Introduction à la deuxième partie

1Ancrés sur toute une partie du territoire national, les CDR tentent d’élaborer un discours cohérent pouvant attirer un ensemble d’individus hostiles à « la subversion en cours ». Les cadres et militants confondent généralement le marxisme et l’idéologie libertaire, comme lorsqu’ils dressent des pancartes « Cohn-Bendit à Pékin ! », dénoncent le « trotskisme anarchisant » et écrivent sur des tracts le danger que représentent les sociologues anarchistes – alors qu’ils sont généralement décrits comme tantôt maoïstes, tantôt trotskistes… Ces erreurs de compréhension et de différenciation ne bloquent pas l’organisation dans la construction d’une idéologie riche, bien que parfois paradoxale. L’antimarxisme, qui est l’essence même du gaullisme d’ordre, se ressent amplement dans le mouvement. Il transcende les générations, les cadets partageant la vision d’un vaste complot marxiste avec pour instigatrice la Chine ou l’URSS ; à l’image de cette théorie d’une révolution culturelle déclenchée et soutenue par la Chine présentée par Francis Thill, rédacteur en chef bulletin d’information du CDR-Jeunes de Clichy-Levallois Renouveau. Néanmoins, il parvient aussi à s’en démarquer par un intérêt immense pour les jeunes, qui représentent l’avenir de la nation, ainsi qu’une pensée politique à visée sociale relativement inédite dans le gaullisme conservateur des années 1968-1974. Empreints de ces idées (même si ces dernières peuvent faire l’objet en interne de débats, notamment avec la frange la plus conservatrice à l’égard des idées les plus progressistes), les Comités sont confrontés à une forte violence militante propre à l’époque. Ce sont ces mêmes groupements qui vont jouer un rôle crucial dans les campagnes référendaires, municipales, législatives et présidentielle des années 1969-1973. Campagnes elles aussi touchées par une violence politique importante quoique inférieure aux élections législatives de 1968.