Introduction
p. 9-28
Texte intégral
1Cet ouvrage est l’aboutissement d’un itinéraire personnel de recherche sur l’histoire des villes portuaires atlantiques, initialement et principalement centré sur celles des façades française et européenne, dans une époque moderne intégrant volontiers la première moitié du xixe siècle, avant de s’ouvrir vers les rivages de l’Afrique subsaharienne, avec quelques détours sur les côtes américaines, principalement autour de la mer des Caraïbes1. C’est peu dire si la démarche s’inscrit directement dans les problématiques de l’histoire atlantique développées depuis une trentaine d’années2, dans un double effort de dépassement de réticences initiales françaises heureusement closes3 et d’intégration à sa juste hauteur du segment africain4. Elle s’y attache d’abord dans son hypothèse de rendre compte de l’évolution historique d’une communauté économique, sociale et culturelle identifiée sous la notion de ville portuaire africaine atlantique à travers son insertion dans l’ensemble des flux générés par la circulation maritime sur l’océan homonyme5. Elle se soucie ensuite de la prise en compte de son entière dimension tricontinentale6, de l’Atlantique nord à celui du sud7, dans une articulation entre le local et le global8, en rendant compte des effets d’un système atlantique inséré dans une proto-mondialisation au sein des diverses communautés portuaires de sa façade africaine9.
2L’approche a retenu une chronologie longue afin de mesurer le rythme et les variations dans la distribution géographique des transformations, articulée sur la plus ou moins grande imbrication entre le commerce des produits matériels et celui des êtres humains saisis pour un travail servile. Elle couvre environ quatre siècles, allant des années 1470, décennie essentielle pour la prise de contacts atlantiques entre Européens et Africains, aux années 1870, décennie où s’achève la transition vers le seul commerce « légitime » de matières premières agricoles et où la logique d’une pénétration coloniale européenne s’accélère face à l’ancienne approche purement commerciale. L’idée centrale, qui fait l’unité de la période, est que cette première émergence de « ports » africains liés à l’essor des échanges atlantiques s’opère dans un cadre historique où l’Afrique est demeurée globalement maîtresse de son destin, comme corégulatrice du système, avant la phase historique de la colonisation10.
Un basculement
3Pour l’Afrique subsaharienne, cette intégration à l’horizon atlantique représente un des tournants majeurs de son histoire. Dans sa réponse commerciale positive donnée à une sollicitation maritime européenne initiée dans la seconde moitié du xve siècle dans le cadre des explorations portugaises, cette partie du continent réoriente partiellement ses échanges extérieurs jusqu’alors fléchés vers le Nord, vers les ports de la Méditerranée, surtout depuis que les réseaux marchands arabes et berbères ont accompagné et facilité l’expansion de l’islam à travers la succession des grands empires médiévaux du Ghâna et du Mâli11. Alors que le rivage n’était qu’une périphérie où un cabotage maritime réduit, concurrencé par les réseaux lagunaires dans certains secteurs, se limitait à quelques échanges interrégionaux à petite et moyenne échelles, celui-ci a acquis de plus en plus une importance stratégique, d’où l’excitation des multiples appétits pour s’assurer le contrôle politique et les bénéfices en tout genre issus de ce nouvel horizon de commerce extérieur. Les grands empires, qui reposaient sur une logique agrégative et décentralisée de vassalisation tributaire, n’ont pas résisté à cette pression qui s’est traduite par un émiettement de la géopolitique de l’Afrique subsaharienne occidentale, mouvement seulement partiellement contrebalancé par des reconstructions à échelle moyenne aux cours des xviie et xviiie siècles. Entre libération sécessionniste et incorporation par de nouvelles puissances intérieures, le littoral atlantique africain, du Sénégal à l’Angola, est devenu l’objet de nombreuses rivalités, entraînant conflits, déplacements de population et remodelage régulier de son découpage politique.
4Par ailleurs, la participation africaine aux échanges atlantiques n’a pas intéressé que des royaumes expansionnistes, plus ou moins tentés par une logique de centralisation et de militarisation de l’État à l’image des royaumes Wolof de Sénégambie12, de la fédération Kaabu en haute Guinée13, des royaumes de Denkyira, Akyem, Akwamu14 et Ashanti15 de l’intérieur de la Côte de l’Or, Allada16, Hueda, Dahomey17 et Oyo18 dans la baie du Bénin, du Bénin19 dans la baie du Biafra, ou encore du royaume du Kongo20 et de ses anciennes provinces sécessionnistes du Loango, Kakongo, Ngoyo et Soyo21, peu agressives après leur indépendance, et surtout du Ndongo sur sa frontière méridionale, alternant entre rôle de blocage de l’avancée portugaise et intermédiaire commercial majeur22. Au contraire, elle a concerné toutes les entités politiques, jusqu’aux plus petites, avec des niveaux d’engagement évidemment très variables dans le temps et dans l’espace. Même les « sociétés sans État » ou sociétés segmentaires sont entrées dans le grand commerce atlantique23, pas seulement sous forme contrainte pour se défendre de leurs voisins belliqueux et prédateurs, mais aussi selon leur propre logique de développement, non nécessairement militaire, mais plutôt agricole comme le montrent les sociétés rizicoles de haute Guinée24, ou même hautement commerciale à l’image des Aro du delta du Niger25.
5L’essor des échanges commerciaux a soutenu la transformation de villages de pêcheurs, souvent complétés de saliculteurs, en villes de petite ou moyenne importance. C’est une innovation majeure dans l’histoire de l’urbanisation de cette partie continentale de l’Afrique puisque les villes s’étaient développées jusqu’alors sur les zones de contact entre les grands écosystèmes, dans le Sahel entre le désert du Sahara et la savane herbeuse et sur la frontière entre la savane arborée et la grande forêt dense du climat équatorial26. De longue date, la fonction commerciale d’articulation entre marchés intérieur et extérieur, reposant sur l’effet d’entraînement de dégagement de surplus agricole, d’extraction de matières premières et d’offre de produits manufacturés de qualité, allant jusqu’à des œuvres artistiques, avait soutenu la transformation de villages en villes dans les principaux carrefours des voies de circulation intérieure, alliant fleuves, rivières et surtout pistes27. La restructuration politique de l’espace ne remodelait qu’à la marge cette distribution, étant donné l’importance cruciale des voies classiques de circulation et la perception des taxes dans les revenus des nouveaux États en expansion28. La vigueur de l’essor des échanges atlantiques a institué une complexification du réseau urbain, ajoutant par exemple la nouvelle relation entre capitale politique et porte maritime à celle qui existait avec les villes relais continentales de l’intérieur. L’essor du type cité-État marque le point ultime de cette diversification urbaine, même si cette logique fragmentaire est compensée par une association au sein d’une confrérie au Vieux Calabar29 ou dans une fédération dans le pays Fante sur la Côte de l’Or30.
6La notion de ville portuaire fait dépendre l’essor de l’ensemble urbain, tant social que matériel, de la dynamique quantitative des échanges, à travers la redistribution de ses profits au sein de la communauté de résidents, selon une hiérarchie sociale et politique où l’enrichissement procuré par la participation aux échanges et leur régulation n’est pas le seul fondement, même si, avec le temps, il tend à en devenir le plus influent, d’où des risques de déstabilisation du système communautaire31. Dans son segment africain, le système des échanges atlantiques est caractérisé par la prépondérance de deux demandes qui se répondent, les offres n’étant que la condition de leur meilleure satisfaction possible. Avant la colonisation, chaque partenaire conserve son entière autonomie dans la redéfinition partielle ou totale de la demande, même si le fait d’échanger des êtres humains contre des biens matériels introduit un rapport pervers qui ne peut être que défavorable à l’Afrique sur la longue durée, la pression démographique fonctionnant comme le meilleur défi pour soutenir l’innovation32.
7La question de l’impact du commerce atlantique sur l’économie africaine, et en particulier son sous-développement au xxe siècle, a suscité des appréciations contradictoires et le débat reste toujours ouvert33. L’évolution des équilibres variables entre les types de marchandises et le commerce des êtres humains, dont l’influence sur l’activité portuaire et commerciale se mesure non seulement en termes de volume, de poids et de maniabilité, mais aussi selon la proportion de la valeur ajoutée par le travail plus ou moins qualifié dans les services fournis, le tout révélé dans les variations des équivalences de troc34, rend nécessaire une périodisation dans la caractérisation du processus d’urbanisation portuaire.
8Les quatre siècles étudiés se décomposent en quatre grandes phases selon les variations d’importance entre le commerce des produits matériels et l’exportation des esclaves hors du continent africain, d’abord vers l’Europe du sud et les îles atlantiques portugaises et espagnoles, mais rapidement essentiellement vers le continent américain, principalement le Brésil et l’espace caraïbe35. Un premier siècle est caractérisé par la prépondérance du commerce des biens matériels africains (or, ivoire, poivre, sucre, chevaux, tissus, produits métalliques…) et celle du marché européen pour l’importation d’esclaves, de préférence de sexe féminin, dans une concurrence avec un trafic servile maritime intra-africain reliant les royaumes de Bénin ou de Kongo aux mines d’or de la Côte de même nom, avec des volumes d’échange encore limités36. Le siècle suivant voit un premier essor des exportations serviles et du volume global des échanges suite au naufrage des prétentions portugaises au monopole et à la multiplication des participations européennes. Un long xviiie siècle débordant jusqu’aux années 1820 connaît une explosion quantitative du commerce des esclaves afin de fournir de la main-d’œuvre aux plantations européennes en Amérique, une baisse des sorties d’or africain concurrencé par celui du Brésil, et une montée des exigences des importateurs africains dans la diversité et la qualité des productions manufacturées37.
9L’essentiel du xixe siècle précolonial, à partir de 1815, correspond à la volonté unilatérale des Européens d’éteindre le trafic d’esclaves déclaré illégal, au profit d’une importation de matières premières agricoles ou minières exigées par la Révolution industrielle38. Porté par les Britanniques qui se heurtent à la mauvaise volonté des autres puissances, surtout des Portugais, Brésiliens et Espagnols, ce mouvement ne s’affermit que dans les années 1830, avec une vive accélération après 1850. Couplé avec l’évolution des techniques au sein de la Révolution industrielle en Europe et aux États-Unis et les mutations majeures du transport maritime et du capitalisme commercial39, ce renouvellement du contenu du trafic contribue à redessiner la hiérarchie des sites portuaires de l’Afrique atlantique40.
Tableau 1. – Évolution du nombre de voyages et d’esclaves embarqués (1514-1866).
Périodes | Voyages | Esclaves embarqués | % Esclaves |
1514-1550 | 72 | 24 559 | 0,2 |
1551-1600 | 745 | 263 413 | 2,6 |
1601-1650 | 1 132 | 388 727 | 3,9 |
1651-1700 | 1 992 | 616 025 | 6,2 |
1701-1750 | 7 102 | 2 081 865 | 20,8 |
1751-1800 | 11 514 | 3 288 859 | 32,8 |
1801-1850 | 8 900 | 3 131 241 | 31,3 |
1850-1866 | 365 | 221 676 | 2,2 |
1514-1866 | 31 822 | 10 016 365 | 100 |
Source : [slavevoyages.org], consultation : 23-05-2021.
Répartition et articulation des rôles
10Dans la période précoloniale, la répartition des tâches se fait selon une division internationale du travail strictement respectée, sauf exceptions marginales d’anticipation, essentiellement en Angola portugais41. Quand l’acheminement et la redistribution sur le continent demeurent un monopole africain, la circulation maritime reste celui des extérieurs, opérateurs européens ou américains, principalement brésiliens. Pendant les trois premiers siècles, l’articulation est facilitée par le partage de fait des mêmes principes fondamentaux du mercantilisme42. Dans les espaces sous influence portugaise, la solution pionnière de pénétration de lançados ou tangomãos dans la haute Guinée dès le xvie siècle43, hors du contrôle de la Couronne, mais selon les codes des entités politiques africaines, diffère en cela de la pénétration des pombeiros dans la colonie-réseau portugaise angolaise appuyée sur quelques forts intérieurs44.
11Du côté africain, le contrôle du commerce extérieur est considéré comme essentiel par les élites traditionnelles puisqu’il assure une augmentation substantielle des ressources qui permettent la consolidation de la domination sociale et politique et l’expansionnisme militaire agrégeant de nouveaux tributaires ou la défense contre des rivaux du même type45. Du côté européen, le commerce africain est conçu dans la logique de monopole dans la double dimension du privilège d’une puissance maritime qui entend s’en réserver le bénéfice face aux prétentions de ses rivales et de la cession de ce privilège souverain à une compagnie de commerce à travers une charte lui réservant un secteur géographique ou l’ensemble du littoral d’Afrique occidentale46. C’est à l’intérieur de cette convergence de modèles d’économie politique que s’impose le principe de négociation de traités commerciaux, même si le fossé culturel ou la mauvaise foi tactique laisse subsister des ambiguïtés. Reste toutefois à surmonter la contradiction entre la prétention au partenariat unique ou au moins privilégié recherché par les Européens et la volonté de diversification défendue par les Africains47. L’importance des interlopes mine les prétentions européennes, faisant basculer le rapport de force en faveur des autorités africaines. Des deux côtés, les difficultés de fonctionnement imposent des solutions de compromis avec les marchands privés indépendants qui réclament leur part de marché48.
12À partir de la seconde moitié du xviiie siècle, cette harmonie de principes avec assouplissements fait place à une divergence grandissante. Alors que les souverainetés africaines demeurent fidèles au modèle traditionnel, les opérateurs européens et américains se réclament toujours plus du libéralisme économique, en essayant d’imposer le nouveau cadre du libre-échange49. Les résistances africaines sont une des causes de la conversion progressive des maisons de commerce européennes à une logique d’occupation militaire afin de briser cette barrière défensive dans le troisième quart du xixe siècle50.
13Les compagnies commerciales privilégiées et les négociants-armateurs privés ont partagé l’idée fondamentale que les échanges avec l’Afrique devaient rester strictement de type commercial, avec le minimum d’investissement sur place pour réduire les frais de fonctionnement. Après la dissolution de la Royal African Company en 1750, l’entretien des forts est confié par le parlement britannique à la Merchant Company Trading to Africa, alors que les opérations commerciales sont devenues totalement libres. À la suppression de la Compagnie française des Indes en 1769, la gestion des comptoirs fortifiés est reprise par le ministère de la Marine, qui la sous-traite cependant assez vite à diverses compagnies privées sectorisées. Sur le site de Ouidah, les trois forts anglais, français et portugais ont connu des utilisations variées au xixe siècle, y compris comme entrepôts pour des agents de maisons de commerce privées.
Qu’est-ce qu’une ville portuaire africaine atlantique ?
14Prétendre caractériser l’émergence de villes portuaires en Afrique atlantique au temps du commerce des esclaves invite à préciser ce qui est inclus de manière générale dans l’association des deux dimensions de ce concept, avant de l’inscrire dans les réalités africaines.
15En histoire maritime, un port est un espace technique de transfert de charge dans la circulation des biens, établissant une liaison entre un hinterland intérieur continental et un foreland maritime extérieur. La caractérisation de cette interface terre-mer intègre de nombreuses variables : la géographie physique du site en forme de rade littorale ou d’estuaire ou delta, le type de navire utilisé sur le segment maritime, le type d’embarcation de liaison entre mer et rivage, l’accostage par échouage ou à quai, la quantité de force humaine ou animale disponible pour les transferts à terre, le mode de stockage provisoire ou à durée plus longue, selon qu’il s’agit de biens matériels volumineux de valeur faible ou moyenne ou très précieux ou d’êtres humains réduits à la condition servile, les modes constructifs et le niveau technologique atteint, et par-dessus tout l’importance du financement consenti par les opérateurs51. Tous ces composants doivent être interrogés dans leur contexte africain, associant les caractéristiques géographiques des sites, les conditions sociales de la croissance quantitative du trafic, la mobilisation des savoir-faire adéquats et les interactions liées au caractère transculturel du commerce atlantique africain.
16La ville est une construction sociale d’un aménagement physique d’un espace pour répondre aux besoins générés par les activités déployées, la résidence des individus et leurs familles, les services de l’autorité politique, les croyances religieuses, le tout relié par un système viaire permettant la circulation intérieure et éventuellement protégé de risques d’agressions extérieures par une enceinte de clôture. L’entrée sociale de la définition croise le mode d’établissement des liens sociaux, depuis les unités fondamentales de la parenté jusqu’aux regroupements corporatifs communautaires, et l’impact de la hiérarchie sociale réunissant les initiatives des élites, le mimétisme des médians et la soumission ou la résistance des inférieurs52.
17En Afrique, des spécificités de civilisation impriment leur empreinte sur l’exercice du commerce atlantique et son rôle urbanisant. S’additionnent la primauté de la structuration lignagère, dans sa double version matrilinéaire dominante ou patrilinéaire en progression, la tradition d’intégration des extérieurs, depuis les migrations écologiques ou militaires jusqu’aux extensions des réseaux commerciaux à longue distance, favorisant une ouverture syncrétique en direction des nouveaux partenaires, l’établissement de la richesse sur le contrôle des hommes et des femmes, dans une déclinaison très fine des formes de dépendance jusqu’à l’esclavage domestique, la conception usufruitière de l’accès aux ressources de l’environnement pensée comme une concession de déités dans l’animisme, soutenant une approche sacrée et ritualisée de toutes les formes d’activité53.
18La notion de ville portuaire pose comme principe que le commerce extérieur agit comme principal support de l’essor urbain. Sur le marché du travail, cette interface s’apparente au cœur de l’activité dont les pulsations s’étendent par ondes concentriques à des secteurs de plus en plus périphériques de l’économie urbaine. Dans l’accumulation des richesses, la manifestation du prestige social et l’influence politique, elle assure le renouvellement des élites de pouvoir en fournissant une alternative de progression face à d’autres sources d’enrichissement via l’agriculture, la guerre ou l’accès privilégié aux ressources étatiques. L’originalité des nouvelles villes atlantiques africaines tient à l’intégration par étapes de ces supports dans les trajectoires des individus et des lignages en ascension soutenue54.
19Ainsi, dans l’émergence de villes africaines à fonction portuaire, est-il stratégique de penser en termes de dynamique de croisement d’influences dans laquelle une matrice africaine absorbe des nouveautés extérieures qui ne sont que des corrections retraduites en termes identifiables et assimilables dans les cultures locales55. Ceci concerne tout autant les modalités de l’échange commercial et les modes de consommation matérielle et culturelle manifestant un attrait pour l’occidentalisation que l’africanisation progressive des Euro-Africains ou Américano-Africains dans la succession des générations et l’inculturation des efforts d’évangélisation chrétienne plutôt tardifs, en dehors de l’exception du royaume du Kongo et du front littoral portugais angolais, problème rencontré depuis longtemps par l’islam dans les villes intérieures soudaniennes.
20En ce qui concerne la forme urbaine du site portuaire, le poids des contraintes géographiques s’allie à l’héritage de la géopolitique africaine et au mode de traitement de la présence extérieure sur les rivages africains pour en diversifier les modes de déclinaison. La préférence pour la rive continentale de lagune sur les côtes basses ou les hauteurs sur les côtes à falaises ou montagneuses, engendrant une distinction entre rivage et place de commerce, la tutelle d’une capitale intérieure ou la concentration dans un même lieu, l’acceptation voire même la sollicitation de l’implantation d’un entrepôt fortifié européen permanent ou le rejet de toute installation durable, forment autant de variations qui modèlent la morphologie de la ville portuaire africaine atlantique56.
21L’effet urbanisant de cette fonction d’articulation entre circuits intérieurs et voies maritimes, drainage des biens exportés vers la mer et distribution des produits importés dans l’intérieur continental, implique une grande attention aux effets de la succession des contextes historiques à travers leurs traductions économiques, technologiques, sociales et culturelles. En effet, le développement des activités urbaines s’inscrit globalement dans un cadre matériel où l’héritage tient souvent une place plus importante que le changement. La ville a cette propriété d’être en réaménagement permanent sur elle-même pour l’essentiel de son paysage construit, renvoyant les nouveaux types constructifs en périphérie, là où le grignotage de l’espace rural rend leur implantation plus aisée. Les nouveaux besoins, tant d’activités que résidentiels, sont souvent obligés de s’accommoder de constructions d’époques antérieures, au prix de quelques ajustements57. C’est seulement lorsque la tension devient trop forte que l’extension de l’espace urbain connaît une accélération transformatrice.
22Faut-il insister sur ce qui insère la fabrique de la ville africaine dans ce processus global ou au contraire sur ce qui l’en différencie pour éviter le piège d’une lecture euro-centrée ? Plusieurs facteurs essentiels fondent une originalité. Ce sont des villes nouvelles où l’impératif commercial peut d’emblée s’imposer, avec cette singularité qu’il est entièrement contrôlé par l’élite dirigeante, ce qui favorise la convergence fonctionnelle entre police et commerce. Contrairement aux villes européennes, les édifices ne sont pas construits en pierre ou en briques, mais associent ossature de bois, murs de terre et couverture végétale, ce qui oblige à des reconstructions beaucoup plus régulières, même en dehors des grands incendies beaucoup plus fréquents. La ville africaine serait donc en théorie plus adaptable aux nouvelles conditions de développement, hypothèse contrariée par le poids des traditions sociales de l’habitat. La conception de la propriété, les structures familiales et de parenté, la logique d’association de la famille et des esclaves domestiques et la limitation des missions concédées à la puissance publique invitent à souligner la spécificité de l’urbanisation africaine sur les quatre siècles étudiés.
Des sources diversifiées sous l’angle de la culture africaine
23L’africanisation d’une grille de lecture, formée à partir d’une observation comparative avec les places portuaires atlantiques européennes et américaines à l’époque moderne, oblige à un retour critique minutieux aux descriptions fournies par les auteurs des récits de voyage, de la fin du xve siècle aux années 1870. Cette longue durée, qui recouvre des changements profonds dans les relations commerciales entre l’Afrique atlantique et ses partenaires européens et américains et qui connaît une accélération tardive, mais vive, dans le différentiel technologique et ses applications dans le transport maritime et le travail portuaire, mais aussi dans les modes constructifs des équipements et des édifices urbains, invite à une comparaison attentive des tableaux brossés par les différents auteurs dans le déroulé du temps, dans l’hypothèse d’une accélération des changements en s’approchant du terme. La prise en compte des illustrations associées exige une extrême vigilance, grâce à leur mise à l’épreuve avec des récits croisés de différents auteurs si possible. Avec la promotion des ingénieurs militaires de Marine au xviiie siècle, les plans de ville deviennent plus nombreux. Là encore, la même précaution doit permettre de distinguer ce qui est resté projet de papier et ce qui a reçu début d’application58.
24Ce type de sources est heureusement complété par les observations consignées par les capitaines de navire dans leurs journaux de bord ou leurs comptes rendus de voyage à leurs armateurs59, surtout lorsque celles-ci sont enrichies de croquis ou de dessins, allant parfois exceptionnellement jusqu’à une série d’aquarelles représentant le cadre géographique physique et humain des opérations de traite60. La correspondance entre des capitaines revenant régulièrement sur un site et les principaux marchands africains du lieu personnalise les conditions de ce commerce transculturel, à l’exemple des échanges entre les marchands du Vieux Calabar et les capitaines et négociants-armateurs de Liverpool61. La richesse documentaire du journal d’Antera Duke, grand marchand Efik du Vieux Calabar des années 1780, fait d’autant plus regretter sa rareté62. Les archives des compagnies de commerce qui ont implanté des établissements commerciaux fortifiés, principalement sur la Côte de l’Or, mais aussi en Sénégambie et dans la baie du Bénin, et les rapports complémentaires de leurs directeurs livrent, au sein d’une gamme très riche de renseignements, des données très précieuses sur l’insertion de l’entrepôt au sein de la ville africaine, depuis son influence sur le marché du travail ou sur la nature coopérative des relations nouées avec les élites dirigeantes africaines jusqu’à son impact sur le modelage de la morphologie urbaine63. Ce type de document se révèle également fort précieux, même sans implantation permanente, comme le prouvent les comptes de la Compagnie zélandaise de Middelburg de 1732 à 1796 à propos de ses activités sur la Côte d’Angole64.
25Dans la consolidation d’une compréhension africaine des réalités de la ville portuaire atlantique, il est essentiel de profiter de tous les témoignages laissés par les Africains eux-mêmes, qu’ils soient du côté des agents du commerce ou de ses victimes, basculant parfois brutalement de l’un dans l’autre65. Les autobiographies ajoutent la richesse dramatique de l’expérience humaine à la reconstitution des itinéraires de vie des historiens à partir des archives, même si les témoignages restent succincts sur la ville-havre de déportation66. Dans l’analyse des dimensions sociales et matérielles d’un site portuaire africain, le recours à la mémoire orale des traditionnistes patentés n’est pas d’un grand secours car cette dernière est principalement ancrée dans une dimension immatérielle associée à la formulation mythique des origines et à la légitimité sacrée du pouvoir exercé. Toutefois, par la restitution mémorielle des conflits, elle permet de mieux comprendre leurs enjeux quand ils sont liés aux échanges atlantiques, principalement lors de crises de succession où éclatent les tensions suscitées par l’accès privilégié aux ressources engendrées par le nouvel horizon commercial, un renversement de l’ordre lignager ou l’introduction d’une nouvelle sacralité chrétienne.
26On reste toutefois loin d’une analyse précise des caractéristiques de la place portuaire qui sont au contraire mieux appréhendées par les approches archéologiques67 ou d’histoire de l’art sur les édifices les plus anciens68, même si ces dernières sont handicapées par l’importance du végétal et de la terre dans la construction traditionnelle, engendrant une réfection régulière. La tactique habituelle de l’incendie lors des affrontements guerriers entre places rivales et les saccages de la conquête coloniale accentuent encore ce déficit de témoignages matériels dans l’héritage patrimonial. Ce dernier est par ailleurs menacé par l’explosion urbaine sur certains sites anciens depuis la seconde moitié du xxe siècle, le dépérissement de certains autres suite à la colonisation et le peu de respect sociétal pour les politiques récentes de protection, même lorsque celles-ci sont assises sur le prestige du label Unesco, à l’exemple de Saint-Louis du Sénégal69. Le tourisme mémoriel lié à la traite des esclaves offre un levier pour une meilleure assise du financement des politiques de conservation et des études archéologiques et historiques enrichissant la valorisation, même si parfois les discours associés n’aident guère à comprendre les réalités comme en témoigne le sanctuaire pourtant très célèbre de Gorée70 ou l’implantation d’une symbolique porte de « non retour » sur la plage de Ouidah71 ou la préservation aléatoire de l’architecture afro-brésilienne sur les sites de la baie du Bénin72.
27Dans l’utilisation des récits de voyageurs, des journaux et correspondances des capitaines de navire et des archives des compagnies de commerce, l’enjeu essentiel est bien de ne pas demeurer prisonnier du caractère euro-centré des sources, prisme déformant ne délivrant qu’une vue tronquée et partiale d’une réalité enracinée dans un environnement d’abord africain avant d’être corrigé par son intégration dans une dimension atlantique. Le croisement des regards d’observateurs aux expériences diversifiées (marins, marchands, militaires, religieux), issus d’univers culturels spécifiques de par leurs origines nationales, est une première précaution de distanciation, même si une méta-réalité commerciale et des trajectoires professionnelles transversales en limitent l’efficience73, d’autant plus que s’y déploie la compilation dérapant parfois vers le plagiat74. La prise en compte des règles les plus habituelles déployées dans cette rhétorique des récits de voyage75 est une démarche préalable et indispensable pour s’approcher au plus près des données les plus factuelles en les dégageant de tout jugement de valeur.
28Ceci exige une réactivité très fine face aux formulations des divers auteurs, appuyée sur une solide connaissance des principaux schémas culturels présidant à leurs formations scolaires et professionnelles et aux idées reçues dans l’opinion publique de leur temps76. Il ne faut pas craindre un pelage efficace de l’enveloppe culturelle pour atteindre les données brutes afin de réintroduire ces dernières dans les univers mentaux et les logiques d’action des sociétés africaines, dans l’esprit de la méthode élaborée par Gérard Chouin77. Pour notre propos, toutes les techniques mobilisées dans le transfert de charges et l’établissement de relations commerciales (matériel nautique, transfert terrestre, échelles de troc, monnaie de compte, crédit, garanties de sécurisation des accords commerciaux, filières ou réseaux d’acteurs africains ou transculturels…) et tous les modes d’action repérés dans la fabrique urbaine au service de l’essor de cette fonction de porte du commerce extérieur atlantique doivent être d’abord replacés dans les habitus traditionnels africains avant d’en évaluer le degré de créolisation par intégration d’innovations d’origine atlantique78.
29Dans l’histoire générale des villes africaines, le type qui nous intéresse peine à trouver sa place. Il est doublement victime d’une concentration des études sur la période contemporaine, associant colonisation et indépendance, et du prisme déformant de la Côte de l’Or pour la longue phase dominée par le commerce des esclaves. Dans les années 1990, la critique du premier tropisme au nom de la reconnaissance de l’ancienneté et de la richesse du processus d’urbanisation en Afrique, y compris dans sa dimension subsaharienne, restait associée à la promotion de la notion de ville-fort qui semblait résumer l’essentiel de cette nouvelle génération de villes littorales nées du grand commerce atlantique79, dans une occultation de la diversité des réalités qu’une observation attentive ne manque pas de révéler. En 2005, une synthèse sur les espaces urbains africains, pourtant présentée sous l’angle d’une perspective historique, n’accordait qu’une portion congrue à la période précoloniale80.
Évolution et embarras de la recherche historique
30Depuis une trentaine d’années, la recherche historique sur les villes portuaires atlantiques a bénéficié de la promotion de cet horizon interprétatif et des nombreux débats qui ont amené à son enrichissement conceptuel et à la reformulation de certains paradigmes81. Malgré son titre, une première approche en 1991 n’a concerné que les rives américaines, en ignorant totalement le continent africain82. Cette défaillance a toutefois été partiellement corrigée en 1999 avec une synthèse centrée sur les sites littoraux des baies du Bénin et du Biafra, riche d’un questionnement pionnier sur les réalités recouvertes par la notion de « port » en contexte africain et atlantique83. En 2004, Robin Law récidivait dans un approfondissement de l’analyse en se focalisant sur l’exemple de Ouidah, porte du commerce extérieur du royaume du Dahomey. Avec son sous-titre annonçant une histoire sociale d’un « port d’esclaves », l’ouvrage rompait avec une ligne générale intégrant ce type spécifique de ville dans une approche plus globale, celle d’un royaume ou d’une région, réduisant souvent l’analyse de l’association des fonctions portuaires et urbaines à la portion congrue. Il reprenait en effet le concept partagé par l’histoire et la géographie urbaines d’une construction sociale matérialisée dans un espace communautaire aménagé en conséquence. Il se plaçait dans le sillage de l’ouvrage innovant d’Harvey Feinberg sur Elmina (1989)84, ville africaine développée autour de son « château », siège successif des états-majors portugais et néerlandais pour la Côte de l’Or, en déplaçant le curseur en faveur d’une approche africaine de la caractérisation de l’évolution d’une place de commerce ayant atteint environ 25 000 habitants au milieu du xixe siècle, avant d’entrer dans un déclin.
31Entre les deux, Alain Sinou, architecte de formation, avait engagé une démarche similaire cherchant à rendre compte de l’évolution de la forme urbaine et du paysage construit de Saint-Louis du Sénégal et de Gorée85 à travers l’évolution des conditions économiques, sociales, culturelles et politiques d’une traite atlantique associant étroitement les exportations d’or, de gomme arabique et d’esclaves et les importations de produits manufacturés européens, dans une coopération entre compagnies de commerce et courtiers africains, principalement d’origine mulâtre, au sein d’accords négociés avec les puissances régionales souveraines, avant de glisser vers une occupation coloniale du territoire au milieu du xixe siècle afin de sécuriser l’exportation des arachides, nouvelle spéculation prise en mains par de puissantes maisons de commerce des ports de Bordeaux et de Marseille. En distinguant ville-comptoir et ville coloniale, il valorisait l’africanité dans le partenariat commercial. En cela il était proche de Feinberg utilisant la notion d’enclave-entrepôt pour caractériser Elmina au xviiie siècle. C’est dans cette même optique que le terme de « slave emporium » a été utilisé pour rendre compte du profil de Cape Coast86. Replacée à l’échelle de la façade atlantique africaine, cette optique ne peut prétendre qu’à une dimension partielle.
32La subordination des trois entrepôts fortifiés français, anglais et portugais de Ouidah face à l’autorité monarchique, d’abord dans le petit royaume littoral de Hueda, puis ensuite dans le plus grand royaume centralisé et militarisé du Dahomey au xviiie siècle, et le rôle croissant des grands marchands privés d’origine brésilienne au xixe siècle dans l’animation du commerce et l’extension urbaine ont conduit Robin Law à récuser à juste titre la notion d’enclave-entrepôt sans en proposer une autre en substitution, préférant le terme plus vague mais plus générique de « port d’esclaves » ou slaving port, quitte à mettre le mot « port » entre guillemets pour souligner l’ambiguïté de la notion dans une comparaison entre les trois façades atlantiques. L’expression neutre de « port de commerce » retenu par des acteurs de l’anthropologie économiste comme Karl Polanyi87, à partir d’une étude de cas du fonctionnement de Ouidah, était aussi rejetée, non pas tant pour la faiblesse de son contenu heuristique que pour sa posture euro-centrée mettant à égalité les directeurs de fort et l’administration étatique commerciale sous les ordres du yovogan (chef des Blancs). Sur ce site, la neutralité dans les conflits maritimes extérieurs et la diversité d’accès des navires européens a toujours été imposée par la puissance souveraine africaine, déjà dans les phases antérieures des royaumes de Hueda et Allada.
33Toutes les réflexions antérieures développées dans cette introduction permettent de comprendre les hésitations de Robin Law et sa résignation face à une quasi-impuissance sémantique à rendre compte de la spécificité et de la diversité des portes urbaines maritimes qui naissent sur les côtes africaines du fait de l’essor des échanges atlantiques. Difficulté illustrée par ailleurs par l’absence de reprise de la discussion et le recours récurrent aux termes de slave port ou slaving port dans l’abondante production de la recherche anglo-saxonne depuis quinze ans, ou encore à la notion encore plus vague de port de mer88. On peut admettre que la notion de port englobe en même temps l’interface terre-mer et l’espace complémentaire socio-urbain qui en a surgi. Le terme de port d’esclaves est plus problématique car il réduit la fonction motrice à cette seule dimension, rejetant dans l’ombre tous les autres trafics assis sur des richesses africaines, réduction contestable pour les deux premiers siècles, plus admissible pour le long xviiie siècle, mais de moins en moins pertinente à partir du second tiers du xixe siècle.
34Une autre perspective ouverte en 1999 avait conduit l’analyse en termes de communauté d’intermédiation, ce qui souligne à juste titre le rôle d’interface et la dimension sociale d’un espace de recouvrement entre une base africaine et des influences extérieures, mais qui occulte le lien matriciel entre l’activité portuaire et la mutation des villages vers une réalité urbaine. Le sous-titre montrait qu’il s’agissait d’abord d’une étude du rôle d’un groupe ethnique dans un hinterland de rivières, l’émergence du fait urbain ne se concrétisant qu’avec la colonisation89. L’idée a toutefois été reprise pour caractériser le grand site d’Elmina90. Récemment, cette perspective a été reformulée à propos des plus grands sites de la Côte de l’Or, en se recentrant sur la réalité portuaire et en l’inscrivant dans la problématique de la globalisation, à travers l’utilisation de la notion de hub91, habituellement associée à l’histoire du transport maritime de l’époque récente, postindustrielle. Les mutations sociales et matérielles de places maritimes majeures comme Elmina, Cape Coast et Accra sont interprétées comme des traductions urbaines de leur rôle de portails de globalisation, lieux de condensation d’une créolisation atlantique en terreau africain92. La ville atlantique africaine est saisie comme un espace d’enchevêtrement où viennent converger et s’emmêler des flux de différentes natures : humains, matériels, idéels et culturels93. Cette perspective très suggestive présente l’intérêt d’articuler étroitement la régulation commerciale, la fonction portuaire, les mutations sociales et l’adaptation du paysage urbain.
35C’est assurément la démarche la plus proche de celle qui a prévalu dans la réalisation de notre ouvrage, à la seule différence près d’une plus grande attention à la relation congénitale entre fonction portuaire et émergence urbaine et à la persistance des solutions traditionnelles africaines à côté de l’intégration des innovations extérieures au sein du processus hybride et syncrétique engendré par cette globalisation atlantique, avant d’être mondialisée. Reste que les sites commerciaux de la Côte de l’Or demeurent des exceptions plutôt qu’une règle à l’échelle de l’ensemble du littoral atlantique africain. En adoptant une focale beaucoup plus grande, cette étude entend soumettre à l’épreuve de la diversité la discussion de la pertinence des catégories conceptuelles mobilisées pour caractériser, au plus près des réalités et des dynamiques en jeu, ce que recouvre l’émergence de « ports » atlantiques africains pendant les quatre siècles qui ont précédé la colonisation.
36Le titre retenu vise à associer trois grands questionnements. Le terme de havre entend rendre compte des modalités d’une interface terre-mer fonctionnant à la force humaine avec des équipements limités, inscrits dans la tradition africaine (moyens de transport, édifices), y compris pour certains comptoirs fortifiés d’initiatives européennes. La ville désigne à la fois le système social hiérarchisé et l’enveloppe matérielle dans laquelle il organise les opérations du grand commerce (autorisations, taxes, équivalences de troc, système de crédit, sécurisation des transactions). La dimension multiculturelle renvoie à la composition multiethnique atlantique de la population et la mesure de l’impact d’un processus de créolisation dans une société essentiellement africaine, dans une grande diversité des formes de présence extérieure. L’hypothèse de travail est bien que c’est au cœur des interactions de ces trois composants que s’est élaboré le type nouveau et spécifique de la ville portuaire africaine atlantique en contexte de proto-mondialisation, en l’érigeant par la concentration des phénomènes dans un même lieu en laboratoire de transformation pour l’ensemble du continent94.
Plan de l’ouvrage
37Le plan d’étude articule la réflexion en sept chapitres. Le premier replace l’Afrique dans un commerce tricontinental en s’intéressant à l’articulation prioritaire de deux demandes qui modèlent les offres en réponse, en enracinant la structuration des échanges dans la géopolitique africaine et en discutant des effets de la transition commerciale du xixe siècle. Le second s’intéresse à la division internationale du travail sur le littoral africain, laissant le contrôle du circuit intérieur aux Africains et la maîtrise du maritime aux Européens et Américains, et aux modalités de l’articulation entre partenaires dans un commerce transculturel sur le littoral. Le troisième dresse la hiérarchie des trente sites supérieurs à partir des données statistiques fournies par la traite esclavagiste, avec pour objectif d’en dessiner des profils différenciés.
38Après cette approche globale, la suite discute de la notion de ville portuaire africaine atlantique. Le chapitre quatre examine les conditions géographiques attractives et répulsives qui conditionnent le développement d’un système portuaire, dans leurs dimensions physiques et humaines. Le chapitre cinq caractérise l’organisation concrète de l’interface terre-mer en promouvant la notion de havre et en s’intéressant au problème du transfert de la plage aux magasins et entrepôts de la place de commerce. Le chapitre six s’intéresse à la dynamique sociale qui soutient l’essor des échanges atlantiques : société urbaine multiethnique et multiculturelle, liens de parenté et encadrement lignager, hiérarchie sociale basée sur une tradition esclavagiste, effets d’une créolisation atlantique inégale. Le dernier chapitre questionne la notion de ville-port en contexte africain, en replaçant la fabrique matérielle urbaine à partir de la fonction commerciale dans un jeu d’interactions dans lequel les effets d’une créolisation ne prennent essor qu’à partir d’une matrice fondamentalement africaine.
Notes de bas de page
1 Saupin Guy (dir.), Villes atlantiques dans l’Europe occidentale du Moyen Âge au xxe siècle, Rennes, PUR, 2006 ; Africains et Européens dans le monde atlantique, xve-xixe siècle, Rennes, PUR, 2014 ; Les villes atlantiques européennes. Une comparaison entre l’Espagne et la France (1650-1850), Rennes, PUR, 2019 ; « Las ciudades portuarias españolas del Caribe en la época moderna: que especificidad? », in Luis López Molina (dir.), Cádiz: del Floreciente s. xviii al Port of Future del s. xxi, Cádiz, Dykinson, 2018, p. 190-205 ; « Le commerce atlantique et la création des villes portuaires en Afrique noire à l’époque moderne », in Kouakou Kouassi (éd.), La Mer : une autre voie de développement en Afrique de l’Ouest, Paris, Les Indes Savantes, 2019, p. 45-64 ; « African Seaports in Transition, 1850-1880s », in Ayodeji Olukoju et Daniel Castillo Hidalgo (éd.), African Seaports and Maritime Economics in Historical Perspective, Cham, Palgrave Macmillan, 2020, p. 17-44.
2 Bailyn Bernard, Atlantic History. Concept and Contours, Cambridge (Mass.), Harvard University Press, 2005. Games Alison, « Atlantic History. Definitions, Challenges and Opportunities », The American Historical Review, 2006, vol. 111, no 3, p. 741-757. Benjamin Thomas, The Atlantic World: Europeans, Africans, Indians and their Shared History, 1400-1900, Cambridge, Cambridge University Press, 2009. Greene Jack P. et Morgan Philip D. (éd.), Atlantic History. A Critical Appraisal, Oxford, Oxford University Press, 2009. Canny Nicholas et Morgan Philip D. (éd.), The Oxford Handbook of the Atlantic World, 1450-1850, Oxford, Oxford University Press, 2011. Miller Joseph C. (éd.), The Princeton Companion to Atlantic History, Princeton, Oxford Princeton University Press, 2015. Coffman D’Maris, Leonard Adrian et O’Reilly William (éd.), The Atlantic World, Londres/New York, Routledge, 2015.
3 Vidal Cécile, « The Reluctance of French Historians to Address Atlantic History », Special Issue. Imagining the Atlantic World, The Southern Quarterly, 2006, vol. 43, no 4, p. 153-189. Cabantous Alain, « Résistance de principe ou lucidité intellectuelle ? Les historiens français et l’histoire atlantique », Revue historique, 2012, t. CCCXIV/3, no 663, p. 705-726. Schnakenbourg Eric, Le monde atlantique. Un espace en mouvement, xve-xviiie siècle, Paris, Armand Colin, 2021.
4 Thornton John K., Africa and Africans in the Making of the Atlantic World, 1400-1800, Cambridge, Cambridge University Press, 1992, 1998. Falola Toyin, Roberts Kevin (éd.), The Atlantic World, 1540-2000, Bloomington, Indiana University Press, 2008. Falola Toyin et Childs Matt D. (éd.), The Changing Worlds of Atlantic Africa: Essays in Honour of Robin Law, Durham, Carolina Academic Press, 2009.
5 Pietschmann Horst (éd.), Atlantic History. History of the Atlantic System, 1580-1830, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 2002. Suranyi Anna, The Atlantic Connection: a History of the Atlantic World, 1450-1990, Londres, Routledge, 2015.
6 Thornton John K., Africa and Africans in the Making of the Atlantic World, 1400-1800, Cambridge, Cambridge University Press, 1992, 1998, p. 6-13, 125-128, 304-320 ; A Cultural History of the Atlantic World, 1250-1820, Cambridge, Cambridge University Press, 2012, p. 60-99.
7 Armitage David et Braddick Michael (éd.), The British Atlantic World, 1500-1800, New York, Palgrave MacMillan, 2002. Alencastro Felipe de, O Trato dos Viventes: Formação do Brasil no Atlântico Sul, São Paulo, Companhia das Letras, 2000 ; « Le versant brésilien de l’Atlantique sud, 1500-1850 », Annales, Histoire, Sciences Sociales, 2006-2, p. 359-382. Richardson David et Ribeiro da Silva Filipa (éd.) Networks and Trans-Cultural Exchange: Slave Trading in the South Atlantic, 1590-1867, Leyde, Brill, 2014.
8 Pétré-Grenouilleau Olivier, Les traites négrières. Essai d’histoire globale, Paris, Gallimard, 2004. Vidal Cécile, « Pour une histoire globale du monde atlantique ou des histoires connectées dans et au-delà du monde atlantique ? », Annales, Histoire, Sciences Sociales, 2012-2, p. 391-413. Bayly Christopher A., « “Archaic” and “Modern” Globalization in the Eurasian and African Arena, ca. 1750-1850 », in Anthony G. Hopkins (éd.), Globalization in World History, New York/Londres, Norton & Company, 2002, p. 45-72. Inikori Joseph E., « Africa and the Globalization Process: West Africa, 1450-1850 », Journal of Global History, 2007, vol. 2-1, p. 63-86. Cañizares-Esguerra Jorge, Seeman Erik R. (éd.), The Atlantic in Global History, 1500-2000, Upper Saddle River, Pearson Prentice Hall, 2007. Weiss Holger (éd.), Ports of Globalisation, Places of Creolisation: Nordic Possessions in the Atlantic World during the Era of the Slave Trade, Leyde, Brill, 2016. Kea Ray, « The Local and the Global. Historiographical Reflexions on West Africa in the Atlantic Age », in J. Cameron Monroe et Akinwumi Ogundiran (éd.), Power and Landscape in Atlantic West Africa. Archeological Perspective, Cambridge, Cambridge University Press, 2012, p. 339-376. Strobel Christoph, The Global Atlantic, 1400-1900, New York, Routledge, 2015. Suarez Bosa Miguel (éd.), Atlantic Ports and the First Globalization, 1850-1930, Londres, Palgrave MacMillan, 2014. Ogbon Miles, Global Lives. Britain and The World, 1550-1800, Cambridge, Cambridge University Press, 2008, chap. 5 et 8.
9 Law Robin et Mann Kristin, « West Africa in the Atlantic Community: The Case of the Slave Coast », William and Mary Quarterly, 1999, vol. 56, p. 307-334. Northrup David, Africa’s Discovery of Europe, 1450-1850, New York, Oxford University Press, 2002.
10 Burnard Trevor, The Atlantic in World History, 1490-1830, Londres, Bloomsbury, 2020, chap. 8, West Africa, p. 139-174. Morgan Philip D., « Africa and the Atlantic, c. 1450 to c. 1820 », in Jack P. GReen et Philip D. Morgan (éd.), Atlantic History…, op. cit., p. 223-248.
11 Fauvelle François-Xavier, « Ghâna, Mâli, Songhay, royaumes courtiers du Sahel occidental », in François-Xavier Fauvelle (dir.), L’Afrique ancienne. De l’Acacus au Zimbabwe, 20 000 ans avant notre ère-xviie siècle, Paris, Belin, 2018, p. 171-201.
12 Barry Boubacar, La Sénégambie du xve au xixe siècle. Traite négrière, islam et conquête coloniale, Paris, L’Harmattan, 1988. Boulègue Jean, Les royaumes wolof dans l’espace sénégambien (xiiie-xviiie siècle), Paris, Karthala, 2013.
13 Green Toby, The Rise of the Transatlantic Slave Trade in Western Africa, 1300-1589, New York, Cambridge University Press, 2012, p. 46-57, 90-94 ; « Architects of Knowledge, Builders of Power: Constructing the Kaabu “Empire”, 16th-17th Centuries », Mande Studies, 2009, vol. 11, p. 91-112. Lopes Carlos, Kaabunké/espaço, poder, território e poder na Guiné-Bissau, Gâmbia e Casamance pré-coloniais, Lisbonne, Comissão Nacional para as Comemorações dos Descobrimentos Portugueses, 1999.
14 Wilks Ivor, Akwamu, 1640-1750: A Study of the Rise and Fall of a West African Empire, Trondheim, Norwegian University of Science and Technology, 2001. Daaku Kwame Y., Trade and Politics on the Gold Coast, 1600-1720: A Study of the African Reaction to European Trade, Oxford, Clarendon Press, 1970. Kea Ray A., Settlements, Trade, and Politics in the Seventeenth-Century Gold Coast, Baltimore/Londres, The Johns Hopkins University Press, 1982.
15 Wilks Ivor, Forests of Gold: Essays on the Akan and the Kingdom of Asante, Athens, Ohio University Press, 1993 ; Asante in the Nineteenth Century: The Structure and Evolution of a Political Order, Cambridge, Cambridge University Press, 1975. McCaskie Thomas C., State and Society in Pre-Colonial Asante, Cambridge, Cambridge University Press, 1995. Pescheux Gérard, « Centre, limite, frontière dans le royaume Asante pré-colonial », Journal des Africanistes, 2004, vol. 74-1/2, p. 180-201.
16 Law Robin, The Kingdom of Allada, Leyde, School of Asian, African, and American Studies, 1997.
17 Law Robin, The Slave Coast of West Africa, 1550-1750: The Impact of the Atlantic Slave Trade on an African Society, Oxford, Clarendon Press, 1991.
18 Law Robin, The Oyo Empire, c. 1600-1836: A West African Imperialism in the Era of the Atlantic Slave Trade, Oxford, Clarendon Press, 1977.
19 Ryder Anthony, Benin and the Europeans, 1485-1897, Londres, Longmans, 1969.
20 Vansina Jan, Kingdoms of the Savanna, Madison, University of Wisconsin Press, 1966. Randles William G. L., L’Ancien royaume du Congo : des origines à la fin du xixe siècle, Paris/La Haye, Mouton et Cie, 1968. Thornton John K., The Kingdom of Kongo: Civil War and Transition, 1641-1718, Madison, University of Wisconsin Press, 1983. Hilton Anne, The Kingdom of Kongo, Oxford, Clarendon Press, 1985.
21 Martin Phyllis M., The External Trade of the Loango Coast, 1576-1870: The Effects of Changing Commercial Relations on the Vili Kingdom of Loango, Oxford, Clarendon Press, 1972.
22 Heywood Linda M., Njinga of Angola: Africa’s Warrior Queen, Cambridge (Mass.), Harvard University Press, 2017. Thornton John, A History of West Central Africa to 1850, Cambridge, Cambridge University Press, 2020, p. 1-15 (introduction).
23 Klein Martin A., « The Slave Trade and Decentralized Societies », Journal of African History, 2001, vol. 42-1, p. 49-66.
24 Green Toby, The Rise…, op. cit., p. 90-93, 148-164. Hawthorne Walter, Planting Rice and Harvesting Slaves. Transformations along the Guinea-Bissau Coast, 1400-1900, Portsmouth (NH), Heinemann, 2003, p. 9-17 ; « The Production of Slaves Where There Was no State: The Guinea-Bissau Coast, 1450-1815 », Slavery and abolition, 1999, vol. 20, no 2, p. 97-124.
25 Northrup David, Trade without Rulers: Precolonial Economic Development in South-Eastern Nigeria, Oxford, Oxford University Press, 1978. Nwokeji G. Ugo, The Slave Trade and Culture in the Bight of Biafra, Cambridge, Cambridge University Press, 2010, p. 53-81.
26 Igué John O., Les villes précoloniales d’Afrique Noire, Paris, Karthala, 2008, p. 13-26, 107-128.
27 Coquery-Vidrovitch Catherine, Histoire des villes d’Afrique noire. Des origines à la colonisation, Paris, Albin Michel, 1993, p. 23-44.
28 Evans E. W. et Richardson David, « Hunting for rents: the Economics of Slaving in Pre-Colonial Africa », Economic History Review, 1995, vol. 4, p. 665-686.
29 Latham Anthony J. H., Old Calabar, 1600-1891. The impact of the international economy upon a traditional society, Oxford, Clarendon Press, 1973. Sparks Randy J., The Two Princes of Calabar. An Eigtheenth-Century Atlantic Odyssey, Cambridge (Mass.), Harvard University Press, 2004 ; Les deux Princes de Calabar. Une odyssée transatlantique à la fin du xviiie siècle, Bécherel, Les Perséides, 2007, p. 47-82. Behrendt Stephen D., Latham Anthony A. J., Northrup David, The Diary of Antera Duke. An Eigtheen-Century African Slave Trader, New York, Oxford University Press, 2010, p. 13-45.
30 Shumway Rebecca, The Fante and the Transatlantic Slave Trade, Rochester, University of Rochester Press, 2011.
31 Saupin Guy, Africains et Européens…, op. cit., p. 21-25.
32 Petre-Grenouilleau Olivier, « Traites et esclavages : vieux problèmes, nouvelles perspectives ? Introduction », Revue d’Histoire Française de l’Outre-Mer, 2002, t. 89, no 336-337, p. 5-40.
33 Rodney Walter, How Europe Underdeveloped Africa, Washington D. C., Howard University Press, 1982 (1972). Inikori Joseph E. (éd.), Forced Migration: The Impact of the Export Slave Trade on African Societies, New York, Africana Publishing Company, 1982, p. 13-59 (Introduction). Inikori Joseph E. et Engerman Stanley L. (éd.), The Atlantic Slave Trade: Effects on Economies, Societies, and Peoples in Africa, the Americas, and Europe, Durham (NC), Duke University Press, 1992. Thornton John K., Africa…, op. cit., p. 43-48, 121-129. Morgan Philip D., « Africa and the Atlantic », in Jack P. Greene et Philip D. Morgan (éd.), Atlantic History…, op. cit., p. 223-247. Eckert Andreas, « The Impact of the Atlantic Slave Trade on Africa – Historiographical Controversies », in Horst Pietschmann (éd.), Atlantic History…, op. cit., p. 337-348. Harding Leonard, « African Economies, African Traders and the Slave Trade », in Horst Pietschmann (éd.), Atlantic History…, op. cit., p. 321-336. Nunn Nathan, « Historical Legacies: A Model Linking Africa’s Past to Its Current Underdevelopment », Journal of Development Economics, 2007, vol. 83-1, p. 157-175. Whatley Warren et Gillezeau Rob, « The Fundamental Impact of the Slave Trade on African Economies », in Paul Rhodes, Joshua Rosenbloom et David Weiman (éd.), Economic Evolution and Revolution in Historical Time, Stanford, Stanford University Press, 2011, p. 111-134. Green Toby, A Fistful of Shells. West Africa from the Rise of the Slave trade to the Age of Revolution, Chicago, The University of Chicago Press, 2019, p. 12-18.
34 Behrendt Stephen D., « Markets, Transaction, Cycles and Profits. Merchant Decision Making in the British Slave Trade », William and Mary Quarterly, 2001, vol. 58, p. 171-204. Miller Joseph C, « Slave Prices in the Portuguese Southern Atlantic, 1600-1830 », in Paul E. Lovejoy (éd.), Africans in Bondage: Studies in Slavery and the Slave Trade, Madison, University of Wisconsin, 1986, p. 43-77 ; Way of Death…, op. cit., p. 40-70. Richardson David, « Prices of Slaves in West and West Central Africa: Toward an Annual Series, 1698-1807 », Bulletin of Economic Research, 1991, vol. 43, no 1, p. 21-56.
35 Daget Serge (éd.), De la traite à l’esclavage, Nantes/Paris, CRHMA/SHFOM, 1988, 2 vol. Daget Serge et Renault François, Les traites négrières en Afrique, Paris, Karthala, 1985. Daget Serge, La traite des Noirs, Rennes, Éditions Ouest-France université, 1990. Pétré-Grenouilleau Olivier, Les traites négrières…, op. cit., p. 163-185. Eltis David, The Rise of African Slavery in the Americas, Cambridge, Cambridge University Press, 2000. Eltis David et Richardson David, « A New Assessment of the Transatlantic Slave Trade », in David Eltis et David Richardson (éd.), Extending the Frontiers: Essays on the New Transatlantic Slave Trade Database, New Haven, Yale University Press, 2008, p. 1-62. Eltis David et Richardson David (éd.), Atlas of the Transatlantic Slave Trade, New Haven, Yale University Press, 2010. Coclanis Peter (éd.), The Atlantic Economy during the Seventeenth and Eighteenth Centuries: Organization, Operation, Practice, and Personnel, Columbia, University of South Carolina Press, 2005, p. 1-29.
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37 Petre-Grenouilleau Olivier, « La traite atlantique au xviiie siècle : réflexions sur un apogée », in Silvia Marzagalli et Bonin Hubert (dir.), Négoce, ports et océans, xvie-xxe siècle, Pessac, Presses universitaires de Bordeaux, 2000, p. 182-192.
38 Lynn Martin, Commerce and Economic Change in West Africa: The Palm Oil Trade in the Nineteenth Century, Cambridge, Cambridge University Press, 1997. Law Robin (éd.), From Slave Trade to “Legitimate” Commerce: The Commercial Transition in Nineteenth-Century West Africa, Cambridge, Cambridge University Press, 1995 ; « Introduction », p. 1-31.
39 Marnot Bruno, La mondialisation au xixe siècle (1850-1914), Paris, Armand Colin, 2012, p. 101-114, 159-160, 212-223.
40 Saupin Guy, « African Seaports in Transition… », op. cit., p. 17-44. Eltis David, Economic Growth and the Ending of the Transatlantic Slave Trade, New York, Oxford University Press, 1987. Klein Herbert, « The Structure of the Atlantic Slave Trade in the 19th Century. An Assessment », Revue Française d’Histoire d’Outre-Mer, 2002, vol. 89, no 336-337, p. 63-77.
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45 Bennet Herman L., African Kings and Black Slaves: Sovereignty and Dispossession in the Early Modern Atlantic, Philadelphia, University of Pennsylvania Press, 2019.
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57 Saupin Guy, « La ville atlantique des temps modernes… », op. cit., p. 38-50.
58 Sinou Alain, Comptoirs et villes coloniales du Sénégal : Saint-Louis, Gorée, Dakar, Paris, Karthala/Orstom, 1993, p. 56-72.
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76 Ibid., p. 39-45.
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85 Sinou Alain, Comptoirs et villes coloniales du Sénégal…, op. cit., p. 12-18.
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89 Austen Ralph et Derrick Jonathan, Middlemen of the Camerons Rivers: The Duala and their Hinterland, c. 1600-1960, Cambridge, Cambridge University Press, 1999.
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94 Burnard Trevor, The Atlantic…, op. cit., p. 141-143, 147, 151.
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