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Le commerce du Nord

 | 
Pierrick Pourchasse

Deuxième partie. Les contradictions de la politique française

Chapitre 6. Les consuls au service de la navigation et du négoce

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Géographique :

France

Texte intégral

1La France, comme toutes les grandes puissances du xviiie siècle, possède un réseau de consuls dans toute l’Europe. Dans un monde où les communications sont lentes et les sources d’informations précieuses, l’activité des consuls est un élément de première importance pour renseigner le monde négociant sur la situation des marchés étrangers. Une étude comparative entre les services consulaires français et scandinaves met en évidence une grande différence entre les deux ensembles, tant sur la densité des réseaux que sur la capacité à fournir des informations.

Les services consulaires français

Des consuls fonctionnaires

  • 1 Mézin A., Les consuls de France au siècle des Lumières (1715-1792), Paris, Imprimerie nationale, 1 (...)

2Dans son ouvrage sur les consuls de France au siècle des Lumières, Anne Mézin commence par donner la définition théorique d’un consul français : « Le personnel consulaire est un ensemble de fonctionnaires du Roi à l’étranger nommés en vertu d’une commission qui leur donne un caractère d’envoyés officiels et leur permet d’exercer des fonctions d’autorité à condition que cette commission soit reconnue et acceptée par le pays d’accueil. Il est de nationalité française et doit respecter des conditions d’âge et de religion ; il dépend des bureaux de la Marine et travaille pour les marins mais également pour les marchands français en raison des relations du commerce et des établissements de négoce français établis à l’étranger1. »

  • 2 AN B1 452, 1756.

3Selon l’ordonnance de la marine de 1681, le personnel consulaire est nommé exclusivement par le roi. En cas d’absence de conventions autorisant la création de consulats, à l’exemple des Provinces-Unies (postes d’Amsterdam et de Rotterdam) de Hambourg et de Dantzig, le roi nomme des Commissaires de la Marine pour remplir les fonctions consulaires. Les consuls ont le pouvoir de nommer des vice-consuls quand ils ont besoin d’aide dans les ports secondaires de leur département ou pour d’autres besoins particuliers. Dans les ports du Nord, il existe de temps à autre des vice-consuls à Lübeck (Bataille de 1777 à 1786), à Riga (Martin Rademacker en 1720, Duvivier en 1730 et Daniel Kolb en 1747), à Rostock, Christiania, Marstrand… En 1756, un vice-consulat est créé à Christians and (Dechezaulx Desprez de 1756 à 1790) car c’est « un port favorable pour y emmener les prises faites en mer du Nord2 ».

Une réglementation peu respectée

4Les consuls de France doivent théoriquement être de nationalité française mais, dans des ports très éloignés où la présence nationale est inexistante, ils sont parfois de nationalité étrangère. À Elseneur, le poste est tenu de 1697 à 1777 par le danois Jacob Hanssen puis par son fils Jean-Georg. Le frère de Jean-Georg, Friderich, est lui-même consul du Danemark à Bordeaux. À Trondheim en Norvège, l’irlandais James Brown fait fonction de consul de France pendant quelques années (1758-1767). De la même manière, le personnel consulaire doit être de religion catholique romaine mais, dans les pays du Nord, cette règle n’est guère respectée. À Elseneur, les Hanssen, sujets danois, sont de confession protestante tout comme James Brown, bien qu’irlandais, à Trondheim.

  • 3 AN B1 451, 23/07/1748.
  • 4 AN B3 419, 26/02/1751.

5Pour les Français, la règle sur la religion est plus difficile à enfreindre. Pourtant, à Bergen, les Dechezaulx (ou de Chezaulx) qui succèdent à leur oncle Jacques Butaud, créateur du consulat, suivent, comme ce dernier, la doctrine luthérienne. Lors de la succession, le chargé d’affaires à Copenhague, l’abbé Mathurin-Rodolphe Lemaire, met cependant des formes particulières pour respecter les conventions : « J’ai appris qu’il (Dechezaulx) avait été appelé à Bergues dès sa plus tendre enfance par feu son oncle (Butaud) qui s’était fait luthérien et qui l’a élevé dans la même religion qu’il professe actuellement. Je souhaiterais donc une nouvelle autorisation de votre part pour passer sur la condition exprimée à cet égard dans les provisions ou que vous jugeassiez à propos de m’en faire parvenir de nouvelles où il ne fût point fait mention de la religion du pourvu3. » Par contre, en 1748, la proposition de l’ambassade de France à Stockholm, de nommer Jean-Théodore Lafon de Jarnac en Saintonge sur le poste de Göteborg (Gothembourg), que l’on cherche à attribuer depuis plusieurs années, est refusée car l’impétrant est de religion protestante. Trois ans plus tard, les autorités n’ont toujours pas trouvé de consul et l’ambassade se propose de faire venir quelqu’un de France4.

6Par l’arrêt du 31 juillet 1691, le consul, devenu officier du roi, est interdit de commerce sous peine de révocation et d’amende. Là aussi, la règle n’est pas appliquée et de nombreuses entorses sont faites au principe de l’interdiction du négoce. Ceci est particulièrement vrai dans les villes du Nord de l’Europe.

  • 5 Helsingør Kommunes Museer, Restaureringen af Helsingør Domkirke 2000-2001 og undersøgelserne af de (...)
  • 6 AN B3 420, 1752.

7À Elseneur, les consuls Hanssen sont membres de l’élite du négoce et de l’armement de la ville. Ils sont spécialisés dans le commerce de céréales, de cuivre de fer et de bois vers la France ainsi que de vin, d’eau-de-vie et de vinaigre de France vers le Danemark. Jean-Georg a une maison de commerce à Bordeaux en association avec son frère Friderich qui y réside5. En 1752, il projette de créer avec deux négociants français une importante société pour établir un commerce direct entre la France et les principales villes du Nord et, à ce propos, il se charge d’obtenir du roi du Danemark un entrepôt libre au port d’Elseneur6. L’affaire n’a pas de suite.

  • 7 AN B1 609, 03/03/1755.
  • 8 AN B1 620 29/07/1763.
  • 9 Pfister-Langanay C., Ports, navires et négociants à Dunkerque (1662-1672), Dunkerque, Société dunk (...)

8À Emden, Jean-Baptiste Casteleyn est consul entre 1755 et 1759. Il « est natif de Dunkerque… Dans le temps de l’établissement à Emden de la première compagnie de Chine, il a été chargé de quelques fournitures pour les armements et l’équipement des vaisseaux dont il s’est très bien acquitté et dont on a été très content… Il a été accepté comme teneur de livres de la Compagnie de Bengale qu’il dirige entièrement aujourd’hui. Son habileté et ses lumières dans le commerce le mettent en grande considération à Emden où il est très bien établi. Il y a fait de bonnes affaires et il a déjà considérablement augmenté son bien7 ». Son consulat est supprimé en 1759 à la suite de son départ du port prussien, les affaires de son commerce passant avant les affaires de sa charge. En effet, la guerre étant survenue, il indique : « Je me suis trouvé obligé à cause de mon caractère et pour la sûreté de mon commerce d’établir une maison de commerce à Groningue pour faire naviguer plusieurs de mes navires sous le pavillon hollandais8. » En 1763, pour raison de santé, il se retire à Dunkerque où il rapatrie son activité et, à cette occasion, il demande d’être exempté du droit de fret que les fermiers généraux veulent imposer à ses navires considérés comme étrangers. En 1793, il fait partie des riches négociants du port flamand et possède plusieurs navires9.

9Joseph Raimbert, viceconsul à Saint-Pétersbourg de 1765 à 1791, est le négociant français le plus en vue de la capitale russe. Il est le correspondant de la Compagnie des Indes ainsi que de Dujardin de Ruzé pour les fournitures navales en provenance de Russie.

  • 10 Wiesener A.-M., « Om utenlanske konsuler i Bergen », Bergens Historiske Forening, 22-1916, p. 36.
  • 11 ADM 11 B 53, 29/03/1767.
  • 12 Wiesener A.-M., op. cit., p. 17.
  • 13 Tardy P., op. cit., p. 173.
  • 14 Framery Pierre-Louis-Marie réside à Bergen pour des raisons d’éloignement et de difficultés d’appr (...)
  • 15 ADM 11 B 53, 08/1763, 04/1765 et 04/1778.
  • 16 Baron S.H., op. cit., p. 3132.

10En Norvège, les consuls exercent tous des métiers marchands, activités nécessaires pour leur assurer des revenus décents. Le pays n’étant guère fréquenté par les navires français, leurs appointements pour l’exercice de leurs fonctions officielles sont réduits. À Bergen, Jacques Butaud, consul entre 1716 et 1748, est à la tête d’une maison spécialisée dans le commerce des vins français10. Son successeur et neveu, Jean-Etienne Dechezaulx, prend la bourgeoisie de la ville en tant que négociant le 19 novembre 1748, l’année même de sa nomination au consulat (11 août 1748). Desruisseaux, négociant vannetais lui adresse parfois des navires11. Son fils, Etienne-David Dechezaulx, qui fait fonction de vice-consul à Bergen depuis le 19 juillet 1779, exerce une activité de commissionnaire pour des partenaires français12. L’origine de la famille est Saint-Martin-en-Ré où une branche est active dans le commerce des sels13. À Trondheim, James Brown exerce l’activité de négociant. Son successeur, Pierre-Louis-Marie Framery14, est également intéressé dans des affaires commerciales. Il travaille aussi à la commission avec Des ruisseaux de Vannes15. Lavie, consul à Saint-Pétersbourg entre 1717 et 1724, est un cas particulier : ancien négociant bordelais, il a fait de mauvaises affaires qui l’ont obligé à quitter le pays pour échapper à ses créditeurs16.

  • 17 AN B1 611, 08/11/1771.

11Les autres consuls français du Nord n’exercent pas d’activité commerciale mais leur charge les autorise à fournir une aide aux capitaines pour trouver un fret de retour vers la France. En 1775, Lesseps écrit qu’il « est entré à Hambourg pendant l’espace de cinq mois sept bâtiments français à la plus grande partie desquels (il a) procuré par les amis des chargements en retour pour nos ports et pour l’étranger avec assez d’avantages17 ».

  • 18 Mézin A., op. cit., p. 16.

12La majorité du personnel recruté pour un poste consulaire est de formation administrative ou juridique (Guyot de Kercy à Hambourg ou Gérard de Rayneval à Dantzig sont avocats) ou a commencé une carrière de fonctionnaire ou de militaire (Decury de Saint-Sauveur à Saint-Pétersbourg est issu des bureaux de la Marine). La nomination à un poste consulaire est parfois une récompense pour services rendus. La nomination à 21 ans de Jean-Baptiste-Barthélemy de Lesseps à Kronstadt, avant-port de Saint-Pétersbourg, s’explique par le fait qu’il est le seul rescapé de l’expédition de La Pérouse. Quant au choix de Coquebert de Montbret, jeune homme de 19 ans, à Hambourg, il ne peut s’agir que de faveurs personnelles18. D’une manière générale, de nombreux consuls sont issus de familles de notables de province, plus ou moins en voie d’anoblissement (Lesseps), ou sont des gentilshommes (Coquebert de Montbret).

Les services consulaires scandinaves

Des consuls négociants

  • 19 Müller L., Consuls, Corsairs and Commerce. The Swedish Consular Service and Long-distance Shipping (...)

13La Suède a une politique de recrutement différente pour son personnel consulaire19. Tout d’abord, les consuls, dont le principal travail concerne les affaires du commerce, appartiennent obligatoirement au monde du négoce à l’exception des postes stratégiques des États barbaresques. Le Collège du Commerce ( Kommerskollegium ), institution dont le but est de développer les exportations suédoises, nomme les responsables aux postes consulaires, après consultation des représentants de la communauté marchande. Habituellement, les autorités demandent à ces marchands de faire un choix et, généralement, celui-ci est suivi. L’élite négociante de la capitale suédoise, regroupée dans l’association des marchands de Stockholm (Grosshandelssocieteten), joue un rôle essentiel dans la politique de nomination des consuls de la monarchie scandinave.

  • 20 RS Kommercekollegium, Huduarkivet EVI a : 347, Skrivelser från Konsuler Nantes, 15/07/1775.

14Au cours du xviiie siècle, le Collège du Commerce choisit de recruter des sujets d’origine suédoise pour assurer une meilleure défense des intérêts nationaux. Pour promouvoir cette idée, il est demandé au personnel consulaire de rédiger les rapports en suédois20. Au Croisic, le consul nommé en 1757 est Eric Gardeman, négociant originaire d’Uddevalla émigré dans le port breton et associé avec un Français dans une entreprise de commerce de sels. Au Havre, à la fin des années 1780, le sieur Reinicke, originaire de Visby, occupe le poste de consul après une formation dont il a bénéficié successivement dans la grande entreprise suédoise Lefebure & Cie puis chez Chauvel, le précédent consul de Suède, et enfin comme courtier-interprète dans le port normand. Progressivement, le pourcentage d’étrangers diminue. En 1789, sur quarante-huit consuls en activité, seuls dix-sept ne sont pas d’origine suédoise. Ces derniers sont habituellement des négociants locaux mais de statut étranger car Versailles refuse l’agrément de consuls de nationalité française. Pour les vice-consuls, le problème ne se pose pas, la majorité d’entre eux sont des négociants français.

  • 21 RC Tyske kancelli 23.

15Le Danemark suit une politique semblable à celle de la Suède. L’activité consulaire est dirigée par le Collège du Commerce de Copenhague ( Kommercekollegiet ) qui choisit naturellement son personnel dans le monde du négoce. Quelques postes importants sont tenus par des sujets danois (Lars Lassen à Marseille, Friedrich Hanssen et Jens Borgaard à Bordeaux…) et le reste par des marchands locaux d’origine étrangère non danoise (Van Hooghwerff à La Rochelle, Flamand Grooters à Quimper…). Comme pour la Suède, la France refuse que ses sujets deviennent consuls de la monarchie danoise. Giraudeau, marchand à Saint-Martin-en-Ré, nommé consul dans cette ville en décembre 1741, doit rendre la patente qui lui a été confiée au profit du sieur Gustave Nordingh car Versailles rejette sa nomination au motif qu‘il est français. Giraudeau refuse car, indique-t-il, « je suis, je l’avoue né et baptisé en France ainsi que le sieur Nordingh mais protestant comme lui… » La seule différence est que Nordingh est « réputé étranger » car son père était consul21.

Des postes convoités par le monde du négoce

16Les entrepreneurs sont très intéressés pour l’obtention d’un poste consulaire qui leur permet de développer leur activité commerciale et leur offre un prestige au sein de leur communauté ainsi qu’une certaine immunité. Les consulats sont ainsi tenus par les négociants les plus en vue. En 1752, le poste de consul suédois à Bordeaux est attribué à Harmensen, négociant d’origine hambourgeoise spécialisé dans le commerce du Nord, qui possède une des plus puissantes affaires de négoce de la place.

  • 22 RS Gallica 516, 18/01/1776.

17Il se crée une grande rivalité pour l’obtention de ces charges. Le 18 janvier 1776, la veuve Babut de Nantes fait parvenir un courrier au Bureau du Commerce de Stockholm pour annoncer la mort de son mari Pierre Babut, consul suédois dans le port breton, et demande que la charge soit transférée à son fils aîné qui travaille depuis sept ans à Amsterdam chez Hope & Cie, pour se former dans le commerce. Le même jour, Jean Henry Wilfelsheim, responsable de la maison de commerce Wilfesheim & Cie de Nantes, demande à Stockholm « la place de consul en cette ville devenue vacante depuis hier par le décès du sieur Babut22 ».Pierre-Benoît Babut obtient finalement la charge tant convoitée.

18Les postes consulaires des ports essentiels au commerce suédois sont monopolisés par les grandes familles commerçantes de Stockholm. Le consulat de Lisbonne est tenu successivement par Joakim de Besche, Anders Bachmanson Nordencrantz, Arvid Arfwedson puis Jean Bedoire, tous membres de familles de l’élite négociante du pays. À Londres, des membres des familles Grill et Tottie conservent le consulat pendant près d’un siècle (1777-1869). À Amsterdam, ce sont les Hasselgren, autre famille du grand négoce suédois, qui monopolisent le poste.

19Les négociants sont très attentifs aux nominations et recommandent toujours aux charges consulaires des personnes qu’ils connaissent et en qui ils ont toute confiance. La plupart d’entre eux exercent ensuite l’activité de commissionnaires pour ces mêmes négociants et il est essentiel de ne pas se tromper pour la bonne marche des affaires.

20Les nominations aux postes danois, tout aussi disputées, sont généralement accordées à des négociants qui exercent un commerce avec le royaume danonorvégien. Ainsi, en 1787, le viceconsul du Danemark à Belle-Isle est Jacques Hubert, marchand local spécialisé dans le commerce de la précieuse rogue norvégienne.

  • 23 RC Tyske kancelli 24, 20/11/1747.
  • 24 Ibid., 02/04/1759.

21Quand une personne veut se faire recommander pour obtenir un poste de consul du Danemark, il est avantageux d’avoir des relations commerciales avec le royaume scandinave. En 1747, François Bollen, négociant bayonnais, originaire d’Anvers, fait une demande pour obtenir le titre de consul de la nation danoise. Il précise qu’il y a plus de quarante ans qu’il est établi à Bayonne « et, pendant tout ce temps là, il a continuellement entretenu des correspondances et un commerce important avec les sieurs Fabritius, Van Osten, Van Hemmert, Kinckel et divers autres négociants, soit de Copenhague, soit des autres principales villes du royaume23 ». Bollen obtient le poste de Bayonne. Jacques Dutisné, un autre négociant de la ville basque, lui succède grâce à l’entreprise Pierre Boué & fils de Hambourg, un de ses donneurs d’ordres, qui contacte son ami Just Fabritius, très important négociant de Copenhague. Pour convaincre définitivement les autorités Fabritius indique en postscriptum de sa lettre de recommandation « que Mrs. Boué me marquent que le dit Dutisné est parent de M. Montz24 ». Ce dernier, ancien négociant bayonnais, devenu banquier à Paris, très investi dans le monde de la grande finance parisienne, représente une relation d’importance pour le monde du négoce danois.

  • 25 AN B1 452.
  • 26 RS Gallica 516, 26/05/1786.

22Les royaumes scandinaves savent récompenser leurs consuls qui ont activement participé au développement du commerce maritime du pays. Hanssen de Liliendahl, consul du Danemark à Bordeaux, obtient des lettres de noblesse du souverain scandinave. À cette occasion, il demande « que cette grâce lui attirât celle de la faire jouir en France où il réside constamment, où il possède des biens fonds, les privilèges des nobles du pays. Il ne serait question que de faire enregistrer les lettres patentes que le roi de Danemark lui a accordées25 ». Lorsque Frédéric-François-Joseph Emmery démissionne de son poste de consul de Suède à Dunkerque le monarque suédois « pour le récompenser, l’éleva au grade de chevalier de son ordre royal de Wasa26 ».

  • 27 Müller L. et Ojala J., « Consular Services of the Nordic Countries during the Eighteenth and Ninet (...)
  • 28 Constant G., « De Hambourg à Marseille. Jean-Christophe Hornbostel (1736-1832) », Marseille, 42-19 (...)

23Certaines familles ou groupes familiaux monopolisent les postes consulaires scandinaves en France. Il est très fréquent que l’on se succède de père en fils comme les Harmensen au consulat de Suède à Bordeaux, les Babut au consulat de Danemark à Nantes27… À Marseille, les membres des familles Butini et Fölsch détiennent le consulat suédois pendant près de 150 ans (1735-1881). Il se constitue de véritables réseaux de consuls négociants scandinaves. À Marseille, dans les années 1780, Jacques Fölsch, consul de Suède, est associé avec son gendre Jean-Christophe Hornbostel. Le frère cadet de ce dernier, Nicolas, est associé dans une autre affaire négociante avec Lars Lassen, consul du Danemark dans la ville provençale28.

  • 29 AN B1 451, 23/07/1753.

24L’activité consulaire n’interrompt pas les visites des négociants chez leurs clients étrangers. En 1743, Jean-Georg Hanssen s’absente pendant un an à l’occasion d’une tournée en France, en Angleterre et en Hollande « pour faire ses affaires personnelles29 ». En 1758, Stierling, consul de Suède à Nantes déclare s’absenter pendant un an à dix-huit mois pour aller en Europe du Nord, tout en continuant à gérer sa charge : « les affaires de mon consulat n’en souffriront point… » Les négociants ont des associés et du personnel pour s’occuper des affaires courantes pendant leurs absences.

Une source d’information essentielle au négoce

La densité des réseaux consulaires

25La densité des services consulaires danois est remarquable. Où qu’ils se situent dans les mers européennes, les navires danois peuvent trouver un consulat ou un vice-consulat à proximité pour leur venir en aide. La France, pays stratégique pour la navigation danoise entre la mer du Nord, l’Atlantique et la Méditerranée, possède le réseau le plus fourni. En 1787, huit consuls et trente vice-consuls y sont en activité alors qu’elle ne possède que sept consulats (Trondheim, Bergen, Elseneur, Hambourg, Göteborg, Saint-Pétersbourg et Dantzig) et moins de dix vice-consulats dans l’ensemble de l’Europe du Nord.

Le réseau des consuls danois en Europe (1787)

Le réseau des consuls danois en Europe (1787)

Le réseau consulaire danois en France en 1787

26– Flandre & Picardie : Dunkerque Abbeville (consuls)

27- Calais, Boulogne, Etaples, Saint-Valéry (vice-consuls)

28– Normandie : Rouen

29-Rouen, Dieppe, Fécamp, Le Havre, Honfleur, Barfleur, Cherbourg, Granville

30– Bretagne : Nantes

31-Saint-Malo, Brest, Quimper, Port-Louis, Belle-Isle, Le Croisic & Le Pouliguen, Roscoff, Morlaix

32– Aunis, Poitou & Saintonge : La Rochelle

33Noirmoutier, Les Sables d’Olonne, Isle-de-Ré, La Rochelle, Rochefort, Charente, Marennes, Royan

34– Provence et Languedoc : Marseille

35Toulon, Cette

36– Guyenne : Bordeaux

37– Gascogne : Bayonne

  • 30 RC Kommercekollegiet 1119, 24/11/1775.

38Les premiers consulats danois s’établissent à la fin du xviie siècle à Nantes puis Bordeaux, les deux grands ports français. La plupart des nouvelles créations ont lieu après la signature du traité de commerce de 1742 entre la France et le royaume scandinave. Les listes donnent parfois un consulat à Saint-Quentin mais cette ville du Nord de la France est simplement le lieu de résidence de Nordingh de Witt, consul à la fois à Nantes et à La Rochelle. Celui-ci « s’absente pour affaires » à Saint-Quentin en 1775 et ne revient pas30, gérant son consulat grâce à la quinzaine de vice-consuls de son département et à sa famille restée sur place. Agacées par cette situation, les autorités danoises nomment en 1785 un nouveau consul à Nantes pour la Bretagne, Nordingh de Witt conservant l’Aunis, le Saintonge et le Poitou.

Les services consulaires danois et suédois en France

Les services consulaires danois et suédois en France

Source : Müller L., op. cit. et Jørgensen A., « Af konsulatsvænets historie i det 18. Århundrede », Erhvervhistorisk Årbog, 1951, p. 60.

39La Suède possède encore un plus grand nombre de consuls en France avec un réseau de seize négociants établis dans les principaux ports et villes commerçantes du pays. Là aussi, la plupart des créations ont lieu après la signature du traité de commerce avec la France (1742). Les vice-consuls, salariés des consuls, n’ont pas besoin de recevoir l’agrément de Stockholm. Il est ainsi difficile de les répertorier car leur trace apparaît rarement dans les archives.

40Les communautés danoises et suédoises dans les ports de France sont trop restreintes pour donner des informations fiables sur les opportunités commerciales et éventuellement offrir une assistance à la navigation scandinave. La mise en place d’un réseau de consuls permet de pallier cette insuffisance d’intermédiaires et de réduire l’aléa commercial lié à une asymétrie d’informations trop importante. La qualité et la quantité des informations recueillies par les services des Bureaux de Commerce de Copenhague et de Stockholm apportent aux négociants scandinaves une vision particulièrement fine de l’économie française. Si l’activité consulaire a un prix pour le négoce, elle permet, d’un autre côté, de faire baisser les coûts grâce aux renseignements qu’elle collecte, fonction principale du métier de consul.

Un outil au service de la navigation et du négoce

  • 31 AN B7 453.

41La première fonction du consul est de représenter son pays auprès des autorités locales et de veiller au bon respect de ses droits. Quand les gabares du roi de France entrent en Baltique au cours des années 17701780, Brosseronde, en poste à Elseneur, déploie une intense activité épistolaire pour résoudre l’inextricable problème du salut au passage du Sund. À ceci s’ajoutent des fonctions de police, judiciaires et notariales. Un document de la correspondance consulaire sur les « privilèges et fonctions des consuls étrangers en France31 » qui peut s’appliquer à l’ensemble des consuls, qu’ils soient français ou étrangers, énumère tout ce dont un consul peut éventuellement être chargé :

  • Il a entière police et toute inspection sur les gens de mer, changement, remplacement
  • Il peut faire arrêter, séquestrer les bâtiments de sa nation et les renvoyer à moins que les gens du pays n’y soient intéressés
  • Il peut arrêter également leurs capitaines, matelots et obtenir main-forte à cet effet
  • Il reçoit les déclarations des capitaines, consulats et fait régler les avaries par les experts
  • Il procède aux inventaires des décédés
  • Il procède au sauvetage des navires
  • Il peut établir des vice-consuls
  • Il légalise les actes du pays, reçoit ceux de leurs nationaux et délivre des certificats de vie.
  • 32 RC Tyske Kancelli 361.
  • 33 RC Tyske Kancelli 24, 10/12/1743.

42Le consul a des devoirs en ce qui concerne les individus du pays qu’il représente. Quand un navire fait naufrage, le consul est chargé d’aider puis de rapatrier l’équipage. C’est également le cas quand un corsaire prend un navire dont une partie des matelots est d’une autre nationalité que celle de son pavillon. En 1748, Ployard, consul du Danemark à Marseille, indique qu’un corsaire « avait conduit ici des vaisseaux hollandais où il se trouvait divers matelots sujets de sa Majesté le Roi de Danemark. Lesquels après avoir été détenus quelques jours dans la citadelle de cette ville en ont été délivrés en vertu des ordres de M. de Maurepas… Il s’est donc trouvé 15 matelots danois sans hardes ni argent et sans moyens pour subsister qui m’ont été remis par le commissaire de la marine32 ». Les capitaines scandinaves, âpres au gain, rechignent à exécuter ces rapatriements. En 1743, le consul Gustave Nordingh s’indigne que « tout nouvellement, les maîtres danois et norvégiens font refus de prendre leurs compatriotes naufragés et marins comme eux sans être payés et exigent 80 à 100 livres de France par matelot. Si une telle chose devait avoir lieu, il m’en coûterait 10 000 livres par an33 ».

  • 34 AE Nantes, Amsterdam, 06/04/1764.

43Il est également chargé de veiller à ce que les marins ne désertent pas et de rapatrier les déserteurs, ce qui parfois ne se fait pas sans mal. En 1721 à Amsterdam, le consul de France obtient l’arrestation de deux « matelots déserteurs de profession », mais l’un réussit à s’enfuir et l’autre déclare « qu’il était de la religion réformée et qu’on lui empêchait à bord le libre exercice34 ».

  • 35 RS Gallica, 510.

44En cas de décès d’un compatriote, les services consulaires ont le devoir de s’occuper du défunt et de ses biens. En 1769, Fölsch, consul suédois à Marseille, écrit : « Le jeune Samuel Henry Hintz de Stockholm, arrivé ici il y a environ six mois pour travailler chez quelque négociant, est venu sans argent et sans lettres de recommandation et, étant tombé malade, il est décédé depuis quatre jours. Il laisse environ 900 livres de dettes à payer. Personne n’a voulu fournir les frais d’enterrement. On s’est adressé à moi et je n’ai pu me dispenser de faire le nécessaire et de débourser ces frais. Les créanciers du défunt me sollicitent également pour les faire payer. J’en écris par ce courrier à la mère qui est Mme C. M. Hintz ; on m’a voulu dire qu’elle n’est point dans l’aisance, ce qui me causera encore de l’embarras35. »

  • 36 AN B1 476, 10/08/1743.
  • 37 AE Nantes, Amsterdam, 12/06/1721.

45Les problèmes de police sont fréquents avec les matelots, hommes d’une grande rudesse. La correspondance consulaire rapporte quantités de mutineries, de désertions, de bagarres, de tentatives de meurtre… Les affaires sont parfois difficiles à régler quand elles concernent des marins de plusieurs nationalités36. Certains consuls semblent très stricts sur la tenue de leurs compatriotes. Le consul de France à Amsterdam ne supporte pas de voir les marins français « gueuser » sur le port et les fait systématiquement arrêter37.

46Les consuls ont obligation de fournir des mémoires et des documents concernant le commerce et la navigation et de favoriser le commerce du pays qu’ils représentent. L’ordonnance de 1781 (titre premier) énumère les renseignements exigés des services consulaires français :

Article 14 : des mémoires annuels sur la situation de la navigation et du commerce et sur les moyens de les augmenter.
Article 15 : des états trimestriels et un état annuel du commerce d’entrée et de sortie du département.
Article 16 : un état de la navigation des bâtiments français trimestriel et annuel.

  • 38 AN B3 418, 10/03/1787.

47L’obtention de tous ces renseignements est parfois difficile. En 1786, Pierre Pauly, vice-consul de France à Christiansand, se plaint des difficultés qu’il a avec les officiers de la douane pour obtenir des informations sur le commerce du port38. D’une manière générale, les consuls français qui sont en même temps négociants fournissent la documentation la plus pertinente sur le commerce de leur département. Les mémoires de Raimbert à Saint-Pétersbourg, de Dechezaulx à Bergen ou les courriers d’Hanssen d’Elseneur sont les plus précis et les mieux informés sur la situation économique des pays du Nord.

  • 39 Id., 28/02/1778.
  • 40 AN B7 425, 1766.
  • 41 Pfister-Langanay C., op. cit., p. 259.

48En Norvège, Framery est particulièrement actif pour développer les relations commerciales entre la France et le Nord, d’autant plus qu’il exerce lui-même une activité négociante. Il fait venir des marchands français pour présenter leurs marchandises : « Les preuves et montres des marchandises qu’ils apportent préviennent en leur faveur tous les marchands du pays. Les divers avantages qu’ils y trouvaient surtout à tirer toutes ces marchandises de la première main ce qu’ils ignoraient auparavant, facilitèrent à nos fabricants les moyens de contracter des liaisons utiles qui augmentent à proportion que les négociants d’ici se débarrassent de leurs dettes avec les Hollandais et les Allemands39. » En 1766, il entreprend un voyage en Bretagne « pour y lier un commerce que les produits des deux pays s’offrent si naturellement40 » c’est-à-dire la rogue et le sel. En 1769, il expédie des filets de pêche norvégiens à la Chambre de Commerce de Dunkerque pour aider à améliorer les méthodes de pêche41.

49L’obligation de fournir des renseignements commerciaux est beaucoup plus méthodique dans les pays scandinaves du fait de la volonté des autorités de tutelle qui sont des organismes à vocation économique gérés en partie par des négociants. Les consuls danois et suédois sont dans l’obligation de collecter quantité de renseignements sur les conditions du commerce et de la navigation pour les Bureaux du Commerce de Stockholm ou de Copenhague. Ils rédigent régulièrement des rapports concernant les prix courants des principales marchandises qui intéressent le commerce national, les règles commerciales, les chargements ainsi que des listes récapitulant les navires et les cargaisons ayant quitté les ports de leur département… Ils informent leur autorité de tutelle sur le prix du fret et le taux des assurances. Leur excellente vision du commerce et leur expérience leur permettent de donner des conseils aux armateurs pour que leurs trafics soient le plus profitable.

  • 42 RC Kommercekollegiet 1142, 1786.

50Les consuls scandinaves ont également l’obligation de recenser précisément les entrées et les sorties des navires de leur nation. À Bordeaux, Hanssen fait parvenir une liste mensuelle puis un récapitulatif annuel à Copenhague. Les rapports envoyés par Nordingh de Witt, consul du Danemark à Nantes42 précisent pour chaque port de son département (pour l’année 1786 : Charente, Rochefort, La Rochelle, Saint-Martin-en-Ré, Noirmoutier, Nantes, Lorient et Port-Louis, Concarneau et Douarnenez, Brest, Morlaix et Saint-Malo) :

  • Le jour de l’arrivée des vaisseaux
  • Les noms des capitaines des vaisseaux
  • Les noms des vaisseaux
  • Le domicile des vaisseaux
  • L’endroit d’où viennent les vaisseaux
  • La portée des vaisseaux en last de commerce
  • La charge importée
  • Le fret perçu par les maîtres qui ont déchargé
  • Les jours auxquels les vaisseaux se sont acquittés de la douane
  • Le lieu de la destination
  • La charge exportée
  • Les frais d’avaries ordinaires ou droits d’Amirauté
  • Le numéro et date des passeports turcs
  • Les droits de renouvellement des passeports turcs perçus par le consul –Les droits de consulat perçus.

51Toutes ces rubriques sont rigoureusement complétées hormis celle du fret que les capitaines refusent souvent de communiquer (sauf à Nantes, peut-être parce que le consul y réside) et celles concernant les passeports turcs qui se rapportent uniquement aux vaisseaux allant en Méditerranée.

  • 43 Kongelige Bibliotek.

52Les renseignements collectés par les bureaux de Stockholm ou de Copenhague, sources d’informations d’une valeur considérable, sont ensuite mis à disposition des négociants du pays. Au Danemark, à partir de 1782, est publié « Efteretninger om den inden og udenlanske handel, skibsfart, fabrique og manufactur bæsen som og on agerdyrkningen og Oeconomien i almindelighed43 », (Informations sur le commerce intérieur et extérieur, la navigation, la fabrique et la manufacture, basées sur – et concernant – l’agriculture et l’économie en général), résumé de toutes les informations compilées par le Bureau du Commerce à destination des acteurs économiques du pays.

  • 44 RC Tyske Kancelli 23, 06/11/1758.

53Les consuls-négociants du Nord sont très actifs pour rechercher de nouveaux marchés pour les activités de leur pays. Au début de la guerre de Sept Ans, Nordingh de Witt en poste à Nantes propose d’approvisionner en bœuf salé les munitionnaires de la Marine à Rochefort et à Brest en remplacement du bœuf irlandais et organise plusieurs expéditions vers les arsenaux français44

54En cas de conflit, les services consulaires sont idéalement placés pour fournir des renseignements sur les puissances ennemies. Ils constituent un véritable service d’espionnage en terre étrangère. Le poste de Hambourg est stratégique, véritable carrefour d’informations économiques mais aussi politiques. La ville hanséatique est le centre de regroupement des courriers qui permettent aux autorités de connaître la situation de l’ensemble de l’Europe du Nord.

  • 45 AN B3 419, 28/08/1744.

55À Elseneur, Hanssen fournit quantité d’informations sur les passages des flottes militaires, les convois anglais… En 1774, la correspondance consulaire au départ de la Suède signale un navire suédois qui charge à Stockholm 250 pièces de canons et des caisses de balles pour l’Angleterre : « il serait souhaitable que nos armateurs puissent s’emparer de ce vaisseau… à deux mâts nommé le Sr. Olof, appartenant au sr. Olof Siöberg ayant un cheval blanc à la proue et une petite galerie plate. Le pilote se nomme Jean Holsten. Il partira de Stockholm le 1er septembre pour Amsterdam ou pour Londres… C’est Mr. Guennis, négociant anglais établi à Stockholm qui l’a fait charger. On a mis des planches de sapin sur toute la cargaison de sorte que les canons, ni les caisses n’apparaissent. Le pilote de ce navire aura des doubles documents, ce dont il s’est vanté luimême45. » Par contre, du fait de leur neutralité et de leurs soucis avant tout commerciaux puisqu’ils sont négociants, les consuls scandinaves en France ne s’occupent guère des choses politiques, hormis en Méditerranée en raison du problème des Barbaresques mais, là aussi, le souci est avant tout économique.

Les difficultés de fonctionnement des services français

Des traitements insuffisants

  • 46 AN B7 418.
  • 47 Mézin A., op. cit., p. 66.

56Les consuls français reçoivent un traitement, la plupart du temps très insuffisant : « les appointements sont si bornés qu’ils suffisent à peine au plus strict nécessaire… ils ont été fixés sur un pied beaucoup trop bas46… » Selon Anne Mézin, « en général, les consuls connaissent de grandes difficultés pécuniaires pendant l’exercice de leurs fonctions en raison de leur train de vie parfois démesuré et des avances faites pour le service47 ». Brosseronde, consul à Elseneur, déclare avoir contracté 30 000 livres de dettes en exerçant sa charge dans le port danois. Les traitements revalorisés en 1775 demeurent ensuite fixes jusqu’en 1791. Les difficultés persistent, les pertes avec le taux de change pouvant atteindre des proportions catastrophiques, à l’exemple de Hambourg (70 %).

La rémunération des consuls et des vice-consuls français (en livres tournois)

La rémunération des consuls et des vice-consuls français (en livres tournois)

Source : Mézin A., op. cit., p. 67-68.

  • 48 Ordonnance de la marine d’août 1681, article 27, livre premier, titre IX.

57Ces traitements sont complétés par des droits sur le trafic maritime. À leur arrivée dans un port étranger, les capitaines sont dans l’obligation de se présenter au consul afin « de leur représenter leurs congés, de faire leur rapport de leur voyage, et de prendre d’eux, en partant, un certificat du temps de leur arrivée et départ, et de l’état et qualité de leur chargement48 »et de payer des droits consulaires. Les capitaines essaient d’éviter cette charge supplémentaire. À Dantzig, le consul Matthy se plaint continuellement des capitaines qui l’ignorent. En août 1725, quatre navires de Dunkerque et un de Saint-Malosont à quai dans le port polonais et tous refusent de lui rendre visite.

  • 49 AN B1 479, 09/01/1753.
  • 50 Ibid., 23/06/1756.
  • 51 Ibid., 23/07/1756.

58Les consuls français perçoivent une autre rétribution sur les certificats d’acquits-à-caution. Ces documents ne cessent de poser problème à Dantzig. En 1752, le négociant Soermans, connu pour être particulièrement chicanier49, fait certifier ses acquits-à-caution, avec plusieurs de ses collègues, par un certain Bonhorst, magistrat de la ville, dont la signature est acceptée par le bureau de Bordeaux. Les commissionnaires du port français se sont d’ailleurs arrangés pour que les documents prescrivent le nom du magistrat au lieu de celui du consul. En 1756, Jean-François Dumont, nouveau résident français dans le port polonais se plaint que Hanssen, consul français à Elseneur, propose aux négociants de Dantzig et de Königsberg d’établir les certificats d’exportation, c’est-à-dire designer les acquits-à-caution « en payant la moitié d’un cens courant50 ».L’idée d’Hanssen est un succès puisque les bureaux de la douane de France reconnaissent sa signature. Toujours en 1756, Dumont dénonce une autre pratique destinée à réduire les droits sur les marchandises livrées à Dantzig : « Les autres (négociants), profitant de la franchise du port de Hambourg y destinent leurs marchandises de leur départ des ports de France et y étant déchargées les font venir par terre jusqu’ici (Dantzig). Au moyen de quoi, non seulement ils épargnent sur le droit de certification des acquits-à-caution mais encore sur celui du Sund dont ils évitent le passage sans parler de l’exemption des droits de douane de cette ville qui forme encore un objet ; toutes les marchandises qui arrivent par terre ne payant absolument rien à l’entrée51. »

  • 52 Au xviiie siècle, les seuls consuls suédois salariés ont ceux d’Alger, de Tunis, de Tripoli et du (...)

59Contrairement à leurs homologues français, les consuls suédois n’ont pas de traitement52 et sont nommés comme consuls honoraires sans aucune rémunération officielle. La seule rétribution fixée par les autorités se limite au paiement d’un droit par chaque navire suédois abordant dans un port de leur district. Ils peuvent également toucher quelques gratifications supplémentaires en aidant les sujets suédois qui ont des problèmes particuliers. Les plaintes des consuls sur la faible rémunération de leur charge sont constantes mais leur discours s’oppose à celui des négociants qui n’acceptent pas l’augmentation des droits sur les navires. Pour ces derniers, les taxes auraient pour conséquence de faire obstacle au développement du commerce suédois.

  • 53 Müller L. et Ojala J., op. cit., p. 36.

60Les consuls du royaume scandinave doivent l’essentiel de leurs revenus à l’activité négociante, tout particulièrement celle de commissionnaire. La seule interdiction qui leur est faite est celle de ne pas participer à l’affrètement maritime. La grande originalité du système est que tous les navires suédois abordant un port d’un département ne paient pas de droits si le consul a la charge de la commission de la cargaison. Si les marchandises sont adressées à un commissionnaire autre que le consul, le règlement des droits devient obligatoire. Pour éviter un double paiement, la majorité des négociants choisissent naturellement d’expédier leurs marchandises à l’ordre du consul. Pour le Bureau du Commerce, il est préférable de concentrer la vente des produits suédois au sein d’une même entreprise que de diviser les commissions entre de multiples agents, le plus souvent étrangers. Une entreprise de taille importante garantit la vente des produits au meilleur prix et au bon moment. En 1790, l’important négociant finlandais Abraham Falander fait environ la moitié de ses ventes à l’étranger par l’intermédiaire des consuls suédois53

  • 54 Jørgensen A., « Af konsulatsvæsnets historie i det 18. århundrede », Erhvervshistorisk Årbog, 1951 (...)
  • 55 RC Tyske Kancelli 24, 01/1770.

61La rémunération des services consulaires danois54 est également constituée d’un droit que doivent payer les navires qui abordent dans les ports de leurs départements. Ces consuls ont les mêmes problèmes que leurs homologues français dans le Nord. La plupart des capitaines ne se présentent aux consulats « que quand ils se trouvent forcés par les circonstances… dans le cas de mauvaises affaires55 ». Un certain nombre de navires refusent de payer car ils ont déjà réglé le consulat lors d’une relâche, prétendue ou réelle, à La Rochelle, Marennes ou ailleurs, les consulats danois ne manquant pas sur le littoral atlantique. En règle générale, les capitaines renâclent à s’acquitter des droits consulaires qu’ils considèrent comme trop élevés.

  • 56 RC Tyske Kancelli 24, 20/11/1747.

62De leur côté, les consuls se plaignent que le nombre de navires est trop peu important pour leur assurer une rémunération correcte. Les avantages commerciaux qu’ils retirent de leur poste compensent cependant largement le non paiement des droits ou l’insuffisance de navires. Certains prétendants à un poste consulaire n’hésitent d’ailleurs pas à renoncer à leurs droits pour obtenir la charge. En 1747, François Bollen, qui aspire au titre de consul de Danemark à Bayonne déclare : « ce n’est pas, en effet, l’espoir d’une rétribution mercenaire qui me fait aspirer à l’honneur du titre » et « afin même que la nation danoise ne soit point surchargée par cet établissement, (je) renonce volontiers aux droits qu’ont accoutumé de prendre les autres consuls nationaux sur les navires de leur nation56 »

Le désintérêt des autorités françaises

  • 57 AN B7 425, 1766.
  • 58 Ibid.
  • 59 AN B1 452, 16 et 20/11/1766.

63Le choix des consuls n’est pas toujours aisé et il arrive parfois que les personnes choisies manquent singulièrement de compétences. James Brown, consul de France à Trondheim entre 1758 et 1767, se fait remarquer par son incapacité à servir les intérêts nationaux. Tout d’abord il ne parle pas le français d’où son « impuissance de correspondre avec les négociants57 » qu’il représente. Ensuite, il montre peu d’enthousiasme dans ses affaires avec la France. Au cours des années 1760, il est chargé d’une commission sur des achats de cuivre pour des négociants français mais « il apporta tant de longueur, tant d’inconvénient à l’exécuter, il chargea cette partie de tant de frais et le cuivre fut si mal choisi que cette tentative dégoûta les Français de faire une nouvelle demande et nous priva des suites avantageuses qu’elle aurait eu de l’accomplissement de notre commerce si elle avait été exécutée fidèlement58 ». Selon Ogier, ambassadeur à Copenhague, James Brown, « anglais d’origine, homme borné qui n’a aucune relation avec les ports de France », n’est pas susceptible d’entretenir et de favoriser le commerce de France. En conséquence, comme il est « absolument incapable de remplir cette place utilement pour l’avantage de la nation59 », il est destitué au profit de Framery.

  • 60 RC Tyske Kancelli 244.
  • 61 RC Tyske Kancelli 24, 23/04/1740.

64Les consuls scandinaves posent parfois quelques problèmes à leur autorité de tutelle. En 1740, Johan-Jacob Leers, en charge du poste danois à Bordeaux, est révoqué à la suite de diverses malversations et plusieurs faillites. De plus, en 1737, il fait de fausses traductions des patentes du Roi de Danemark pour s’attribuer le titre de consul général60 À la date de sa révocation, « il est réduit à n’oser sortir du Château-Trompette, un des forts de cette ville où il s’est réfugié… C’est un asile où ses créanciers ne peuvent mettre à exécution les contraintes par corps qu’ils ont contre lui sans un ordre exprès du roi de France61 ».

  • 62 RC Kommercekollegiet 1135, 12/08/1784.

65En 1784, Compigné, consul à Rouen, nomme vice-consul M. Maréchal Duclos « négociant très connu au dit lieu de Granville sur les bonnes attestations » qu’on lui a envoyé62 L’année suivante, il lui faut déchanter et révoquer le personnage qui a mécontenté un capitaine et qui n’a aucune des qualités nécessaires pour remplir cette commission.

66L’absence d’intérêt pour la navigation nationale et les difficultés financières de l’Etat français ont parfois des conséquences fâcheuses sur le fonctionnement des services consulaires.

  • 63 AN B1 451, 18/12/1728.

67Le poste d’Elseneur est caractéristique de la négligence des autorités françaises envers les intérêts du commerce. La ville est d’une importance capitale, tant au niveau stratégique qu’économique, puisqu’elle commande l’entrée de la Baltique et est le lieu de prélèvement de la douane du Sund où s’arrêtent tous les navires de commerce. L’activité négociante y est considérable : les navires viennent y prendre leurs ordres et toutes les grandes maisons de commerce y ont des correspondants… Un rapport de 1728 constate qu’il « n’y a aucun consul de France à Copenhague ni dans les autres ports du Danemark à cause que les sujets du roi n’y font point de commerce. Il y a seulement à Elseneur un vice-consul de la nation nommé Hanssen. Cependant le sr. de Rochefort a été nommé pour résider à ce premier port mais sur ce qu’il a représenté qu’il y ferait un séjour inutile, il lui a été permis de résider à Hambourg jusqu’à nouvel ordre63 ».

  • 64 AN B1 452, 25/06/1776.
  • 65 AN B7 426, 01/08/1767.

68En août 1760, Jean-Georg Hanssen, devenu entre temps consul d’Elseneur, meurt. Le négociant Conrad Hanssen, fils du consul décédé et « particulier fort aisé64 », propose de remplacer son père mais les autorités décident de différer son remplacement car le commerce français en Baltique souffre d’une grande langueur ; un consul n’est donc pas nécessaire. Ogier, ambassadeur de France à Copenhague, insiste sur le caractère indispensable du consulat pour certifier les acquits-à-caution ou rapatrier les gens de mer français de la Baltique, mais les autorités restent inflexibles. Le poste n’est pourvu qu’en septembre 1776, soit seize ans après la mort de Hanssen. Entre temps, « les commerçants français n’ont aucune personne de leur nation à Elseneur, ils doivent s’adresser pour le soin d’acquitter les droits à des négociants du lieu dont le commerce principal consiste en ces sortes de commissions. On peut assurer qu’on ne connaît rien d’autre d’aussi révoltant que la cupidité de ces courtiers. D’accord avec les gens de la douane parce que leur droit de commission croît en proportion de la somme payée et arbitre de l’évaluation du change, on en reçoit des mémoires effrayants chargés de faux frais onéreux65 ».

  • 66 AN B1 485 reg 1, 11/05/1778.

69Guillaume-François de Brosseronde, secrétaire auprès de l’ambassade de France à Copenhague, obtient, en récompense de ses services, le poste d’Elseneur. Le nouveau promu a des difficultés à accomplir son travail car comme il l’indique lui-même en 1778 : « comme tout se traite ici en langue danoise ce que je n’entend point… il me fallait recourir à des traducteurs. » Il est ainsi obligé d’attacher à la chancellerie de son consulat le « sieur Didier Perrot, français… qui parle fort bien le danois et l’allemand66 ».

  • 67 AN B1 452, 13/06/1780.
  • 68 Ibidem, 15/06/1790.

70Quelques années plus tard, La Houze, ambassadeur à Copenhague, demande la création d’un vice-consulat pour Didier Perrot, son ancien chancelier. Celui-ci semble la personne idéale pour mettre en place de solides relations commerciales avec la France : « M. de Sartine… voulut bien l’attacher au consulat d’Elseneur en qualité de chancelier dont il remplit gratuitement l’espace de deux années les fonctions auprès de M. de Brosseronde. Revenu ensuite à Copenhague pour occuper une place de commis en chef dans une des premières maisons de commerce de cette capitale, les nouvelles lumières que lui a acquise une correspondance suivie avec les meilleures maisons de Norvège, de Suède, de Russie, jointes à la connaissance des langues danoise et allemande… » La réponse des autorités est laconique : « les conjonctures ne permettent pas… la création d’une nouvelle place67. » Quelques années plus tard, en 1790, Perrot pose sa candidature pour obtenir le poste de vice-consul à Christiansand, vacant avec la mort de Dechezaulx-Desprez, mais cette fois, « il n’y a pas de remplacement prévu68 ».

  • 69 AN B3 418, 07/1734.

71Ce manque d’ambition se retrouve dans la création d’un consulat à Berlin proposé par le diplomate de Villardeau en 1734, poste qui pourrait centraliser les correspondances des « consuls, commissaires et négociants français établis à Riga, Königsberg, Dantzig, Lübeck, Hambourg, Copenhague et autres ports et autres villes de l’Allemagne69 ». Ce poste ne voit pas le jour alors que la Prusse est devenue un des principaux partenaires de la France en Europe septentrionale.

72Le fonctionnement des consulats français dans le Nord est un exemple du manque d’ambition des autorités pour construire de véritables réseaux dans le but d’organiser les bases d’un commerce actif avec les pays nordiques. L’explication habituelle est qu’il n’y a pas besoin d’établir un consul dans une place où les Français ne font pas de commerce.

Notes

1 Mézin A., Les consuls de France au siècle des Lumières (1715-1792), Paris, Imprimerie nationale, 1997, p. 9.

2 AN B1 452, 1756.

3 AN B1 451, 23/07/1748.

4 AN B3 419, 26/02/1751.

5 Helsingør Kommunes Museer, Restaureringen af Helsingør Domkirke 2000-2001 og undersøgelserne af de borgerlige begravelser, Helsingør, 2001, p. 56.

6 AN B3 420, 1752.

7 AN B1 609, 03/03/1755.

8 AN B1 620 29/07/1763.

9 Pfister-Langanay C., Ports, navires et négociants à Dunkerque (1662-1672), Dunkerque, Société dunkerqoise d’Histoire et d’Archéologie, 1985, p. 428 et suiv.

10 Wiesener A.-M., « Om utenlanske konsuler i Bergen », Bergens Historiske Forening, 22-1916, p. 36.

11 ADM 11 B 53, 29/03/1767.

12 Wiesener A.-M., op. cit., p. 17.

13 Tardy P., op. cit., p. 173.

14 Framery Pierre-Louis-Marie réside à Bergen pour des raisons d’éloignement et de difficultés d’approvisionnement de la ville de Trondheim.

15 ADM 11 B 53, 08/1763, 04/1765 et 04/1778.

16 Baron S.H., op. cit., p. 3132.

17 AN B1 611, 08/11/1771.

18 Mézin A., op. cit., p. 16.

19 Müller L., Consuls, Corsairs and Commerce. The Swedish Consular Service and Long-distance Shipping, 17201815, Uppsala, Studia Historica Upsaliensia 213, 2004.

20 RS Kommercekollegium, Huduarkivet EVI a : 347, Skrivelser från Konsuler Nantes, 15/07/1775.

21 RC Tyske kancelli 23.

22 RS Gallica 516, 18/01/1776.

23 RC Tyske kancelli 24, 20/11/1747.

24 Ibid., 02/04/1759.

25 AN B1 452.

26 RS Gallica 516, 26/05/1786.

27 Müller L. et Ojala J., « Consular Services of the Nordic Countries during the Eighteenth and Nineteenth Centuries ; DidThey Really Work ? », Research in Maritime History, n° 22, 2002, p. 36.

28 Constant G., « De Hambourg à Marseille. Jean-Christophe Hornbostel (1736-1832) », Marseille, 42-1960, 16.

29 AN B1 451, 23/07/1753.

30 RC Kommercekollegiet 1119, 24/11/1775.

31 AN B7 453.

32 RC Tyske Kancelli 361.

33 RC Tyske Kancelli 24, 10/12/1743.

34 AE Nantes, Amsterdam, 06/04/1764.

35 RS Gallica, 510.

36 AN B1 476, 10/08/1743.

37 AE Nantes, Amsterdam, 12/06/1721.

38 AN B3 418, 10/03/1787.

39 Id., 28/02/1778.

40 AN B7 425, 1766.

41 Pfister-Langanay C., op. cit., p. 259.

42 RC Kommercekollegiet 1142, 1786.

43 Kongelige Bibliotek.

44 RC Tyske Kancelli 23, 06/11/1758.

45 AN B3 419, 28/08/1744.

46 AN B7 418.

47 Mézin A., op. cit., p. 66.

48 Ordonnance de la marine d’août 1681, article 27, livre premier, titre IX.

49 AN B1 479, 09/01/1753.

50 Ibid., 23/06/1756.

51 Ibid., 23/07/1756.

52 Au xviiie siècle, les seuls consuls suédois salariés ont ceux d’Alger, de Tunis, de Tripoli et du Maroc, conséquence du caractère très particulier de ces charges. Ceci est également vrai pour le Danemark.

53 Müller L. et Ojala J., op. cit., p. 36.

54 Jørgensen A., « Af konsulatsvæsnets historie i det 18. århundrede », Erhvervshistorisk Årbog, 1951, p. 3761.

55 RC Tyske Kancelli 24, 01/1770.

56 RC Tyske Kancelli 24, 20/11/1747.

57 AN B7 425, 1766.

58 Ibid.

59 AN B1 452, 16 et 20/11/1766.

60 RC Tyske Kancelli 244.

61 RC Tyske Kancelli 24, 23/04/1740.

62 RC Kommercekollegiet 1135, 12/08/1784.

63 AN B1 451, 18/12/1728.

64 AN B1 452, 25/06/1776.

65 AN B7 426, 01/08/1767.

66 AN B1 485 reg 1, 11/05/1778.

67 AN B1 452, 13/06/1780.

68 Ibidem, 15/06/1790.

69 AN B3 418, 07/1734.

Table des illustrations

Titre Le réseau des consuls danois en Europe (1787)
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Titre Les services consulaires danois et suédois en France
Légende Source : Müller L., op. cit. et Jørgensen A., « Af konsulatsvænets historie i det 18. Århundrede », Erhvervhistorisk Årbog, 1951, p. 60.
URL http://books.openedition.org/pur/docannexe/image/21525/img-2.png
Fichier image/png, 36k
Titre La rémunération des consuls et des vice-consuls français (en livres tournois)
Légende Source : Mézin A., op. cit., p. 67-68.
URL http://books.openedition.org/pur/docannexe/image/21525/img-3.png
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