Introduction de la première partie

p. 23-24


Texte intégral

1Le cannibalisme en Océanie est une question débattue depuis l’intrusion des Européens dans ce monde vaste et diversifié à partir du xvie siècle. Savoir si les insulaires que l’on rencontre sont cannibales, a toujours été une question angoissante pour les premiers Occidentaux arrivés et qui confondaient souvent l’anthropophagie avec d’autres pratiques comme le démembrement des corps ou encore la chasse aux têtes (D. Barbe, N. Cambon).

2Les débats, y compris dans le monde scientifique n’ont fait qu’obscurcir la question. Mais les controverses ont atteint leur acmè à la fin du siècle dernier marqué par l’émergence des postcolonial studies et, principalement, chez les anthropologues les uns niant l’existence du cannibalisme, un fait défendu par les autres. La controverse aussi vive que productive en termes d’écrits terminée, peut donner l’impression que la question était close. D’ailleurs depuis vingt ans, mise à part une étude sur le cannibalisme dans l’Europe occidentale antique et médiévale à partir de laquelle l’auteur trace, en ouverture de cette partie, les contours méthodologiques de la recherche sur ce thème (V. Vandenberg), rien de novateur ou peu s’en faut, n’a été produit.

3Il ne s’agit pas aujourd’hui comme hier, durant le colloque qui a précédé l’ouvrage, d’estimer la réalité du cannibalisme mais d’explorer dans une perspective multidisciplinaire les sources qui en parlent et qui laissent souvent entrevoir dans la vaste région qui nous a intéressée (Nouvelle-Calédonie, Vanuatu, Australie, Polynésie française, Fidji, Salomon, Papouasie Nouvelle-Guinée, Nouvelle-Zélande…) qu’elles sont bien minces pour établir la certitude d’une réalité ou d’une absence, qu’elles soient archéologiques ou issues des archives judiciaires (F. Valentin, G. Murphy).

4En allant aux sources, en contextualisant l’époque et les auteurs, en démêlant le vrai du faux, le réel du rêvé, en repérant les confusions (E. Banaré), mais aussi en croisant les méthodes et les angles de vue du littéraire à l’archéologue et à l’anthropologue en passant par l’historien, nous pouvons parvenir à des premiers constats utiles pour une nouvelle approche d’un phénomène qui interpelle encore beaucoup les Océaniens, peu diserts sur la question. La raison de ce mutisme fait aussi partie des champs d’exploration de cet ouvrage.


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