Chapitre VII. Les relais CDR dans la société civile : associations amies, compagnons de route et réseaux
p. 241-258
Texte intégral
1Les ramifications nationales sont difficiles à établir pour le comité national des CDR, les archives Lefranc s’avérant particulièrement discrètes sur la question. À l’inverse, il est possible de dresser un profil relativement précis des réseaux établis par le comité provisoire départemental du Calvados. Celui-ci offre une étude de cas locale intéressante, qui apporte aux chercheurs une illustration de la manière dont les CDR tissent leurs réseaux à l’échelle nationale. Les mémoires de Pierre Poilblan ainsi que les archives de Pierre Chaunu en disent long sur les contacts établis en 1968-1969 avec d’autres organisations, tout comme sur les créations de satellites réalisées à la fin du mandat gaullien. De leurs côtés, les archives publiques sont peu prolixes sur ces questions, bien que certaines évoquent des liens entre les CDR et d’autres organisations (principalement gaullistes), et entre militants issus de différents groupements. Croisées avec les témoignages recueillis, il est possible d’établir la diversité des réseaux construits par le siège national, ainsi que par des comités départementaux. Des réseaux qui se superposent sans se faire concurrence, mais qui démontrent une volonté de s’adapter autant que possible aux réalités sociopolitiques locales.
Des réseaux personnels qui se (con)fondent avec les réseaux structurels
2Les responsables départementaux et nationaux occupent une place centrale dans les prises de contacts avec les autres mouvements, tout comme leurs relations personnelles. Ainsi, le responsable des CDR-Jeunes du Cher, Patrick Wattrin, profite de son réseau familial pour y associer sa section1. Sa mère, adhérente UDR, était employée à la mairie communiste de Vierzon. Appréciée pour sa discrétion (elle n’affichait pas ses opinions politiques), elle put utiliser sa position pour ménager les cadets CDR qui n’étaient guère appréciés des communistes. Son père était quant à lui journaliste pour Le Parisien libéré, ce qui permit aux CDR du Cher de pouvoir publier librement des articles et communiqués dans le journal. Pour finir, Patrick Wattrin était employé aux éditions Vaillant (rachetées en 1968-1969 par Hachette) que contrôlait « un mercenaire russe » anticommuniste, Nansky. Ce télescopage de réseaux familiaux/militants a permis à la petite section de survivre (au moins symboliquement) jusqu’en 1977. Toutefois, les inimitiés que pouvait porter Patrick Wattrin a l’égard d’autres organisations politiques a pu également porter préjudice à la section : la méfiance qu’il éprouvait pour le SAC (basé à Bourges) et son désintérêt pour les giscardiens et les démocrates-chrétiens ont grandement limité l’influence du CDR du Cher.
3Un autre exemple particulièrement frappant de ces opportunités de réseautage personnel est celui du CDR du Calvados. Les archives Chaunu démontrent que les nombreux contacts associatifs et universitaires du moderniste sont utilisés pour le compte de la section départementale. Tout d’abord, il utilise ses correspondances occasionnelles avec des personnalités politiques et culturelles fortes pour défendre les valeurs du comité départemental. Par exemple, il soutient les analyses de Raymond Aron sur les causes de mai-juin 1968 et l’encourage subtilement à mener la lutte avec lui contre les « subversifs2 », reçoit de nombreuses lettres de ralliement suite à son article condamnant fermement la constitution d’assemblées universitaires illégales en juillet 19683, convainc le préfet du Calvados Lecene de se rallier à l’organisation4, défend auprès de Georges Pompidou à la fois son désir personnel de relancer la natalité en France5 et le bien-fondé des activités des CDR :
« Je prends la liberté de m’adresser à vous, Monsieur le Premier Ministre, au nom d’un petit groupe d’hommes qui ont payé dans leur personne leur attachement clairement manifesté à la République et à ses institutions. Nous avons essayé de regrouper des bonnes volontés. Nous continuerons à lutter. À la fin juin, tout était facile. Au début de la seconde moitié de juillet, tout l’est déjà moins. La peur, à nouveau, joue contre nous. Si l’État ne montre pas clairement, en manifestant dès maintenant, d’une manière concrète et sensible, son déplaisir, qu’il ne tolérera plus certains actes, qu’il ne permettra plus le viol systématique et rémunéré des consciences, une fraction plus grande, demain, de notre jeunesse, encadrée et préparée par de tels guides, partira à l’assaut de la Cité et Dieu sait ce qu’il adviendra6. »
4Ses contacts universitaires sont eux aussi mis à profit pour nourrir les activités du mouvement. Le Syndicat autonome des facultés des lettres, dont fait partie Pierre Chaunu, est mobilisé contre la « subversion marxiste » sur les campus. Son président, Robert Garapon, est un soutien assumé de Pierre Chaunu et des CDR-Éducation nationale7. Un nombre non négligeable d’enseignants-chercheurs assistent également les CDR : les professeurs Paul Colonge, Jean Bastié, M. Muller et Louis Guinet, l’historien Lucien Musset, le doyen honoraire des facultés de droit et de sciences économiques de Paris Georges Vedel8, etc. Il ne faut pas surestimer le poids de ce réseau universitaire personnel, les enseignants-chercheurs ne le suivant pas toujours. Ce fut le cas lorsque les CDR durent annuler la « marche sur Caen » – une marche d’universitaires (pro-)CDR visant à dénoncer les violences gauchistes qui se sont produites sur le campus de Caen à l’automne 1970 – initialement prévue en janvier 19719. De plus, tous ces enseignants-chercheurs ne sont pas forcément membres du mouvement, mais plutôt des sympathisants. Néanmoins, leurs contributions nourrissent l’antenne départementale du Calvados et bien d’autres (les contacts de Pierre Chaunu venant des quatre coins du pays).
5Les adhésions de Pierre Chaunu à des associations de diverses natures sont exploitées habilement par le CDR du Calvados qui s’efforce de nouer des liens étroits avec elles – notamment une fois l’antenne calvadosienne prise en main par le moderniste. Par exemple, l’Association familiale de Caen et du Calvados (à laquelle appartient Pierre Chaunu) est très proche des CDR. Les deux organisations tentent de se soutenir mutuellement en incitant les militants parents d’élèves à adhérer aux deux structures10. Cette entente est visible par les prises de positions publiques en faveur de la natalité, de la baisse des impôts (pour permettre aux parents d’offrir une meilleure vie à leurs enfants) et de la condamnation de l’avortement par le comité départemental11. Le Comité de l’enseignement public (CEP), satellite des CDR, est fortement lié à la section CDR-Éducation nationale du Calvados par le biais de l’amitié qu’entretiennent Pierre Chaunu et Georges Molinié, professeur agrégé de lettres qui dirige le CEP12. Un lien qui a permis au CEP de disposer d’un vaste réseau de renseignements sur l’évolution des situations dans les universités et établissements scolaires de l’Hexagone : Georges Molinié a pu transmettre ces informations à une « personne sûre » du ministère de l’Éducation nationale, informations récoltées en partie par les contacts de Pierre Chaunu qui se situent à « Caen, son université, ses grands lycées, et individuellement sur les gros établissements secondaires de toute l’Académie13 ». Par ailleurs, la présence des numéros du bulletin interne de l’UNI et sa profession de foi pour les élections universitaires de Caen de 1971 dans les archives Chaunu tend à prouver une sympathie du démographe pour le jeune syndicat antisubversif14. Le fait que Pierre Chaunu refuse d’y adhérer par soucis d’indépendance mais qu’il s’intéresse aux activités de l’UNI pourrait signifier que le CDR calvadosien soutient (plus ou moins discrètement) le syndicat (pro-)gaulliste. Dans le même esprit de lutte anti et contre-subversive, les associations de parents d’élèves sont sollicitées dans l’espoir de lutter plus efficacement contre l’embrigadement supposé de la jeunesse par les « révolutionnaires ». Cette initiative n’a rien de spécifiquement locale (Calvados) ni de personnelle (Pierre Chaunu est loin d’être le seul à s’en préoccuper), mais elle est surtout documentée par les archives Chaunu. Le CDR du Calvados, plus particulièrement sa section Éducation nationale, tisse en l’espace de quelques semaines de riches contacts avec des syndicats d’enseignants et de parents d’élèves. Il peut se targuer de disposer dès octobre 1968 de liens privilégiés avec le SNALC, le Syndicat autonome des instituteurs de Paris, la Confédération autonome de Caen et du Calvados (ou CAEN, qu’il a fondé), et la Fédération des associations de parents d’élèves de l’enseignement Public, plus connue sous l’acronyme de PELCEP/PELCES15. D’abord approché par des membres de la section CDR-Éducation nationale du Calvados, il est par la suite activement défendu par le comité national pour son « indépendance » politique qui en ferait un syndicat de parents d’élèves hors du commun16. En effet, le sociologue Philippe Gombert constate que les syndicats de parents d’élèves sont durant les années 68 fortement politisés, perçus par l’opinion publique comme des organisations de gauche (fédération Cornec, MAF, FCPE) ou de droite (PEEP, UNAPEL) soumises à des syndicats d’enseignants (le Syndicat national des instituteurs en tête17). C’est pourquoi les CDR privilégient une organisation qu’ils perçoivent comme apolitique, hostile aux associations de parents d’élèves orientées à gauche – et vierge de toute influence d’une organisation rivale18. Le CDR du Calvados infiltre rapidement le PELCEP tout en intégrant officiellement la CAEN (composée uniquement de militants CDR) dans l’association avec la bénédiction du siège national19. Il est fort probable que les autres comités de défense aient adopté une posture similaire, bien qu’aucune source ne permette d’étayer cette théorie. Les initiatives personnelles ont permis le noyautage du PELCEP/PELCES bien plus que les décisions prises par les responsables nationaux. En revanche, c’est sur l’initiative du comité national que les antennes départementales ont investi la Fédération Armand20.
6Les rapports humains sont donc centraux entre cadres CDR et personnes extérieures pour permettre au mouvement d’étendre son influence. Pierre Chaunu entretient des contacts avec des individus qui ne sont pas tous issus des milieux scolaires et universitaires. Ainsi, un groupe d’études antisubversif dijonnais animé visiblement par Jacques Soustelle recrute en novembre 1969 celui qui a pris le contrôle du CDR du Calvados21. Le fait que les comités du Calvados et de Côte-d’Or partagent une vision particulièrement conservatrice de la société, que le comité dijonnais soit peu apprécié de l’UDR local pour ses positions jugées trop à droite et de la présence d’un cadre CDR de Dijon (M. Chardonnet) dans le groupe d’études soustellien permet d’en déduire que ledit groupe s’est associé à plusieurs comités de défense connus pour leurs positions plus sévères à l’égard des « subversifs ». Le réseau personnel de Pierre Chaunu n’en vient plus seulement alors à se télescoper avec celui du comité calvadosien, il rejoint celui tissé par d’autres responsables locaux issus de comités différents. Le même constat peut être fait pour les autres responsables CDR étudiés. René Marbot profite de sa position de cadre supérieur en entreprise pour y développer le comité de défense des Yvelines (qui promeut et applique autant que possible la Participation), sa place de parent d’élèves pour militer en faveur des CDR dans les établissements scolaires où sont inscrits ses enfants et ses amitiés avec des agents des forces de l’ordre pour obtenir des renseignements confidentiels22. Jean-Pierre Antoni et ses soutiens (tels Jacques Limouzy, François de Lestrade, Henri Bressolier) usent de leurs fonctions pour implanter le CDR du Tarn dans plusieurs secteurs : des établissements scolaires (Jean-Pierre Antoni est chef d’établissement), des entreprises (notamment à Mazamet grâce à François de Lestrade), des partis politiques non gaullistes (par l’entremise de Jacques Limouzy23), etc. Ces exemples démontrent à la fois l’utilité de ces réseaux personnels pour les antennes départementales CDR et leurs sections socioprofessionnelles, et la richesse de leur diversité. Le développement des réseaux locaux de chaque comité permet d’accroître l’influence du comité national. En dressant un graphique de ces réseaux, il devient plus aisé d’observer la grande diversité de ces ramifications et de constater qu’elles n’ont rien à envier aux réseaux établis par l’UDR (dont font partie les CDR) [fig. 12 et 13].
7Les relations établies par les cadres départementaux permettent d’enrichir le réseau de l’organisation nationale. Il s’agit d’un élément fondamental du réseautage des CDR puisque chaque comité dispose d’une autonomie réelle (malgré les contraintes financières qui les rendent dépendant du siège national). Les responsables nationaux sont, à de rares exceptions près, des cadres départementaux et régionaux. Seuls Yves Lancien, Michel Anfrol (très vite remplacé par Betty Durot) et Pierre Lefranc occupent des responsabilités exclusivement nationales. À l’instar de leurs subalternes, ils mobilisent très certainement leurs contacts dans l’intérêt du mouvement, mais ils ne laissent guère de sources de ces initiatives personnelles. Les archives d’Yves Lancien et de Gourville auraient pu être plus explicites sur ces points, mais avec la perte desdits documents, il est impossible pour le chercheur d’aller plus loin24. Pour leur part, les archives Lefranc sont silencieuses au sujet des réseaux établis par les responsables nationaux. Elles le sont presque tout autant en ce qui concerne les ramifications internationales de l’organisation. Quelques éléments montrent que dans leur volonté de s’opposer aux « révolutionnaires », les CDR approchent et/ou sont contactés par certains acteurs internationaux susceptibles de leur fournir des renseignements ou des contacts. Ainsi, le consul de France Georges Rieu transmet à l’été 1968 des informations sur le communisme international qu’il juge susceptibles de pouvoir aider la toute jeune organisation dans ses activités25. Pierre Lefranc obtient également par le biais d’Aubineau un rapport sur la situation dans différentes universités (occidentales ?) réalisé par le Pr Gandubert, enseignant-chercheur à l’université d’Ottawa26. De son côté, le CDR du Calvados obtient de Raymond Triboulet un projet d’avis sur le nucléaire à l’attention de la commission politique du Parlement européen en avril 1969, ce qui révèle l’intérêt particulier que porte la section CDR-Éducation nationale calvadosienne pour la place du nucléaire dans la société civile et la recherche27. Le fait que Raymond Triboulet en soit le rédacteur n’est pas anodin puisqu’il s’agit d’un gaulliste conservateur (qu’on ne peut rattacher à la mouvance du gaullisme d’ordre) actif au sein du Mouvement national universitaire d’action civique depuis sa fondation en 195828. Il n’a pas été possible de trouver d’autres informations sur le sujet. De toute évidence, le silence qui entoure les sources sur cette question tend à démontrer davantage le peu d’intérêt des responsables nationaux à établir des ramifications internationales nombreuses ou sur la longue durée, que la volonté de masquer un éventuel réseau étoffé.
Un compagnonnage qui semble parfois intéressé
8Le compagnonnage est un engagement majeur dans la famille gaulliste. Il s’agit d’une forme de vivre-ensemble militant consistant à former une grande famille politique au-delà des clivages socio-économiques et culturels, et à partager de manière vibrante et collective une même conviction. En somme, une solidarité militante où des individus partageant les mêmes idées et valeurs se rassemblent, la forme comptant davantage que le fond idéologique29. S’il n’est pas indispensable pour être reconnu comme un militant authentique, il n’en reste pas moins l’un des éléments constitutifs de l’identité gaulliste. Comme l’explique Bernard Lachaise, le qualificatif de « compagnon » est rapidement adopté par les gaullistes eux-mêmes pour se démarquer des communistes (« camarades ») et des modérés (« monsieur »). Il fait également référence au passé glorieux de la résistance et de la France libre – avec la fondation de l’ordre des compagnons de la Libération –, et permet d’appuyer le sentiment d’attachement des militants à la personne du général de Gaulle plutôt que d’une idéologie particulière30. Selon André Malraux, « le gaullisme n’est pas né du tout d’une idéologie. Il est né d’un sentiment fondamental31 ». Or, des individus moins sentimentaux gravitent également autour du gaullisme, qu’il s’agisse de simples opportunistes ou de personnes curieuses ; ces « gaullistes virtuels », aussi qualifiés de « ceux d’ailleurs » par Olivier Guichard32. Comme cela fut démontré précédemment, tous les CDR n’étaient pas gaullistes (au moins 20 % furent giscardiens et centristes, un certain nombre d’entre eux étaient issus de l’extrême droite) et se rallièrent davantage au régime via les Comités par hostilité à la gauche et l’extrême gauche. Cela n’est pas totalement inédit puisque le même phénomène était déjà perceptible au temps du RPF, bien qu’il s’agisse d’un contexte politique très différent (le RPF se trouvait dans l’opposition, à l’inverse de l’UDR et ses satellites qui dominent la majorité). Des militants sincères pouvaient chercher à profiter de leur appartenance au mouvement pour recevoir de l’aide ou des avantages, que ce soit dans le but d’obtenir une mutation professionnelle, une promotion, un emploi, un soutien familial33, etc. Une fois encore, les CDR ne dérogent pas à la règle. De nombreux militants semblent avoir cherché à profiter des réseaux établis par les responsables nationaux pour obtenir des gratifications personnelles. Bien que les archives soient avares en informations, la correspondance de Pierre Lefranc contenue dans le carton 569AP/263 des Archives nationales de France fournit de nombreux exemples sur la question34. Les demandes de recommandations d’emplois et des décorations sont légion. Ainsi, un gendarme de Drancy se plaint auprès de Pierre Lefranc que la médaille de la résistance lui aurait été refusée, ce à quoi Lefranc lui répond qu’après enquête, il ne peut rien faire pour l’aider dans sa démarche car il aurait dépassé la date de forclusion. Le délégué national s’implique davantage dans la cause du délégué du 16e arrondissement parisien, Maurice Domboys. Il n’hésite pas à écrire à François Ortoli, ministre du Développement industriel et scientifique, pour lui demander de s’engager personnellement dans la promotion de Maurice Domboys comme officier de la Légion d’honneur. Il justifie sa requête par le passé militaire, industriel et politique (CDR dès mai 1968) du requérant. Pierre Lefranc est aussi sollicité pour une demande différente mais toute aussi symbolique, la présence d’officiels à une exposition. Effectivement, le peintre Augustin Guille, dit « Archiguille », organise une exposition de peinture au musée d’Art moderne en novembre 1968. Il aimerait pouvoir rencontrer le ministre des Affaires culturelles André Malraux ou son directeur de cabinet « pour arrêter définitivement le cadre et le programme de cette manifestation ». Sa requête est soutenue par le délégué national des CDR qui y voit une opportunité de pouvoir traiter de « l’éducation permanente par les arts » avec le gouvernement, omettant au passage de préciser que le requérant est un généreux donateur du mouvement. Ces exemples font écho au modèle d’analyse des recommandations en politique proposé par Julie Bour dans sa thèse publiée sur le clientélisme politique en Lorraine de la IIIe à la Ve République35.
9Des demandes sont également émises par des adhérents dans le cadre professionnel. Désireux de devenir fonctionnaire, Albert Minard supplie Pierre Lefranc d’intervenir en sa faveur, ce qu’il fait en transmettant sa candidature « à un certain nombre d’organismes ». De son côté, R. Belkiri (qui vit à Le-Puy-en-Velay) souhaite être muté. Pierre Lefranc lui promet de l’aider dans sa demande de mutation. M. Medves, militant à Draveil, tente d’acquérir un commerce dans sa commune de résidence. Le délégué national demande au député Jean-Claude Fortuit de le recevoir et d’intercéder en sa faveur. Ces exemples ne doivent pas effacer un autre aspect du « compagnonnage » CDR relevant de l’affect : l’attachement au chef charismatique. La correspondance de Pierre Lefranc montre une préoccupation sincère de certains adhérents d’associer le délégué national à leur vie privée. Ainsi, Mme Nolle invite Pierre Lefranc aux obsèques de son époux tandis que Mme Leroy l’invite au mariage de ses enfants36. Il en est de même des naissances et des baptêmes familiaux, comme ce fut le cas du Pr Schmeltz37. Bien que Pierre Lefranc décline ces multiples propositions, elles illustrent le poids de sa figure auprès de ces personnes : sans lien d’amitié particulier, elles proposent spontanément au chef de l’organisation d’être le témoin privilégié d’événements importants de leur vie. Il existe un phénomène semblable au temps de la traversée du désert (1953-1958) où des militants et militantes voulurent associer Jacques Foccart à des instants particuliers de leur vie38. Il en est de même avec le SAC, très attaché au secrétaire général élyséen aux affaires africaines et malgaches39. Il s’agit donc pour ces individus de se lier plus étroitement au leader charismatique – ou plus exactement, au détenteur du leadership organisationnel tel que défini par Manfred Kets de Vries40. Les réseaux interpersonnels au sein du mouvement sont utilisés dans le but de satisfaire ce désir. Cependant, il ne faut pas généraliser cette tendance qui reste visiblement marginale et très ciblée : de toute évidence, Yves Lancien et les autres responsables nationaux ne bénéficient pas de cet intérêt particulier de la part des militants. Si le secrétaire général est apprécié des militants, aucune source ne montre la volonté de certains adhérents de le lier plus étroitement à leur vie privée. Il est possible que cela soit dû à la composition et la nature même du mouvement : une minorité non négligeable (au moins un cinquième des adhérents) n’est pas gaulliste, et l’organisation se veut transpartisane41. Par conséquent, le compagnonnage pourrait moins s’y manifester.
Les CDR, des lobbyistes du gaullisme d’ordre
10Soucieux de pouvoir lutter efficacement contre la « subversion marxiste », les CDR ont rapidement compris qu’il était nécessaire d’influencer les décideurs politiques (à savoir les membres du gouvernement et les élus nationaux) lors des élaborations de projets et propositions de lois. Pour se faire, ils doivent devenir ce que l’on nomme communément un groupe d’intérêt, un groupe de pression ou encore un lobby. Ces expressions permettent de parler de groupes sociologiquement et idéologiquement hétérogènes, rendant leur définition multiple et complexe42. Les politologues Emiliano Grossman et Sabine Saurugger proposent une définition claire et précise des groupes d’intérêts :
« Dans son acception la plus large, la notion de groupe d’intérêt est définie comme une entité qui cherche à représenter les intérêts d’une section spécifique de la société dans l’espace public. Dans une compréhension plus étroite, le groupe d’intérêt est défini comme une organisation constituée qui cherche à influencer les pouvoirs politiques dans un sens favorable à son intérêt43. »
11Les CDR répondent à ces deux définitions : ils forment une organisation désirant influencer les pouvoirs politiques et l’opinion publique, peut-être aussi d’autres groupes (première définition), mais ils sont également désireux de former un groupe de pression en jouant sur leurs liens avec le parti gaulliste (deuxième définition). C’est pourquoi ils s’efforcent de devenir des intermédiaires du gaullisme d’ordre auprès des élus et ministres UDR et RI. Cette initiative n’a rien d’originale au sein de cette mouvance, l’UNI et le SAC agissent également comme des « groupe[s] de pression ultraconservateurs44 ». L’historienne Nassera Mohraz montre comment l’UNI établit des contacts étroits avec des membres du gouvernement grâce au soutien de Jacques Foccart durant la présidence Pompidou, avant de se rapprocher progressivement d’Alice Saunier-Seïté (PR-UDF), secrétaire d’État puis ministre des Universités (1976-1981), dans le but de défendre des positions conservatrices et hostiles aux revendications des syndicats de gauche. François Audigier souligne quant à lui l’influence du SAC sur les ministres et élus gaullistes – au moins un député sur neuf accordait son attention à des membres du SAC en 1969 – ainsi que sur le général de Gaulle. Par la suite, son discours profondément anticommuniste ne rencontre pas autant d’écho auprès de Georges Pompidou et son entourage, mais il garde l’attention d’une partie non négligeable des élus gaullistes. Le SAC, qui se voulait « investi d’une mission45 » quasi sacrée contre cette « anti-France » qu’étaient les organisations de gauche et d’extrême gauche46, représente donc un allié de l’UNI et des CDR dans leur lutte contre la « subversion marxiste », mais également un rival pour les idées qu’ils défendent. D’un côté, les CDR partagent une franche hostilité au marxisme avec ces deux autres organisations. De l’autre, elle se montre favorable à des projets politiques progressistes qui ne les intéressent pas particulièrement : la Participation est officiellement soutenue par le SAC, mais celui-ci ne lutte pas pour sa promotion, tandis que l’UNI voit la Participation comme un projet dangereux et gauchisant.
12Dans la pratique, les CDR s’efforcent de diffuser leurs idées auprès de leurs contacts gouvernementaux et parlementaires. Très engagés sur la réforme universitaire, les CDR agissent dès la rentrée universitaire de septembre 1968 pour essayer d’imposer leur point de vue. Les CDR-Éducation nationale se mobilisent activement pour influencer le Premier ministre Couve de Murville, le ministre Edgar Faure, les autorités universitaires et les parlementaires. Pour se faire, ils réalisent un rapport dressant la situation (notamment les problèmes rencontrés) dans les établissements primaires et secondaires qu’ils remettent à l’inspecteur général délégué par le ministère de l’Éducation nationale, M. Amestoy, qui ne cache pas sa sympathie à l’égard des idées véhiculées par le mouvement47. Pour accroître leur poids auprès des autorités et de l’opinion publique, les sections CDR-Éducation nationale vont unifier (de façon éphémère) une vingtaine d’associations d’enseignants, d’étudiants et de parents d’élèves dans le CLNRE48. Ce satellite devait servir de paravent pour véhiculer les idées des CDR en arborant l’image d’une banale association « apolitique ». Les militants sont également encouragés à faire remonter tout problème d’ordre scolaire qu’ils rencontreraient ou dont ils auraient connaissance à la section afin qu’elle puisse en référer au ministère Faure49. L’introduction jugée insatisfaisante de la Participation dans les universités par Edgar Faure – car perçue comme incomplète et timorée, voire favorable uniquement aux gauchistes – et le refus du ministère de l’Éducation nationale de coopérer ni même d’écouter les revendications des CDR reflètent la fragilité des contacts établis par l’organisation50. L’effondrement du CEP, nouvelle forme prise par le CLNRE en 1969, illustre parfaitement l’échec du lobbying universitaire du mouvement51. Les papiers Lefranc montrent également le souci de se ménager les autres organisations gaullistes. Lorsque les CDR implantent les GAP, ils ont conscience qu’ils peuvent nuire à la CFT qui « entretient ouvertement des rapports très étroits avec l’UDR52 ». Cette préoccupation est loin d’être circonscrite au seul syndicat indépendant puisque la direction du mouvement insiste, dans une note secrète d’octobre 1969, sur la nécessité de ne pas déranger les organisations alliées que sont le SAC, l’UNI, la CFT et l’UDR53.
13L’influence que les CDR aimeraient avoir auprès des élus et des gouvernants ne doit pas non plus être exagérée. Bien qu’il compte une dizaine de milliers d’adhérents durant les présidences de Gaulle et Pompidou, le mouvement est en réalité peu écouté par les pouvoirs politiques. Plusieurs pistes de réflexion peuvent éclairer les raisons de cet échec. Si Jacques Foccart accorde quelques entretiens à Pierre Lefranc et (bien moins encore) à Yves Lancien, son journal élyséen montre un désintérêt rapide pour la cause de leur organisation. Les autres personnalités gaullistes ne font guère mieux : Georges Pompidou ne s’intéresse pas aux CDR et se contente de répondre à la correspondance de certains de ses membres ; Robert Poujade refuse de coopérer avec eux et veille à ce que l’UDR en fasse tout autant depuis la polémique entre Edgar Faure et certains comités départementaux ; presque aucun cadre gaulliste n’évoque les CDR dans ses mémoires, la majorité pensant même le groupe dissout après les élections législatives de juin 1968 ou le départ du général de Gaulle en avril 1969 comme l’indiquent les témoins54. Ainsi, lorsqu’il fut interviewé, Jacques Belle pensait que les CDR s’étaient éteints avec le départ du général de Gaulle et l’élection de Georges Pompidou en 1969. Il déclara que les ministres et élus gaullistes en pensaient de même, ce que corroborent les témoignages de Jacques Godfrain et André Fanton. C’est pourquoi André Fanton s’exclama au sujet du présent ouvrage : « quel gâchis en temps et en énergie vous consacrez à l’étude d’un groupe aussi mineur et inconséquent ! Quel gâchis de réaliser des études sur quelque chose d’aussi insignifiant que les CDR, alors que les années 1968 ont tant à dire de plus grand ! » De fait, les CDR souffrent de leur originalité. Soutiens fidèles du pouvoir, ils ne manquent pas de le critiquer à l’occasion. Ils sont d’essence gaulliste mais se veulent transpartisans. Les mauvaises relations qu’entretiennent Jacques Foccart avec Pierre Lefranc et Yves Lancien amenuisent également les capacités d’influence de l’organisation auprès des élus et cadres gaullistes55. Dans ces conditions, il n’est pas surprenant de constater que les actions les plus efficaces menées par les CDR dans les dédales parlementaires et gouvernementaux le furent aux côtés d’autres organisations gaullistes ou grâce à des initiatives personnelles. Par exemple, lorsque la question de la dévaluation du franc se pose, les CDR ne sont pas les premiers à manifester leur hostilité. Jacques Foccart souligne dans son journal élyséen que le SAC avait vivement rejeté l’idée de dévaluer le franc. Une opinion que le général de Gaulle aurait écoutée56. Les CDR ont peut-être pu peser dans cette prise de décision (le mouvement étant très puissant à ses débuts), mais il n’existe aucun élément qui puisse entériner cette théorie. Seule l’intervention du SAC est mentionnée par les sources. Concrètement, la coopération entre organisations gaullistes est encouragée par des responsables CDR dans un souci d’efficacité, ce qui souligne l’incapacité du mouvement à agir seul. Bien qu’il souhaite préserver l’individualité des CDR, le comité national encourage l’ensemble des comités départementaux à se rapprocher du SAC, de l’UJP, de l’UDR et de l’AN57. Les CDR-Jeunes partagent cette opinion. Michel Piquet, délégué général des cadets, cherche à diversifier « la clientèle » du groupement socioprofessionnel en soutenant (voire en contrôlant) des mouvements de jeunes modérés (MLR, MNEU, Club Jeunes France et autres). En parallèle, il insiste sur la nécessité de coopérer avec l’UJP, l’UDR et les RI pour s’opposer au marxisme58. Derrière l’idée de coopération se trouve celle d’une certaine dépendance du groupement à l’égard de ses alliés, qui n’atteint pas son identité propre. Harris Sportes, responsable CDR-Jeunes sur les questions électorales, rappelle en décembre 1969 que les militants peuvent participer à des listes électorales à condition de le faire au nom d’autres organisations antimarxistes59. Cette dépendance à d’autres organisations n’est pas au goût des CDR, qui peuvent alors chercher sciemment à concurrencer leurs « alliés » quand une opportunité se présente. Ainsi, le comité du Haut-Rhin, qui a besoin du SAC et de l’UJP pour organiser des manifestations (les RG évoquent pudiquement une « étroite coopération »), tente de s’implanter auprès des étudiants du Haut-Rhin qui sont « assez peu réceptifs aux consignes diffusées par l’Union nationale Inter-Universitaire60 ».
14La difficulté de se faire entendre et d’agir librement démontre la faible influence du réseau établi par les CDR. Le succès rencontré par certaines initiatives personnelles ne fait qu’accentuer l’impression que ce sont les relations interpersonnelles qui permettent au groupement de ne pas être totalement démuni face aux pouvoirs politiques. L’exemple du projet porté par René Marbot de revaloriser le salaire des commissaires de police en est une bonne illustration. Bien qu’il s’agisse du seul cas relativement bien documenté, il en existe d’autres. Par exemple, l’affaire Amalrik qui scandalise une partie de la communauté historienne française en décembre 1970. Andreï Amalrik est un historien soviétique de 32 ans qui est arrêté en URSS pour avoir écrit clandestinement un ouvrage au titre provocant, L’Union soviétique survivra-t-elle en 198461 ? Très mobilisé dans la défense des droits des intellectuels d’Europe de l’Est, Pierre Vidal-Naquet rédige une lettre signée par 72 historiens français adressée au président de l’Académie des sciences de l’URSS en janvier 1970 pour protester contre l’arrestation d’Amalrik62. Celle-ci étant restée lettre morte, Vidal-Naquet réitère l’expérience avec 65 historiens dont Pierre Chaunu et ce, avec le soutien du comité du Calvados63. Bien qu’il s’agisse avant tout d’une décision personnelle, le poids de Pierre Chaunu au sein du mouvement semble bien avoir impulsé son soutien – d’autant que la cible de la lettre n’est autre cette fois-ci que l’ambassadeur soviétique en France. De son côté, le CDR du Tarn dispose d’une influence réelle sur la vie politique locale. Il bénéficie du soutien affiché du député-maire de Castres Jacques Limouzy et d’une forte implantation dans le 2e arrondissement (Castres-Mazamet), que ce soit au niveau politique, scolaire ou industriel. Aucun projet d’envergure n’y a été porté, mais les actions quotidiennes du mouvement bénéficiaient de la protection des élites politiques et économiques locales64. À l’inverse, le comité départemental du Calvados connaît des difficultés pour bien fonctionner. Alors qu’il peine déjà à récolter des dons malgré la sympathie manifeste des élites politiques et économiques locales, le départ de Pierre Poilblan et ses sympathisants à l’été 1969 provoque la déchéance du comité calvadosien qui ne supporte pas l’hémorragie et ce, malgré les tentatives acharnées de Pierre Chaunu pour le relancer. Preuve s’il en est que l’établissement de réseaux locaux interpersonnels est crucial pour que le comité local puisse fonctionner correctement.
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15Bénéficiant de multiples réseaux interpersonnels, les CDR parviennent difficilement à se faire entendre. Le jeune mouvement a l’ambition de devenir le porte-parole de la « majorité silencieuse » et des opposants au marxisme et utilise l’ensemble des connexions qu’ont établi ses cadres avec d’autres individus ou organisations. Il parvient ainsi à coopérer avec les autres organisations, au point toutefois d’en devenir parfois dépendant – selon le poids de l’antenne départementale. Très actif, le mouvement parvient à se faire entendre mais peine à être écouté. La plupart de ses revendications n’obtiennent pas satisfaction, et celles qui le sont semblent davantage être des concessions accordées à des organisations alliées ou à des membres influents du groupement. S’il ne faut pas renier les vastes réseaux établis par les CDR, il ne faut pas pour autant en fantasmer la portée qui s’avère avant tout symbolique.
Notes de bas de page
1Tout ce qui suit repose sur le témoignage de Patrick Wattrin obtenu le 7 avril 2020.
2AD14, 68J492, lettre de Pierre Chaunu à Raymond Aron, le 14 juin 1968.
3Le Monde, 21 juillet 1968.
4AD14, 68J514, lettre de Pierre Chaunu à Yves Lancien, le 28 octobre 1970.
5AD14, 68J492, lettre de Georges Pompidou à Pierre Chaunu, le 23 mai 1969.
6AD14, 68J492, lettre de Pierre Chaunu à Georges Pompidou, le 17 juillet 1968.
7AD14, 68J514, lettres de Robert Garapon à Pierre Chaunu, les 17 et 18 décembre 1970.
8AD14, 68J514, communiqué de presse du syndicat autonome des enseignants des facultés des lettres et sciences humaines en juin 1971, communiqué de presse du syndicat autonome des enseignants des facultés des lettres et sciences humaines en mars 1971, et diverses lettres de Pierre Chaunu rédigées en juin 1971.
9AD14, 68J514, lettre du doyen de Caen à Pierre Chaunu, le 9 décembre 1970, et lettre d’un « collègue et ami » de l’université d’Aix-Marseille – faculté des lettres et sciences humaines d’Aix-en-Provence à Pierre Chaunu, le 6 janvier 1971, et brouillon d’un communiqué du CDR du Calvados, le 22 décembre 1970.
10Cette volonté de double appartenance se manifeste dans une lettre particulière. AD14, 68J514, lettre de R. Mariton à Pierre Chaunu, le 16 septembre 1968.
11AD14, 68J514, brouillon d’un communiqué du CDR du Calvados, non daté (décembre 1970), et brouillon d’un communiqué du CDR du Calvados, février 1971.
12AD14, 68J514, lettre de Georges Molinié à Pierre Chaunu, le 14 décembre 1970.
13Lettre de Georges Molinié à Pierre Chaunu, le 5 février 1970.
14Documents consultables dans la cote 68J514 des archives départementales du Calvados.
15Il varie selon les documents. AD14, 68J514, « Compte rendu des activités de la commission et du bureau du CDR du Calvados – section « Éducation nationale » depuis le 11 septembre 1968 », rédigé le 28 octobre 1968.
16ANF, 569AP/157, brouillon daté du 26 octobre 1968.
17Gombert Philippe, « Les associations de parents d’élèves en France : approche socio-historique et mutations idéologiques », Revue française de pédagogie, no 162, 2008/1, p. 61.
18AD14, 68J514, lettre de Pierre Poilblan aux adhérents du CDR du Calvados, le 14 octobre 1968, et brouillon daté du 26 septembre 1968.
19AD14, 68J514, brouillon no 1 daté du 28 novembre 1968, et convocation de l’association des parents d’élèves des lycées de Caen, le 22 novembre 1968.
20Audigier François, Histoire du SAC. Les gaullistes de choc, 1958-1969, Paris, Perrin, 2021, p. 373.
21Le nom de Jacques Soustelle est mentionné comme responsable du groupe d’études antisubversif. AD14, 68J514, lettre de M. Chardonnet à Pierre Chaunu, le 8 novembre 1969.
22Témoignage de René Marbot, le 12 février 2020 ; archives privées, René Marbot, questionnaire rempli par René Marbot le 8 juillet 1968, 5 pages.
23Témoignages de Jacques Limouzy le 29 janvier 2020, et de Jean-Pierre Antoni le 31 janvier 2020.
24Yves Lancien remet à de Gourville ses archives après son élection comme député de Paris en 1978. Une inondation aurait détruit les papiers Lancien et de Gourville dans les décennies suivantes. Témoignage de René Marbot, le 12 février 2020.
25ANF, 569AP/263, lettre de Pierre Lefranc au consul de France Georges Rieu, le 24 juillet 1968.
26Nous n’avons trouvé aucune trace de ce rapport dans les archives Lefranc. Il semblerait que l’auteur soit Louis-Joseph Gandubert, enseignant-chercheur au Centre de recherche en civilisation canadienne-française à partir de 1967. ANF, 569AP/263, lettre de Pierre Lefranc à Monsieur Y. Aubineau, le 11 octobre 1968.
27AD14, 68J514, « Projet d’avis à l’intention de la Commission de l’Énergie, de la recherche et des problèmes atomiques sur la recherche dans l’Université et ses implications pour la jeunesse européenne », par Raymond Triboulet à la commission politique du Parlement européen, le 16 avril 1969.
28Ce groupe s’intéresse particulièrement à l’évolution de la situation dans les universités françaises et Triboulet a écrit occasionnellement pour lui. L’Université française, no 59, juin-juillet 1971.
29Lachaise Bernard, « Contestataires et compagnons : les formes de l’engagement gaulliste », Vingtième Siècle, no 60, 1998/4, p. 72.
30Lachaise Bernard, « Qu’est-ce qu’un compagnon ? », in Serge Berstein, Pierre Birnbaum et Jean-Pierre Rioux (dir.), De Gaulle et les élites, Paris, La Découverte, 2008, p. 69.
31Témoignage d’André Malraux dans Roger Stéphane, Charles de Gaulle, Éditions de l’Herne, Paris, 1973, p. 108.
32Guichard Olivier, Un chemin tranquille, Paris, Flammarion, 1975, p. 202.
33Audigier François, « Les “réseaux Foccart” en outre-mer à la fin de la IVe République. Une étude de cas : le capitaine de gendarmerie mobile Dargelos », Outre-mers, t. XCV, no 358-359, 2008/1, p. 75-88 ; Mary Sylvain, « Renseignement, propagande et réseaux gaullistes outre-mer. Jacques Foccart et les Antilles-Guyane sous la IVe République », Histoire, économie et société, 2015/4, p. 110-122 ; Muller Bryan, La Fabrique du gaullisme. Militantisme en Midi toulousain sous la IVe République, op. cit.
34Tout ce qui suit s’appuie sur la correspondance de Pierre Lefranc contenue dans la cote ANF, 569AP/263.
35Bour Julie, Clientélisme politique et recommandations. L’exemple de la Lorraine de la IIIe à la Ve République, Rennes, Presses universitaires de Rennes, coll. « Histoire », 2018, 211 p. Elle a également publié plusieurs travaux sur les réseaux politiques (et le clientélisme) du député meusien Louis Jacquinot. Bour Julie, « Le clientélisme sous la Ve République : l’exemple du député Louis Jacquinot », in Jens Ivo Engels, Frédéric Monier et Nathalie Petiteau (dir.), La Politique vue d’en bas. Pratiques privées, débats publics dans l’Europe contemporaine (xixe-xxe siècles), Paris, Armand Colin, coll. « Recherches », 2012, p. 223-240 ; Bour Julie, Dard Olivier, Gueit-Montchal Lydiane et Richard Gilles (dir.), Louis Jacquinot, un indépendant en politique, Paris, Presses universitaires Paris Sorbonne, 2013, 208 p.
36ANF, 569AP/263, lettre de Pierre Lefranc à Madame J. Nolle, le 20 septembre 1968, et lettre de Pierre Lefranc à Madame Roger Leroy, le 20 septembre 1968.
37ANF, 569AP/263, lettre de Pierre Lefranc au Pr G. W. Schmeltz, le 21 août 1968.
38Archives consultables à la Fondation Charles de Gaulle, dans les cartons des correspondances entretenues par Jacques Foccart avec les compagnons du RPF entre 1953 et 1958.
39Jacques Foccart est invité à des mariages, des obsèques, des célébrations, etc., par des membres du SAC. Il suffit de consulter ses archives et son journal élyséen pour constater le poids de ces requêtes.
40Très disciplinés et engagés dans l’organisation, les leaders organisateurs sont efficaces dans la mise en place d’actions basées sur des processus, dans la construction de structures, de processus et de cadres et ont une attitude très positive à l’égard de l’autorité. À l’inverse, ils ne tolèrent pas l’irrespect envers la hiérarchie et ne supportent pas le manque de structuration au sein d’une organisation. Kets De Vries Manfred, « Archétypes de leadership et équipe de direction », Gestion, no 33, 2008/3, p. 54.
41Il peut aussi s’agir d’un biais de sources, les archives Lancien étant perdues/détruites.
42Par exemple, Dominique Chagnollaud et Claude Leclercq en offrent des définitions différentes dans leur manuel de sociologie politique. Chagnollaud Dominique, Sociologie politique, Paris, Dalloz, 1997, p. 181-192 ; Leclercq Claude, Sociologie politique, Paris, Economica, 2e éd., 1998, p. 155-162.
43Grossman Emiliano et Saurugger Sabine, Les Groupes d’intérêt. Action collective et stratégies de représentation, Paris, Armand Colin, coll. « U », 2006, p. 11.
44L’expression vient de François Audigier et concerne le SAC. Audigier François, Histoire du SAC, op. cit., p. 422-434 ; Mohraz Nassera, « L’UNI et les gaullistes (1968-1976) », in François Audigier, Bernard Lachaise et Sébastien Laurent (dir.), Les Gaullistes. Hommes et réseaux, Paris, Nouveau Monde Éditions, 2013, p. 68-70.
45Action civique, février 1973.
46L’expression « anti-France » est bien employée par Pierre Debizet pour qualifier la gauche et l’extrême gauche (mais surtout le PS et le PCF). Action civique, novembre 1973.
47AD14, 68J514, « Compte rendu des activités de la commission et du bureau du CDR du Calvados – section “Éducation nationale” depuis le 11 septembre 1968 » rédigé le 28 octobre 1968.
48Liste des groupements ayant adhéré au Comité de liaison pour la neutralité et la réforme de l’enseignement, le 21 septembre 1968, et communiqué du Comité de liaison pour la neutralité et la réforme de l’enseignement, le 21 septembre 1968.
49AD14, 68J514, « Compte rendu des activités de la commission et du bureau du CDR du Calvados – section “Éducation nationale” depuis le 11 septembre 1968 » rédigé le 28 octobre 1968.
50ANF, 569AP/158, lettre de Pierre Lefranc au ministre Olivier Guichard, le 27 août 1969.
51ANF, 569AP/158, note d’information confidentielle sur le Comité de l’enseignement public (CEP), non datée (vers octobre 1969).
52ANF, 569Ap/159, note sur le syndicalisme indépendant, le 7 juin 1970.
53« Il est important qu’il n’y ait pas d’interférences avec les mouvements alliés : M. Depagna (UDR) dans les milieux étudiants et lycéens, action de M. Debizet (SAC) au plan professionnel (CFT) ou au plan universitaire (UNI). » ANF, 569AP/158, note confidentielle sur l’action des CDR le 14 octobre 1969.
54Témoignages de Jacques Godfrain le 22 janvier 2020, d’André Fanton le 29 janvier 2020 et de Jacques Belle le 12 février 2020.
55Se référer au chapitre ix.
56Foccart Jacques, Journal de l’Élysée, t. II, op. cit., p. 468.
57Archives privées, René Marbot, circulaire d’information CDR (non datée, visiblement des Yvelines), p. 6.
58AD14, 68J514, compte rendu confidentiel des CDR-Jeunes des journées nationales des 8 et 9 novembre 1969 à tous les adhérents du Mouvement, le 20 novembre 1969.
59AD14, 68J514, compte rendu des CDR-Jeunes sur les élections municipales de 1971, le 4 décembre 1969.
60AD68, 2119W2, note du SDRG du Haut-Rhin au directeur de cabinet de la préfecture du Haut-Rhin no 1551/73, le 11 avril 1973.
61Le Monde, 4 mai 1970 ; Le Monde diplomatique, juillet 1970, p. 18.
62Dosse François, Pierre Vidal-Naquet, une vie, La Découverte, coll. « Sciences humaines », Paris, 2020, p. 462.
63AD14, 68J548, lettre de Pierre Vidal-Naquet à Pierre Chaunu, le 1er décembre 1970.
64Témoignages de Jacques Limouzy le 29 janvier 2020, et de Jean-Pierre Antoni le 31 janvier 2020.
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