Annexe XI
p. 303-304
Texte intégral
Lettre de Jacques-Antoine Coquille d’Alleux adressée à Boullet, procureur général syndic du département de Maine-et-Loire, ADML, 1 L 205, 19 septembre 1792
[Note en marge] « Répondu le 3 octobre au citoyen Coquille qu’il peut jusqu’à nouvel ordre garder ses pistolets. Le même jour prévenu la municipalité de Beaufort [sic]. »
« Beaupreau le 19 septembre l’an 4 de la liberté et le 1er de l’égalité 1792.
Monsieur le procureur général syndic,
Les commissaires de la municipalité se sont transporté chez moi le dix huit du présent conformément à l’arêté du département, pour faire l’inventaire des armes, fourrages, etc. Il s’en suit que la municipalité a fait désarmer les patriotes puisqu’il n’y avoit qu’eux à avoir faits leur déclaration. Les commissaires ne sont pas même allé à St Martin paroisse réunie à celle de Beaupreau qui est beaucoup plus concidérable que la métropole. Je n’ai pas pensé que la loi obligea les individus dont le patriotisme est à l’épreuve à donner leurs armes dans un endroit où ils en ont besoin tant pour leur sureté personnelle que pour en imposer aux fanatiques. En conséquence, j’ai déclaré par écrit que la loi obligeant les citoyens à donner leurs armes ou à marcher, je marcherois aux frontières ou à quelque poste que ce fût plutôt que de rester désarmé au centre du fanatisme. Je vous prie, Monsieur, de faire attention que je n’ai que deux pistolets aux quels je dois en partie le respect qu’on me porte lorsque je suis obligé de faire un enterrement.
L’incivisme est ici désespérant, un malheureux qui a deux enfants aux frontières et dont le plus jeune me sert la messe, a été mis dehors, par son locataire il ne lui a pas été possible de trouver une maison. Je l’ai retiré lui sa femme et son enfant pour comble d’infortune ils sont tous trois malades au presbitère et ce n’est pas à qui viendra les soulager. Comme cet homme avant la Révolution étoit généralement aimé, que dans son état d’armurier il trouvoit à travailler, les patriotes honteux viennent encor de temps en temps à huit heures du soir pour le voir, mais ils tremblent d’être apperçus. Il s’en suit que l’infortuné a perdu toutes ses pratiques. Il est très industrieux il peut fabriquer des piques des sabres des bayonnettes des fusils même, s’il étoit possible de l’employer sitôt qu’il sera guéri, je pense, Monsieur, que ce ne seroit pas une charité, mais un devoir. Nous allons avoir une gendarmerie qui je crois aura toute la complaisance pour entretenir le modérantisme. Dernièrement des patriotes représentèrent qu’il falloit faire sortir les régents du colège ; ils répondirent qu’ils attendoient les ordres de la municipalité. De sorte que ces prêtres continuent impunément leurs manoeuvres, et le colège est toujours le refuge des prêtres réfractaires. Pardon Monsieur, si je deviens si souvent importun, je me fais un devoir de veiller et d’arrêter le plus qu’il m’est possible le mal qu’on se prépare à faire ; je puis vous assurer que l’affaire de Chatillon n’a point changé les esprits. Il court des bruits ici capables de faire soulever le peuple, et de faire égorger les patriotes. Toutes les nouvelles sont à l’avantage des malveillans et quand nous aurions massacré tous les prussiens et les hongrois on répondroit à Beaupreau qu’ils sont à Paris.
J’ai l’honneur d’être avec respect, Monsieur le procureur général syndic,
Votre très humble et très obéissant serviteur Coquille curé de Beaupreau. »
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