Version classiqueVersion mobile

Culture, enseignement et société en Occident aux XIIe et XIIIe siècles

 | 
Jacques Verger

Introduction

Entrées d'index

Géographique :

France

Texte intégral

1Le titre donné à ce livre, la périodisation adoptée, la conception même du sujet mise en œuvre appellent quelques explications préliminaires qui aideront le lecteur, espérons-le, à mieux comprendre ce qu'il trouvera - ou ne trouvera pas - dans la suite de l'ouvrage.

Une histoire culturelle

Culture

2Comme l'indique l'ordre même des mots du titre, ce livre se veut d'abord livre d'histoire culturelle. Non pas donc histoire intellectuelle traditionnelle, histoire désincarnée des idées ou des savoirs, mais mise en perspective de ceux-ci dans le contexte institutionnel, politique, social de leur temps. Précisons cependant davantage, car le mot culture est susceptible de recevoir, dans la langue d'aujourd'hui, bien des acceptions diverses. Entendue au sens le plus large comme l'ensemble des connaissances et des représentations du monde dont un individu ou un groupe social dispose à un moment donné, la notion de culture peut renvoyer à une multitude de croyances, de mythes, d'images, de savoir-faire et de manières d'être.

  • 1 Cf. en particulier, Clanchy, M. T., From Memory to Written Record. England, 1066-1307, Londres, 197 (...)

3Ce n'est pas de cela qu'il s'agira ici. Culture sera pris en un sens plus restreint. Parler de « culture savante »serait cependant sans doute trop restrictif et élitiste. Parler de « culture écrite »serait en fait trop vague. Même dans des sociétés comme la société occidentale au Moyen Âge, où la majorité de la population était analphabète et la parole orale, souvent doublée d'une gestuelle codée, certainement prépondérante comme support de la communication, l'écrit, sous des formes multiples, fût-ce comme simple relais ou annexe de l'oralité et de la mémoire, occupe en fait une place considérable, quoique diffuse et souvent insaisissable. Surtout à partir des xie-xiie siècles, presque aucune forme de vie religieuse, judiciaire, administrative, économique, pour ne pas parler des relations courantes entre les individus, les familles ou les groupes sociaux, n'a pu se maintenir sans le recours au moins marginal à l'écriture, latine ou vernaculaire, et donc à des hommes capables de la manier. Cette diffusion capillaire de la « literacy », bien mise en valeur notamment par certains historiens anglo-saxons1, est certainement un des aspects originaux et intéressants de l'histoire culturelle du Moyen Âge, mais ce n'est pas non plus de cela qu'il sera question ici. En fait, la culture dont nous allons parler sera simplement celle que l'on pourrait qualifier, si le mot n'avait pris de nos jours une nuance un peu péjorative, de « culture scolaire »; je veux dire par là que nous prendrons essentiellement en compte l’ensemble des savoirs « enseignés », c’est-à-dire normalement transmis par l’école ou à la rigueur par d’autres types connexes d’« institutions culturelles », telles que, pour notre époque, bibliothèques, monastères, chancelleries, cours princières ou ecclésiastiques. Bien que le champ couvert par ces savoirs enseignés se soit progressivement beaucoup élargi, précisément à l’époque ici considérée, il n’en s’agissait pas moins d’un corpus limité, clos, défini d’ailleurs, tant dans ses contours que dans ses hiérarchies internes, par des textes de nature théorique (classifications du savoir) ou normative (programmes et statuts scolaires). On verra plus loin (chapitre II) que cette volonté classificatoire a eu pour effet de laisser en dehors du champ des savoirs diffusés par l’école des pans considérables de la culture écrite, vernaculaire au premier chef, mais même, dans certains cas, latine. Ceci ne veut pas dire que les disciplines ainsi écartées, même si elles en ont généralement souffert, aient été inévitablement vouées au déclin et à l’oubli, mais leur rejet dans le domaine des pratiques coutumières et des transmissions empiriques leur a conféré un statut tout différent de celui reconnu aux savoirs légitimes, dont il était jugé bon de confier à l’école, c’est-à-dire à une institution spécifique d’éducation, la conservation et la diffusion, de génération en génération.

Enseignement

4Ce livre sera donc, pour une part importante, histoire de l’école et de l’enseignement, c’est-à-dire histoire des politiques et des institutions d’enseignement, des méthodes pédagogiques, des contenus des savoirs inculqués. Il s’agit là d’un secteur relativement bien balisé par un certain nombre de recherches récentes mais où celles-ci interdisent précisément de se contenter des descriptions approximatives et des schémas simplistes qui ont longtemps prévalu.

5S’agissant des institutions, on ne peut se contenter de suivre le passage, perçu comme un progrès continu et irrésistible, des écoles monastiques aux écoles cathédrales et de celles-ci aux universités. Si telle est bien la ligne générale de l’évolution, ce fut au prix de bien des hésitations, des freinages, voire des retours en arrière. Les systèmes anciens survivent parfois longtemps, les nouveaux, qui ne sont pas forcément conscients de l’être, ne se dégagent que très progressivement des formes qui les ont précédés. Enfin, d’une région à l’autre de la Chrétienté, en fonction des situations locales et parfois du simple hasard (du moins le semble-t-il en l’état actuel de nos connaissances), une grande diversité de solutions institutionnelles a été mise en œuvre. L’analyse historique doit y être attentive. Si modèles il y a eu, leur succès a toujours été partiel et strictement limité par les contraintes du contexte social, politique et religieux.

6La même prudence s’impose dans l’étude des méthodes et des contenus d’enseignement. Bien sûr, ceux-ci étaient officiellement placés sous le signe de l’universalisme chrétien et il n’y a certainement pas de culture nationale ou régionale, au plan de l’école qui nous intéresse ici, aux xiie et xiiie siècles. L’usage généralisé du latin, comme la référence à un système commun et validé par l’Église de classification et de légitimation des savoirs, garantissait en théorie l’homogénéité de l’institution scolaire à travers toute la Chrétienté. Mais, en pratique, tout change d’un lieu et d’une époque à l’autre. Certaines disciplines, assidûment cultivées ici, seront totalement négligées ailleurs. Dans certaines écoles, la leçon magistrale sera privilégiée, dans d’autres on fera au contraire grande place aux débats contradictoires entre étudiants. Selon les époques et les lieux, les textes de base étudiés – les « autorités »– ne seront pas les mêmes, l’activité croissante des traducteurs et la mise en place d’un véritable marché du livre scolaire ayant globalement pour effet d’accroître la liste des textes disponibles et d’en accélérer la diffusion et la circulation.

7Il faudra enfin prendre garde à l’écart, plus ou moins grand mais toujours existant, entre la norme des statuts et la pratique de l’enseignement ; certains livres font défaut, beaucoup d’étudiants n’accomplissent que des cursus incomplets ; des maîtres audacieux s’aventurent parfois, à leurs risques et périls, au-delà du champ balisé des programmes officiels.

Société

8Mais on ne peut s’en tenir à une simple histoire de l’institution scolaire, d’autant que, même si celle-ci acquiert volontiers une forte tendance à l’autonomie et même s’il y a eu, à toutes les époques, d’éternels étudiants et des professeurs enfermés dans leur tour d’ivoire, l’école ne représente pas normalement un milieu stable. C’est, sauf pour une petite minorité, un lieu de passage, en même temps qu’un carrefour d’influences rivales. L’école est en effet un enjeu vers lequel convergent les ambitions des écoliers (et de leurs familles), les exigences de l’Église et du prince, les attentes et parfois les craintes de la société environnante.

9Il nous faudra donc replacer l’histoire de l’enseignement dans tout ce contexte social, chercher en quoi la culture que diffuse l’école exprime précisément le rapport dialectique entre celle-ci et la société qui l’entoure. Disons tout de suite que ce n’est pas là tâche facile d’autant que pour l’époque qui nous intéresse (xiie-xiiie siècles) les méthodes classiques de l’histoire sociale ne satisfont que très partiellement nos curiosités.

10Partielles et lacunaires, les sources des xiie-xiiie siècles ne livrent presque jamais de données quantitatives, sauf à la rigueur pour des sous-groupes très restreints. L’identification des personnages est également très incertaine et les paramètres les plus classiques de la sociologie historique – origine sociale et géographique, âge, liens de famille, cursus d’études, carrière ultérieure, fortune, etc. - ne peuvent être établis, à grand peine, que pour des individus isolés mais jamais par séries continues, statistiquement significatives. Plus nombreuses, les sources normatives ou littéraires ne nous sont elles-mêmes parvenues, malgré tout, que de manière souvent aléatoire et leurs indications chronologiques, quand elles existent, doivent être prises avec prudence : telle institution a pu se mettre en place des années, voire des décennies, avant qu’un document ne vienne nous en révéler l’existence et bien des textes, des traductions par exemple, ont pu circuler très antérieurement au plus ancien manuscrit qui nous en est parvenu.

  • 2 C'est une des raisons pour lesquelles j'ai concentré sur les xive et xve s. le livre que j'ai récem (...)

11Dans ces conditions, il est difficile, pour les xiie et xiiie siècles, de cerner au sein de la société occidentale le groupe des gens de savoir issus des écoles, car les sources spécifiques sont vraiment insuffisantes. Il est vrai qu’eux-mêmes se dégageaient peut-être encore mal de la société environnante ; l’époque suivante (xive-xve siècles) qui aura beaucoup plus le culte du diplôme et le respect des compétences techniques, leur donnera plus de place ou, en tout cas, de visibilité sociale2

12Il faut donc bien souvent, pour cette époque, se contenter d’une approche qualitative des facteurs sociaux. C’est de cette manière qu’il faudra se demander quelles furent les attitudes vis-à-vis de l’école, de l’Église, des princes, des villes, des divers groupes sociaux, dominants ou dominés. L’ont-ils favorisée ? L’ont-ils fréquentée ? Qu’en attendaient-ils et, à l’occasion, qu’en redoutaient-ils ? Mais l’école ne se contentait pas de répondre à un certain nombre de besoins politiques et sociaux. Elle-même avait ses apports propres et contribuait pour sa part au changement social. Ne parlons évidemment pas, pour cette époque, de « formation professionnelle » ; les savoirs diffusés par les écoles et les universités médiévales étaient généralement trop abstraits pour se prêter à une mise en pratique immédiate et beaucoup d’étudiants ne faisaient d’ailleurs que des études incomplètes. Mais il est en revanche clair que pour tous ceux qui ont fréquenté peu ou prou l’école, les savoirs – ou les bribes de savoir – qu’ils y ont acquis constituaient un bagage culturel dont ils gardaient souvenir leur vie durant et qui orientaient leur vision ultérieure du monde et leur manière de s’y comporter. Vérifier l’hypothèse que, par les disciplines qu’elles a mises ou remises en honneur, les doctrines originales qu’elle a pu créer et diffuser, les méthodes nouvelles de travail intellectuel qu’elle a élaborées, l’école des xiie et xiiie siècle a influé sur les transformations sociales et politiques de son temps autant qu’elle en était le reflet, sera une des ambitions de ce livre.

De la Renaissance du xiie siècle aux premières crises de la scolastique

13Le découpage chronologique adopté pour ce livre implique que la période retenue (xiie-xiiie siècle) ait, au moins pour l’histoire culturelle, une certaine unité. Il me semble en tout cas qu’elle s’oppose assez nettement aux périodes qui la précèdent et qui la suivent.

  • 3 En particulier Riché, P., Éducation et culture dans l'Occident barbare, VIe-VIIIe siècles, Paris, L (...)
  • 4 Je pense notamment à Radding, Ch. M., The Origins of Médiéval Jurisprudence. Pavia and Bologna, 850 (...)

14Ce n’est pas mépriser les incontestables richesses intellectuelles du haut Moyen Âge, bien mises en valeur par les nombreux travaux de Pierre Riché3, que de dire que cette période se présente malgré tout, sur le plan culturel, comme une période relativement immobile, fermée aux apports extérieurs, strictement concentrée sur les disciplines grammaticales et religieuses, où tout ou presque se passe dans les grands monastères et accessoirement dans les cours de quelques princes mécènes, autant dire dans des milieux extrêmement étroits. Si dans d’autres domaines, ceux notamment de la démographie, de l’économie et des structures sociales, les grandes mutations (sur l’importance et la brutalité desquelles on discute d’ailleurs toujours) ont dû se produire aux alentours de l’An Mil, voire dès le xe siècle, dans le domaine de la culture et de l’éducation, il semble bien qu’il y ait eu un certain retard et qu’il faille attendre les dernières décennies du xie siècle pour voir se produire des changements vraiment significatifs. Certains ont récemment cru pouvoir faire démarrer le mouvement plus tôt et de manière plus progressive, mais c’est sur la foi, me semble-t-il, d’indices bien ténus4. Même si dans des régions comme l’Italie un certain nombre de nouveautés remontent vraisemblablement à la seconde moitié du xie siècle, le xiie n’en reste pas moins, globalement, le grand siècle de l’essor culturel de l’Occident médiéval.

  • 5 Haskins, Ch. H., The Renaissance of the Twelfth Century, Cambridge Mass., 1927.

15C’est dans un livre classique publié en 1927 que le médiéviste américain Charles H. Haskins a, pour désigner ce grand mouvement d’essor, lancé l’expression de « Renaissance du xiie siècle5 ». Dans son esprit, il s’agissait de montrer que ce mouvement était d’importance comparable à celui de la Renaissance par excellence, celle des xve-xvie siècles, qu’il en partageait certains traits fondamentaux (le retour aux Classiques, le renouveau de l’éducation, une certaine distance par rapport à la religion traditionnelle) et avait également contribué au développement de l’humanisme occidental. Par la suite, certains historiens ont contesté la pertinence du concept de renaissance appliqué au xiie siècle, relevant en particulier que les hommes de ce temps, à la différence de ceux du xve, n’avaient pas eu le sentiment de devoir rompre avec des siècles d’obscurité barbare pour redonner vie à un passé aboli ; au xiie siècle, le sentiment de continuité avec une Romanité toujours vivante était beaucoup plus fort et il vaudrait mieux parler d’efflorescence et de renovatio que de renaissance. L’expression était cependant bien trouvée et elle a finalement survécu.

  • 6 Dans sa grande synthèse Histoire et culture historique dans l'Occident médiéval, 2e éd., paris, Aub (...)

16Quoi qu’il en soit de la dénomination retenue, il est incontestable que le xiie siècle a été, plus ou moins tôt et plus ou moins intensément selon les pays mais, au total, à peu près partout en Occident, un temps de mutation et d’essor sur le plan culturel. Même en laissant de côté, puisque nous l’avons exclu de ce livre, tout ce qui concerne l’art (épanouissement de l’art roman et naissance du gothique), la littérature vernaculaire (chansons de geste et roman courtois), l’historiographie (dont les grandes histoires universelles de Sigebert de Gembloux et Otton de Freising marquent l’âge d’or6), on ne peut manquer de relever l’ampleur des mutations du xiie siècle dans les domaines qui nous intéressent ici, tant au plan des institutions (renouveau de l’école) que des idées (essor des disciplines profanes et de la théologie scolastique) et des hommes (naissance de l’« intellectuel »médiéval).

17Cette croissance rapide, souvent désordonnée au point d’échapper parfois au contrôle des autorités, ne s’est pas prolongée indéfiniment. L’inflexion se marque, me semble-t-il, après des décennies d’essor continu, dans le dernier tiers du siècle. Le xiiie siècle n’est donc pas, quant à lui, dans le simple prolongement du xiie, ce qui justifie que nous ayons divisé ce livre en deux grandes parties en fonction de cette césure chronologique majeure.

  • 7 Dans sa Préface à Gervais de Tilbury, Le Livre des Merveilles, trad. et commenté par A. Duchesne, P (...)

18À coup sûr, du xiie au xiiie siècle, les éléments de continuité ne manquent pas. Les foyers majeurs d’enseignement et de culture – Paris, Bologne – sont restés les mêmes, les disciplines étudiées et les méthodes de travail intellectuel aussi, tout en s’enrichissant progressivement ; la position sociale des hommes de savoir - magistri (= maîtres), « philosophes », docteurs ès-lois, etc. - ne s’est pas fondamentalement transformée. On ne peut cependant parler de poursuite pure et simple de la croissance. Il ne s’agit certes pas pour autant, sauf cas très particuliers (celui des écoles cathédrales allemandes, peut-être), de recul et de déclin. Même en l’absence de véritables sources quantitatives, on est à peu près sûr que les effectifs scolarisés ont crû de manière importante. Croissance aussi dans la production de livres mis à la disposition des étudiants. Grâce aux traductions nouvelles et aux sommes rédigées par les maîtres de Paris et Bologne, la quantité de savoir disponible a augmenté. On peut dire que dans les écoles du xiiie siècle on enseignait plus de choses et on travaillait mieux ; ce progrès des savoirs n’est sans doute étranger à ce que Jacques Le Goff a appelé avec quelque emphase « le tournant du xiie au xiiie siècle qui connaît une grande mutation des valeurs, où les valeurs descendent du ciel sur la terre7 ».

19Mais il n’y a pas eu que cela. Le xiiie siècle a aussi été, par rapport au xiie, époque de reclassement, d’élagage d’une croissance touffue, de remise en ordre et de reprise en main. Après le temps de la spontanéité, des découvertes et de la « désinstitutionalisation »(R. W. Southern), celui de la consolidation des acquis, du rétablissement des cadres, des classifications et des encyclopédies. Des foyers secondaires s’éteignent, au profit des centres majeurs, des initiatives particulières sont abandonnées ; le xiiie siècle voit fleurir statuts et règlements ; les pouvoirs établis prennent désormais en temps utile les dispositions nécessaires pour canaliser les initiatives intellectuelles et garantir la position sociale des gens de savoir.

20La fin du xiiie siècle, disons plus précisément les années 1280 vers lesquelles s’arrête ce livre, correspondent-elles à une inflexion majeure dans l’histoire culturelle de l’Occident médiéval ? La question a été également posée pour bien d’autres domaines – la croissance démographique, l’activité économique, les structures sociales, les systèmes politiques – sans recevoir de réponse décisive. Certains historiens pensent que dès les dernières décennies du siècle l’accumulation des tensions, voire des contradictions, a mené à un point de rupture, engendrant, sinon un effondrement brutal, en tout cas l’amorce d’une série de crises en chaîne. D’autres estiment au contraire que la croissance, peut-être ralentie, a pu continuer sans trouble majeur jusque dans la première moitié, voire jusqu’au milieu du xive siècle. Faux débat peut-être, tant il est vrai qu’il y a rarement de rupture radicale en histoire, si ce n’est par l’effet d’un diagnostic rétrospectif.

21Pour ce qui est en tout cas de l’histoire de la culture et de l’enseignement qui nous intéresse ici, elle offre incontestablement à la fin du siècle quelques indices de crise, dont la fameuse condamnation des « averroïstes »parisiens en 1277 est à coup sûr le plus emblématique, même si sa signification et sa portée réelle prêtent à discussion. De plus, il nous semble que, par-delà tel ou tel épisode spectaculaire, ces années ont vu s’amorcer une profonde mutation de la géographie culturelle de l’Europe, avec l’éveil de régions et de pays neufs et jusque là marginaux aux dépens des centres traditionnels. En même temps, au fur et à mesure qu’étaient atteints un certain nombre de seuils critiques, par exemple avec l’essor de l’économie monétaire ou des savoirs profanes ou l’émergence de l’État moderne, des problèmes nouveaux passaient au premier plan, auxquels les hommes de savoir étaient invités à réfléchir. C’est pourquoi il nous a semblé qu’au total la fin du xiiie siècle n’était pas un trop mauvais moment pour fixer le terme de ce livre et qu’il était loisible de penser que, malgré leur diversité interne, les xiie et xiiie siècles possédaient au plan culturel une unité suffisante par rapport aux périodes qui les encadrent.

Un contexte favorable

22De tout ce qui précède, il ressort à l’évidence que l’histoire culturelle de l’Occident chrétien aux xiie et xiiie siècle ne peut être comprise que replacée dans l’histoire générale de ces deux siècles. Ce n’est pas ici le lieu de retracer cette histoire et le lecteur voudra bien se rapporter aux manuels généraux d’histoire médiévale – il en existe de nombreux et d’excellents – pour acquérir la connaissance d’ensemble de la période sans laquelle les faits de culture dont nous allons parler n’auraient guère de signification.

23Je me bornerai à rappeler, dans les pages qui suivent, sous une forme très schématique et sans entrer dans aucun détail événementiel ni aucune particularité nationale ou régionale, les traits majeurs de l’évolution de l’Occident entre le xiie et le xiiie siècle.

Croissance et prospérité

24Les xiie-xiiie siècles appartiennent à une période longue de croissance démographique et économique générale, ayant commencé, selon les régions, tantôt dès la fin du xe siècle, tantôt seulement dans le courant du xie. La base de cette croissance a évidemment été l’essor agricole : extension des terroirs cultivés, meilleure maîtrise des espaces naturels, progrès des techniques agraires, hausse des rendements et, au bout du compte, développement et diversification de la production permettant d’assurer de manière à peu près régulière l’alimentation d’une population pourtant toujours plus nombreuse.

25L’essor agricole a soutenu l’essor urbain, lui aussi général bien que très inégalement réparti selon les régions. Naturellement, les villes restaient bien petites comparées à celles d’aujourd’hui : quelques dizaines de milliers d’habitants au plus, 200 000 à Paris à la fin du xiiie pour la plus grande ville occidentale du temps. Mais cela suffisait pour que les villes retrouvent, en sus de leurs fonctions religieuses et politiques traditionnelles, un rôle actif comme centres de production artisanale spécialisée, nœuds des échanges commerciaux, foyers d’animation de la vie économique, y compris pour les campagnes environnantes.

26Mentionnons enfin, après les longs siècles de quasi économie-nature du haut Moyen Âge, le retour à l’économie monétaire. Les espèces métalliques redeviennent l’instrument indispensable des échanges de biens et de services ; au xiiie siècle, on recommence à frapper, d’abord en Italie puis dans tout l’Occident, de grosses pièces d’argent puis d’or et le crédit devient un moteur indispensable de l’activité économique. Ces mutations ne se firent pas sans susciter débats et même scandale ; l’Église maintint sa condamnation traditionnelle du prêt à intérêt, l’anti-judaïsme chrétien y puisa une de ses justifications, hérésies populaires et mouvements religieux de pauvreté fleurirent dans les milieux urbains directement affectés par la monétarisation de l’économie. Les problèmes de l’usure, du juste prix, du salariat se retrouvèrent à l’ordre du jour, largement évoqués par les prédicateurs et commentés dans les disputes universitaires.

27La vie intellectuelle trouva évidemment des conditions favorables dans ce contexte d’aisance matérielle croissante. Des liquidités plus abondantes étaient disponibles pour les investissements, au demeurant bien modestes, que requérait l’essor de l’école et de la culture : rémunération des maîtres, subsistance des écoliers, fabrication des livres, dotation des collèges, etc. Plus largement, la vie intellectuelle a bénéficié d’une atmosphère mentale certainement plus propice qu’au haut Moyen Âge, celle de la ville et du « chantier urbain »(J. Le Goff), atmosphère nouvelle de liberté nourrie des garanties et franchises individuelles désormais consenties aux citadins, de l’intensité des échanges en tout genre, de la vivacité des discussions et des prises de parole publiques.

28En créant davantage de richesses, la croissance économique a aussi rendu à nouveau possible une certaine mobilité sociale ; d’aucuns parvenaient à s’élever, tandis que d’autres voyaient leur situation ancienne menacée. Les stratégies individuelles ou familiales ne se limitaient plus au maintien des positions acquises par la bonne gestion des patrimoines et le jeu des alliances, l’ingéniosité et le travail, dont le caractère productif était désormais reconnu, devaient permettre non plus seulement de subsister mais d’améliorer son sort personnel tout en contribuant au mieux-être général. Dans ces conditions, ceux qui se consacraient aux études et à la culture pouvaient légitimement vouloir tirer profit de leur peine, comme les autres travailleurs – paysans défricheurs, artisans ou marchands –, pour s’élever dans la hiérarchie des statuts sociaux.

Ouverture et mobilité

29Si la croissance a suscité aux xiie-xiiie siècles certaines formes de mobilité sociale, elle a aussi permis une plus grande mobilité géographique des hommes et des idées en élargissant l’espace contrôlé par les Occidentaux et en facilitant leur circulation. À la conquête des espaces intérieurs par les défrichements et l’amélioration des infrastructures de transport (routes, ponts), ont fait pendant les conquêtes extérieures. À la fin du xie siècle, l’Occident devient expansif, conquérant, sinon impérialiste. Les Normands s’installent dans la Pouille byzantine et la Sicile arabe tandis que la Reconquista chrétienne refoule peu à peu les Musulmans hors de la Péninsule ibérique. Au milieu du xiiie siècle, ne leur reste plus que le petit royaume de Grenade. Les Croisades d’Orient, quant à elles, ont donné naissance à des « États latins », relativement fragiles il est vrai, en Syrie-Palestine et, au xiiie siècle, en Grèce. Plus au Nord, la christianisation des populations slaves et scandinaves, acquise pour l’essentiel dès le début du xie, fut suivie de la lente et très progressive intégration de ces pays dans l’orbite culturelle de la Chrétienté latine.

30Précédant ou suivant et finalement dépassant croisés et pèlerins, les marchands italiens se sont assurés aux xiie et xiiie siècles le contrôle de la navigation méditerranéenne et ont créé de multiples comptoirs en Orient. Au xiiie siècle, ils pénètrent jusqu’en Mer Noire et s’enfoncent à partir de là sur les routes de l’Asie mongole.

31La vie intellectuelle occidentale a tiré grand profit de cette expansion géographique. Dans les zones de conquête (Sicile, Espagne, Constantinople) et malgré la rudesse initiale de celle-ci, des contacts se sont noués avec des lettrés musulmans, juifs ou byzantins, qui ont permis en particulier de se procurer et de faire traduire en latin de nombreux textes grecs ou arabes.

32À l’intérieur même de l’Occident, étudiants et manuscrits ont pu désormais circuler aisément, d’Angleterre en Espagne, d’Allemagne en Italie. Une nouvelle géographie culturelle de l’Europe, plus cohérente, se dessine.

33Au xiie siècle, cette géographie est encore complexe et assez mobile. Il y a encore des zones marginales peu touchées par les idées nouvelles, il y a des zones frontières où l’on va quérir, on l’a dit, manuscrits et traductions ; il y a toutes les routes au long desquelles circulent les étudiants à la recherche des meilleurs maîtres et des meilleures écoles. Des aires de plus grand dynamisme se détachent précocement : l’Italie du Sud, la Romagne et la Lombardie, la vallée du Rhin, l’Ile-de-France capétienne, l’espace plantanegnêt enfin, à cheval sur la Normandie (ajoutons-y même les pays de Loire et le Poitou) et l’Angleterre. Quelques villes commencent à briller d’un éclat particulier (Paris, Bologne), mais leur primauté est encore relative et cette géographie culturelle reste souple.

34C’est au xiiie siècle que les choses se décantent et se fixent. Les centres majeurs, devenus les grandes villes universitaires, rejettent dans l’ombre les foyers scolaires secondaires ; les cours princières et ecclésiastiques se sédentarisent définitivement ; des itinéraires quasi obligés relient désormais entre eux les nœuds d’un réseau culturel bien structuré à l’échelle de la Chrétienté occidentale.

La réforme de l’Église

35Il est évidemment impossible de séparer au Moyen Âge vie religieuse et vie culturelle. Il convient donc de rappeler ici, en quelques mots, ce phénomène fondamental qu’a été, du xie au xiiie siècle, la réforme parfois dite « grégorienne »de l’Église. Les prodromes en sont perceptibles dès la première moitié du xie siècle, bien avant le pontificat éponyme de Grégoire VII (1073-1085). Elle se prolonge jusqu’au xiiie ; on peut considérer que le quatrième Concile de Latran (1215) la clot symboliquement par l’ampleur de son œuvre législative. À la fois locale et générale, épiscopale et pontificale, la réforme de l’Église a profondément transformé les conditions de vie spirituelle et religieuse de la Chrétienté occidentale. Elle n’a pas négligé les domaines de la culture et même si certaines manifestations tendent peu à peu à lui en échapper, surtout dans les pays méditerranéens, on peut cependant dire que, globalement, l’Église réformatrice a réussi à garder dans son orbite, voire à récupérer les courants majeurs de la culture savante du temps, en même temps qu’elle maintenait son contrôle sur l’institution scolaire. Il y a certes eu des conflits, des déviations doctrinales, des condamnations mais dans l’ensemble, les hérésies de cette époque semblent avoir été plus « populaires »que savantes.

36Pour bien comprendre l’impact de la réforme de l’Église sur la vie culturelle et l’enseignement, il convient d’en rappeler la triple dimension.

37La réforme a d’abord été réforme du clergé séculier et revalorisation de son rôle pastoral (prédication et sacrements), au moins au niveau des évêques et des chanoines, celui des paroisses, surtout rurales, restant sans doute moins accessible aux efforts des réformateurs. Ceci exigeait davantage de clercs cultivés, donc formés dans les écoles. Ceci impliquait aussi un effort intellectuel systématique de mise en forme et de vulgarisation bien contrôlée du message religieux, notamment par le biais de la prédication et du droit canon. Des champs considérables s’ouvraient par là-même à la réflexion et à l’action des clercs instruits.

38La réforme a aussi touché le monde monastique et régulier. Elle y a eu pour effet de faire éclater l’ancienne tradition bénédictine et clunisienne, centrée sur la liturgie et étroitement liée aux structures féodales de la société. Sous l’action des idéaux réformateurs, deux courants divergents sont apparus dans le monde régulier. Un courant ascétique et pénitentiel (la Chartreuse, Cîteaux), prônant le retrait du monde et l’attachement aux formes traditionnelles de la culture monastique. À l’opposé, de nouveaux réguliers ont au contraire privilégié le souci de faire servir les idéaux de la vie commune à une action d’évangélisation des laïcs, en particulier vis-à-vis des populations urbaines en plein essor ; ce fut l’œuvre des congrégations de chanoines réguliers au xiie siècle, des ordres mendiants au xiiie. Aux uns et aux autres, le recours aux formes modernes de la culture et de l’enseignement est apparu très vite comme un moyen efficace de se préparer à l’action pastorale.

  • 8 Sur la Curie romaine, voir les travaux d'A. Paravicini Bagliani et en particulier, en français, La (...)

39Enfin, la réforme a eu à la fois pour moyen et pour effet de renforcer la centralisation ecclésiastique en exaltant sans mesure le pouvoir pontifical jusqu’à le définir comme une sorte de pouvoir absolu d’essence divine (plenitudo potestatis). La centralisation pontificale a fait de Rome une véritable capitale et de la Curie un exceptionnel milieu de culture où affluaient des clercs de toutes origines8. Elle a aussi amené les papes des xiie et xiiie à s’appuyer, à travers toute la Chrétienté, sur des auxiliaires soumis à leur seule autorité, efficaces et dociles. Pour cela, ils ont très tôt choisi de faire appel à des lettrés issus des meilleures écoles et donc à favoriser le développement d’institutions (les universités et les ordres mendiants) qui mettaient à l’honneur les disciplines savantes. Celles-ci ont donc largement profité de la réforme de l’Église, même si, revers de la médaille, celle-ci imposait à l’enseignement et à la réflexion une contrainte d’orthodoxie religieuse qui pouvait devenir rapidement pesante, comme on le constatera à plusieurs reprises au cours du xiiie siècle.

Une nouvelle économie des pouvoirs

40La réforme a entraîné entre autres, on vient de le dire, une profonde mutation dans la répartition des pouvoirs et de l’autorité au sein de l’Église. Il en a été de même, mutatis mutandis, au sein de la société laïque. Celle-ci est en fait marquée à cette époque, sur le plan politique, par la difficile cohabitation de forces traditionnelles, encore prestigieuses mais déclinantes, et de forces nouvelles.

41Du côté des forces traditionnelles, l’Empire. Durement ébranlé par son affrontement avec la Papauté au temps de la querelle des investitures (1075-1122), l’Empire retrouve belle allure au temps de Frédéric Barberousse (1152-1190) mais s’effondre complètement au xiiie siècle comme force politique réelle, avant même la mort de Frédéric II (1250) et le « Grand Interrègne »(1250-1273).

42Traditionnelle aussi, la féodalité, le monde des seigneurs châtelains et des chevaliers. Le raffinement déjà nostalgique auquel atteint la culture courtoise dans les dernières décennies du xiie siècle (Chrétien de Troyes), ne doit pas cacher que l’autorité politique de l’aristocratie guerrière des maîtres du sol recule désormais partout devant la multiplication des franchises paysannes, l’essor des villes et le « mouvement communal », la renaissance enfin du pouvoir princier. Tandis qu’en Italie du Nord surgissent des cités-États pratiquement indépendantes, on voit, dès le xiie siècle en Angleterre et en Italie du Sud, en France et dans la Péninsule ibérique au xiiie, le roi reconstituer à son profit l’autorité publique de l’État. Généralement plus ou moins soutenu par l’Église, s’appuyant sur un embryon déjà perceptible de sentiment national, le prince s’impose sur un vaste territoire non seulement par son prestige sacré et sa force militaire mais par sa capacité à administrer, à lever l’impôt, à rendre la justice et à garantir la paix et la sécurité. Pour cela, il lui faut évidemment non seulement des serviteurs fidèles, mais un personnel compétent d’hommes rompus aux techniques de l’écriture et aux subtilités du droit. Il lui faut aussi des lettrés capables de trouver dans l’Écriture sainte, la loi romaine ou la philosophie grecque la justification théorique de ses prétentions à la souveraineté. Lui aussi a donc besoin d’hommes de savoir et d’écoles capables de les former.

43Dès les premières manifestations de la renaissance de l’État, la culture et l’enseignement deviennent donc des enjeux politiques. Même s’il accepte encore, pour une large part, d’en déléguer le contrôle à l’Église, le prince ne peut désormais rester indifférent à ce domaine de l’activité de ses sujets.

Bibliographie

Bibliographie

Le contexte général pourra être mis en place, pour l’arrière-plan, économique et social, à partir de :

Fossier, R. et al., Le Moyen Âge, t. 2, L’éveil de l’Europe, Paris, A. Colin, 1982.

Fossier, R., La société médiévale (Coll. U), Paris, A. Colin, 1991.

Contamine, Ph. et al., L’économie médiévale, Paris, A. Colin, 1993, et pour les aspects religieux et mentaux, à partir de :

Vauchez, A (dir.), Apogée de la Papauté et expansion de la Chrétienté (1054-1274)

(t. V de l’Histoire du christianisme), Paris, Desclée, 1993.

Martin, H., Mentalités médiévales, xie-xve siècle (Coll. Nlle Clio), Paris, PUF, 1996.

Il existe, du moins en français, assez peu d’histoires générales de la culture et de l’enseignement au Moyen Âge. Citons :

Le Goff, J., Les intellectuels au Moyen Âge (Coll. Points-Histoire), Paris, éd. du Seuil, nlle éd., 1985.

Paul, J., Histoire intellectuelle de l’Occident médiéval (Coll. U), Paris, A. Colin, nlle éd., 1998.

M. Rouche, Des origines à la Renaissance (t. I de l’Histoire générale de l’enseignement et de l’éducation en France, dir. par L.-H. Parias), Paris, Nlle Librairie de France, 1981.

Sot, M. (dir.), Le Moyen Age (t. I de l’Histoire culturelle de la France, dir. par J.-P. Rioux et J.-Fr. Sirinelli),-Paris, éd. du Seuil, 1997.

Voir aussi la bibliographie très à jour récemment publiée sous la dir. de J.-P. Boudet sous le titre « Éducation et cultures dans l’Occident chrétien (début du xiie-milieu du xve siècle) »dans Historiens et géographes, n° 363 (août-sept. 1998), p. 347-388.

On dispose de plusieurs synthèses récentes sur l’histoire culturelle du xiie siècle :

Entretiens sur la Renaissance du xiie siècle, éd. par M. de Gandillac et E. Jeauneau, Paris-La Haye, Mouton, 1968.

Wolff, Ph. L’éveil intellectuel de l’Europe (Coll. Points-Histoire - t.I de l’Histoire de la pensée européenne), Paris, éd. du Seuil, 1971.

Renaissance and Renewal in the Twelfth Century, dir. par R.L. Benson et G. Constable, Cambridge Mass., 1982 (rééd. Toronto, 1991).

Die Renaissance der Wissenschaften, dir. par P. Weimar, Zurich, 1981.

Paul, J., L’Église et la culture en Occident, ixe - xiie siècles (Coll. Nlle Clo), 2 vols., Paris, PUF, 1986.

Le xiie siècle. Mutations et renouveau en France dans la première moitié du xiie siècle, dir. par F. Gasparri, Paris, Le Léopard d’Or, 1994

Southern, R. W., Scholastic Humanism and the Unification of Europe, vol. I, Foun-dations, Oxford, 1995.

Verger,J., La Renaissance du xiie siècle, Paris, éd. du Cerf, 1996.

Il n’existe pas, à ma connaissance, d’histoire culturelle générale comparable du xiiie siècle.

Notes

1 Cf. en particulier, Clanchy, M. T., From Memory to Written Record. England, 1066-1307, Londres, 1979, et Stock, B., The Implications of Literacy. Written Language and Models of Interprétation in the Eleventh and Twelfth Centuries, Princeton, 1983.

2 C'est une des raisons pour lesquelles j'ai concentré sur les xive et xve s. le livre que j'ai récemment consacré à ce sujet (Verger, J., Les gens de savoir en Europe à la fin du Moyen Age, Paris, PUF, 1997).

3 En particulier Riché, P., Éducation et culture dans l'Occident barbare, VIe-VIIIe siècles, Paris, Le Seuil, 1962, et Id., Écoles et enseignement dans le Haut Moyen Âge, 2e éd., Paris, Picard, 1989.

4 Je pense notamment à Radding, Ch. M., The Origins of Médiéval Jurisprudence. Pavia and Bologna, 850-1150, Yale Univ. Press, New Haven et Londres, 1988, qui prétend faire débuter le renouveau du droit romain en Italie à la fin de l'époque carolingienne, mais en adoptant pour certains commentaires juridiques une datation « haute »contestée par beaucoup.

5 Haskins, Ch. H., The Renaissance of the Twelfth Century, Cambridge Mass., 1927.

6 Dans sa grande synthèse Histoire et culture historique dans l'Occident médiéval, 2e éd., paris, Aubier, 1991, Bernard Guenée écrit par exemple : « Pendant cinquante ans, jusque vers le milieu du l'historiographie occidentale, un moment exceptionnel, où les historiens furent relativement nombreux à être de qualité rare »(p. 359-360).

7 Dans sa Préface à Gervais de Tilbury, Le Livre des Merveilles, trad. et commenté par A. Duchesne, Paris, Les Belles Lettres, 1992, p. XII.

8 Sur la Curie romaine, voir les travaux d'A. Paravicini Bagliani et en particulier, en français, La cour des papes au xiiie siècle, Paris, Hachette, 1995.

Le texte et les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont sous Licence OpenEdition Books, sauf mention contraire.

Cette publication numérique est issue d’un traitement automatique par reconnaissance optique de caractères.
Rechercher dans OpenEdition Search

Vous allez être redirigé vers OpenEdition Search