Quand la bande dessinée s’approprie les violences conjugales
p. 69-86
Texte intégral
1La bande dessinée s’est souvent attachée à mettre en textes et en images tous les sujets possibles. Mais il en est qui sont rarement abordés et qui ne font qu’une apparition fugitive. Certains thèmes n’ont pas été considérés comme des véritables « sujets ». C’était le cas des violences faites aux femmes et des féminicides1, bien que fortement médiatisés ces dernières années, en dépit des nombreux travaux universitaires2 réalisés auparavant. Les quatre albums du présent corpus – Luchadoras, Touchées, … À la folie, Une place au Paradis – ont tous été publiés entre 2006 et 2019. Depuis, d’importants mouvements sociaux ont eu lieu concernant le harcèlement sexuel et les violences conjugales et le nombre de féminicides en 2020 a baissé par rapport à 2019, passant de 146 à 90, soit une baisse de presque 40 %, qui n’est cependant pas encore le signe d’un véritable changement. Les événements liés à la pandémie sont déterminants pour comprendre ces chiffres car la tendance de 2018 et 2019 allait à l’inverse : 121 féminicides pour 2018 et 146 pour 2019. L’analyse des violences conjugales est donc très complexe3.
2Les bandes dessinées actuelles abordent les violences dans leur ensemble, sans se focaliser sur les seuls féminicides. Luchadoras (2006) de Peggy Adam4 s’intéresse aux nombreuses disparitions accompagnées de meurtres qui ont lieu à Ciudad Juárez au Mexique. Prenant pour inspiration l’histoire sinistre de ce qui est devenu le symbole du féminicide dans le monde, l’autrice raconte l’histoire d’Alma, jeune femme victime de violences conjugales qui échappe à la mort tandis que d’autres sont retrouvées mutilées, jetées comme de vulgaires ordures. Violent, sans couleur ni espoir, le récit de cet album se résout dans la brutalité, le cercle de la violence ne prenant jamais fin. Si l’héroïne survit, l’autrice ne propose aucune solution, ni échappatoire pour ces femmes qui ne reçoivent aucun soutien de l’État et ne peuvent compter que sur elles-mêmes. Le second album, Touchées (2019) de Quentin Zuttion5 aborde la thématique des violences sexuelles par un biais spécifique : l’histoire de trois femmes qui se rencontrent lors des séances d’« escrime thérapeutique » après qu’elles ont subi des violences sexuelles. L’intérêt de l’album est la pratique sportive de l’escrime qui permet à la fois de reprendre confiance en soi, de « se défaire d’une double prison : le langage et le corps6 ». Cet album se détache du précédent par sa qualité narrative dans le sens où Quentin Zuttion reprend le cadre de la thérapie organisée par le collectif « Stop Violences Sexuelles » ainsi que des témoignages qu’il a pu recueillir pour créer ces « histoires de femmes »… À la folie (2009) de Sylvain Ricard et James7 décrit le quotidien d’un couple marié où la violence s’est peu à peu installée, se normalisant. En se concentrant sur les questionnements que vit le personnage féminin, les auteurs font en quelque sorte interagir le couple avec le lecteur sous la forme d’une thérapie où les deux protagonistes se livrent sur leur relation en s’adressant directement à celui qui lit. Enfin, Une place au paradis (2019) de Mosdi et Lorenzi8 aborde le sujet d’une manière classique en montrant la descente aux enfers de Mélanie dont la relation avec Romain s’est transformée en spirale de violence. L’accent est porté sur les proches et leurs réactions. Si ces albums sont différents par leur traitement, ils sont autant de messages d’espoir, pour les survivantes et un hommage pour celles qui n’ont pas survécu.
Luchadoras de Peggy Adam
3Luchadoras de Peggy Adam est une exception dans ce corpus. Bien qu’il aborde les violences, le lieu, la nature des violences et les relations entre les personnages sont singuliers. Le scénario de cette bande dessinée se déroule à Juárez, ville frontalière entre le Mexique et les États-Unis, souvent surnommée dans les médias « capitale mondiale du meurtre », où près de 4 000 femmes furent victimes de meurtre entre 1993 et 20009. En plus des féminicides, la ville compte 3 000 meurtres en 2010 avant que le taux ne commence à diminuer à la suite du déploiement de l’armée dans toute la région. Toutefois Ciudad Juárez fait partie des villes ayant un taux d’homicide par habitant extrêmement élevé10, occupant toujours la deuxième place de la ville la plus dangereuse du monde derrière Tijuana, autre ville mexicaine, selon une étude du Conseil citoyen pour la sécurité publique et la justice pénale11.
4En couverture de l’album (fig. 1), le lecteur peut en partie lire ces informations : « Depuis 1993, plus de 600 femmes ont disparu et plus de 400 ont été assassinées à Ciudad Juárez, ville mexicaine frontalière des États-Unis. » Malgré cette volonté de contextualiser, le texte est bien en deçà de la réalité des enlèvements et des meurtres qui ont lieu dans cette ville. L’histoire de Luchadoras est un récit fictif qui s’inscrit dans une réalité bien tangible12. Le choix du titre fait référence à la lucha libre, autrement appelée catch mexicain ou encore lutte mexicaine, sport de combat théâtral qui se distingue du catch classique de plusieurs manières. Le combattant ou luchador (luchadora au féminin) porte un masque et garde secrète son identité tout en étant très reconnaissable sur le ring, que ce soit par les couleurs qu’il porte ou par les coups qu’il assène qui sont aériens et spectaculaires. Le choix du titre est clair. Au-delà de s’inscrire géographiquement au Mexique, l’autrice indique quasi directement que la ou les protagonistes doivent se battre pour survivre, mais de manière cachée. Une fois le récit terminé, il est également possible de comprendre ce titre d’une manière plus profonde. En effet, la protagoniste Alma règle son problème de violence conjugale d’une manière bien spécifique : elle fait tuer son compagnon par des membres d’un gang contre de l’argent. Ainsi, elle reste anonyme et non soupçonnable du meurtre par les policiers qui n’ont aucune idée de qui a pu le tuer. Elle se libère de ce poids d’une façon inattendue, ne brisant certes pas la chaîne de la violence, mais la retournant contre son assaillant qui, plus tôt dans l’album, a essayé de la tuer en lui plantant un couteau dans le ventre.
Fig. 1. – Couverture. Peggy Adam, Luchadoras, Genève, Suisse, Atrabile, 2006.

5Ce dénouement marque la particularité de ce récit en comparaison des autres albums. La violence dépasse le cadre familial et s’immisce au cœur de la vie publique. Au cours des 96 pages, le lecteur voit quatre scènes de crimes, une dizaine de cadavres de femmes abandonnées après avoir été violées et mutilées, mais également un nombre important de femmes disparues (elles sont seulement évoquées, aucun cadavre visible, aucun nom), cinq scènes de violences conjugales à l’encontre de deux femmes perpétrées par le même homme (Romel frappant Alma et sa sœur) et enfin une agression au couteau et un meurtre par arme à feu sur un homme. La violence et la mort sont permanentes dans cet album et le dénouement s’inscrit dans cette spirale sans fin. En effet, au-delà d’Alma, différents personnages gravitent autour d’elle. Tout d’abord, Romel, son compagnon violent, qui est également membre (voire chef) d’un gang local, les Rebeldes. Ensuite, il y a sa sœur, Estella, qui vit avec elle et Romel. Et enfin, Jean, un touriste, qui s’est épris d’Alma et ignore la situation de la ville de Juárez. Si l’histoire d’Alma et de sa famille est prédominante, beaucoup d’autres événements relatifs à des féminicides ont lieu autour d’eux sans qu’ils en soient responsables. Par ailleurs, certains personnages ont également une place importante dans le « contexte » de Juárez. C’est le cas de Romel, qui fait partie d’un gang, et de nombreux personnages de l’album qui expriment leur peur d’être mêlés à ces hors-la-loi ou à leurs activités. A contrario, certains personnages sont intimement liés à toutes ces disparitions comme l’« intermédiaire » qui n’est jamais nommé mais sert à plusieurs reprises d’intermédiaire entre différents personnages pour des activités illicites. C’est lui qu’Alma paie pour faire tuer Romel, c’est lui qui paie le chauffeur de bus13 de l’usine pour abandonner certaines femmes loin de la ville et c’est lui que le lecteur peut apercevoir au début de l’album comme un membre des diabolitos, gang rival à celui de Romel.
6Au fil des pages, les femmes disparaissent et meurent mais le mystère de leur disparition n’est jamais éclairci. Romel, alors qu’il a bien tenté de tuer Alma à l’aide d’un couteau, n’est cependant pas à l’origine des disparitions. Lui et sa bande sont qualifiés de « petits voyous » par un policier local, et même Alma sait qu’ils ne sont pas « dangereux » à ce point. En réalité, la source de ces disparitions et des féminicides est, dans cet album, plus « politique14 ». En effet, le lecteur assiste à différentes discussions désignant clairement un personnage important, qui paie des sommes conséquentes afin qu’on lui « livre » ces filles. Le patron de l’usine est terrifié par cette situation mais préfère toucher l’argent et se taire plutôt que de poser des questions, à l’image de ce dialogue avec l’intermédiaire :
- Pourquoi il ne se tape pas des putes plutôt ?
- Je n’en sais rien, et je ne veux pas non plus savoir ce qu’il leur fait subir. Je sais qu’il paie beaucoup, et qu’on doit obéir. Il n’y a rien d’autre à savoir.
7Ainsi le choix de l’autrice est de désigner une personne ou un groupe spécifique de personnes haut placées comme responsables de ces féminicides. Si aucune piste ne permet de désigner un ou des responsables, un haut gradé de la police mexicaine tient pourtant ces propos après la découverte de cinq cadavres à propos des suspects :
- Trouvez en un d’ici ce soir, le gouverneur vous en sera très reconnaissant…
- Ce soir ? Mais c’est n’importe quoi.
- Cherchez du côté des Rebeldes.
- Ce sont des petits voyous, pas des tueurs !
- Pour ce soir.
8Pour les autorités, il faut des suspects, quitte à créer des boucs émissaires. Le sujet est éminemment politique et ne relève pas que du féminicide. La situation spécifique de la ville pose tout d’abord problème : la frontière crée un mouvement perpétuel de flux de personnes. Plus il y a d’inconnus et moins la police peut agir. Si en France le système judiciaire est peu efficace pour prévenir le féminicide, il le devient à la mort de la victime, ici les cadavres s’accumulent et les autorités sont incapables de résoudre ces affaires. En 2011, le taux d’homicide a diminué suite au déploiement de l’armée dans la région, mais la présence d’hommes armés en nombre ne fait que traiter les symptômes d’un problème social plus grand. Étant sur la frontière avec les États-Unis et formant avec El Paso au Texas une ville tampon entre deux pays, Juarez est difficile à surveiller. Les criminels américains ont la possibilité de traverser la frontière et si certains d’entre eux sont responsables des féminicides, les forces de police mexicaine seront incapables de les retrouver ou de les arrêter. Parmi les victimes, beaucoup sont des ouvrières des nombreuses usines de Juarez. Seules et sans attache, elles sont des cibles faciles et leur mort reste discrète. Si elles disparaissent, elles seront remplacées et oubliées. Cette grande volatilité rend la justice quasi inopérante à Juarez, seule une réponse violente proportionnée semble fonctionner : Alma tue Romel et le gouvernement envoie l’armée. Une grande partie des habitants de la ville viennent d’ailleurs, de l’intérieur du Mexique. Ces ouvrières sont des migrantes non qualifiées entassées dans des bidonvilles autour de la ville au plus près de la frontière avec les États-Unis. Pour de si nombreux crimes, les auteurs sont tout aussi nombreux et leurs profils diffèrent, ce qui atteste de la terrible complexité de la situation. Les féminicides n’ont pu se développer que grâce à l’impunité qui règne dans cette ville. Les petits gangs et leurs trafics, comme le taux d’homicide par habitant, le laisser-aller judiciaire ont permis de tels chiffres. Ainsi, comme il est dit dans le webdocumentaire de Jean Christophe Rampal et Marc Fernandez, « la cité des morts15 » : « Le principal suspect dans l’affaire reste peut-être la ville elle-même. »
Touchées de Quentin Zuttion
9Avec Touchées de Quentin Zuttion la situation est différente. C’est un album de reconstruction a posteriori où les violences sexuelles priment. L’auteur plonge les lecteurs dans le quotidien de trois femmes : Lucie, Tamara et Nicole, toutes trois victimes de violences conjugales et sexuelles qui se rencontrent lors de séances d’escrime thérapeutique16. Lucie est le personnage principal et ses deux « acolytes », Nicole et Tamara s’agrègent autour du récit de sa reconstruction, leur chemin ne faisant plus qu’un à la fin de l’album (fig. 2).
Fig. 2. – Couverture. Quentin Zuttion, Touchées, Paris, Payot Graphic, 2019.

10Les violences sont omniprésentes pour Lucie, elle ne cesse d’y penser. Le lecteur comprend vite qu’elle veut se protéger tout en espérant rendre les coups, passant par exemple la nuit avec un couteau de cuisine en main. Tamara a une manière plus agressive de se protéger, en frappant et en prenant les devants afin de se défendre de toute future interaction sociale, de manière à ne plus jamais passer inaperçue. Nicole est, quant à elle, dans une situation tout à fait différente. Vivant seule et accompagnée de son chien, elle ne côtoie personne, Lucie et Tamara devenant ses deux seules amies, en dehors de son chien qui fait office de confident et de soutien sans faille. Par le biais de ces séances d’escrime thérapeutique organisées par un maître d’armes et une psychothérapeute17, elles vont peu à peu apprendre à toucher et à être touchées de nouveau pour se libérer des douleurs qui les rongent de l’intérieur.
11Par le sport de « combat », c’est le corps qui doit de nouveau prendre le dessus, l’esprit devant lâcher prise pour laisser s’exprimer toute la violence là où les mots ne peuvent plus grand-chose. La parole revient alors peu à peu, au fil des séances, lors desquelles les trois femmes nouent des liens et se battent : entre elles avec un fleuret en main et ensemble une fois sorties de la séance. L’escrime est au cœur de ce processus qui est loin d’être classique. Les mots ne sont pas recherchés, ils arrivent sans dialogue et sortent d’eux-mêmes après un combat physique acharné contre soi-même. Lors de la première séance, le maître d’armes pose les bases de son sport et explique précisément l’objectif de ces séances :
« Votre corps parle, écoutez-le. Extirpez vos sensations les plus profondes et utilisez-les. Déchargez la colère, transpercez la culpabilité. Tuez la honte, libérez-vous. »
12La violence peut être totale lors d’un combat d’escrime. Le masque rend l’autre anonyme, les personnages ne voient pas qui elles affrontent, tandis que l’armure les protège intégralement. Le fleuret ne coupe pas, le risque de blessure étant minime, elles peuvent y projeter toutes leurs pensées. Pour guérir, elles doivent frapper, rendre ce qu’elles ont subi : frapper toujours plus fort jusqu’à se libérer de la peur.
13L’imagerie de l’album n’a pourtant aucune violence en elle. Au contraire, le dessin est très doux, presque flou parfois. Les émotions sont puissantes, violentes, brutales et pourtant le trait de l’auteur et les couleurs en gouache apportent un contraste avec le discours et les gestes. Les cases, tout d’abord, n’ont pas de bordures, la séparation se fait d’elle-même. Les personnages gardent leurs traits, excepté pendant les leçons d’escrime où les corps se dissimulent, l’armure blanche se fondant presque sur l’absence de décor qui caractérise ces scènes. Les visages disparaissent sous les masques d’escrime, les différences de taille ou de corpulence n’apparaissent plus car seul le combat à l’épée compte, figurant celui qu’elles mènent à l’intérieur.
14Chaque duel où la personne disparaît devient abstrait, allant même parfois plus loin, le combat psychologique dépassant le physique et devenant sur le papier un affrontement onirique où l’arme devient plus qu’une extension de la personne mais bien la personne elle-même, qui détruit et découpe son adversaire sans pour autant que cela arrive dans la réalité. Faisant prévaloir le combat psychologique, l’auteur rappelle l’intérêt thérapeutique de ces séances et montre le combat intérieur que vivent ces femmes sans avoir recours aux mots. Il s’en remet au langage corporel qui vit un réapprentissage sensoriel : touché, être touché. Au fil de l’album se suivent des séances d’escrime et des souvenirs marquants de la vie des trois héroïnes. Le lecteur découvre par touches leurs souffrances et stigmates ainsi que les relations que ces trois femmes vont nouer. Touchées contient étonnamment peu de dialogues pour un thème lié à la reconstruction psychique. Quentin Zuttion fait le choix d’observer silencieusement en interpellant par des images à la fois douces et puissantes le lecteur. Le dessin n’est pas chargé de commentaires, il représente l’angoisse de la situation, sans se charger d’un pathos superflu : les émotions sont fortes sans être misérabilistes.
15Le titre a par ailleurs une double signification. S’il faut frapper en escrime, l’injonction de la femme forte qui lutte contre sa victimisation est pourtant rejetée. Elles n’ont pas besoin de l’être, car la force de façade n’est rien sans la reconstruction et l’acceptation des moments de faiblesse. Lucie, par exemple, ne veut pas être « forte » ni « courageuse », elle veut « être légère » et retrouver la légèreté de la vie sans avoir peur ou être en colère. Par l’escrime thérapeutique, elle peut se décharger de tous ses sentiments et frapper pour évacuer toute sa colère et ses émotions. Les trois héroïnes passent d’ailleurs par ce stade de décharge, frappant de plus en plus vite et de plus en plus fort leurs adversaires, en criant parfois, jusqu’à tomber de fatigue, épuisées.
16Après ces épreuves, elles ne sont pas plus fortes ou guéries, mais l’acceptation de leur vulnérabilité les rend, en un sens, plus libres. C’est à la manière d’une éclosion qu’elles vont ainsi pouvoir renaître et s’épanouir. Ce sont avant tout ces logiques contradictoires que l’auteur a voulu mettre en avant. Ces héroïnes ne forment pas un bloc et n’ont pas d’histoires communes. Lucie, malgré les coups qu’elle a subis, a par exemple du mal à contenir sa colère face aux caprices de son fils. Cela ne fait pas d’elle une mauvaise mère. Tamara recherche la violence et l’ivresse dans ses relations mais est également incapable d’affronter ses propres sentiments pendant une partie de l’album. Nicole a un parcours beaucoup plus flou, peu abordé, qu’elle dit même avoir oublié. Le lecteur comprend qu’elle est plus âgée que les deux autres et que son « histoire » a eu lieu au lycée sans qu’elle puisse s’en souvenir. Elle dit même s’être rendue à l’enterrement d’un de ses agresseurs sans vraiment savoir pourquoi. Mais grâce à ces séances, son corps se « libère » peu à peu, son dos ne lui fait plus mal et elle ressent de nouveau la douceur quand quelqu’un la touche. C’est à la fois grâce aux séances et aux rencontres qu’elles vont se reconstruire et s’accepter, sans pour autant se venger ou rendre la pareille.
17Au cours de leurs séances, elles deviennent des sortes de sœurs d’arme, empruntant ensemble le chemin de leur liberté. Elles se frappent, se battent mais se soutiennent et se protègent également. Elles n’ont pas besoin d’avoir le même parcours ni le même âge, leur amitié va dépasser toutes les cases préétablies par la société. Elles forment une équipe qui va au-delà du sport et leur permet de s’entraider et de s’accepter de nouveau. Mélanger ainsi trois générations de femmes permet également d’aborder d’autres thématiques comme celle du langage et/ou de la sexualité et de la sororité. Tamara est très « libérée » et parle de façon crue, mais cela ne l’empêche pas de s’attacher à Nicole qui est bien plus silencieuse et discrète, c’est même Tamara qui va faire redécouvrir la sensation de désir à son aînée, elle lui apprend que l’on peut toujours ressentir et faire du bien à l’autre. Ce sont les failles que chacune ressent qui leur permet d’être si soudées et ce sont ces rencontres qui redéfinissent leur nouvelle vie.
… À la folie de Sylvain Ricard & James
18Ce troisième album de Sylvain Ricard (scénario) et James (dessin) est encore différent des deux précédents. Le premier abordait les féminicides, le second la sororité. Ici, aucun mort ni thérapie sportive de groupe. Le récit des protagonistes est simple, et la spirale de la violence est prévisible, presque « classique » (fig. 3).
Fig. 3. – Sylvain Ricard et James, … À la folie, Paris, Futuropolis, 2009.

19Assis l’un à côté de l’autre sur un canapé, le couple (un homme et une femme) raconte leur histoire, depuis leur rencontre jusqu’à leur séparation et au-delà. Narrateur l’un après l’autre, ils passent en revue leur vie commune, chacun racontant les moments vécus avec l’autre. Tous les deux sont à la même université. Lui est un bel homme, populaire et décomplexé, qui passe des amphithéâtres aux bars, toujours accompagné de « filles faciles » avec lesquelles lui et ses amis passent leur temps. Elle est tout le contraire. Réservée et discrète, elle l’observe de loin sans jamais oser aller le voir. Puis un soir, lors d’une fête étudiante, ils se rencontrent et leur relation débute. Six mois après, ils sont mariés et s’installent dans un grand appartement qu’elle décore et aménage seule pendant qu’il travaille et subvient à leurs besoins. Puisqu’elle n’a pas besoin de travailler, elle n’a qu’à le combler et n’a pas à se tracasser des soucis quotidiens du monde du travail18. Tout semble donc « parfait » quand le premier coup arrive. « Ce n’est rien, une bête gifle, il était très énervé, mais c’est bon c’est réglé, il s’est excusé. Il a juré qu’il ne recommencerait pas. » Et puis, ajoute-t-elle, « c’est sa faute, elle l’avait énervé, il subit tant de pression au travail, il faut le comprendre19 ». À partir de cet épisode, le lecteur comprend la suite de l’histoire… Les « bêtes » gifles ne vont pas cesser et la spirale de l’emprise et des violences ne va aller qu’en s’accélérant.
20En utilisant le format de la double narration où chaque personnage raconte sa version des faits, les auteurs abordent de manière directe le sujet des violences conjugales. Le lecteur connaît le point de vue de chacun, peut comprendre et s’identifier, et se confronter à certains raisonnements. Le couple s’adresse directement à lui lors des scènes où ils sont assis l’un et l’autre sur le canapé. À l’image d’une thérapie de couple, ils racontent, chacun leur tour, les moments forts de leur vie commune. Cependant, même s’ils racontent une histoire partagée, ils ne communiquent pas entre eux, ne se répondent pas et n’existent pas, pour ainsi dire, l’un pour l’autre. Chacun se raconte au lecteur. Aucun des personnages ne porte de nom. « Il » est marié à « elle » et les autres protagonistes du récit sont nommés de façon générique : « mère », « meilleure amie », « patron », etc. Ce processus d’anonymisation des personnages du récit permet de rendre l’histoire universelle. N’importe qui peut s’identifier aux personnes du couple ou bien à l’entourage. Dès les trente premières pages, le lecteur connaît la suite du récit et la centaine de pages restantes confirme ce pressentiment d’un mécanisme désormais bien documenté. Par ce choix de ne pas personnifier le récit, les auteurs rendent l’histoire universelle, elle dépasse les personnages de cette fiction. Il ne s’agit pas de signifier que les violences conjugales sont « normales » et communes à tous, mais bien qu’elles sont systémiques et qu’elles répondent à un mécanisme d’emprise qui a été largement étudié et médiatisé en France par la psychologue Muriel Salmona20. La construction du récit passe d’un point de vue à l’autre permettant au lecteur d’appréhender les doutes, les questionnements et leur vie après ces violences.
21S’ils relatent les épisodes de leur vie commune, ils décrivent également leurs moments de solitude. Pour « elle », cela se traduit par les instants où elle a évoqué les violences qu’elle subissait à sa meilleure amie, à sa mère21, au médecin22 ou encore aux agents de police. Pour « lui », ce sont les moments où il doute, où il se confie à son patron, ou même aux instances judiciaires qui se sont présentés. L’album n’est plus seulement un témoignage, il permet de voir ce qui entoure un couple dont le mari est auteur de violences conjugales et la femme, victime. C’est le cas lorsque la mère de la victime trouve des excuses au mari violent : « C’est normal, c’est hormonal », ne soutenant pas sa fille qui se confie. Cette dernière est également confrontée à l’absence de soutien des médecins qui ne peuvent pas attester les violences puisqu’elle vient consulter trop tardivement et que les blessures sont en partie déjà cicatrisées. Elle témoigne également de la solitude qu’elle éprouve lorsqu’elle est mise à l’abri dans un foyer qui accueille les femmes victimes de violences conjugales. Avec ces versions et la dichotomie qui est faite du récit, le lecteur peut ainsi appréhender toute la dureté de cette relation. « Elle » l’aime pour ce qu’il est. « Il » l’aime car « on ne fait pas sa vie avec une traînée, il faut une vraie femme, pas une pute ». Pour elle, leur mariage était le plus beau jour de sa vie, pour lui c’était un moyen de commencer un réseau. Et ces différences se font de plus en plus prégnantes. Il ne voit pas la violence qu’il lui fait subir et concède seulement « qu’il m’est arrivé de lui donner une gifle ». La minimisation de la violence reflète, là encore, l’absence de considération pour l’autre. Il ne cesse de répéter qu’il l’aime mais n’hésite pas à la frapper pour ensuite lui faire des reproches et reporter la faute sur ses comportements puisqu’« elle ne peut pas se rendre compte, je subis beaucoup de pression au travail et elle reste toute la journée à la maison ». Le cycle de la violence se répète et si l’espoir qu’elle sorte de cette relation naît avec la traduction en justice de ses actes, il meurt bien vite quand elle le recontacte avec l’espoir de le retrouver ou qu’il écope simplement d’un rappel à la loi grâce à ses relations professionnelles. Ainsi, toutes les procédures qu’elle a pu engager deviennent caduques et ils finissent par se retrouver.
22Cet album se différencie des précédents en ne donnant aucun espoir à la femme de ce couple. Ne négligeant aucun aspect des violences conjugales, l’auteur rappelle que l’humain est complexe et soumis à des mécanismes psychiques le rendant dépendant de ses émotions et/ou sentiments. L’emprise qu’il a sur elle est quasi totale. Vivant un véritable enfer, elle fuit, puis une fois en sécurité, elle n’aspire qu’à le retrouver, oubliant les coups et les viols et ne pensant qu’à leurs premiers jours. Elle est soulagée qu’il n’y ait aucune suite judiciaire et il lui pardonne ce comportement. Pour un moment, une nuit, ils sont comme au premier jour. Mais bien évidemment le cycle des violences reprend23.
23L’album se termine comme il a commencé, sur le canapé alors qu’ils s’adressent l’un et l’autre au lecteur. Cependant, ils interagissent l’un avec l’autre pour la première fois. En effet, alors qu’ils racontent leur réveil au lendemain d’une nuit de retrouvailles, il ajoute le geste à la parole et la gifle en expliquant ses raisons. Ils ne se parlent pourtant pas directement, parlant de l’autre à la troisième personne comme toujours. Mais il la frappe puis la console, lui disant qu’il l’aime, qu’il s’excuse mais que c’est bien de sa faute à elle, puis passant immédiatement à autre chose, il résume sa journée de travail ainsi : « Le reste de la journée s’est plutôt bien passé contrairement à ce que j’avais anticipé. » Séparant privé et professionnel, il se dédouble et détache ses actes et sa personne. Par cette phrase, placée là comme une maxime, il suit le phénomène de pensée où l’on sépare l’homme de ce qu’il produit, retirant à l’acte commis sa gravité puisqu’en dehors du privé, il est une autre personne. Il n’a ainsi pas à se remettre en question et peut continuer à ne pas considérer sa violence comme problématique. Seulement, si sa vie est tournée vers son travail, sa vie à elle n’est que privée puisqu’elle n’a aucun moyen d’échapper à son emprise. Par son « statut » de femme au foyer et sa soumission aux règles qu’il a établies, sa relation avec lui est, pour ainsi dire, toute sa vie24, alors que pour lui ce n’est qu’un détail dans son objectif de carrière. À la manière de tout embrigadement psychologique, il l’éloigne de toute autre relation qui pourrait lui faire perdre de son pouvoir d’emprise.
Une place au paradis de Thomas Mosdi et Pierre Lorenzi
24Le dernier album de ce corpus Une place au paradis de Thomas Mosdi (scénario) et Pierre Lorenzi (dessin) raconte l’histoire de Mélanie et de son compagnon Romain. Ils viennent d’emménager dans un immeuble avec leur fille de cinq ans, Lilou. Romain travaille dans une concession automobile tandis que Mélanie s’occupe de leur fille et reste à la maison. Elle a quitté son ancien poste à la demande de son compagnon afin de s’occuper uniquement des tâches ménagères et de leur fille. Romain la bat, l’insulte, la prive de tout et se comporte de façon extrêmement jalouse (fig. 4).
Fig. 4. – Couverture. Thomas Mosdi et Pierre Lorenzi, Une place au paradis, Paris, Marabout, coll. « Marabulles », 2019.

25La violence est cependant bien différente en comparaison de la bande dessinée À la folie. Les auteurs ont en effet voulu montrer une violence crue dès les premières pages. L’héroïne apparaît après sa fille et son compagnon dont on voit les visages dès la première page. Mélanie est effondrée au sol, comme morte. Le lecteur voit ses pensées et ses souvenirs et peut croire qu’elle revoit sa vie avant de mourir. Mais c’est un dialogue interne auquel il assiste. Elle se parle à elle-même et donne des ordres à son corps afin de se relever, malgré la douleur, comme s’il n’était pas capable de s’exécuter sans qu’elle donne de tels ordres. Une fois debout, elle perd du sang, se rince puis va réconforter sa fille qui a, en partie, assisté à la scène. Dans ces trois premières pages, le lecteur a vu la violence sans voir de coups et comprend la situation par les mots du compagnon violent : « Vous vous êtes vraiment donné le mot pour me pourrir la vie », par la peur de l’enfant (yeux écarquillés, point d’exclamations en fin de phrases et questions d’incompréhension : « Pourquoi papa est en colère ?! Il est fâché après toi ? Il t’a fait mal ?! Papa, il me fait peur… »), et à travers la souffrance de la mère (inconsciente au sol un court moment, crachant du sang, puis tentant de rassurer sa fille en détournant les réponses pour lui faire oublier ce à quoi elle vient d’assister)25.
26L’histoire de Mélanie est celle de milliers d’autres femmes, et c’est cette capacité à montrer la réalité des violences conjugales qui donne une place si spéciale à cet album dans ce corpus. Les trois précédents étaient tournés vers l’espoir. On y voyait des femmes en souffrance, mais déjà sorties du cercle de la violence. Mélanie est au cœur de la spirale des coups. Cet album n’est pas uniquement sombre, les signes d’espoir sont nombreux au fil des pages. Après l’introduction, Mélanie accompagne sa fille à l’école, tête baissée et une paire de lunettes de soleil sur le nez, alors qu’elle attend l’ascenseur, elle croise l’un de ses voisins, jovial qui descend par les escaliers. Le dessin est très clair : il est lumineux et souriant, ses vêtements et cheveux rayonnent de couleur chaude tandis que Mélanie est sombre et habillée de couleur froide. Il est l’espoir d’un changement futur.
27Cet album est spécifique : il montre la violence conjugale et intrafamiliale, le parcours d’une femme victime de violences conjugales, mais il fait également rentrer en ligne de compte toutes les personnes proches et leurs réactions. Mélanie a affaire à un compagnon violent, elle est également liée à sa fille Lilou, mais aussi à sa voisine Katia26 qui va l’accueillir et la protéger de Romain. On trouve également la directrice de l’école de Lilou qui s’inquiète de l’attitude de celle-ci et comprend ce que vit Mélanie, puis Mathieu, un autre voisin qui va l’accompagner pour l’aider à sortir de cette spirale de violences ou encore ses voisins de palier qui n’interviennent pas : « Chacun chez soi et les moutons seront bien gardés ! » Lorsque toutes ces personnes sont présentes, l’album change d’angle. Au départ, le récit ressemble à des histoires que l’on peut entendre dans les médias : la femme est battue, brimée, certaines personnes essayent d’intervenir sans succès, d’autres font mine de ne rien voir et pour Mélanie, les moments de violences se succèdent, entrecoupés de moments appelés « lune de miel », comme on a pu en voir dans les trois albums précédents.
28Mais Mathieu, le voisin, insiste et Mélanie accepte de lui parler plus longuement. Il lui raconte son histoire à lui et celle de sa mère, qui, comme Mélanie, avait un compagnon violent, mais qui, contrairement à Mélanie, n’a pas pu en réchapper et en est morte. Mû par la tristesse, mais aussi la colère, Mathieu va tout faire pour aider Mélanie à sortir de cette situation d’emprise. Il se dit même prêt à tuer lui-même Romain pour venger sa mère et protéger Mélanie. Cette décision doit cependant lui appartenir, elle ne peut sortir de cette situation que si elle le décide. Contrairement aux autres albums, Mélanie ne peut pas juste quitter son mari bourreau, son enfant est en jeu. Mathieu a pourtant tout prévu et lui indique l’adresse d’une maison d’accueil pour les femmes dans sa situation. Alors en danger de mort, elle doit se cacher et elle accepte d’être aidée par des institutions qui la protégeront de son compagnon violent. Dans cet album, la reconstruction n’est pas la clé, Mélanie doit d’abord se libérer et disparaître pour survivre tout en laissant Romain vivre.
⁂
29Ces quatre albums sont à la fois différents mais parfaitement complémentaires. L’un est sombre et n’offre que la mort de l’autre comme solution libératrice sans pour autant donner de l’espoir aux victimes de féminicides ; l’autre est une approche sportive de la reconstruction dans le but de se réapproprier son corps ; un troisième encore raconte l’histoire destructrice d’un couple universel qui, par chaque détail, raconte l’histoire de toutes les violences conjugales, et le dernier enfin est une ode à l’espoir malgré une spirale de la violence. Et pourtant, parmi ces nombreuses différences, il apparaît évident aux yeux des lecteurs que les violences conjugales et intrafamiliales sont mues par des schémas d’emprise et des fonctionnements systémiques. Connaître et comprendre les phases de violences et de lunes de miel qui s’enchaînent au sein du couple ou encore comprendre les biais psychologiques qui ont lieu en amont des coups, font de ce corpus une œuvre d’une rare violence. Le rapport à la police est peu présent dans ces albums. Parfois seulement inutiles, les agents de police ne représentent pas une porte de sortie pour les victimes de violences conjugales. Cette position ambivalente est à la fois due au peu de pouvoir qu’ont les agents pour s’immiscer dans ces affaires mais également à la faiblesse du système judiciaire tant qu’il n’y a pas féminicide. Les auteurs de ces bandes dessinées témoignent par cette absence de l’inefficacité des forces de l’ordre dans les affaires de violences conjugales. De nombreux faits divers en France relatent régulièrement des affaires dans lesquelles les femmes avaient porté plainte une ou plusieurs fois et où la police n’était pas intervenue, à l’image de Yasemin, la dernière victime de féminicide en 2020 qui s’est rendue plusieurs fois au poste de police pour porter plainte contre son mari violent a également tenté d’alerter une assistante sociale. Elle est morte devant ses enfants le 23 décembre à 25 ans. Le fait que des femmes meurent sous les coups de leur conjoint ou ex-conjoint malgré des signaux d’alerte auprès des forces de l’ordre participe à cette défiance dont témoignent peut-être ces bandes dessinées. Quand la police et la justice sont présentes dans les albums, elles sont soumises aux jeux de pouvoirs qui les dirigent, faisant alors rentrer en ligne de compte des considérations autres, telle que la corruption ou les états d’âme personnels des intervenants. Or si la justice établit des limites claires dans les libertés conjugales, son application reste relative à l’appréciation humaine.
30La simplicité du dessin allège le ton et les différents auteurs font tout pour rendre la lecture plus « plaisante » en alternant des passages heureux aux ceux plus sombres des violences. Alma retrouve l’espoir grâce à Jean, Lucie grâce à ses amies et Mélanie grâce à Mathieu. « Elle », dans le couple « type » d’auteur et de victime de violences conjugales, est encore aveuglée par son premier amour et n’a personne sur qui compter au-delà d’elle-même, sa culpabilité l’empêchant de se sauver. Ces bandes dessinées deviennent alors des recueils d’espoir : l’espoir d’aimer de nouveau, de retrouver l’autre, de ne plus souffrir et de s’accepter malgré les maltraitances. L’espoir de se libérer et de pouvoir enfin tourner le dos à ce passé et vivre de nouveau.
Notes de bas de page
1 Ce terme est entré en 2015 dans le dictionnaire Robert tout en restant non reconnu par l’Académie Française. Depuis 2017, le journal Libération publie une cartographie mensuelle des féminicides sur le territoire français. Le Monde mène un travail approfondi d’enquêtes concernant les féminicides depuis 2019.
2 Le terme féminicide, défini comme « meurtre de femmes commis par des hommes parce que ce sont des femmes » fut utilisé publiquement pour la première fois en 1976 à Bruxelles au Tribunal international des crimes contre les femmes. Voir Lydie Bodiou, Frédéric Chauvaud, Ludovic Gaussot et al. (dir.), On tue une femme. Le féminicide. Histoire actualités, Paris, Hermann, 2019.
3 Voir, pour l’exemple québécois, Geneviève Lessard, Lyse Montminy, Elisabeth Lesieux, Catherine Flynn, Valérie Roy, Sonia Gauthier et Andrée Fortin, « Les violences conjugales, familiales et structurelles : vers une perspective intégrative des savoirs », Enfances Familles Générations, 22, 2015, en ligne.
4 Peggy Adam, Luchadoras, Genève, Suisse, Atrabile, 2006.
5 Quentin Zuttion, Touchées, Paris, Payot Graphic, 2019.
6 Quentin Zuttion, entretien avec Marius François, NEON, 18 septembre 2019.
7 Sylvain Ricard et James… À la folie, Paris, Futuropolis, 2009.
8 Thomas Mosdi et Pierre Lorenzi, Une place au paradis, Paris, Marabout, coll. « Marabulles », 2019.
9 Diana Washington Valdez, The Killing Fields: Harvest of Women: the Truth about Mexico’s Bloody Border Legacy, Mexico, Inglès, 2006.
10 Jules Falquet, « Des assassinats de Ciudad Juárez au phénomène des féminicides : de nouvelles formes de violences contre les femmes », Contretemps, 2014, en ligne.
11 Vianey Pichardo, « Seis ciudades mexicanas, en el top 10 de las más violentas del mundo », [unotv.com].
12 Se reporter à Cathy Fourez, « Narrer le féminicide au Mexique : un art de l’urgence », dans Lydie Bodiou, Frédéric Chauvaud, Ludovic Gaussot et al., (dir.), On tue une femme, op. cit., p. 295-318.
13 Ce chauffeur est une allusion aux accusations d’agressions sexuelles commises par des chauffeurs de bus à l’encontre de femmes travaillant de nuit dans les maquiladoras, les manufactures américaines installées sur la frontière entre le Mexique et les États-Unis. Voir « La police de Ciudad Juárez recherche « Diana, la chasseuse de chauffeurs » dans Le Monde avec l’AFP, 4 septembre 2013, extrait de : Les damnés de Juárez de Rémy Ourdan. Voir également Jean-Christophe Rampal, « Ciudad Juárez, symbole du féminicide », dans Lydie Bodiou, Frédéric Chauvaud, Ludovic Gaussot et al. (dir.), On tue une femme, op. cit., p. 113-128.
14 Jean-Christophe Rampal et Marc Fernandez, La ville qui tue les femmes : enquête à Ciudad Juárez, Paris, Hachette, 2005.
15 Voir [www.lacitedesmorts.net].
16 L’auteur n’a pas assisté aux séances afin de ne pas déranger les femmes qui y participaient. Il a cependant recueilli des témoignages de certaines de ces femmes pour créer son récit.
17 La psychothérapeute permet de mettre des mots sur la colère et les émotions qui ressurgissent lors des combats, c’est l’agrégation du sport et du suivi psychologique qui permettent l’efficacité des séances.
18 D’après sa meilleure amie qu’elle voit souvent et qui lui envie en partie ce « mode de vie », p. 27-30.
19 Cette idée reçue, souvent partagée, a fait l’objet de nombreux travaux qui ont analysé le mécanisme des violences conjugales, permettant de nuancer ces aprioris. C’est le cas notamment du livre de Victoria Vanneau, La Paix des ménages. Histoire des violences conjugales xixe-xxie siècle, Paris, Anamosa, 2016. Voir aussi Lydie Bodiou, Frédéric Chauvaud, Ludovic Gaussot et al. (dir.), Le corps en lambeaux. Violences sexuelles et sexuées faites aux femmes, Rennes, PUR, 2016.
20 Muriel Salmona, « L’emprise ou la dissociation traumatique à l’œuvre », Soins psychiatriques, 315, 39, 2018, p. 20-24.
21 Voir Katherine Péloquin, Marie-France Lafontaine et al., « Romantic attachment, dyadic empathy, and intimate partner violence: Examination of the direct relationships and underlying mechanism », Journal of Social and Personal Relationships, 28, 2011, p. 915-942.
22 Roger Henrion, Les Femmes victimes de violences conjugales, le rôle des professionnels de santé : rapport au ministre chargé de la santé, La Documentation française, 2001.
23 Ce cycle de la violence fait figure de constante dans l’histoire, Victoria Vanneau, La Paix des ménages, op. cit. Voir aussi Sylvie Kaczmareck, La violence au foyer. Itinéraires de femmes battues, Paris, Imago, 1990.
24 Comportement « caractéristique » de la « femme battue », Marie-France Hirigoyen, Femmes sous emprise, Paris, Oh ! Éditions, 2005.
25 Les autres scènes de violences sont toutes psychologiques ou suggérées sans jamais montrer les coups si ce n’est pour la dernière où Mélanie se défend à l’aide d’un couteau et entaille le bras de Romain. Jean-Luc Tournier, L’enfant exposé à la violence conjugale, Louvain-la-Neuve, De Boeck, 2012 et Roland Coutenceau et Muriel Salmona (dir.), Violences conjugales et famille, Paris, Dunod, 2016.
26 Katia sert aussi de lien entre Mélanie et Mathieu et aide ce dernier à organiser la fuite de Mélanie en foyer pour femme battue avec enfant.
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