Chapitre X. L’argent, la guerre et l’État
p. 189-226
Texte intégral
« Trois choses sont absolument nécessaires pour mener une guerre victorieuse : premièrement de l’argent, secondement de l’argent, troisièmement de l’argent. »
Jacques de Trivulce, maréchal de France (lettre à Louis XII, début xvie siècle).
1Dire qu’à la fin du Moyen Âge la guerre a été le principal moteur dans le processus de la formation des États modernes peut être désormais considéré comme une tautologie1. Il est notoire qu’en cette période les coûts exorbitants occasionnés par la présence endémique de la guerre ont favorisé la centralisation des ressources financières et la mise en place d’une fiscalité plus performante par la plupart des monarchies, des principautés et des pouvoirs urbains2. Les cas de l’Angleterre et de la France, opposés dans l’interminable guerre de Cent Ans (1337-1453), sont bien connus et ont attiré depuis longtemps l’attention des chercheurs3. Nous l’avons vu, la principauté savoyarde vit depuis la fin du xiiie siècle, un état de belligérance presque permanent, qui va de pair avec une amélioration générale de ses structures administratives. Après les longs conflits régionaux contre les Habsbourg et le Dauphiné, les visées politiques et territoriales des Savoie deviennent plus ambitieuses et se traduisent par la création de nouveaux postes destinés à une meilleure gestion économique et logistique des conflits armés. Sur le plan institutionnel, l’éclosion de l’office de la Trésorerie de guerres (1388) est le symptôme le plus évident d’un État en construction qui cherche à dompter des dépenses militaires en constante augmentation.
2Dans ce chapitre, nous essaierons dans un premier temps d’estimer le coût de la guerre et son poids dans le bilan de la principauté. Nous nous intéresserons également aux différentes modalités du financement des conflits armés et, notamment, à leur lien avec le développement de la fiscalité4. C’est bien connu : si l’impôt fait l’État, c’est la guerre qui crée l’impôt… et la Savoie n’échappe pas à cette règle. Il importe toutefois de rappeler que notre recherche se base essentiellement sur l’exploitation des comptes militaires (inv. 29) et de la Trésorerie générale (inv. 16). Il s’agit donc de poser le premier jalon d’une étude qui devrait toutefois être complétée par le dépouillement et le croisement d’autres sources administratives savoyardes, tels que les comptes de l’Hôtel et des subsides5.
3Dans une perspective d’histoire financière, qui est celle de ce chapitre, il est nécessaire d’éclairer le lecteur au sujet des monnaies et des taux de conversion utilisés. Pour la première moitié du xive siècle, les montants sont généralement exprimés en monnaie de compte locale, principalement en livres viennois6. De ce fait, nous avons converti dans cette devise toutes les sommes d’argent considérées pour cette période7. Vers 1340, dans tous les pays avoisinant la vallée du Rhône, en Bourgogne, en Provence et notamment en Savoie, se met en place le système monétaire du florin-gros, qui remplace progressivement celui de la livre-sous8. Les montants que l’on retrouve dans les comptes vers le milieu du xive siècle sont donc pour la plupart exprimés en florins d’or de Florence, où 1 florin correspond à 12 gros, également appelés en Savoie « deniers gros » ou « gros de florin9 ». À partir de 1365 environ, le florin de petit poids (parvi ponderis) est la monnaie de compte que nous retrouvons majoritairement dans l’ensemble de notre documentation10.
Les coûts
4L’impact déficitaire de la guerre dans les finances savoyardes a déjà été constaté par d’autres travaux basés sur l’analyse des pièces comptables11. Le propos est maintenant d’élargir le cadre de ces études ponctuelles en menant l’enquête sur une temporalité plus longue. Pour ce faire, les dépenses militaires seront confrontées avec les recettes des receveurs/trésoriers généraux qui, depuis le milieu du xive siècle en tout cas, centralisent les revenus ordinaires (produit des châtellenies et des péages) et extraordinaires (impôt) des États de Savoie12. D’autres montants, tels que la valeur monétaire d’une principauté ou les dots, seront indiqués dans le but de fournir un ordre de grandeur aux coûts de la guerre.
L’impact financier de la guerre de Septante Ans : quelques résultats
5Pour la première moitié du xive siècle, dresser un bilan financier de la principauté savoyarde est assez ardu. D’une part, puisque la Trésorerie générale en tant que « caisse centrale » du comté n’apparaît timidement qu’à partir du règne d’Amédée VI13. L’éclosion en 1297 des comptes des receveurs de Savoie – qui tendent désormais à se distinguer de ceux tenus par les clercs de l’Hôtel pour la gestion des dépenses de la cour – n’est en effet pas encore symptomatique d’une concrète centralisation des revenus domaniaux14. Au début du xive siècle, il n’existe guère – si ce n’est pour les régions proches de Chambéry (Savoie-Propre, Maurienne et Tarentaise) – une hiérarchie administrative couvrant l’ensemble des territoires savoyards et impliquant une distribution homogène des ressources financières : nous observons plutôt des « passages horizontaux du numéraire d’une caisse à l’autre, au gré des mandats comtaux dictés par les nécessités du moment15 ». D’autre part, les rares comptes militaires conservés pour cette période ne nous permettent pas encore de mener une analyse sérielle des données chiffrées. Nous nous bornons ainsi à mettre en perspective les coûts des deux opérations les plus conséquentes : l’occupation d’Ambronay (1308) et le siège du château de La Corbière (1321).
6De mars à juin 1308, une armée forte d’environ 1 000 combattants à cheval et 15 000 fantassins est levée par Amédée V afin d’imposer sa domination dans la plaine d’Ambronay et permettre la jonction des bailliages du Bugey et de la Bresse16. Les comptes tenus pour cette expédition attestent d’une dépense d’environ 4 000 livres viennois. À titre de comparaison, ce montant équivaut à la dot de Catherine de Savoie, mariée en 1315 à Léopold Ier de Habsbourg (4 200 livres viennois)17. Il s’agit de la première dépense militaire d’une telle envergure que nous retrouvons dans la documentation comptable savoyarde. Le trésor d’Amédée V n’arrive d’ailleurs pas à prendre complètement en charge les salaires des combattants convoqués, étant donné que le décompte des paiements montre qu’une partie de ceux-ci, à la fin des hostilités, se retrouvent créditeurs d’environ 1 000 livres viennois envers les agents payeurs du prince18.
7L’effort économique mis en œuvre par le comte de Savoie est d’autant plus significatif si nous le comparons aux dépenses des châtellenies et des receveurs, également très sollicités dans le financement des conquêtes d’Amédée V. En 1308, l’ensemble des châtellenies de Bresse et du Bugey déboursent pour la guerre contre le dauphin 275 livres viennois19. De 1286 à 1307, les comptes du châtelain de Montmélian, qui dirige personnellement un grand nombre de sièges et de chevauchées, attestent d’une dépense de 2 250 livres viennois pour l’amélioration des fortifications et le paiement de salaires des gens d’armes20. Les receveurs généraux, quant à eux, enregistrent entre 1303 et 1305 des frais de guerres annuels d’environ 1 000 livres viennois, à savoir 58 % du total de leurs livrées21. En additionnant les dépenses soutenues par les différents appareils administratifs savoyards, durant la première décennie du xive siècle, le coût du conflit contre le dauphin peut être estimé autour de 12 000 livres viennois. Il s’agit bien sûr d’un montant considérable, qui ne représente toutefois pas encore le coût majeur généré par la politique territoriale savoyarde : pour l’achat du Revermont (1289), Amédée V a dû verser à Robert II de Bourgogne 16 000 livres viennois22.
Tableau 18. – Les dépenses de deux opérations de la guerre de Septante Ans (1308 et 1321), montants en livres viennois.
Guerre | Dépenses | Recettes du receveur de Savoie | % dépenses/recettes | |
1308 | Ambronay | 4 098 | 4 500 | 91 |
1321 | La Corbière | 9 500 | 16 610 | 57 |
8Le deuxième compte de notre corpus concerne le siège du château de La Corbière de 132123. Pour avoir raison de ce château-fort, essentielle de par sa position stratégique sur le Rhône dans la lutte contre le comte de Genève, le trésor d’Amédée V dépense 9 500 livres viennois, destinées à la construction et au transport des machines de guerre ainsi qu’au paiement des gages d’environ 3 700 piétons et 400 combattants à cheval24. C’est la première fois que les Savoie mettent en œuvre de tels moyens financiers dans une guerre de siège, qui dura six semaines en tout. Le coût de l’opération correspond à 57 % des revenus du receveur général, qui durant lu siège de La Corbière dispose d’une liquidité vraisemblablement plus consistante qu’au tout début du xive siècle25. Il s’agit d’un effort financier indéniable, dont les comptes attestent néanmoins d’une prévision plus correcte par rapport à la guerre d’Ambronay, étant donné que les gens d’armes mobilisés sont payés pour la totalité de leur service, y compris les trajets d’aller et de retour.
9Pour donner un ordre de grandeur des coûts de la guerre de Septante Ans, nous pouvons comparer nos chiffres avec ceux connus pour les royaumes d’Angleterre et de France. Dans la dernière décennie du xiiie siècle, la couronne anglaise dépense pour ses guerres environ 2 000 000 livres tournois (3 300 000 livres viennois), c’est-à-dire plus que l’ensemble des revenus de l’Échiquier26. À la même époque, les dépenses militaires de Philippe le Bel s’élèvent à environ 2 125 200 livres tournois (3 542 000 livres viennois)27. La mise en rapport de ces montants avec ceux pris en charge par le trésor savoyard redimensionne les moyens financiers à disposition du comté d’Amédée V, soulignant le caractère finalement assez régional de la guerre de Septante Ans28.
Les frais de la conquête
10À partir du principat d’Amédée VI, nous disposons pour chaque campagne militaire d’un compte particulier relatant la majorité des coûts supportés pour sa réalisation. La meilleure rationalisation des dépenses et la distribution plus homogène des ressources financières – conséquence de l’institutionnalisation, en 1351, de la Trésorerie générale au sommet de la hiérarchie administrative – nous permettent de mieux saisir l’impact des guerres sur les finances du comté de Savoie29.
Tableau 19. – Les dépenses de guerre d’Amédée VI [I] (1352-1355), montants en florins d’or.
Guerre | Dépenses | Recettes de la Trésorerie générale pour les années concernées | |
1352 | Valais | 1 358 | 2 241 |
1352-1353 | Pays de Gex | 17 410 | 23 365 |
1355 | Faucigny | 173 270 | 13 812 |
11Une fois sa majorité atteinte en 1348, Amédée VI entreprend en une décennie trois expéditions de taille. Si la guerre en Valais n’a pas généré un coût insurmontable, les conquêtes du pays de Gex et, en particulier, celle du Faucigny ont assurément représenté un défi pour les caisses de la principauté savoyarde, amputées par la crise, économique et démographique, provoquée par l’épidémie de Peste noire de 134830. La somme respectable de 173 270 florins dépensée pour l’occupation du Faucigny représente vingt-cinq fois le revenu annuel des châtellenies du nouveau bailliage, estimé à 7 000 florins environ31. Le coût de cette expédition dépasse même celui de l’achat d’une principauté entière : pour l’acquisition du Dauphiné, finalisée en 1349, le roi de France a déboursé 120 000 florins ; dix ans plus tard, Amédée VI en paiera 160 000 pour racheter la baronnie de Vaud32. Cette dépense sans précédent est révélatrice de l’importance accordée par Amédée VI à l’annexion de cette baronnie, octroyant une certaine homogénéité territoriale à la mosaïque hétéroclite qui formait sa principauté. Pour mener à bien l’opération, le Comte Vert réalise d’ailleurs un véritable blocus de la vallée de l’Arve, effectué grâce au déploiement spectaculaire de plus de 20 000 hommes33.
Tableau 20. – Les dépenses de guerre d’Amédée VI [II] (1361-1380), montants en florins de bon poids.
Guerre | Dépenses | Recettes de la Trésorerie générale pour les années concernées | % dépenses/recettes | |
1361-1363 | Piémont | 142 937 | 162 503 | 88 |
1366-1367 | Croisade | 374 755 | 227 821 | 164 |
1378-1380 | Bresse | 30 697 | 87 226 | 35 |
12À partir de 1360, les réformes administratives mises en place par Amédée VI se reflètent dans le système financier savoyard : la Trésorerie générale centralise toujours plus les rentes domaniales et féodales (affermage des vignes et des moulins, droits de marché, péages, etc.), seigneuriales (dîmes, bans, etc.) et le produit de l’impôt34. Les montants exprimés dans le tableau 20 illustrent ainsi plus précisément les revenus globaux du comté bien qu’il subsiste toujours une certaine disproportion entre les coûts de la guerre et les recettes de la Trésorerie générale. Pour la chevauchée au Piémont, il faut néanmoins considérer que le trésorier général Pierre Gerbais, une fois les hostilités terminées, encaisse la somme de 41 000 florins du marquis de Saluces, ce que lui fait récupérer plus d’un quart des dépenses prises en charge entre 1361 et 136335. Quant à la croisade dans les Dardanelles, elle a été réalisable grâce aux prêts demandés aux banquiers italiens et aux subsides récoltés pendant l’été 1368, après le retour victorieux d’Amédée VI en Savoie36. En dépit du grand effort économique demandé par les nombreuses campagnes du Comte Vert, ses troupes sont en principe rétribuées régulièrement et le plus souvent pour l’intégralité de leur service. Entre 1361 et 1375, les comptes signalent très rarement des cas où les combattants ne reçoivent pas la totalité de leur créance37. La situation semble quelque peu empirer en 1380, durant la guerre contre les Beaujeu, pour laquelle les gens d’armes ne perçoivent que deux tiers de leur solde. Dans ce sens, la situation empire au cours du principat d’Amédée VII.
Tableau 21. – Les dépenses de guerre d´Amédée VII (1383-1390), montants en florins de petit poids.
Guerre | Dépense | Soldes dues aux combattants | Recettes de la Trésorerie générale pour les années concernées | % dépenses/recettes | |
1383 | Flandre | 11 182 | 9 528 | 53 366 | 21 |
1384 | Piémont | 4 962 | 854 | 57 256 | 9 |
1384 | Valais | 20 647 | 4 045 | 57 256 | 36 |
1386 | Piémont | 6 133 | 1 761 | 42 012 | 14 |
1386 | Flandre | 15 727 | 7 995 | 42 012 | 37 |
1387 | Piémont | 43 803 | 21 684 | 44 107 | 99 |
1388 | Nice | 15 692 | 4 729 | 48 107 | 32 |
1390 | Italie du Nord | 22 490 | 4 304 | 51 556 | 44 |
13Par rapport au milieu du xive siècle, les dépenses générées par les guerres d’Amédée VII s’insèrent de manière plus harmonieuse dans le bilan de la principauté savoyarde38. À la lecture du tableau 21, il apparaît qu’elles sont surtout considérables à l’occasion des conflits dans le Piémont oriental, étant donné que le coût total de ces opérations (75 545 florins) équivaut aux recettes d’environ deux ans de la Trésorerie générale39. Il est vrai que le Comte Rouge n’entreprend pas d’expéditions d’envergure à l’extérieur de ses domaines comme l’avait fait son père : les contingents envoyés en Flandre sont finalement assez modestes et ils sont enrégimentés en grande partie par les trésoriers du roi de France. De plus, nous ne retrouvons pas à cette époque de conflits de longue durée. À part les affrontements en Canavais, qui se prolongent pendant environ huit mois étalés sur trois ans, les autres périodes de belligérance ne dépassent que rarement les trois mois40. En revanche, des crédits considérables sont accordés aux gens d’armes. En 1387, pour la dernière guerre au Piémont, 33 % des gages ne sont pas rétribués aux troupes. De même, un tiers des combattants qui ont participé à la chevauchée de Nice n’ont pas reçu de salaire. Les débours du trésorier général, encore en 1402, pour des réliquats de nobles qui avaient combattu au sud de l’Italie vingt ans auparavant, démontrent de la difficulté des caisses d’Amédée VII à régler les soldes de ses combattants41.
De la modération d’Amédée VIII à la débâcle de Louis Ier
14Si l’on exclut la période d’hostilité sans répit au Piémont au début du xve siècle, la première partie du principat d’Amédée VIII n’est pas caractérisée par de grands faits d’armes42. L’impact économique de la « guérilla » entreprise par Facino Cane est toutefois conséquent, représentant, en 1400, plus du 60 % des revenus de la Trésorerie générale43. Les opérations militaires les plus significatives menées après l’érection ducale obtenue en 1416, celles contre les Visconti (1426-1427) et le marquis de Montferrat (1432-1435), ont absorbé 30 % et 55 % des recettes du duché. Les frais pris en charge par Pierre Masuer, le premier maître de l’artillerie de Savoie, s’élèvent pour ces deux guerres à 457 et 25 083 florins, représentant respectivement 0,7 % et 14 % des dépenses totales. L’augmentation des coûts liés aux engins à poudre est révélatrice de l’importance croissante accordée par Amédée VIII à ces armes nouvelles, qui entraînent la tenue d’une comptabilité spécifique44.
Tableau 22. – Les dépenses de guerre d’Amédée VIII (1400-1439), montants en florins de petit poids.
Guerre | Dépenses | Soldes dues aux combattants | Recettes de la Trésorerie générale pour la période concernée | % dépenses/recettes | |
1400 | Piémont | 33 124 | 1 977 | 52 094 | 63 |
1422 | Valentinois | 15 579 | 148 621 | 10 | |
1426-1427 | Milan | 59 082 | 3 405 | 190 971 | 30 |
1432-1435 | Montferrat | 176 592 | 20 721 | 318 696 | 55 |
1435 | Chivasso | 13 477 | 84 786 | 16 | |
1437 | Venise | 23 450 | 2 331 | 161 218 | 15 |
1439 | Bresse | 2 244 | 79 931 | 3 |
15Pour la première moitié du xve siècle, le rapport entre les coûts de la guerre et les revenus des États Savoyards est inférieur par rapport à celui constaté précédemment. À cet égard, il faut considérer que le nouveau duché d’Amédée VIII bénéficie d’entrées plus consistantes, dues notamment aux revenus des nouvelles acquisitions territoriales, telles la principauté des Savoie-Achaïe (1418) et le Genevois (1424), ainsi qu’à une pression fiscale toujours plus contraignante exercée par le pouvoir ducal45. Le tableau 22 atteste ce fait de manière indiscutable : la Trésorerie générale jouit de recettes annuelles atteignant souvent les 150 000 florins, alors que durant le gouvernement d’Amédée VII celles-ci ne dépassent que rarement les 50 000 florins46. Nous observons également une meilleure solvabilité des caisses savoyardes, qui disposent dans la plupart des cas de liquidités suffisantes à payer l’intégralité des soldes des troupes. Les réformes administratives mises en place par Amédée VIII en 1430 (Statuta Sabaudiae) sont probablement à l’origine de ce changement, étant donné qu’elles obligent formellement les trésoriers des guerres à régler les gages des gens d’armes « selon leur rang et pour la totalité de leur service auprès du prince47 ». De plus, comme nous l’avons déjà constaté, l’institutionnalisation des offices du maréchal et du trésorier des guerres, finalisée par cette nouvelle législation, amène à des contrôles plus réguliers de la part des autorités savoyardes. Ces dernières appliquent dès lors des déductions systématiques aux salaires des gens d’armes ne disposant pas d’un armement adéquat ou d’un nombre suffisant de montures, des mesures disciplinaires qui ont certainement eu des incidences sur les dépenses des guerres48.
16Nous arrivons enfin au principat de Louis Ier (1440-1465), généralement associé à une période de crise institutionnelle et financière. Ce fait est clairement illustré par le tableau 23, réalisé à partir des données fournies par les comptes de la Trésorerie des guerres et de la Trésorerie générale.
Tableau 23. – Les dépenses de guerre de Louis Ier (1443-1452), montants en florins de petit poids.
Guerre | Dépenses | Soldes dues aux combattants | Recettes de la Trésorerie générale pour la période concernée | % dépenses/recettes | |
1443 | Bresse | 16 629 | 61 328 | 27 | |
1444 | Bresse | 35 424 | 7 341 | 76 254 | 46 |
1447 | Piémont | 50 083 | ? | 177 517 | 28 |
1448 | Fribourg | 60 960 | 98 733 | 61 | |
1449 | Piémont | 150 083 | ? | 159 462 | 94 |
1452 | Bresse | 698 | 73 357 | 1 |
17Les opérations de renforcement des garnisons de frontières de la Bresse, menacées entre mai 1443 et juillet 1444 par les Écorcheurs, coûtent l’équivalent de 40 % des entrées sur deux ans de la Trésorerie générale, qui participe également avec 38 000 florins au financement des contingents envoyés dans une région où l’ennemi ne fera finalement que des timides apparitions49. Le conflit contre la ville de Fribourg occasionne une dépense de 60 960 florins, près de 60 % des ressources de l’État, en absorbant également une bonne partie du trésor de la Chambre apostolique de Félix V50. Le coût de la désastreuse campagne au bord de la Sesia contre Francesco Sforza, scellée avec la cuisante défaite de Borgomanero (avril 1449), s’élève à environ 150 000 florins, montant qui phagocyte la totalité des revenus annuels du duché51. La mise en gage des bijoux et de la vaisselle de cour, la demande incessante d’argent de Louis à son père, les plusieurs cas de désertion de la part de combattants n’ayant pas reçu leur solde sont autant d’éléments qui attestent de la situation critique dans laquelle se trouvent les caisses savoyardes en cette période52. La guerre au Piémont contre les Valpergue (1460) tout comme l’expédition en secours à Chypre (1460-1461), dont le coût s’élève à environ 125 000 florins, ne font qu’aggraver l’état général des finances ducales53.
18Pour comprendre ce bilan déficitaire, il faut considérer que les innombrables et ruineuses guerres de Louis Ier se greffèrent à une situation économique déjà visiblement précaire. Pensons par exemple aux frais de l’élévation ducale de 1416 (25 500 florins) ou à l’élection d’Amédée VIII au concile de Bâle, en octobre 1439 (25 000 florins)54. À ceux-ci s’ajoutent encore les dépenses de deux cours et administrations distinctes : celle du duc et sa femme Anne de Lusignan, installée à Turin depuis septembre 1447 ; et celle de son père Félix V, itinérante entre Lausanne et Genève55. Hormis la guerre, les difficultés financières du milieu du xve siècle sont ainsi également à attribuer à l’onéreux gouvernement bicéphale d’un État « tiraillé entre deux cultures politiques à unifier, deux cours princières à ravitailler, deux frontières peu sûres à garder56 ».
Le financement
19Comme nous venons de le constater, l’entretien des armées génère la dépense la plus lourde dans le bilan des États de Savoie, obligeant les princes à trouver rapidement des fonds de liquidités. Sur cette question, les recettes des comptes militaires recèlent des renseignements de premier ordre : elles mentionnent le montant versé, son origine, l’intermédiaire, ainsi que, dans la plupart des cas, la date et le lieu où la somme a été reçue par l’officier en charge de l’expédition. Toutes ces données nous permettent d’observer sur une longue durée le mouvement des capitaux destinés au financement des guerres et, en conséquence, de mieux comprendre l’évolution des structures administratives de la principauté.
La guerre d’Ambronay et le siège de La Corbière… aux frais de la noblesse
20Les descriptifs des recettes du compte tenu par Pierre d’Arvillard, bailli de Bâgé, pour la guerre d’Ambronay (1308) ne présentent pas encore un caractère très détaillé. Le manque de précision des écritures comptables nous laisse d’ailleurs des doutes quant à la véritable origine de certains montants. Nous pouvons néanmoins relever l’apport considérable des prêts accordés par la noblesse et les bourgeois d’Ambronay, représentant environ 45 % du total des entrées, se montant à 4 064 livres viennois. Cette somme importante se compose également des versements effectués par Antoine de Clermont, receveur de Savoie, ou par des membres de l’entourage comtal (24 %), ainsi que par les contributions des châtellenies de Bresse et de Bugey (21 %), en particulier Bourg-en-Bresse, Pont-d’Ain, Saint-Germain et Saint-Rambert. Le 10 % restant est, pour la plupart, fourni par des versements de particuliers, à l’instar des 370 livres viennois versées par le chevalier Berlion de Rovorée57.
21Une quinzaine d’années après, le siège du château de La Corbière coûtera à peu près le double (9 500 livres viennois) de l’expédition d’Ambronay, même s’il dura moins longtemps. Les recettes du compte de Guillaume de Châtillon, receveur du Chablais, montrent une cinquantaine d’entrées, regroupées par rubriques se référant à des personnes ou à des types de ressources particulières. Celles-ci débutent avec les sommes versées par les châtelains et péagers du Chablais (16 %) et elles se poursuivent avec les cens payés par les communautés juives (3 %), puis avec les compositions négociées avec divers seigneurs à propos de frais de mutation (5 %). Viennent ensuite des dons, assez modestes d’ailleurs, accordés à nouveau par les Juifs, par l’abbaye de Saint-Maurice et certaines communautés d’habitants (1 %)58. Le compte enchaîne avec une longue liste de prêts concédés le plus souvent par des représentants de familles seigneuriales (52 %), qui sont pour la plupart gagés sur les revenus du domaine direct savoyard, soit les châtellenies, mais le plus souvent sur les péages de Villeneuve et de Saint-Maurice59. Nous trouvons enfin une vingtaine d’entrées rassemblées dans une rubrique intitulée « reçu du comte » (23 %), où sont enregistrés les montants transmis à Guillaume de Châtillon par l’intermédiaire de personnages de l’entourage d’Amédée V, tels que le receveur général ou son barbier60.
22L’analyse des recettes de ces deux premiers comptes présente comme caractéristique principale une grande diversité des sources de financement. Au début du xive siècle, nous constatons finalement l’implication assez faible assumée par les receveurs de Savoie, dont les versements ne représentent jamais plus du quart de l’argent récolté. En revanche, le recours au crédit, dans lequel la noblesse joue un rôle majeur, est essentiel. Pour le siège de La Corbière, le seul prêt octroyé par Othon Ier de Grandson s’élève à 1 300 florins, soit environ 23 % de l’ensemble des recettes61.
La quête effrénée de liquidité d’Amédée VI ou l’épuisement du trésor dynastique
23Au milieu du xive siècle, l’incessante activité militaire d’Amédée VI demande une liquidité de fonds dans des proportions inédites, en particulier durant la longue et onéreuse campagne du Faucigny de 1355. Nicod François, premier officier à porter le titre de trésorier général, est désigné par le jeune prince en tant que responsable financier de cette opération délicate62.
24Les recettes de l’expédition en Faucigny enregistrent d’abord des versements effectués à quelques jours d’intervalle (entre le 31 mars et la fin d’avril 1355) ; le premier de 35 000 florins, le second de 40 000 florins et le troisième de 20 000 florins, puisés par Nicod François dans la « salle voûtée » (crota) du château du Bourget63. À cette somme de 95 000 florins, il faut peut-être encore ajouter les 40 000 florins « reçus du seigneur » et transmis par le châtelain de Bâgé et Guillaume Bon de Chambéry, officier qui avait auparavant occupé la charge de receveur de Savoie64. L’encore embryonnaire Trésorerie générale d’Amédée VI n’est donc pas qu’une simple structure administrative, elle renvoie aussi à l’existence d’un trésor dynastique, apparemment bien garni et promptement disponible. C’est peut-être d’ailleurs à ce fonds de liquidités que fait allusion le chroniqueur Cabaret, lorsqu’il mentionne le « très grand trésor » dont Amédée VI peut disposer au moment de son accès à la dignité comtale en 1352 : « et fut gouverné le conte Amé en son enfance sy vaillamment que ses gouverneurs luy esparmerent, oultre feire ses guerres, deffenses et tenir son estat, ung tres grand tresaur sans celuy de son pere luy lessa, lesqueulx tresaurs, quant vint en age d’ome, il emploia moult honorablement65 ». Les autres recettes engrangées par Nicod François en 1355, souvent arrondies à la centaine ou au millier, sont des versements réalisés par des officiers aux compétences administratives bien définies, comme le maître de la monnaie de Bourg-en-Bresse et surtout les baillis des États de la Maison de Savoie, Piémont compris. Comme l’illustre le tableau 25, la Bresse et le Bugey sont les bailliages les plus sollicités : ils représentent à eux seuls environ 73 % des donations versées par l’ensemble des châtellenies66.
Tableau 24. – Répartition des recettes du compte de Nicod François (Faucigny, 1355), montants en florins d’or.
Montants | % | |
Trésor comtal | 95 000 | 49 |
Châtellenies (Savoie et Piémont) | 52 330 | 26 |
Guillaume Bon de Chambéry | 40 000 | 21 |
Maître de la monnaie de Bourg-en-Bresse | 4 500 | 2,3 |
Prêts casanes lombardes | 3 500 | 1,7 |
Total | 195 300 | 100 |
Tableau 25. – Versements des officiers territoriaux pour le financement de la guerre en Faucigny (1355), montants en florins d’or.
Montants | % | |
Bailliage du Bugey | 33 000 | 62 |
Bailliage de Bresse | 6 000 | 11,5 |
Bailliage du Chablais | 3 330 | 6 |
Bailliage d’Aoste | 2 500 | 5 |
Châtellenie de Suse | 2 000 | 4 |
Clavaire d’Ivrée | 2 000 | 4 |
Clavaire de Chieri | 2 000 | 4 |
Châtellenie de Maurienne | 1 500 | 3 |
Total | 52 330 | 100 |
25Le compte du clerc Antoine Maillet, auquel Amédée VI confie la gestion financière des chevauchées menées au Piémont entre 1361 et 1363, dénombre dans les six premières peaux du parchemin une centaine d’items exprimant la provenance de l’argent dans ses recettes67. Les florissants marchés de l’Italie du Nord incitent le comte de Savoie à chercher du crédit auprès de banquiers. Ces derniers lui assurent une levée d’argent à la hauteur de 16 642 florins, à savoir 23 % des entrées68. La Trésorerie générale représente la deuxième source de financement la plus importante (16 %) : son soutien au trésor de guerre s’accroît d’ailleurs considérablement pendant l’été 1363, lorsque le clerc Reynaud de Lys rejoint le contingent savoyard engagé contre le marquis de Saluces avec 80 000 florins reçus du trésorier général Pierre Gerbais69. Étant donné qu’entre 1361 et 1363, les entrées annuelles de la Trésorerie générale sont en moyenne d’environ 50 000 florins, il est légitime de formuler l’hypothèse que l’expansion territoriale au Piémont ait été réalisable, encore une fois, grâce au trésor dynastique, associé par les maîtres auditeurs de Chambéry aux liquidités de la Trésorerie générale.
Tableau 26. – Répartition des recettes du compte d’Antoine Maillet (Piémont, 1361-1363), montants en florins de bon poids.
Montants | % | |
Prêts banquiers | 16 642 | 23 |
Trésorerie générale | 11 866 | 16 |
Châtellenies (Piémont et Tarentaise) | 9 983 | 14 |
Maître de l’Hôtel | 9 588 | 13 |
Rachat du service militaire | 6 828 | 9 |
Prêts noblesse | 6 433 | 8 |
Vente de châteaux | 6 152 | 8 |
Seigneur de Beaujeu | 3 374 | 5 |
Judicature de Savoie | 2 337 | 3 |
Vente cire et épices | 1 029 | 2 |
Total | 74 232 | 100 |
26Durant ces années marquées par des conflits constants au sud des Alpes, Amédée VI n’hésite pas à puiser dans les fonds du maître de l’Hôtel, habituellement réservés aux dépenses de sa cour70. Cette dernière contribue à l’effort de guerre avec un pourcentage tangible (13 %), de peu inférieur aux versements fournis par les châtellenies de Piémont et de Tarentaise (14 %). Nous apercevons pour la première fois dans les recettes d’un trésorier savoyard les revenus du rachat du service militaire (9 %). Il s’agit de montants généralement encaissés par les baillis et les châtelains qui, depuis la fin du xiiie siècle, s’occupent d’amender les hommes qui ne se présentent pas à la « chevauchée du seigneur71 ». Le tableau 26 illustre également l’intervention de sources de financement qui n’avaient jamais encore été sollicitées jusqu’à présent. En novembre 1361, une partie des revenus de la justice (3 %) sont envoyés à Antoine Maillet en tant qu’emprunts négociés entre Amédée VI et le juge Jean Lageret. De même, les produits de la vente de cire et d’épices (2 %) sont transmis au trésor de guerre par l’entremise d’Aymon de Challant72. Dans l’intention de disposer de suffisamment d’argent pour faire face aux grands coûts engendrés par son armée, le comte de Savoie ne dédaigne pas la vente en espèces de quelques châteaux, ce qui lui permet de bénéficier immédiatement d’un fonds de liquidités73. Il s’agit d’entrées (8 %) aussitôt dépensées pour payer les troupes et galvaniser leur morale à la veille du siège de Saluces74.
27L’hétérogénéité et les grandes différences de numéraire des montants perçus par les trésoriers militaires attestent de la spasmodique recherche d’argent pour les onéreuses expéditions du Comte Vert. Durant la seconde partie de son règne, le recours à l’emprunt est le moyen privilégié pour pallier le trou budgétaire provoqué par sa politique expansionniste. Il ne s’agit toutefois plus de « prêts forcés » fournis par la noblesse savoyarde, mais de véritables crédits gagés parfois sur des objets précieux. Le coût de la croisade de 1366 a été couvert à la hauteur de 20 % (environ 74 000 florins) par des prêts obtenus auprès de banquiers vénitiens et génois75. En 1383, les emprunts obtenus grâce à la mise en gage de la vaisselle représentent 24 % du financement de la campagne menée par Amédée VI aux côtés de Louis Ier d’Anjou76. Quant aux versements des officiers territoriaux, ils constituent toujours un pourcentage non négligeable, variant entre 14 % et 26 % des recettes. Ils témoignent d’une contribution plus étendue des domaines savoyards par rapport au début du xive siècle, où seules les châtellenies les plus proches du théâtre de la guerre, voire celles directement impliquées dans celle-ci, contribuent à son financement.
La stabilisation de la Trésorerie des guerres et l’amélioration des rouages administratifs
28Pour la période allant de 1383 à 1415, les recettes du trésorier des guerres Pierre Voisin s’élèvent au total à 206 691 florins77. Les considérables montants qu’il perçoit de la Trésorerie générale, dont le plus élevé atteint les 21 600 florins, atteignent 68 % des recettes78. Pierre Magnin, maître de l’Hôtel, contribue à plusieurs reprises à l’accroissement de ses liquidités (8 %), en particulier à l’occasion de la chevauchée à Nice, où son seul versement de 8 591 florins pallie plus de la moitié du coût de l’expédition (environ 15 700 florins)79. Les 12 183 florins transmis par Guillaume d’Enfernet (6 %), trésorier des guerres de Charles VI, sont perçus par Pierre Voisin en raison de l’aide apportée par la Savoie contre les Anglais en Flandre80. Les versements des maréchaux Boniface de Challant et Jean de Vernay (3,5 %) donnent en revanche une idée de la disponibilité en espèces de ces représentants de la haute aristocratie savoyarde, parfois obligés d’avancer de leur poche l’argent nécessaire à l’entretien de l’armée81. En 1390, la mise en gage des bijoux et de la vaisselle de la comtesse Bonne de Bourbon ramène en tout 15 000 florins et permet le financement de l’expédition en Italie contre la ligue formée par Florence et Bologne82.
29Le reste des fonds encaissés par la Trésorerie des guerres provient en partie de la dot de l’épouse d’Amédée VII, Bonne de Berry, auquel s’ajoutent les subsides versés par les communautés et par le clergé. Force est de constater, enfin, que les revenus domaniaux ne figurent que rarement dans les recettes du trésor de guerre qui, entre 1383 et 1415, encaisse directement des châtellenies seulement 918 florins, seulement 0,4 % du total des recettes. Ce dernier élément ne doit pourtant pas nous faire croire à une diminution de leur contribution. En ces années, nous assistons à une centralisation plus marquée du surplus financier des châtellenies au profit de la Trésorerie générale qui, par la suite, se préoccupe de les redistribuer à la Trésorerie des guerres. Les réformes des procédures et de l’organisation financière mises en place par Bonne de Bourbon à la fin du règne de son fils sont probablement à l’origine de cet effort de canalisation des revenus de la principauté vers l’administration centrale83.
Tableau 27. – Répartition des recettes du compte de Pierre Voisin, trésorier des guerres (1383-1415), montants en florins de petit poids.
Montants | % | |
Trésorerie générale | 141 740 | 68 |
Maître de l’Hôtel | 16 775 | 8 |
Trésoriers du roi de France | 12 183 | 6 |
Maréchaux de Savoie | 7 344 | 3,5 |
Gages sur les bijoux de la comtesse (Bonne de Bourbon) | 7 000 | 3,5 |
Prêts noblesse | 6 450 | 3 |
Subsides | 5 884 | 3 |
Dot de Bonne de Berry | 4 250 | 2,5 |
Gages sur la vaisselle du comte | 2 344 | 1,5 |
Nice | 1 450 | 0,7 |
Châtellenies | 918 | 0,4 |
Judicature de Savoie | 190 | 0,1 |
Institutions religieuses | 163 | 0,1 |
Total | 206 691 | 100 |
30Au cours de la première moitié du xve siècle, le poids de l’administration centrale dans le financement de la guerre continue de s’accroitre. Lors de l’expédition en Valentinois (1422), 93 % des recettes de Giacomo Garretti, trésorier des guerres, sont versées par la Trésorerie générale84. Le reste de l’argent récolté par ce dernier provient des pièces de vaisselle fondues converties en monnaie à Chambéry en juillet 142285. La guerre contre les Visconti présente une répartition des recettes semblable à celle de la campagne en Valentinois : 83 % sont issus des versements du trésorier général ; 15 % proviennent des revenus de la gabelle du sel de Nice et Cuneo ; les 2 % restants se composent de 400 florins avancés par le marquis de Saluces et de 300 florins versés directement par l’Hôtel d’Amédée VIII86.
31La durée prolongée et le coût élevé (environ 177 000 florins) de la campagne en Montferrat (1432-1435) obligent le duc de Savoie à faire recours à des sources de financement plus diversifiées87. Aux importants montants versés par la Trésorerie générale (60 %), s’ajoutent les subsides encaissés grâce à la politique fiscale exercée sur les terres conquises par Amédée VIII (12 %), qui n’hésite pas à ordonner des réquisitions en nature dans les châteaux occupés par ses troupes (4 %). Les recettes de la Trésorerie des guerres montrent ensuite plusieurs versements provenant des officiers piémontais (5 %), se démarquant par leur rôle logistique dans le transfert des montants d’une trésorerie à l’autre88. Giacomo de Margara, trésorier de Verceil, et Filippo Guasco, receveur du Piémont, s’occuperont à plusieurs reprises d’aller chercher l’argent nécessaire à Ansermet de l’Espine auprès du trésorier général89.
Tableau 28. – Répartition des recettes du compte d’Ansermet de l’Épine, trésorier des guerres, florins de petits poids (1431-1435).
Montants | % | |
Trésorerie générale | 85 187 | 60,3 |
Impôts (Montferrat) | 17 100 | 12 |
Rachat du service militaire | 10 616 | 7,5 |
Déductions de salaires aux gens d’armes | 9 332 | 6,6 |
Prêts | 5 910 | 4,2 |
Garnisons du Montferrat | 5 462 | 4 |
Receveur du Piémont | 5 121 | 3,7 |
Trésorier de Verceil | 1 313 | 1 |
Capitaine de Santhià | 800 | 0,5 |
Clavaire de Biella | 304 | 0,2 |
Total | 141 145 | 100 |
32Pendant le règne de Louis Ier, la Trésorerie générale assume le rôle principal dans le financement des opérations militaires. Les recettes des comptes des trois campagnes menées en Bresse contre les Écorcheurs (1439, 1443 et 1444) et celle du conflit contre Fribourg (1448) proviennent presque exclusivement de celle-ci, à l’exception des quelques montants (1,7 %) octroyés par le receveur de Genève, Jean Vieux, qui encaisse depuis 1444 le surplus de plusieurs châtellenies et de la Chambre apostolique de Félix V, et par le châtelain de Bâgé (1,1 %)90. De même, 78 % de l’argent récolté pour la campagne contre Francesco Sforza (1449) est issu de versements effectués par le trésorier général Jean Maréchal91. À cette époque, les revenus et les subsides accordés par les communautés et les châtellenies disparaissent presque complètement des recettes des trésoriers des guerres.
33Le processus de centralisation des revenus de la principauté vers la Trésorerie générale semble définitivement s’accomplir durant la première moitié du xve siècle. Les Statuta Sabaudiae de 1430 précisent d’ailleurs que l’argent nécessaire aux trésoriers des guerres pour payer les soldes des gens d’armes « lui sera envoyé seulement par notre trésorier général92 ». À partir de 1445, plusieurs circulaires édictées par la chancellerie ducale ordonnent aux baillis, aux châtelains et aux péagers de verser leurs revenus uniquement au trésorier général de Savoie93. L’analyse des recettes des comptes militaires met ainsi en exergue une claire amélioration des rouages administratifs, marquée par une concentration sans précédent de tous les revenus des États savoyards au bénéfice du trésorier général94. En d’autres termes, si au moment de son apparition la Trésorerie des guerres fonctionne en concomitance à la Trésorerie générale – en encaissant à plusieurs reprises des revenus perçus généralement par cette dernière tels les subsides ou les dots – elle devient sous le principat d’Amédée VIII un poste dépendant de l’administration centrale.
34Jusqu’ici, nous avons déjà relevé un certain nombre d’éléments concernant les différentes formes de prélèvement fiscal adoptées par les souverains afin de faire face aux coûts de leur expansion territoriale. Il s’agira, dans la dernière partie de ce chapitre, de les catégoriser et de comprendre leur apport réel dans le bilan des États de Savoie.
L’impôt
35Entre 1270 et 1350, l’Occident médiéval connaît une période de taxation généralisée, allant de pair avec « un puissant démarrage de l’État95 ». La guerre a bien entendu joué un rôle prépondérant dans l’enclenchement de ce processus. Le royaume d’Angleterre, imbriqué dans un long et acharné conflit contre ses voisins insulaires (1277-1338) en est, dans ce sens, l’exemple paradigmatique96. En France, s’appuyant sur une propagande visant la défense du royaume, Philippe le Bel (1285-1314) lève un impôt direct basé sur le patrimoine de chacun, en donnant lieu, selon Xavier Hélary, à une véritable « révolution fiscale97 ». Ce sont les premiers pas vers la fixation d’un impôt permanent dont l’essor est à attribuer d’une part au paiement de l’énorme rançon du roi Jean le Bon, capturé par les Anglais à la bataille de Poitiers (1356), et, d’autre part, à la mise en défense du royaume sous Charles V (1364-1380)98. Au début du xive siècle, à une échelle plus régionale, un phénomène semblable s’enclencha également dans les territoires piémontais des Savoie-Achaïe : le prince s’attribue d’une fonction de protection du bien public, en exploitant la « nécessité militaire » dans le but d’accroître les subsides et légitimer la naissance d’une fiscalité publique, directe et étalée sur la majorité des terres domaniales99. Mais qu’en est-il pour le cas spécifique de la principauté savoyarde ?
Les différentes modalités du prélèvement
36Il importe avant tout de distinguer les différentes modalités de prélèvement fiscal pour la période envisagée100. Dans le sous-chapitre précédent, nous avons estimé l’apport financier des revenus habituels du domaine du prince, à savoir les ressources provenant des droits fonciers, seigneuriaux, féodaux, régaliens : terres, moulins et forêts pour n’en citer qu’une partie. Celles-ci sont récoltées par les officiers territoriaux (châtelains, baillis, et péagers) qui, par la suite, se chargent soit de les dépenser directement selon leurs nécessités, soit de les verser dans les caisses de l’administration centrale. Les coûts de la campagne d’Ambronay (1308) et du siège du château de La Corbière (1321) sont respectivement couverts pour 21 % et 16 % des surplus des châtellenies proches de Bresse, Bugey et Chablais. Durant l’hiver 1332, la châtellenie de Montfalcon contribue à la hauteur de 30 % au paiement des gages des hommes d’armes ayant participé aux chevauchées de Soirier, Monthoux et Bardonnèche101. En 1355, lors de l’occupation du Faucigny, les versements des officiers territoriaux parviennent à suppléer 26 % du coût total de l’opération102. Entre 1360 et 1363, pour le conflit contre les Saluces, les châtellenies du Piémont et de Tarentaise fournissent directement aux trésoriers militaires 14 % de leurs recettes103. À partir de la fin du xive siècle, nous l’avons vu, il n’est plus possible de quantifier précisément l’apport des châtellenies au financement de la guerre, étant donné que leurs revenus sont systématiquement centralisés vers la Trésorerie générale et de moins en moins dépensés sur place au gré des circonstances. Il apparaît toutefois évident que les seuls produits du domaine ne sont pas suffisants à supporter les croissantes dépenses de guerre, d’où la nécessité de la part des princes d’expérimenter d’autres formes de taxations, telles le rachat du service féodal et l’impôt direct.
37La durée imprévisible des chevauchées, le coût élevé de l’équipement ainsi que les risques liés à la pratique de la guerre sont autant de facteurs qui incitent de nombreux hommes à préférer payer plutôt que d’aller combattre pour leur seigneur. Le rachat du service féodal dû au seigneur par les vassaux (écuage) est une pratique ancienne qui, à la fin du Moyen Âge, se généralise à une grande partie des sujets sous la juridiction du prince104. Philippe le Bel a pu tripler les revenus de son royaume grâce à l’imposition de l’obligation du service d’ost à l’ensemble de la population (arrière-ban)105. De même, dans les premières décennies du xive siècle, Philippe de Savoie-Achaïe étend l’obligation du service militaire à « tous les hommes pouvant manier les armes », dans le but de renflouer ses caisses, amputées en ces années par les guerres incessantes contre le Dauphiné et les marquis du Montferrat et de Saluces106. Pour la période allant de 1297 à 1357, les revenus du châtelain de Pignerol issus du rachat du service militaire couvrent 61 % de ses dépenses de guerre, témoignant de l’efficacité, du moins au sud des Alpes, de ce type d’expédient fiscal107.
38L’impôt extraordinaire est représenté par le fouage, une taxe directe de quotité établie par feu, ou par la taille, fixée généralement par répartition territoriale. À partir du xve siècle, en Savoie, ces subsides sont accordés par les assemblées des Trois États, convoquées par les princes afin de négocier la levée de l’impôt avec les représentants des communautés108. À ces modes de prélèvement, s’ajoutent parfois les contributions indirectes, tels les droits de péage ou la gabelle, impôt prélevé sur la vente du sel109.
39L’historien Nicolas Carrier a efficacement synthétisé l’évolution des modalités du prélèvement fiscal dans la principauté savoyarde, en soulignant que l’impôt direct – une pratique exceptionnelle pendant la première moitié du xive siècle – se normalise au cours du principat d’Amédée VIII par l’assertion de la souveraineté savoyarde à l’intégralité de ses sujets, indépendamment de leur statut juridique110. Il s’agira pour nous, d’une part, de comprendre le lien entre la guerre et la levée des subsides et, d’autre part, de chiffrer le réel apport de l’impôt – le subside – en le comparant avec le coût effectif de l’expédition pour laquelle celui-ci a été en principe accordé.
De l’aide seigneuriale à l’impôt direct
40En 1313, dans le but de couvrir les frais de l’expédition organisée pour le couronnement impérial de son beau-frère Henri VII de Luxembourg, le comte de Savoie lève pour la première fois le subside général111. En s’appuyant sur le prétexte du traditionnel devoir d’aide au seigneur lorsqu’il accompagne le roi des Romains en Italie (regalia), Amédée V réussit à imposer une demande en espèces, basée sur la richesse de chacun – une forme d’impôt sur le revenu – à l’ensemble de ses sujets ainsi qu’aux hommes de ses vassaux, y compris ceux des seigneurs ecclésiastiques112. La documentation relative à cette expérimentation fiscale est trop lacunaire pour nous donner une idée de sa véritable portée pécuniaire, d’autant plus que nous ne connaissons pas le total des dépenses générées par l’entretien du contingent savoyard qui escorta Henri VII dans son Romfahrt113. Il n’en demeure pas moins que la levée de la regalia de 1313 accélère le processus de monopolisation fiscale de la part du prince, en faisant doubler les recettes comtales en une dizaine d’années114. Dès le principat d’Aymon (1329-1343), ces dernières contiennent plusieurs montants expressément récoltés par l’impôt direct, regroupés dans une rubrique spécifique intitulée « recettes des subsides » (recepte subsidiorum). En 1331 et en 1347, nous savons que le fouage a été appliqué respectivement au sein de plusieurs châtellenies, préalablement inspectées par des commissaires du comte de Savoie, chargés de compiler les listes des potentiels contribuables115.
41Durant le règne d’Amédée VI, les comptes nous donnent davantage de renseignements sur l’impôt et sur son apport aux caisses de la principauté. De retour de son expédition victorieuse en Valais, le Comte Vert réussit à contraindre ses sujets à l’aide seigneuriale, en raison de la colée reçue par le chevalier Guillaume de Grandson avant la bataille décisive contre les Valaisans116. Selon la coutume féodale, le prince pouvait en effet exiger ce type de subventions lors de quatre occasions : son adoubement ou celui de son fils aîné, le mariage de sa fille aînée (dot), le paiement de sa rançon et son départ en croisade117. Les recettes du trésorier général attestent bien d’une série de donations encaissées, entre le 2 juillet et le 15 décembre 1353, « pour la nouvelle chevalerie du seigneur118 ». Les montants sont très variés. L’évêque de Maurienne et le châtelain de La Rochette paient 100 florins. Les communautés de Saint-Symphorien et de Septème, en Viennois, en versent respectivement 100 et 10. Guillaume de Thoiry transmet l’ensemble des « dons » du bailliage du Val d’Aoste, s’élevant à 495 florins. Le chevalier Pierre de Montgelas, châtelain de Conflans, transmet au trésorier général 50 gros tournois. À la différence des regalia de 1313, l’impôt de 1353 n’est pas généralisé à l’ensemble de la population. Ce sont seulement certains bailliages – ceux appartenant au berceau de la dynastie – qui octroient le subside au prince : la Savoie (avec les vallées de Maurienne et de Tarentaise), le Bugey, le Viennois et le Val d’Aoste. Le total de ces donations se monte néanmoins à environ 1 000 florins, couvrant pour plus des deux tiers le coût de l’aventureuse expédition valaisanne (1 358 florins)119.
42Une dizaine d’années plus tard, entre 1360 et 1363, les guerres au Piémont engendrent une dépense non négligeable d’environ 143 000 florins120. Amédée VI n’hésite alors pas à exercer une pression fiscale sur les terres conquises aux Savoie-Achaïe, temporairement tombées sous sa juridiction121. Les communautés piémontaises octroient un subside, réparti par circonscription administrative, pour un total de 28 548 florins122. À ce montant s’ajoutent 696 florins requis à certaines familles de la noblesse piémontaise, en particulier les Luserna, qui concèdent une aide proportionnelle au nombre de feux de leurs seigneuries (fouage), fixé ici à un florin par feu123. Durant cette période, les recettes des comptes militaires attestent également de revenus perçus grâce au rachat du service en armes dû au prince par les communautés124. Il s’agit d’une forme de fiscalité généralement exercée à l’échelle locale par les châtelains, amendant les hommes ne se présentant pas à la « chevauchée », ou à l’« ost », convoqué par le prince125. Si l’on additionne ces montants (6 828 florins) à ceux encaissés grâce à l’impôt direct, nous arrivons à un total de 36 072 florins, qui pallie 24 % des dépenses militaires engendrées en ces années.
Tableau 29. – Répartition du subside accordé par les communautés piémontaises (décembre 1363), montants en florins de bon poids.
Montants | % | |
Pignerol | 5 000 | 17,5 |
Turin | 4 000 | 14 |
Moncalieri | 4 000 | 14 |
Chieri | 3 848 | 13,5 |
Vigone | 2 000 | 7 |
Villefranche | 1 500 | 5,2 |
Fossano | 1 500 | 5,2 |
Gassino | 1 000 | 3,5 |
Carignan | 1 000 | 3,5 |
Cavour | 900 | 3,2 |
Cumiana | 800 | 2,8 |
Bagnolo | 700 | 2,5 |
Cavallermaggiore | 600 | 2,1 |
Miradolo | 600 | 2,1 |
Perosa | 600 | 2,1 |
Saint-Martin | 500 | 1,8 |
Total | 28 548 | 100 |
Tableau 30. – Versements des communautés au trésorier Antoine Maillet pour le rachat du service militaire (18-08-1361 – 16-02-1362), montants en florins de bon poids.
Montants | % | |
Bailliage de Tarentaise | 3 056 | 44,8 |
Montjovet | 1 200 | 17,6 |
Chieri | 1 000 | 14,6 |
Cavour | 700 | 10,2 |
Pignerol | 312 | 4,6 |
Cirié | 200 | 2,8 |
Val de Suse | 120 | 1,8 |
Caselle | 100 | 1,5 |
Gassino | 80 | 1,2 |
Pancalieri | 60 | 0,9 |
Total | 6 828 | 100 |
43La machine fiscale savoyarde s’active à nouveau sur le territoire occupé lors de la croisade dans les Dardanelles. Les villes de Lemona, Lassillo et Mésembrie sont soumises à des tailles durant l’hiver 1366, ce qui rapporte 10 487 florins aux caisses d’Amédée VI126. En 1368, une fois de retour sur ses terres, le comte de Savoie s’appuie à nouveau sur l’aide seigneuriale dans le but de rembourser les dettes provoquées par « son voyage d’outremer127 ». À la différence de 1353, cette fois-ci c’est l’ensemble de ses sujets qui sont taxés. De plus, le tarif du fouage double, s’élevant à deux florins par feu par rapport au seul florin demandé aux communautés piémontaises quelques années auparavant. En 1368, le trésorier général encaisse ainsi du produit de l’impôt la somme respectable d’environ 105 000 florins, couvrant 31 % du coût de la croisade (374 755 florins)128.
44Au cours du principat d’Amédée VI, l’imposition du fouage se fait essentiellement par la demande du prince de l’aide seigneuriale, qui se révèle un moyen de pression fiscal plutôt efficace. Les deux subsides accordés en 1353 (adoubement d’Amédée VI) et en 1368 (croisade) couvrent respectivement 71 % et 31 % des frais engendrés, témoignant que les coutumes féodales pouvaient suppléer, du moins en partie, les trous budgétaires provoqués par les grandes expéditions129.
Tableau 31. – Récapitulatifs des subsides encaissés pour les guerres d’Amédée VI (1352-1368), montants en florins de bon poids.
Produit des subsides | Total | Dépenses | % dépenses/subsides | |||
Aide seigneuriale | Prélèvements aux nouveaux sujets | Rachat du service militaire | ||||
Valais (1352-1353) | 1 010 | 1 010 | 1 358 | 74 | ||
Piémont (1363) | 29 244 | 6 828 | 36 072 | 142 937 | 25 | |
Croisade (1367-1368) | 105 000 | 10 487 | 115 487 | 374 755 | 31 |
Le tournant du xve siècle, vers une fiscalité d’« État » ?
45Les études sur les finances d’Amédée VII ont déjà mis en avant le lien de causalité entre la guerre et l’intensification de la levée de l’impôt direct130. Comme l’avait déjà fait son père, le Comte Rouge réussit, entre mai 1385 et décembre 1388, à récolter pour sa « nouvelle chevalerie » le montant de 17 693 florins, correspondant à presque la totalité des dépenses de l’expédition contre les Valaisans (20 647 florins)131. Par rapport à l’impôt levé en 1353 par Amédée VI, les comptes dévoilent la contribution de l’ensemble des bailliages savoyards, à laquelle s’ajoutent des donations de la part des nobles, des communautés juives, des casanes lombardes et des institutions ecclésiastiques132. Ce constat va de pair avec le changement décisif qui s’opère pendant le gouvernement d’Amédée VII dans les modalités du prélèvement : la noblesse est toujours moins exemptée de l’impôt et les contribuables ne sont plus classés dans la documentation en fonction des liens juridiques qu’ils entretiennent avec le prince ou d’autres seigneurs, ce qui est révélateur du croissant monopole de la fiscalité par les comtes de Savoie au détriment des droits seigneuriaux traditionnels133. Toutefois, si l’impôt levé en 1388 pour les expéditions en Valais et en Provence couvre respectivement 58 % et 54 % des frais, l’onéreuse campagne menée en Canavais en 1387 (43 803 florins), ne sera contrebalancée qu’en faible partie par la réception du subside (16 %)134.
Tableau 32. – Subside encaissé par la Trésorerie générale pour l’adoubement d’Amédée VII (1384), montants en florins de petit poids.
Montants | % | |
Bailliages de Savoie, Bugey, Bresse, Valbonne et Val d’Aoste | 11 517 | 65 |
Juifs | 3 095 | 17 |
Institutions ecclésiastiques | 1 604 | 9 |
Lombards | 756 | 4 |
Noblesse | 721 | 4 |
Total | 17 693 | 100 |
Tableau 33. – Subside encaissé par la Trésorerie générale pour la guerre en Valais (1388), montants en florins de petit poids.
Montants | % | |
Bresse | 100 | 38 |
Bugey | 100 | 38 |
Savoie | 58 | 28 |
Total | 258 | 100 |
Tableau 34. – Subside encaissé par la Trésorerie générale pour la guerre en Canavais (1389), montants en florins de petit poids.
Montants | % | |
Bugey | 1 828 | 30 |
Bresse et Valbonne | 1 812 | 30 |
Piémont | 1 388 | 23 |
Faucigny | 561 | 9 |
Savoie, Maurienne, Tarentaise | 406 | 6 |
Total | 5 995 | 100 |
Tableau 35. – Récapitulatif des subsides encaissés pour les guerres d’Amédée VII (1384-1388), montants en florins de petit poids.
Subsides | Coût de l’expédition | % | |
Valais (1384) | 17 693 | 20 647 | 85 |
Piémont (1387) | 7 368 | 43 803 | 16 |
Valais (1387) | 258 | 444 | 58 |
Nice (1388) | 8 508 | 15 692 | 54 |
46Le xve siècle représente un tournant décisif. La fiscalité savoyarde s’accélère grâce à des convocations régulières et formalisées des assemblées des Trois États135. Pour les principats des premiers ducs de Savoie, Amédée VIII et Louis Ier, seules quelques années exceptionnelles (1419-1425 ; 1440-1444) ne verront pas les trésoriers généraux enregistrer dans leurs recettes la perception de subsides : la levée de l’impôt direct se stabilise et elle représente un revenu toujours plus consistant136.
47Les trente premières années du principat d’Amédée VIII n’ont pas connu de grands affrontements armés, à l’exception du conflit intermittent contre le condottiere Facino Cane. C’est précisément dans ce contexte que les sources administratives révèlent des subsides concernant « la guerre du seigneur au Piémont et en Lombardie137 ». Les communautés vaudoises accordent, entre le 17 et le 21 juin 1400, des dons qui varient entre 100 et 200 florins, correspondant au salaire de deux mois pour l’entretien respectif de cinq et dix lances à trois chevaux138. À cette occasion, les donations du clergé représentent environ un quart du subside total encaissé, couvrant 41 % des dépenses du trésorier des guerres pour l’année 1400 (33 124 florins).
Tableau 36. – Subsides encaissés par la Trésorerie générale pour la guerre contre Facino Cane (1400), montants en florins de petit poids.
Montants | % | |
Institutions ecclésiastiques | 3 949 | 45 |
Châtellenies (Bresse et Bugey) | 2 997 | 34 |
Noblesse | 1 664 | 19 |
Total | 8 610 | 100 |
Tableau 37. – Subsides encaissés par la Trésorerie des guerres pour la guerre contre Facino Cane (1400), montants en florins de petit poids.
Montants | % | |
Châtellenies (Val d’Aoste et Ivrée) | 2 630 | 51 |
Nobles et bourgeois vaudois | 1 525 | 29 |
Châtellenies (Pays de Vaud) | 962 | 18 |
Total | 5 117 | 100 |
48Dans les trois premières décennies du xve siècle, les comptes des trésoriers généraux enregistrent à plusieurs reprises la perception de l’impôt direct, sans toutefois systématiquement préciser si elle a un lien spécifique avec une expédition militaire. La guerre contre les Visconti de 1427 présente pour la première fois un cas de contributions fiscales indirectes, levées sur le transport et la vente de marchandises139. Celles-ci reposent sur l’exploitation des revenus de la gabelle du sel, destinée au paiement des gens d’armes et à l’amélioration des fortifications du Piémont140. Le produit de la gabelle (7 859 florins), transmis à la Trésorerie des guerres par Paganin Dupuis, gabeleur de Nice et Coni, pallie 13 % du coût de l’expédition en Lombardie (59 082 florins).
49L’occupation du Montferrat (1432-1435) est de loin l’opération la plus ruineuse du règne d’Amédée VIII. Dans les comptes de Barthélemy Chabod, trésorier général, nous retrouvons le subside encaissé pour son financement (29 567 florins)141. Nous remarquons, d’une part, la contribution à l’effort de guerre de l’ensemble des bailliages savoyards et des domaines du Piémont ; d’autre part, une participation plus consistante des institutions ecclésiastiques qui, à l’instar de la noblesse, sont toujours moins exemptées de l’impôt. Les comptes de la Trésorerie des guerres, quant à eux, attestent d’autres formes de revenus fiscaux (tableau 39). En premier lieu, les prélèvements effectués dans les terres nouvellement conquises : Ansermet de l’Espine est nommé par Amédée VIII receveur du Montferrat et récolte, durant l’année 1434, la somme de 17 100 florins. À ce montant, il faut additionner les réquisitions en nature faites dans les châteaux tombés en mains savoyardes au cours de l’expédition (5 462 florins)142. Puis, figurent en dessous les revenus du rachat du service militaire des communautés, dont les montants sont calculés sur la base d’un effectif variable de brigands (fantassins) engagés pour une période allant de deux à trois mois. Le bailliage de Savoie, par exemple, contribue à la guerre en Montferrat avec le paiement de 4 500 florins, correspondant aux salaires de 300 brigands pendant trois mois. Négociés par le prince et les représentants des communautés lors des assemblées des Trois États, les termes de ces versements renvoient à l’utilisation des obligations militaires pour recourir au service de troupes mercenaires, une pratique qui se fait courante au cours du xve siècle143. Au final, la somme des revenus fiscaux perçus par les trésoriers savoyards s’élève à 62 745 florins, représentant 35 % du coût global du conflit (176 592 florins).
Tableau 38. – Subsides encaissés par la Trésorerie générale pour la guerre en Lombardie et en Montferrat (1432-1434), montants en florins de petit poids.
Montants | % | |
Piémont | 10 190 | 34 |
Savoie | 4 269 | 14 |
Bresse | 4 157 | 14 |
Vaud | 3 019 | 10 |
Bugey | 2 327 | 8 |
Genevois | 1 626 | 5 |
Nobles et bannerets | 1 080 | 4 |
Chablais | 952 | 4 |
Institutions ecclésiastiques | 820 | 3 |
Faucigny | 629 | 2 |
Valbonne | 281 | 1 |
Aoste | 217 | 1 |
Total | 29 567 | 100 |
Tableau 39. – Subsides encaissés par la Trésorerie des guerres pour la guerre en Montferrat (1432-1435), montants en florins de petit poids.
Montants | % | ||
Impôts | Prélèvement direct sur les terres conquises | 17 100 | 51 |
Garnisons du Montferrat | Prélèvement en nature sur les terres conquises du Montferrat | 5 462 | 16 |
Rachat du service militaire (Savoie) | 300 brigands pour trois mois à 5 florins par brigand | 4 545 | 13 |
Rachat du service militaire (Faucigny) | 200 brigands pour deux mois à 5 florins par brigand | 2 121 | 7 |
Rachat du service militaire (Genevois) | 200 brigands pour deux mois à 5 florins par brigand | 1 930 | 6 |
Rachat du service militaire (Bugey) | 150 brigands pour deux mois à 5 florins par brigand | 1 520 | 5 |
Rachat du service militaire (pays de Gex) | 50 brigands pour deux mois à 5 florins par brigand | 500 | 2 |
Total | 33 178 | 100 |
50L’intense politique militaire du duc Louis Ier génère à nouveau des négociations avec les représentants des communautés, sollicités à plusieurs reprises pour participer à l’effort de guerre. En 1448, pour le conflit contre Fribourg, le fouage est fixé à deux florins par feu pour l’ensemble des terres du domaine savoyard, Piémont exclu. Il apporte à la caisse centrale 16 550 florins, couvrant 27 % du coût de l’expédition (60 960 florins)144. Nous retrouvons la même proportion pour la campagne contre Francesco Sforza de l’année suivante : les environ 50 000 florins engrangés grâce aux subsides représentent environ le tiers des dépenses totales de la catastrophique campagne au sud des Alpes (150 083 florins)145.
51Au début du xve siècle, les sources administratives attestent l’institutionnalisation progressive de l’impôt direct. Les institutions ecclésiastiques et les nobles s’ajoutent définitivement à la population des châtellenies et des communautés assujetties au paiement du fouage, fixé sous le principat d’Amédée VIII à deux florins par feu146. Mais peut-on vraiment parler d’une « fiscalité d’État » ? La fiscalité moderne se définit en premier lieu par la légitimité de l’impôt, qui doit être indiscutable et élaboré sur une nouvelle conception institutionnelle de celui-ci147. Le cas savoyard illustre que, si la levée de l’impôt tend à se pérenniser, elle se justifie encore souvent par un prétexte de nature féodale. Par exemple, en 1405, un subside est levé pour le paiement de la dot de Bonne de Savoie, sœur d’Amédée VIII. À l’occasion du passage en Savoie, en 1414 et en 1431, du roi des Romains Sigismond de Luxembourg, des regalia seront également accordées au prince de la part de l’ensemble des contribuables148. En d’autres termes, au début du xve siècle, la fiscalité savoyarde ressemble encore à « une fiscalité d’État masqué sous une forme féodale, voire seigneuriale149 ». Il n’en demeure pas moins que, sous le gouvernement d’Amédée VIII, nous assistons à la mise en place d’une meilleure organisation du dialogue du prince avec ses sujets par l’intermédiaire des assemblés des Trois États, désormais devenues des véritables institutions représentatives.
52Au sujet du financement de la guerre, un prélèvement fiscal plus contraignant et régulier ne se traduit pas forcément par des résultats plus satisfaisants. À la différence des principats d’Amédée VI et Amédée VII, dans lesquels l’aide seigneuriale parvient parfois à couvrir l’essentiel des dépenses de guerre, l’impôt direct, le produit de la gabelle et le rachat du service militaire encaissés pendant la première moitié du xve siècle ne remboursent généralement jamais plus qu’un tiers du coût total de l’expédition. La guerre génère ainsi plus de coûts que de recettes. Cela est d’autant plus visible lorsqu’elle ne rapporte plus, en particulier pendant le principat de Louis Ier, des conquêtes territoriales fructueuses et durables.
Bilan
53En Savoie, le coût d’une campagne peut absorber complètement les entrées de la principauté. La stabilisation des effectifs militaires tout comme la « monétarisation » progressive de la guerre, due à l’affermissement du service soldé et à la présence toujours plus marquée de mercenaires dans les armées des princes, sont dans ce sens des facteurs déterminants. Nous avons pu constater ce phénomène lors de la campagne en Faucigny (1355) et des guerres au Piémont (1361-1363), pendant lesquelles le trésor dynastique des Savoie est asséché par une remarquable mobilisation de forces armées. Dès le milieu du xive siècle, les dépenses militaires représentent d’ailleurs un pourcentage du bilan qui est supérieur à ceux calculés dans d’autres espaces princiers. En France, sous Charles V (1364-1380), environ la moitié des ressources du royaume sont engagées pour le paiement de l’« armée de la reconquête150 ». En Bourgogne, les guerres de Philippe le Hardi (1384-1404) mobilisent au maximum le quart des dépenses de la recette générale de toutes les finances151. De même, dans les phases les plus intenses de la politique militaire de Jean sans Peur (1404-1419), l’entretien de l’armée représente entre 15 % et 25 % des dépenses totales du duché152. Au cours du xve siècle, le royaume de Sicile et le duché de Bretagne enregistrent des pourcentages à peu près semblables, respectivement de 23 % et 24 %153.
54À l’aune de ces comparaisons, il est incontestable que les recettes de la Trésorerie générale – évoluant néanmoins d’environ 50 000 florins par année durant le principat d’Amédée VII (1383-1391) à 150 000 florins (en moyenne) au milieu du xve siècle – n’ont pas supporté l’effort demandé par la politique expansionniste savoyarde, ni la concurrence avec les disponibilités financières de principautés voisines. Pour donner un ordre de grandeur, à la fin du xive siècle, la recette générale de toutes les finances des États Bourguignons s’élève déjà à plus d’un million de livres tournois, correspondant en ces années à environ 1 400 000 florins154. En 1427, les seules villes du duché de Milan encaissent des revenus annuels à la hauteur de 1 154 825 livres impériales, à savoir sept fois plus que ceux de la totalité des domaines des Savoie155. Plus au moins à la même époque, Florence et Venise disposent de revenus mensuels qui dépassent à eux seuls les recettes annuelles de l’ensemble des États savoyards156.
55L’analyse sérielle des recettes des comptes nous permet de tirer quelques conclusions quant aux modalités du financement des guerres savoyardes. Tout d’abord, elle confirme que, dès la fin du xive siècle, la gestion des dépenses militaires se fait au profit d’un cadre institutionnel nouveau : l’importance des officiers territoriaux s’amoindrit au profit de trésoriers spécifiquement chargés de la gestion économique des conflits. Cette tendance va de pair avec le rôle toujours plus centralisateur assumé par la Trésorerie générale au sein de la hiérarchie administrative du duché d’Amédée VIII. À cet égard, il semblerait que la Savoie ait été d’ailleurs plus précoce que la Bourgogne, dont la trésorerie, à l’époque de Philippe le Hardi, ne centralise qu’une minime partie des finances ducales157.
56Quant aux sources du financement de la guerre, nous avons constaté que ni les revenus domaniaux ni ceux amenés par l’impôt, toujours plus réguliers à partir de la fin du xive siècle, ne sont jamais suffisants à assurer aux princes la liquidité nécessaire, sur le court terme, pour pouvoir rapidement lever une armée. Les Savoie doivent ainsi régulièrement recourir au crédit158. Les prêts peuvent prendre deux formes distinctes. Durant la première moitié du xive siècle, ceux-ci sont en réalité des « dons négociés », voire des « prêts forcés », assortis d’une note précisant qu’ils résultent de contrats passés entre le comte et certaines communautés d’habitants, des Lombards et surtout des seigneurs que l’on retrouve dans les comptes comme chefs de bannières. Les nombreuses expéditions à l’étranger entreprises par Amédée VI nécessitent en revanche le recours à des emprunts plus consistants – octroyés par des prêteurs d’argent divers – impliquant souvent la mise en gage d’objets précieux159.
57En dépit de la grande diversité des sources de financement mobilisées par la guerre, force est enfin de constater que les trésoriers n’arrivent presque jamais à payer la totalité des soldes des combattants recrutés. Cela indique la difficulté, voire l’impossibilité, de la part des appareils administratifs de prévoir les dépenses militaires. Les importants crédits que les gens d’armes contractent envers les agents payeurs du prince – un phénomène que l’on pourrait qualifier d’« endettement public » – renvoient aux problèmes liés au système de recrutement savoyard, qui fera l’objet du prochain et du dernier chapitre de ce livre.
Notes de bas de page
1 Contamine P., « La guerre et l’Occident chrétien », dans Pages d’histoire militaire médiévale (xive-xve siècles), Paris, Boccard, 2005, p. 7-9. À ce sujet, cf. Tilly C., Contrainte et capital dans la formation de l’Europe : 990-1990, trad. D.-A. Canal, Paris, Aubier, 1992 ; Genet J.-P., « Féodalisme et naissance de l’État moderne », art. cité ; id., La genèse de l’État moderne, op. cit. ; Contamine P., Guerre et concurrence, op. cit. Sur cette question, les travaux de Giorgio Chittolini sur le duché de Milan restent incontournables, Chittolini G., « I principati italiani alla fine del medioevo », dans M. A. Ladero Quesada (dir.), Poderes publicos en la Europa medieval: principados, reinos y coronas. XXIII Semana de estudios medievales, Estella, 22 a 26 julio de 1996, Pampelune, Gobierno de Navarra, Departamento de Educación y Cultura, 1997, p. 235-259 ; id., « Fiscalité d’État et prérogatives urbaines dans le duché de Milan à la fin du Moyen Âge », dans P. Contamine, J. Kerhervé et A. Rigaudière (dir.), L’impôt au Moyen Âge, op. cit., vol. 1, p. 147-176.
2 Parmi les innombrables recherches à ce sujet, cf. Turner W. J., « Mental Incapacity and the Financing of War in Medieval England », dans L. J. Andrew Villalon et D. J. Kagay (dir.), The Hundred Years War (II): Different Vistas, Leyde, Brill, 2008, p. 387-401 ; Carocci A. et Collavini S., « Il costo degli stati. Politica e prelievo nell’Occidente medievale (VI-XIV secolo) », Storica, 18 (2012), p. 7-48 ; Kagay D. J., « War financing in the late-medieval crown of Aragon », Journal of Medieval Military History, 6 (2008), p. 119-148 ; Menjot D., « L’impôt : péché des puissants. Le discours sur le droit d’imposer dans le Libro de las Confesiones de Martin Perez (1316) », dans N. Guglielmi et A. Rucquoi (dir.), Droit et justice : le pouvoir dans l’Europe médiévale, Paris, Éditions du CNRS, 2008, p. 117-135 ; Hélary X., « Révolution militaire, révolution fiscale ? Le poids de la guerre dans les finances royales sous le règne de Philippe le Bel », dans P. Contamine, J. Kerhervé et A. Rigaudière (dir.), Monnaie, fiscalité et finances au temps de Philippe le Bel. Journée d’études du 14 mai 2004, Paris, Comité pour l’histoire économique et financière de la France, 2007, p. 229-254 ; Kagay D. J. (dir.), War, Gouvernement and Society in the Medieval Crown of Aragon, Aldershot, Ashgate, 2007 ; Mainoni P., « La révolution fiscale dans l’Italie du Nord (xiie-xiiie siècle). Quelques considérations », dans D. Menjot, A. Rigaudière et M. Sánchez Martínez, L’impôt dans les villes de l’Occident méditerranéen, Paris, Comité pour l’histoire économique et financière de la France, 2005, p. 219-254 ; Ladero Quesada M. A., « De la reconquista à la fiscalité d’État dans la couronne de Castille (1268-1368) », dans J.-P. Genet, La Genèse de l’État moderne, op. cit., p. 35-51 ; Bulst N., « Impôts et finances publiques en Allemagne au xve siècle », dans J.-P. Genet, La genèse de l’État moderne, op. cit., p. 65-76 ; Rigaudière A., « L’essor de la fiscalité royale du règne de Philippe le Bel (1285-1314) à celui de Philippe VI (1328-1350) », dans J. Carrasco (dir.), Europa en los umbrales de la crisis: 1250-1350. Actas de la XXI Semana de estudios medievales de Estella, 18 al 22 de julio de 1994, Pampelune, Gobierno de Navarra, Departamento de Educación y Cultura, 1995, p. 323-92 ; Prestwich M., War, Politics and Finance under Edward I, Londres, Faber & Faber, 1972. Pour une approche plus théorique à la question, cf. Scordia L., « Le roi doit vivre du sien ». La théorie de l’impôt en France, xiiie-xve siècles, Paris, Institut d’études augustiniennes, 2005.
3 Cf. Mairey A., La guerre de Cent Ans, Saint-Denis, Presse universitaires de Vincennes 2017, p. 125-35 ; Prestwich M., « War and Taxation in England in the XIIIth and XIVth Centuries », dans J.-P. Genet, La genèse de l’État moderne, op. cit., p. 181-192 ; Ormrod W. M., « The English Crown and the Customs (1349-1363) », Economic History Review, 40 (1987), p. 27-40 ; Genet J.-P., « Les débuts de l’impôt national en Angleterre », Annales ESC, 34 (1979), p. 348-354 ; Hebert M., « Guerre, finances et administration : les États de Provence de novembre 1359 », Le Moyen Âge, 83 (1977), p. 103-130 ; Henneman J. B., Royal Taxation in Fourteenth-Century France. The Development of War-Financing: 1322-1356, Princeton, Princeton University Press, 1971 ; id., « Financing the Hundred Years’ War: Royal Taxation in France in 1340 », Speculum, 42 (1967), p. 275-98 ; Rey M., Les finances royales sous Charles VI : les causes du déficit (1388-1413), Paris, Imprimerie nationale, 1965 ; Postan M., « The Costs of the Hundred Years War », Past and Present, 27 (1964), p. 34-53 ; McFarlane K. B., « War, the Economy and Social Change: England and the Hundred Years War », Past and Present, 22 (1962), p. 3-18 ; Doucet R., « Les finances anglaises en France à la fin de la guerre de Cent Ans (1413-1435) », Le Moyen Âge, 27 (1926), p. 265-332.
4 Pour l’espace savoyard, cf. César M., « Small Towns and Resistance to Taxation in late Medieval Savoy », dans F. Garnier et alii (éd.), Cultures fiscales en Occident du xie au xviie siècle. Études offertes à Denis Menjot, Toulouse, Presses universitaires du Midi, 2019, p. 319-327 ; Guilleré C., « Les finances d’Amédée VIII (1391-1416) », dans L. Ripart, C. Guilleré et P. Vuillemin (dir.), La naissance du duché de Savoie, op. cit., p. 237-276 ; id., « Culture financière et fiscale en Savoie du xiiie au xve siècle », dans D. Menjot, A. Rigaudière et M. Sánchez Martínez, L’impôt dans les villes de l’Occident méditerranéen, op. cit., p. 469-483 ; Andenmatten B., « Le comte de Savoie Amédée V et le nerf », art. cité ; Biolzi R., « Les guerres d’Amédée VII », art. cité.
5 À ce propos, nous renvoyons au projet FNS Société de cour, élites et finances : de l’Hôtel des princes de Savoie à l’État moderne mené par Eva Pibiri (université de Lausanne), qui vise à étudier les comptes de l’Hôtel des Savoie dans une perspective d’histoire économique, sociale et institutionnelle.
6 Comme la livre tournois, cette monnaie de compte se subdivise en sous et deniers : 1 livre valant 20 sous et 1 sou valant 12 deniers. Émis par les archevêques de Lyon depuis l’époque carolingienne, le denier viennois est frappé par les princes de Savoie depuis le xie siècle, Spufford P., Handbook of Medieval Exchange, Londres, Offices of the Royal Historical Society, 1986 p. 128. Sur les monnaies en Savoie, Morenzoni F., « Le duc Amédée VIII de Savoie et sa monnaie (vers 1420-vers 1434) », dans L. Ripart, C. Guilleré et P. Vuillemin (dir.), La naissance du duché de Savoie, op. cit., p. 277-318 ; Borrel V., « Les monnayages d’Amédée V, comte de Savoie (1285-1323) », Omni, 11 (2017), p. 245-287 ; Cudazzo S., Monete Italiane Regionali, vol. 5 : Casa Savoia, Pavie, Ed. Varesi, 2005 ; Biaggi E., Otto secoli di Storia delle monete Sabaude, Turin, Il Centauro, vol. 1, 1993 ; Simonetti L., Monete Italiane Medioevali e Moderne, vol. 1 : Casa Savoia, Florence, Poggiali, 1967-1968.
7 Pour ce faire, nous nous sommes basés sur les taux de change indiqués dans les comptes par les scribes savoyards ou dans Spufford P., Handbook of Medieval Exchange, op. cit.
8 Ce système de compte apparaît pour la première fois en Dauphiné vers 1320 et découle essentiellement de l’intensification des échanges commerciaux à la fin du Moyen Âge. Dès cette époque, on dispose alors de deux numéraires comme référence de valeur : le florin d’or, originaire de Florence, et le gros tournois d’argent fin. Le rapport constant 1 à 12 (1 florin : 12 gros) consacre ainsi un nouvel étalonnement monétaire au dépend de l’ancien, livre-sous-denier, Belaubre J., Histoire numismatique et monétaire de la France médiévale (de la période carolingienne à Charles VIII), Paris, Le Léopard d’or, 1986, p. 100.
9 Le florin d’or de Florence est mentionné pour la première fois en Savoie vers 1321, Andenmatten B., La Maison de Savoie, op. cit., p. 419.
10 C’est seulement à partir de 1430 qu’apparaît régulièrement le ducat de Savoie, qui pèse 3,5 grammes d’or fin, à l’instar du ducat de Venise, Spufford P., Handbook of Medieval Exchange, op. cit., p. 131-133.
11 Cf. par exemple Chamorel F., « Ad partes infidelium », op. cit., p. 35-61 ; Biolzi R., « Les guerres d’Amédée VII », art. cité ; id., « Avec le fer et la flamme », op. cit., p. 64-67 ; Barbero A., Il ducato di Savoia, op. cit., p. 90-93.
12 Les différents postes des recettes de la Trésorerie générale ont été récemment catégorisés par Guilleré C., « Les finances d’Amédée VIII », art. cité, p. 250-258.
13 Guilleré C. et Castelnuovo G., « De la comptabilité domaniale », art. cité, p. 213-30 ; Demotz B., « Une clé de la réussite », art. cité, p. 17-26 ; Castelnuovo G., Ufficiali e gentiluomini, op. cit., p. 190-91.
14 Castelnuovo G. et Guilleré C., « Les finances et l’administration », art. cité, p. 75.
15 Andenmatten B., « Le comte de Savoie Amédée V et le nerf », art. cité, p. 23.
16 Kersuzan A., Défendre la Bresse, op. cit., p. 50-52.
17 Tabacco G., « Il trattato matrimoniale sabaudo-austriaco del 1310 e il suo significato politico », BSBS, 49 (1951), p. 28-29. Pendant la première décennie du xive siècle, les entrées annuelles des receveurs de Savoie oscillent entre 4 000 et 5 000 livres viennois, Guilleré C., « Le financement de la guerre », art. cité, p. 65.
18 Des 1 557 livres viennois dues aux combattants arrivés en premier à Ambronay (177 piétons et 31 hommes d’armes), les officiers savoyards n’arrivent à en payer que 552, AST/SR, CS, inv. 29, 1 (1308), f. 1-5 ; Guilleré C., Biolzi R. et Macherat, S., Les sources du financement, op. cit., p. 33-60.
19 Kersuzan A., Défendre la Bresse, op. cit., p. 158.
20 Guilleré C., « Le financement de la guerre », art. cité, p. 64-65.
21 Pour ces années, les dépenses de guerre s’élèvent à 2 993 livres. Environ la moitié de cette somme (1 633 livres) a été employée en 1305 pour les salaires d’environ 290 hommes d’armes engagés contre les troupes dauphinoises à Ambronay, AST/SR, CS, inv. 16, 2 (1300-1308), f. 19-20.
22 Kersuzan A., Défendre la Bresse, op. cit., p. 27.
23 Sur cet épisode, cf. supra, p. 51-52.
24 Cf. le chiffre (5 700 livres tournois) proposé par Andenmatten B., La Maison de Savoie, op. cit., p. 292. En ces années, le taux de change est d’un sous tournois pour vingt deniers viennois, AST/SR, CS, inv. 29, 2 (1321), f. 2.
25 Dans la deuxième décennie du xive siècle les recettes des caisses centrales font plus que doubler : de 4 000-5 000 livres viennois en 1308, elles atteignent les 12 000 livres en 1312, AST/SR, CS, inv. 16, 3 (1308-1314), f. 1. En cette période, l’accroissement des recettes est déterminé par la perception d’une partie des 20 000 livres tournois encaissées en juillet 1304 pour la dot de Marie de Brabant, mariée à Amédée V en 1297, Guichenon S., Histoire généalogique, op. cit., vol. 2, p. 367.
26 Prestwich M., War, Politics and Finance, op. cit., p. 151-176. Pour cette période, les dépenses de guerre prises en charge par les Plantagenêt ont été également estimées par Ormrod W., « England: Edward II and Edward III », dans M. Jones (dir.), The New Cambridge Medieval History, c. 1305-c. 1414, Cambridge, Cambridge University Press, vol. 6, 2000, p. 271-296.
27 Hélary X., « Révolution militaire », art. cité, p. 242-243. À ce sujet, cf. également Lalou E., « Les questions militaires sous le règne de Philippe le Bel », dans P. Contamine, C. Giry-Deloison et M. H. Keen (dir.), Guerre et société en France, en Angleterre et en Bourgogne, xive-xve siècle, Lille, Publications de l’Institut de recherches historiques du Septentrion, 1991, p. 37-62.
28 Pour donner un autre ordre de grandeur, les entrées annuelles du duché de Bretagne peuvent s’élever, vers la fin du xiiie siècle, à 25 000 livres tournois (Morvan F., La chevalerie, op. cit., p. 124), qui équivalent à environ 41 600 livres viennois.
29 Nous n’avons consciemment pas considéré les coûts des expéditions menées en Italie contre les Visconti (1372-1374) et Charles de Duras (1382-1383), étant donné qu’ils ont été en grand partie remboursés aux Savoie par la Chambre apostolique d’Avignon et les trésoriers angevins, Galland B., « Le rôle du comte », art. cité, p. 807-808 ; Masson C., Des guerres d’Italie, op. cit., p. 352-354 ; Macherat S., La dernière campagne, op. cit., p. 31-40.
30 Comme nous le verrons par la suite, le comte de Savoie a disposé d’autres importantes sources de liquidités pour financer ces expéditions, tel le trésor dynastique conservé au château du Bourget, ce qui explique le fort contraste entre le coût de la guerre en Faucigny et les recettes, dérisoires en ces années, de la Trésorerie générale, cf. infra, p. 203-204.
31 Carrier N., La vie montagnarde, op. cit., p. 44. Léon Ménabrea a estimé le coût de cette expédition à plus de 200 000 florins, Ménabréa L., « De l’organisation militaire », art. cité, p. 26.
32 Kersuzan A., Défendre la Bresse, op. cit., p. 85-86 ; Lemonde A., Le temps des libertés, op. cit., p. 14-18 ; Barbero A., Il ducato di Savoia, op. cit., p. 8.
33 Cf. supra, p. 69-71.
34 Barbero A., Il ducato di Savoia, op. cit., p. 45-46 ; Castelnuovo G., Ufficiali e Gentiluomini, op. cit., p. 41.
35 Cognasso F., Il Conte Verde, op. cit., p. 77-78.
36 Chamorel F., « Ad partes infidelium », op. cit., p. 58-61. Au montant proposé par Florian Chamorel, calculé sur le total des livrées du clerc Antoine Barbier, nous avons ajouté les dépenses prises en charge par le trésorier général de Savoie (environ 150 000 florins).
37 À la fin de la guerre contre le marquis de Saluces (1363), l’homme d’armes Mermet Daux reste créditeur envers le comte pour 70 florins, qui lui seront remboursés par le châtelain d’Évian et Féternes. François de La Frasse, châtelain de Chillon, reçoit également du trésorier une lettre de crédit pour ses arriérés de salaires de 500 florins, à prélever sur l’ensemble des revenus du Chablais, AST/SR, CS, inv. 29, 16 (1361-1363), f. 7 ; Galland B, « Le rôle du comte », art. cité, p. 809 (note 223).
38 Biolzi R., « Les guerres d’Amédée VII », art. cité.
39 Pour le calcul du coût de cette guerre, nous avons également considéré les 11 000 florins déboursés par le trésorier général André Belletruche pour les salaires des compagnies encore engagées en Canavais en 1388, Pazmandy T., « Les guerres d’Amédée VII », art. cité, p. 89. C’est également de ce travail que nous avons tiré les sommes concernant les recettes de la Trésorerie générale pendant le principat d’Amédée VII.
40 Cf. supra, p. 97.
41 AST/SR, CS, inv. 16, 47 (1401-1402), f. 87 ro-87 vo. En 1416, nous retrouvons encore dans les comptes de la Trésorerie générale des paiements d’arriérés de salaires à des gens de guerre ayant combattu dans les armées d’Amédée VII entre 1387 et 1390, Guilleré C., « Les finances d’Amédée VIII », art. cité, p. 261-262.
42 Biolzi R., « Le règne d’Amédée VIII », art. cité, p. 197-198.
43 De plus, entre 1402 et 1407, on dépense à nouveau quelque 8 000 florins pour le renforcement des garnisons du Canavais, constamment exposées aux attaques hivernales de Facino Cane, AST/SR, CS, inv. 29, 25 (1401-1402) ; 26 (1407). Le coût élevé de cette campagne est probablement à attribuer à l’efficacité et à la mobilité des troupes de cet expert condottiere, qui réussit à capturer un grand nombre de capitaines savoyards, Settia A. A., « Facino Cane », art. cité, p. 150-152.
44 Cf. supra, p. 106-109.
45 Carrier N., « Local Communities and Fiscal Reform in Late-Medieval Savoy: Lords, Peasants, and Subsidies (Fourteenth to Fifteenth Centuries) », dans I. Epurescu-Pascovici (dir.), Accounts and Accountability, op. cit., p. 205-228.
46 Pour donner un ordre de grandeur, l’achat du Genevois a coûté à Amédée VIII 45 000 francs d’or, correspondant à 82 500 florins, Demotz B., Le comté de Savoie du xie au xve siècle : pouvoir, château et État au Moyen Âge, Genève, Slatkine, 2000, p. 58.
47 SS, II.34.5, p. 240.
48 Cf. supra, p. 151-153.
49 Badoux L., « Pour la garde de ses pays », op. cit., p. 103.
50 Biolzi R., « Avec le fer et la flamme », op. cit., p. 15-16 et 155-156. Il faudra aussi prendre en compte les 2 250 florins dépensés à Morat pour le ravitaillement des troupes alliées de Berne, Abbott F. et Biolzi R., « L’approvisionnement alimentaire », art. cité, p. 298. L’éphémère mainmise sur Fribourg n’a pas amené de véritables avantages, d’autant plus que la ville au bord de la Sarine, dont les finances ont également été amputées par la guerre de 1448, n’a jamais réussi à payer les 40 000 florins de dédommagement aux Savoie imposés par le traité de Morat (16 juillet 1448), Meyer M., « Correspondance et documents », art. cité, p. 314-319 ; Tappy D., Les États de Vaud, Lausanne, BHV, 1988, p. 348-349.
51 Le coût exorbitant de cette guerre a été considéré comme une des causes principales de la débâcle financière du duché de Savoie au milieu du xve siècle, Barbero A., Il ducato di Savoia, op. cit., p. 88-97.
52 Gaullieur E. H., « La correspondance du pape Félix V », art. cité, p. 359.
53 AST/SR, CS, inv. 29, 92 (1460-1461).
54 Guilleré C., « Les finances d’Amédée VIII », art. cité, p. 275 ; Cognasso F., Amedeo VIII, op. cit., vol. 1, p. 258.
55 Les dépenses annuelles des deux cours s’élèvent en cette période à environ 30 000 florins, Barbero A., Il ducato di Savoia, op. cit., p. 89-90.
56 Castelnuovo G., « Quels offices ? », art. cité, p. 9-10.
57 AST/SR, CS, inv. 29, 1 (1308), f. 6 ; Guilleré C., Biolzi R. et Macherat, S., Les sources du financement, op. cit., p. 48-49.
58 Sur les Juifs en Savoie à la fin du Moyen Âge, cf. en dernier lieu, César M., « Les Juifs et le prince : entre législation et conflits de juridiction dans le duché de Savoie à la fin du Moyen Âge », dans M. Caesar et F. Morenzoni (dir.), La Loi du Prince, vol. 1, op. cit., p. 357-373.
59 Nous retrouvons régulièrement dans les comptes des receveurs généraux de Savoie des « prêts forcés » négociés par le prince avec les nobles à l’occasion du financement d’opérations militaires. En 1330, le receveur Guillaume Bon reçoit « des prêts accordés pour les chevauchées » à la hauteur de 172 livres viennois et 1 600 florins d’or, AST/SR, CS, inv. 16, 8 (1330-1331), f. 2-3. En 1349, Humbert Dideri, receveur de Chambéry, encaisse 1 258 florins de bon poids « pour les prêts des officiers et d’autres sujets encaissés pour la guerre au Piémont », AST/SR, CS, inv. 16, 15 (1349-1351), f. 1.
60 AST/SR, CS, inv. 29, 2 (1321), f. 1 ; Guilleré C., Biolzi R. et Macherat S., Les sources du financement, op. cit., p. 65-69.
61 Andenmatten B., La Maison de Savoie, op. cit., p. 419-420. Sur les énormes capacités financières d’Othon Ier de Grandson et ses probables activités bancaires, cf. Hesse C., « Succès et aléas de l’activité commerciale et financière de la noblesse. L’exemple d’Othon de Grandson », dans B. Andenmatten (dir.), Othon Ier de Grandson (1240-1328). Le parcours exceptionnel d’un grand seigneur vaudois, Lausanne, CLHM, 2020, p. 103-124.
62 Cf. supra, p. 135-136.
63 AST/SR, CS, inv. 29, 13 (1355), f. 1 ; 14 (1355), f. 1.
64 Nous doutons toutefois que ce montant ait été complètement prélevé des caisses de la Trésorerie générale, dont les revenus ne dépassent pas en ces années les 15 000 florins, tableau 20, p. 196.
65 Cabaret, La Chronique de Savoye [170], p. 171-172.
66 AST/SR, CS, inv. 29, 14 (1355), f. 1-2.
67 AST/SR, CS, inv. 29, 16 (1361-1363), f. 1-6.
68 Les prêts sont accordés par les casanes d’Asti, Turin, Moncalieri, Avigliana, Chieri, Lanzo et Rivoli. Un emprunt considérable (7 288 florins) est octroyé à Milan à Humbert bâtard de Savoie. D’autres prêts sont également concédés au comte par des banquiers de Chambéry (1 937 florins) et de Paris (200 florins), AST/SR, CS, inv. 29, 16 (1361-1363), f. 1, 4-6.
69 AST/SR, CS, inv. 29, 17 (1363), f. 1.
70 À ce sujet, Guilleré C., « Le financement de la cour savoyarde du milieu du xiiie siècle au début du xve : essai de typologie des dépenses de cour », dans P. Bianchi et L. C. Gentile (dir.), L’affermarsi della corte Sabauda: dinastie, poteri, « élites » in Piemonte e Savoia fra tardo Medioevo e prima età moderna, Turin, S. Zamorani, 2006, p. 145-161.
71 Les communautés devaient participer à l’effort de guerre à travers l’envoi de contingents armés, conformément aux franchises accordées par le prince, Barbero A., Il ducato di Savoia, op. cit., p. 82-83 ; Biolzi R., « Military Recruitment and Funding in Savoy », art. cité, p. 47-72. Nous reviendrons par la suite sur cet aspect spécifique de la fiscalité savoyarde, infra, p. 212, 216 et 222.
72 AST/SR, CS, inv. 29, 16 (1361-1363), f. 3. Pour une étude sur les épices en Savoie à la fin du Moyen Âge, cf. Abbott F., Des comptes d’apothicaires : les épices dans la comptabilité de la Maison de Savoie (xive-xve siècle), Lausanne, CLHM, 2012.
73 Il est d’abord question du château de Lompnes, en Bresse, vendu et probablement inféodé, en octobre 1361, au seigneur de Grammont pour 2 000 florins. Le même mois, une transaction est faite avec Michelet Arpini de Rivoli au sujet du château d’Alpignano, dont la moitié lui est cédée pour 1 500 florins. En décembre, un château situé dans les environs de Turin est également vendu à Amédée Simeone, banquier d’Asti et châtelain de Lanzo, qui débourse la somme de 2 700 florins, AST/SR, CS, inv. 29, 16 (1361-1363), f. 3-4.
74 Cf. supra, p. 77-78.
75 80% de ces emprunts ont été remboursés par Amédée VI entre 1367 et 1368. Pour tous ces montants, cf. Chamorel F., « Ad partes infidelium », op. cit., p. 49-59.
76 Macherat S., La dernière campagne, op. cit., p. 124. Le prêt sur gage consistait au dépôt effectif d’objets qui étaient censés couvrir la valeur de l’emprunt, Morenzoni F., « Les prêteurs d’argent et leurs clients dans le Valais savoyard à la veille de la Peste Noire. La casane de Sembrancher en 1347 », RSH, 42 (1992), p. 6. Cet expédient financier était également courant dans le royaume de France : en 1416, le connétable Bernard VII d’Armagnac fait saisir la vaisselle précieuse, les joyaux du roi et même l’or de la châsse de Saint Louis pour assurer la solde à ses hommes d’armes, Schnerb B., Armagnacs et Bourguignons, op. cit., p. 225.
77 AST/SR, CS, inv. 29, 23/1 (1383-1415), f. 1-50.
78 AST/SR, CS, inv. 29, 23/1 (1383-1415), f. 3.
79 AST/SR, CS, inv. 29, 23/1 (1383-1415), f. 7-8.
80 La somme de 2 000 francs par mois accordée pour le paiement des soldes des combattants savoyards par Charles VI semble ainsi avoir été largement couverte, Biolzi R., « Les guerres d’Amédée VII », art. cité, p. 132-133.
81 Cf. supra, p. 165-166. En Bourgogne, à l’époque de Jean sans Peur, les officiers n’hésitent pas à vendre leurs biens pour avancer au duc l’argent nécessaire à ses guerres, Schnerb B., « Un aspect de la politique », art. cité, p. 121.
82 Le coût de cette expédition s’est élevé à environ 22 000 florins, Biolzi R., « Les guerres d’Amédée VII », art. cité, p. 137.
83 Guilleré C., « Les finances d’Amédée VIII », art. cité, p. 276-277.
84 AST/SR, CS, inv. 29, 27 (1422), f. 2-5.
85 AST/SR, CS, inv. 29, 27 (1422), f. 13.
86 AST/SR, CS, inv. 29, 87/2 (1426-1427), f. 1-27.
87 AST/SR, CS, inv. 29, 32 (1431-1435), f. 6 ro-60 vo.
88 Sur le receveur du Piémont, cf. Barbero A., Il ducato di Savoia, op. cit., p. 24-26.
89 AST/SR, CS, inv. 29, 32 (1431-1435), f. 5 vo-ro, 11 vo et 13 ro.
90 AST/CS, inv. 29, 38/2 (1443), f. 4 ro ; Biolzi R., « Avec le fer et la flamme », op. cit., p. 273-274. Dès le 8 mars 1444, Félix V assume l’administration directe de l’évêché de Genève. À partir de cette date, la Chambre apostolique engrange les revenus de plusieurs terres domaniales, notamment les châtellenies de Ternier, La Roche, Mornex et Rumilly (Genevois) ; Bonne, Bonneville, Châtelet-de-Crédoz, Châtillon et Cluse (Faucigny). Dès 1445 elle encaisse également le surplus d’Évian, Féternes, Thonon, Allinges, Ballaison et Hermance plus encore ceux des péages de Nyon, Vevey, Blonay, Reamont, Beaufort et Tarentaise, Mongiano E., « Da Ripaille a Losanna », art. cité, p. 173-178.
91 Le duc Louis obtient de marchands piémontais et lombards un prêt de 34 000 florins, correspondant à 22 % du coût de la désastreuse guerre de 1449, Barbero A., Il ducato di Savoia, op. cit., p. 89.
92 SS, II.34.5, p. 240.
93 AST/Corte, PD, 86 (1445), f. 6 vo-11 ro, 16 ro, 18 ro, 19 ro-vo, 21 ro-vo.
94 À ce propos, cf. également Guilleré C., « Les finances d’Amédée VIII », art. cité, p. 266-269.
95 Contamine P., « La guerre et l’Occident chrétien », art. cité, p. 7. Pour le royaume de France, la pression fiscale est encore plus frappante dans la deuxième moitié du xve siècle, où l’on voit une croissance des recettes de 105 %, id., « Guerre, fiscalité royale et économie en France (seconde moitié du xve siècle) », dans M. Flinn (dir.), Proceedings of the Seventh International Economic History Congress, Edimbourg, University Press, 1978, vol. 2, p. 269. Pour l’Angleterre, cf. Prestwich M., « War and Taxation », art. cité, p. 191-192 ; Genet J.-P., « Les débuts de l’impôt national en Angleterre », Annales ESC, 34 (1979), 348-354. À ce sujet, cf. également les études citées à la note 2, p. 189-190.
96 Cf. Ormrod M., « The English State and the Plantagenet Empire, 1259-1360: A Fiscal Perspective », dans J. R. Maddicott et D. M. Palliser (dir.), The Medieval State: Essays Presented to James Campbell, Londres, Hambledon Press, 2000, p. 197-214.
97 Ces nouveaux modes de prélèvements se sont concrétisés, dans une première étape, par l’appropriation de la décime (1298), rapportant au roi de France un revenu annuel de 250 000 livres tournois, Hélary X., « Révolution militaire », art. cité, p. 239-243.
98 En Bourgogne, l’impôt direct est levé régulièrement à partir de 1376, Dubois H., « Fouage royal et fouage ducal bourguignon au xive siècle », dans P. Contamine, J. Kerhervé et A. Rigaudière (dir.), L’impôt au Moyen Âge, op. cit., vol. 3, p. 678-684 ; id. « Naissance de la fiscalité dans un État princier au Moyen Âge : l’exemple de la Bourgogne », dans J.-P. Genet, La genèse de l’État moderne, op. cit., p. 91-100. Dans le duché de Bretagne, le fouage pouvait être levé avec l’accord des États depuis 1365, Kerhervé J., L’État breton, op. cit., vol. 2, p. 581-636. Les villes et les principautés de l’espace germanique connaissent également un remarquable essor fiscal dès le milieu du xive siècle, Schubert E., Fürstliche Herrschaft und Territorium im späten Mittelalter, Munich, R. Oldenbourg, 1996, p. 118-125 ; Isenmann E., Die Deutsche Stadt im Mittelalter (1150-1550): Stadtgestalt, Recht, Verfassung, Stadtregiment, Kirche, Gesellschaft, Wirtschaft, Cologne, Böhlau Verlag, 2012, p. 282-327 ; Bulst N., « Impôts et finances publiques », art. cité.
99 Buffo P., « Guerra e costruzione del pubblico », art. cité. De même, la ville de Berne impose dès 1384 l’impôt permanent pour financer la guerre contre les Kybourg, Gerber R., Gott ist Burger zu Bern. Eine spätmittelalterliche Stadtgesellschaft zwischen Herrschaftsbildung und sozialem Ausgleich, Weimar, Herrmann Böhlaus, 2001, p. 133-138. Les Savoie participent à ce conflit aux côtés des Bernois, en envoyant une centaine d’hommes d’armes dirigés par le bailli de Vaud Humbert de Colombier, AST/SR, CS, inv. 29, 22_bis (1383).
100 Pour un résumé des différentes formes de fiscalité à la fin du Moyen Âge, cf. V. Toureille et alii (dir.), Guerre et société, op. cit., p. 193-197.
101 AST/SR, CS, inv. 29, 3 (1332), f. 1-2.
102 Cf. tableau 24, p. 204.
103 Cf. tableau 26, p. 205.
104 L’écuage est institué pour la première fois en Angleterre au xiie siècle, sous le principat d’Henri II, Warren-Hollister C., « The Significance of Scutage Rates in Eleventh and Twelfth Century England », English Historical Review, 75 (1960), p. 577-588 ; Contamine P., La guerre au Moyen Âge, op. cit., p. 176-183. Kaeuper R. W., Guerre, justice et ordre public : l’Angleterre et la France à la fin du Moyen Âge, trad. N. Genet et J.-P. Genet, Paris, Aubier, 1994, p. 29-31.
105 Contamine P., Guerre, État et société, op. cit., p. 30-33 ; Hélary X., « Révolution militaire ? », art. cité, p. 248-249.
106 À partir de 1313, les communautés piémontaises versent régulièrement à leur seigneur une taxe appelée militia (200-300 livres), qui les exempte de lui fournir des troupes à cheval, cf. à ce sujet Buffo P., « Guerra e costruzione del pubblico », art. cité, p. 7-20.
107 Biolzi R., « Military Recruitment and Funding in Savoy », art. cité, p. 61-62.
108 Tallone A., Parlamento Sabaudo, Bologne, Forni, 1928-1946, 13 vol. À ce sujet, cf. également Barbero A., Il ducato di Savoia, op. cit., p. 17-20 ; Tappy D., Les États de Vaud, op. cit., p. 173-275 ; Daviso di Charvensod C., « Considerazioni intorno ai Tre Stati in Piemonte », BSBB, 45 (1947), p. 13-41 ; Benedetto A. M., « Note sulle assemblee dei domini sabaudi », Rivista di storia del diritto italiano, 30 (1957), p. 141-188. En Valais, le développement de la fiscalité a été abordé par Dubuis P., Une économie alpine, op. cit. ; id., Le jeu de la vie et de la mort. La population du Valais (xive-xvie siècle), Lausanne, CLHM, 1994.
109 Toureille V. et alii (dir.), Guerre et société, op. cit., p. 195. Instituée dans le royaume de France en 1341, la gabelle est particulièrement fructueuse pour le royaume d’Angleterre dans la première partie de la guerre de Cent Ans, Ormrod W. M., Edward III, New Haven/Londres, Yale University Press, 2011, p. 271-296.
110 Carrier N., « Local Communities and Fiscal Reform », art. cité, p. 228 ; id., « L’État princier et la condition des personnes : servage et souveraineté dans les Statuta Sabaudie », dans M. Caesar et F. Morenzoni (dir.), La loi du prince, op. cit., vol. 1, p. 213-231.
111 Cf. supra, p. 50-51.
112 Bautier R-H. et Sornay J., Les sources, op. cit., vol. 2, p. 423, 431, 443 et 446-449. Seul les nobles et les « villes franches » sont exemptés de cet impôt, Carrier N., « Local Communities and Fiscal Reform », art. cité, p. 209-210. À ce sujet, cf. également Andenmatten B., La Maison de Savoie, op. cit., p. 327-330 ; Coutaz C., « Die Reicharchiven in Turin und die Beziehungen des Hauses Savoyen zu Heinrich VII », Mitteilungen des Institus für Österreicher Geschichtsforschung, 89 (1981), p. 241-267.
113 Le 24 novembre 1310, Henri VII concède au comte de Savoie le titre de vicaire général d’Empire en Lombardie. L’effectif de la troupe qui suit Amédée V est d’environ 300 hommes d’armes, Gabotto F., Asti e la politica sabauda in Italia al tempo di Guglielmo Ventura secondo nuovi documenti, Pignerol, BSS, 1903, p. 271-273. Sur cette expédition, cf. Margue M., Pauly M. et Schmid W. (dir.), Der Weg zur Kaiserkrone: der Romzug Heinrichs VII in der Darstellung Erzbischof Balduins von Trier, Trier, Kliomedia, 2009 ; Andenmatten B., La Maison de Savoie, op. cit., p. 327-328 ; Galland B., Les papes d’Avignon, op. cit., p. 211-230 ; Bowsky W. M., Henry VII in Italy. The Conflict of Empire and City-State (1310-1313), Lincoln, University of Nebraska Press, 1960.
114 Andenmatten B., La Maison de Savoie, op. cit., p. 441 ; Guilleré C., « Le financement de la guerre », art. cité, p. 65.
115 Carrier N., « Local Communities and Fiscal Reform », art. cité, p. 211-212.
116 Demander aux sujets une contribution pour l’adoubement du seigneur est une ancienne pratique féodale, servant à couvrir les frais de l’équipement militaire et les éventuels tournois suivant la cérémonie de la colée. De retour de Sion, Amédée VI aurait d’ailleurs organisé des joutes à Chambéry, accompagnées par de grandes festivités « jusques passée la minuyt », Cabaret, La Chronique de Savoye [177], p. 177-178.
117 Guichenon S., Histoire généalogique, op. cit., vol. 2, p. 307. Sur cette question, cf. Brühl C., Fodrum, Gistum, servitium regis: Studien zu den wirtschaftlichen Grundlagen des Koenigtums im Frankenreich und in den fraenkischen Nachfolgestaaten Deutschland, Frankreich und Italien von 6. bis zur Mitte des 14. Jahrhunderts, 2 vol., Cologne/Graz, Boehlau, 1968.
118 AST/SR, CS, inv. 16, 18 (1353-1354), f. 1 ; Andenmatten B., La Maison de Savoie, op. cit., p. 302-303.
119 Cf. tableau 19, p. 195.
120 Cf. tableau 20, p. 196.
121 Le subside est justifié par les 77 000 florins d’indemnités que Jacques de Savoie-Achaïe doit encore payer à Amédée VI suite au traité de paix signé en juillet 1362, Cognasso F., Il Conte Verde, op. cit., p. 96-97.
122 Les communautés de Savigliano, Barge et Busca sont exemptées de payer le fouage en raison des maux provoqués par la guerre, Tallone A., Parlamento Sabaudo, op. cit., vol. 1, CVII, p. 70-73.
123 Ibid. Il est envisageable que d’autres bailliages aient été sollicités à payer l’impôt, notamment ceux de Bresse et Valbonne où, en avril 1363, on dépêche un émissaire « pour récupérer les subsides », AST/SR, CS, inv. 29, 17 (1363), f. 8.
124 AST/SR, CS, inv. 29, 16 (1361-1363), f. 1-6.
125 Cf. à ce sujet Buffo P., « Guerra e costruzione del pubblico », art. cité ; Biolzi R., « Military Recruitment and Funding in Savoy », art. cité.
126 Chamorel F., « Ad partes infidelium », op. cit. p. 54-55.
127 La croisade fait partie des quatre cas où le prince peut faire appel à l’aide seigneurial, cf. supra, p. 215.
128 Chamorel F., « Ad partes infidelium », op. cit., p. 54-55 et 60-62 ; Bouquet J.-J., « Quelques remarques sur la population du comté de Savoie au xive siècle d’après les comptes de subsides », RHV, 71 (1963), p. 58.
129 Le dernier subside levé par Amédée VI, en 1372, concerne son action en Italie en qualité de capitaine de la ligue contre les Visconti, Carrier N., « Local Communities and Fiscal Reform », art. cité, p. 218-219. Sur cette expédition, Galland B., « Le rôle du comte de Savoie », art. cité.
130 Pazmandy T., « Les guerres d’Amédée VII », art. cité ; Biolzi R., « Les guerres d’Amédée VII », art. cité.
131 À l’instar d’Amédée VI, Amédée VII est adoubé chevalier par Guillaume de Grandson sous les murs de Sion, en 1384, Cabaret, La Chronique de Savoye [302], p. 269-270.
132 AST/SR, CS, inv. 16, 35 (1383-85), f. 48 vo-49 vo, 36 (1385), f. 11 vo-13 vo, 16 vo-23 vo, 37 (1386-1389), f. 28 ro-48 vo.
133 Carrier N., « Local Communities and Fiscal Reform », art. cité, p. 217-219.
134 AST/SR, CS, inv. 16, 37 (1386-1389), f. 28 vo-48 ro ; AST/SR, CS, inv. 29, 23/1 (1383-1415), f. 6-7 ; Pazmandy T., « Les guerres d’Amédée VII », art. cité, p. 88 ; Tallone A., Parlamento Sabaudo, op. cit., vol. 2, CCCXL, p. 7.
135 Castelnuovo G., Ufficiali e Gentiluomini, op. cit., p. 114-116.
136 À ce sujet, cf. également Guilleré C., « Les finances d’Amédée VIII », art. cité, p. 266-274.
137 AST/SR, CS, inv. 16, 45 (1400-1401), f. 68 ro-78 ro ; AST/SR, CS, inv. 29, 32/1 (1383-1415), f. 11-18.
138 Les nobles et les bourgeois d’Yverdon accordent le subside de 120 florins, qui correspond au salaire de deux mois pour six lances. Ceux de Romont paient l’équivalent du salaire de dix lances pour deux mois, AST/SR, CS, inv. 29, 23/1 (1383-1415), f. 11.
139 AST/SR, CS, inv. 29, 87/2 (1426), f. 10 ro.
140 Pendant la guerre contre les Visconti, plusieurs communautés piémontaises sont amendées car elles n’exploitent pas le produit des gabelles pour des travaux de fortifications, AST/Corte, PD, 75 (1427), f. 141 ro. Depuis 1446, l’argent provenant de la gabelle du vin de Castelletto, près de Novare, doit être utilisé pendant quinze ans pour l’entretien du château, AST/Corte, PD, 109 (1446), f. 17 ro.
141 Ce subside est également levé pour l’entretien des gens d’armes savoyardes qui, entre 1431 et 1433, accompagnent Sigismond de Luxembourg dans son Romfahrt, AST/SR, CS, inv. 16, 75 (1431), f. 49 ro-55 ro ; 77 (1432-1433), f. 62 ro-88 vo, 78 (1433-1434), f. 43 ro-46 vo ; 80 (1434-1435), f. 57 vo-59 ro.
142 L’impôt est levé entre 1433 et 1434, d’abord dans le « bas Montferrat » puis dans le « haut Montferrat », la région entre Acqui et Alba, AST/SR, CS, inv. 29, 32 (1431-1435), f. 16 ro-17 ro, 19 ro-24 ro. Pour la géographie administrative du marquisat de Montferrat à la fin du Moyen Âge, cf. Del Bo B., Uomini e strutture, op. cit., p. 35-74.
143 À ce sujet, cf. infra p. 262-263 ; Barbero A., Il ducato di Savoia, op. cit., p. 83-85.
144 Biolzi R., « Avec le fer », op. cit., p. 54-57 et 273 ; Tappy D., Les États de Vaud, op. cit., p. 348-349.
145 Barbero A., Il ducato di Savoia, op. cit., p. 89-91.
146 C’est le même montant que nous retrouvons en Bourgogne au cours du xve siècle, Sablon du Corail A., La guerre, le prince et ses sujets, op. cit., p. 304-305. L’impôt direct est institutionnalisé dans le duché de Bourgogne en 1407, Boone M., « Les ducs, les villes et l’argent des contribuables : le rêve d’un impôt princier permanent en Flandre à l’époque bourguignonne », dans P. Contamine, J. Kerhervé et A. Rigaudière (dir.), L’impôt au Moyen Âge, op. cit., vol. 2, p. 330-331.
147 Genet J.-P., La genèse de l’État moderne, op. cit., p. 8.
148 Carrier N., « Local Communities and Fiscal Reform », art. cité, p. 225.
149 Andenmatten B., La Maison de Savoie, op. cit., p. 440. À ce sujet, cf. également Gelting M., « Les mutations du pouvoir comtal en Maurienne (xive-xve siècles) », dans B. Andenmatten, A. Paravicini-Bagliani et N. Pollini (dir.), Amédée VIII – Félix V, op. cit., p. 215-228.
150 Contamine P., Guerre, État et société, op. cit., p. 136-137, note 3. Pour le bilan de quelques comptes des trésoriers des guerres à l’époque de Charles VI, Rey A., Les finances royales, op. cit., p. 426-427.
151 Van Nieuwenhuysen A., Les finances du duc de Bourgogne Philippe le Hardi (1384-1404) : économie et politique, Bruxelles, Éditions de l’université de Bruxelles, 1984, p. 499.
152 Schnerb B., « Un aspect de la politique », art. cité, p. 128.
153 Silvestri A., L’amministrazione nel regno di Sicilia: cancelleria, apparati finanziari e strumenti di governo nel tardo medioevo, Rome, Viella, 2018, p. 283 ; Kerhervé J., L’État breton, op. cit., vol. 1, p. 328-329.
154 Van Nieuwenhuysen A., Les finances du duc, op. cit., p. 192. En 1398, une livre tournois correspond à 16 derniers gros (1 florin petit poids = 12 derniers gros), AST/SR, CS, inv. 16, 43 (1398), f. 116 vo.
155 Une livre impériale correspond en ces années à environ un florins petit poids, cf. pour ces chiffres Mainoni P., « Fiscalità signorile e finanza pubblica nello stato visconteo-sforzesco », Estados y mercados financieros en el Occidente cristiano (siglos XIII-XVI). XLI Semana de Estudios Medievales (Estella, 15-18 de julio de 2014), Pampelune, Gobierno de Navarra, 2015, p. 154.
156 Barbero A., Il ducato di Savoia, op. cit., p. 92 ; Guilleré C., « Les finances d’Amédée VIII », art. cité, p. 274-275.
157 Schnerb B., L’État bourguignon, op. cit., p. 252-253.
158 Une pratique fortement attestée en Bourgogne également, Schnerb B., « Un aspect de la politique », art. cité, p. 113-128 ; Van Nieuwenhuysen A., Les finances du duc, op. cit. p. 333-372.
159 Pour un récapitulatif des emprunts et des subsides occasionnés par les guerres savoyardes, cf. annexe 2, p. 292.
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