uns m’ont adiouté que la Nostre Dame qui est au-dessus de la porte de Saint Victor, baissa la tête et fit une inclination à ceux qui, à deux genoux, luy demendoient son assistance26 ».
11Peu importe alors l’invraisemblance historique totale de cette vision de 1562, dont l’une des conséquences est de suggérer un déplacement des faits d’un bout à l’autre de Verdun, de la Ville haute à la Ville basse. Il reste cette conviction : « c’est à Marie après Dieu que nous devons cette victoire, et c’est pour luy en rendre graces que nous faisons tous les ans cet[t]e procession. » Le regard critique et historique des clercs du xviiie siècle souligne les contradictions, mais il est bien difficile, écrit l’un d’eux d’aller à contre-courant du regard traditionnel popularisé par le sermon de Quillot lequel, par sa diffusion, « a en quelque sorte servy de model aux prédicateurs qi ont preché après luy dans cette cérémonie célèbre27 ». Or, le discours du récollet n’est pas le fruit d’une initiative individuelle, vraisemblablement il répond à une commande et relève de ces remarquables conceptions qui « tâche[nt] de créer une continuité entre le présent [Verdun, citadelle de la Contre-Réforme28] et l’image d’un passé approprié29 ». Le prédicateur et plus encore son sermon sont des agents de la quête identitaire préservée – situation aisément comparable dans l’espace nord-lorrain avec Metz vivant la coexistence confessionnelle –, invitant les auditoires à recevoir la vulgate mariale, à l’intérioriser telle qu’elle est, puis à la diffuser aux générations suivantes.
12Cette première série de remarques nous a plongés dans la fabrique de discours destinés à favoriser une autocélébration et à renouer avec la tradition rassurante des éloges des villes. Organisée par les autorités politiques, publiques et religieuses, souvent liée à une cérémonie processionnelle occupant l’espace urbain, bien inscrite enfin dans le calendrier tel un incontournable et très attendu rendez-vous, la prédication donnée à la ville est encore chargée d’autres objectifs plus délicats.
Parler pour rassembler
13Certaines prises de parole se rapportent en effet à des passages difficilement glorieux puisqu’ils renvoient à une mémoire douloureuse, celle d’une coupable errance de la cité, du moins d’une de ses composantes, au grand dam et préjudice de tous. Car les mauvais choix d’un instant font planer comme un danger sur une bonne réputation pluriséculaire. En inscrivant ce souci dans l’économie générale de la spiritualité du temps – qui veut que l’on tire profit de ses fautes afin de grandir dans la foi et rendre possible la conversion –, certains sermons sont des tentatives publiques de mettre fin à une situation héritée pesante et déshonorante. C’est particulièrement le cas des engagements politiques contractés par certaines cités au temps de la Ligue30. Or, un tel combat contre l’autorité étatique, notamment mené au nom de principes politiques (défense des privilèges municipaux) et moraux (« sauver son âme » précise Stéphane Gal), n’est pas sans risque. Le pari est perdu à Troyes comme à Reims, et l’échec d’une telle aventure a forcément un coût politique sur le court, moyen et long terme. Sinon, comment comprendre que la fidèle Châlons-en-Champagne ait été élue chef-lieu de la nouvelle généralité-intendance au sortir des guerres de Religion, alors que la capitale des Comtes et la cité des Sacres connaissent un « déclassement » temporaire et semblent bel et bien punies31. L’art du sermon peut alors cultiver la volonté de rédemption générale par la pratique d’une prédication d’apaisement32.
14Dijon en offre une intéressante illustration. En effet, la cité de Mayenne ne revint que tardivement au roi, en 159533. On connaît mal les circonstances dans lesquelles un sermon semble être dédié aux faits, ni quand on l’instaura et s’il fut régulièrement dispensé, pourtant un manuscrit daté de 1676 intrigue. Intitulé La ville fidele et catholique ou panégyrique de Dijon reduitte soubs l’obeissance d’Henry 4, le discours est composé et prononcé huit décennies plus tard par dom Moreau, profès bénédictin dijonnais, devant un auditoire choisi et représentatif des principaux corps de la cité, religieux et politiques34. Fondamental, le message à faire passer est la relecture publique d’une fidélité peu évidente au cours de ces années de plomb, celles de nombreuses grandes villes prises « dans la confusion generalle de toutte la France… [marquée par les mauvais choix créant la] division… [qui] rendoient les autres villes coupables, [mais] cette ville de dijon [demeura] innocente [de cette accusation] ; fidelle a son prince légitime [Henri III], dans le temps même de l’infidellité35 ». Alors que le souverain était sur le point de mettre fin aux séditions et de se réinstaller dans Paris36, permettant la normalisation tant espérée, il est assassiné le 1er août 1589. L’orateur ne masque pas le dilemme auquel sont soumises les autorités dijonnaises, entre d’une part « une famille etrangere, de Guise, devenue fiere ambitieuse et puissante […] s’establissant une pretention imaginaire » avec Mayenne, leur gouverneur, et de l’autre un souverain légitime mais suivant une « fausse et criminelle croyance37 ». Non sans subtilité, Dijon aurait accepté l’idée d’une défaite à venir du Navarrais, option justifiant un positionnement moins ligueur que pragmatique, loyal à sa manière. Dom Moreau proclame à quel point Dijon fut avant toute autre considération un pôle fixe de la restauration monarchique et spirituelle du pays. Foyer de stabilité, elle sait où est son devoir et, au contraire d’autres, elle n’a pas erré en attendant un « autre David38 ». Mieux encore, elle fut une cité modèle, temporairement divisée par l’aveuglement de quelques-uns, et, à sa suite, « les autres villes de la Bourgogne animées par l’exemple de leur capitalle » reviennent au roi Henri IV pleinement légitimé39. Dans cette distribution des vertus propres d’une cité et d’une métropole d’équilibre, que faire alors de l’engagement ligueur, bien réel dans les faits ? On plaide l’innocence dijonnaise qui fut celle de nombreuses familles maintenant haut le flambeau de la droiture, résistant même jusqu’au « martyr » du premier d’entre eux, le maire pendu par les insurgés ligueurs40. Véritable tour de passe-passe rhétorique, le panégyrique ou éloge entend faire chaque année la démonstration que l’authentique esprit urbain a traversé les événements. La loyauté est comme un ADN pour peu que l’on veuille regarder au-delà des apparences, ce à quoi s’évertue justement l’orateur chargé de défendre l’honneur passé des siens.
15Dans les moments de tension et d’affrontement, c’est au nom de la vertu de prudence qu’on veille à ce qu’aucune chaire n’enflamme inutilement l’ensemble de la ville par l’usage d’un verbe fielleux ou provocateur. Y aspirer est une chose, y parvenir une autre, surtout quand il s’agit de lutter contre la publicité déjà acquise de certains sermons. Les discours que nous envisageons désormais ne relèvent pas de la catégorie des rendez-vous importants et attendus, trop surveillés pour donner prise à des débordements, toutefois ils atteignent, par leur écho spontané, une visibilité aussi inattendue que forte. Les deux capitales lorraines, l’épiscopale Toul et la ducale Nancy, connurent des épisodes oraux de cet ordre entre 1646 et 1649. Afin d’en apprécier la valeur, il convient de rappeler que le duché est occupé depuis 1633, que le duc Charles IV s’est exilé et que des évêques plutôt francophiles et des gouverneurs français exercent les pouvoirs41. C’est d’abord un orateur jésuite, Committi, qui tient des « paroles peu respectueuses » contre les parlementaires messins temporairement exilés à Toul au cours de l’avent 1646. La colère de la cour est d’autant plus grande que l’orateur est malgré tout confirmé dans sa mission pour instruire les fidèles au carême suivant, toujours depuis la chaire de la cathédrale. En réaction, les magistrats menacent de créer leur propre station concurrente afin de contrer ce qu’ils assimilent à une provocation de la part des pouvoirs toulois ligués (municipalité, évêque, chapitre cathédral). À ce point, l’affaire trouve une rapide solution. Les pères jésuites délèguent leur provincial pour faire amende honorable et, une fois l’incident clos, la cour accorde sa commission à Committi. Dans cette histoire, la réaction parlementaire a désamorcé le sentiment anti-français et empêché de possibles autres expressions d’une rancœur nourrie au fil des années. De la sorte, elle préserve aussi l’exemplarité de la communauté urbaine42.
16Le lieu est différent, mais les enjeux parfaitement identiques dans l’affaire de Nancy en 1649. Orpheline de son souverain – Charles IV a quitté les lieux pour une longue errance depuis 1633 –, Nancy s’enflamme en janvier 1649 à cause des mots du prieur des augustins affirmant que « les Bourgeois de Nancy se reisouissoint des divisions lesquelles estoient en France et dans la Ville de Paris, et qu’il y restoit encore assé de fleaux pour les affliger, q[ue] nestoient au point auquel ils le souhaitoient ». Prononcé dans le cadre moins visible de la chapelle de l’Hôpital Saint-Charles, le discours aurait pu rester confidentiel. C’était oublier que dans une ville occupée et sous tension, alors que la Fronde connaît ses premiers développements auxquels le religieux fait nettement allusion, le contrôle est important. Les propos tenus parviennent dès le lendemain aux oreilles des pouvoirs, en particulier à celles de la municipalité. Le débat qui s’engage n’est pas sans enjeu. Il est en effet crucial de prouver que le prédicateur s’est non seulement isolé par ses propos, mais a choqué : « ses auditeurs avoient esté fort scandalisés comme pernicieux, de dangereuse conséquence et dommageable au publicq. » La Ville ordonne une enquête et amène le sermonnaire à résipiscence. La leçon est la suivante :
« il navoit heu la volonté doffenser ny le général ny le particulier, ains infirmer que tous les chrestiens faisoient ensemblem[ent] un mesme corps en la participa[ti]on du precieux corps de Jesus christ ils debvoient sattrister des afflictions que lung des membres souffroit et non pas sen resiouir, et que lon ne pouvoit blesser une partie dud. corps que tout le reste ne sen ressentit43 ».
17Satisfait, le corps de ville qualifie la solution trouvée de « remede convenable ».
18La prédication sert bien à faire entendre et voir une ville unifiée autour de représentations et de valeurs communes. Par la parole se manifeste une communion suffisamment visible pour être pleinement exprimée. Plus d’un demi-siècle plus tard, en août 1719, un ciboire est volé à la chapelle des cordeliers de Nancy. L’objet est retrouvé quelques jours plus tard, mais souillé car abandonné dans « un fumier ». L’évêque de Toul et le duc Léopold ordonnent alors la cérémonie réparatrice du sacrilège sous la forme d’une procession et d’un sermon commandé « sur le sujet ». Médiateur et agent, l’orateur, un cordelier, fait lui-même amende honorable dans la chaire, à genoux, portant un cierge. Par ses mots comme par son geste – une source privée nous dit « ses auditeurs furent très contents de son sermon » –, il parachève une liturgie particulière au sens profondément social, et répare une indignité individuelle par une réaction commune, permettant aux citadins rassemblés de participer au blanchiment d’un vêtement urbain maculé44.
19Enfin, comment ne pas évoquer « les saints et les villes [qui] partagent une vie intime45 » et à ce titre figurent parmi les critères faisant l’urbanité. En constatant oralement sa formidable dotation en sanctuaires et en corps saints, une cité reliquaire est en capacité de faire triompher l’idée de sa fondation sur le sang des martyrs et le compagnonnage sans failles des patrons. Ordonner une prédication est un des moyens les plus sûrs d’entretenir une dévotion générale aux protecteurs. À Troyes, dont il fut évêque au ve siècle, saint Loup est populaire depuis longtemps, son culte unanimement entretenu, en particulier depuis que lui fut attribué l’éloignement de deux périls majeurs : le recul de l’incendie de 153046, la sauvegarde face à une menace huguenote en 159047. Chaque 29 juillet est l’occasion d’une célébration argumentée qu’on imagine très suivie à l’abbaye Saint-Loup. De rares mentions prouvent le recrutement d’orateurs sortant un peu de l’ordinaire, comme en 1635, mais aucun discours ne nous est parvenu48. La situation châlonnaise est plus riche car les sermons du récollet Charles Rapine ont été imprimés. Il intervient deux fois, au milieu des années 1620, d’abord pour prêcher la mémoire de quatre saints protecteurs, dont Memmie, le premier évêque – « vous le voyez, Auditeurs (et bien-heureux les yeux qui voyent ce que vous voyez) » –, probablement lors d’une translation des châsses. Enthousiaste et désireux de stimuler la piété des citadins, il le compare à d’autres tutélaires célèbres ailleurs :
« S. Martin de Tours, de S. Hilaire de Poictiers, de sainct Bonaventure, de S. Irénée de Lion, de S. Aignan à Orléans, de S. Eutrope à Xaintes, et d’autres en d’autres villes de la France […]. Si cela une fois nous arrive [de l’oublier] ainsi que nos pechez l’ont demerité, adieu Chaalons, adieu vostre ville. Malheur à nous, si nous sommes autant esloignez d’eux, comme nous le sommes maintenant de leurs mœurs49. »
20La harangue a une forte dimension civique, c’est « un monument, érigée au despe[n]s du public : en fin tous les ans [les Magistrats de la République] employoient quelque orateur pour reciter un panegyric en leurs louanges50 ». Une communion publique permise par la parole, voilà exactement l’objectif visé. C’est dès lors aux Châlonnais d’imiter et de vénérer leurs saints afin que leur cité soit toujours resplendissante sous le regard de Dieu : « Que ferons nous à ces saincts personnages, et ces quatre corps […] ce sont eux qui ont quitté leur pays, leurs maisons, leurs délices de leur ville51. » La translation apporte visiblement les fruits espérés, sous la forme d’une multiplication de miracles que l’orateur devenu auteur consigne52.
21La faveur insigne de Dieu pour la ville des intendants de Champagne transparaît encore dans un second sermon donné en l’honneur du saint Nombril ou « sacré umbilic », une relique christique majeure. Trois parcelles en étaient conservées, une à Constantinople, la seconde à Rome jusqu’en 1527, enfin la châlonnaise, seule rescapée des drames. Comment attribuer au simple hasard ce qui relève d’une élection divine : « entretoutes les villes d’Europe voire de la Chrestienté, [elle] a esté choisi par une gratuite bonté de Dieu », qui « a pris possession de cette ville, dont il veut estre le Seigneur53 ». Le sermon ne cesse d’encourager l’attachement à une précieuse relique, vénérée et exposée, peut-être aussi parce qu’elle commence à être remise en cause et qu’on doute de son authenticité. Monseigneur de Noailles finit par en interdire la vénération au début du xviiie siècle, décision qui, selon Voltaire, conduisit « toute la ville de Châlons [à] lui f[aire] un procès54 ». Le propos est volontairement exagéré, n’en doutons pas, mais il traduit bien l’importance urbaine, visible et publique, qu’avait acquise la relique.
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22À l’invitation d’une revue historique, l’écrivain Michel del Castillo avait évoqué ses « cicatrices intérieures » avec les mots suivants : « Remaniés, transformés, les souvenirs sont l’écume de la mémoire55. » Les sermons commémoratifs envisagés dans cette rapide analyse nous ramènent à cette vision des rapports complexes nourris entre histoire et mémoire, entre un ressenti toujours subjectif malgré l’objectivité des faits.
23Les discours rencontrés sont liés à des moments de crise, le plus souvent éléments d’une actualité brûlante à instrumentaliser par la commémoration, surgissant parfois d’un passé qui hante encore les esprits, plus enfoui que visible. C’est au cours de ces différentes périodes sensibles que l’identité historique des villes, réelle comme imaginée, est interrogée, se trouve bousculée et on la croit en danger. De telles situations appellent une réponse pensée collectivement, tel un moyen de surmonter la tension par une appropriation communautaire, d’éviter que le dissensus ne brise le nécessaire consensus56. Bien évidemment, la prédication n’est qu’une des modalités permettant de maintenir le groupe urbain dans son unité malgré les diversités d’opinion. Elle peut parfois échapper à tout contrôle immédiat, nous en avons vu quelques illustrations, mais cela reste exceptionnel et la reprise en mains ne tarde pas.
24Dans cette remise en ordre publique et obligée des sociétés urbaines, ici accomplie par le verbe, les hommes retenus pour dispenser les discours sont liés aux cités : ils peuvent y être nés, ou alors, parce qu’ils y résident, décident de s’y impliquer fortement, pour toutes sortes de raisons, en mettant leurs aptitudes reconnues au service du bien commun ou du vivre ensemble. Cette communauté d’identité entre les acteurs et les messages facilite nécessairement la crédibilité, la légitimité et donc la visibilité des sermons mémoriels. Plus encore, ce sont les différents pouvoirs urbains et pas seulement les autorités cléricales qui collaborent à cette expression maîtrisée d’une religion publique qui est aussi une religion civique. En exaltant par exemple la place unique des saints, les discours et éloges espèrent bien entraîner l’ensemble du corps urbain sur la voie d’un perfectionnement bénéfique à tous. Or, comment atteindre ces vues et faire mieux accueillir l’image de cité sainte sinon en associant une parole prêchée aux actes et pratiques plus concrets.
Notes de bas de page
1Voir Cabantous Alain, « Des villes en général et de Dunkerque en particulier », in Alain Cabantous (dir.), Mythologies urbaines. Les villes entre histoire et imaginaire, Rennes, PUR, 2004, p. 17-34. Parmi les cas les plus étudiés, incarnant un héroïsme urbain forgé sur une autre forme de grandeur, le sacrifice, les Bourgeois de Calais occupent une place bien à part dans le champ historiographique et l’imaginaire local et français : à la synthèse forte de Moeglin Jean-Marie, Les Bourgeois de Calais, essai sur un mythe historique, Paris, Albin Michel, 2002, s’est ajoutée la réflexion sur les « fortunes [contemporaines] du mythe » médiéval, dont l’érection du groupe d’Auguste Rodin, par Curveiller Stéphane et Domain Magali, « Calais et le mythe des Six Bourgeois », in Alain Cabantous, Mythologies urbaines, op. cit., p. 95-107.
2Coulomb Clarisse, « L’historien de la ville et l’espace public », in Clarisse Coulomb (dir.), Écrire l’histoire de la ville à l’époque moderne, Histoire urbaine, vol. 28, no 2, 2010, p. 123-145.
3Ancienne, la tradition d’éloge des villes reste très actuelle aux temps modernes. Voir Coulomb Clarisse, « Chanter la ville. Les éloges de villes publiés en France des années 1640 aux années 1780 », in Dominique Le Page (dir.), Urbanités. Vivre, survivre, se divertir dans les villes, xve-xxe siècle, Dijon, EUD, 2012, p. 75-88.
4Martin Hervé, Le métier de prédicateur à la fin du Moyen Âge. 1350-1520, Paris, Cerf, 1988 ; Muzzarelli Maria-Giuseppina, Pescatori di uomini. Predicatori e piazze alla fine del Medioevo, Bologne, il Mulino, 2005.
5Qu’il soit permis de renvoyer aux travaux suivants : Simiz Stefano (dir.), La parole publique en ville des Réformes à la Révolution, Villeneuve-d’Ascq, Presses universitaires du Septentrion, 2012 ; Id., Prédication et prédicateurs en ville, xvie-xviiie siècles, Villeneuve-d’Ascq, Presses universitaires du Septentrion, 2015 ; Id, « Une “révolution” de la prédication catholique en ville ? Début xvie siècle-seconde moitié du xviie siècle », Histoire urbaine, vol. 34, no 2, 2012, p. 33-50. Voir aussi Brian Isabelle, Prêcher à Paris sous l’Ancien Régime, Paris, Classiques Garnier, 2014.
6Audisio Gabriel (dir.), Prendre une ville. Histoire, arts et lettres, Aix-en-Provence, Publications de l’université d’Aix, 2004, p. 9.
7Expression utilisée à propos par Olivia Carpi dans le compte rendu d’Histoire, économie & société, 2005, 24-3, p. 448.
8Di Stefano Roberto et Maldavsky Aliocha (dir.), Invertir en lo sagrado : salvación y dominación territorial en América y Europa, siglos xvi-xx, Santa Rosa, EdUNLPam, 2018 ; Maldavsky Aliocha (dir.), Les Laïcs dans la mission : Europe et Amériques xvie-xviiie siècles, Tours, Presses universitaires François-Rabelais, 2017.
9Dom Jean François et dom Nicolas Tabouillot, Histoire de Metz par des religieux bénédictins de la Congrégation de Saint Vanne, t. II, Metz, 1769, p. 669-670.
10Approfondissements, citations et analyses dans Tribout De Morembert Henri, « Une pieuse fondation de la municipalité de Metz. La chapelle de la victoire dite des Lorrains, 1476-1754 », Bulletin philologique et historique (jusqu’à 1610) du CTHS, Paris, Imprimerie nationale, 1963, p. 235-247 ; voir aussi Gantelet Martial, « Entre France et Empire, Metz, une conscience municipale en crise à l’aube des Temps modernes (1500-1526) », Revue historique, 2001/1 (no 617), p. 5-45. [DOI : 10.3917/rhis.011.0005], [https://www.cairn.info/revue-historique-2001-1-page-5.htm], p. 11. Cet auteur insiste : « La haine lorraine, nourrie par des années de conflits [troisième tentative de prise en un demi-siècle], fut alors à son paroxysme : la description du duc Nicolas s’apparenta à celle d’un diable et l’événement souda la ville autour de ce sentiment commun envers un ennemi devenu héréditaire. »
11Cabourdin Guy, « Les temps modernes, de la Renaissance à la guerre de Trente ans », in Encyclopédie illustrée de la Lorraine, Histoire de la Lorraine, Nancy, PUN, 1991, p. 67-73.
12Cinq-centième anniversaire de la bataille de Nancy (1477), actes du colloque de Nancy, 22-24 septembre 1977, Nancy, Annales de l’Est, no 62, 1979 ; Schneider Hélène, « René II (1451-1473/1480/1508). Le fondateur de la principauté lorraine des temps modernes », in Laurent Jalabert (dir.), Ducs de Lorraine. Biographies plurielles de René II à Stanislas, Metz, Paraiges-Histoire, 2017, p. 19-21.
13Le profit politique de cet effondrement est évident pour René II. Le souverain hérite en quelque sorte de ce statut de « terre du milieu » formulé par Pernot François, « L’espace lotharingien à la Renaissance : les “terres du milieu” qualifiantes pour la domination européenne ? », in Gérard Giuliato, Marta Peguera Poch et Stefano Simiz (dir.), La Renaissance en Europe dans sa diversité, t. 1 : Les pouvoirs et lieux de pouvoir, Nancy, xvie-xviie siècles en Europe, coll. « Europe xvi-xvii », no 20, université de Lorraine, 2015, p. 163-176.
14Ageron Olivier, « Un lieu de mémoire en Lorraine : Notre-Dame de Bonsecours », in Philippe Martin et François Roth (dir.), Mémoire et lieux de mémoire en Lorraine, Sarreguemines, Éditions Pierron, 2003, p. 249-252.
15Friant Emmanuelle, « L’église des Cordeliers de Nancy et la Chapelle Ronde, lieu de mémoire symbolique de la Lorraine ducale », in ibid., p. 223-236.
16Le musée Lorrain de Nancy conserve ce qui serait le quatrième monument érigé depuis le xve siècle, fruit d’une subvention de 1821 (musée Lorrain, « Monument commémoratif de la mort de Charles de Bourgogne dit « Croix de Bourgogne », Grillot, architecte, 1821-1822 ». Calcaire taillé, sculpté. H. 440 ; l. 120 ; Pr. 120 cm. Inv. D. 2008.0.2. Dépôt de la Ville de Nancy, fait en 1934).
17Sur les débuts de cette procession de la délivrance, interrompue courant xviie siècle, voir Michaud-fréjaville Françoise, « Les processions à Orléans au xve siècle », Cahiers de recherches médiévales et humanistes, 2005/12, p. 113-130.
18Informations aimablement fournies par Aurore Benad, qui a soutenu en décembre 2019 une thèse à l’université de Lorraine intitulée : « Pour le Salut des âmes du peuple de ladite ville ». Municipalité et vie religieuse à Nancy fin xvie-fin xviiie siècleQu’elle en soit remerciée.
19Davies Joan, « Persecution and Protestantism : Toulouse, 1562-1575 », The Historical Journal, 1979/22, p. 31-51 ; Greengrass Mark, « The anatomy of religious riot in Toulouse in may 1562 », The Journal of Ecclesiastical History, 1983/34, Cambridge University Press, p. 367-391 ; Fanlo Jean-Raymond, « Toulouse, 1562, ou comment on écrit l’Histoire », in Gabriel Audisio, Prendre une ville, op. cit., p. 63-73 ; Souriac Pierre-Jean, « Guerres religieuses, histoire et expiation : autour de l’émeute toulousaine de mai 1562 », Chrétiens et sociétés. xvie-xxe siècles, no 20, Lyon, 2013, p. 31-62.
20Simiz Stefano, « La mémoire catholique d’un échec protestant à travers les siècles : la tentative de surprise de Verdun en septembre 1562 », Les Affrontements religieux (xvie-xviie siècles), Annales de l’Est, 2009/1, p. 123-139.
21Verdun, comme Toul et Metz, est occupée par les troupes françaises depuis 1552.
22Crouzet Denis, Les Guerriers de Dieu. La violence au temps des guerres de religion, vers 1525-vers 1610, Seyssel, Champ Vallon, 1990, p. 755.
23Armand de Monchy d’Hocquincourt.
24Sermon prononcé par le R. P. Urbain Quillot, Récolet, en la Procession Générale du 3 septembre 1671, paru à Verdun, Jacquet, s. d. sous le titre de Sermons des Graces que la Glorieuse Vierge Marie a fait à Verdun et de secours qu’elle luy a donné contre les Hérétiques, publié in Petite bibliothèque verdunoise, éd. Nicolas Frizon, t. 1, Verdun, Laurent, 1885, p. 98-163.
25Ibid., p. 125.
26Ibid., p. 142.
27Chanoine Guédon, Mémoire touchant la procession générale qui se fait tous les ans le IIIe de septembre à Verdun pour remercier Dieu, vers 1750, publié in Petite bibliothèque verdunoise, t. 1, op. cit, p. 6-7.
28Simiz Stefano, « Verdun, ville dévote et cité mariale », in Philippe Martin et Noëlle Cazin (dir.), Autour de la Congrégation de Saint Vanne et de Saint Hydulphe, l’idée de réforme religieuse en Lorraine, Bar-le-Duc, Société des lettres, sciences et arts de Bar-le-Duc, 2006, p. 51-65 ; Id., « Réactualiser un héritage religieux : Verdun cité de Marie d’après le manuscrit du chanoine Baleycourt, vers 1673 », Annales de l’Est, no spécial 2013, p. 201-212.
29Baetens Roland, « À la recherche d’une identité urbaine. Anvers et les mythes au xixe siècle », in Alain Cabantous, Mythologies urbaines, op. cit., p. 109.
30Il s’agit là d’un domaine classique d’études. Sans souci aucun d’exhaustivité, nous renvoyons à Constant Jean-Marie, La Ligue, Paris, Fayard, 1996, chap. vii, « La Ligue : une révolution urbaine et provinciale », et à Gal Stéphane, « Peurs urbaines et engagements politico-religieux au xvie siècle : l’exemple de la Ligue grenobloise », Histoire, économie & société, 2001, 20/1, p. 3-21.
31Voir en priorité Konnert Mark, Local Politics in the French Wars of Religion. The Towns of Champagne, the Duc de Guise, and the Catholic League, 1560-95, Aldershot, Ashgate, 2006, en particulier la conclusion, p. 257-267.
32Songeons à l’émergence un peu partout des « prêcheurs d’Henri IV », selon l’expression de Thierry Amalou, Le Lys et la mitre. Loyalisme monarchique et pouvoir épiscopal pendant les guerres de Religion (vers 1580-vers 1610), Paris, CTHS, 2007, p. 360.
33Gras Pierre (dir.), Histoire de Dijon, Toulouse, Privat, 1987, p. 117-119. Lire aussi le classique Drouot Henri, Mayenne et la Bourgogne, Étude sur la Ligue (1587-1596), Paris, Auguste Picard, 1937, dont l’objectif est une mise en système, depuis l’observatoire dijonnais, des comportements urbains pendant la Ligue.
34B. M. de Dijon, ms 743, La ville fidele et catholique ou panegyrique de Dijon reduitte sous l’obeissance d’Henry 4, prononcé le 28ème de may en l’Église le S[ain]te Chapelle du Roy : en présence du Clergé et des Cours souveraines de Bourgogne
35Ibid., fo 3.
36Ibid., fo 7 vo : « il n’avoit plus qu’à vaincre les moins forts enfermés dans Paris », mais « un coup funeste » le frappa.
37Ibid., fo 9 vo.
38Ibid., fo 2 vo-3 ro et 16 ro.
39Ibid., fo 11 ro.
40Ibid., fo 14 vo. L’orateur indique que le souverain bourbon le réhabilite plus tard, anoblissant ses descendants.
41Martin Philippe, Une guerre de Trente Ans en Lorraine, 1631-1661, Metz, Serpenoise, 2002 ; Jalabert Laurent, « Charles IV (1604-1625/1675). Le temps des ruptures », in Ducs de Lorraine, op. cit., p. 110-118 ; Vignal-Souleyreau Marie-Catherine, Richelieu et la Lorraine, Paris, L’Harmattan, 2004.
42Michel Emmanuel, Histoire du parlement de Metz, Paris, Techener, 1845, p. 99.
43Archives municipales de Nancy, BB 5, registre des délibérations, date du 25 janvier 1649.
44Lepage Henri, « Journaliers de la famille de Marcol », Mémoires de la Société archéologique de Lorraine et du Musée historique lorrain, t. LIX, 1909, 4e série/9e volume, p. 338-390.
45Le Gall Jean-Marie, « Les saints des capitales », in Alain Cabantous (dir.), Mythologies urbaines, op. cit., p. 167.
46Survenu six ans après un premier feu en 1524.
47Roberts Penny, A City in Conflict. Troyes during the French Wars of Religion, Manchester, Manchester University Press, 1996, p. 181. L’historienne anglaise a montré qu’il s’agissait plutôt des troupes royalistes.
48Le chanoine rémois Petitpied (Oddos Jean-Paul, « Marie-Nicolas Desguerrois et la dévotion sentimentale », in Pierre-Eugène Leroy (dir.), La vie à Troyes sous Louis XIII, Troyes, Centre Pithou, 1984, p. 73, note 34).
49Sermon contenu dans Discours de la vie, mort et miracles de S Memmie ou S. Menje, apostre et premier evesque de Chaalons en Champagne, s. l. s. d., p. 39-40. Le sermon date de l’avent 1624.
50Ibid., p. 5.
51Ibid., p. 25-26.
52Ibid., p. 43-79, miracles collationnés à la suite du sermon.
53Sermon reproduit dans Annales ecclésiastiques du diocese de Chaalons en Champagne par la succession des Evesques de ceste Eglise, Comtes de Chaalons et Pairs de France, Paris, 1636, p. 381-420.
54Voir Delumeau Jean, Rassurer et protéger, Paris, Fayard, 1989, p. 236 et Voltaire, Traité sur la tolérance, Genève, 1763, p. 155.
55Revue L’Histoire, juillet-août 2006, no 311, p. 64.
56Alazard Florence, Geonget Stephan, Gerbier Laurent et Mellet Paul-Alexis (dir.), Dissensus : pratiques et représentations de la diversité des opinions, 1500-1650, Paris, Honoré Champion, 2016.
Auteur
Université de Lorraine (CRULH)

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