Conclusion de la première partie
p. 85-86
Texte intégral
1À travers cette question attendue et sobrement descriptive – Qu’est-ce que le célibat à l’époque moderne ? – se dessine en réalité un chemin méthodologique. Pour y répondre, il faut retrouver les célibataires dans les sources et donc lire entre les lignes des généalogies et des actes notariés. Car le terme célibataire n’apparaît que dans la seconde moitié du xviiie siècle, et même alors les individus non mariés n’utilisent pas ce mot (chargé d’insulte) pour se définir. De plus, contrairement à notre époque contemporaine, le terme « célibat » est bien plus rattaché à l’Église qu’à la vie laïque.
2Ce chemin mène alors à une première conclusion : il est évident que le célibat existe au xviie siècle et qu’il représente une part importante de la société noble. En moyenne, une femme sur deux ne se marie pas, de même que 37 % des hommes. De plus, le célibat laïque n’est pas négligeable puisqu’il concerne 1/5 des hommes et 1/8 des femmes au cours du xviie siècle. Ces filles majeures, surtout présentes dans la seconde moitié du xviie et au début du xviiie siècle, se dévoileront davantage au fil des chapitres. Si elles forment le groupe le moins représenté parmi nos échantillons, elles participent pourtant activement aux politiques patrimoniales qui intéressent ce livre. L’étude démographique menée au chapitre iii permet toutefois de garder à l’esprit que l’époque moderne offrait rarement aux femmes une alternative au mariage et au couvent.
3Les proportions du célibat laïque et du célibat religieux, chez les hommes comme chez les femmes, doivent trouver des explications dans ce xviie siècle que les historiographies s’emploient à mythifier ou à ternir1. Sans prendre parti dans cette querelle, nous garderons en tête deux caractéristiques du xviie siècle, propres à servir nos analyses. La première, constatée notamment par Élie Haddad et Claire Chatelain, est le renforcement d’une discipline patrilinéaire voire patriarcale2. La seconde est l’immanquable Réforme catholique qui crée, dans la noblesse française, un véritable élan dévot3. Cette nouvelle spiritualité, mêlée à l’esprit gallican qui renforce les liens entre l’Église et la Couronne4, permet d’interroger le nombre des vocations à l’aune de motivations également politiques et économiques.
4Ces outils de lecture doivent être appliqués à notre corpus pour tenter de comprendre et d’expliquer le célibat de près de la moitié de ses membres. Il convient d’observer les conjonctures familiales et historiques qui font du xviie siècle un moment à part dans l’histoire de la noblesse et dans celle, plus particulière, des familles Béthune, Courtenay, Harlay et Lameth.
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