La Morée est-elle ingouvernable ?

Difficultés à gouverner et mutations politiques dans la Grèce latine (xive siècle)

Simon Hasdenteufel

p. 223-236


Texte intégral

1L’historien de la Grèce latine – que l’on appelle aussi Morée – est confronté à un véritable paradoxe quand il envisage le xive siècle. Cette période, qui succède au règne des Villehardouin, princes de Morée de 1209 à 1278 ressemble à un imbroglio ingouvernable, voire à une véritable anarchie. Qu’il suffise d’observer non seulement la multiplicité des souverains qui se réclament princes de Morée à cette époque, mais aussi la galaxie d’acteurs politiques venus de différentes régions d’Occident et dont les destins se croisent en Grèce, ainsi qu’Isabelle Ortega a pu le souligner concernant la fin du xiiie siècle dans sa contribution au présent volume.

2En même temps, si l’on s’intéresse aux sources narratives décrivant ce xive siècle moréote, on trouvera finalement peu de tableaux et de jugements aussi sombres que ceux contenus dans l’historiographie. Les documents administratifs sont peut-être plus parlants lorsqu’il s’agit d’aborder les difficultés à gouverner, mais cela reste des indications ponctuelles1. Il n’est donc pas si sûr que la Morée ait été un territoire anarchique, ni même répulsif pour des princes occidentaux en quête de pouvoir et de prestige. De plus, si l’on considère la question des difficultés à gouverner sous l’angle des révoltes contre l’autorité, David Jacoby n’a recensé qu’un seul soulèvement de la part d’un groupe d’archontes grecs de la Skorta en 1304, pour protester contre une hausse des impôts – et, au demeurant, les conséquences politiques et matérielles de cette révolte s’avèrent limitées2.

3Mais revenons sur les jugements historiographiques portés sur la Morée du xive siècle. La monographie publiée par Antoine Bon en 1969, qui a fait date en proposant une histoire événementielle complète de la région, ne manque pas de mots très durs : le xive siècle est une période « beaucoup moins brillante » ; les princes du début du xive siècle sont incapables de rendre à la Morée sa prospérité ; à partir de 1318 on assiste à une « anarchie » et à une « décadence » de la principauté ; enfin, à partir de 1364, tout est déjà perdu, annonçant la « disparition » de la Morée latine3. Par contraste, le xiiie siècle, sous l’égide du gouvernement des Villehardouin apparaît comme un moment de grande stabilité, voire un âge d’or grâce à l’action d’un prince tout-puissant, énergique et charismatique dont les successeurs du siècle suivant ne sont qu’une ombre dérisoire.

4Néanmoins, dans les faits, le gouvernement des Villehardouin fut bien loin de constituer un modèle d’efficacité et d’harmonie politique. La conquête de la Morée est longue et laborieuse, et Geoffroy de Villehardouin en a usurpé les fruits à son propre suzerain, Guillaume de Champlitte. De surcroît de graves conflits ont menacé la légitimité des Villehardouin au cours de leur règne : la résistance de l’archonte Léon Sgouros dans la région de Corinthe jusqu’en 1208 ; le conflit avec l’Église latine, entraînant une excommunication de la part du pape entre 1218 et 1223 ; la guerre contre le seigneur d’Athènes Guy de La Roche en 1248 ; le conflit avec Venise autour de Négrepont en 1255 ; et, enfin, la défaite à Pélagonia contre Byzance en 1259, entraînant une série de reconquêtes de la part des Grecs à partir de 1261.

5Alors pourquoi un tel décalage entre la vision du xiiie siècle et celle du siècle suivant ? C’est sans doute d’abord un effet des sources. La Chronique de Morée, qui existe en quatre versions de langue différente – grecque, italienne, française et aragonaise – constitue l’un des principaux témoignages sur la région et a tendance à glorifier la dynastie des Villehardouin, en particulier le premier d’entre eux, Geoffroy, dépeint sous les traits du fondateur quasi mythique4. Il faut dire que l’objectif de ce texte est d’élaborer un véritable récit des origines de la principauté, destiné à être déclamé pour édifier le public moréote ou les princes friands d’exemples à imiter.

6Par ailleurs, notre historiographie contemporaine, forcément marquée par l’idéologie de l’État moderne, définit le bon gouvernement par sa rapidité et son efficacité, ainsi que par l’exercice d’un pouvoir souverain fort et centralisé. À l’inverse, le gouvernement fragile serait lent dans ses décisions, du fait d’un souverain faible et contesté. Pour autant, les plus récentes recherches sur la culture politique médiévale ont amené à changer ces représentations, montrant que derrière une apparente anarchie pouvaient se jouer des processus de négociation, de partage et de circulation du pouvoir, avec une dose de violence mesurée5. Ce sont ces processus, entre souverains et feudataires, qui vont nous intéresser.

7Il ne s’agit pas de brosser un tableau irénique de la Morée, ni de nier certaines difficultés bien réelles du pays que ce soit les pestes successives ou les incursions des Catalans, Navarrais et Turcs. Il est plutôt question de reconsidérer ce qui nous apparaît comme un paysage politique ingouvernable de manière plus nuancée. Les souverains, ceux et celles qui prétendent gouverner un ensemble d’individus et un ensemble territorial, ont certes des difficultés à imposer leur autorité ; mais ces difficultés seraient moins le signe de leur faiblesse que le reflet d’un véritable mode de gouvernement, où il existe une part de « jeu » au sein des relations politiques. Je m’appuie ici sur les travaux de l’anthropologue Pierre Clastres pour qui la politique entendue comme « rapport de coercition » n’est pas un modèle de référence pour penser le pouvoir, mais seulement un cas particulier, étroitement lié à l’imaginaire de l’État moderne européen6. La contestation contre le chef fait partie du fonctionnement empirique du groupe politique7. Elle conduit d’un côté le souverain à toujours réaffirmer son autorité, et de l’autre ses hommes à fixer des limites à son pouvoir. De cette manière, ces deux parties, par un jeu de frictions et d’oppositions plus ou moins ouvertes définissent mutuellement l’étendue de leur capacité d’influence et d’action. De la sorte, la Morée du xive siècle pourrait nous apparaître davantage comme un terrain où le pouvoir se négocie, où des princes et princesses d’Occident en quête d’influence trouvent de véritables opportunités politiques, et où se mettent en place de nouveaux acteurs politiques.

Difficultés à gouverner ou négociation du pouvoir ?

8L’exemple que je souhaiterais développer dans un premier temps est celui des relations entre le prince d’Achaïe Philippe de Savoie, troisième mari d’Isabelle de Villehardouin – la fille de Guillaume II – et son homme-lige, Nicolas III de Saint-Omer, également maréchal de la principauté de Morée et coseigneur de Thèbes, au début du xive siècle. Les rapports entre ces deux hommes sont tantôt cordiaux, tantôt orageux, dans la mesure où Nicolas s’oppose à plusieurs reprises aux décisions de Philippe. À première vue, on peut considérer que le gouvernement du prince est de la sorte rendu plus difficile. Toutefois, je proposerais plutôt d’y déceler un mode de partage du pouvoir entre les deux hommes, par lequel le prince n’est pas tout-puissant, mais doit tenir compte de l’avis de ses hommes et que ce mode d’exercice du pouvoir politique partagé est perçu, non pas comme une faiblesse du prince, incapable de diriger son État – ce que nous aurions tendance à voir –, mais plutôt comme un vrai modèle de gouvernement, révélateur des représentations politiques médiévales.

9Peu après son arrivée en Morée en 1301, Philippe de Savoie, sur le conseil d’un « chevalier picars », Vincent de Marays, fait emprisonner le chancelier de la principauté, Benjamin de Kalamata, au motif qu’il s’était largement enrichi ces dernières années et devait une partie des rentes au prince. Comme l’a indiqué Isabelle Ortega dans son article, Philippe de Savoie gouverne ici à la manière d’un tyran italien, procédant par coups de force pour imposer son autorité. Benjamin appelle alors à l’aide son « meillor amy et seignor », Nicolas III de Saint-Omer qui, bannière déployée et à la tête de 400 hommes, se rend dans la cité portuaire de Clarence, en audience exceptionnelle devant le prince8. La version française de la chronique de Morée décrit alors de manière vivante les événements : les esprits s’échauffent, le prince Philippe manifeste une grande colère, tandis que Nicolas lui reproche, épée au poing, de ne pas respecter les « usances et les coustumes dou pays9 ». Cependant, l’intervention de la princesse Isabelle de Villehardouin ainsi que celle du seigneur Guillaume de Montbel permettent d’apaiser la situation10. Le prince calme sa colère et accepte un accord en vertu duquel Benjamin de Kalamata lui remet 15 000 hyperpères selon la version aragonaise et 20 000 selon la française, en échange du casal de Perakhora, dans la châtellenie de Corinthe, d’une valeur de 6 000 hyperpères par an11. Philippe obtient ainsi partiellement les ressources financières qu’il recherchait, mais ses prétentions politiques ont été contenues – son aire d’action en tant que souverain, délimitée12. Par la suite, les relations entre Philippe et Benjamin semblent s’être largement améliorées : le chancelier devint le plus proche conseiller du prince et arrangea même pour lui un échange de biens lucratif avec le comte de Céphalonie13. Un acte de donation au nom de Philippe et Isabelle, daté du 24 décembre 1303 et issu des archives turinoises, semble témoigner de ces bonnes relations. Il y est en effet déclaré : « Nous havons requeri le honorable et sage Beniémin chancelier de nostre princée quil mette son su propre saeaul a ces presentes lettres14. » Ainsi, par le biais de l’opposition au prince qui est partie intégrante d’un processus de négociation, une difficulté à gouverner a-t-elle finalement débouché sur un renforcement de la cohésion politique.

10Cependant, les frictions entre Philippe et Nicolas ne cessent pas et on peut s’intéresser à un épisode en particulier, à première vue éloigné de l’opposition au prince. La chronique française de Morée raconte qu’en 1304, Nicolas, éreinté par l’extrême jalousie de sa femme Guillerma de Céphalonie, entreprit de la faire mourir de chagrin en la maintenant enfermée au lieu-dit de La Rhoviata, et en se montrant publiquement auprès d’une autre dame. Comme il ne pouvait s’afficher avec une femme inférieure à lui dans la hiérarchie, il se rapprocha d’une dame de haut rang, Marguerite d’Akova, sœur de la princesse Isabelle de Villehardouin et veuve du comte de Céphalonie, Richard15. Le frère de Guillerma, Jean, vint néanmoins délivrer sa sœur de La Rhoviata et entreprit de porter l’affaire devant la cour du prince16. La fin de l’épisode ne nous est pas connue du fait d’une lacune dans le manuscrit mais il semblerait que tout soit finalement rentré dans l’ordre. Cette histoire a été interprétée comme un témoignage pittoresque sur la vie quotidienne en Morée, ou alors comme une source utile à l’histoire des femmes. Il me paraît cependant possible d’en faire une lecture politique. Le rapprochement de Nicolas avec Marguerite d’Akova, que le maréchal rend visible à tous, fait sans doute partie de sa stratégie pour miner l’autorité du prince. Il se montre avec une femme de plus haut rang – la sœur de la femme du prince – pour manifester qu’il a gagné en puissance. Au reste, Nicolas avait-il vraiment l’intention d’épouser Marguerite in fine ? La question reste ouverte mais, j’aurais tendance à supposer qu’il s’agit d’une manœuvre pour rappeler à Philippe qu’il n’est pas tout-puissant et doit composer avec ses hommes, au premier rang desquels le maréchal.

11Pour autant, ces épisodes d’opposition entre Philippe et Nicolas sont entremêlés de manifestations de confiance et d’amitié mutuelle : ils mènent ainsi ensemble une campagne militaire en Épire sur ordre de leur suzerain, Charles II d’Anjou. Puis, voyant qu’ils ne pourraient tirer aucun avantage de cette expédition, Nicolas parvient à trouver un stratagème pour mettre fin aux opérations, contre l’avis du souverain angevin. Philippe lui montre alors sa gratitude pour une telle manœuvre en l’embrassant sur la joue17. Dans la mesure où les gestes et attitudes d’amitié ont également une portée politique, on comprend que Philippe et Nicolas, loin d’être dans l’opposition systématique, sont aussi des alliés qui mettent leurs forces en commun quand cela est nécessaire18.

12Les frictions entre les deux hommes révèlent donc plutôt l’utilisation par chacun d’entre eux de toute une gamme d’outils politiques pour mesurer et délimiter empiriquement leur part d’influence mutuelle19. Le prince sait que son pouvoir n’est pas fondamentalement incontestable, qu’il est borné par les usages et par l’avis des autres barons, mais qu’il doit tenter sans cesse de le réaffirmer. La chronique française de Morée sous-entend que, face à lui, Nicolas III de Saint-Omer a pris la défense de plusieurs seigneurs moréotes, dont Benjamin, contre le pouvoir du prince : « il avoit eu grosses paroles avec le prince Philippe de Savoye, pour le chancelier et pour autres plusieurs hommes dou pays20 ». C’est ce mode de gouvernement, fondé sur la négociation, qui semble salué par la chronique de Morée comme le plus vertueux. Lorsque, dans l’affaire de Benjamin de Kalamata, Nicolas tire son épée face à Philippe, la chronique lui fait dire qu’il ne menace pas le prince mais cherche à défendre son honneur – ce qui est d’ailleurs son devoir d’homme-lige. Il rappelle au prince son serment de respecter les usages de la principauté21. De même, le prince est valorisé par la chronique quand il sait calmer son ira principis sur le conseil de ses barons22. L’autorité du souverain n’est donc pas seulement à envisager de manière monolithique comme une puissance à laquelle doit toujours répondre l’obéissance ; c’est aussi une ressource qui se négocie, se partage et se délimite avec le reste de la communauté politique aristocratique. Après tout, les Assises de Romanie s’ouvrent sur la définition de la place du prince, non pour mettre en avant son pouvoir, mais plutôt ses multiples liens d’obligation : il doit d’abord hommage à l’empereur de Constantinople, puis prêter serment auprès de ses barons et de ses sujets de maintenir les usages de l’empire de Romanie – c’est seulement après qu’il reçoit à son tour les serments des barons et de ses hommes-liges – ainsi que des bourgeois et de toute la population grecque et latine23.

Quand une princesse gouverne à distance… avec difficulté

13Au fil du xive siècle moréote, on observe une évolution politique : l’éloignement du prince qui gouverne sa principauté majoritairement à distance, se rendant de moins en moins sur place et déléguant de manière croissante son autorité. Cela contribue à modifier les modalités du gouvernement et du partage de l’influence dans le jeu entre le souverain et ses hommes. On peut analyser cette évolution à travers le cas d’un personnage féminin : Marie de Bourbon, une princesse capétienne mariée en septembre 1347 avec Robert de Tarente, membre de la famille angevine de Naples, prince de Morée et empereur titulaire de Constantinople24. Ce dernier semble en effet avoir associé son épouse à son gouvernement, faisant plusieurs donations en sa faveur dans le Péloponnèse25. Le 27 juin 1357, il lui donne la province de Kalamata, avec ses châteaux et forteresses, ses dépendances, ainsi que ses droits26. Puis, le 1er février 1359, il lui remet, à elle ainsi qu’à ses enfants nés et à naître, un casal du nom de Posermicun et la montagne de Moundrista, où se trouvait peut-être un village ou un château27. Peu auparavant, la princesse d’Achaïe avait également acheté un château du nom de Phanari, sans doute à une dizaine de kilomètres au nord du site de Moundritsa, à une certaine Guillemette, dame de Charny (en Bourgogne) et de Vostitsa (dans le nord du Péloponnèse)28. En outre, vers cette même période, Marie aurait repris à Guillemette la baronnie de Vostitsa, ainsi que celle de Nivelet – probablement par un nouveau rachat29. De la sorte, elle disposait de possessions notables en Morée, où elle ne fut cependant présente que de manière ponctuelle, résidant la plupart du temps à Naples et naviguant d’autre part à plusieurs reprises entre l’Italie et Chypre où elle tentait de faire valoir les droits de son premier fils, Hugues de Lusignan30.

14Les sources nous permettent de savoir avec plus de certitudes qu’à la fin du mois de janvier 1361, Marie envoie son agent Nicolas de Boiano dresser un état des ressources et des conflits dans ses possessions moréotes31. Dans cette enquête d’une grande précision, on trouve plusieurs mentions de contestations, notamment d’un archonte grec influent du nom de Nicolas Koutroulis qui met Marie au défi de lui faire un procès – pour une raison néanmoins inconnue32. Toutefois, l’opposition la plus forte vient du baron de Chalandritsa, Centurione Ier Zaccaria qui tient une région voisine des possessions de Marie. Le rapport affirme que Centurione a fait prisonnier plus de 25 hommes de Marie dans la seigneurie de Vostitsa, qu’il a confisqué les biens d’un de ses feudataires dans cette même seigneurie et qu’il a agressé un de ses liges33. En réponse, Nicolas de Boiano raconte qu’il a pris l’initiative de confisquer des biens de Centurione situés à proximité de Vostitsa. Mais le rapport indique ensuite que Centurione a réagi en allant se plaindre au baile, menaçant d’attaquer Nicolas « en contumancia ». Ledit baile aurait alors poussé un seigneur moréote manifestement influent, Jan Senesguardo, à écrire à Nicolas pour lui dire que la princesse Marie agissait contre les usages de la principauté34.

Fig. 1. – La Morée au temps de Marie de Bourbon (c. 1361).

Image

15Il y a là des similitudes avec les épisodes du début du xive siècle dans les manières de limiter le pouvoir du souverain, en recourant par exemple au droit moréote pour justifier une opposition. Mais on discerne également des évolutions. En effet, cette fois, l’initiative du coup de pression ne vient pas du prince, mais d’un des barons de la principauté, à savoir Centurione qui vient empiéter sur les seigneuries de Marie. Comme celle-ci gouverne surtout à distance, on ne s’étonne pas que ses barons et ses hommes en profitent pour rogner ses domaines. Le rôle de l’agent de Marie, Nicolas Boiano signale également une inflexion intéressante : lorsque le baile et Jan Senesguardo prennent le parti de Centurione en invoquant le droit moréote, Nicolas dit avoir répondu au premier qu’il est en théorie lui aussi, en tant que baile, un agent sous la juridiction de Marie – donc il lui doit obéissance en priorité sur le droit moréote – et au second que son attitude ne plaît pas à l’impératrice et qu’il ne sert pas les coutumes de la patrie agissant de la sorte35. Ainsi, le souverain – qu’il soit masculin ou féminin – et ses hommes adaptent-ils au fil de l’histoire de la Morée leurs stratégies de négociation et de délimitation de leurs sphères d’influence respectives. Il n’en reste que, à l’instar de Nicolas III de Saint-Omer au début du xive siècle, Centurione, en ce qu’il est un des plus puissants seigneurs de Morée s’impose comme le principal interlocuteur chargé de contenir l’autorité souveraine. En 1364, à la mort de Robert de Tarente, il devient même baile de la principauté et cumule ainsi les statuts de seigneur local et d’agent du pouvoir impérial36.

Quand devient-il vraiment difficile de gouverner ?

16Face à ces exemples de jeux de délimitation du pouvoir, on peut se demander à quel moment le souverain considère qu’il devient trop difficile pour lui de gouverner. La Morée du xive siècle offre un excellent terrain d’étude de cette question. En effet, comme c’est une période où le titre de « prince de Morée » n’est plus attaché à une seule famille, mais circule entre les grands aristocrates occidentaux, ces derniers s’en saisissent quand ils y voient une opportunité – et s’en dessaisissent, sinon officiellement, du moins de facto, quand ils estiment ne pas réussir à exercer une influence suffisante ou ne pas tirer profit de ce titre.

17On peut mentionner plusieurs exemples notables de renoncement au pouvoir princier. Philippe de Savoie aurait quitté la principauté en 1304 ou 1305. La version française de la chronique de Morée reste assez laconique sur les raisons de ce départ mais l’éditeur Jean Longnon affirme avec vraisemblance que Philippe aurait anticipé sa déposition par le roi Charles II d’Anjou, duquel il tenait la dignité princière, au profit du fils du souverain angevin, Philippe de Tarente37. La chronique aragonaise de Morée évoque cependant une autre raison, sans doute complémentaire : constatant qu’il n’était plus le vrai seigneur de la terre, mais que c’était désormais le maréchal Nicolas III de Saint-Omer, il préféra s’en retourner38.

18Vient ensuite le temps de princes ou de princesses appartenant ou étant liés à la cour angevine et cherchant à tenter l’aventure en Morée. Entre 1325 et 1326, le prince angevin titulaire de la Morée, Jean de Gravina, mène une campagne dans le Péloponnèse pour reprendre la forteresse de Karytaina aux Byzantins et s’illustrer auprès des barons moréotes. Néanmoins, face à la difficulté du siège, il préfère abandonner les opérations avant l’hiver et rentrer à Naples au printemps suivant39. Par la suite, en 1332, il échange son titre de prince d’Achaïe avec son neveu, le jeune Robert de Tarente, contre des droits sur le duché de Durazzo et le royaume d’Albanie. Il se retire ainsi d’un jeu politique où il estime son influence beaucoup trop réduite40. Quelques années plus tard, entre 1338 et 1341, la mère de Robert de Tarente, Catherine de Valois-Courtenay, en tant que régente, princesse d’Achaïe et impératrice de Constantinople, se rend en Morée. Sur place, elle semble avoir essayé d’imposer son autorité, de constituer une véritable cour à Patras et même de soulever les aristocrates grecs d’Épire face à l’empereur byzantin. Toutefois, ses ambitions semblent avoir rencontré des oppositions trop fortes, ce qui l’aurait contrainte à rentrer à Naples, où elle laissa peu à peu le pouvoir à son fils41.

19Enfin, en 1390, Amédée de Savoie-Achaïe, reprenant les droits de son grand-père Philippe de Savoie, ambitionne de venir en Morée. Les archives vénitiennes montrent que la Sérénissime a invité par un acte du 24 septembre le prince à passer en Grèce, en mettant des navires à disposition pour le passage d’une armée remarquable : 300 chevaliers, 600 fantassins, dont des arbalétriers et plus de 1 000 auxiliaires42. Venise possède en effet depuis 1388 la châtellenie d’Argos, mais la place est alors militairement occupée par le despote byzantin de Mistra, Théodore Ier Paléologue, allié au seigneur de Corinthe, Nerio Acciaiuoli, l’un des plus puissants hommes de la Morée43. Les Vénitiens espèrent ainsi, avec l’aide du nouveau prince, récupérer leurs places. Toutefois, Amédée semble ne jamais être passé en Grèce et l’affaire s’être résolue par la voie diplomatique. À côté des questions dynastiques qui le retinrent finalement en Savoie, le prince titulaire craignait peut-être de s’engager dans une situation politique trop risquée, où ses gains auraient été trop faibles, pris d’un côté entre le risque de dépendance à Venise, et de l’autre le jeu politique entre Nerio, Théodore, mais aussi la compagnie navarraise, installée dans le sud-ouest du Péloponnèse44.

20Néanmoins, il est aussi des situations inverses où le souverain cherche à conserver sa place en Morée. Revenons brièvement sur le cas de Marie de Bourbon. L’historiographie a souvent considéré qu’en 1363 ou 1364, la princesse de Morée avait vendu les baronnies de Nivelet et de Vostitsa à Nerio Acciaiuoli, interprétant cette vente comme un aveu d’incapacité à gouverner ses possessions en Morée45. Une telle interprétation vient de la compréhension sans doute inexacte de deux documents issus des actes des Bourbons aux Archives nationales. Le premier date du 13 novembre 1363 et a été passé à Naples ; le second prend la forme d’un inventaire dressé le 17 mars 1364 à Vostitsa et contient la copie d’un acte de Marie de Bourbon passé le 12 octobre de l’année précédente. Or, ces deux documents complexes ont été réinterprétés et réédités par Julian Chrysostomidès qui a montré de manière précise et convaincante que cette vente n’a finalement jamais eu lieu : Marie était réticente à se séparer de ces terres, si bien que le contrat passé avec Nerio le 13 novembre 1363 prévoyait une clause de rétrocession des deux baronnies. Cette clause fut mise en application, de sorte que Nerio ne devint jamais seigneur des baronnies de Vostitsa et Nivelet qui restèrent à la princesse46. La raison de ce projet de vente demeure cependant floue, mais il est possible qu’il ait visé à obtenir des liquidités, afin de financer la croisade ambitionnée par le fils de Marie, Hugues de Lusignan, en Terre sainte47.

Conclusion

21Contrairement au tableau que l’on trouve chez Antoine Bon, la Morée n’est sans doute pas une périphérie encombrante, répulsive et anarchique. Au contraire, pour les princes et princesses d’Occident, c’est une véritable terre d’opportunités politiques et de conquêtes rêvées, d’autant plus que les incursions des Turcs dans la région à partir des années 1330 ressuscitent l’imaginaire de la croisade48.

22Par ailleurs, on peut envisager cette multiplication des prétendants et prétendantes à la suzeraineté sur la Morée du point de vue des barons et hommes-liges de la principauté : pour ces derniers, cela représente une offre politique inégalée par rapport au siècle précédent dominé par la seule dynastie des Villehardouin. C’est par exemple le cas en 1316, quand la principauté est disputée entre d’un côté Mahaut de Hainaut et son mari Louis de Bourgogne, contre de l’autre Ferrand de Majorque49. Cette pluralité de princesses et princes potentiels offre à chaque fois aux feudataires les moyens de se positionner par rapport au souverain qui serait le plus susceptible de servir leurs intérêts, et ainsi de constituer de véritables stratégies politiques.

23Enfin, l’éloignement progressif des souverains de la Morée laisse de l’espace libre pour d’autres formes de pouvoirs. Lorsque les princes mâles ne se saisissent pas de la souveraineté, ce sont les princesses, comme Marie de Bourbon ou Catherine de Valois-Courtenay qui cherchent à l’exercer. En outre, sur place des acteurs locaux s’arrangent pour prendre davantage d’influence, à l’image de Centurion Zaccaria ou des membres de la famille Acciaiuoli.

24Ainsi, selon comment on les envisage, les difficultés à gouverner peuvent-elles être aussi le reflet d’un jeu politique dynamique, riche d’opportunités de conquête d’influence et de pouvoir. Ce jeu fonctionne à partir de négociations constantes du pouvoir, de manière plus ou moins violente, entre souverains et feudataires et ces négociations, que l’on perçoit aujourd’hui comme anarchie, sont au contraire considérées par nos sources comme une norme de fonctionnement. L’image de seigneurs peinant à imposer leur autorité appartient finalement davantage à une construction historique et théorique a posteriori et derrière cette représentation, nous pouvons deviner des souverains qui gouvernent selon les critères et les codes politiques de leur époque.

Notes de bas de page

1 En 1382, Aldobrando Baroncelli évoque ainsi à son seigneur Lorenzo Acciauoli le « male stato di questo Paese ». Voir Luttrell Anthony T., « Aldobrando Baroncelli in Greece: 1378-1382 », in Anthony T. Luttrell (éd.), Latin Greece, the Hospitallers and the Crusades, Londres, Variorum, 1982, p. 293. Voir aussi un rapport émis vers 1354 sur les biens moréotes de Nicolas Acciaiuoli, mentionnant plusieurs exactions sur les terres de ce dernier, ou encore un rapport d’enquête dressé fin janvier 1361 par Nicolas Boiano pour les possessions de Marie de Bourbon en Morée énumérant diverses difficultés économiques et politiques. Ces documents ont été édités in Longnon Jean et Topping Peter, Documents sur le régime des terres dans la principauté de Morée au xive siècle, Paris, Mouton, 1969, p. 128-129 et 150. On peut enfin mentionner l’appel à l’aide des habitants de la châtellenie de Corinthe face aux incursions des Turcs, in Buchon Jean-Alexandre, Nouvelles recherches historiques sur la Principauté française de Morée, t. II, Paris, Comptoir des imprimeurs unis, 1843, p. 145.

2 Livre de la conqueste de la princée de l’Amorée. Chronique de Morée (1204-1305), éd. Jean Longnon, Paris, H. Laurens, 1911, § 918, p. 362 ; § 922-938, p. 363-369 ; Jacoby David, « The Encounter of two Societies: Western Conquerors and Byzantine in the Peloponnesus after the Fourth Crusade », in David Jacoby, Recherches sur la Méditerranée orientale du xiie au xve siècle : peuple, sociétés, économies, Londres, Ashgate, p. 902-903.

3 Disparition qui n’a pourtant lieu officiellement que bien plus tard, en 1430, lorsque Centurione II Zaccaria renonce au titre de prince de Morée face à Thomas Paléologue. Voir Bon Antoine, La Morée franque, recherches historiques, topographiques et archéologiques sur la Principauté d’Achaïe (1205-1430), t. I, Paris, de Boccard, 1969, p. 151-152, 199-200 et 248.

4 Shawcross Teresa, The Chronicle of Morea: Historiography in Crusader Greece, Oxford, Oxford University Press, 2009, p. 214-217.

5 Voir les analyses de Dominique Barthélemy, inspirées de l’anthropologie, notamment dans Barthélemy Dominique, « Hommages, vengeances et trahisons au xe siècle d’après Flodoard et Richer de Reims », in Dominique Barthélemy, François Bougard et Régine Le Jan, La Vengeance, 400-1200, Rome, École française de Rome, 2006, p. 149-158 ; id., « La vengeance, le jugement et le compromis », in Le règlement des conflits au Moyen Âge, actes du XXXIe Congrès de la SHMESP, Angers, juin 2000, Paris, Publications de la Sorbonne, 2001, p. 11-20.

6 Clastres Pierre, La société contre l’État. Recherches d’anthropologie politique, Paris, Éditions de Minuit, 1974, p. 20.

7 Ibid., p. 51.

8 L’épisode est raconté par les versions française et aragonaise de la chronique de Morée. La version aragonaise ne mentionne pas le personnage de Vincent de Marays, mais précise que la somme réclamée par Philippe à Benjamin est de 30 000 perpères. On notera aussi que le texte français accorde une plus grande importance aux relations entre les personnages et aux questions juridiques que cela soulève : il est dit que Philippe de Savoie a fait arrêter Benjamin en ce qu’il est « son home et son official », à quoi Nicolas rétorque que le prince « ne le pooit faire par droit, pour ce que il estoit son homme lige », voir Livre de la conqueste, op. cit., 856-861, p. 338-340 ; Libro de los fechos et conquistas del principiado de la Morea, compilado por comandamiento de don fray Johan Ferrandez de Heredia, éd. Alfred Morel-Fatio, Genève, J.-G. Fick, 1885, 507-509, p. 111-112.

9 Sur la place et le rôle de ces coutumes défendues par les barons moréotes, voir l’article d’Isabelle Ortega dans le présent volume.

10 Le livre de la conqueste, op. cit., 861-866, p. 341-343.

11 Le montant en question n’est indiqué que par la version française. Ibid., 867, p. 343 ; Libro de los fechos, op. cit., 512, p. 112.

12 Le seul véritable perdant est peut-être Vincent de Marays : ce dernier a dressé Philippe contre Benjamin car il était un adversaire à la fois du chancelier et de Nicolas. On le retrouve ainsi s’opposer au maréchal de la Morée dans un autre épisode. Voir Le livre de la conqueste, op. cit., p. 376-378.

13 Ibid., p. 343-344 ; Bon Antoine, La Morée franque, op. cit., p. 176.

14 Archivio di Stato di Torino, Sezione Corte, Mazzo 1, fasc. 8, fo 1.

15 Guillerma étant elle-même la fille de Richard de Céphalonie et de sa première femme – restée anonyme dans nos sources – qu’il eut avant Marguerite. On note que Nicolas courtisait donc la belle-mère de sa femme actuelle. Voir Le livre de la conqueste, op. cit., 997-1002, p. 389-391 et 1009, p. 394 ; Guérin Marie, Les dames de la Morée franque (xiiie-xve siècle). Représentation, rôle et pouvoir des femmes de l’élite latine en Grèce médiévale, thèse d’histoire, dir. Jean-Claude Cheynet, université Paris-Sorbonne, 2014, p. 71 et 79 ; Ortega Isabelle, Les lignages nobiliaires dans la Morée latine, xiiie-xve siècle : permanences et mutations, Turnhout, Brepols, 2012, p. 644. La dynastie de Céphalonie a souvent été désignée dans l’historiographie comme faisant partie de la famille Orsini, néanmoins cette identification reste plus qu’hypothétique. Voir Osswald Brendan, L’Épire du treizième, op. cit., n. 6, p. 31 et 503-504.

16 Livre de la conqueste, op. cit., 1010-1011, p. 394-395.

17 Livre de la conqueste, 1007, p. 393.

18 De la même manière, Isabelle Ortega propose dans son article une analyse des modalités de résolution des conflits et de création de consensus, soulignant ainsi une complémentarité entre contestation et composition dans les rapports de force politique entre le souverain et ses vassaux.

19 Sur la colère comme outil politique, voir Jamme Armand et Nicoud Marilyn, « “Jamais leur passion n’y voit rien de blâmable.” Passion, pulsions et violences en milieu curial : une perspective », in Bernard Andenmatten et al., Passions et pulsions à la cour, Florence, Sismel/Edizioni del Galluzzo, 2015, p. 17-18. Plus largement on peut aussi se référer à Boquet Damien et Piroska Nagy, Sensible Moyen Âge : une histoire des émotions dans l’Occident médiéval, Paris, Le Seuil, 2015.

20 Livre de la conqueste, op. cit., 886, p 350.

21 Ibid., 862-864, p. 341-342. Sur le serment du prince, voir ibid., 853, p. 337-338 ; Libro dele Uxanze e Statuti delo Imperio de Romania, éd. Antonella Parmeggiani, Spolète, Centro Italiano di Studi sull’alto Medioevo, 1998, p. 113.

22 De manière générale la chronique française de Morée ne manifeste pas d’hostilité contre Philippe de Savoie. Elle le décrit même comme « moult vaillans homs et de grant corage ». La version aragonaise, plus laconique sur cette période, se montre néanmoins favorable à Philippe, disant de lui qu’il fit la guerre contre les Grecs et « guarda bien su tierra ». Le prince semble donc avoir laissé un souvenir relativement positif. Voir Le livre de la conqueste, op. cit., 935, p. 368 ; Libro de los fechos, op. cit., 505, p. 111.

23 Libro dele Uxanze, op. cit., p. 113.

24 Libro de los fechos, op. cit., 678, p. 149.

25 Il faut dire que Marie de Bourbon avait contribué à la libération de Robert, fait prisonnier dans un contexte de luttes intestines des Angevins, par le roi Louis de Hongrie en janvier 1348, et libéré, sans doute trois ans après et, au plus tard en 1352. Voir Troubat Oliver, « La France et le royaume de Chypre au xive siècle : Marie de Bourbon, impératrice de Constantinople », Revue historique, no 278, 1987, p. 7-9.

26 Cette donation est connue et évoquée par l’historiographie à partir d’un passage de l’Histoire de l’empire de Constantinople composée par Charles Du Fresne Du Cange au milieu du xviie siècle. Dans ce passage, l’auteur cite en français un bref extrait de l’acte de donation de Kalamata qu’il affirme tenir des titres originaux de la chambre des comptes de Paris. En l’état, je n’ai toutefois pas eu la possibilité de retrouver cet acte aux Archives nationales. Voir Du Fresne Du Cange Charles, Histoire de l’empire de Constantinople sous les empereurs français jusqu’à la conquête des Turcs, t. II, éd. Jean-Alexandre Buchon, Paris, Verdière, 1826, p. 263-264.

27 Cet acte est également mentionné par Du Cange, ainsi que par d’autres travaux indiquant, cette fois, son numéro de série aux Archives nationales. Voir ibid., p. 264 ; Huillard-Bréholles Alphonse, Titres de la maison ducale de Bourbon, t. I, no 2778, Paris, Plon, 1867, p. 485 ; Troubat Olivier, « La France et le royaume de Chypre », art. cité, p. 9. Sur l’hypothèse de la présence d’un château au niveau de la montagne de Moundritsa, voir Kourelis Konstantinos, Monuments of Rural Archaeology. Medieval Settlements in the Northwestern Peloponnese, Dissertation in Art and Archaeology of the Mediterranean World, University of Pennsylvania, 2003, p. 274-275. Enfin, il est à noter qu’en 1358, Robert de Tarente avait également donné au grand sénéchal de la cour angevine de Naples, Nicolas Acciaiuoli, la châtellenie de Corinthe comme baronnie. Voir Buchon Jean-Alexandre, Nouvelles recherches historiques, op. cit., p. 147-148.

28 Huillard-Bréholles Alphonse, loc. cit.

29 Guerin Marie, Les dames de la Morée franque, op. cit., p. 45 et 49-50 ; Bon Antoine, La Morée franque, op. cit., p. 234 et 465.

30 Troubat Olivier, « La France et le royaume de Chypre », art. cité, p. 10-13.

31 Voir la carte (figure 1).

32 Longnon Jean et Topping Peter, Documents sur le régime des terres, op. cit., p. 150.

33 Ibid., p. 152-153.

34 Ibid., p. 153. Les Assises de Romanie stipulent en effet que le prince ne peut punir un de ses barons, ni retenir son fief sans avoir consulté tout ou partie de ses hommes-liges. Voir le Libro dele Uxanze, op. cit., 4, p. 118-119.

35 « A lu quale miss. Jan respusi camme non placea ca a madamma non fo servate le consuetudini de la patria, no le vollyo servare yo. » Voir Longnon Jean et Topping Peter, loc. cit.

36 Libro de los fechos, op. cit., 689, p. 152.

37 Livre de la conqueste, op. cit., p. 402. Sur la souveraineté angevine sur la Morée, voir Sampsonis Florence, Entre le roi et le prince. La principauté de Morée aux mains des rois de Sicile Charles Ier et Charles II d’Anjou (1267-1309), thèse d’histoire, dir. Jean-Marie Martin, Paris 1-Panthéon Sorbonne, 2016. Voir également l’article d’Isabelle Ortega.

38 Libro de los fechos, op. cit., 514, p. 113.

39 Ibid., p. 144-145 ; Bon Antoine, La Morée franque, op. cit., p. 205.

40 Cet échange permet notamment à Jean de Gravina d’échapper à l’hommage qu’il aurait dû rendre à Robert de Tarente. En effet ce dernier avait hérité en 1331 du titre d’empereur de Constantinople par son père Philippe Ier de Tarente. Or, comme nous l’avons vu, selon les Assises de Romanie, le prince de Morée – ici Jean de Gravina – doit hommage à l’empereur – donc Robert de Tarente. Jean refusa ces conditions et fit la guerre avec Robert pendant un an, avant l’arbitrage du roi Robert Ier de Naples, le frère aîné de Jean, qui organisa l’échange des titres entre l’oncle et son neveu.

41 Hasdenteufel Simon, « The Empress, the Florentine and Greece. Ruling between Italy and Latin Morea in the Mid-14th century », in Denise Bezzina, Aysu Dincer et Chiara Ravera, Gender, Networks, and Communities in Medieval Europe, Amsterdam University Press, à paraître.

42 Chrysostomidès Julian, Monumenta Peloponnesiaca: Documents for the History of the Peloponnese in the 14th and 15th centuries, Camberley, Porphyrogenitus, 1995, p. 171-189.

43 Ibid., p. 99-100.

44 Bon Antoine, La Morée franque, op. cit., p. 258-261.

45 Ibid., p. 234 ; Longnon Jean et Topping Peter, Documents sur le régime des terres, op. cit., p. 144 ; Troubat Olivier, « La France et le royaume de Chypre », art. cité, p. 12 ; Guérin Marie, Les dames de la Morée franque, op. cit., p. 45-46.

46 Chrysostomidès Julian, Monumenta Peloponnesiaca, op. cit., p. 10-21 ; id., « Was Neri Acciaiuoli Ever Lord of Vostitsa and Nivelet? », in Michael Heslop et Charalambos Dendrinos, Byzantium and Venice, 1204-1453: Collected Studies, Farnham, Ashgate, 2011, p. 504-509.

47 Ibid., p. 512-513.

48 Sur ce sujet, voir Carr Michael, Motivations and Response to Crusades in the Aegean: c. 1300-1350, thèse de doctorat de philosophie, dir. Jonathan Harris, Royal Holloway, université de Londres, 2011.

49 Libro de los fechos, op. cit., p. 122-124 et 132-136 ; Livre de la conqueste, op. cit., p. 403-404.


Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.