Les petits ports de la basse vallée de la Loire

1En ce qui concerne la Loire, l’exercice d’inventaire conduit à des conclusions assez proches de celles observées pour la Gironde et la base vallée de la Garonne : ni Nantes, ni Bordeaux, ne disposèrent d’avant-port à l’embouchure de leur fleuve. La pêche et la saliculture d’abord, le transport de produits agricoles ensuite, ont de la même manière stimulé la naissance de plusieurs lieux d’accueil pour les navires. S’agissant la Loire, les géographes, les historiens et les archéologues lui ont apporté un éclairage nouveau au cours des deux dernières décennies. Les campagnes de fouilles successives conduites depuis les années 1990 au niveau de l’antique agglomération de Ratiatum (Rezé1) et, plus globalement, l’approche géoarchéologique promue par les contributeurs à la revue Aesturia, ont actualisé les connaissances initialement fournies par Marcel-Hadolphe Hérubel2. De Nantes jusqu’à Saint-Nazaire, l’estuaire ligérien est bordé par près de 150 km de rives, si l’on prend en compte leur trait plus découpé au Moyen Âge qu’aujourd’hui. L’existence de quelques 25 ports et de mouillages, soit fossilisés dans le paysage ou subsistant aujourd’hui à l’état de relique, a été mise en évidence3. Le croisement de ces données produit la densité d’un site portuaire tous les 6 kilomètres, ce qui représente un taux de concentration assez inférieur aux observations faites en Basse-Seine. Mais là aussi, la toponymie du xix^e siècle laisse à penser que d’autres lieux de très faible importance – une trentaine au total – ont pu être employés pour des fonctions portuaires au cours de la période médiévale.

2Les travaux conduits dans la Basse-Loire ont montré que ces points de transbordement trouvent leur origine au Moyen Âge, dans la période comprise entre le xi^e et le xiv^e siècle, les ports antérieurs comme celui de Rezé ayant été abandonnés. L’étude du site de Cordemais menée en 1996 par le service régional de l’Inventaire des Pays de la Loire en offre une bonne illustration4. Le portum de Cordimense était situé sur la rive droite du fleuve, à la moitié du cours de l’estuaire, et desservait son bourg fondé autour des années 1040-10505. Appelé « port Saint-Nicolas », du nom du prieuré fondé à proximité par les moines de Redon, il fut établi à la faveur d’un étier, celui du Tertre, qui reliait le marais du Lot à la Loire. Son fonctionnement est attesté au cours du xii^e siècle dans le trafic salicole. Le seigneur de Cordemais donna audit prieuré ses parts des revenus portuaires6 : l’ancrage, le voilage, le péage et le pontonnage. Comme tous les autres, il devait son existence à la qualité du lieu où il fut implanté. Tant que l’étier resta suffisamment large et profond, il continua de participer à la vie maritime locale. L’alluvionnement fluviomaritime empâtant insensiblement la rive, il finit par être absorbé dans les marais au cours du xix^e siècle.

3Les sites du Pellerin et de Port-Launay se signalent dans un acte de 1542, par lequel est fait mention d’un bac qui reliait les deux ports. Le Pellerin est décrit au xviii^e siècle par Jean Ogée comme « un petit port où il y a toujours beaucoup de vaisseaux et de barques [et où] on y carène aussi7 ». À Port-Launay, d’après un compte de 1473, un droit d’un boisseau de blé ou de sel était perçu sur les navires qui y mouillaient8. Selon un aveu de 1409, il existait aussi un bac qui traversait l’estuaire à partir du port de Mindin. Un autre fonctionnait entre Paimboeuf et Donges9. Quant au port de Montoir, il était encore visible en 1690. Il était « formé par un canal qui avoit flux et reflux. Il fut comblé par un ouragan qui enleva tous les foins des prairies voisines, et les transporta dans ce canal ». Jean Ogier ajoute à propos du port adjacent de Méan qu’il « n’étoit alors qu’un petit ruisseau, avec un mauvais pont de bois et un droit de péage10 ».

Le complexe portuaire de Nantes

4Assez étonnamment, la mise en place du dispositif portuaire de Nantes n’a fait l’objet d’aucun réel examen. Malgré ce que laisserait entendre le titre de l’étude que Paul Jeulin publia en 1929 – L’évolution du port de Nantes […] depuis les origines – le port à proprement dit, abordé en tant qu’outil, ne bénéficia que d’un propos très sommaire11. Par la suite, Henri Touchard éluda quasiment la question, ces deux auteurs se concentrant en réalité sur les trafics commerciaux12. Il n’y a bien que Jean-Pierre Leguay au travers de son analyse du réseau urbain breton, Michel Le Mené dans un article consacré à la construction à Nantes au xv^e siècle, et Noël-Yves Tonnerre qui proposèrent une lecture complémentaire de celle très datée des historiens nantais du xviii^e siècle13.

5La cité de Nantes fut établie à proximité du point de confluence entre la Loire et de l’Erdre, sur un chapelet de buttes bordé par des marais – paysage assez classique dans cet estuaire – et face à une série de bancs sédimentaires bientôt transformés en prairies, qui permettaient de franchir en plusieurs étapes le cours du fleuve. Les premiers aménagements portuaires médiévaux, héritiers du Portus Namnetum, auraient été accomplis au vi^e siècle. Le récit de Fortunat, prélat et poète de l’époque, relate des travaux menés entre 549 et 582, sous l’autorité de l’évêque de la cité, Félix. Voici la narration élogieuse qu’en fit l’évêque de Poitiers14 :

« Génie bienfaisant, Félix modifie la nature pour la corriger, et contraint les vieux fleuves à prendre un nouveau cours. Une digue les force à quitter la route qui les conduisait à la mer, et à suivre celle que leur interdisait la nature. Ici vous comblez une vallée, là vous abaissez une montagne ; l’une se soulève, l’autre s’enfonce. Tout est bouleversé, tout change d’aspect et de forme ; la montagne devient vallée et la vallée devient montagne. À l’endroit même où l’eau fuyait à travers la plaine, la terre amoncelée forme un rempart inébranlable ; où passaient les navires, cheminent à présent les chariots. Le flot poussé par votre main franchit la barrière que lui opposaient les collines, et le fleuve obéissant va où vous le menez, en dépit de la montagne. Au point où son cours était le plus rapide, il s’arrête à présent malgré la vitesse acquise ; une colline sortie tout à coup du sol le force à rebrousser chemin. Les eaux qui se précipitaient avec une violence inutile, sont aujourd’hui asservies à l’homme et serpent à le nourrir. On fait la moisson sur l’ancien lit du fleuve, et c’est grâce à vous que l’eau donne au peuple du pain. Avec quelle autorité ne devez-vous pas conduire l’esprit mobile des hommes, vous qui imposez votre volonté aux flots impétueux ! »

6Au cours du xviii^e siècle, ce texte a donné lieu à deux interprétations différentes et très hypothétiques, qu’il n’est toutefois pas possible de vérifier ni de réfuter. L’ancien maire de Nantes, général des finances et subdélégué de l’intendance, Gérard Mellier, revint sur cet épisode dans un essai de 1719 qu’il consacra à l’histoire de sa cité. S’appuyant de surcroît sur un extrait du bréviaire nantais imprimé en 1556 qui ne paraît guère plus explicite, il relaya une opinion assez répandue à l’époque : les travaux conduits par l’évêque furent destinés au détournement et à la canalisation de l’Erdre, ce qui aurait permis l’assèchement des marais adjacents15. Une trentaine d’années plus tard, nourrissant son propos à partir d’observations personnelles et de la mémoire locale, l’abbé Nicolas Travers – comme plusieurs autres avant et après lui – pensa que cette entreprise visa la réalisation de terrassements sur le fleuve lui-même16. Les prairies de Mauves et de la Madeleine n’auraient formé jusque-là qu’une seule et même langue de terre rattachée à la rive droite de la Loire, le long de laquelle s’écoulait le Seil qui confluait au niveau de l’extrémité occidentale de cet ensemble alluvial. Le projet de l’évêque consista à faire creuser un canal au travers de la presqu’île. Ainsi, le cours du fleuve était autorisé à longer directement les rives de la cité. L’ouvrage aurait été complété d’une tranchée à l’embouchure de l’Erdre, le tout produisant un effet de chasse salutaire dans ce bras d’eau dont la configuration facilitait le colmatage.

7En outre, cette reconfiguration du système hydrologique aurait été accompagnée d’autres aménagements, en particulier pour protéger les parties basses de la ville : l’édification d’une digue jusqu’au débouché de la Chézine pour surélever les berges ; plus en aval, le rabotage de rocher de Miséri qui obstruait le cours du fleuve au niveau de Chantenay et gênait la remontée des navires ; l’établissement d’une chaussée à hauteur de la porte de la Poissonnerie pour relier les deux rives (figure 29). Quel que soit le degré de véracité de ces supputations, et en dépit du caractère apologique de la narration de Fortunat, l’initiative de Félix présente un trait assez caractéristique des travaux menés en milieu fluviomaritime. Elle ne visait pas seulement à faciliter la navigation jusqu’aux abords de Nantes, mais servait plus globalement à maîtriser les eaux, de sorte qu’il était possible ici d’assécher les terres humides destinées à l’agriculture, là de curer un bras d’eau sensé accueillir des navires et leur trafic. Bien souvent, et jusqu’à un temps très avancé dans le Moyen Âge, la fonction portuaire, même essentielle pour la population qui l’exploitait, ne justifiait pas à elle seule la mise en œuvre de tels efforts. Les aménagements conséquents, pour être entrepris, supposaient servir plusieurs intérêts urbains ou activités économiques.

8De ces premiers travaux d’envergure, l’espace portuaire nantais aurait hérité d’une configuration bipartite : un premier secteur s’étirait le long du cours encore incertain de l’Erdre ; et un second occupait, de part et d’autre du point de confluence, les berges de la rive droite de la Loire.

9Aux abords de Nantes, la canalisation de l’Erdre, peut-être déjà entreprise sous l’évêque Félix au vi^e siècle, fut complètement réalisée au xiii^e siècle, sous l’impulsion successive de Guy de Thouars, Pierre de Dreux, dit Mauclerc, et Jean I^er. Empiétant pour cela sur les territoires de l’évêque, ce qui leur valut un long conflit avec les autorités épiscopales jusqu’au règlement de 1259, les travaux démarrèrent en 1207 par l’édification du château de la Tour Neuve près du rivage17. L’ambition consista ensuite à étendre vers le nord et vers l’ouest, au-delà des remparts antiques qui enserraient la ville, une enceinte capable de protéger une partie de ses faubourgs, alors en plein essor. Le nouveau tracé du périmètre urbain devait englober le bourg du Main (paroisse Sainte-Catherine) et l’essentiel de la paroisse Saint-Nicolas, ce qui pour ce faire exigeait d’enjamber l’Erdre. Du même coup, il devenait nécessaire de fixer son lit afin que, tout à la fois, la rivière restât navigable et participât à la défense des fortifications, sans exposer Nantes aux débordements et à l’insalubrité que cette zone humide pouvait potentiellement produire18. Aussi, les travaux consistèrent à canaliser et à rétrécir l’Erdre sur la section qui traversait la ville, tout en rectifiant son cours afin de l’éloigner des remparts gallo-romains et de la place des Changes. L’ouvrage commandait du même coup de déplacer la confluence plus en aval, à l’endroit dont elle ne varia plus ensuite19. Ces ouvrages de canalisation furent réalisés en 122020. Puis, profitant de la vacance du siège épiscopal en 1227, Pierre de Dreux fit accélérer la réalisation du projet ce qui permit d’achever la nouvelle clôture21. L’on tenta de creuser des douves à travers le granit, depuis la butte du Marchix jusqu’à la Loire. Mais, compte tenu de la dureté de la roche, et malgré la réalisation d’une première section franchie par le pont Sauvetout qui reliait la ville à la route de Vannes, il fallut y renoncer22.

10À l’issue de cette campagne d’aménagements de l’Erdre, le dispositif portuaire de cette rivière avait été enrichi et mieux structuré. Depuis le fleuve, les navires y accédaient via une entrée barrée par une grille et protégée au xv^e siècle par les tours du Rateau et Sainte-Catherine23. Ce dispositif de fermeture, menacé par les crues violentes de décembre-janvier 1496-1497, nécessita la pose de câbles afin qu’il ne soit pas emporté par les eaux24. Désormais, un port intérieur – le port d’Erdre – protégé par les remparts desservait directement la ville25. Il était traversé par deux ponts qui reliaient le quartier de la place du Change à la paroisse Saint-Nicolas26. Par la suite, d’autres travaux furent engagés pour l’entretenir. En 1449 notamment, son état de délabrement requit qu’on procédât à son nettoyage et à son curage27. Plus en amont, le port Communeau situé au nord de l’agglomération était accessible depuis une porte, franchi par un pont et défendu par une tour, ces trois ouvrages lui étant spécialement dédiés. Un compte de 1473 évoque la fonction de garde des clefs du port Communeau28. Un autre port le complétait un peu plus au nord, à hauteur de Barbin. Enfin, ce tronçon de l’Erdre avait été équipé de chaussées qui longeaient ses berges, ainsi que de moulins avec leurs retenues d’eau29. Ces dispositifs n’étaient pas sans danger pour la ville puisque, obstruant le cours de la rivière, ils pouvaient occasionner, comme en 1475, des inondations30. En 1472, entreprenant la restauration des moulins des halles, la ville fit installer des batardeaux en aval des moulins de Barbin et de la chaussée de Coutant31. Entre ces deux infrastructures meunières, l’eau de la rivière était assez paisible. Le duc y disposait de « l’usaige de peschaige à poisson, et aussy de bois, ros [roseaux] et tout autre revenu d’un estang », droits que la reine Anne concéda temporairement aux Chartreux selon des lettres du 6 décembre 149832.

11Depuis la grande entreprise conduite par l’évêque Félix, la Loire et sa rive droite reçurent également des attentions répétées. Une donation datée du 9 octobre 1118, engagée par le comte Conan au profit de l’église de Toussaint d’Angers, fait état des revenus liés au pont joignant la cité à Pirmil. Selon ce document, des droits frappaient alors les ports (portibus) établis le long de ce franchissement33. Au port antique de Richebourg encore en activité à cette époque, Pierre Mauclerc, dans le cadre du vaste chantier d’extension de la ville qu’il conduisait, ajouta deux ports sur la Loire. L’un était situé un peu en retrait du fleuve, dans la paroisse Sainte-Radegonde, à proximité immédiate de la zone castrale en cours de construction, sur un bras d’eau qui servait aussi de douve. Il s’appelait le port de Pierre de France et subsista vraisemblablement jusqu’au xv^e siècle, avant d’être supprimé pour permettre l’extension du château. L’autre, qui portait le nom de son constructeur, le port Briand-Maillard, se trouvait lui au contact direct de la Loire et bordait les remparts depuis le château ducal jusqu’au château du Bouffay34. À proximité, dans le cimetière de Sainte-Croix, les moines de Marmoutier avaient fait construire des celliers et des maisons évoqués dans un document de 113835. Une fois son emplacement fixé en 1218, on établit à son extrémité ouest une construction en demi-lune, liée aux remparts de la ville, dont la fonction était de le protéger36. Il apparaît à plusieurs reprises dans la documentation du xv^e siècle. Une porte, gardée par un agent urbain spécialement affecté, s’ouvrait sur ses berges37. Elle permettait de communiquer avec la ville et, par une rue portant son nom, il était possible de rejoindre au nord le port Communeau38. Dans un premier temps, un large et profond fossé séparait Briand-Maillard de l’enceinte, un pont-levis l’enjambant pour permettre d’accéder à la porte. En 1444, en raison des « grans eaux », on s’employa à « sauver les planches et solliveaux du pont du Port Brient-Maillard39 ». Ce pont, qui était alors couvert en ardoises, subit plusieurs réparations40. Par la suite, les inconvénients qu’occasionnait ce fossé résolurent les Nantais à le faire combler. À ce travail, accompli en 1499, on ajouta le pavage de la zone remblayée, ce qui indique que l’ensemble de la berge était alors stabilisé et empierré41.

12Au xv^e siècle, deux autres ports étaient également en activité. Sur l’île Feydeau, dite aussi île de la Saulzaie, à proximité des halles, s’étendait le port Poissonnier. Il faisait face à la porte Poissonnière, dite aussi porte Chalandière43, à laquelle il était relié par un pont enjambant le bras d’eau qui les séparait. Ce chenal qu’empruntaient les navires avait tendance à se gâter. Aussi, le 20 mai 1388, un accord fut passé entre Jean IV et les marchands de Nantes au sujet de la canalisation de cette partie du fleuve, plus précisément du « cheinel de la rote Challandière, queul les marchenz sont tenuz fere et tenir en estat, lequel cheinel avoit tout esté fait aux despens de Monseigneur [le duc de Bretagne] ». Au titre de leur part qui montait à la moitié des sommes engagées, ils payèrent 80 livres à l’administration ducale44. L’opération dut être renouvelée en 1484-1485, au moment de la restauration de la porte Poissonnière45. On fit appel pour cela à des spécialistes allemands, Jehan Houc et son confrère. Ils construisirent à cet effet des « engins à tirer les eaux des bardeaux de la porte du port Poissonnier46 ».

13À proximité de l’embouchure de l’Erdre, le long des remparts du bourg du Main, se trouvait le Port-à-vin47. Son nom porte l’activité principale dont il était destinataire. De surcroît, il accueillait les rares chantiers navals que Nantes ait pu compter au xv^e siècle48. Et puis, en aval de la ville, se tenait déjà le port de la Fosse. Deux documents de 1476 et 1499 le mentionnent49. Il était relié à la cité par la porte Saint-Nicolas et était bordé par quelques maisons détenues par des marchands nantais. Cet espace d’habitation hors les murs apparaît dès le xiv^e siècle dans un acte du duc Jean V50. En 1480, Guillaume Guidelaye à Pierre Boucher cédèrent la rente qu’ils possédaient sur une de ces habitations51. Avec le succès du port, elles devenaient tellement nombreuses que François II envisagea en 1485 de les abattre afin qu’elles ne nuisent pas à la sécurité de la cité52. La Fosse était particulièrement fréquentée par les bâtiments de charge du commerce maritime international. Voici une affaire qui le met en évidence. Au mois de mars 1467, le sénéchal, le prévôt, et le procureur du duc de Bretagne reçurent l’ordre de saisir « soubz bonne garde et par loyal inventoyre les biens, danrées et marchandises des marchans d’Espaigne, estans et fréquentans la Fosse de Nantes, jusques à la valeur et estimacion de XXX mille escuz ». Ceux-ci, en dépit des trêves conclues entre les rois d’Espagne, d’Angleterre et le duc de Bretagne, avaient surpris deux navires anglais dans le port de Saint-Nazaire53. Cette mesure de rétorsion, produisait des conséquences fâcheuses sur la présence des Castillans à Nantes. Vers 1475-1476, alors qu’une vingtaine de ces marchands avaient été capturés et enfermés dans la prison du Bouffay, et tous les biens de leurs compatriotes saisis dans la ville et ses faubourgs, elle donna lieu à la requête suivante des fermiers du denier pour livre qui, vu l’anéantissement de ce devoir par suite de la ruine des Espagnols, demandèrent la résiliation de leur ferme. « Et davantaige ung navire d’Espaigne estant à la Fosse de Nantes, s’en voulloit retourner en son pays, et avoit avallé la rivière jusques à la Tranchée, a esté prins et arresté et empesché de faire son voaige54. » Bien qu’excentré, ce port vaste et profond présentait l’avantage de pouvoir accueillir un grand nombre de vaisseaux. Pour exemple, en septembre 1557, en dépit de la forte sécheresse qui depuis juin affectait le niveau d’eau de la Loire, c’est une flotte 20 à 22 galères qui vint y faire relâche55.