Chapitre II. Horizons et réseaux familiaux
Les marqueurs d’une jeunesse au temps des Lumières (1747-1771)
p. 53-72
Texte intégral
1Dans son ouvrage majeur sur l’attitude du clergé français face au serment du 27 novembre 1790, l’historien américain Timothy Tackett préconise le recours à une étude du milieu social et familial des prêtres jureurs de 1791 pour en apprécier d’éventuels effets sur leurs opinions politiques. Mais une telle entreprise, colossale à l’échelle du royaume de France, n’est pas envisageable. Seule une multiplication d’études locales est à même d’apporter des éclairages sur cette question1. C’est dans ce cadre que s’inscrit ce deuxième chapitre de l’étude sur Jacques Coquille. Il ne s’agit cependant pas de dégager une « origine » de son choix à l’heure du serment, au risque de livrer une vision téléologique de l’Histoire, mais plutôt de saisir les univers sociaux et mentaux dans lesquels il a pu évoluer. Car « c’est un monde qu’il faut chercher à comprendre parce qu’il n’est pas le nôtre et que celles et ceux qui l’ont vécu l’ont appréhendé autrement que nous2 ».
2Reconstituer les premières années de la vie d’un individu dans la seconde moitié du xviiie siècle n’est pas chose aisée. À cet égard, et en complément des apports de la contextualisation, le recours à la microstoria est impérieux et autorise à dégager les principaux marqueurs d’une jeunesse au temps des Lumières grâce aux traces périphériques disséminées dans les archives, particulièrement dans les registres paroissiaux. Tentons donc à présent d’entrer dans les cadres de l’intime, les espaces de l’enfance et de la jeunesse de Jacques Coquille.
Les Coquille ou les origines nivernaises d’une famille de la noblesse d’épée
Empreintes généalogiques nobiliaires de la famille Coquille
3Jacques Coquille est issu d’une longue lignée attestée à Nevers dès le xiiie siècle3 et anoblie par le roi Charles VI en 1391. Les Coquille bénéficient donc du statut de la noblesse d’épée exerçant des charges militaires comme écuyer ou capitaine de compagnie de gens d’armes pendant la guerre de Cent Ans. Par la suite, les membres de cette famille obtiennent différentes fonctions ou charges parmi lesquelles, pêle-mêle, celles d’avocat au parlement de Paris, de lieutenant général de bailliage, d’auditeur des causes d’appel, de conseiller au siège présidial, de receveur des amendes.… Certains accèdent à des fonctions religieuses non négligeables comme grand prieur de Cluny, doyen de Soissons, chanoine de Nevers. Les Coquille sont donc bien établis dans le Nivernais, connus et suffisamment aisés pour permettre à certains des leurs d’accéder à un statut social plus ou moins élevé.
Guy Coquille : la mémoire d’un ancêtre illustre
4Quelle mémoire Jacques-Antoine Coquille d’Alleux a-t-il bien pu avoir de cette famille renommée de la région de Nevers ? Difficile à dire car il ne la mentionne jamais dans les documents qui nous sont parvenus écrits de sa main. Cependant, il est fort probable qu’il ait pu entendre parler d’au moins un ancêtre illustre dont il porte le nom si particulier4, l’emblème de cette famille, à savoir Guy Coquille, juriste du xvie siècle.
5Pour Jacques, Guy Coquille est un lointain parent puisque celui-ci a vécu plus d’un siècle et demi avant lui, de 1523 à 1603. Leur lien familial, agnatique, n’est pas des plus proches : Guy Coquille est l’arrière-arrière-petit-fils de Jean Coquille, ancêtre en ligne directe de Jacques à la onzième génération. Quoiqu’il en soit, ce sont la notoriété et l’œuvre de cet homme qui ont pu parvenir jusqu’à lui. D’ailleurs, le grand-père de Jacques porte ce même prénom de Guy, ce qui n’est peut-être pas un hasard.
6Dans le Nivernais, Guy Coquille demeure aujourd’hui encore le célèbre juriste du xvie siècle. Une place à Nevers et une statue à Decize, sa ville natale, lui sont toujours dédiées. Élevé depuis l’âge de 5 ans par les religieuses de l’abbaye de Notre-Dame de cette même ville, la formation intellectuelle du jeune Guy se poursuit au collège de Navarre, à Paris, où il étudie la littérature et se découvre bientôt un intérêt pour la poésie latine. En 1541, il s’établit pour deux ans à Padoue, en Italie, dans le but de poursuivre des études de droit romain. De retour en France, il complète sa formation en droit à Orléans et y devient avocat. À partir de 1553, il récupère les domaines familiaux et s’installe à Nevers où il se rapproche du duc François de Clèves qui l’envoie en 1562 en mission diplomatique en Allemagne. Guy Coquille dispose désormais d’une vraie notoriété dans le domaine du droit, ce qui lui vaut de représenter le tiers état du Nivernais lors des États généraux d’Orléans et de Blois5. Il y a « défendu avec zèle les libertés civiles et politiques des villes et des provinces6 ». Il s’engage ensuite dans d’autres responsabilités publiques comme celle de premier échevin de Nevers pendant les guerres de religion, où il s’affiche comme opposant de la Ligue catholique, et comme procureur général et fiscal du duché. Il contribue aussi à créer un collège de jésuites à Nevers, après l’édit de Rouen de 1603 qui autorise ces derniers à rouvrir leurs établissements et à en fonder de nouveaux. Remarqué pour ses talents, le roi Henri IV en personne fait appel à lui mais il décline la proposition, choisissant de rester dans son Nivernais natal car « préférant l’étude à la politique7 ».
7Historien et juriste, spécialiste du droit coutumier, Guy Coquille a livré de nombreux écrits8. D’un point de vue religieux, Anne-Marie Chagny met en avant l’« homme de tolérance [qui] désire la destruction de l’hérésie mais souhaite la combattre par des armes spirituelles. Il est l’un des théoriciens de la monarchie absolue et de l’Église gallicane. Dans un contexte de remise en cause de l’autorité royale avec les guerres de religion, pour lui, « le Roy est le chef et les trois ordres sont les membres ; et tous ensemble font le corps politique et mystique, dont la liaison et l’union […] est inséparable9 ».
8Jacques-Antoine Coquille d’Alleux a-t-il pu être marqué par la mémoire de ce lointain « cousin », s’inspirer de ses combats juridiques, de ses prises de position publiques ? Rien n’est moins sûr, mais il s’aventure lui aussi sur des terrains d’actions similaires à certains moments donnés de sa vie.
Une famille liée à la noblesse de cour
9Parcourir l’histoire familiale de Jacques-Antoine Coquille d’Alleux révèle des surprises, inédites, qui renseignent sur le statut de cette famille. C’est le cas avec sa tante, Charlotte-Paule Coquille d’Alleux. En examinant son acte de naissance dressé le 8 septembre 1702 dans la paroisse de Saint-Saulge10, à une trentaine de kilomètres au nord-est de Nevers, l’on remarque la présence d’une marraine particulière : « Haute et puissante dame Madame Charlotte Le Prêtre de Vauban11, épouse de haut et puissant seigneur Jacques Louis de Maigrigny, chevallier comte de Vilbertin et seigneur d’Aunay. » Il s’agit là de la première fille de l’architecte et ingénieur de Louis XIV, Sébastien Le Prêtre de Vauban, établi au château de Bazoches au nord-est de Saint-Saulge. La tante de Jacques-Antoine hérite de son prénom. L’époux de cette marraine de renom, Jacques Louis de Mesgrigny, comte de Villebertin au sud de Troyes, n’est pas non plus un quidam. C’est le neveu d’un grand ami de Vauban, Jean de Mesgrigny, ce dernier étant à la naissance de Charlotte-Paule le gouverneur de la citadelle de Tournai.
10Ce lien avec les Le Prêtre de Vauban et les Mesgrigny permet de mieux appréhender la place de la famille Coquille dans la hiérarchie de la noblesse de l’époque. Les aïeuls de Jacques-Antoine sont donc au contact de membres de la cour de Louis XIV et alliée avec elle, ce qui leur assure une certaine notabilité, au moins dans le Nivernais. Le grand-père, Guy Coquille, est qualifié sur ce même acte de « noble, conseiller du Roi » tout comme il l’est à Saint-Saulge en 1712 sur l’acte de baptême de son fils Jacques-François12, le père de Jacques-Antoine, ce qui ne prouve pas pour autant l’appartenance à la noblesse. D’autres familles de renommée locale sont choisies pour parrainer ce nouvel enfant : celle d’Aimé François Rapine de Sainte Marie « noble scientifique personne […] chanoine de l’église de Nevers » et celle de « Madame Madeleine Gascoing épouse de Guillaume Millot, escuyer, seigneur de Montjardin, trésorier de France ».
11Le royaume de France est secoué l’année suivante par la parution de la bulle Unigenitus, tout particulièrement à Nevers13. Ce texte demandé par Louis XIV au pape Clément XI vise à condamner 101 propositions du Nouveau Testament en Français avec des Réflexions morales de l’oratorien Pasquier Quesnel et par ce biais, les jansénistes dans leur ensemble. En 1717, plusieurs prélats lancent un « appel » pour condamner la bulle Unigenitus et réclamer l’ouverture d’un concile. Le chanoine de la cathédrale de Nevers, Aimé François Rapine de Sainte Marie, fait rapidement partie de ces opposants à la bulle papale que l’on nomme bientôt « les appelants ». Il s’oppose ainsi très vivement à son évêque Édouard II Bargedé, antijanséniste de longue date, et signe en 1717, avec les autres chanoines du chapitre cathédral, un appel pour l’organisation d’un concile. La controverse s’éternise et s’amplifie jusqu’en 1719, date à laquelle un incident éclate, impliquant Aimé François Rapine de Sainte Marie :
« Le 5 juin 1719, Mgr Bargedé officie à vêpres. Le chapitre est là, un grand nombre de fidèles assistent à l’office. Eustache de Chéry, chanoine-trésorier, un des appelants, refuse ostensiblement d’ôter à l’évêque sa croix et son camail14 pour qu’il puisse se revêtir de ses habits pontificaux. Après l’office, lorsque Monseigneur, suivi d’un laquais qui porte “sa robe et chape”, est sur le point de sortir du chœur pour entrer dans la nef, François-Aimé Rapine de Sainte Marie, archidiacre, autre chanoine appelant, repousse le laquais et l’oblige à quitter “la robe et chape” de l’évêque15. »
12L’évêque Bargedé décède quelques semaines plus tard. Rapine de Sainte Marie, lui, poursuit son action dans le camp janséniste. Mais en 1722, alors qu’il est grand archidiacre de la cathédrale de Nevers, il contacte l’évêque de Soissons, Languet, pour lui faire part de sa volonté de révoquer l’appel au concile émis en 1717 et de se soumettre aux directives du pape Clément XI16.
13La famille Coquille a sans aucun doute vécu de près ces querelles. Mais, dans ce cas précis, mieux vaut se garder d’attribuer toute portée lointaine à ces réflexions jansénistes, à la fois théologiques et politiques, pour échapper à une écriture téléologique de l’Histoire. C’est ce que préconise Pierre-Yves Beaurepaire, qui, relevant pourtant le caractère stimulant des thèses de Dale Van Kley17, insiste sur la nécessité de considérer ces conflits pour eux-mêmes, plutôt que d’en faire les « prolégomènes de la Révolution, dans une archéologie des origines de la Révolution française18 ». Dans la même optique, Serge Bianchi souligne le caractère contestataire du jansénisme qui « n’est pas foncièrement révolutionnaire19 ». Il est tentant d’y voir ici une possible influence qui aurait été transmise à Jacques-Antoine, mais les archives à notre disposition ne permettent pas d’affirmer qu’il a évolué dans les courants jansénistes de l’époque.
Fig. 1. – Généalogie de la famille Coquille.

Les Joubert de la Motte, une famille de la bourgeoisie provinciale de l’Anjou
14La famille Joubert, c’est celle de Perrine (1708-?) la mère de Jacques-Antoine Coquille d’Alleux. Attestée au début du xvie siècle en Anjou, cette famille est peut-être originaire de Provence ou de Valence dans le Dauphiné. Elle fait l’acquisition de la terre de la Motte à Morannes, à l’est de Châteauneuf-sur-Sarthe, dans la première moitié du xvie siècle. Il s’agit là d’une famille intégrée à la petite bourgeoisie marchande angevine, spécialisée dans la boucherie et le cuir, alliée aux autres familles de ce milieu20. Le plus vieil ancêtre connu est Mathurin Joubert, maître-boucher à Angers dans la paroisse Saint-Pierre21. La branche des Joubert de la Motte quant à elle se rattache à un marchand tanneur, René Joubert, établi à Morannes à la fin du xvie siècle. Les générations suivantes se consacrent aux charges de notaires et de procureurs fiscaux22 et comptent désormais parmi les figures de la bourgeoisie locale.
15Le père de Perrine, Pierre Pascal (1675-1736), est avocat au siège du présidial de Château-Gontier et devient sénéchal de Morannes comme son père avant lui, adjoignant désormais le nom de la terre de La Motte au patronyme Joubert. Ces sénéchaux, possédant de nombreuses terres alentours, représentent les évêques et les ursulines d’Angers et rendent la justice en leur nom. Cela confère donc une place de choix à la famille Joubert dans la société, qui plus est dans une petite ville sise au carrefour des grandes routes de l’Ouest.
16Une famille issue pour partie de l’ancienne noblesse, un ancêtre illustre en la personne de Guy Coquille et des alliances honorables avec des familles nobles de la cour de Louis XIV : autant d’éléments qui peuvent compter dans la compréhension de l’univers familial de Jacques-Antoine Coquille d’Alleux et qui n’ont pourtant jamais été mis en exergue par l’historiographie du xixe siècle. Il était peut-être délicat pour les historiens du parti royaliste dans la IIIe République d’insister sur cette appartenance à une famille de noblesse ancienne, renommée quoiqu’ayant probablement dérogé23, qui a pu « accoucher » d’un tel « renégat » comme ils l’ont écrit. Ou plus simplement, partant du postulat que son parcours était incompréhensible, ils n’ont jamais cherché à cerner son milieu familial. Cependant, Jacques-Antoine lui-même ne fait à aucun moment référence aux siens et aux origines de sa famille dans ses écrits. La prudence dans l’analyse est donc de mise et l’on ne peut s’en tenir qu’à des suppositions : cette absence de référence est-elle tributaire de sources lacunaires ou est-elle la marque d’un détachement vis-à-vis de cette histoire familiale ? Ou, tout simplement, Jacques-Antoine en avait-il connaissance ? Pour aller plus loin dans la compréhension du personnage, c’est à la famille nucléaire de Coquille qu’il convient à présent d’étendre la réflexion.
Les Coquille ou la vie d’une famille bourgeoise en Touraine au xviiie siècle
Les pérégrinations de Jacques-François Coquille d’Alleux, employé des aides
17Jacques-François, le père de Jacques-Antoine, n’est pas originaire de l’ouest de la France. Il est en effet né loin de là en 1712 à Saint-Saulge, important centre de foires à proximité de Nevers, comptant alors quelque 2 500 habitants. Son propre père prénommé Guy, avait été maire perpétuel de cette localité et conseiller du roi. Sa mère, Claire Méchine de Montanteaume, avait quant à elle son nom gravé sur la cloche de l’église de Saint-Saulge, signe d’une certaine notabilité. Ce couple a au moins quatre enfants dont trois à notre connaissance quittent leur province natale. Si ce n’est pas le cas de leur fille Charlotte-Paule, il en va ainsi de Simon-Guy qui s’établit en 1748 à Charlieu dans la Loire, de Charles-Guy, seigneur de Verpilleux au nord-est de Saint-Étienne, que l’on retrouve par ailleurs en Guadeloupe en 1785, et donc de Jacques-François, le père de Jacques-Antoine, qui s’installe à Tours. Peut-on y voir le signe d’un affaiblissement de l’assise financière et matérielle de la famille Coquille dont les membres se voient contraints de tenter leur chance au-delà du cadre géographique familial traditionnel ? On peut le supposer pour Jacques-François au regard du réseau de relations qu’il va construire en Anjou et en Touraine, plus proche de la bourgeoisie marchande que de la noblesse d’épée dont est issue sa famille. Ce qui est corroboré par le fait qu’aucun des actes paroissiaux sur lesquels figure Jacques-François ne comporte de mentions relatives à une quelconque noblesse. Il y a ainsi tout lieu de penser ici à un cas de dérogeance liée à un appauvrissement de la famille Coquille.
18Jacques-François apparaît en janvier 1740 dans les registres des archives de la paroisse de Morannes aux confins du diocèse d’Angers, pour une raison indéterminée mais probablement liée à son activité professionnelle, y exerçant les fonctions d’employé des aides. L’une des préoccupations majeures de la future Régie générale des aides est en effet de ne pas placer ses employés à proximité de leur lieu de naissance. D’après l’historienne Vida Azimi, « il faut en chercher la raison dans l’objet même de cette administration, lequel est la perception des impôts. La Ferme et la Régie générale considèrent que c’est une précaution nécessaire à prendre afin d’éviter la corruption et les intelligences entre les employés et la population locale24 ». Voilà donc le père de Jacques-Antoine lancé dans une carrière administrative, celle de la perception des aides, c’est-à-dire du recouvrement des taxes royales prélevées sur certaines marchandises, en particulier les vins et autres boissons. C’est cette administration adossée en premier lieu à la Ferme générale qui devient plus tard, sous l’action de Necker à partir de 1780, l’administration de la Régie générale des aides. Pour l’heure, Jacques-François est chargé de la tenue de registres portatifs et de l’exercice des marchands de vins en gros et en détail25.
19Cette profession d’employé des aides a pu être déterminée grâce à l’acte de baptême d’un certain Jacques-Louis Contencin pour lequel Jacques-François est parrain en 174026. Cette famille Contencin est par ailleurs liée à la famille Joubert de la Motte par l’intermédiaire de Perrine, la future femme de Jacques-François, qui est elle-même marraine en 1736 d’un Sylvain Contencin, frère du Jacques-Louis Contencin précédemment cité. Cette famille Contencin est peut-être la clé du lien qui s’établit entre Jacques-François et Perrine qui se marient le 20 décembre 1740 à Azé, paroisse toute proche de Château-Gontier27.
20Cette union semble poser problème. Les pères des deux époux étant décédés, Jacques-François obtient une procuration de sa mère, Claire Méchine, réalisée devant notaire à Saint-Saulge, qui donne son assentiment pour ce mariage. Mais Marie Caillet, la mère de Perrine, refuse de donner son consentement malgré l’insistance et les démarches entreprises par sa fille auprès de différents notaires de Château-Gontier et de Daumeray. Faute de documents existants28, nous n’avons pu déterminer les raisons de ce refus. Perrine signe son acte de mariage « Perrine Joubert de la Peccaudière » et non pas « de la Motte ». Sur les actes de baptême de ses enfants n’apparaît plus que le nom de Joubert. Peut-on y voir une explication en lien avec les difficultés de ce mariage ou bien un problème lié au partage des biens de son père ?
21Le couple paraît s’installer quelque temps à Morannes où Perrine donne naissance en 1741 à un premier enfant, Marie Anne Claire29. Jacques-François est alors receveur des aides de Saint-Ouën-des-Toits, importante place de marché au nord-est de Laval. Il s’occupe désormais de la gestion administrative de l’impôt et exerce un rôle financier d’encaissement du produit des droits30. Il gravit de manière classique les échelons de cette administration fiscale bénéficiant de cette « filière de promotion sociale privilégiée31 ».
22C’est à Tours que François Marie Casimir, son second enfant, voit le jour, comme l’atteste l’acte de baptême inscrit sur les registres de la paroisse Saint-Vincent daté du 9 novembre 174532. Pourtant, cet acte précise que ce premier fils est né le 24 septembre précédent : comment expliquer ce décalage dans le temps entre naissance et baptême ? Ce cas est-il symptomatique de l’allongement du délai au baptême tel que décrit par les historiens du xviiie siècle comme signe d’un fléchissement dans le respect des pratiques religieuses33 ? Peut-être faut-il plutôt y voir un lien avec l’évolution de la carrière de Jacques-François, identifié dans cet écrit comme « contrôleur ambulant des aides ». Comme l’explique Vida Azimi, « les contrôleurs ambulants des aides sont chargés de surveiller tous les employés des aides dans une, deux ou trois élections et de rendre compte à leurs commettants de tout ce qui intéresse la perception et l’amélioration des produits ». Ses déplacements sont donc fréquents et les absences probablement prolongées, puisqu’il doit en théorie rallier plusieurs bureaux et rendre compte de ses activités au directeur et aux fermiers généraux. Les traitements de ces fonctions ne sont pas connus pour l’époque mais, vers 1780, les contrôleurs ambulants perçoivent 2 100 livres annuels, encore qu’il y ait des disparités locales suivant le lieu d’affectation, et obtiennent des gratifications supplémentaires qui modulent parfois fortement leurs revenus.
23Dans tous les cas, Tours paraît bel et bien devenir pour quelques années le siège de la cellule familiale où Jacques-Antoine voit le jour, deux ans après, le vendredi 16 juin 1747 dans la paroisse Saint-Vincent34. Il est le dernier enfant du couple, les familles nombreuses étant très rares chez les employés des aides car, d’après Vida Azimi, « les fonctions d’ambulance qui nécessitent beaucoup de mouvement se concilient mal avec une vie de famille stable35 ». Sa marraine n’est autre que sa sœur Marie Anne Claire, qui n’a pas encore 6 ans36. Le prénom d’Antoine lui vient de son parrain, Antoine Jean Rattier : âgé d’environ 7 ans, il est le fils d’Antoine Rattier, receveur de la formule au bureau général de Tours depuis 1740, trésorier de l’extraordinaire des guerres puis receveur de l’hôtel de ville de Tours jusqu’à sa mort en 1760. Quant à celui de Jacques, c’est celui de son père, Jacques-François Coquille d’Alleux, qui a alors 34 ans, et qui est désormais désigné sur l’acte de naissance comme contrôleur des aides de la généralité de Tours. Via cette carrière entreprise dans l’administration de la perception des aides, le père de Coquille a acquis une garantie de stabilité de l’emploi37 et de nombreux privilèges. Comme tous les employés de son corps, il bénéficie de la protection du roi, et est exempté « de taille et curatelle, de collecte, de logement de gens de guet et de garde38 ». Le petit Jacques-Antoine naît ainsi dans une famille à l’aisance certaine par rapport à l’immense majorité des Français de l’époque. Son père fait partie, comme nombre d’employés des aides, de la petite bourgeoisie.
24Les premières années de Jacques-Antoine sont donc marquées par les fréquents déplacements de son père. Cependant, le berceau familial de sa mère Perrine Joubert offre des repères et une forme de stabilité pour les Coquille autour de la paroisse de Morannes, important carrefour commercial entre le Maine et l’Anjou. Perrine y est née en 170839 dans une famille de notables exerçant les fonctions de sénéchal de père en fils. Non loin de là, elle y possède une propriété héritée de ses parents dans la petite paroisse de Varenne-Bourreau, la Péccardière40, nom qu’elle accole d’ailleurs à son propre patronyme. Les allers et venues de la famille y sont très réguliers. Perrine est présente à Morannes le 10 juin 1746 au mariage de sa sœur dont elle signe l’acte41. Avec Jacques-François son mari, ils sont tour à tour parrain, marraine, témoins ou simplement présents lors de baptêmes ou de mariages à Chemiré (9 juin 1748 ; 15 août 1750 ; 5 novembre 1753)42 et Morannes (5 juillet 1751 ; 9 août 1757 ; 4 novembre 1757)43. Il est possible que la famille se soit d’ailleurs installée à Morannes par la suite (ou réinstallée puisque Marie Anne Claire y est née en 1741), car le fils François Marie Casimir est dit « originaire de Morannes » lors de son mariage à Bourgueil en 178644. Morannes apparaît donc comme le lieu autour duquel cette famille gravite au gré des fonctions du père.
25Nous perdons presque totalement leurs traces par la suite. Perrine Joubert disparaît des registres des paroisses précitées après 1751. Quant à Jacques-François, il est indiqué veuf le 26 juin 1763 au décès de sa fille Marie Anne Claire à Château-Gontier45. Celle-ci, âgée de 21 ans, si elle était malade, a pu être confiée aux soins de son oncle Pierre Pascal Joubert de la Motte, alors médecin établi dans la ville. Malheureusement, malgré toutes les recherches entreprises, il n’a pas été possible d’identifier les dates et lieux de décès de Perrine Joubert et Jacques-François Coquille, encore moins leurs inventaires après décès qui auraient pu fournir de précieux renseignements sur leurs conditions de vie matérielles. L’hypothèse la plus probable est que Jacques-François a pu être placé dans un autre bureau de contrôle des aides, comme c’était fréquemment le cas dans cette administration, puisqu’il est désigné comme « employé dans les aides » au décès de sa fille en 1763.
Ferme générale et Régie des aides, bourgeoisies marchandes : l’univers social des Coquille-Joubert
26Le réseau de sociabilité des parents de Jacques-Antoine se caractérise par une forte implication dans l’administration fiscale d’Ancien Régime et par extension, via la perception des aides, dans le monde des marchands angevins et tourangeaux de l’époque. Vida Azimi observe que « toutes les études faites sur les administrations de l’Ancien Régime confirment à des degrés divers l’existence de réseaux familiaux, de véritables lignées de commis. Que la Ferme ou la Régie générale en soient également affectées, paraît alors tout naturel46 ». Qu’en est-il pour la famille Coquille ? La question mérite d’être posée pour mieux appréhender l’univers familial de Jacques-Antoine.
27Si son grand-père Guy Coquille n’était pas engagé dans une carrière au sein de l’administration des aides, son père Jacques-François a fait en sorte que l’aîné de ses fils, François, s’engage comme lui dans cette voie professionnelle. C’est ainsi que le frère de Jacques-Antoine fait ses débuts en tant que receveur des aides de la ville de Pouancé, dans laquelle il fixe son domicile, vers 1771, alors âgé de 25 ans47. Il devient par la suite receveur des droits de gros de la ville de Tours puis receveur de la Régie générale de Bourgueil, ville dans laquelle il se marie et s’établit jusqu’à sa mort en 1816. À la Révolution, avec la suppression de la Régie générale des aides à compter du 1er avril 1791, sa préoccupation est, comme beaucoup des employés des aides de l’époque, d’être placé dans les nouvelles administrations48. Il devient alors directeur des Postes, toujours à Bourgueil, et fait une demande à la fin de l’année 1793, comme la loi l’y autorise, pour obtenir un brevet de pension au regard de ses anciennes fonctions.
28L’oncle de Jacques-Antoine, Simon-Guy Coquille (1716-1803), est lui aussi affilié à la régie des aides puisqu’il est pendant toute sa carrière receveur des aides à Charlieu dans la Loire. S’y ajoute également Anne Marguerite Louise Coquille de Fureterre, la marraine de sa sœur Marie Anne Claire, qui est « entreposeuse au bureau du tabac de Château-Gontier49 », et dont le mari Pierre de Fureterre a été receveur des gabelles du Languedoc et du Roussillon. Comme d’autres femmes à ce poste, même si elles étaient peu nombreuses dans cette administration, elle avait en charge la gestion d’un entrepôt et devait vendre le tabac de la Ferme suivant les prix fixés annuellement50.
29Les Coquille n’échappent donc pas à la règle de la spécialisation de nombre de familles dans la Régie des aides et dans la Ferme générale. Avec seulement un tiers de ses membres sans lien de parenté avec d’autres familles de la Ferme, Yves Durand souligne une tendance à l’endogamie professionnelle dans ce milieu51. Cela assure un réseau familial d’entraide et permet de placer les membres de la famille, suivant en cela la pratique d’un népotisme qui gouverne le monde des commis52.
30Intégrer la Ferme générale ou la Régie générale des aides, c’est faire partie d’un véritable corps mêlant les intérêts publics et privés53. Ce ne sont pas moins de 30 000 familles de financiers et d’employés qui exercent leur activité en 1757 dans ce qui constitue la plus grande bureaucratie du royaume. Comme beaucoup d’autres, la famille Coquille a tissé sa toile de relations dans ce réseau administratif. Cette toile peut s’apprécier à la lumière des registres paroissiaux, via les parrainages d’enfants sur les actes de baptême ou la présence d’une signature au bas de tel ou tel acte, comme témoin à l’occasion d’un mariage ou d’une sépulture.
31Nous avons souligné plus haut le rôle de la famille Contencin dans le possible rapprochement de Jacques-François Coquille avec Perrine Joubert. Le couple devait bien connaître ces Contencin, installés à Morannes dans le « fief » des Joubert. Ils sont un bon exemple de famille très implantée dans la perception des impôts. Le père, Pierre Contencin, est receveur des aides perpétuant l’activité de son père Nicolas, ancien directeur des aides à Angers. Il devient par la suite Trésorier de France au bureau des finances de Metz. Mais auparavant ses enfants sont nés à Morannes entre 1734 et 1740, dont deux sont filleuls de Jacques-François et Perrine. L’aîné, Pierre-François, devient contrôleur des aides à Poitiers puis directeur des aides à Tours54. Par les liens entretenus avec cette famille, Jacques-François Coquille peut développer son réseau au sein de l’administration des aides. À la naissance de son fils François Marie Casimir en 1745, il choisit comme parrain Charles Binet, directeur des aides à Amboise55. Pour Jacques-Antoine qui naît en 1747, le choix se porte sur le jeune Antoine Jean Rattier, fils d’Antoine Rattier, receveur de la ville de Tours comme nous l’avons indiqué plus haut. Une même signature revient sur ces deux actes de naissance, celle de François Le Vaigneur, directeur des aides de Tours dont la fille Marie-Françoise est la marraine de François Marie Casimir56.
32Au-delà des liens du sang, les relations amicales jouent ici un rôle prépondérant pour faciliter les carrières, s’entraider ou se soutenir. Cette administration peut donc s’apprécier comme un véritable corps social57. Celui-ci devient la cible de l’opinion publique naissante en ce milieu du xviiie siècle, au regard de ses privilèges et des abus liés à la perception des impôts. Dans quelle mesure Jacques-Antoine a-t-il pu être marqué par cet environnement familial et amical ? Il n’en fait pas mention dans ses écrits, mais on le trouve aux avant-postes pendant la Révolution pour réclamer plus d’égalité dans la société, ce qui tranche avec ce qu’il a pu vivre dans sa jeunesse.
33Les différentes alliances des Coquille révélées par les registres paroissiaux donnent à voir par ailleurs l’appartenance de la famille à tout un réseau développé de marchands. Cela corrobore le constat réalisé par Vida Azimi sur la prédominance du monde de la marchandise engagé dans la Ferme générale et la Régie générale des aides58. Le schéma des alliances abonde en ce sens.
Fig. 2. – Schéma des alliances du couple Coquille-Joubert.

34Au mariage de Perrine et Jacques-François à Azé en 1740, on remarque déjà la présence de négociants tels les Seguin de Château-Gontier. La famille est étroitement liée avec les Le Tessier du Chêne Vert, en particulier Louis, marchand, qui épouse la sœur de Perrine à Morannes en 1746. Perrine est présente à Chemiré au baptême de sa nièce Marie en 1748 puis est marraine de son neveu Charles en 1750. Jacques-François, lui, signe plusieurs actes de mariage de fils et filles de marchands. Il en va ainsi en 1751 à Morannes pour l’union de Jean Beucher, fils du marchand Michel Beucher, et de Renée Potry, fille de Maurice Potry également marchand. On retrouve ce dernier présent en 1771 sur l’acte notarié du titre clérical de Jacques-Antoine que nous évoquons plus loin dans cette étude. La signature de Jacques-François apparaît aussi en 1757, toujours à Morannes, sur l’acte de mariage d’Anne Leblanc et Jean Tardif, fils du marchand Jérôme Tardif, et sur l’acte de mariage la même année et au même endroit de Jacques Le Jan et Louise Davy, fille de Guy Davy négociant. Les exemples abondent, et l’on en décèle encore un à Chemiré en 1753, avec la signature de Jacques-François sur l’acte de baptême d’Antoine Theulier, fils du marchand Louis Theulier59.
35Ce tour d’horizon des familles constituant le réseau de la famille Coquille ne serait pas complet sans évoquer leurs alliances avec des cercles liés aux professions juridiques et aux médecins. Ainsi trouve-t-on la signature de Perrine Joubert à Saint-Ouën-des-Toits en 1741 sur l’acte de baptême de Jean Pichot. Celui-ci est le fils de Pierre Pichot de la Graverie, avocat au parlement et sénéchal de Saint-Ouën-des-Toits et dont le frère René, procureur du roi au siège des traites en 1734, est un magistrat de la ville de Laval60. Jacques-François, lui, signe en 1757 à Morannes l’acte de mariage de Jacques Le Jan, exerçant la charge de conseiller du roi. Ce dernier acte précise qu’il est médecin pour le roi à la Flèche et docteur en médecine de l’université de Montpellier, fils de Jean Le Jan, lui aussi docteur en médecine. Parmi les témoins, sont identifiables un étudiant en médecine, un docteur en médecine et deux maîtres en chirurgie. C’est un autre aspect des relations de Jacques-François et de Perrine, car à plusieurs reprises nous les retrouvons proches de ce monde de la « médecine ». Cela s’explique très probablement par le fait que Pierre Pascal Joubert de la Motte, le frère de Perrine, est lui-même docteur en médecine installé à Château-Gontier. Et c’est un « maître-chirurgien », Paul Leblanc, qui est présent sur l’acte de baptême de leur fille Marie Anne Claire Coquille née en 1741 à Morannes. Jacques-François assiste d’ailleurs au mariage de la fille de Paul Leblanc à Morannes en 1757.
36Ce long détour par les réseaux de sociabilité de la famille Coquille-Joubert, au titre de la recherche des traces périphériques de la vie de Jacques-Antoine, est éclairant. Il révèle l’absence de liens familiaux avec la noblesse, confirmant l’hypothèse d’une possible dérogeance de la famille Coquille. Celle-ci parvient néanmoins à asseoir sa situation grâce au parcours du père au sein de la Régie générale des aides et en s’ouvrant au milieu des bourgeoisies marchandes. Le plus souvent qualifiés d’« employés » tout au long du xviiie siècle, les commis de la Ferme générale ont acquis peu à peu des caractères de fonctionnaires : situation statutaire et réglementaire, perception d’un traitement et non d’un salaire, emploi permanent intégré dans une hiérarchie administrative61. Dans cette administration se dessine peu à peu la notion de service public. Cette mission assurée par son père a-t-elle pu jouer dans le choix de Jacques-Antoine de s’impliquer ultérieurement au service de l’État ?
37De plus, souvent exécrés dans l’esprit de la population, cibles des philosophes et des pamphlétaires, ces employés des aides sont les témoins privilégiés de l’oppression et de l’injustice du système fiscal d’Ancien Régime sur les contribuables, qu’ils le réprouvent ou bien qu’ils en profitent. La Révolution venue, les commis de la Ferme générale et de la Régie générale des aides revendiquent, par opportunisme ou par conviction, ce statut de serviteurs de l’État au même titre que les juges ou les prêtres62. Ils s’opposent alors aux fermiers généraux qui subissent poursuites et condamnations à mort à partir de 1793. C’est tout le paradoxe de ce corps administratif à la fois soucieux d’intégrer le processus révolutionnaire et de préserver ses acquis.
38Tout comme la famille du curé Jacques Roux63, plutôt aisée elle aussi, Jacques-François Coquille et Perrine Joubert ont fait souche parmi les notables locaux. Leur appartenance au milieu de la bourgeoisie les rapproche par ailleurs du cadre familial d’un François-Yves Besnard64 et leur insertion dans les réseaux de marchands d’un Dominique Dillon65 ou d’un Pascal-Antoine Grimaud66. Pour autant, les comparaisons s’arrêtent là pour Jacques Roux qui passe son enfance à l’écart de l’agitation des villes67, à la différence de Besnard à Angers ou de Grimaud à Clermont-Ferrand. Jacques-Antoine va lui aussi vivre cette expérience urbaine à Tours.
L’expérience urbaine à l’époque des Lumières : vivre à Tours au milieu du xviiie siècle
39Nous ne disposons d’aucun élément sur la jeunesse tourangelle de Jacques-Antoine. Il semble néanmoins pertinent d’esquisser un tableau de la ville de Tours au mitan du xviiie siècle, à l’instar de la démarche entreprise par Philippe Bourdin sur Clermont-Ferrand au sujet de Pascal-Antoine Grimaud68. Cette approche, outre le fait de pallier l’absence d’archives relatives à la personne étudiée, offre une meilleure compréhension de son cadre de vie et de l’évolution du monde qui s’opère sous ses yeux.
40Longtemps présentée comme une ville figée à cette époque, Tours a pourtant connu de nombreuses transformations dans la seconde moitié du xviiie siècle. Présent le plus souvent dans ce centre urbain de sa naissance en 1747 à sa sortie du couvent des récollets vers 1783, Jacques-Antoine voit le monde changer à travers les évolutions de la ville. Elle n’est donc pas tout à fait la « belle endormie » suivant l’expression dont l’historiographie a voulu l’affubler pendant longtemps. Peuplée de 20 000 habitants environ, c’est une ville qui tient un rôle administratif important dans le royaume de France :
« [C’est la] capitale d’une généralité regroupant le Maine, l’Anjou et la Touraine, le siège d’un gouvernement, d’un archevêché ayant dix évêchés suffragants, et [qui] est dotée, à défaut de cours souveraines, de juridictions relativement prestigieuses comme le bureau des finances69 et le bailliage et siège présidial. Deux chapitres importants y résident par ailleurs, celui de Saint-Gatien et celui, fort prestigieux, de Saint-Martin70. »
41Tours n’échappe pas au mouvement général d’une « volonté radicale de rupture avec la ville existante, issue de l’époque médiévale71 ». D’où la mise en œuvre de grands travaux retentissants72 qui bouleversent et transforment profondément le paysage de la ville au xviiie siècle. En premier lieu, le plus visible et le plus symbolique de ces changements, c’est la destruction progressive des remparts qui s’accélère dans les années 1770 et 1780 et qui s’explique notamment par l’impératif économique d’accéder facilement au fleuve. L’effet n’est sans doute pas anodin sur la population. Le sentiment d’entrer dans un monde nouveau, voire « moderne » se diffuse devant le démantèlement de ces clôtures urbaines médiévales, symboles d’un autre temps. Et que dire du réaménagement des quais (à partir de 1771), de la construction d’un nouveau pont (de 1765 à 1775), de l’édification de bâtiments face à la Loire (à partir de 1780), du tracé d’un nouvel axe majeur Nord-Sud (à partir de 1772), « manifestant tout à la fois la puissance de l’autorité royale et le prestige des institutions locales73 ». Jacques-Antoine assiste assurément à cette modification du visage de la ville de Tours et aux tentatives de maîtrise des éléments naturels, en particulier de la Loire et du Cher, dont les grandes crues, respectivement en 1755, 1770, 1782, 1784 pour le premier et 1766, 1768, 1770 pour le second, incitent à la mise en œuvre de grands travaux de restauration et de construction de digues et de levées dans la décennie 1770.
42Tours est bien une ville de son temps, marquée par le mouvement des Lumières. La recherche de l’embellissement passe par des constructions comme celle d’un nouvel hôtel de ville et par la création de nouvelles places comme la « place royale » en 178174. Les travaux de pavage des rues sont légion dans les années 1770-1780. L’on cherche à rationaliser l’espace par la numérotation des maisons (1769) et grâce à de nouvelles plaques de noms de rues, en lettres d’or sur marbre noir d’Italie, installées à partir de 1778. Au regard de considérations de plus en plus prégnantes liées à l’hygiène, la santé et la sécurité, les échevins s’emparent de la question du nettoyage des rues, de la translation des cimetières et de l’éclairage public, car Tours serait devenue selon eux une des villes les plus passagères du royaume.
43Jacques-Antoine fait donc l’expérience des Lumières à travers cette mutation urbaine de Tours, architecturale, fonctionnelle mais aussi économique et culturelle. Si la ville n’était au milieu du xviiie siècle ni un grand port, ni un grand centre marchand et plutôt faiblement industrialisée, elle est « en passe de devenir une importante place de commerce à la fin de l’Ancien Régime75 ». Le jeune Tourangeau a pu d’autant plus prendre conscience des changements économiques en cours dans cette capitale de généralité que son parrain, Antoine Jean Rattier, en a été l’un des acteurs majeurs. Il doit sa place de receveur de la ville de Tours à son père, Antoine, trésorier de l’extraordinaire des guerres, qui était présent lui aussi à la naissance de Jacques-Antoine en 1747. En effet, Antoine Rattier est nommé receveur de la ville de Tours en août 1759. Mais il décède quelques mois plus tard le 12 novembre 1760 et c’est son fils qui, âgé d’à peine 20 ans, le remplace, bien qu’inexpérimenté76 en la matière. Nous avons tout lieu de penser que Jacques-Antoine a des liens importants et suivis avec Antoine Jean Rattier, car ce dernier est présent en 1778 lors de la profession de son filleul chez les récollets de Tours.
44Ce poste de receveur de la ville de Tours, Antoine Jean Rattier l’occupe pendant 24 ans, jusqu’en mars 1784. Il a en charge la gestion des finances de la ville et, à ce titre, un rôle incontournable pour les échevins dans la majorité de leurs projets. Malgré sa gestion qui laisse parfois à désirer77, il se rend indispensable par les fonctions qu’il cumule et les caisses qu’il gère : capitaine de la compagnie de pompiers (1767), contrôleur des octrois (1768), trésorier du collège.… Il fonde même en 1775 une fabrique de couvertures de laine « destinée à faire travailler les pauvres78 », et en 1783 un établissement de tirage de soie conjointement avec l’échevin Simon-Roze. Il participe en cela au développement plus large de l’activité de la draperie et de la soierie à Tours, dont le commerce avec Nantes prospère via la Loire, traduisant le renouveau de l’intérêt du fleuve79 et son ouverture vers la grande porte atlantique80. Il quitte ses fonctions en 1784 en raison des difficultés financières de la ville de Tours et de ses propres difficultés d’argent. Il avait investi en 1775 dans la plantation de 50 000 pieds de peupliers d’Italie et de pieds d’osier. Malheureusement, une crue de la Loire en février 1784 ruine ce projet et son concepteur, précipitant son départ de Tours. Il s’installe alors à Saint-Denis, près de Paris, où il investit de nouveau dans une manufacture de blanchiment de soies jaunes. Il revient se fixer enfin en bord de Loire près de Blois, à Chouzy-sur-Cissé81, au manoir de Laleu, acheté par adjudication en 1780 à l’archevêque de Tours, Monseigneur de Fleury.
45Avec ce parrain, présent aux étapes importantes de sa vie, Jacques-Antoine Coquille d’Alleux a devant lui l’exemple d’un homme de sept ans son aîné, dynamique, en phase avec les mutations économiques de son époque, qui entreprend, investit, échoue et rebondit, tout en expérimentant de nouveaux procédés comme celui qu’il affirme avoir trouvé vers 1775 pour traiter les vers qui endommagent les soieries82.
46C’est toute une ville qui s’éveille à la vie culturelle dans ces années 1770-1780 qui marquent là aussi une rupture dans l’histoire de Tours83 : créations de journaux, diffusion de l’Encyclopédie, organisation de loges maçonniques, représentations théâtrales, mise en place d’un nouveau collège, développement d’une école de chirurgie et d’une école de dessin.… Jacques-Antoine a sûrement vu à l’œuvre certaines de ces transformations. Sa proximité avec les édiles tourangeaux ne fait que conforter cette hypothèse. D’ailleurs, outre Antoine Jean Rattier, l’on trouve parmi les signataires de sa profession chez les récollets en 1778 un certain Claude Sain de Bois Le Comte qui, en 1765, a été candidat pour le poste de maire de la ville et qui a manqué de peu d’être choisi par Choiseul pour cette fonction84.
47L’impression que procure l’entrée de la ville de Tours à l’infatigable voyageur qu’est Arthur Young, en septembre 1787, n’est peut-être pas très éloignée de ce que pouvait éprouver Jacques-Antoine quelques années auparavant, lui qui va quitter puis retrouver à plusieurs reprises la vallée de la Loire et l’ancienne capitale du royaume de France, au gré des déplacements liés à sa formation religieuse :
« L’entrée de Tours est vraiment magnifique : c’est une rue neuve, composée de grandes maisons, construites en pierres de taille, avec des façades régulières. Cette belle rue, qui est large, avec des trottoirs de chaque côté, est tracée en droite ligne à travers toute la ville jusqu’au nouveau pont, de quinze arches, chacune ayant 75 pieds d’ouverture. Le tout constitue une belle entreprise tendant à l’embellissement d’une ville de province85. »
48Si les traces de la jeunesse de Coquille sont quelque peu ténues, elles rendent cependant possibles l’évaluation de son milieu familial et social, inscrit dans un espace de carrefours commerciaux, avec Saint-Ouën-des-Toits ou Morannes, et urbain avec Tours, propices à l’observation des mutations de la société, à l’ouverture vers la modernité et aux idées des Lumières. Analyser ces cadres permet de mettre en évidence les potentielles influences qui agissent sur le personnage étudié. Si le milieu d’origine n’a semble-t-il eu que peu de lien avec le choix à l’heure du serment de 1790, il existe une corrélation entre le taux de jureurs et la fréquentation d’un milieu urbain86. Cependant, de notre point de vue, la question n’est peut-être pas de chercher des raisons intrinsèques au seul serment, au risque de réduire la compréhension du parcours de l’individu uniquement à cette action. Il s’agit plutôt de voir si Coquille réactive ultérieurement cet univers mental, ce réseau familial et social, et s’il s’appuie sur celui-ci au cours sa vie.
49C’est à Tours une nouvelle fois qu’on le retrouve en 1776, dans l’un des nombreux couvents de cette ville marquée par l’héritage religieux de Saint-Martin, après qu’il a achevé sa formation d’ecclésiastique dont il faut à présent explorer les ressorts.
Notes de bas de page
1Tackett Timothy, La Révolution, l’Église, la France, op. cit., p. 103.
2Farge Arlette, Vies oubliées. Au cœur du xviiie siècle, Paris, La Découverte, 2019, p. 9.
3Coquille Guy, Généalogie de la maison des Coquilles, faite par Guy Coquille, escuyer, seigneur de Romenay. Ensemble la lettre d’anoblissement de la maison desdits Coquilles, par le roi Charles VI, en l’année 1311 [« sic » pour 1396], disponible sur [http://gallica.bnf.fr].
4Deux origines possibles pour ce nom de Coquille : une référence au pèlerinage de Saint-Jacques de Compostelle, le pèlerin, ou une indication toponymique, la coquille étant un espace de forme concave, une dépression.
5En 1560 et en 1561 pour les États généraux d’Orléans, et en 1567 et 1588 pour les États généraux de Blois.
6Chagny Anne-Marie, Dupont Sandrine et Darnault Emmanuel, « Guy Coquille », fascicule, archives départementales de la Nièvre, 2003.
7Ibid.
8Coquille Guy, Dialogue sur les misères de la France, 1594, Traité des libertés de l’Église de France, 1594 ; Les coustumes du pays et duché de Nivernois avec les annotations de Maître Guy Coquille, 1605 ; L’Histoire du pays et du duché du Nivernais, 1612.
9Coquille Guy, Traité des libertés de l’Église de France, 1594.
10Archives départementales de la Nièvre (par la suite, ADN), 4 E 17, 8 septembre 1702.
11Charlotte Le Prêtre de Vauban est née en 1661 et est décédée en 1709. Son célèbre père Sébastien meurt en 1707.
12ADN, 4 E 267, 13 juillet 1712, acte de baptême de Jacques-François Coquille d’Alleux à Saint-Saulge.
13Sur la question janséniste, voir notamment Van Kley Dale K., Les origines religieuses de la Révolution française, 1560-1791, Paris, Le Seuil, 2002 ; Maire Catherine, De la cause de Dieu à la cause de la nation. Le jansénisme au xviiie siècle, Paris, Gallimard, 1998 ; Michel Marie-José, Jansénisme et Paris, 1640-1730, Paris, Klincksieck, 2000 ; Cottret Monique, Histoire du jansénisme, xviie-xixe siècles, Paris, Perrin, 2016 ; Andurand Olivier, La Grande Affaire. Les évêques de France face à l’Unigenitus, Paris/Rennes, Société d’histoire religieuse de la France/Presses universitaires de Rennes, 2017.
14Petit manteau couvrant les épaules jusqu’à la ceinture.
15Marillier Abbé, « Histoire de la Constitution Unigenitus dans le diocèse de Nevers », Compte-rendu du congrès scientifique international des Catholiques, Paris, Picard, 1891, p. 227.
16Charrier Jules, « Le jansénisme dans l’ancien diocèse de Nevers », Revue d’histoire de l’Église de France, t. V, no 29, 1914, p. 605-619.
17Van Kley Dale K., Les origines religieuses de la Révolution française, op. cit.
18Beaurepaire Pierre-Yves, La France des Lumières, op. cit., p. 42.
19Bianchi Serge, « Les curés rouges dans la Révolution française », art. cité, p. 369.
20Renseignements aimablement mis à notre disposition par Bernard Joubert de la Motte, d’après un travail généalogique réalisé par Frédéric Chopin.
21ADML, 5 E 5, 6 juillet 1607, minute du notaire Guillaume Guillot à Angers.
22Joubert de la Motte Bernard, « Inventaire après décès du sieur René Nicolas Joubert de La Motte », La Mayenne Archéologie Histoire, Société d’archéologie et d’histoire de la Mayenne, no 19, 1996, p. 83.
23Sur la perte de la noblesse, voir Bourquin Laurent, La noblesse dans la France moderne (xvie-xviie siècles), Paris, Belin, 2002.
24Azimi Vida, Un modèle administratif de l’Ancien Régime, les commis de la ferme générale et de la régie générale des aides, Paris, Éditions du CNRS, 1987, p. 74.
25Ibid., p. 48.
26ADML, 6 E 220, 14 janvier 1740, acte de baptême de Jacques-Louis Contencin à Morannes.
27Archives départementales de la Mayenne (par la suite ADM), 5 Mi 614, acte de mariage du 20 décembre 1740 de Jacques-François Coquille d’Alleux et Perrine Joubert de la Motte à Azé.
28Les actes notariés réalisés par Perrine n’ont pas été conservés.
29ADML, 6 E 220, 17 septembre 1741, acte de baptême de Marie Anne Claire Coquille d’Alleux à Morannes.
30Azimi Vida, Un modèle administratif de l’Ancien Régime, op. cit., p. 47.
31Ibid., p. 68.
32Archives départementales d’Indre-et-Loire (par la suite ADIL), 6NUM6/261/728, 9 novembre 1745, acte de baptême de François Marie Casimir Coquille d’Alleux à Saint-Vincent-de-Tours.
33Le Bozec Christine, Révolution et religion, Paris, Passés Composés, 2021, p. 39.
34ADIL, 6NUM6/261/730, acte de baptême du 17 juin 1747 à Saint-Vincent-de-Tours.
35Azimi Vida, Un modèle administratif de l’Ancien Régime, op. cit., p. 85.
36Décédée à Château-Gontier en 1763 à l’âge de 21 ans.
37Lelievre Jacques, cité dans Azimi Vida, Un modèle administratif de l’Ancien Régime, op. cit., préface p. xii.
38Azimi Vida, Un modèle administratif de l’Ancien Régime, op. cit., p. 53.
39ADML, 6 E 220, 9 novembre 1708, acte de baptême de Perrine Joubert de la Motte à Morannes.
40Les orthographes varient : Pécaudière, Pécardière.
41ADML, 6 E 220, 10 juin 1746, acte de mariage de Louis Le Tessier et Françoise Joubert à Morannes.
42ADML, registre paroissial de Chemiré-sur-Sarthe en ligne, non coté : 9 juin 1748, acte de baptême de Marie Cécile Perrine Le Tessier ; 15 août 1750, acte de baptême de Charles Pierre Marie Le Tessier ; 5 novembre 1753, acte de baptême de Louis Theulier.
43ADML, 6 E 220, registre paroissial de Morannes : 5 juillet 1751, acte de mariage de Jean Beucher et Renée Potry ; 9 août 1757, acte de mariage de Jean Tardif et Marie Le Blanc ; 4 novembre 1757, acte de mariage de Jean-Jacques Le Jan et Louise Alexandre Davy.
44ADIL, 6NUM6/031/074, 3 mai 1786, acte de mariage de François Marie Casimir Coquille d’Alleux à Bourgueil avec Marie Magdelaine Beauvallet.
45ADM, 27 juin 1763, acte de sépulture de Marie Anne Claire Coquille d’Alleux à Château-Gontier.
46Azimi Vida, Un modèle administratif de l’Ancien Régime, op. cit., p. 81.
47Archives départementales de la Sarthe (par la suite ADS), 4 E 140/88, 28 août 1771, acte notarié portant le titre clérical de Jacques-Antoine Coquille d’Alleux devant Pierre Poullet notaire à Précigné.
48Azimi Vida, Un modèle administratif de l’Ancien Régime, op. cit., p. 152.
49ADM, 5 Mi 490, 21 juin 1750, acte de décès d’Anne Marguerite Coquille de Fureterre à Château-Gontier, paroisse Saint-Jean-Baptiste.
50Azimi Vida, Un modèle administratif de l’Ancien Régime, op. cit., p. 50.
51Durand Yves, Les Fermiers Généraux au xviiie siècle, Paris, Presses universitaires de France, 1971.
52Azimi Vida, Un modèle administratif de l’Ancien Régime, op. cit., p. 81.
53Durand Yves, Les Fermiers généraux, op. cit., p. 45.
54Il deviendra sous-préfet de Mamers après la Révolution.
55ADIL, 6NUM6/261/728, 9 novembre 1745, acte de baptême de François Marie Casimir Coquille d’Alleux à Saint-Vincent-de-Tours.
56Le fils de François Le Vaigneur, Jean-François, connaît un parcours proche de celui de Jacques-Antoine Coquille : entré chez les Minimes, il abdique toute fonction ecclésiastique à la Révolution puis se marie en 1794.
57Azimi Vida, Un modèle administratif de l’Ancien Régime, op. cit., p. 68.
58Ibid., p. 90.
59Pour l’anecdote, le fils de Madeleine, sœur d’Antoine Theulier, est le célèbre chef chouan Marin-Pierre Gaullier né lui aussi à Morannes en 1766.
60Pitou Frédérique, La Robe et la plume. René Pichot de la Graverie, avocat et magistrat à Laval au xviiie siècle, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2003.
61Mousnier Roland, Les Institutions de la France sous la Monarchie absolue, t. II, Paris, Presses universitaires de France, 1980, p. 79.
62La Ferme générale est supprimée en 1790.
63Markov Walter, Jacques Roux, op. cit., p. 20-21.
64Taroni Martine, François-Yves Besnard. Un prêtre en révolution, op. cit., p. 11.
65Artarit Jean, Dominique Dillon, op. cit.
66Bourdin Philippe, Le Noir et le Rouge, op. cit., p. 30.
67Markov Walter, Jacques Roux, op. cit., p. 22.
68Bourdin Philippe, Le Noir et le Rouge, op. cit.
69Caillou François, Une administration royale d’Ancien Régime : le bureau des finances de la généralité de Tours (1577-1790), Tours, Presses universitaires François-Rabelais, 2005.
70Baumier Béatrice, Tours entre Lumières et Révolution. Pouvoir municipal et métamorphoses d’une ville (1764-1792), Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2007.
71Harouel Jean-Louis, Histoire de l’urbanisme, Paris, Presses universitaires de France, 1993, cité in Baumier Béatrice, Tours, op. cit.
72Maillard Brigitte, Vivre en Touraine au xviiie siècle, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2003.
73Baumier Béatrice, Tours, op. cit.
74Ibid.
75Ibid.
76Saupin Guy, Histoire sociale du politique : les villes de l’Ouest atlantique français à l’époque moderne, xvie-xviiie siècle, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2010, p. 234.
77Baumier Béatrice, Tours, op. cit.
78Ibid.
79Ibid.
80Voglie Jean-Baptiste de, Tableau de la généralité de Tours depuis 1762 jusques et compris 1766, cité in Baumier Béatrice, Tours, op. cit.
81Antoine Jean Rattier devient maire de Chouzy-sur-Cissé en 1810.
82Baumier Béatrice, Tours, op. cit.
83Ibid.
84Ibid.
85Young Arthur, Voyages en France, Paris, Taillandier, 2009, p. 163.
86Tackett Timothy, La Révolution, l’Église, la France, op. cit., p. 109.
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