In memoriam Jean-François Gicquel

1Organisateur du colloque Sacres et couronnements avec nos amis historiens des Facultés des Lettres, Jean-François Gicquel a brutalement disparu dans sa cinquante-deuxième année, le 28 janvier 2021. Il est rare qu’un homme suscite à la fois l’estime et l’affection de ceux qu’il côtoie, et même dans ses rires, ses contradictions et repentirs ou encore ses mouvements passionnés. Si une notice dit l’essentiel sur son parcours universitaire, ses qualités de pédagogue et son amour du métier (Julien Lapointe Journal de l’Association des Historiens des Facultés de droit, n^o 13, juillet 2021), nous aimerions évoquer ici les directions empruntées par ses recherches, sans pouvoir néanmoins envisager aussi ses enseignements (et son manuel d’introduction historique au droit, publié en 2017) et ses directions de travaux.

2Jean-François Gicquel a toujours suivi le chemin ouvert par une belle thèse portant sur Le concordat en Bretagne (1801-1879). Clergé et administration, dirigée par le professeur Maurice Quénet et soutenue en 2000 à la Faculté de droit de Rennes. Cette thèse, née du dépouillement de riches fonds archivistiques, a entretenu chez lui une vive curiosité qui s’est épanouie dans le domaine de l’histoire politique, institutionnelle et religieuse. La publication du Juriste malgré lui. Les dix commandements du droit concordataire selon monseigneur Godefroi Brossays Saint-Marc (Nancy, 2011) l’amènera à revenir sur l’application du droit concordataire en lui ouvrant de nouvelles voies. Si cette recherche visait l’examen des idées politiques et juridiques soutenant l’action ce « personnage central et incontournable du Concordat » en Bretagne de 1859 à 1878, elle s’est accomplie dans le récit d’une aventure humaine, foisonnante et complexe. Jean-François Gicquel ne se proposait-il pas de tracer l’« esquisse d’une biographie juridique » en dévoilant l’architecture secrète d’une vie animée par la foi, la réflexion et l’action ?

3Ses études ultérieures, au croisement d’une approche historienne et juridique, conserveront cet attachement à l’étude d’hommes, parfois difficiles à saisir, qu’il s’agisse de considérer les Guise et le statut de Prince étranger à la Cour de France au xvi^e siècle (La Renaissance en Europe dans sa diversité, Nancy, 2015), le personnage de François III à l’occasion de la cession des duchés (250 ans. De la Lorraine ducale à la Lorraine française, Nancy, 2021), l’éducation du prince héritier sous la révolution française (Libertés des consciences et religion : enjeux et conflits, Nancy, 2018) ou encore Louis XVIII qui « ne sera donc jamais un Roi sacré rituellement » dans les Actes de ce colloque.

4Une autre passion naîtra des enseignements assurés par Jean-François Gicquel : le droit du patrimoine. L’étude de cette riche matière organisant la protection des biens immobiliers, mobiliers et immatériels, sera étudiée par lui de manière nécessairement dogmatique mais toujours animée par l’histoire. Un dernier ouvrage sur le droit du patrimoine est aujourd’hui sous presse (collection Ellipses). Sa lecture nous donnera le plaisir de nous ressouvenir de Jean-François Gicquel, dans une joie mêlée de tristesse et dans l’espérance.