Chapitre II. À partir des années 1880, nationalisation
p. 67-96
Texte intégral
1Aux premiers temps de la IIIe République, de nouveaux types d’associations apparaissent dans les communes rurales mayennaises et connaissent un développement important et rapide. Contrairement aux sociétés et aux cercles, l’impulsion vient ici explicitement du pouvoir central, qui voit dans les corps de sapeurs-pompiers, les associations musicales et les sociétés conscriptives des supports de diffusion d’un idéal républicain à l’échelle nationale1.
Les sapeurs-pompiers, de nouvelles racines
2Intégrer les sapeurs-pompiers dans le cadre d’une étude sur la sociabilité associative peut sembler curieux. Cependant, même si leur mission première est la lutte contre l’incendie, « c’est à peine si [au xixe siècle] l’on dénombre plus de deux ou trois incendies par an dans les registres de la plupart des communes rurales. Tous les autres rassemblements ne tiennent qu’à la volonté associative2 ». Pour Annie Grange, l’adhésion volontaire aux sapeurs-pompiers confirme « leur appartenance légitime à la vie associative3 ». Jean-Claude Farcy constate qu’« un corps de sapeurs-pompiers, dans une petite commune, se transforme, de fait, en société amicale4 », destinée à animer la vie locale. Selon Hubert Lussier, « l’existence d’une compagnie de sapeurs-pompiers ne se conçoit […] pas sans un calendrier de réjouissances et de cérémonies5 ». Le cadre associatif et la convivialité générée, qui, sur la longue durée, se mue en « esprit de corps6 », conduisent logiquement à considérer pleinement les corps de sapeurs-pompiers comme des associations de sociabilité.
3À leur origine, les corps de sapeurs-pompiers ne relèvent pas de la législation associative. Le 6 février 1815, la circulaire de Montesquiou, ministre de l’Intérieur de Louis XVIII, confirme le cadre institué par la loi du 16-24 août 1790, qui fait de l’organisation de la lutte contre l’incendie une prérogative municipale. L’État ne prévoit pas d’armer les corps de sapeurs-pompiers, ni de leur verser une solde. Cette dernière est à la charge des municipalités. La seule contrepartie pour les éventuels postulants est l’exemption du service de la Garde nationale, ces troupes chargées de la sécurité intérieure depuis la Révolution française et placées sous la tutelle des municipalités7. Les communes rurales se montrent réticentes à mettre en œuvre la circulaire de Montesquiou, au regard des dépenses à engager8. Par ailleurs, dans les campagnes françaises, dans le Loir-et-Cher9 comme dans la Beauce10, les solidarités de voisinage pourvoient, bien avant le xixe siècle, à la lutte contre le feu.
4La loi du 22 mars 1831 réorganise la Garde nationale pour en faire une organisation générale et permanente11. L’article 40 offre la possibilité aux communes de former, au sein même de cette dernière, des compagnies ou subdivisions de sapeurs-pompiers volontaires12, sans aucune obligation de versement de solde13. Si la réorganisation de la Garde nationale pose de nombreux problèmes dans sa mise en œuvre générale14, les municipalités rurales, sous une pression populaire plus forte15, profitent de ce nouveau cadre, financièrement intéressant, pour former des corps de sapeurs-pompiers. Les sapeurs-pompiers ont les mêmes obligations de service communal et d’assiduité que les autres hommes de la Garde nationale. Âgés de 20 à 60 ans, ils doivent être de nationalité française. L’organisation n’est pas rigoureusement censitaire : tout Français honorablement connu peut y servir, à l’exception des domestiques et des personnes sans ressources16. En tant que militaires à part entière, les sapeurs-pompiers sont armés. En dehors de la lutte contre l’incendie, ils sont appelés à un service d’escorte et d’ordre pour les cérémonies publiques locales. C’est pourquoi, pour une question de prestige17, ils s’investissent souvent dans la constitution de formations musicales.
5Le 25 août 1871, la suppression de la Garde nationale laisse les sapeurs-pompiers sans cadre. Le décret organique du 29 décembre 1875 remédie à cette lacune. Il établit dans la durée, et parfois non sans mal, les compagnies et subdivisions de sapeurs-pompiers. Le législateur institue ainsi une clause d’engagement quinquennal, aussi bien pour les sapeurs-pompiers, sur le plan humain, que pour les municipalités, sur le plan matériel18.
6De l’embrigadement militaire au sein de la Garde nationale aux avantages (soldes, indemnités, etc.) que suggère la législation à partir des années 1870, le corps de sapeurs-pompiers est un type d’association initié d’en haut, au travers d’une « participation suscitée19 ».
Des activités qui dépassent la seule lutte contre l’incendie
7Les registres des sapeurs-pompiers des communes rurales qui ont été conservés en Mayenne montrent des interventions relativement rares. À Saint-Denis-de-Gastines, la subdivision ne sort qu’une fois en 1849, pas du tout en 1850, puis, à nouveau, une seule fois pour chacune des deux années suivantes20. Les seules obligations de service, régulières, du pompier volontaire sont les exercices qui ont lieu tous les premiers dimanches du mois sur la place du bourg. Ces réunions consistent au maniement et à l’entretien de la pompe à incendie, mais aussi au nettoyage des armes. Sur la photographie de manœuvres prise à Fougerolles (annexe 4a), subdivision créée en 1859 et forte de 42 membres en 190021, même s’il y a une part de mise en scène, l’uniforme et le képi sont de rigueur ; on constate également que les exercices mensuels sont une sorte d’animation dans le bourg, attirant badauds et enfants.
8La célébration de la patronne des sapeurs-pompiers, sainte Barbe, le 4 décembre, est toujours l’occasion d’un banquet, auquel se joignent autorités locales et membres honoraires du corps. Plus largement, les sapeurs-pompiers sont souvent les seuls animateurs de communes dépourvues, pour la plupart d’entre elles, de toute autre structure associative. À Fougerolles, le dimanche 28 juillet 1872, la subdivision organise un concours de tir à la cible, auquel seuls ses membres peuvent participer, mais où l’ensemble des habitants de la commune est invité à assister22. Après s’être réunis « en habit de petite tenue sur l’une des places du bourg », à deux heures de l’après-midi, les sapeurs-pompiers se rendent « en ordre de bataille » dans une prairie, transformée en champ de tir. Une fois le concours terminé, la subdivision est de retour dans le bourg, en fin d’après-midi, pour une remise des prix accompagnée de rafraîchissements.
9À Ernée, en 1847, soit une dizaine d’années après la création du corps local de sapeurs-pompiers, un dénommé Giovanni Rivetti, se présentant comme « compositeur et professeur de musique23 », écrit au conseil municipal pour obtenir « un fixe en traitement suffisant, pour donner les soins nécessaires à la musique et instruire gratis quatre élèves, ayant des dispositions », au sein de la Garde nationale24. Cette demande reste sans réponse. En 1860, c’est au tour du sous-lieutenant des pompiers de revenir à la charge, avec succès : il demande qu’une somme de 300 francs soit allouée par le conseil municipal pour acheter des partitions, louer ou acheter des instruments. Jusqu’en 1892, année où sont créées, d’une part, la musique municipale, d’autre part, l’harmonie Saint-Louis-de-Gonzague, la musique est, à Ernée, le monopole des sapeurs-pompiers.
10Plusieurs exemples montrent, à l’instar de ce que l’on constate à Ernée, que les sociétés de musique doivent souvent leur naissance aux sapeurs-pompiers, vis-à-vis desquels elles prennent une autonomie toute relative. À Villaines-la-Juhel, en 1862, la société musicale est formée « pour organiser une musique pour la subdivision des sapeurs-pompiers25 ». À Pré-en-Pail, en 1876, la société musicale issue du corps des pompiers devient musique municipale. Désormais, le conseil municipal subvient aux besoins financiers du groupement, à la condition que ses membres s’engagent à le faire fonctionner pour cinq ans26. Or, c’est également la durée d’engagement d’un sapeur-pompier. À Fougerolles-du-Plessis, la monographie communale de 1899 indique que la fanfare locale a été fondée vingt ans auparavant par l’instituteur, en collaboration avec le lieutenant des sapeurs-pompiers27.
11Les corps de sapeurs-pompiers ruraux participent également à l’essor de la pratique du tir dans les communes rurales. Les officiers ou sous-officiers se trouvent impliqués dans les instances dirigeantes des sociétés de préparation militaire. C’est surtout le cas dans les premières années du xxe siècle, époque où les compétences en la matière sont encore rares à l’échelle locale. À Montsûrs en 1904 et à Sainte-Suzanne en 1909, la direction du tir, mais également la participation au bureau de la société de tir locale sont assurées par des gradés issus du corps des sapeurs-pompiers de la commune28. À la même époque, à Ambrières, le maire demande au préfet que « les cartouches nécessaires aux tirs des pompiers et de la société de tir » soient stockées ensemble chez le vice-président de l’association. Cela lui est refusé, car le nombre de munitions dépasse les 5 000 et le stockage commun représente un « danger pour la sécurité publique ». La demande du maire témoigne cependant de la confusion qui existe au niveau communal entre l’activité du corps de sapeurs-pompiers et celle de la société de tir.
Des créations liées à une conjonction de facteurs
12En Mayenne, dans les premières années du xixe siècle, seules les villes de Laval, Mayenne et Château-Gontier possèdent un corps de sapeurs-pompiers. Ernée, avec ses près de 5 000 habitants et malgré l’incitation du sous-préfet au printemps 181529, doit attendre pour voir se former un corps de sapeurs-pompiers. À l’époque, le pouvoir central reste cantonné dans un rôle d’accompagnement du mouvement de créations. En 1834, suite à l’évolution du cadre législatif de la Garde nationale, ce sont les élus de Craon qui sollicitent les autorités préfectorales afin d’organiser la première subdivision rurale de sapeurs-pompiers en Mayenne30. Celle-ci compte, à ses débuts, 41 membres. L’année suivante, le courrier du sous-préfet de Mayenne au maire d’Ernée, prônant la création d’un service de lutte contre l’incendie, trouve, cette fois-ci, un écho favorable. Le mouvement de créations est amorcé dans le département. Une certaine émulation joue. Un maillage se constitue progressivement, toujours dans le cadre de la Garde nationale, indépendamment des changements de régimes politiques. À l’échelle nationale, quelle que soit la région observée, la Seine-et-Marne, le Rhône ou le Berry31, les créations de corps de sapeurs-pompiers connaissent un pic dans les années 1860. La Mayenne se fond dans cette évolution générale (tableau 3).
Tableau 3. – La création de corps de sapeurs-pompiers, un processus antérieur à la IIIe République.
1830-1839 | 1840-1849 | 1850-1859 | 1860-1869 | 1870-1879 | Total |
2 | 5 | 6 | 13 | 9 | 35 |
13Les principales agglomérations rurales, sans être nécessairement des chefs-lieux de canton, se dotent en premier : Craon (1834), Ernée (1837), Saint-Denis-de-Gastines (1847), Évron (1848), Gorron (1852) et Saint-Denis-d’Anjou (1852). Les communes situées en périphérie de Laval sont également un terreau fertile : Changé, Saint-Berthevin, Saint-Jean-sur-Mayenne et Bonchamp ont leur subdivision avant 1880, alors même que leur population, notamment pour les deux dernières – respectivement 1 094 et 1 152 habitants au recensement de 1872 –, n’est pas particulièrement importante. Le nord et le sud du département apparaissent bien pourvus, par opposition au centre, qui se signale par une quasi-absence de corps de sapeurs-pompiers. Un effectif maximal théorique est fixé a priori par l’autorité préfectorale pour chaque corps de sapeurs-pompiers ; il tient compte, notamment, de la population communale. En pratique, entre les années 1830 et les années 1870, l’effectif moyen d’un corps dans les campagnes mayennaises est de 30 hommes.
14La création d’un corps de sapeurs-pompiers est la rencontre de trois facteurs : une municipalité favorable, des moyens financiers et des volontaires.
15Même en pays d’habitat dispersé, les fermes ne sont jamais loin les unes des autres. Dans le cas d’un incendie nocturne, les flammes se voient de loin et la chaîne des voisins et amis est prompte à se former, avec ses seaux, entre le puits ou la mare et le lieu du sinistre. Le problème est que, bien souvent, les moyens mis en œuvre sont dérisoires par rapport à la force des flammes et la priorité n’est pas donnée à l’extinction du foyer, mais plutôt à la non-propagation des flammes. Les rapports de gendarmerie sur les incendies en Mayenne témoignent de cette réalité : la maison d’habitation est préservée, les animaux sont sortis des écuries et des étables, les meules de foin intactes sont éloignées, mais, dans la plupart des cas, le bâtiment où s’est déclenché l’incendie est totalement détruit par le feu32.
16Au cours du xixe siècle, les causes d’incendies se multiplient en campagne : en 1867, le maire de Cuillé évoque l’usage de la pipe et des allumettes chimiques33. L’ampleur des sinistres marque les esprits. À Ambrières, en 1866, c’est l’incendie qui touche le château de Malortie, sur la commune voisine de Saint-Loup-du-Gast, qui traumatise une partie de la population34. Dès le 23 décembre, Pierre Baudet, débitant de boissons et maître de tissage à Ambrières, écrit au préfet pour demander la création d’une « subdivision de sapeurs-pompiers » dans sa commune et se porte volontaire pour en faire partie, en tant qu’« ancien soldat du 59e régiment d’infanterie de ligne de la classe de 184435 ».
17Les sapeurs-pompiers faisant partie intégrante de la Garde nationale, leur création relève d’une décision de conseil municipal. Le sujet revient à de nombreuses reprises dans les délibérations. L’intérêt est toujours reconnu, mais la création est aussi une question d’argent, ce qui retarde d’autant la prise de décision des élus. À Lassay, lors du conseil municipal du 17 février 1853, le maire rappelle que le principe de l’acquisition d’une pompe à incendie a été adopté trois ans plus tôt, sans effet, et qu’au vu des récents sinistres, il serait bon de concrétiser l’achat36.
18L’existence d’une pompe à incendie est, en effet, l’élément qui justifie auprès des autorités préfectorales la création d’un corps de sapeurs-pompiers sachant la manœuvrer. C’est un investissement important pour un budget communal. Les municipalités espèrent beaucoup des subventions départementales et des aides des sociétés d’assurances. Ces dernières peuvent apporter une contribution à l’achat d’une pompe à incendie, mais certaines demandes sont toutefois rejetées. En 1853, la Société d’assurances mutuelles mobilières et immobilières contre l’incendie de Caen refuse ainsi une allocation à la municipalité d’Évron au prétexte que le chiffre d’assurances dans le canton est insuffisant : 719 000 francs, au lieu du million nécessaire37.
19Jusqu’à la réorganisation initiée par le décret organique du 29 décembre 1875, la pérennité des corps de sapeurs-pompiers dans les communes rurales mayennaises n’est jamais garantie. À Quelaines, la subdivision, créée en 1848, est dissoute trois ans plus tard38. L’évolution est la même à Ballots : création en 1865, dissolution en 187839. Vingt ans plus tard, l’instituteur du village écrit40 : « Ballots avait autrefois une compagnie de sapeurs-pompiers […]. Tous les mois, on faisait la manœuvre et la pompe se maintenait en bon état. Aujourd’hui, cette société est dissoute et, en cas d’incendie, la pompe est mise en mouvement par les gens de bonne volonté. »
Une pérennisation républicaine
20L’engagement quinquennal institué par le décret de 1875 rencontre une forte opposition sur le terrain. Le service de Garde nationale disparu, la seule obligation militaire est celle du service dans l’armée, dont le recrutement et la durée de service sont fixés, depuis 1872, par tirage au sort. L’engagement quinquennal est ainsi perçu comme un service militaire déguisé, alors même que ceux qui l’exécutent n’ont pas été tirés au sort par ailleurs. En 1877, les pompiers d’Ernée pétitionnent, sans succès, contre les mesures imposées41. La même année, ceux de Saint-Denis-d’Anjou se réorganisent avec un effectif renouvelé de près de la moitié, pour finir par se dissoudre en 1878, et ce de manière durable42. Il en va de même pour ceux de Ballots, déjà cités. Sans disparaître, de nombreux corps ont de grandes difficultés pour recruter ou conserver leurs membres. La subdivision de Loigné, qui compte 25 hommes au milieu des années 1870, n’en a plus que 16 à la fin du xixe siècle43. Malgré la réorganisation, qui engage les municipalités, les difficultés matérielles des corps ruraux persistent. À Villaines-la-Juhel, en 1890, l’habillement des sapeurs-pompiers est le même depuis trente ans44. À Cuillé, en 189945 : « Depuis une trentaine d’années, il existe […] une compagnie de sapeurs-pompiers qui a rendu beaucoup de services dans notre région. Quoique sans ressources la compagnie s’entretient par des prodiges d’économie. »
21En 1899, l’arrondissement de Château-Gontier compte 16 corps ruraux de sapeurs-pompiers, celui de Laval 11 et celui de Mayenne 8 (fig. 5). Les premières années du xxe siècle voient la création ou recréation d’une subdivision à Ambrières en 1902, à Bazougers et Montsûrs en 1903. Mais, d’un autre côté, disparaissent celles de Soulgé-le-Bruant en 1905, de Pré-en-Pail en 1906 et de Bierné en 190746. Certaines communes ont une pompe à incendie, mais pas de pompiers pour la manœuvrer, comme à Chailland ou à Saint-Pierre-la-Cour ; d’autres font appel, en cas d’incendie, aux sapeurs-pompiers des communes voisines, comme Niafles avec ceux de Craon ou de la Selle-Craonnaise. La subdivision d’Ambrières, dans son règlement constitutif de 1902, établit ainsi un « abonnement annuel des communes environnantes fixé à Chantrigné, 45 fr[ancs] ; Cigné, 35 fr ; Couesmes, 35 ; le Pas, 50 ; St-Loup-du-Gast, 20 ; Soucé, 15 ; Vaucé, 1247 ». Pour bénéficier des services de la subdivision de Gorron, l’abonnement est, pour chaque commune, de 15 francs par an. Colombiers, Brecé et Lesbois ont souscrit. Mais, pour les autres, précise la monographie communale de 1899, en cas d’intervention hors abonnement, l’indemnité à payer est de 100 francs48.
Figure 5. – Les corps de sapeurs-pompiers dans les communes rurales mayennaises à la fin des années 1900.


Sources : Arch. dép. de la Mayenne, R 1253, R 1263, 538 J, E-dépôt.
22Si le nombre global de corps reste stable (33 en 1875, 37 à la fin des années 1900), en revanche, leur répartition évolue : le nord du département s’appauvrit, alors que le sud s’enrichit. C’est plus particulièrement le cas des communes situées autour de Château-Gontier. De manière générale, le début du xxe siècle apparaît comme une période de consolidation pour les corps ruraux de sapeurs-pompiers en Mayenne.
23Au-delà des difficultés rencontrées, les corps de sapeurs-pompiers, dans le dernier tiers du xixe siècle, servent de base de développement à d’autres types d’associations.
Éclosion des associations musicales
24Avec une génération d’écart, le mouvement associatif musical suit la même évolution que celle des corps de sapeurs-pompiers, avec lesquels il a des liens très forts. L’essor de la pratique musicale s’inscrit dans une tradition héritée de la Révolution française. Le retour puis l’affirmation de la République à partir des années 1880 encouragent la pratique musicale, perçue comme une « utilité publique49 ». Olivier Ihl écrit que les fanfares « furent d’emblée considérées par les républicains comme une institution éminemment moralisatrice50 ». Dans une démarche de valorisation de la démocratie, les républicains voient plusieurs intérêts politiques dans la musique : premièrement, cette dernière aurait une « capacité à revitaliser le peuple » en fortifiant les poumons et d’autres organes vitaux ; deuxièmement, elle relierait les individus entre eux en dépit de leur hétérogénéité ; troisièmement, la IIIe République résultant d’un compromis, la musique devrait « aider le peuple à négocier ses conflits » en encourageant le consensus51.
25À partir de 1879, une véritable politique en faveur de la pratique musicale est mise en œuvre. Des subventions sont allouées, via les préfectures, pour l’achat et l’entretien d’instruments, ainsi que pour les frais de déplacement des sociétés lors des concours. Ceux-ci jouent un rôle déterminant dans l’essor et la qualité de la pratique musicale associative : le « véritable but d’un concours », ce sont « les progrès des Sociétés, le développement et la constatation de leurs connaissances musicales ; l’extension de leurs relations, à l’aide d’une louable et fraternelle émulation ; leur union morale, artistique et intellectuelle52 ». Les concours musicaux ont une organisation très cadrée, comprenant trois catégories d’exercices : la lecture à première vue, c’est-à-dire l’exécution d’un morceau découvert pendant le concours, l’exécution d’ensemble, sur un morceau, cette fois-ci, préparé lors des séances de répétitions de l’association, et la prestation soliste. Dans l’esprit des promoteurs des concours de musique et du gouvernement républicain qui les subventionne, le jugement comparatif doit générer une émulation entre les sociétés et une impulsion à la création de nouvelles compositions53. Les concours de musique prennent place aux côtés de l’incitation scolaire, des récompenses sportives et des prix scientifiques dans la panoplie de la méritocratie républicaine, manière de façonner une « société des émules54 ».
26Une « fièvre orphéonique » s’empare du département du Nord, de l’Alsace et de la région parisienne à partir des années 184055, mais Paul Gerbod parle, pour la fin du Second Empire, du « vide choral de l’Ouest56 ». De manière générale, la fin du xixe siècle est l’époque de la « crise des chorales », du fait d’un répertoire devenu médiocre57. L’autre raison du déclin des chorales est l’essor de la pratique instrumentale à partir des années 1870. Celle-ci est née, le plus souvent, au sein de la Garde nationale58, et s’épanouit sous la IIIe République, de manière toutefois très contrastée. Les régions où le chant choral est fortement implanté – le nord et l’est de la France – connaissent une pratique instrumentale importante, dès avant 1870, essor qui se perpétue jusqu’à la Grande Guerre. En revanche, dans l’ouest de la France, la vague de créations est plus tardive (années 1870-années 1880) et le reflux plus précoce (années 1910)59. Le Maine-et-Loire connaît ainsi un pic de créations dans les années 187060. Dans le midi de la France, l’attitude face à la pratique musicale est similaire à celle de l’Ouest61.
Des appellations qui cachent une diversité toute relative
27Les intitulés retenus par les fondateurs des sociétés musicales rurales mayennaises entre 1860 et 1909 lors des déclarations auprès de l’autorité préfectorale sont d’une grande variété. Parmi les appellations précises, les « sociétés chorales » ou « orphéons » (quatre mentions) ne représentent que 6 % des créations. L’Orphéon de Craon, fondé en 186162, fait figure d’exception. Deux autres sociétés chorales rurales répertoriées en Mayenne ont une existence très limitée dans le temps : celle de Saint-Loup-du-Dorat, créée en 1882, ne fonctionne plus huit ans plus tard ; celle de Saint-Denis-d’Anjou, annexe de la fanfare, comme celle de Meslay-du-Maine, est fondée en 1886 et est dissoute au bout de cinq ans63. Ce paysage correspond au « vide choral de l’Ouest ».
28Les « fanfares » composées uniquement de cuivres sont au nombre de 19, soit près de 30 % du total. Les « harmonies », qui accueillent également des bois, au nombre de trois, représentent près de 5 % des sociétés musicales. Les « philharmoniques », qui regroupent instrumentistes et artistes lyriques, au nombre de deux, n’en représentent que 3 %. En Mayenne, l’association harmonique est une spécificité catholique, puisque celle des Fendeurs d’ardoises de Renazé, fondée en 1881, comme celle Saint-Louis-de-Gonzague à Ernée, fondée en 1892, sont rattachées à cette obédience. L’existence d’une Symphonie à Craon est mentionnée dans la presse des années 1890. Censée regrouper les quatre familles d’instruments (cordes, bois, cuivres et percussions), elle apparaît, en quelques occasions64, comme supplétive de la fanfare communale, à l’égal de musiciens amateurs non-sociétaires, invités. La prédominance de la « fanfare » sur les autres sortes de formations musicales n’est pas spécifique à la Mayenne. Elle se retrouve en Vendée65, terre peu favorable à la pratique instrumentale, comme dans l’Eure, département comptant parmi les « verts pâturages orphéoniques66 ».
29Dans la moitié des cas des sociétés musicales rurales mayennaises, l’appellation choisie entretient le flou sur l’activité. Au fil de la période, « société musicale » (22 mentions, soit 33 %) devient prédominant. On peut également lui associer « union musicale » (six mentions) et « musique » (cinq mentions). Ces termes sont choisis par des associations dont l’activité se veut à la fois instrumentale et chorale, c’est-à-dire, en réalité, le programme d’une société philharmonique. La musique de Cossé-en-Champagne, créée en 1874, propose, par exemple, à ses adhérents deux répétitions hebdomadaires de musique instrumentale et une répétition de musique vocale67. Enfin, l’appellation « lyre », qui se rapproche de celle de « société philharmonique68 », fait plus dans l’originalité que dans la précision. Au début des années 1880, la Lyre renazéenne concourt ainsi dans la même catégorie que sa grande rivale locale, l’harmonie des Fendeurs d’ardoises.
30En résumé, dans les campagnes mayennaises, la musique instrumentale l’emporte sur le chant choral, et les cuivres seuls sur l’association cuivres-bois.
Une pratique musicale qui se développe après 1880
31Si quelques sociétés musicales se mettent en place dans les campagnes mayennaises avant les années 1880, leur date de création reste toutefois imprécise. Un chef de musique est ainsi signalé dès 1813 dans la Garde nationale d’Évron69 ; en 1831, le corps de musiciens s’y compose de 11 membres70. Des formations musicales sont mises sur pied par le clergé local, afin d’animer les cérémonies et fêtes religieuses, mais leur organisation demeure informelle et précaire.
32Il faut être prudent vis-à-vis des sources de la fin du xixe siècle, où apparaissent des revendications d’ancienneté. Selon l’Inventaire dans le cadre de l’Exposition universelle de 186771, l’existence de la fanfare de Craon « remonte à une cinquantaine d’années », soit aux débuts de la Restauration. La Monographie de Gorron affirme, en 1899, que la fanfare de la commune « remonte à plus de 60 ans » ; elle n’apparaît pourtant dans les sources officielles qu’à partir de 188572. La situation se reproduit à Bais, où la fanfare, « fondée vers 1865 », n’est déclarée officiellement qu’en 188773. Ces assertions d’ancienneté se font dans un contexte de concurrence pour l’obtention de subventions départementales. L’ancienneté est un critère de sélection pour l’autorité préfectorale. En 1890, Henri Guéranger, notaire, membre honoraire de l’Union musicale d’Évron, déplore ainsi qu’une confusion d’ancienneté entre la musique municipale et sa société ait conduit le préfet à accorder une subvention à la première, mais pas à la seconde74. En la matière, c’est sans doute le rédacteur de la monographie de Vaiges qui est le plus honnête : il écrit que la société musicale de la commune existe depuis le milieu du xixe siècle, mais « avec quelques intermittences75 ». Il précise, par ailleurs, que le fonctionnement n’est régulier que depuis 1887, date à laquelle la société bénéficie du subventionnement de la municipalité. Ainsi, il est difficile de déterminer, avant 1870, quelle est la diffusion d’une pratique musicale associative régulière dans les campagnes mayennaises.
33La première décennie de la IIIe République voit l’émergence de neuf sociétés musicales rurales mayennaises ; 30 sont fondées au cours de la décennie 1880-1889, 15 au cours de la suivante. Au début du xxe siècle, c’est une soixantaine de communes rurales mayennaises qui sont dotées d’une société de musique, soit 21 % du total. On est donc proche des résultats obtenus par Marie-Dominique Amaouche-Antoine pour le département de l’Aude à la même époque (17 %)76.
34Au début des années 1890, ce sont plus d’une quarantaine de formations rurales qui perçoivent une subvention départementale77. Celle-ci s’élève en moyenne à 40 francs et varie en fonction du nombre de membres déclarés, mais aussi de l’activité de la formation. En 1889, la prestigieuse fanfare de Craon perçoit, par exemple, 165 francs, alors que la chorale de Saint-Denis-d’Anjou, dont l’existence est précaire – elle est dissoute en 1891 –, n’en reçoit que 10. Mais la multiplication des sociétés musicales entraîne une nouvelle répartition des subventions à l’échelle départementale. En 1890, la société Sainte-Cécile d’Andouillé, créée en 1888, perçoit, ainsi, pour la première fois, une subvention de 20 francs, qui passe à 30 l’année suivante ; dans le même temps, la fanfare de Craon voit la sienne baisser à 140 en 1890, puis à 120 en 1891.
Une première percée associative
35Par leur nombre important et par leur implantation sur l’ensemble du territoire départemental, les sociétés musicales sont une étape importante de la pénétration du mouvement associatif dans les campagnes mayennaises.
36La répartition des sociétés de musique, créées entre le milieu du xixe siècle et la fin des années 1900 est relativement contrastée (fig. 6). Les bordures méridionale et orientale du département, mais également le nord-ouest, de Laval à Ernée, sont particulièrement pourvus. À l’opposé, les communes périphériques des trois villes et des gros bourgs, souvent sièges de plusieurs sociétés musicales, sont peu dotées.
Figure 6. – Les sociétés de musique dans les communes rurales mayennaises entre le milieu du xixe siècle et les années 1900.


Sources : Arch. dép. de la Mayenne, 1 T 1051-1053.
37Sur la base du recensement de 1881, 250 habitants agglomérés au bourg sont le seuil en dessous duquel il n’y a pas de commune avec un ensemble musical, hors la présence d’un site industriel. À l’inverse, les 22 plus importantes agglomérations rurales sont toutes pourvues. La société musicale a besoin d’un vivier de recrutement pour pouvoir fonctionner, contrairement au cercle de type angevin. Un seuil minimal de 15 membres actifs est indispensable à la création et à la vie d’une société musicale. Le plus petit effectif est recensé à Juvigné, en 1887, où la fanfare municipale, créée six ans plus tôt, ne compte que 14 musiciens78. Ce faible nombre lui est préjudiciable, puisqu’en 1890, la fanfare ne fonctionne plus. La moyenne de 25 membres actifs par formation est représentative de la très grande majorité des associations musicales. Les plus importantes peuvent dépasser la cinquantaine de pratiquants, à l’exemple de la musique du Cercle Saint-Joseph d’Évron, vers 1900 (annexe 4b).
38L’éloignement des principales agglomérations et la difficulté inhérente à en faire venir la ou les fanfare(s) pour animer la fête locale prédisposent également à la création d’une société de musique. Cependant, le facteur déterminant est l’initiative d’un individu, amateur de musique, qui arrive à fédérer autour de lui.
39Il existe parfois un lien entre l’existence d’un cercle et la création d’une société musicale. À Évron, les membres de l’Union musicale font reconnaître officiellement leur société en 1888, mais déclarent, dans un courrier adressé au préfet en 1890, qu’elle « existe et fonctionne depuis 25 ans79 ». Or, en 1865, ce sont, pour beaucoup, les mêmes qui fondent le cercle de l’Union. Un phénomène identique s’observe à Renazé, où le Cercle de l’Union, créé en 1879 par des cadres et des ouvriers des ardoisières, est suivi, deux ans plus tard, d’une harmonie des Fendeurs d’ardoises. Dans ce dernier cas, l’obédience catholique des deux entités est avérée, même si elle n’est pas revendiquée. Ailleurs, le clergé local s’affiche plus ouvertement. À Chémeré-le-Roi, en 1882, le curé et son vicaire figurent en deuxième et troisième positions, juste derrière le maire, parmi les 19 membres honoraires. L’article 1er des statuts décrit la musique comme « un art de délassement agréable […] et un des moyens les plus efficaces de moralisation80 », ambition qui rappelle celle exprimée dans les règlements des sociétés de cure.
40La création d’une société musicale peut également être le résultat d’une scission, où l’obédience religieuse joue un rôle. Ainsi, tout au long du xixe siècle, la musique associative à Ernée se pratique exclusivement au sein des sapeurs-pompiers, mais, en 1892, deux demandes d’autorisation arrivent sur le bureau du sous-préfet : en février, celle de l’harmonie Saint-Louis-de-Gonzague, catholique ; en juin, celle de la musique du comité des fêtes municipales, laïque81. Le même antagonisme se retrouve à Évron, où la création de l’harmonie Saint-Joseph, en 186982, est une réponse à celle de l’Union musicale. 10 % des sociétés musicales, créées entre le xixe siècle et la première décennie du xxe peuvent être rattachées clairement à l’obédience catholique. C’est trois fois moins que pour les cercles. Ce chiffre confirme la difficulté à constituer une fanfare en termes de moyens matériels et surtout humains. C’est pourquoi, la plupart du temps, à l’échelle communale, les statuts des sociétés musicales ne font souvent pas de différence, dans l’animation, entre fête civile et fête religieuse.
41L’existence de sites industriels en campagne explique la création de certains ensembles musicaux. La société musicale de Port-Brillet, composée d’ouvriers de la fonderie Chappée, naît en 1878, à l’initiative de Julien Cossé, chef, et Joseph Verron, sous-chef. Ces derniers deviennent, respectivement directeur et sous-directeur de l’usine à partir de 1882. La société musicale est un emblème pour l’usine, à tel point que les embauches à la fonderie sont conditionnées à la connaissance de la musique. Certains ouvriers du nord de la France, excellents musiciens, sont débauchés par Chappée pour intégrer la société musicale83. Celle-ci, fondée avec une trentaine de membres, compte « 80 exécutants » en 189984.
42À Montigné, en 1896, « sur l’initiative de M. Roclanski, directeur de l’usine des Prés [fabrique de colle et de gélatine, ouverte la même année] et ancien chef de musique à l’école libre de l’Immaculée conception à Laval se fonda à Montigné la société musicale “L’Espérance”85 ». Plus tardivement, vers 1910, des fanfares sont également créées sur le site de tissages de Fontaine-Daniel, sur la commune de Saint-Georges-Buttavent, et aux mines de la Lucette, sur celle du Genest.
43Au-delà de l’initiative locale, les sociétés de musique fonctionnent, comme les cercles, en dehors de tout contrôle officiel, à leurs débuts tout au moins. À Cossé-en-Champagne, en 1880, le maire demande au préfet d’autoriser la musique de la commune, six ans après sa création86. La même démarche, avec retard, a lieu, entre autres, à Cuillé, à Port-Brillet et à Saint-Ouën-des-Toits. La régularisation auprès de l’administration est une nécessité à partir du moment où la société de musique ou le conseil municipal sont amenés à faire une demande de subvention auprès du préfet. La société musicale de Cossé-le-Vivien se retrouve dans une situation délicate après avoir sollicité et obtenu, le 2 mai 1891, une aide financière de la part de la commission départementale en charge des affaires culturelles. En effet, les services du préfet relèvent que la société n’a jamais été officiellement déclarée. Sommé de s’expliquer, le maire est obligé de reconnaître qu’aucun arrêté préfectoral n’est venu en approuver les statuts. Le 13 mai, le sous-préfet de Château-Gontier « estime 1o qu’il y a lieu de la mettre en demeure de régulariser sa situation ; 2o que lui accorder cette année une subvention serait illégal87 ». Dès le 19 juin, la préfecture reçoit une demande d’autorisation, de la part du directeur de la fanfare de Cossé-le-Vivien, accompagnée de la liste des 19 membres de la société.
Une activité intense et variée
44Les répétitions sont la première et principale activité des sociétés musicales. Elles ont lieu deux à trois fois par semaine, le soir, pour une durée d’une heure et demie à deux heures. Les jours sont très variables selon les associations. À Ballée, par exemple, « du 1er novembre au 15 mars, il y [a] au moins trois répétitions par semaine. Elles commence[nt] à 7 h ½ précises pour finir à 9 h du soir. Du 15 mars au 1er novembre, il [y a] une répétition qui aura lieu le dimanche88 ». Le lieu de répétition est une salle de la mairie, comme à Renazé ou Évron, ou une classe de l’école de garçons, comme à Saint-Martin-de-Connée et Saint-Pierre-sur-Orthe ou Saint-Denis-d’Anjou. Pour les sociétés musicales les plus importantes, l’objectif est la participation annuelle à l’un des concours régionaux qui ont lieu à la belle saison.
45La raison d’être d’une association musicale est avant tout l’animation des fêtes du bourg. L’article 2 des statuts de la fanfare de Grez-en-Bouère, en 1904, stipule qu’elle a pour but « d’offrir chaque année un concert aux membres honoraires », « d’effectuer une sortie, chaque mois, pendant la belle saison surtout », « de prendre part à des concours », « d’assister à toute fête ou cérémonie conforme au bon ordre, à la morale et aux lois : fête nationale, distribution de prix dans les écoles publiques, comice agricole, Sainte-Cécile, processions de la Fête-Dieu, sépultures des sociétaires, mariages des membres exécutants, etc.89 ».
46Le 7 juin 1896, lors de la procession de la Fête-Dieu, « la Fanfare de Craon, si brillante et si populaire, qui se prodigue sans compter, a joué ses marches et ses andantes toujours appréciés90 ». L’année suivante, le 29 mai, à l’occasion de la venue de l’évêque de Laval à Craon, la fanfare est mise à contribution à l’arrivée de celui-ci, lors du cortège dans le bourg et au cours de la cérémonie en l’église Saint-Nicolas91. En août de la même année, lors des rencontres vélocipédiques, qui voient se succéder dans l’après-midi cinq à six courses différentes, « la Fanfare de Craon installée au départ sur une estrade, dissipe, par des morceaux variés, la monotonie forcée des intermèdes92 ». Le 4 août 1912, dans cette même commune, le concours régional de gymnastique, organisé par la Fédération gymnastique et sportive des patronages de France, réunit 27 sociétés et 1 300 gymnastes et l’animation musicale est assurée par 200 musiciens issus de quatre formations, dont trois craonnaises93.
47Si le bourg bénéficie d’un kiosque, la société musicale est amenée à se produire plus fréquemment en public : deux fois par mois, à la belle saison, par exemple, selon les statuts de 1906 de la fanfare de Craon94. La Sainte-Cécile, patronne des musiciens, est fêtée autour du 22 novembre, par une messe le matin, un concert l’après-midi et un banquet le soir. La société musicale contribue à l’animation de la commune très souvent au-delà du domaine musical. Celle du Bourgneuf-la-Forêt organise, par exemple, chaque année « un tir au fusil de chasse et un tir à la carabine de précision95 ».
48Les quelques intermittences, déjà évoquées, qu’il peut y avoir dans l’existence d’une société musicale ne disparaissent pas sous la IIIe République. À Chemazé, la fanfare des Bons Enfants existe de 1879 à 1888, puis est recréée en 1889 sous l’appellation de « Lyre chemazéenne ». À Juvigné, la société musicale ne fonctionne que de 1881 à 1890. À Villaines-la-Juhel, la musique créée en 1862, s’arrête en 1888, reprend un an plus tard, stoppe en 1894 et, enfin, reprend à nouveau en 189696. La même évolution s’observe pour la fanfare de Saint-Denis-d’Anjou : fondée en 1885, elle est dissoute en 1891, recréée en 1893, mais n’existe plus en 189997. D’autres ont des existences encore plus brèves : Commer de 1887 à 1890, Saint-Aignan-sur-Roë de 1888 à 1891, ou Voutré de 1889 à 1891.
49Cette précarité, fréquente, témoigne de la totale dépendance des sociétés musicales vis-à-vis de la présence ou non, sur leur territoire, d’un chef de musique qualifié. Une mutation, un décès, une fâcherie peuvent remettre en cause très aisément l’existence d’une fanfare d’une année sur l’autre, et le groupe peut se dissoudre plus vite qu’il ne s’est formé. À Montigné, M. Roclanski, fondateur de la société musicale locale en 1896, quitte la commune trois ans plus tard et abandonne la direction de la musique. L’auteur de la monographie communale conclut98 : « C’est un sale coup pour la fanfare. »
50La situation de la Mayenne en matière d’associations musicales est en définitive assez représentative de celle d’un département de l’Ouest de la France : peu de chorales et une pratique instrumentale associative qui se développe véritablement à partir des années 1880, pour atteindre son apogée dans la décennie suivante.
Développement des associations conscriptives
51À l’instar des sociétés musicales, les associations conscriptives reçoivent le soutien de l’État républicain. La dénomination « associations conscriptives » recouvre les sociétés de gymnastique, celles de tir, ainsi que celles de préparation militaire. Si cette dernière a comme objectif affiché d’être un prélude à l’armée, les deux premières se confondent bien souvent avec elle99.
52En 1870, la défaite de Sedan est perçue comme la conséquence d’un « engourdissement » de la société française ; l’« antique rigueur » du sport est remise au goût du jour et conduit à l’émergence des premières sociétés de gymnastique et de tir au début de la IIIe République100. Entre 1880 et 1882, une réglementation est mise en place par le gouvernement républicain afin d’organiser des exercices militaires au sein des établissements scolaires. La gymnastique, sur un modèle importé d’Allemagne101, devient alors un « phénomène de masse ». Par ailleurs, en 1882, le ministère de l’Instruction publique prévoit de répartir 36 000 fusils dans les écoles de France102.
53Il est cependant un temps, relativement long, entre la sortie de l’école – si tant est que l’instruction militaire y soit effective – et le service militaire, où le jeune homme risque d’oublier ce qu’il a appris. Le gouvernement encourage donc la création d’associations destinées à dispenser une « formation post-scolaire et prémilitaire » grâce à une législation incitatrice, mais aussi des subventions et une mise à disposition de matériel (fusils, munitions)103. Le mouvement de création des sociétés conscriptives est initié, à l’échelle nationale, dès 1873 avec la fondation de l’Union des sociétés de gymnastique de France (USGF)104. Il est relancé par la loi militaire de 1889 qui réduit le service militaire de cinq à trois ans et accroît d’autant la nécessité de créer des structures intermédiaires entre le temps de l’école et le temps de l’armée pour assurer une continuité dans la formation105. En 1907, les circulaires du ministère de l’Instruction publique visent à créer des associations de tir dans toutes les écoles publiques françaises106.
54La France passe de 1 500 sociétés conscriptives en 1885 à 2 100 en 1914107. Le côté attrayant du maniement des armes fait que l’activité du tir l’emporte sur celle de la gymnastique. Le mouvement s’étend d’abord dans le nord et l’est de la France. Comme pour la pratique musicale associative, l’ouest et le sud de la France accusent un certain retard108. Les fédérations nationales, laïque et catholique, se structurent dans les années 1880109. Les grands concours regroupant des sociétés venues de toute la région, sur le modèle de ceux de musique, voient le jour, dans l’ouest, à partir des années 1910.
55En 1914, la France compte 2 000 sociétés conscriptives « républicaines » et 1 600 d’obédience catholique pour respectivement 350 000 et 150 000 membres110. Cependant, jusqu’aux années 1920, les sociétés conscriptives, plus particulièrement celles dévolues au tir, sont matériellement précaires111.
56Les patronages catholiques français jouent un rôle majeur dans le développement des sociétés conscriptives112. À partir des années 1880, la hiérarchie ecclésiastique se fait de plus en plus incitatrice. L’abbé Le Conte du diocèse de Châlons-sur-Marne, rédige, en 1883, un rapport sur ce qu’il dénomme les « patronages ruraux113 ». En 1886, l’abbé Combes, du diocèse de Carcassonne, publie les Instructions sur les patronages, sorte de manuel à l’attention des curés de paroisse qui voudraient se lancer dans l’expérience. Les patronages sont définitivement appelés à compléter les cercles d’ouvriers initiés dans les années 1870 par Albert de Mun, avec l’objectif de lutter contre la déchristianisation114.
57Après le temps des projets pionniers, les années 1880-1930 sont la grande époque des patronages catholiques115. Leur essor n’est cependant réel qu’après 1906116. Les lois de 1901 et de 1905 font surgir chez les catholiques, notamment dans l’Ouest, un sentiment de menace et la nécessité de se défendre, voire de contre-attaquer117. D’une part, la loi qui définit le statut des associations vise à déconsidérer les congrégations religieuses118. D’autre part, la loi de séparation des Églises et de l’État et les inventaires, parfois effectués avec l’usage de la force publique, finissent d’exaspérer le camp catholique. Les patronages, destinés aux écoliers, sont pour la hiérarchie catholique un moyen majeur de résistance face à la laïcisation, mais leur implantation réelle dans les campagnes de l’Ouest, notamment, reste l’objet d’interrogations119.
Les débuts timides du tir
58La première société rurale de tir répertoriée en Mayenne est celle de Pommerieux. Elle est créée en 1881, sous l’appellation de « cercle de l’Union ». L’activité de tir n’est officiellement déclarée qu’à compter du 1er février 1893, mais un document de 1886 témoigne de l’existence d’un jardin, où se trouvent « le jeu de boules et le tir120 ».
59Entre 1881 et 1907, seules 11 créations de sociétés ont été répertoriées dans les communes rurales mayennaises : Pommerieux (1881), Couptrain (1884), Pré-en-Pail (antérieure à 1887), Ernée (1889), Mée (1899), Coudray (1900), Ambrières (1902), Montsûrs (1904), Grez-en-Bouère (1905), Bouchamps-lès-Craon et Saint-Pierre-des-Landes (1907). C’est une géographie très éclatée. À l’exception de Pré-en-Pail, Ambrières, Montsûrs et Grez-en-Bouère, elles apparaissent dans des communes rurales faiblement peuplées et dépourvues de toute association antérieure. Un phénomène d’émulation locale joue vraisemblablement dans le Craonnais entre Pommerieux, Mée et Bouchamps-lès-Craon, bien que les dates de création des trois sociétés apparaissent relativement espacées.
60L’autre caractéristique des sociétés conscriptives rurales mayennaises au tournant du xxe siècle est qu’elles sont uniquement des sociétés de tir. L’intérêt porté à cette activité peut se voir comme la perpétuation d’une pratique ancienne, le tir à la cible ou au pavois, entretenue, à partir de la monarchie de Juillet par l’activité des sapeurs-pompiers. Les sociétés de tir reprennent souvent à leur compte, dans un cadre officiel et formalisé, les concours de tir annuels organisés avec succès dans les communes depuis des décennies. Cette préférence pour le tir corrobore celle observée à l’échelle nationale.
61La gymnastique connaît localement un relatif succès à partir des années 1910. Le « grand concours de gymnastique, organisé par la Société de Tir et de Gymnastique La Craonnaise » (annexe 4c), les samedi 3 et dimanche 4 août 1912, propose un programme riche, dépassant les frontières strictes de la pratique gymnastique et destiné à attirer un large public : « 27 Sociétés de Gymnastique, 4 Sociétés Musicales (1 300 Gymnastes, 200 Musiciens) », « Grande Retraite aux Flambeaux », « Concours entre les Sociétés de Gymnastique, « Festival de musique. Défilé en ville », « Illuminations. Splendide feu d’artifice121 ».
Des sociétés conscriptives plus nombreuses et plus diversifiées
62Les communes rurales de la Mayenne connaissent 10 créations d’associations conscriptives en vingt-six ans, entre 1881 et 1907, soit 0,4 par an, puis 17 en cinq ans, entre 1909 et 1914, soit 3,4 par an. Il faut y voir l’effet des circulaires portées en 1907 par Aristide Briand, ministre de l’Instruction publique. Il serait erroné de faire de la Grande Guerre une borne chronologique. Les sociétés de tir cessent certes de fonctionner pendant le conflit, mais l’année 1920 représente un pic de créations, avec 13 nouvelles sociétés, dont l’objet est avant tout la préparation militaire. Quelques-unes de ces créations sont en réalité des recréations, mais le mouvement témoigne d’un intérêt toujours très prononcé en ces temps de sortie de guerre.
63À partir des années 1910, d’autres activités s’adjoignent progressivement au tir : la gymnastique, bien évidemment, puis tous les sports. L’association des Chasseurs des Alpes mancelles est créée à la Pôoté en juillet 1912, avec pour but : « le développement corporel et l’éducation physique de ses membres par la pratique des sports, du tir et de la gymnastique, par l’entraînement raisonné et l’observation rigoureuse des lois de l’hygiène122 ». La prestation que les sociétaires présentent sur la place du bourg, à l’occasion d’une fête de la gymnastique, le dimanche 25 mai 1913, est constituée d’exercices à la barre fixe et aux barres parallèles, de constitutions de pyramides humaines et de mouvements d’ensemble avec des « bâtonnets » (annexe 4d). Les photographies prises à la Sportive de Meslay, association fondée en 1912, montrent une activité footballistique dès l’année suivante, avec, notamment un match organisé contre l’équipe de l’Étoile sportive de Bierné en avril 1913 (annexe 4e). Toutefois, ce qui fait l’identité du patronage et ce qui est mis en scène sur les photographies « officielles », ce sont l’activité de fanfare et les exercices de gymnastique (annexe 4f).
64Ce n’est qu’à l’aube des années 1930, que la prédominance des sociétés conscriptives s’estompe au profit d’associations véritablement sportives. Cependant, cette évolution n’est pas linéaire. En 1923, par exemple, les membres de la société des jeunes d’Ambrières, fondée un an plus tôt, avec un but essentiellement gymnique, se réunissent pour élargir officiellement les activités proposées : l’association « fera désormais usage du tir et fera la préparation militaire123 ».
65À côté des nombreuses « Unions sportives », le choix de l’appellation trahit souvent les intentions premières, prémilitaires ou paramilitaires, des fondateurs : les « Volontaires » de Landivy, ou bien encore la « Vigilante » de Villaines-la-Juhel. D’autres choix apparaissent plus pacifistes ou originaux : l’« Avenir » de Blandouet, la « Joyeuse » de la Chapelle-au-Riboul et, à Jublains, les « Diablinthes », référence au peuple gaulois dont le village était l’agglomération principale pendant l’Antiquité.
66Le vocabulaire employé dans certains statuts trahit l’ambiance militaire dans laquelle baignent les associations sportives. À l’Union sportive de Couptrain, en 1923124 : « Art. 16 – L’enseignement sportif, les séances d’entraînement ont lieu sous la direction du “capitaine de sport”, qui est en outre chargé d’assurer la discipline et l’obéissance aux règlements […]. »
67La géographie d’implantation des sociétés conscriptives dans les communes rurales mayennaises fait apparaître de grandes disparités (fig. 7). On retrouve des « déserts » associatifs autour des trois villes. Des « paquets » se constituent, qui épousent les contours d’autant de petits « pays » au sein desquels joue une certaine émulation. Comme pour les ensembles musicaux, on retrouve de fortes densités de sociétés au sud-ouest du département, autour de Craon et de Renazé, mais également entre Laval et Ernée.
Figure 7. – Sociétés conscriptives et associations sportives dans les communes rurales mayennaises (1880-années 1930).


Sources : Arch. dép. de la Mayenne, 4 M, R 1215-1216, 1 Z, 2 Z.
68Au sortir de la Grande Guerre, quelques sociétés conscriptives sont l’émanation d’un pôle industriel, à l’image de ce qui se passe pour la musique. Après l’Union musicale, fondée en 1910 et devenue l’Espérance en 1911, des cadres des mines de la Lucette sur la commune du Genest créent, en 1919, une Association sportive destinée à la préparation au service militaire. Les sociétés qui apparaissent à Port-Brillet, en 1920, portés par des cadres de la fonderie Chappée, et à Saint-Saturnin-du-Limet, en 1921, en lien avec les Ardoisières de la Rivière, reposent sur les mêmes principes.
69Les recensions des effectifs des sociétés conscriptives dans les sources consultées sont rares. Elles n’offrent qu’une vision très partielle de la réalité. Pour la période 1881-1909, les effectifs des membres actifs sont très variables, allant, pour l’année 1899, de 45 à l’Avenir de Couptrain à 129 à Pré-en-Pail125. Le nombre de membres rapporté à la seule population totale de la commune de Couptrain (396 habitants au recensement de 1901) pourrait amener à penser que plus d’un Couptrainais sur dix est tireur. Il faut avoir à l’esprit que, dans la plupart des cas, le recrutement des sociétés dépasse les limites communales.
70À partir des années 1910, le succès s’amplifie : la société de tir de l’Union de Pré-en-Pail compte 140 membres, celle de la Pôoté 100 et celle d’Ambrières 150126. A contrario, à la même époque, la société de tir de Landivy ne compte que 40 membres et celle de Bouchamps-lès-Craon 25.
Le rôle majeur des patronages catholiques
71Jusqu’à la fin des années 1900, l’Église mayennaise investit peu les sociétés conscriptives : une seule société sur les 11 qui apparaissent dans les sources, entre 1881 et 1907, peut être rattachée à l’obédience catholique. En revanche, sur la période suivante, de 1909 à 1939, les patronages accueillent en leur sein au moins la moitié des 66 sociétés conscriptives nouvellement créées.
72La France charitable et prévoyante. Tableau des œuvres et institutions du département de la Mayenne, ouvrage publié en 1896, recense, pour les communes rurales mayennaises, cinq « patronages de garçons » : un à Chailland, Villaines-la-Juhel, Montigné, et deux à Craon127.
73La présence d’écoles catholiques dans la plupart des communes mayennaises, et plus particulièrement dans le monde rural, permet à la hiérarchie ecclésiastique locale, contrairement à d’autres régions de France, de ne pas s’inquiéter d’une éventuelle perte de mainmise sur la jeunesse. Cela explique, à la fin du xixe siècle, le faible nombre de patronages destinés aux écoliers.
74Les années 1902-1914 en Mayenne sont une « période de colère conservatrice128 ». Cette colère s’exprime électoralement, mais aussi par la création à l’échelle départementale d’une Association des catholiques de la Mayenne, en 1903, dont le double but est129 : « dans le présent, l’aide aux religieuses expulsées de l’enseignement et, dans l’avenir, l’aide au clergé et aux paroisses les plus pauvres, le jour où serait dénoncé le Concordat et votée la Séparation des Églises et de l’État ». Mgr Grellier, évêque de Laval, écrit en 1907 à propos des associations catholiques130 : « Après l’œuvre des écoles libres, il n’est pas à mes yeux d’œuvre plus importante et plus nécessaire… dans toutes les paroisses. » Si on tient compte du fait que le rayonnement d’une société de tir est souvent cantonal, aucun « pays », aucun « coin » du département n’est laissé au monopole du camp d’en face, et réciproquement. L’introduction, en 1908, d’un agrément ministériel, visant à ce que les sociétés catholiques ne puissent plus, notamment, bénéficier de la distribution gratuite de fusils et de cartouches131, ne semble pas être un facteur dissuadant très efficace.
75Dans les bourgs les plus importants, les sociétés conscriptives relevant des patronages catholiques se trouvent parfois en confrontation directe avec des sociétés laïques. À Évron, la création de l’Alerte en 1913, affiliée à la Fédération gymnastique et sportive des patronages de France (FGSPF), est une riposte à la fondation, l’année précédente, de l’Union sportive, issue de l’enseignement public132. L’Alerte affiche, à l’origine, une spécificité liée au tir et à la gymnastique, dans un but « de développement des forces physiques et morales », alors que sa concurrente, affiliée à l’Union de sociétés française de sports athlétique (USFSA) apparaît plutôt sur un créneau « sport-loisir ».
76Les appellations des patronages catholiques, au sein desquels les sociétés conscriptives se déploient, sont très variées. Certains choix sont locaux : la « Craonnaise », la « Chaillandaise », la « Frambaldéenne », « Juvigné Sports » ; d’autres sont plus connotés : la « Jeanne-d’Arc », la « Société Saint-Joseph » ; les derniers plus originaux : l’« Alerte », l’« Intrépide », l’« Espérance », l’« Espoir », l’« Étoile », la « Jeune Garde », l’« Avant-garde » ou les « Francs-Tireurs ». La Jeanne-d’Arc d’Ernée, en 1910, se donne pour but de développer « par l’emploi rationnel de la gymnastique, du tir et des sports, les forces physiques et morales des jeunes gens, de préparer au pays des hommes robustes et de vaillants soldats133 ». Les fondateurs de la Jeanne-d’Arc de Lignières-la-Doucelle, en 1920, se fixent comme objectif de préparer les jeunes gens à devenir des « hommes vigoureux134 ». À part l’obédience, il n’y a, à vrai dire, pas de spécificité dans le fonctionnement d’une société conscriptive catholique.
77À la fin des années 1930, au moment où le tir et la gymnastique sont globalement un peu passés de mode, les patronages catholiques continuent de garder un attachement fort à la préparation militaire. Le témoignage d’Augustin Raimbault sur les activités du patronage Saint-Joseph de Cossé-le-Vivien pendant les années 1930 confirme cet état de fait135 : à côté des jeux d’adresse et du billard, c’est la gymnastique qui a la part belle, or « qui dit gymnastique, dit marche rythmée, défilé ; et qui dit défilé, dit aussi musique ».
Des installations et des équipements très inégaux
78Les sociétés conscriptives sont de trois types en fonction du public visé : « scolaire », « post-scolaire » ou « mixte ». En Mayenne, le modèle le plus répandu est celui de la société post-scolaire intégrant une section scolaire. Ceci explique qu’au moment de sa création, notamment à la fin du xixe et au début du xxe siècle, le stand de tir soit, la plupart du temps, installé dans l’école des garçons, publique ou privée. Certaines sociétés bénéficient d’un champ de tir sur un terrain privé loué par les sociétaires. En dehors des concours, les séances ont lieu une à deux fois par semaine, prioritairement le jeudi et le dimanche, jours où les locaux scolaires sont disponibles, « de 13 h à 19 h », comme à Pré-en-Pail, par exemple. Ils peuvent aussi avoir lieu en soirée comme à la Jeanne-d’Arc d’Ernée, en 1920, où les séances de gymnastique ont « lieu deux fois par semaine, de 20 à 21 heures […] lundi et mercredi136 ».
79L’accès à des installations dépend de multiples aléas. En 1869, le conseil municipal de Ménil rejette l’achat d’appareils pour les exercices de gymnastique, « considérant que les enfants ont presque tous un long trajet à faire pour se rendre à l’école et qu’ils s’occupent très activement chez leurs parents, entre les classes, à des travaux manuels137 ». À Couptrain, en 1913, un conflit entre les sociétaires et le propriétaire du champ de tir amène l’association à recentrer ses activités sur le tir scolaire138. Vingt-cinq ans plus tard, à Ambrières, c’est la même situation, c’est-à-dire la perte du champ de tir, couplée à l’âge avancé des membres du conseil d’administration, qui conduit à la dissolution de la société de tir mixte et de préparation militaire.
80En 1936, une enquête menée par la préfecture au sujet des installations sportives dont bénéficient les associations montre que la situation s’est améliorée, mais qu’il y a encore de grandes disparités139. À Laigné, les membres de l’Avant-Garde n’ont pas de terrain spécifique et utilisent celui de l’école de garçons « moyennant l’entretien du tir à la carabine, du sautoir, des agrès et de la cour, le cas échéant ». À Izé, les activités gymniques ont lieu dans une cour privée, de 10 mètres sur 25, attenante au presbytère ; le champ de tir est lui distant de 100 mètres. La Jeanne-d’Arc de Gorron bénéficie d’un gymnase situé au patronage, avec un « stand de gymnastique » de 14 mètres sur 15 ; pour le tir, elle loue un stand à la sortie du bourg, qu’elle partage avec l’Union gorronnaise. À Lassay, la Frambaldéenne a l’usage d’un terrain de sport de 60 mètres sur 40, pour le saut en hauteur et en longueur, et d’une salle de gymnastique, de sept mètres sur quatre, comprenant une barre fixe, des barres parallèles et une corde lisse.
81L’Amicale de Vaiges a la chance d’avoir accès au stade situé sur un terrain municipal, déjà équipé d’une barre fixe, de sautoirs pour la longueur et la hauteur. Pour la rentrée 1936, sont prévus un portique avec des anneaux, un trapèze, une corde à nœuds et une corde. À cela s’ajoute le stand de tir sous le préau de l’école publique de garçons. Le seul bémol reconnu par le maire est que « le terrain de gymnastique n’est pas muni de gradins, ni de vestiaires, les fonds dont dispose l’Association sportive de Vaiges étant trop insuffisants ». À la même époque, à 10 kilomètres de là, à Bazougers, l’Union sportive profite de l’installation de douches au lavoir municipal. De son côté, la Sportive, relevant du patronage de Meslay, est propriétaire de son propre gymnase et de son propre terrain. L’installation « comporte une grande salle de réunions avec bureau et vestiaire, salle de jeux ». À l’une des extrémités du stade, « se trouvent les agrès nécessaires à la gymnastique : portique, barre fixe, sautoir, une butte prévue pour le tir à la carabine ». À cela s’ajoute un confort supplémentaire : « un puits à eau potable ». Enfin, « l’installation très prochaine d’un stand de tir à 200 m[ètres] est prévue ».
82À partir des années 1880, encore plus que sous le Second Empire, l’État républicain ne se contente plus d’être « prescripteur », « il encadre140 ». C’est pourquoi on peut parler d’une véritable nationalisation du mouvement associatif. Cependant, la généralisation du phénomène, à l’échelle du département de la Mayenne, n’a lieu qu’à partir des années 1910.
Notes de bas de page
1 Farcy Jean-Claude, « Le temps libre au village », art. cité, p. 338.
2 Dalmaz Patrick, Histoire des sapeurs-pompiers français, Paris, PUF, coll. « Que sais-je ? », 1996., p. 30.
3 Grange Annie, L’apprentissage de l’association, op. cit., p. 17-18.
4 Farcy Jean-Claude, « Le temps libre au village », art. cité, p. 340.
5 Lussier Hubert, Les sapeurs-pompiers au xixe siècle. Associations volontaires en milieu populaire, Paris, A.R.F. Éditions/L’Harmattan, 1988, p. 117.
6 Baker Alan R. H., Fraternity Among the French Peasantry, op. cit., p. 210.
7 Lussier Hubert, Les sapeurs-pompiers, op. cit., p. 15-17.
8 Dalmaz Patrick, Histoire des sapeurs-pompiers français, op. cit., p. 21.
9 Baker Alan R. H., Fraternity Among the French Peasantry, op. cit., p. 192.
10 Farcy Jean-Claude, Les paysans beaucerons au xixe siècle, Chartres, Société archéologique d’Eure-et-Loir, 1988, 2 tomes, p. 1054.
11 Carrot Georges, La Garde nationale (1789-1871). Une force publique ambiguë, Paris, L’Harmattan, 2001, p. 256.
12 Dalmaz Patrick, Histoire des sapeurs-pompiers français, op. cit., p. 34. La subdivision compte au plus 51 hommes, la compagnie entre 52 et 250. Au-delà et jusqu’à un maximum de 500 hommes, les sapeurs-pompiers forment des bataillons.
13 Lussier Hubert, Les sapeurs-pompiers, op. cit., p. 18.
14 Girard Louis, La garde nationale, 1814-1871, Paris, Plon, 1964, p. 208-209.
15 Baker Alan R. H., Fraternity Among the French Peasantry, op. cit., p. 206.
16 Girard Louis, La garde nationale, op. cit., p. 198.
17 Dalmaz Patrick, Histoire des sapeurs-pompiers français, op. cit., p. 34.
18 Lussier Hubert, Les sapeurs-pompiers, op. cit., p. 20.
19 Ibid., p. 66.
20 Arch. départ. de la Mayenne, E-dépôt 155, 3 H 10.
21 Arch. départ. de la Mayenne, R 1264.
22 Arch. départ. de la Mayenne, E-dépôt 75, 3 H 3.
23 Le site de la Bibliothèque nationale de France [data.bnf.fr] recense 29 œuvres attribuées à « Giovanni Rivetti (compositeur, 18..-18.. ?) », dont la plupart sont datées des années 1868-1870.
24 Arch. municip. d’Ernée, 4 H 1.
25 Arch. départ. de la Mayenne, 1 T 1053.
26 Arch. départ. de la Mayenne, E-dépôt 136, 1 D 6.
27 Arch. départ. de la Mayenne, MS 80/16-3.
28 Arch. départ. de la Mayenne, 4 M 163.
29 Arch. municip. d’Ernée, 4 H 1.
30 Arch. départ. de la Mayenne, E-dépôt 62, 3 H 1.
31 Lussier Hubert, Les sapeurs-pompiers, op. cit., p. 25 ; Grange Annie, L’apprentissage de l’association, op. cit., p. 17 ; Pauquet Alain, La société et les relations sociales en Berry, op. cit., p. 444-445.
32 Tropeau Christophe, « Retour sur l’affaire du pyromane du dimanche », L’Oribus, no 97, novembre 2016, p. 15-40.
33 Arch. départ. de la Mayenne, E-dépôt 204, 1 D 2.
34 L’Écho de la Mayenne, 6 janvier 1867.
35 Arch. départ. de la Mayenne, E-dépôt 2, 3 H 2.
36 Arch. départ. de la Mayenne, E-dépôt 94, 1 D 7.
37 Arch. départ. de la Mayenne, E-dépôt 72, 3 H 6.
38 Arch. départ. de la Mayenne, MS 80/26-9.
39 Arch. départ. de la Mayenne, R 1253.
40 Arch. départ. de la Mayenne, MS 80/22-3.
41 Arch. municip. d’Ernée, 4 H 1.
42 Arch. départ. de la Mayenne, E-dépôt 154, 3 H 5 ; R 1253 ; MS 80/23-8.
43 Arch. départ. de la Mayenne, MS 80/24-4.
44 Arch. départ. de la Mayenne, E-dépôt 198, 3 H 4.
45 Arch. départ. de la Mayenne, MS 80/26-4.
46 Arch. départ. de la Mayenne, 538 J 1.
47 Arch. départ. de la Mayenne, E-dépôt 2, 3 H 2.
48 Arch. départ. de la Mayenne, MS 80/14-5.
49 Pasler Jann, La République, la musique et le citoyen, 1871-1914, Paris, Gallimard, 2015 (2009), p. 35.
50 Ihl Olivier, La fête républicaine, Paris, Gallimard, 1996, p. 155.
51 Pasler Jann, La République, la musique et le citoyen, op. cit., p. 38-47.
52 Clodomir Pierre-François, Manuel complet du chef-directeur « harmonie et fanfare », à l’usage des exécutants, ou Traité de l’organisation des sociétés musicales, Paris, Alphonse Leduc éditeur, 1883, p. 162-163.
53 Pasler Jann, La République, la musique et le citoyen, op. cit., p. 221.
54 Ihl Olivier, Le Mérite et la République. Essai sur la société des émules, Paris, Gallimard, 2007, p. 304-305.
55 Yon Jean-Claude, Histoire culturelle de la France au xixe siècle, Paris, A. Colin, 2010, p. 180.
56 Gerbod Paul, « L’institution orphéonique en France au xixe et au xxe siècle », Ethnologie française, 1980, vol. 10, no 1, p. 28.
57 Ibid., p. 30-31.
58 Ibid., p. 27.
59 Lebrat Soizic, « La Vendée résiste-t-elle à l’orphéon ? », op. cit., p. 123-150. Soizic Lebrat mène une comparaison entre le département de la Vendée, terre réputée pauvre en sociétés musicales, et celui de l’Eure, terre riche, étudiée par Rauline Jean-Yves, Les sociétés musicales en Haute-Normandie (1792-1914). Contribution à une histoire sociale de la musique, Lille, ANRT, 2003, 705 p.
60 Cambon Jérôme, Les trompettes de la République. Harmonies et fanfares en Anjou sous la Troisième République, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2011, p. 85. L’auteur s’appuie pour l’essentiel sur les données tirées de Bellier Olivier, Les sociétés de musique dans le Maine-et-Loire au xixe siècle, mémoire de maîtrise dactylographié, Tours, 1986, 214 p.
61 Gumplowicz Philippe, Les travaux d’Orphée. Deux siècles de pratique musicale amateur en France (1820-2000). Harmonies, chorales, fanfares, Paris, Aubier, 2001 (1987), p. 84.
62 Arch. départ. de la Mayenne, 1 T 1052.
63 Arch. départ. de la Mayenne, 1 T 1053.
64 Arch. départ. de la Mayenne, 1 pe 53/2 (Le Journal de Craon), 24 décembre 1893 ; 1 pe 53/3 (Le Journal de Craon), 22 avril 1894.
65 Lebrat Soizic, « La Vendée résiste-t-elle à l’orphéon ?, art. cité.
66 Gumplowicz Philippe, Les travaux d’Orphée, op. cit., p. 80.
67 Arch. départ. de la Mayenne, 1 T 1052.
68 Amaouche-Antoine Marie-Dominique, « Les sociétés musicales », art. cité, p. 444.
69 « Évron en fête, 1860-1960 », dans L’Oribus, juillet-septembre 1985, no 18, p. 21.
70 Arch. départ. de la Mayenne, E-dépôt 72, 3 H 1.
71 Arch. départ. de la Mayenne, 1 T 1052.
72 Arch. départ. de la Mayenne, MS 80/14-5 ; 1 T 1052.
73 Arch. départ. de la Mayenne, MS 80/11-1 ; 1 T 1052.
74 Arch. départ. de la Mayenne, 1 T 1052.
75 Arch. départ. de la Mayenne, MS 80/9-9.
76 Amaouche-Antoine Marie-Dominique, « Les sociétés musicales », art. cité, p. 443.
77 Arch. départ. de la Mayenne, 1 T 1052.
78 Ibid.
79 Ibid.
80 Ibid.
81 Arch. départ. de la Mayenne, 1 T 1052.
82 « Évron en fête, 1860-1960 », art. cité, p. 21-32.
83 Foucault Rémy, « La famille Chappée : un exemple type de paternalisme en Mayenne », L’Oribus, no 7, septembre 1982, p. 26.
84 Arch. départ. de la Mayenne, MS 80/6-12.
85 Arch. départ. de la Mayenne, MS 80/4-6.
86 Arch. départ. de la Mayenne, 1 T 1052.
87 Ibid.
88 Ibid.
89 Ibid.
90 Arch. départ de la Mayenne, 1 pe 53/3 (Le Journal de Craon), 14 juin 1896.
91 Arch. départ de la Mayenne, 1 pe 53/4 (Le Journal de Craon), 30 mai 1897.
92 Ibid., 8 août 1897.
93 Concours de gymnastique du 4 août 1912, programme, Craon, Imprimerie-librairie R. Leclerc, 1912, 32 p.
94 Arch. départ. de la Mayenne, 1 T 1052.
95 Arch. départ. de la Mayenne, MS 80/6-2.
96 Arch. départ. de la Mayenne, 7 M 189, 1 T 1052, 1 T 1053.
97 Arch. départ. de la Mayenne, 1 T 1052, 1 T 1053, MS 80/23-8.
98 Arch. départ. de la Mayenne, MS 80/4-6.
99 Hubscher Ronald, L’histoire en mouvements. Le sport dans la société française (xixe-xxe siècle), Paris, A. Colin, 1992, p. 47.
100 Lecoq Benoît, « Les sociétés de gymnastiques et de tir dans la France républicaine (1870-1914) », dans Revue historique, 1986, no 559, p. 157.
101 Mosse George L., L’image de l’homme. L’invention de la virilité moderne, Paris, Éditions Abbeville, 1997 (1996), p. 54.
102 Hubscher Ronald, L’histoire en mouvements, op. cit., p. 26.
103 Tetart Philippe (dir.), Histoire du sport en France. Du Second Empire au régime de Vichy, Paris Vuibert, 2007, p. 22.
104 Dietschy Paul et Clastres Patrick, Sport, société et culture en France, du xixe siècle à nos jours, Paris, Hachette, 2006, p. 45.
105 Crubellier Maurice, L’enfance et la jeunesse dans la société française, 1800-1950, Paris, A. Colin, 1979, p. 198.
106 Hubscher Ronald, L’histoire en mouvements, op. cit., p. 47.
107 Lecoq Benoît, « Les sociétés de gymnastiques et de tir », art. cité, p. 158-159.
108 Tetart Philippe (dir.), Histoire du sport en France, op. cit., p. 21.
109 Lecoq Benoît, « Les sociétés de gymnastiques et de tir », art. cité, p. 160.
110 Farcy Jean-Claude, La jeunesse rurale, op. cit., p. 174.
111 Baker Alan R. H., « Des aspects géographiques des sociétés de préparation militaire en France, 1870-1914 », Revue historique des armées (en ligne), 274/2014.
112 Lagrée Michel, Religion et modernité, France, xixe-xxe siècles, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2003, p. 181-189.
113 Cholvy Gérard, Histoire des organisations et mouvements chrétiens de jeunesse en France (xixe-xxe siècle), Paris, Éditions du Cerf, 1999, p. 85.
114 Lecoq Benoît, « Les sociétés de gymnastiques et de tir », art. cité, p. 165.
115 CholvyGérard et Tranvouez Yvon (dir.), Sport, culture et religion. Les patronages catholiques (1898-1998). Actes du colloque de Brest, 24, 25 et 26 septembre 1998, Brest, Centre de recherche bretonne et celtique/université de Bretagne occidentale, 1999, p. 13.
116 Cholvy Gérard, Christianisme et société en France, op. cit., p. 97.
117 Denis Michel, L’Église et la République en Mayenne, 1896-1906, Rennes/Paris, Institut de recherches historiques de Rennes/Klincksieck, 1967, 289 p.
118 Gaboriaux Chloé, « La loi 1901 faute de mieux », art. cité, p. 58.
119 Farcy Jean-Claude, La jeunesse rurale, op. cit., p. 175.
120 Guioullier Claude, Biographie d’une société de tir et de préparation militaire : l’Union de Pommerieux. Alliances familiales, socialité associative et pouvoirs politiques locaux, mémoire de DEA, EHESS, 1995, p. 11-12.
121 Concours de gymnastique du 4 août 1912, op. cit. Arch. départ. de la Mayenne, 5 Fi 80/169 et 172.
122 Arch. départ. de la Mayenne, 2 Z 75.
123 Arch. départ. de la Mayenne, 4 M 167.
124 Arch. départ. de la Mayenne, 4 M 169.
125 Arch. départ. de la Mayenne, MS 80/12-3 ; MS 80/20-1.
126 Arch. départ. de la Mayenne, 2 Z 77.
127 La France charitable et prévoyante. Tableau des œuvres et institutions du département de la Mayenne, Paris, Librairie Plon, 1896, p. 5.
128 Charlot André, « Laïcité et résistance de l’Église en Mayenne à travers les élections législatives (1876-1914) », B.C.H.A.M., 1974, 2e série, t. 37, p. 124.
129 Charlot André, « Autour de la loi de Séparation (1902-1908) », B.C.H.A.M., 1977-1978, 2e série, t. 46, p. 217.
130 Cité par Cholvy Gérard dans Sport, culture et religion, op. cit., p. 20.
131 Dietschy Paul et Clastres Patrick, Sport, société et culture, op. cit., p. 54.
132 « Évron en fête, 1860-1960 », op. cit., p. 89-98.
133 Arch. départ. de la Mayenne, 2 Z 75.
134 Arch. départ. de la Mayenne, 2 Z 201.
135 « Mémoires d’une famille mayennaise 1870-1970 », L’Oribus, no 46, juin 1998, p. 85.
136 Arch. départ. de la Mayenne, 4 M 169.
137 Arch. départ. de la Mayenne, E-dépôt 111, 1 D 3.
138 Arch. départ. de la Mayenne, 2 Z 77.
139 Arch. départ. de la Mayenne, 4 M 166 ; 4 M 167 ; 4 M 170 et 4 M 174.
140 Aprile Sylvie, La Révolution inachevée, op. cit., p. 433.
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Un constructeur de la France du xxe siècle
La Société Auxiliaire d'Entreprises (SAE) et la naissance de la grande entreprise française de bâtiment (1924-1974)
Pierre Jambard
2008
Ouvriers bretons
Conflits d'usines, conflits identitaires en Bretagne dans les années 1968
Vincent Porhel
2008
L'intrusion balnéaire
Les populations littorales bretonnes et vendéennes face au tourisme (1800-1945)
Johan Vincent
2008
L'individu dans la famille à Rome au ive siècle
D'après l'œuvre d'Ambroise de Milan
Dominique Lhuillier-Martinetti
2008
L'éveil politique de la Savoie
Conflits ordinaires et rivalités nouvelles (1848-1853)
Sylvain Milbach
2008
L'évangélisation des Indiens du Mexique
Impact et réalité de la conquête spirituelle (xvie siècle)
Éric Roulet
2008
Les miroirs du silence
L'éducation des jeunes sourds dans l'Ouest, 1800-1934
Patrick Bourgalais
2008