Les ports de Sinope, acteurs des échanges de la cité dans l’Antiquité
p. 201-222
Texte intégral
1La cité de Sinope, fondation milésienne1 du milieu du viie siècle av. J.-C.2, se situe au milieu de la côte sud de la mer Noire, à égale distance entre le Bosphore et la Colchide. Durant l’Antiquité, Sinope a eu une histoire riche3 : à partir du milieu du vie siècle av. J.-C., elle a fait partie de la satrapie de Phrygie hellespontique au sein de l’Empire achéménide4 ; en 437, les Athéniens y ont installé une clérouquie5 et après l’explosion de l’Empire athénien en 404, Sinope a eu à faire face au reliquat des Dix-Mille, menés par Xénophon, au printemps et à l’été 400 av. J.-C.6. En 370, la cité fut attaquée par le satrape perse Datamès, en rébellion contre l’autorité royale7 et, entre 353/352 et 346/345 av. J.-C., elle passa un traité d’alliance avec la cité d’Héraclée du Pont8 pour assurer sa sécurité en des temps troublés au sein de l’Empire perse. Durant la conquête de l’Empire achéménide par Alexandre le Grand, la région de Sinope ne fut pas touchée, car en dehors du circuit de l’Anabase. Elle servit de base de repli aux généraux perses survivants de la bataille du Granique, qui utilisèrent son atelier monétaire en vue de lever de nouvelles troupes9. Après la mort de Darius III, le Perse Ariarathès se tailla une principauté cappadocienne dont Sinope faisait partie, où il frappa monnaie10, avant d’être attaqué en 322 par le Diadoque Eumène de Cardia, venu conquérir ses possessions11. La mort d’Ariarathès et celle d’Eumène, ainsi que les guerres incessantes entre les successeurs d’Alexandre, loin du Nord de l’Anatolie, permirent à Sinope une vraie indépendance politique au iiie siècle av. J.-C. et une prospérité économique visible à travers les amphores timbrées de Sinope retrouvées sur tout le pourtour de la mer Noire à l’époque hellénistique12. La richesse de Sinope aiguisa les appétits de la dynastie du Pont, qui commençait à se doter de rivages dans le Nord de l’Anatolie avec la prise d’Amastris en 27913 et celle d’Amisos avant 25514. Sinope fut attaqué par Mithridate II du Pont en 220 et sauvée grâce à l’appui technique de son allié rhodien15, mais elle ne put résister à son petit-fils Pharnace Ier qui la conquit en 183 av. J.-C.16. Au iie siècle av. J.-C., Sinope devint la capitale du royaume du Pont et la ville natale de Mithridate VI Eupator17. À ce titre, elle fut particulièrement visée durant les guerres mithridatiques et fut finalement prise par le général romain Lucullus en 70 av. J.-C.18, et, en 45 av. J.-C., Jules César y déduisit une colonie romaine19.
2La situation géographique de Sinope correspond à une zone de rupture de charge entre une voie commerciale terrestre établie de la Cilicie à Sinope20 et les routes maritimes du Pont-Euxin21. Le port de Sinope joue, en tant qu’acteur, un rôle d’intermédiaire économique et stratégique entre ces deux espaces opposés.
3La cité a la particularité d’avoir été fondée sur un isthme22 (voir fig. 1) et, depuis l’Antiquité, son port a la réputation d’être le meilleur de la côte sud de la mer Noire23, et a même prétendu au titre de « Hong Kong24 » du Pont-Euxin. L’importance commerciale de son port, connu pour sa double rade, se retrouve donc dans la littérature scientifique, sans que cette affirmation ne soit pleinement justifiée.
4L’objet de cet article est de s’interroger sur la notion de port à Sinope, en partant d’une définition simple, à savoir qu’un port est « un abri naturel ou artificiel aménagé pour recevoir les navires, pour l’embarquement et le débarquement de leur charge25 ». Il existe différents types de ports26, comme les ports maritimes, les ports fluviaux, les ports de commerce, les ports de transit, les ports de pêche, les ports militaires. La question d’un port implique aussi que l’on s’interroge sur les aménagements portuaires, comme les digues, les jetées, les phares, les débarcadères, les embarcadères, les quais et les bassins27.
5Parler du « port de Sinope » nous semble restrictif, car nous montrerons dans cet article qu’il y a eu plusieurs ports à Sinope, avec des fonctions différentes et/ou cumulées. L’évolution historique et urbanistique de la cité a eu son importance dans la définition, l’emplacement et l’aménagement des ports de Sinope, tout comme la question de la taille des navires et du développement du commerce. Dans cet article, nous nous attacherons à aborder la question des ports de Sinope du point de vue des vestiges archéologiques, mais aussi des sources littéraires, en montrant comment, à travers l’Antiquité, le grand port de Sinope est devenu l’acteur des échanges économiques de la cité.
Le premier port de Sinope
6Si la ville antique de Sinope est connue pour son implantation sur un isthme, le premier port de Sinope n’y fut peut-être pas installé. L’objet de cette première partie est de réfléchir au peuplement de la région de Sinope et à l’emplacement du premier port grec.
Le peuplement du territoire de Sinope
7Les quelques découvertes archéologiques réalisées à ce jour ont seulement permis de démontrer que l’occupation la plus ancienne dans la province de Sinop est datée de la période chalcolithique28. Les couches d’occupation identifiées à Kocagöz Höyük, à Boyabat-kaya, le mobilier de Maltepe Höyüğü et la céramique de Kıran Höyük et de Kabali Höyük nous apportent des précisions quant au peuplement de la région, qui semble s’opérer antérieurement, dès le début de la période néolithique29. Le nombre de sites recensés de l’Âge du Bronze est en forte augmentation30, et ce chiffre est un indicateur d’un afflux croissant de la population et des activités engendrées. La région de Sinop est située à l’une des extrémités nord d’un vaste réseau commercial qui, au ixe et viiie siècle av. J.-C., est contrôlé par le puissant royaume assyrien31.
8Sinope est une cité dont la fondation sur la côte sud de la mer Noire est aussi l’une des plus anciennes32. De l’Antiquité à aujourd’hui, tous les auteurs s’accordent à dire que Sinope est une colonie milésienne33 fondée au milieu du viie siècle av. J.-C.34 : après une première fondation milésienne au milieu du viie siècle av. J.-C., le premier fondateur Habron fut tué par les Cimmériens, dont l’occupation de la péninsule de Sinope est attestée par Hérodote35. La refondation de Sinope par deux exilés milésiens, Koos et Krétinès36 a eu lieu à la génération suivante, soit en 631 av. J.-C., date de la fondation de la cité dans la chronologie d’Eusèbe de Césarée dans la version de Saint Jérôme37.
9Si la date de la fondation et de la refondation de Sinope sont bien assurées, aucun élément déterminant ne permet de préciser l’époque à laquelle eurent lieu les premiers contacts que l’on pourrait qualifier de précoloniaux. De nombreux travaux de recherche laissent à penser que dès la période du ixe et du viiie siècle av. J.-C., il y eut des incursions maritimes de premiers navigateurs grecs en mer Noire38. À cette hypothèse sont fréquemment associés les récits mythologiques39 relatant les exploits des Argonautes et du héros fondateur thessalien Autolycos de Tricca à Sinope40.
10Avant de fonder la cité de Sinope sur l’isthme de la presqu’île de Boztepe, qui est un acte mûrement réfléchi et hautement stratégique, les colons milésiens avaient assurément prospecté la côte, réalisé des repérages préliminaires et possédaient suffisamment d’informations sur les territoires convoités. Néanmoins, les quelques rares données archéologiques pour cette période se résument à la récolte d’un nombre limité de fragments de céramique41, qui ne permettent pas aujourd’hui d’affirmer que la première colonie de Sinope fondée par les Milésiens l’a été sur un terrain vierge ou, au contraire, sur l’emplacement occupé par une communauté déjà présente sur la presqu’île de Boztepe. Mais la rareté du mobilier et l’absence de vestiges probants pour cette période permettent de supposer que l’implantation de la ville a peut-être été définie ex nihilo.
11De ce fait, avant l’implantation des Milésiens à Sinope et l’aménagement d’un port, un port naturel avait dû abriter les premiers contacts commerciaux entre Grecs et populations locales.
Le port naturel d’Armenè
12D’après les sources littéraires, les environs de Sinope étaient des territoires peuplés par des Syriens42, des Assyriens43 ou des Leucosyriens (Syriens Blancs)44. Beaucoup d’auteurs ont voulu voir dans cette mention un lien entre les rivages pontiques et les Assyriens45, ou dans ces populations des descendants de Hittites qui vivaient dans le territoire compris entre Sinope et la Ptérie46. Les travaux de P. Garelli ont montré la présence assyrienne en Cappadoce grâce aux tablettes découvertes à Kultepe (Kaniš)47.
13Ces populations locales occupaient la presqu’île de Sinope et la vallée du Karasu, et c’est vraisemblablement à l’embouchure du Karasu et de la crique d’Akliman que les premiers contacts et comptoirs commerciaux ont été établis par les Grecs (voir fig. 1 et 2).
Fig. 1. – Carte de la région de Sinope.

J.-F. Pichonneau.
Fig. 2. – Vue aérienne de la crique d’Akliman.

J.-F. Pichonneau.
14Les prospections effectuées par O. P. Doonan sur les contreforts et dans la vallée du Karasu48 permettent de mettre en évidence une occupation locale, certes peu dense, mais qui a forcément contribué à l’établissement d’échanges économiques et culturels. Les colons grecs qui ouvraient de nouveaux marchés et qui créaient des comptoirs sur la côte méridionale de la mer Noire, étaient manifestement animés d’une volonté expansionniste. Le fait est d’autant plus visible lors de la fondation par Sinope de nouvelles colonies telles que Trapézonte et Cérasonte chez les Colques49 et Cotyôra chez les Tibarènes50 afin de s’assurer le contrôle des ressources minérales de l’arrière-pays51.
15À cinquante stades à l’est de Sinope, le site d’Akliman a été identifié comme le port antique d’Armenè52. Cette vaste crique naturelle, abritée des vents dominants et de la houle, est équipée de modestes mouillages, qui sont utilisés actuellement par des plaisanciers et quelques bateaux de pêche saisonnière à l’anchois. Il est évident que des espaces côtiers comme la ría de Hamsilos, la crique d’Akliman, le delta du Karasu et la vaste baie méridionale de la presqu’île de Boztepe ont été des endroits privilégiés pour l’établissement de ces premiers contacts commerciaux basés sur le troc, bien avant le viiie siècle av. J.-C.
16Des liens économiques existaient donc entre les Grecs et les populations locales et nous pouvons nous demander quelle a été l’attitude de ces premiers colons à l’égard des populations locales et réciproquement. Dans sa notice sur Sinope53, Strabon nous indique que les colons milésiens ont pris possession de la presqu’île et du tombolo de Sinope en profitant de la faiblesse de ses occupants. Le terme de « faiblesse », utilisé par Strabon, peut être entendu dans le sens d’une faible densité de population qui occupait cet espace et d’un manque de réactivité des habitants locaux qui ne semblaient pas manifester de l’hostilité à cette nouvelle implantation, et peut-être même y voir certains intérêts économiques.
17Placé à proximité du delta du Karasu, le site d’Armenè, dès le viiie siècle av. J.-C., est une zone d’échange que nous pouvons qualifier d’emporion, propice à l’ouverture d’un marché entre les populations locales de l’arrière-pays, la haute vallée du Karasu, et les premiers marchands grecs. Mais définir Armenè comme uniquement un port de commerce ou une bourse maritime serait de réduire la notion complexe de l’emporion à un simple concept exclusivement marchand54.
18Lors de l’expédition des Dix-Mille, Xénophon et son armée font escale pendant cinq jours dans le port d’Armenè au printemps 400 av. J.-C. Pour qu’ils reprennent la mer au plus vite en direction d’Héraclée, la cité de Sinope leur fait don de vivres pour le voyage, composés de trois mille médimnes de farine et de quinze cents cérames de vin55. Au cours de cette période, le port d’Armenè paraît suffisamment vaste pour disposer d’appontements, de quais, d’entrepôts et d’espace afin d’accueillir une telle armée d’environ huit mille soldats ainsi qu’une flotte militaire. Aussi, nous pouvons supposer que ces stocks de denrées ou du moins une partie, sont déjà entreposés dans le port d’Armenè, dont les activités commerciales dominantes sont tournées sur l’exportation des excédents de la production d’huile d’olive, de vin, de poisson et le transbordement de céréales. La ville de Sinope ne peut se permettre d’accueillir cette importante flotte dans le grand port pour des raisons aussi bien sécuritaires que d’encombrement des quais, au risque de perturber l’activité commerciale et surtout la tranquillité de la population avec une foule de mercenaires en armes circulant dans la ville.
19Le géographe Strabon, au début du ier siècle apr. J.-C., décrit Armenè comme une simple bourgade située sur territoire de Sinope, pourvue d’un port56. La construction du grand port fortifié dans la ville Sinope et l’accroissement de son activité dès le ve siècle av. J.-C. ont sûrement contribué à ce lent déclin d’Armenè et peut-être, au début du ier siècle apr. J.-C., sert-il occasionnellement d’escale, d’abri aux navires à fort tonnage. Une prospection subaquatique associée à un inventaire exhaustif des sources pourrait permettre d’apporter de nouveaux indices et une meilleure compréhension des ports de Sinope, d’Armenè et des espaces côtiers.
Grands ports et petits ports
20En raison de la fonction et de la situation géographique, les ports sont catalogués, par les auteurs, comme petits ports ou grands ports. Les petits ports sont affectés exclusivement au transbordement, au commerce local de redistribution, et sont aménagés traditionnellement sur la grève ou dans une anse naturelle, dotés d’un môle ou de brise-lames comme le premier port à Demirci. Ces petits ports ont un statut privé, mais ils peuvent aussi servir d’abris temporaires pour des embarcations de faible taille, lors de mauvais temps.
21Parfois un qualificatif est adjoint, un bon port tel celui d’Armenè, un mauvais port comme Cérasonte ou encore celui de Trapézonte, qui était seulement saisonnier avant le creusement des rades sous le règne d’Hadrien.
22Aux premières heures de la fondation des colonies côtières par les Grecs sur le Pont-Euxin, les ressources halieutiques ont été un des facteurs essentiels pour l’alimentation57, l’essor économique et le développement de ces cités58. La situation géographique de Sinope, sur la côte méridionale, à mi-distance entre Chalcédoine et la Colchide et à la verticale de Chersonèse, en fait une escale obligée dès le développement du commerce et des lignes maritimes59.
23Avant de présenter les ports de la Sinope antique, il est essentiel de définir les principaux et différents modes de navigation en mer Noire, tout en y associant les différents modèles d’embarcations appropriées.
Les différents modes de navigation
24Il existe et, cela dès la fondation de Sinope, une marine militaire et une autre de commerce. Notre propos ici n’est pas d’aborder seulement ces deux modes, mais aussi de présenter l’ensemble de la flottille qui a contribué en grande partie à l’essor de la cité.
25Pour exercer un contrôle sur une large bande côtière au sud du Pont-Euxin, allant de Cytoros à l’ouest à Trapézonte à l’est, Sinope devait disposer au ive et au iiie siècle av. J.-C., d’arsenaux, de chantiers de construction navale et d’une flotte militaire et marchande conséquente.
26Dès le début de la colonisation grecque en mer Noire, le commerce progresse rapidement, les navires marchands augmentent considérablement, aussi bien en nombre qu’en taille, qui au fil des siècles, prend des proportions démesurées60. La marine marchande est constituée de plusieurs modes de transports des biens et des hommes, les tailles et les modèles de navires sont conditionnés par le volume et la nature du fret à transporter mais aussi par les distances à parcourir. Aussi ce trafic commercial est-il saisonnier en raison des très mauvaises et dangereuses conditions de navigation en hiver61, voire impraticables en mer Noire. Les gros navires de charge ou mixtes, jaugent à plus d’une centaine de tonnes, sont destinés à une navigation hauturière. Définis comme cargos, ils possèdent une quille et une étrave, et ne peuvent accoster que dans des ports en eaux profondes équipés de quais pour l’arrimage. Ce mode est principalement employé sur de longues distances pour le transport des céréales, des salaisons, de l’huile d’olive, du vin, du bétail, des matériaux de construction et des biens manufacturés. Le cabotage diurne ou de plusieurs jours est représenté par une autre catégorie de bateaux de transport, jaugeant à une vingtaine de tonnes en moyenne. Ils sont majoritairement utilisés pour un commerce de redistribution que l’on pourrait qualifier d’inter-cités et dans les estuaires des fleuves. Ce qui caractérise ces navires, outre leur maniabilité du fait de leur taille réduite, c’est surtout qu’ils sont construits spécialement avec un fond plat pour leur permettre l’échouage sur une grève. Le modèle a peu changé jusqu’à aujourd’hui (voir fig. 3 et 4).
Fig. 3. – Technique de l’échouage sur la plage en mer Noire.

Source : [https://www.sualtigazetesi.com/karadenizin-son-capari-turizme-hizmet-edecek/].
Fig. 4. – Bateaux de pêche traditionnels de la mer Noire.

Source : [https://www.sualtigazetesi.com/karadenizin-son-capari-turizme-hizmet-edecek/].
27Le petit cabotage concernait seulement l’activité marchande des environs immédiats et de la chôra maritime de Sinope : on pourrait parler d’un commerce de proximité et de transbordement. La multitude de barques et de pirogues monoxyles formait aussi une flottille de petit cabotage, destinée à la pêche saisonnière et au transport de proximité par voie fluviale. Les pirogues monoxyles sont des embarcations traditionnelles utilisées, comme l’attestent les fouilles de ces épaves, depuis la période néolithique62. Pour le Pont-Euxin, c’est l’Anabase de Xénophon qui apporte quelques précisions sur ces pirogues, qui sont décrites lors de l’arrivée des Dix-Mille aux frontières du territoire des Mossynèques63. Les canots sont au nombre de trois cent, et chacun d’eux porte à son bord deux guerriers et un rameur. Le nombre d’occupants nous permet de supposer que ces embarcations étaient de taille réduite et naviguaient seulement sur domaine fluvial, car en mer la houle est trop souvent forte.
28Il semble, comme le fait P. Arnaud64, que nous pouvons cataloguer plusieurs modes des relations commerciales. Le premier mode est celui de la navigation hauturière : il correspond à une navigation sur de longues distances et concerne principalement l’acheminement de denrées indispensables à l’approvisionnement des grandes cités. Le second mode peut être qualifié de navigation inter-cités. Il peut être déduit de l’étude du timbrage amphorique et du timbrage sur tuile à l’époque hellénistique65, témoignant de relations privilégiées entre les cités. La collecte et l’acheminement des produits manufacturés se font à partir des ruptures de charges ou de grands ports, et cet aspect correspond à un commerce local de proximité et de redistribution.
Le développement de la marine
29Au ve siècle av. J.-C., la suprématie de la marine militaire athénienne est attestée sur l’ensemble de la Méditerranée et de la mer Noire66. En 437 av. J.-C., Périclès envoya une expédition navale dans le Pont-Euxin67, dans le but d’intégrer les colonies comme Héraclée Pontique et Sinope dans la Ligue de Délos68. Aux habitants de Sinope, il laissa treize navires avec le stratège Lamachos et des soldats en armes pour combattre le tyran Timèsiléos en place dans la ville. Une fois que celui-ci et ses partisans eurent été expulsés, Périclès décréta que six cents volontaires athéniens navigueraient vers Sinope pour s’installer au côté de la population locale, après avoir réparti les maisons et les terres que détenaient les tyrans. Sinope et Héraclée devinrent alors une tête de pont, relais indispensable qui permit à Athènes d’étendre son influence et son contrôle économique vers le sud-est du littoral pontique. Dès la fin du ive siècle, Sinope s’imposa comme un intermédiaire commercial privilégié entre la Colchide et les cités grecques, et c’est aussi à cette période que les cités développaient la construction et la fortification de leurs grands ports abrités.
30Les avancées technologiques de la marine militaire ont permis à la marine marchande de construire et d’affréter de nouveaux vaisseaux destinés au transport de charges toujours plus lourdes et volumineuses, mais c’est au cours de la période romaine que le nombre et le gigantisme sont atteints69.
31Désignés sous le terme de navis oneraria à la période romaine, ces bateaux sont propulsés uniquement à la voile ou velum. La coque ventrue est carénée et quillée, les bordages sont renforcés par quatre préceintes qui s’interrompent en arrière contre le gouvernail latéral. La grande voile carrée, quadrillée de bandes de renfort, est fixée à une vergue transversale hissée sur un mât central sur lequel est fixée à son extrémité une nacelle ou corbis. À l’avant, une petite voile de proue, le supparum, est montée sur un mâtereau afin d’équilibrer au mieux le vaisseau et de lui faciliter les manœuvres lors des changements de cap. En arrière de la voile carrée, on distingue les haubans du mât et les cargues pour hisser la vergue, et, à la proue, les cordages sont attachés en toupet. À l’arrière, la poupe est relevée sans rambarde, sur le pont, il y a une cabine avec des marchandises, et contre celle-ci et en avant, une tente est dressée.
32Au musée archéologique de Sinop, la cuve d’un sarcophage en marbre blanc, exécutée vers la fin du ier ou au début du iie siècle apr. J.-C., présente latéralement un décor composé de deux navires marchands voguant sur les flots, et une inscription rappelle le défunt, Cornelius Arrianus, mort à l’âge de soixante ans70 (voir fig. 5 et 6). Une stèle funéraire, dans le musée de Sinop, au nom du nauclère Iulius Callinicus, et datée des ier et iie siècle apr. J.-C., présente aussi ce même modèle de bateau, avec une inscription métrique votive71.
Fig. 5. – Sarcophage de Cornelius Arianus, musée archéologique de Sinop.

J.-F. Pichonneau.
Fig. 6. – Détail du navis oneraria, sarcophage de Cornelius Arianus, musée archéologique de Sinop.

J.-F. Pichonneau.
33À n’en point douter, la représentation est celle de navires marchands du type cargo, naviguant en convoi, dont la longueur dépasse généralement vingt mètres et dont le poids en charge varie entre cent et cent cinquante tonnes et plus, pour les plus gros. Désignés sous le terme de corbita, ces vaisseaux de ligne à deux mâts sont très courants à l’époque romaine, ils sont affrétés exclusivement pour transporter de lourdes charges et sillonnent aussi bien la mer Noire que le bassin méditerranéen. Les épaves qui ont été découvertes au large de Zeytinlik72, dont l’une a une cargaison de tuiles produites à Sinope et une autre étaient chargées d’amphores produites aussi à Sinope, correspondent, par leur taille respective, qui est entre vingt et trente mètres de longueur, au modèle de corbita évoqué précédemment. À une trentaine de kilomètres au nord-ouest de Sinope, lors des prospections sub-aquatiques réalisées par R. Ballard et son équipe en 2000, trois épaves chargées d’amphores produites à Sinope ont été localisées par cent mètres de profondeur73. Toujours sur la côte au nord-est de Sinope, une autre épave chargée aussi d’amphores a été identifiée par 320 mètres de profondeur, en très bon état de conservation elle a pu être datée par radiocarbone entre 410 et 520 apr. J.-C.74 Cette dernière épave d’une quinzaine de mètres de long est aussi une corbita de taille modeste dont la charge avoisinée une cinquantaine de tonnes.
34Sinope apparaît parmi l’un des principaux centres de production et d’exportation d’amphores timbrées et de tuiles au iiie siècle av. J.-C. Le timbrage de Sinope présente des emblèmes d’ateliers qui ont des caractéristiques communes comme l’aigle et le dauphin mais aussi le canthare, la grappe et le fouloir de raisin75. Ce répertoire iconographique permet de quantifier un commerce manufacturé à grande échelle tel que le commerce de l’huile d’olive, du garum, du vin et des salaisons76.
La pêche en mer Noire
35Dans sa notice sur Sinope77, Strabon rapporte que c’est à partir de Sinope que les thons (les pélamydes), qui longent la côte depuis Trapézonte et Pharnacia, ont acquis une taille idéale pour être pêchés et salés78. Cette espèce, appelée Sarda sarda, est une bonite à dos rayé, de la famille des scombridés, et Pline l’Ancien précise que le terme de pélamyde correspond à un jeune thon de moins d’un an79. Avant d’être passés au sel80, les poissons étaient coupés en morceaux et séparés des parties grasses et des viscères ou tarichoi. Les filets salés ou melandrya étaient préférés à la chair fraîche car celle-ci était plus difficile à digérer. Ce mode de conservation, salé, séché ou mariné permit de développer, au cours de la période hellénistique, un important commerce des salaisons à grande échelle81. Lorsque Strabon évoque les pêcheries de thon à Sinope82, il entend montrer la qualité et l’étendue de ces installations de transformation des thons qui sont établies sur le front de mer aux abords de la ville.
36D’autres espèces étaient aussi pêchées et consommées fraîches ou bien demi-sel : c’est le cas du mulet de Sinope, dont la chair était réputée pour ses vertus médicinales83. L’anchois, qui est pêché en mer Noire actuellement, peu présent dans la littérature, a forcément été connu et exploité de façon saisonnière. Le nombre important d’espèces en mer Noire84 implique qu’à chacune d’entre elles correspondait une technique de pêche appropriée, soit annuelle, soit saisonnière85. Cette pêche côtière était pratiquée depuis la grève et au large, au filet encerclant et au harpon. Depuis la grève, plusieurs méthodes étaient usitées, madragues, nasses, hameçons, aménagements de pièges et de filets, et le recours à des appâts n’est pas à exclure. Le printemps et l’automne étaient les deux périodes de migration des espèces pêchées, mais c’est surtout dès la fin du mois de septembre que les pélamydes abandonnaient la mer Noire en bancs serrés pour rejoindre les eaux de la mer de Marmara86.
37Xénophon, lors de son passage chez les Mossynèques87, évoque que dans des jarres, des tranches de dauphin étaient conservées dans le sel et que de la graisse de dauphin était conservée dans d’autres pots. Le dauphin est une espèce qui était surtout pêchée par les populations locales88 pour son importante masse graisseuse, qui était employée à la place de l’huile d’olive pour la conservation des denrées.
Le grand port de Sinope, acteur des échanges économiques
38Le grand port de Sinope est un port éloigné d’une embouchure fluviatile, Vitruve préconise que dans cette situation de l’importance de la construction de môles, de jetées et de quais s’arrondissant ou pas intérieurement89. Aux extrémités de ces protections des tours sont élevées et équipées de repères lumineux à feu ainsi qu’un mur de défense est associé. Toujours d’après Vitruve, le marché, les entrepôts (horrea) et les arsenaux sont aussi situés à proximité du port, généralement ces bâtiments jouxtent les quais. En raison du coût élevé pour la construction du grand port en eaux profondes, son statut est civil, mais, pour autant, il répond à des exigences militaires, comme dans l’ensemble des autres cités portuaires.
39Quand Strabon mentionne une double rade90, il entend parler des deux ports, le mouillage militaire au pied de l’acropole avec les arsenaux et le mouillage marchand le long du rempart méridional de la ville.
40Dans la ville de Sinope, le grand port de commerce, abrité en eaux calmes et profondes, a obligatoirement été établi sur la côte méridionale de l’isthme, car la côte septentrionale est soumise aux vents rabattants venus du Nord (voir fig. 7) et celle-ci n’offre pas d’abri contre une houle permanente. Par ailleurs, les hauts-fonds de bancs sablonneux et d’écueils rocailleux, qui s’égrènent tout le long de la côte, empêchent les vaisseaux dont le tirant d’eau est peu ou pas important d’accoster.
Fig. 7. – Vue des fortifications de Sinope depuis la côte septentrionale.

J.-F. Pichonneau.
41La côte nord de l’isthme, inaccessible à la navigation hauturière, présente, à partir de la Kumkapı (« Porte du sable ») et jusqu’à Akliman, une longue plage propice seulement à l’échouage (voir fig. 1). Les hauts-fonds permettent en effet seulement aux bateaux à très faible tirant d’eau d’y accéder. La grève et l’embouchure envasée du Karasu sont uniquement accessibles en barques ou en pirogues. C’est surtout la plage, au plus étroit de l’isthme, aux abords de la porte de la Kumkapı, qui a servi de port saisonnier pour le petit cabotage et la pêche.
42Au début du ier siècle apr. J.-C., Strabon n’apporte pas seulement des informations géographiques sur la présence de ports situés de part et d’autre de l’isthme de Sinope91 (voir fig. 8), il mentionne aussi deux rades et un arsenal. Seuls quelques ports disposaient d’arsenaux destinés aux constructions de vaisseaux militaires. Mithridate VI avait transformé le port de Sinope en une véritable base navale fortifiée, mais, lors de la troisième guerre mithridatique, le général romain Lucullus, avec une flotte d’une cinquantaine de navires, avait détruit les derniers vaisseaux de la flotte pontique et en avait capturé une trentaine devant Lemnos92. La dernière bataille navale mentionnée par Memnon est celle engagée au large de Sinope : l’auteur précise comment l’un des généraux de Mithridate, Séleucos, accompagné par Cléocharès et par des vaisseaux de Sinope, a remporté la victoire contre des navires romains commandés par l’amiral Censorinus et comment leurs navires de transport ont été capturés93.
Fig. 8. – Carte des fortifications et de la ville antique de Sinope.

J.-F. Pichonneau.
43Après la déduction d’une colonie césarienne à Sinope en 45 av. J.-C.94, le grand port de Sinope resta au cours du haut Empire une base navale avancée pour les escadres romaines. Sinope était une des clés stratégiques pour le contrôle de la mer Noire, qui constituait une partie du limes romain95. Le port de Sinope garda toujours cette fonction militaire importante : Marcus Agrippa y d’ailleurs fit escale avec son escadre en 14 apr. J.-C. avant son expédition dans le Bosphore Cimmérien96. Mais, au cours du Haut-Empire c’est indéniablement le port de Trapézonte qui joue le rôle de base arrière du limes cappadocien et lors des campagnes contre les Parthes, il est le port d’attache de la Classis Pontica jusqu’au iiie siècle97.
44Une inscription de Sinope, datée du règne de Trajan, mentionne un praefectus orae maritimae Amastrensis et classis Ponticae98. J. Moreau, premier éditeur de l’inscription, estimait que la préfecture orae maritimae Amastrensis était liée à une réorganisation du commandement des côtes de la mer Noire en vue de la préparation des opérations contre les Parthes, donc avant 116 apr. J.-C.99. Du fait qu’un préfet soit mentionné à Amastris, on peut supposer qu’il existait peut-être une base navale ou un port militaire sur le fleuve Iris ou à son embouchure. Il est certain que sur cette partie de la côte méridionale du Pont-Euxin, les ports comme celui de Sinope servaient à la fois d’escale et de port de ravitaillement à la flotte militaire tout au long de la période romaine.
45Dans la lettre qu’adresse Arrien de Nicomédie, gouverneur de Cappadoce, à l’empereur Hadrien, l’auteur n’apporte aucune information particulière sur le port de Sinope car les données sont seulement géographiques100.
46Jean-Baptiste Lechevalier, secrétaire d’ambassade auprès du comte de Choiseul-Gouffier, ambassadeur de France auprès de l’Empire ottoman, visita Sinope entre 1785 et 1786101 et donna une description du grand port de Sinope dans son ouvrage Voyage de la Propontide et du Pont-Euxin102. D’après lui, les dimensions du grand port étaient de 160 toises de longueur, soit 288 mètres, et de 80 toises de largeur, soit 144 mètres, la profondeur ne dépassant pas douze pieds ou 3,60 mètres. La rade était suffisamment vaste pour recevoir les plus gros vaisseaux. Il précisait aussi que le port était fermé par un môle ruiné, dont quelques vestiges étaient encore visibles au pied de la tour no 12 sur les gravures réalisées par Jules Laurens, qui avait accompagné Xavier Hommaire de Hell lors de son voyage à Sinope en 1847103. L’auteur signalait aussi un petit port près de l’acropole, qui était presque entièrement ensablé. Toujours aux pieds de l’acropole, deux autres môles, dont un est immergé, étaient mentionnés par les byzantinistes britanniques A. Bryer et D. Winfield, en avant des tours no 7 et 31104 (fig. 9).
Fig. 9. – Plan de la ville fortifiée de Sinope.

Bryer A. et Winfield D., The Byzantine Monuments and Topography of the Pontos, Washington D. C., Dumbarton Oaks Research Library and Collection, 1985, p. 88.
47L’extrait du plan, levé par Pefsinet en 1817, présente une jetée qui est située au pied de la tour no 7 (fig. 10).
Fig. 10. – Plan de la rade de Sinope, Pefsinet, 1817.

Pars, Bibliothèque nationale de France, Cartes et Plans.
48Un accès permet de relier le grand port de commerce et les arsenaux à la ville par la rue Sabahatin Ali et cela dès sa construction aux ve-ive siècle av. J.-C. (voir fig. 11). L’origine de cet axe correspond à une ligne de faille qui a d’abords été exploitée sous forme de carrière pour la construction de la première enceinte. Accentuée ainsi, cette faille formait un fossé qui protégeait le flanc oriental du premier rempart de l’acropole, construit avec des blocs en conglomérat volcanique. Dès la période classique, lors de la construction du second état de l’enceinte et de la fortification du grand port, le fossé a été aménagé en tant qu’axe de circulation : il est alors bordé de part et d’autre par les contrescarpes qui ont été modifiées, renforcées et restaurées au fil du temps suivant les besoins. Nous pouvons supposer aussi que la Kibris Caddesi et la Tuzcular Caddesi sont des axes communiquant directement avec le port de commerce. Les bassins et les arsenaux, au bas de l’acropole, furent aussi construits lors de la période classique. Les travaux de mise en défense de la ville sur le flanc ouest de l’acropole, réalisés avec l’aide technique et l’expertise des Rhodiens105 avant 220 av. J.-C. et l’attaque du roi du Pont Mithridate II106, ne concernaient pas directement les ports, les derniers ouvrages de cette ligne défensive étant les tours no 67 et 77 (voir fig. 11). Le texte de Polybe signale seulement que les habitants de Sinope furent mis à contribution pour la défense de la ville. Ce sont eux qui montèrent les palissades aux points faibles et qui barrèrent les accès au rivage avec des pieux.
Fig. 11. – Plan des fortifications de l’acropole de Sinope.

J.-F. Pichonneau.
49La zone ouest du port a fait l’objet de destruction à répétition, la première intervenant à l’issue du siège et de la prise de la ville en 183 av. J.-C. par Pharnace Ier du Pont107. Il semble probable que les tours no 67 et 77, très endommagées lors du siège, au point de ne pas être restaurées, ont été détruites pour la construction d’une nouvelle courtine, de la tour no 31 et la création d’une porte latérale accédant au port, le premier môle en avant de la tour no 45 étant aussi construit à cette période. La mise en œuvre de la courtine entre la tour no 31 et la tour no 32 est aussi contemporaine de ce renfort des défenses du port militaire. Ces extensions défensives du port ont donc été réalisées après le siège de 183 av. J.-C. et avant la prise de la ville par Lucullus en 70 av. J.-C.108 : elles sont l’œuvre des dynastes du Pont, et plus vraisemblablement de Mithridate VI. L’obturation de la porte latérale intervint au second siècle de notre ère lors de la construction de l’aqueduc et de la citerne qui est adossée contre la courtine du rempart109.
50Au cours de l’Empire ottoman, la tradition de charpentiers navals se perpétua jusqu’au début du xxe siècle. Le chantier de Sinope était l’un des plus actifs des côtes de la mer Noire car il disposait à volonté de bois de chêne d’excellente qualité. Provenant des forêts de la vallée du Karasu, ces bois de chêne, de sapin et d’orme étaient destinés à la construction navale110 et étaient apportés par chariots en ville, les câbles et les filins étant fabriqués dans les corderies de Sinope, en plein air entre la ville et les faubourgs de Boztepe.
51L’exploitation du bois était très réglementée, et un officier au service de la marine militaire de la Sublime Porte est en charge des coupes et de l’acheminement des bois de chêne (quercus cerris) propres à la construction de vaisseaux de guerre. Strabon précise que l’arrière-pays de Sinope, la Sinopitide, est montagneux et qu’y abonde un bois d’excellence pour les constructions navales et que son transport est facile111. Communément ce sont des essences comme le pin (pinus pinea) et le sapin qui sont utilisées jusqu’à la fin du xixe siècle essentiellement pour l’accastillage de la marine à voile, le chêne étant réservé pour les coques et les vaisseaux de guerre. Le transport de ces bois est effectué par radelage jusqu’aux embouches des fleuves où ils sont regroupés avant d’être exportés. Au xixe siècle V. Cuinet note que le delta de l’Halys est encore encombré par du bois de flottage ce qui représente de réels dangers pour la navigation112.
52Dès la fondation de Sinope, la ville se dote d’un grand port aux abords méridionaux de l’acropole. À cette période, les aménagements sont seulement composés par quelques môles de pierres comme brise-lames, nécessaires pour le chargement et le déchargement des marchandises jusqu’à la terre ferme. Le quai est alors composé par un appontement sur pieux destiné à l’arrimage de navires de tailles modestes, les vaisseaux à fort tonnage mouillant plus au large.
53Le parement hellénistique, extérieurement et intérieurement, du rempart méridional de l’acropole présente deux arches, séparées entre elles par une tour no 33 qui, dès l’origine, est peut-être équipée d’un signal lumineux. Ces deux portes sont aussi protégées de part et d’autre par deux autres tours no 32 et 34 en proue de navire. Ces deux arcatures ont été obturées par une maçonnerie de petits blocs d’origine polygénique liés à un mortier de sable gris et de chaux. Les bases de la retombée des arches ne sont pas visibles mais la largeur de chacune d’elles peut être estimée à cinq mètres.
54Ces portes marines, du fait de leurs caractères architecturaux, ont été édifiées ou réaménagées au plus tard à la période seldjoukide. Le 1er novembre 1215, le sultan d’Ikonium, Kay Kâwus Ier, prit possession du port de Sinope détenu jusque-là par l’Empire grec de Trébizonde113. Dès lors, il s’assura ainsi un débouché marchand sur la mer Noire et il mit en place une flotte militaire dont le port d’attache était Sinope. La ville passa sous gouvernance turque, une garnison y fut installée et l’acropole fut transformée en citadelle sous la direction d’architectes grecs. Ces travaux de réfection et la mise en défense furent financés par une quinzaine d’émirs seldjoukides : une inscription bilingue de Kay Kâwus Ier, encastrée dans le mur de la tour no 38 de la Loncakapı relate cette transformation de l’acropole en place forte114, qui prit par la suite dans les textes le nom de château, ou de citadelle suivant les auteurs.
55La présence des deux portes marines permet surtout de confirmer d’une continuité de cet espace en tant que port militaire : ces portes renforcent l’hypothèse de la présence de bassins et des quais disposés en arrière de la fortification hellénistique. C’est au cours de cette même période que l’on peut dater la dernière réfection des piles de l’ultime branche de l’aqueduc qui alimente toujours la citerne du port. Depuis le répartiteur de nouvelles alimentations sont créées pour les fontaines dont certaines sont encore en place comme celle dans Tuzcular Caddesi d’où le terme de Fontana annoté sur le plan de 1817 de Pefsinet (fig. 10).
56En 1254, suite à une période critique au sein du sultanat, l’empereur de Trébizonde Manuel Ier reprit à la surprise générale le contrôle de Sinope et de son port115. La gestion et la défense de la ville étaient alors sous le contrôle de nobles appartenant à la famille des Gavrâs. Mais au cours de l’année 1265, suite au refus de reddition du gouverneur Gavrâs, les Turcs Seldjoukides encerclèrent la ville par la mer, les vaisseaux furent équipés de machines de guerre. Après deux ans d’un siège long et difficile, lors de l’assaut sur la ville, c’est de nouveau le port et l’acropole qui furent convoités et repris en premier par Mu`în al-Dîn Sulayman Pervâne.116 On peut supposer que l’activité marchande, au cours de ces périodes instables, a fortement chuté et a provoqué une rétractation du marché et des échanges, et seul un commerce de proximité était encore actif. Les remparts ont quant à eux subi d’importants dégâts, en particulier ceux du port et de l’acropole. Le nombre impressionnant de boulets de pierre retrouvés ou stockés dans le secteur de la prison et de ses abords lors de travaux, pourrait bien provenir des mangonneaux (sorte de trébuchet à balancier) et des catapultes armant les vaisseaux seldjoukides qui ont fait à cette époque le siège de la ville.
Conclusion
57Acteur économique de la ville, le port contribue fortement à son rayonnement et à son développement, il est aussi un indicateur des activités marchandes, grâce à lui des produits manufacturés arrivent à Athènes et à Rome. Le grand port marchand de Sinope est une porte sur la mer par laquelle transitent les voyageurs, il apparaît dès lors comme un ensemble monumental dont certains caractères architecturaux décoratifs rappellent l’entrée principale d’une cité avec son arc de triomphe. C’est aussi un espace de contact, pas seulement marchand, négoce ou militaire, mais culturel entre des populations sédentaires et des voyageurs d’origines divers. L’évolution et la transformation permanente des rivages de Sinop par l’homme ces dernières années conduit inexorablement à l’enfouissement et à la disparition des vestiges des anciens ports de la ville. Les réfections du rempart et les colluvions ont fini par ensabler les premiers ouvrages et repousser ainsi le trait de côte au-delà des fortifications. En prélude à la guerre de Crimée, la bataille navale qui eut lieu le 30 novembre 1853117 entre les flottes russes et ottomanes dans la baie méridionale de Sinope a causé en grande partie la destruction de ce premier espace portuaire, puis les constructions de la prison en 1882 par le gouverneur Veysel Paşa et des nouvelles routes et infrastructures ont fini par l’oblitérer définitivement. Toutefois le port de Sinope conserva encore de son importance puisqu’à la fin du xixe siècle il constituait la seconde escale pour les paquebots entre Constantinople et Trébizonde, et cette tradition d’étape s’est perpétuée jusqu’à nos jours par l’arrivée de ferry de croisières en mer Noire.
Notes de bas de page
1Xénophon, Anabase, VI, 1, 15 ; Strabon, XII, 3, 11 ; Diodore, XIV, 31, 2 ; Arrien, Periégèse, 14 ; Eustathe de Thessalonique, Commentaires, 772 (GGM II).
2Ivantchik Askold, « Les légendes de fondation de Sinope du Pont », REA, 99, 1997, p. 33-45 ; Ivantchik Askold, « Die Gründung von Sinope und die Probleme der Anfangsphase der griechischen Kolonisation des schwartzmeergebietes », in Gocha R. Tsteskhladze (éd.), The Greek colonisation of the Black Sea area, Historia Einzelschriften, 121, Stuttgart, Franz Steiner Verlag, 1998, p. 297-330 ; Ivantchik Askold, Am Vorabend der Kolonisation. Das nördliche Schwartzmeergebiet und die Steppennomaden des 8.-7. Jhs. V. Chr. In der klassischen Literaturtradition : Mündliche Überlieferung, Literatur und Geschichte, Berlin/Moscou, Deutsches Archäologisches Institut, 2005, p. 135-148, s’appuyant sur le Pseudo-Scymnos, 941-952 (GGM) = 986-997 Diller = F 27 (CUF).
3Barat Claire, Sinope dans son environnement pontique, thèse de doctorat sous la direction de Pierre Debord, université Michel-de-Montaigne, Bordeaux 3, 2006.
4Hérodote, III, 90.
5Plutarque, Per., XX, 1-2.
6Xénophon, An., V, 5-VI, 2.
7Énée le Tacticien, Poliorcétique, XL, 4-5 ; Polyen, Stratagèmes de guerre, VII, 21, 5.
8French David, The Inscriptions of Sinope. Part I Inscriptions, Inschriften Griechischer Städte aus Kleinanien Band 64, Bonn, Dr Rudolf Habelt, 2004, no 1.
9Harrisson Cynthia, « Persian names on coins of Northern Anatolia », Journal of Near Eastern Studies, 41, 3, 1982, p. 181-194.
10Loc. cit.
11Appien, Mithr., VIII ; Diodore, XVIII, 16, 1-3 ; 31, 194 ; Plutarque, Eum., III, 12 ; Justin, XIII, 6, 1.
12Monachov Sergej J., « Les amphores de Sinope », Anatolia Antiqua, 2, 1993, p. 107-132 ; Garlan Yvon, « Quelques réflexions sur les timbres amphoriques de Sinope », in Mehmet Sağlam, Bayram Kodaman, Mehmet Ali Ünal, Jean-Louis Bacqué-Grammont et Mustafa Özbalcı (éd.), Ikinci Tarih Boyunca Karadeniz Kongresi Bildirileri (Uluslararasi I). Congrès international sur la mer Noire I. 1-3 Haziran 1988, Samsun, Eğitim Fakültesi Dergisi Özel Sayısı, 1990, p. 549-554 ; Garlan Yvon, « Remarques sur les timbres amphoriques de Sinope », CRAI, 1990, p. 490-507 ; Conovici Niculae, Histria VIII. Les timbres amphoriques. 2. Sinope (tuiles timbrées comprises). Histria. Les résultats des fouilles, Paris, De Boccard, 1998 ; Garlan Yvon, Les timbres amphoriques sinopéens sur amphore et sur tuiles trouvés à Sinope. Présentation et catalogue, Istanbul, Institut français d’études anatoliennes, 2004.
13Memnon, FGrHist, 434, F 9, 4.
14Sartre Maurice, L’Anatolie hellénistique de l’Égée au Caucase (334-31 av. J.-C.), Paris, Armand Colin, 2003.
15Polybe, Hist., IV, 56.
16Strabon, XII, 3, 11.
17Strabon, XII, 3, 11.
18Memnon, F37 ; Strabon, XII, 3, 11 ; Plutarque, Vie de Lucullus, 23, 1-6 ; Appien, Guerre de Mithridate, 83 ; Barat Claire, « Conquête et destin d’une cité grecque dans l’Empire romain », in Nicolas Mathieu, Le monde romain de 70 av. J.-C. à 73 apr. J.-C. Voir, dire, lire l’empire, Rennes, PUR, 2014, p. 91-100.
19Barat Claire, « La Colonia Iulia Felix Sinope, un exemple de fondation coloniale au nord de l’Anatolie », in Nathalie Barrandon et François Kirbihler F. (éd.), Les gouverneurs et les provinciaux sous la République romaine, Rennes, PUR, 2011, p. 145-167 ; Barat Claire, art. cité, 2014, p. 106-120 ; Barat Claire, « La Colonia Iulia Felix Sinope : d’une ironie tragique à une réalité », in Cédric Brélaz (éd.), L’héritage grec des colonies romaines d’Orient. Interactions culturelles dans les provinces hellénophones de l’empire romain, Paris, De Boccard, 2017, p. 201-228.
20Hérodote, II, 34 ; Skylax, GGM, I, 102 ; Strabon, XIV, 3, 1 ; XIV, 5, 22 ; XII, 1, 3.
21Robinson David M., « Ancient Sinope », AJPh, 27-2, 106, 1906, p. 134 ; Arnaud Pascal, « Les relations maritimes dans le Pont-Euxin d’après les données numériques des géographes anciens », REA, 94, 1-2, 1992, p. 64-65.
22Polybe, Hist., IV, 56 ; Strabon, XII, 3, 11.
23Robinson David M., art. cité, p. 131.
24Leaf Walter, « The commerce of Sinope », JHS, 36, 1916, p. 1-3.
25Rey Alain et Rey-Debove Jossette (éd.), Le Petit Robert par Paul Robert. Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française, Paris, Dictionnaires Le Robert, 1991, p. 1484.
26Ibid.
27Ibid.
28Işin Mehmet Akif, Tatlican Ismail et Işin Munire, Sinop, Ankara, Dönmez, 1989, p. 4-6 ; Işin Mehmet Akif, « Sinop regional field survey », Anatolia Antiqua, 6, 1998, p. 95-96, 98-99 ; Doonan Owen P., Sinop landscapes. Exploring connection in a Black Sea Hinterland, Philadelphie, University of Pennsylvania Museum of Archaeology and Anthropology, 2004, p. 51-55.
29Işin Mehmet Akif, art. cité, p. 95-96, 98-99 ; Bauer Alexander A., « The Prehistoric pottery of Sinop Province, Turkey: Observations on Pre-Greek interactions in the Black Sea », AJA, 105, 2001, p. 264-265 ; Doonan Owen P., op. cit., p. 51-55.
30Ibid., p. 54-67.
31Garelli Paul, Les Assyriens en Cappadoce, Paris, A. Maisonneuve, 1963.
32Avram Alexandre, Les diasporas grecques du viiie siècle à la fin du iiie siècle av. J.-C., Paris, Bréal, 2012, p. 66-74.
33Xénophon, An., VI, 1, 15 ; Strabon, XII, 3, 11 ; Diodore, XIV, 31, 2 ; Arrien, Per., 14 ; Eust., Comment., 772 (GGM II).
34Voir la réflexion de Ivantchik Askold, art. cité, 1997, p. 33-45 ; Ivantchik Askold, art. cité, 1998, p. 297-330 ; Ivantchik Askold, op. cit., p. 135-148, qui s’appuie sur le Pseudo-Scymnos, 941-952 Müller = 986-997 Diller = F 27 Marcotte et qui remet en cause la datation communément admise du milieu du viiie siècle av. J.-C. en relation avec la fondation de Trapézonte en 756 d’après la version arménienne de la Chronologie d’Eusèbe de Césarée, Eusèbe, Vers. Arm. Ol. 6.1 = II 80e Schoene.
35Hérodote, IV, 12.
36Pseudo-Scymnos, 941-952 (GGM) = 986-997 Diller = F 27(CUF).
37Eusèbe, Hieronymus Ol. 37.2 = II 89n Schoene.
38Carpenter Rhys, « The Greek penetration of the Black Sea », AJA, 52, 1948, p. 1-10 ; Labaree Benjamin W., « How the Greeks sailed into the Black Sea », AJA, 61, 1957, p. 29-33 ; Graham Alexander John, « The date of the Greek penetration of the Black Sea », Bulletin of the Institute of Classical Studies of the University of London, 5, 1958, p. 25-42 ; Drews Robert, « The earliest Greek settlements on the Black Sea », JHS, 96, 1976, p. 18-31 ; Hind John G. F., « Greek and Barbarian peoples on the shores of the Black Sea », Archaeological Reports, 30, 1983-1984, p. 71-97 ; Graham Alexander John, « Pre-colonial contacts ; questions and problems », in Jean-Paul Descoeudre (éd.), Greek colonists and native populations, Canberra/Oxford, Canberra Humanities Research Centre-Oxford Clarendon Press, 1990, p. 45-60 ; Boardman John, « Early Greek pottery on Black Sea sites ? », Oxford Journal of Archaeology, 10-3, 1991, p. 387-390 ; Doumas Chistos, « Quelques indications concernant les contacts entre la mer Égée et la mer Noire avant la colonisation grecque », Thracia Pontica IV. Les agglomérations côtières de la Thrace avant la colonisation grecque, Sofia, Comité de la culture, Institut de thracologie, conseil municipal de la ville de Sozopol, Centre d’histoire maritime et d’archéologie subaquatique, 1991, p. 15-20 ; Tsetskhladze Gocha R., « Greek penetration of the Black Sea », in Gocha R. Tsetskhladze et Franco De Angelis (éd.), The Archaeology of Greek colonisation, Oxford, Oxford University Committee for Archaeology, Institute of Archaeology, 1994, p. 111-135.
39Mossé Claude, La colonisation dans l’Antiquité, Paris, Nathan, 1970, p. 27-29 ; Tsteskhladze Gocha R., « La colonizzazione greca nell’area de Ponto Eusino », in Salvatore Settis (éd.), I Greci. Storia, cultura, arte, società. 2. Una storia greca. 1. Formazione, Turin, G. Einaudi, 1996, p. 945-947.
40Pseudo-Scymnos, 989-991 (Diller) = 944-946 (GGM)= F27, 3-6 (CUF) ; Plutarque, Luc., 23, 5 ; Appien, Mithr., 83 ; Strabon, XII, 3, 11 ; Apollodore, Bib., I, 9, 16 ; Apollonios de Rhodes, II, 955-957 ; Valerius Flaccus, V, 113-115 ; Hygin, Fab., XIV, 30.
41Doonan Owen P., op. cit., p. 55-59.
42Anon., Per. Pont. Eux., 22 (GGM I) ; Pseudo-Skymnos, 988-989 (Diller) = 943-944 (FHG) = F27, 3-4 ; Eumélos FGrHist 451, F5 ; Philosteph., FHG III 29, F3 ; Nicolas de Damas, FGrHist 90, F46.
43Pseudo-Skylax, 89 (GGM I) ; Apol. Rhod. 2. 946-947 ; Dion., Per., 772 (GGM II) ; Arg. Orph. 754.
44Hécatée de Milet, FGrHist 1, F199 ; Ephore FGrHist 70, F43 ; Strab. 12. 3. 9 ; Pline, Hist. Nat. 6. 3 (9) ; Schol. Apoll. Rhod. 2. 946 ; 964 ; 999 ; Eust., Comment., 970 (GGM II).
45Gelzer Heinrich, « Sinope in den Keiltexten », Zeitschrift für ägyptische Sprache un Altertumskunde, 12, 1874, p. 114-121 ; Robinson David M., art. cité, p. 144-146 ; Huxley George Leonard, « Homerica. I Homeric Syrie », GRBS, 3-1, 1960, p. 20.
46Huxley G. L., art. cité, p. 22.
47Garelli Paul, op. cit.
48Doonan Owen P., op. cit., p. 40-49.
49Xénophon, An., IV, 8, 22 ; V, 3, 2.
50Xénophon, An., V, 5, 3.
51Drews Robert, art. cité, p. 18-31.
52Xénophon, An., VI, 1, 15 ; Pseudo-Scylax, Per., 89 ; Stoop M. W., « Ancient Armene and its harbour », Anatolica, 6, 1977-1978, p. 117-128, pl. I-VII.
53Strabon, XII, 3, 11.
54Bresson Alain et Rouillard Pierre (éd.), L’emporion, Paris, De Boccard, 1993.
55Xénophon, An., VI, 1, 15.
56Strabon, XII, 3, 10.
57Wilkins John, « Fish as a source of food in Antiquity », in Tønnes Bekker-Nielsen (éd.), Ancient Fishing and Fish Processing in the Black Sea Region, Aarhus, Aarhus University Press, 2005, p. 21-30.
58C’était la problématique du colloque « Fishing and Greek Colonisation in the Black Sea during Antiquity. A geographical and regional approach » organisé à la Maison méditerranéenne des sciences de l’homme (Aix-en-Provence) par Alexandre Baralis et Myriam Sternberg les 3 et 4 juin 2021.
59Arnaud Pascal, art. cité, p. 63-77.
60Voir Rougé Jean, Recherches sur l’organisation du commerce maritime en Méditerranée sous l’Empire romain, Paris, Imprimerie Nationale, 1966 ; Rougé Jean, La marine dans l’Antiquité, Paris, PUF, 1975 ; Reddé Michel, Mare Nostrum. Les infrastructures, le dispositif et l’histoire de la marine militaire sous l’Empire romain, Rome, École française de Rome, 1986 ; Bounegru Octavian, Trafiquants et navigateurs sur le Bas Danube et dans le Pont Gauche à l’époque romaine, Wiesbaden, Harrassowitz, 2006 ; Nantet Emmanuel, Phortia. Le tonnage des navires de commerce en Méditerranée du viiie siècle avant l’ère chrétienne au viie siècle de l’ère chrétienne, Rennes, PUR, 2016.
61Arnaud Pascal, Les routes de la navigation antique. Itinéraires en Méditerranée, Paris, Errance, 2005, p. 26-28.
62Voir Gomez José, « Une pirogue monoxyle néolithique dans le lit de la Charente », Bulletin de la Société préhistorique française, 79-2, 1982, p. 61-64.
63Xénophon, An., V, 4, 11-12.
64Arnaud Pascal, art. cité, p. 63-77.
65Conovici Niculae, « The Dynamics of Trade in Transport Amphoras from Sinope, Thasos and Rhodos on the Western Black Sea Coast: a Comparative Approach », in Vladimir Stolba et Lise Hannestad (éd.), Chronologies of the Black Sea Area in the period c. 400-100 BC, Aarhus, Aarhus University Press, 2005, p. 97-117.
66Meiggs Russell, The Athenian Empire, Oxford, Clarendon Press, 1979 ; Pébarthe Chistophe, « Quand Athènes dominait le monde grec : l’empire oublié (477-404) », in Frédéric Hurlet (éd.), Les Empires. Antiquité et Moyen Âge. Analyse comparée, Rennes, PUR, 2008, p. 33-55.
67Plutarque, Per., XX, 1-2.
68Barat Claire, « Relations et solidarités entre les cités grecques de la côte sud de la mer Noire (viie-iiie siècle av. J.-C.) », in Laurianne Martinez-Sève (éd.) Les diasporas grecques du viiie à la fin du iiie siècle av. J.-C., Pallas, 89, 2012, p. 223.
69Voir Rougé Jean, op. cit., 1966 ; Rougé J., op. cit., 1975 ; Reddé Michel, op. cit. ; Bounegru Octavian, op. cit. ; Nantet Emmanuel, op. cit.
70French David, op. cit., no 146.
71Ibid., no 169.
72Kassab Tezgör Dominique, « Prospection sous-marine près de la côte sinopéenne : transport d’amphores depuis l’atelier et navigation en mer Noire », Anatolia Antiqua, 6, 1998, p. 443-449.
73Ballard Robert D., Hiebert Fredrik T., Coleman Dwight F., Ward Cheryl, Smith Jennifer S., Willis Kathryn, Foley Brendan, Croff Katherine, Major Candice et Torre Francesco, « Deepwater archaeology of the Black Sea: The 2000 season at Sinop, Turkey », American Journal of Archaeology, 105-4, 2001, p. 607-623.
74Ballard Robert D., « Les mystères de la mer Noire », National Geographic France, 4-5, 20, mai 2001, p. 52-69 ; Horlings Rachel Lynelle, Deepwater survey, archaelogical investigations and historical context of three late antique Black Sea shipwrecks, MA, California State University; Ward Cheryl, « Four Ships of Late Antiquity in the Black Sea », in Dominique Kassab Tezgör (éd.), Sinope. Un état de la question après quinze ans de travaux, Ancient Civilizations from Scythia to Siberia, 16, 2010, p. 189-198, 541-542.
75Garlan Yvon, Les timbres amphoriques sinopéens sur amphore et sur tuiles trouvés à Sinope. Présentation et catalogue, Istanbul/Paris, Institut français d’études anatoliennes/De Boccard, 2004.
76Barat Claire, « Salaisons de la mer Noire : commerce et gastronomies antiques », in Christine Hoët-Van Cauwenberghe, Armelle Masse et Gilles Prilaux (éd.), Sel et société. Tome 1 : Techniques, usages, langage, Lille, Presses universitaires du Septentrion, 2017, p. 163-184.
77Strabon, XII, 3, 11.
78Barat Claire, art. cité, 2017b (salaisons), p. 167.
79Pline l’Ancien, Hist. Nat., IX, 18, 1.
80Barat Claire, art. cité, 2017b, p. 170-171.
81Ibid., p. 174-177.
82Strabon, XII, 3, 11.
83Athénée, Deipn., III, 118c ; VII, 307b.
84Barat Claire, art. cité, 2017b, p. 166-168.
85Lefebvre Thomas, « La pêche en Turquie et en particulier dans la zone des détroits et la mer Noire », Annales de géographie, 38, 125, 1929, p. 470-479 ; Barat C., art. cité, 2017b, p. 168-169.
86Strabon, VII, 6, 2.
87Xénophon, An., V, 4, 28.
88Barat C., art. cité, 2017b, p. 168.
89Vitruve, De l’architecture, V, 12.
90Strabon, XII, 3, 11.
91Strabon, XII, 3, 11.
92Appien, Mithr., 78.
93Memnon, F37.
94Barat Claire, 2014, art. cité, p. 109-111 ; Barat Claire, art. cité, 2017a (colonia), p. 201-228.
95Reddé Michel, op. cit., p. 253.
96Flavius Josèphe, Ant. Jud., XVI, 21.
97Reddé Michel, op. cit., p. 253-254.
98French D., op. cit., no 126.
99Moreau Jacques, « Sur une inscription de Sinope », Limes-Studien, Vorträge des 3. Internationalen Limes-Kongresse in Rheinfelden/Basel 1957, Bâle, Verlag des Institutes Für Ur- und Frühgeschichte der Schweiz, 1959, p. 84-87 ; Moreau Jacques, « Sur une inscription de Sinope », in Jacques Moreau et Walter Schmitthenner (éd.), Scripta Minora, Annales Universitatis Saraviensis Band I, Heidelberg, C. Winter, Universitätsverlag, p. 22.
100Arrien, Per., 20.
101Barat Claire, « Les antiquités de Sinope du Pont dans les récits de voyageurs (xviiie et xixe siècles) », in François Baratte (éd.), L’Antiquité vue par les voyageurs, 130e congrès national des sociétés historiques et scientifiques, La Rochelle, 2005, édition électronique, 2009, [http://cths.fr/ed/edition.php?id=5053].
102Lechevalier Jean-Baptiste, Voyage de la Propontide et du Pont-Euxin, Paris, Dentu, 1800-1802, p. 377-380.
103Hell Xavier Hommaire, Voyage en Turquie et en Perse exécuté par ordre du gouvernement français pendant les années 1846, 1847 et 1848, tome premier, Paris, P. Bertrand, 1854, p. 344-348 ; Martin Michael E., « Some miscellaneous notes on the town and antiquities of Sinope, mainly from travellers accounts », Anatolian Studies, 48, 1998, p. 175-180 ; Barat Claire, art. cité, 2009.
104Bryer Anthony et Winfield David, The Byzantine Monuments and Topography of the Pontos, Washington D. C., Dumbarton Oaks Research Library and Collection, 1985, p. 88.
105Fernoux Henri-Louis, « Les cités s’entraident dans la guerre : historique, cadres institutionnels et modalités pratiques des conventions d’assistance dans l’Asie Mineure hellénistique », in Jean-Christophe Couvenhes et Henri-Louis Fernoux (éd.), Les cités grecques et la guerre en Asie Mineure à l’époque hellénistique, Tours, Presses universitaires François-Rabelais, 2004, p. 115-177.
106Polybe, Hist., IV, 56.
107Tite Live, Hist. Rom., XL, 2, 6 ; Polybe, Hist., XXIII, 9, 2 ; Strabon, XII, 3, 11.
108Memnon, F37 ; Strabon, XII, 3, 11 ; Plutarque, Luc., 23, 1-6 ; Appien, Mithr., 83 ; Barat Claire, 2014, art. cité, p. 91-100.
109Barat Claire, « L’aqueduc de Sinope. Histoire d’une localisation, de Pline le Jeune à l’archéologie contemporaine », in Catherine Abadie-Reynal, Samuel Provost et Pascal Vipard (éd.), Les réseaux d’eau courante dans l’Antiquité. Réparations, modifications, réutilisations, abandon, récupération, Rennes, PUR, 2011, p. 35-46.
110Cuinet Vital, La Turquie d’Asie. Géographie statistique, administrative, raisonnée et descriptive de chaque province d’Asie Mineure. Tome IV, Paris, E. Leroux, 1894-1895, p. 567-568 ; 582-583.
111Strabon, XII, 12, 3, 12.
112Cuinet Vital, op. cit., p. 454.
113Nystazopulou Marie, « La dernière reconquête de Sinope par les Grecs de Trébizonde », Revue des études byzantines, 22, 1, 1964, p. 243.
114Voir Redford Scott, Legends of Authority. The 1215 Seljuk Inscriptions of Sinop Citadel, Turkey, Istanbul, Koç University Press, 2014.
115Nystazopulou Marie, art. cité, p. 243-244.
116Ibid., p. 247-249.
117Paschkoff Lydie, « Sinope (Asie Mineure). Six mois de séjour dans l’Antique capitale de Mithridate et la patrie de Diogène », Le Tour du Monde, 47, 1889, p. 415-416 ; Cuinet Vital, op. cit., p. 579-581 ; Gouttman Alain, La guerre en Crimée 1853-1856, la première guerre moderne, Paris, Perrin, 2003, p. 87-88.
Auteurs
Université polytechnique Hauts-de-France ; Institut français d’études anatoliennes.
Claire Barat est maître de conférences. Université polytechnique Hauts-de-France (Valenciennes), LARSH. Directrice de la mission archéologique de Porsuk – Zeyve Höyük (Turquie). Chercheuse associée à l’Institut français d’études anatoliennes (IFÉA) (USR 3131), Istanbul (Turquie). [Claire.Barat@uphf.fr] – [clairebarat33@yahoo.fr].
Service régional de l’Archéologie ; DRAC Nouvelle Aquitaine ; ministère de la Culture et de la Communication ; Institut français d’études anatoliennes.
Jean-François Pichonneau est archéologue, Service régional de l’Archéologie, DRAC Nouvelle Aquitaine, ministère de la Culture et de la Communication. Chercheur associé à l’Institut français d’études anatoliennes (IFA) (USR 3131), Istanbul (Turquie). [jfpichonneau@yahoo.fr].

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