Introduction
p. 11-24
Texte intégral
1Lors de l’été 1968, des images d’enfants décharnés, souffrant de maladies dues à la malnutrition affluent dans les médias occidentaux. Elles proviennent de la région sud-orientale de la Fédération du Nigeria, qui a déclaré son indépendance une année auparavant sous le nom de République du Biafra. Encerclée par l’armée nigériane qui cherche à la reconquérir, la province est en proie à la guerre et à la famine. Ce conflit, qui aurait pu passer largement inaperçu en Occident, s’invite dans les agendas européens et américains, et marque le début d’une association durable entre « Afrique » et « crise humanitaire » dans les représentations collectives. L’émotion suscitée par la famine engendre par ailleurs la mobilisation de diverses organisations humanitaires et caritatives qui souhaitent apporter leur aide à la population civile. Emmenées par le Mouvement international de la Croix-Rouge, les secours catholiques et les entraides protestantes, des opérations de secours internationales sont mises sur pied en direction du territoire sous contrôle biafrais et des zones reprises progressivement par les troupes nigérianes. Cette crise et les réponses qui y furent apportées ont octroyé au Biafra une place toute particulière dans l’histoire de l’humanitaire.
La guerre Nigeria-Biafra dans l’histoire de l’humanitaire
2« Nouveau Solferino1 », lieu de naissance du « mouvement humanitaire moderne2 », moment marquant la fin d’un « premier siècle de l’humanitaire3 », ou encore ouvrant les « vingt glorieuses de l’humanitaire4 », les qualificatifs évoquant l’importance de ce conflit ne manquent pas. Dans la littérature francophone, sa place particulière est étroitement liée à la création, en 1971, de l’une des ONG françaises les plus emblématiques : Médecins sans frontières (MSF). La guerre est désignée comme le moment de la rupture des futurs fondateurs de l’organisation avec le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) pour lequel ils travaillaient alors, considéré comme trop conservateur pour agir sans l’accord des belligérants et trop neutre pour dénoncer les violences dont il était le témoin. De cette rupture serait née MSF, symbole du renouveau de l’humanitaire caractérisé par la pratique du « témoignage » et du « sans-frontiérisme ». Cette lecture du moment biafrais, fruit d’abord de certains acteurs de l’époque5, a ensuite imprégné durablement les études sur l’humanitaire en France6, la rupture des médecins au Biafra étant progressivement érigée en un tournant majeur de l’histoire de l’humanitaire.
3Dans les années 1990 puis 2000, la façon de concevoir le Biafra a évolué vers une lecture plus nuancée des événements, qui ne perçoit plus uniquement la guerre comme le lieu de l’invention d’un nouvel humanitaire par un petit groupe de médecins français, mais comme un épisode qui illustre la complexité de l’aide7. Pour Rony Brauman, leurs prises de position témoignent ainsi des « liaisons dangereuses du témoignage et des propagandes politiques8 ». Dans un ouvrage sur Médecins sans frontières, Anne Vallaeys revisite le rôle joué par ces acteurs en présentant notamment un tableau plus large des opérations de secours. Elle souligne le contexte politique de soutien de la France à l’indépendance biafraise dans lequel se sont insérées leurs actions9. Cette mise en perspective, qui relativise et montre les ambiguïtés des prises de position des médecins, n’est probablement pas sans liens avec les querelles internes du milieu humanitaire français10, mais a le mérite d’élargir le spectre d’analyse. Elle rejoint ainsi une tradition plus anglo-saxonne qui, moins marquée par la naissance du sans-frontiérisme, mobilise la crise Nigeria-Biafra comme un cas d’étude illustrant les « effets pervers » de l’aide, son instrumentalisation par les belligérants, ainsi que son rôle dans la prolongation des hostilités et du blocus11.
4Ces deux traditions ont progressivement convergé, comme le montrent les travaux de trois auteurs qui ont récemment proposé des histoires générales de l’humanitaire. Pour Philippe Ryfman, la fin des années 1960 et la guerre du Biafra marquent toujours le début d’un « second siècle ». Toutefois, ce moment n’est plus caractérisé uniquement par la création de MSF et l’invention du sans-frontiérisme, mais plus largement par « la montée en puissance des ONG nées au cours des quatre décennies précédentes, le surgissement de nouvelles et la transformation des pratiques, le repositionnement de la Croix-Rouge et l’affirmation des Organisations internationales12 ». Johannes Paulmann, quant à lui, propose une histoire rythmée par quatre conjonctures (deuxième moitié du xixe siècle, Première Guerre mondiale, années 1960-1970, puis début des années 1990) et considère le Biafra comme l’un des événements de la troisième conjoncture qu’il appelle le « moment de la mobilisation postcoloniale13 ». Enfin, pour Michael Barnett, l’histoire de l’humanitaire est façonnée par l’évolution et la combinaison de trois facteurs structurels : les « forces » de destruction, de production et de compassion. Il organise sa périodisation autour de trois grands moments : la fin du xixe siècle, la fin de la Seconde Guerre mondiale et la chute du mur de Berlin14. La fin des années 1960 et le Biafra constituent toutefois une séquence centrale de la seconde période, définie notamment par l’élargissement du spectre des bénéficiaires potentiels de l’aide humanitaire et par le rôle grandissant joué par les organisations non gouvernementales et internationales dans les territoires décolonisés. Ainsi, s’il n’est pas systématiquement pensé comme un tournant, le conflit demeure tout de même l’une des étapes importantes des histoires de l’humanitaire et des droits de l’homme15. Ses caractéristiques saillantes sont toujours rappelées : contribution de l’aide au prolongement des hostilités, invention du sans-frontiérisme et du témoignage par les médecins français.
5La façon dont la guerre civile nigériane est considérée dans l’histoire de l’humanitaire appelle deux remarques. Premièrement, la multiplicité des mentions et des évocations du conflit contrastait jusqu’à récemment avec la rareté des travaux historiques ayant entrepris de renouveler l’étude de cette crise et des réponses qui y ont été apportées16. La plupart des analyses citées ci-dessus s’appuient essentiellement sur une littérature secondaire comprenant deux types de publications. Les mémoires ou les récits d’acteurs de l’époque, parfois complétés par d’importantes recherches documentaires, forment une première catégorie17. Des études scientifiques sur le conflit, qui datent pour la plupart des années 1970, fournissent le second type de ressource à disposition. Outre les travaux dédiés à la guerre civile et à son internationalisation, qui consacrent des développements au rôle de la crise humanitaire dans ce processus18, deux thèses de doctorat en sciences politiques écrites au début des années 1970 ont posé les jalons de l’analyse des opérations de secours dans cette guerre et constituent encore aujourd’hui des ressources essentielles pour aborder le sujet19.
6La seconde remarque a trait aux approches qui ont été privilégiées. Le conflit a été appréhendé comme symbolisant le renouveau d’un humanitaire devenant plus enclin à dépasser les frontières pour aller secourir les victimes quelles qu’elles soient et où qu’elles se trouvent, mais aussi comme le lieu de l’expression de ses effets pervers. Ces deux perspectives reflètent plus généralement la façon dont l’humanitaire a longtemps été abordé. La connotation essentiellement positive acquise par ce terme, en raison des valeurs de générosité, de sacrifice et d’altruisme envers des « victimes » qu’il véhicule et qui résonnent particulièrement dans les sociétés occidentales dans la seconde moitié du xxe siècle, a produit une littérature clivée sur le sujet20. D’une part, elle est constituée de récits bienveillants, voire complaisants, qui interprètent l’évolution et l’expansion de l’humanitaire comme un signe de progrès moral21. Les premiers volontaires ont par exemple été dépeints comme des figures de saints laïques, avant de devenir les nouveaux héros des temps modernes. D’autre part, une littérature critique s’est développée, privilégiant le plus souvent la mise en lumière de la disjonction entre des pratiques aux conséquences néfastes ou entreprises pour de « mauvaises raisons », et les valeurs supposées animer l’humanitaire. Ces façons de présenter ce phénomène, qu’il s’agisse de sa « célébration euphorique » ou de la critique de ses « effets pervers », peuvent être appréhendées comme les revers d’une même médaille et disent finalement peu de choses sur l’humanitaire en tant que tel22.
L’humanitaire et son histoire
7Considéré comme un fait social majeur de la fin du xxe siècle, l’humanitaire demeure un objet d’étude aux contours flous, comme le montrent la diversification et la multiplication des usages du terme. Employé depuis la première moitié du xixe siècle – parfois de manière négative car évoquant une certaine sensiblerie23 – pour caractériser par exemple des sentiments, une philosophie ou des buts, l’usage de l’adjectif humanitaire s’est progressivement diversifié. Défini par les dictionnaires contemporains par les termes « qui vise au bien de l’humanité », il est désormais utilisé pour qualifier des actions, des opérations militaires, des professions, des acteurs, des situations, des décisions politiques, des moyens financiers ou encore des notions24. En outre, il est de plus en plus fréquemment employé comme un substantif. Sous cette forme, le terme fait référence aux individus ou aux organisations impliquées dans le déploiement de l’aide humanitaire (« les humanitaires »), ou à un phénomène plus large (« l’humanitaire »). Comme l’expriment Axelle Brodiez et Bruno Dumons : « Alors qu’il désignait à l’origine la gestion des actes de secours envers les victimes de guerre, son sens s’est progressivement étendu, produisant une catégorie “attrape-tout” à connotation positive, pouvant désigner la moindre action de solidarité sur le territoire national comme à l’étranger. Il se confondrait avec l’histoire du xxe siècle25. »
8Face à cette multiplication de significations et d’usages, il n’est pas inutile de rappeler la définition de l’action humanitaire proposée par Philippe Ryfman qui, malgré ses limites26, permet notamment de cerner les caractéristiques essentielles de cette notion :
« Une assistance fournie par un seul ou une conjonction d’acteurs, s’insérant à des niveaux variés dans un dispositif international de l’aide, régie par un certain nombre de principes et mise en œuvre (au nom de valeurs considérées comme universelles) au profit de populations dont les conditions d’existence du fait de la nature (catastrophes) ou de l’action d’autres hommes (conflits armés internes ou internationaux) sont bouleversées, et l’intégrité physique atteinte, voire la survie même compromise27. »
9Étudier l’action humanitaire suppose donc à la fois de se pencher sur les mécanismes qui amènent à l’élaboration de cette assistance, sur les acteurs qui la déploient (organisations, États, mais aussi individus), sur les principes qui la sous-tendent, sur sa mise en pratique ainsi que sur la façon dont les populations à qui elle est destinée l’appréhendent. Or, de ces multiples dimensions, l’histoire de l’humanitaire en général, et lors de la crise au Biafra en particulier, n’a longtemps fourni qu’une vision partielle. La raison repose sur les deux approches, laudative ou particulièrement critique, évoquées précédemment, mais aussi sur la tendance à entrer dans ce champ d’étude par l’histoire de l’un de ses acteurs. Des monographies retracent par exemple l’histoire de Médecins sans frontières, de l’UNICEF ou encore du Comité international de la Croix-Rouge28. Qu’il s’agisse de travaux scientifiques, d’histoires au caractère institutionnel, ou d’hagiographies, la majorité de cette littérature demeure focalisée sur une seule et unique organisation.
10Une telle approche présente certaines limites. Tout d’abord, elle peine à rendre compte de la complexité de l’action humanitaire, qui inclut le plus souvent une multitude d’acteurs aux provenances et aux cultures variées. Les recherches ont ainsi insuffisamment étudié les rapports, pourtant souvent structurants, qu’entretiennent les agences humanitaires entre elles ou avec les États. Ensuite, la focale institutionnelle a insisté sur les principes – juridiques et moraux – censés guider les organisations29, afin de justifier leur existence, leurs pratiques ou d’affirmer leur spécificité et leur identité dans le champ humanitaire. Cette dernière préoccupation a eu pour conséquence de masquer les continuités ou les similitudes existantes entre ces acteurs, qui se présentent le plus souvent comme à l’origine d’une nouvelle forme d’action humanitaire30. En revanche, leur fonctionnement et leurs rouages internes en termes de prise de décision, de financement ou de personnel demeurent parfois sous-étudiés31. Enfin, les contextes dans lesquels s’inscrivent leurs activités, qu’il s’agisse de ceux de leur élaboration ou de leur déploiement ont souvent peu été mis en valeur. En effet, l’entrée dans l’histoire de l’humanitaire par le biais de ces organisations majoritairement occidentales ne laisse qu’une place minime aux réflexions sur la façon dont l’aide est perçue là où elle est dispensée, envisageant la plupart du temps les bénéficiaires comme de simples récepteurs.
Entrer dans l’histoire de l’humanitaire par la guerre Nigeria-Biafra
11Cette étude propose d’aborder ces différentes dimensions par le biais de ce moment considéré comme charnière qu’est le Biafra. En se basant sur des sources et de la documentation de première main, il s’agit d’analyser « au concret », à partir de la situation sur place, comment se développe l’intérêt pour cette région africaine en Occident, et comment cette mobilisation donne lieu à une vaste et complexe opération de secours sur les terrains nigérians et biafrais. Suivre empiriquement ces processus nécessite de varier les points de vue, qu’il s’agisse des échelles d’observations (internationales, nationales, locales), des façons d’appréhender les acteurs (au niveau du siège ou du terrain), ou des espaces géographiques (Nigeria/Europe de l’Ouest)32. Cette démarche permet tout d’abord de donner à voir qui sont les acteurs de l’aide humanitaire à l’époque (individus, institutions, mais aussi gouvernements), et dans quels contextes et traditions ils s’inscrivent. En outre, en éclairant l’articulation entre principes et pratiques, elle conduit à penser autrement qu’en termes moraux la question de l’impact des opérations de secours sur le conflit. Enfin, elle interroge les perceptions et les rapports entre les « bénéficiaires » et les acteurs occidentaux. Le renouveau historiographique majeur dont l’humanitaire a profité ces dernières années fournit des outils conceptuels pour accorder une attention particulière à ces trois dimensions qui sont au centre de notre questionnement.
Les acteurs de l’aide humanitaire
12Dans le sillage du récent développement de l’histoire transnationale et globale33, différents auteurs ont revisité le rôle joué par les acteurs non gouvernementaux dans les relations internationales34. Interroger la façon dont ils interagissent et se positionnent les uns par rapport aux autres fournit souvent des clés pour comprendre leurs prises de décisions ou la constitution de leurs agendas35. Il en est de même pour la manière dont les individus qui les composent circulent entre les sphères locales, nationales et internationales36. Il s’agit donc ici de dresser un tableau d’ensemble des acteurs humanitaires qui s’engagent dans le secours aux populations nigérianes et biafraises, et de les analyser dans une perspective « relationnelle », en mesure de prendre en considération leur multiplicité, leur diversité ainsi que leurs interactions37. Porter l’attention sur la provenance des individus qui travaillent sur le terrain et sur les problèmes concrets qu’ils rencontrent, permet plus généralement de mettre en lumière la porosité entre les différentes traditions de l’aide humanitaire (Croix-Rouge, œuvres sociales missionnaires, héritages coloniaux)38.
13La prise en compte de ces acteurs ne dispense pas d’une réelle analyse du rôle des États, ceux-ci demeurant fondamentaux pour comprendre le développement de l’aide humanitaire au xxe siècle, son institutionnalisation et son entrée dans l’ère industrielle39. Ils ne sont pas non plus étrangers à la multiplication des ONG à partir des années 197040. Dans le cas Nigeria-Biafra, examiner le fonctionnement des acteurs non gouvernementaux et les ressources dont ils disposent met en lumière comment les gouvernements européens les plus impliqués dans le conflit – britannique et français – envisagent la crise humanitaire et sous quelle forme ils tentent d’y répondre. Les rapports que les États entretiennent avec les organismes de secours éclairent par ailleurs les dimensions politiques de l’humanitaire.
Principes et pratiques
14Dans la littérature, la présentation de l’attitude des organisations de secours pendant la guerre Nigeria-Biafra oscille en fonction des points de vue. D’une part, certains auteurs insistent sur le non-respect du droit international et du principe de neutralité par les organisations humanitaires. Ils ont ainsi souligné que le CICR avait agi dans le conflit au Biafra en outrepassant ses prérogatives, sans respecter les dispositions prévues par le droit international, et en allant au-delà du principe de neutralité censé guider son action41. D’autre part, les histoires centrées sur la rupture des médecins français avec le CICR insistent sur le caractère trop légaliste de ce dernier, celui-ci privilégiant l’obtention de l’accord des parties à l’efficacité de son action et étant trop attaché à sa neutralité pour dénoncer le traitement infligé par le gouvernement nigérian aux Biafrais. Elles soulignent ainsi les limites de ce type d’humanitaire42.
15Ces deux façons de voir les choses ne sont pas sans rappeler les débats moraux qui traversent régulièrement le monde de l’humanitaire, sur le devoir ou non d’intervenir ou de dénoncer telle ou telle situation43. En toile de fond de ces questionnements se trouve l’échec du CICR et plus largement de la communauté internationale à protéger les populations juives de la politique d’extermination du régime nazi44. Comme l’a souligné Sébastien Farré, mettre l’accent sur les aspects concrets des actions humanitaires permet d’aborder ces débats autrement que sous l’angle normatif45. Une telle approche amène à relativiser des interprétations trop calquées sur l’inscription des organisations dans des cadres juridiques ou moraux, et qui sous-évaluent les marges de manœuvre qu’elles s’octroient. Dans ce livre, il s’agit plus particulièrement d’analyser comment les acteurs articulent leurs pratiques avec ces considérations normatives en fonction des autres contraintes imposées par le terrain et l’urgence auxquelles ils font face. Montrer comment ils se positionnent concrètement par rapport à la médiatisation de la crise et à la souveraineté du gouvernement nigérian permet ainsi d’appréhender différemment l’invention du « tapage médiatique » ou du « droit d’ingérence » par les médecins français.
Enjeux locaux et destinataires
16S’intéresser au rapport qu’entretiennent les humanitaires avec les sociétés dans lesquels ils se déploient impose de réintégrer les enjeux locaux, dans une histoire longtemps dominée par une perspective occidentale. Les bénéficiaires ou encore l’impact de l’assistance fournie ont souvent été peu étudiés, notamment en raison d’un accès difficile aux sources, mais également parce qu’une telle démarche nécessite de se placer au niveau du terrain et d’appréhender les destinataires autrement qu’en victimes passives46. Cette tendance s’est trouvée renforcée par le fait qu’à partir des années 1960, l’aide humanitaire est devenue essentiellement un phénomène allant du nord vers le sud.
17Dans le cas du Biafra, si les conséquences des opérations de secours sur le prolongement du conflit ont été bien mises en avant, d’autres aspects restent peu étudiés, tels que par exemple la situation après le départ des organisations occidentales, ou encore l’impact de ces dernières sur les rapports de forces entre les acteurs locaux. En outre, très peu de travaux ont été consacrés au rôle joué par les institutions humanitaires nigérianes dans le conflit47. Ce livre n’a pas pour ambition de combler ces lacunes qui mériteraient une recherche en soi. Néanmoins, dans la mesure où les sources consultées le permettent, il sera attentif au rôle des acteurs nigérians et biafrais dans les processus de médiatisation, de déploiement et de réappropriation de l’aide humanitaire. Quels rapports entretiennent-ils avec cette « assistance » provenant de l’étranger et en majorité de l’Occident ? Restituer leur perception des opérations de secours et la mettre en regard avec celle qu’ont les acteurs occidentaux de leurs interlocuteurs africains dévoile l’importance du contexte postcolonial dans les tensions qui parcourent leurs relations. La complexité de ces phénomènes permet finalement de dépasser une vision binaire qui dépeint les humanitaires occidentaux soit comme de nouveaux colons soit comme des bienfaiteurs, et les sociétés africaines comme des victimes passives à sauver ou des entités irresponsables instrumentalisant l’aide humanitaire.
Organisation de la recherche
18L’ouvrage est structuré en trois parties. Afin d’analyser comment s’articulent, lors d’une crise humanitaire, les différentes échelles, locales, nationales et internationales, mais également les relations entre les lieux de l’élaboration des réponses humanitaires et ceux de leur déploiement, les deux premières parties suivent le déplacement de cette crise de l’échelle locale à l’échelle internationale, puis des réponses qui y sont apportées de l’Occident au Nigeria. La troisième partie revisite, sur la base des postulats méthodologiques énoncés précédemment, à la fois la question des effets pervers de l’aide et celle du renouvellement de l’humanitaire à la fin des années 1960.
19Plus précisément, la première partie examine comment une guerre civile qui se déroule sur le continent africain et qui aurait pu passer largement inaperçue prend la dimension d’une crise humanitaire internationale. Partant des controverses qui existent encore aujourd’hui dans l’historiographie sur l’ampleur de la famine ou sur l’emploi du terme de génocide, le premier chapitre retrace les événements utilisés dans les discours des belligérants qui nourrissent ces interprétations contradictoires déjà pendant le conflit. Le déplacement de ces préoccupations sur la scène internationale fait l’objet du second chapitre. Il met en lumière le rôle joué par différents acteurs dans la médiatisation du conflit, qu’il s’agisse de la diaspora nigériane, des missionnaires, des humanitaires ou encore des gouvernements français et britannique. Le troisième chapitre étudie ensuite l’émotion engendrée par une crise dont l’iconographie marque durablement l’imaginaire occidental sur l’Afrique. La manière dont la situation est présentée suscite avant tout des réactions « humanitaires », qui posent la question du lien entre humanitaire et politique.
20La deuxième partie s’intéresse aux réponses concrètes apportées par différents acteurs humanitaires. Les processus de décision qui amènent de nombreux organismes non gouvernementaux à intervenir sur le terrain biafrais sans l’accord formel du gouvernement nigérian permettent de montrer quels sont les motivations et les mécanismes favorisant ou non la mise en place d’une opération de secours dans une région donnée. Ceci fait l’objet du quatrième chapitre, qui pose plus généralement la question du rapport des acteurs humanitaires à la souveraineté des États dans lesquels ils interviennent. Le cinquième chapitre retrace ensuite le déploiement des opérations de secours sur le terrain. En partant des problèmes concrets rencontrés par les humanitaires (logistique, efficacité, cohabitation entre acteurs variés), il examine quels sont les savoirs et les ressources mobilisés par l’action humanitaire à la fin des années 1960. Après l’analyse de l’élaboration des réponses, puis de leurs mises en place sur le terrain, le sixième chapitre interroge la réception et la perception qu’en ont les autorités et les acteurs de secours locaux. Plus généralement, c’est l’ambiguïté dont font preuve ces derniers par rapport à des opérations et des moyens provenant essentiellement de l’Occident qui est discutée.
21La troisième partie revisite les éléments qui ont fait du Biafra un moment charnière de l’histoire de l’humanitaire. Ainsi, le chapitre sept étudie la relation entre l’aide humanitaire et les enjeux politiques à travers la question : aide humanitaire, aide à la guerre ? Il s’agit à la fois de comprendre comment les humanitaires se sont positionnés face à ce « dilemme » et de montrer, à travers l’étude du cas de la France, comment les opérations humanitaires ont pu être considérées comme l’une des composantes de la politique de soutien à l’indépendance du Biafra. Le huitième chapitre traite de la problématique des violations du droit humanitaire et des droits de l’homme sous les yeux des volontaires, autre « dilemme » majeur de l’humanitaire. Mettre en regard les principes et les pratiques des acteurs autour de cette question, amène à appréhender sous un angle différent la rupture entre les médecins français et le CICR et à l’inscrire dans le contexte plus général de remise en question de l’organisation genevoise à cette période. Afin de réfléchir plus largement à la place du Biafra dans l’histoire de l’humanitaire, le fonctionnement, les rouages internes du CICR et leur évolution en lien avec le conflit font l’objet du dernier chapitre.
Sources et documentation
22Les archives des acteurs humanitaires constituent la première catégorie de sources exploitées dans le cadre de ce travail. Ces organisations s’étant structurées en trois grands ensembles pendant le conflit – Croix-Rouges, réseaux protestants et catholiques – le choix s’est porté sur la consultation de fonds documentaires qui pouvaient donner à voir chacun de ces groupes. Les organisations étant nombreuses, au sein de ces ensembles, à s’être impliquées à des niveaux très variés (recherches de financements, envoi de personnel, action sur le terrain), les archives de celles qui ont centralisé les différentes initiatives et agi directement sur le terrain ont été privilégiées. En ce qui concerne le Mouvement de la Croix-Rouge, les archives du Comité international de la Croix-Rouge ont constitué la principale ressource en raison du rôle central joué par l’organisation dans les opérations de secours au Biafra, ainsi que comme coordinateur de l’aide internationale en territoire fédéral. Particulièrement riches, ces fonds comprennent à la fois les documents des organes décisionnels du CICR, la correspondance entre le siège et le terrain, ainsi que de nombreux rapports de délégués qui permettent de saisir la situation sur place. Cette documentation a été complétée par les archives de la Fédération internationale de la Croix-Rouge, l’autre composante « internationale » du Mouvement. Moins bien fournies, elles livrent toutefois quelques renseignements supplémentaires sur les différentes façons dont le conflit a pu être appréhendé par certaines Sociétés nationales. Les archives de la Croix-Rouge française ont constitué le troisième fonds consulté spécifiquement pour cet ensemble, choix qui s’explique doublement. D’une part, cette Société nationale représente une interface intéressante pour étudier le rapport entre humanitaire et politique en raison de son rôle de relai de la politique du gouvernement français de soutien au Biafra, et d’autre part c’est au sein des équipes qu’elle envoie sur le terrain que se trouvent les volontaires français qui fondent par la suite Médecins sans frontières.
23Caritas internationalis qui coordonne les réponses catholiques à la crise humanitaire n’ayant pas donné suite aux demandes de consultation de ses archives, il a fallu trouver d’autres ressources pour appréhender ce point de vue. Pour combler cette lacune, la piste des missionnaires de la congrégation du Saint-Esprit, dont le rôle particulier dans l’éveil de l’intérêt pour le Biafra en Europe et dans les opérations de secours est connu, s’est révélée particulièrement féconde. Dans leurs archives à Chevilly-Larue, sont conservés une importante correspondance entre les missionnaires sur le terrain et le Vatican, mais également des documents émanant de Caritas internationalis, du Joint Church Aid, ainsi qu’une imposante documentation sur le conflit. Un fonds du Secrétariat catholique du Nigeria, déposé dans les archives nationales nigérianes à Ibadan, a fourni des informations complémentaires sur le rôle des organisations religieuses à la fin du conflit ainsi que sur le positionnement des autorités nigérianes à leur égard.
24Les archives du Conseil œcuménique des Églises conservées à Genève ont permis de reconstituer une partie des activités protestantes en réponse au conflit. Les fonds du secrétariat général, ceux de la commission des Églises pour les Affaires internationales et ceux de la division Interchurchaid Refugees and World Service disposent de documents témoignant de la diversité de la mobilisation protestante. Là aussi, correspondances, rapports, notes internes donnent à voir les articulations entre les différentes organisations qui participent au secours au Nigeria et au Biafra. La dimension des opérations sur le terrain étant moins présente au sein du Conseil œcuménique qui agit plutôt comme un pourvoyeur de ressources pour d’autres organisations, celle-ci a pu être appréhendée par le biais des papiers personnels de l’un des responsables des opérations protestantes sur le terrain biafrais. Conservée à la bibliothèque nationale d’Écosse à Édimbourg, la correspondance du révérend Alexander Somerville et de sa femme, adressée à leurs proches en Écosse ou au bureau des missions de l’Église d’Écosse, s’est révélée utile pour appréhender les problèmes concrets rencontrés par les humanitaires au quotidien.
25Ce corpus a fourni le matériel nécessaire pour étudier les rapports entre les diverses organisations, entre les grands ensembles auxquels elles appartiennent, ainsi que les articulations entre les sièges et les terrains, la recherche de fonds et la mise en œuvre des secours. De surcroît, les documents internes à ces organisations, qui sont donc moins suspects que leurs proclamations publiques destinées à alerter et à récolter des financements, apportent un éclairage sur la situation des populations biafraises et nigérianes pendant la guerre. Enfin, les archives de l’Organisation des Nations unies (ONU) et les papiers personnels du coordinateur nommé par le gouvernement américain pour les secours au Nigeria-Biafra, Clarence Clyde Ferguson, ont permis de mettre en lumière les choix des acteurs qui décident de ne pas s’impliquer directement dans les opérations de secours, mais de les soutenir d’une façon ou d’une autre.
26La seconde grande catégorie d’archives dépouillées émane des gouvernements. Les Civil War collections conservées aux archives nationales du Nigeria à Ibadan ont été consultées lors d’un séjour dans le pays en 2011. Constituées essentiellement de brochures publiées pendant la guerre par les autorités fédérales et biafraises, ces fonds renseignent sur les discours officiels, mais en disent peu sur les attitudes à l’égard des humanitaires et des opérations de secours. Les archives concernant le conflit demeurant probablement dans les ministères ou chez des particuliers, il n’a pas été possible de les consulter. Néanmoins, la littérature secondaire, la presse et les témoignages ont permis de reconstruire dans une certaine mesure ces points de vue. Surtout, les documents d’autres gouvernements spécialement proches des belligérants se sont révélés particulièrement utiles. Les très riches fonds conservés aux archives nationales du Royaume-Uni éclairent ainsi le positionnement nigérian sur les questions humanitaires pendant la guerre. L’appui décisif, fourni par l’ancienne métropole au gouvernement militaire fédéral nigérian pendant le conflit, explique leur proximité ainsi que le rôle d’intermédiaire entre Lagos et les organisations de secours joué par les Britanniques. Les archives gouvernementales françaises, en raison du soutien de l’exécutif accordé aux sécessionnistes, constituent des sources possibles pour comprendre le point de vue des autorités biafraises (notamment les fonds du secrétariat pour les Affaires africaines et malgaches aux archives nationales et dans une moindre mesure les fonds du ministère des Affaires étrangères à Nantes et à Paris). Mais c’est surtout pour mettre en lumière la façon dont l’humanitaire est articulé au politique dans les espaces nationaux français et britannique que ces fonds ont été utiles. Complétés par les documents diplomatiques publiés des États-Unis et de la Suisse, ils permettent également d’examiner les relations qu’entretiennent les acteurs non gouvernementaux avec les gouvernements.
27La presse écrite et illustrée, nigériane, suisse, française, britannique et américaine a été consultée en fonction des besoins. Les rapports, récits, mémoires et analyses publiés par ceux, Nigérians ou occidentaux, qui ont participé de près ou de loin à la médiatisation de la crise et aux réponses élaborées par les organisations de secours, ont finalement constitué des ressources supplémentaires pour approcher empiriquement ces processus.
Notes de bas de page
1 J.-C. Rufin, Le piège : quand l’aide humanitaire remplace la guerre, Paris, Lattès, 1986, p. 61.
2 P. Micheletti, Humanitaire : s’adapter ou renoncer, Paris, Marabout, 2008, p. 29.
3 P. Ryfman, La question humanitaire, Paris, Ellipses, 1999, p. 34.
4 J. Lebas et J. Mamou, « Éditorial », Humanitaire, n° 1, novembre 2000, p. 2.
5 B. Kouchner, Charité business, Paris, Le Pré aux Clercs, 1986 ; B. Kouchner, Le malheur des autres, Paris, Éditions la Seine, 1992.
6 Sur les liens entre origine des acteurs humanitaires et production scientifique sur le sujet, voir I. Herrmann, « Humanitaire », in O. Christin (dir.), Dictionnaire des concepts nomades en sciences sociales, Paris, Métailié, 2010, p. 233-243.
7 A. Destexhe, L’humanitaire impossible ou deux siècles d’ambiguïtés, Paris, Armand Colin, 1993, p. 59-69. É. Thévenin, Ces famines qui ont bouleversé le monde, du xixe siècle à nos jours, Tours, Éditions CLD, 2008, p. 180-190.
8 R. Brauman, entretiens avec C. Portevin, Penser dans l’urgence : parcours critique d’un humanitaire, Paris, Seuil, 2006, p. 87-91 ; R. Brauman, « Les liaisons dangereuses du témoignage humanitaire et des propagandes politiques », in M. Le Pape, J. Siméant et C. Vidal (dir.), Crises extrêmes. Face aux massacres, aux guerres civiles et aux génocides, Paris, La Découverte, 2006, p. 188-204.
9 A. Vallaeys, Médecins sans frontières : la biographie, Paris, Fayard, 2004, p. 54-90.
10 D. Maillard, « 1968-2008 : le Biafra ou le sens de l’humanitaire », Humanitaire, n° 18, 2008 [http://humanitaire.revues.org/182], consulté le 13 juillet 2014. E. Davey, From Tiers-mondisme to Sans-frontiérisme : Revolutionary Idealism in France from the Algerian War to Ethiopian Famine, PhD thesis, Queen Mary University, 2011, p. 36-38. Cette thèse a été publiée en 2015 : E. Davey, Idealism Beyond Borders : The French Revolutionary Left and the Rise of Humanitarianism, 1954-1988, Cambridge, Cambridge University Press, 2015.
11 Par exemple : J. Benthall, Disasters, Relief and the Media, Londres, I.B. Tauris, 1993, p. 92-108 ; A. de Waal, Famine Crimes : Politics and the Disaster Relief Industry in Africa, Londres, International African Institute, 1997, p. 72-77 ; J. Okpoko, The Biafran Nightmare : The Controversial Role of International Relief Agencies in a War of Genocide, Enugu, Delta of Nigeria, 1986.
12 P. Ryfman, Une histoire de l’humanitaire, Paris, La Découverte, 2008, p. 44.
13 J. Paulmann, « Conjunctures in the History of International Humanitarian Aid during the Twentieth Century », Humanity, vol. 4, n° 2, 2013, p. 227.
14 M. Barnett, Empire of Humanity : A History of Humanitarianism, Ithaca, Cornell University Press, 2011.
15 L. Heerten, « The Dystopia of Postcolonial Catastrophe : Self-determination, the Biafran War of Secession, and the 1970s », in J. Eckel et S. Moyn (éd.), The Breakthrough : Human Rights in the 1970s, Philadelphia, University of Pennsylvania Press, 2014, p. 15-35 ; M. C. Morgan, « The Seventies and the Rebirth of Human Rights », in N. Ferguson, E. Manela, C. S. Maier et D. J. Sargent (éd.), The Shock of the Global : The 1970s in Perspective, Cambridge, Harvard University Press, 2011, p. 237-250.
16 Les historiens s’y intéressent de plus en plus, voir par exemple les deux numéros consacrés au Biafra dans le Journal of Genocide Research, vol. 16, n° 2-3, 2014.
17 Outre les publications de Bernard Kouchner, voir les écrits des contemporains qui vont de récits d’expériences personnelles à analyses scientifiques. Par exemple, D. Jacobs, The Brutality of Nations, New York, Paragon House, 1988 ; E. Urhobo, Relief Operations in the Nigerian Civil War, Ibadan, Daystar Press, 1978 ; M. Aaronson, « The Nigerian Civil War and “Humanitarian Intervention” », in B. Everill et J. Kaplan (éd.), The History and Practice of Humanitarian Intervention and Aid in Africa, Basingstoke, Palgrave Macmillan, 2013. Dan Jacobs (engagé à l’UNICEF puis directeur exécutif du Comité de secours au Nigeria-Biafra aux États-Unis), Emmanuel Urhobo (Conseil chrétien du Nigeria) et Michael Aaronson (Save the Children) ont tous trois participé de près ou de loin aux opérations de secours.
18 J. Stremlau, The International Politics of the Nigerian Civil War, 1967-1970, Princeton, Princeton University Press, 1977 ; et plus généralement dans les travaux et récits sur la guerre : Z. Cervenka, A History of the Nigerian War, 1967-1970, Ibadan, Onibonoje Press, 1972 ; J. de Saint-Jorre, The Nigerian Civil War, Londres, Hodder and Stoughton, 1972 ; J.-L. Clergerie, La crise du Biafra, Limoges, Presses universitaires, 1994 ; E. Osaghae, E. Onwudiwe et R. T. Suberu (éd.), The Nigerian Civil War and its Aftermath, Ibadan, John Archers, 2002.
19 T. Hentsch, Face au blocus : histoire de l’intervention du Comité international de la Croix-Rouge dans le conflit du Nigeria, 1967-1970, Genève, Droz, 1973 ; L. S. Wiseberg, The International Politics of Relief : A Case Study of the Relief Operations Mounted during the Nigerian Civil War (1967-1970), PhD thesis, Université de Californie, 1973.
20 I. Herrmann « From Polemical Topics to Magnetic Concepts : Humanitarianism and Anti-Semitism in Switzerland », Journal of Political Ideologies, vol. 15, n° 1, 2010, p. 55-56.
21 M. Barnett, « Humanitarianism as a Scholarly Vocation », in M. Barnett et T. G. Weiss (éd.), Humanitarianism in Question : Politics, Power, Ethics, Ithaca, Cornell University Press, 2008, p. 235.
22 P. Dauvin et J. Siméant, Le travail humanitaire. Les acteurs des ONG du siège au terrain, Paris, Presses de Sciences Po, 2002, p. 17.
23 I. Herrmann, « Humanitaire », art. cité, p. 234-235.
24 B. Jacquemart, « Humanitaire : le mot et les concepts en jeu », Humanitaire, n° 1, 2000, p. 49-63.
25 A. Brodiez et B. Dumons, « Éditorial. Faire l’histoire de l’humanitaire », Le Mouvement Social, n° 227, 2009/2, p. 4.
26 Sur les limites de cette définition, cf. J. Paulmann, « Conjunctures in the History of International Humanitarian Aid during the Twentieth Century », art. cité, p. 215-217 ; J. Benthall, « Relief », in A. Iriye et P.-Y. Saunier, The Palgrave Dictionary of Transnational History, Basingstoke, Palgrave Macmillan, 2009, p. 887-893.
27 P. Ryfman, La question humanitaire, op. cit., p. 17.
28 M. Black, Children First : The Story of UNICEF, Past and Present, Oxford, Oxford University Press, 1996 ; A. Vallaeys, Médecins sans frontières, op. cit. ; F. Bugnion, Le Comité international de la Croix-Rouge et la protection des victimes de la guerre, Genève, CICR, 2000.
29 S. Farré, Colis de guerre. Secours alimentaire et organisations humanitaires (1914-1947), Rennes, PUR, 2014, p. 14-15.
30 G. Lachenal et B. Taithe, « Une généalogie missionnaire et coloniale de l’humanitaire : le cas Aujoulat au Cameroun, 1935-1973 », Le Mouvement Social, n° 227, 2009/2, p. 45-63.
31 P.-Y. Saunier, « La secrétaire générale, l’ambassadeur et le docteur. Un conte en trois épisodes pour les historiens du “monde des causes” à l’époque contemporaine, 1800-2000 », Monde(s), n° 1, 2012/1, p. 32.
32 Sur la notion « d’action humanitaire au concret », voir P. Dauvin et J. Siméant, Le travail humanitaire, op. cit., p. 22-25.
33 Par exemple : A. Iriye, Global and Transnational History : Its Past, Present, and Future, New York, Palgrave Macmillan, 2013 ; P.-Y. Saunier, « Circulations, connexions et espaces transnationaux », Genèses, n° 57, 2007, p. 110-126 ; P. Grosser, « L’histoire mondiale/globale, une jeunesse exubérante mais difficile », Vingtième Siècle, n° 110, 2011, p. 3-18 ; A. Caillé et S. Dufoix (dir.), Le tournant global des sciences sociales, Paris, La Découverte, 2013.
34 A. Iriye, Global Community : The Role of International Organizations in the Making of the Contemporary World, Berkeley, University of California Press, 2002.
35 Voir par exemple les numéros « Organisations internationales et ONG : coopération, rivalité, complémentarité de 1919 à nos jours », Relations internationales, n° 151, 2012/3 et n° 152, 2012/4.
36 Sur l’humanitaire plus particulièrement, cf. D. Laqua, « Inside the Humanitarian Cloud : Causes and Motivations to Help Friends and Strangers », Journal of Modern European History, vol. 12, n° 2, 2014, p. 175-185.
37 Sur cette perspective cf. P.-Y. Saunier, Trajectoire de recherche : de l’histoire de Lyon à l’histoire des organisations internationales : un récit à l’envers de l’évidence, Habilitation à diriger les recherches, EHESS, 2010.
38 Les carrières et les profils de certains individus reflètent particulièrement bien les porosités entre ces différentes traditions : É. Morier-Genoud, « Missions and Institutions : Henri-Philippe Junod, Anthropology, Human Rights and Academia between Africa and Switzerland, 1921-1966 », Schweizerische Zeitschrift für Religions und Kulturgeschichte, 2011, p. 193-219 ; J. Siméant, « Entrer, rester en humanitaire : des fondateurs de MSF aux membres actuels des ONG médicales françaises », Revue française de science politique, vol. 51, n° 1, 2001, p. 47-72 ; B. Taithe, « Reinventing (French) Universalism : Religion, Humanitarianism and the “French Doctors” », Modern and Contemporary France, vol. 12, n° 2, 2004, p. 147-158.
39 J. F. Hutchinson, Champions of Charity : War and the Rise of the Red Cross, Boulder, Westview Press, 1996 ; P. de Sénarclens, L’humanitaire en catastrophe, Paris, Presses de Sciences Po, 1999 ; S. Farré, Colis de guerre, op. cit.
40 K. O’Sullivan, « A “Global Nervous System” : The Rise and Rise of European Humanitarian NGOs, 1945-1985 », in M. Frey, S. Kunkel et C. R. Unger (éd.), International Organisations and Development, 1945 to 1990, Basingstoke, Palgrave Macmillan, 2014, p. 196-219.
41 M. Aaronson, « The Nigerian Civil War and “Humanitarian Intervention” », art. cité.
42 A. Destexhe, L’humanitaire impossible, op. cit.
43 J. Moore, Hard Choices : Moral Dilemmas in Humanitarian Intervention, Oxford, Rowman & Littlefield, 1998 ; J. L. Holzgrefe et R. O. Keohane (éd.), Humanitarian Intervention : Ethical, Legal, and Political Dilemmas, Cambridge, Cambridge University Press, 2003.
44 Sur le CICR durant la Seconde Guerre mondiale, cf. J.-C. Favez, Une mission impossible ? Le CICR, les déportations et les camps de concentration nazis, Lausanne, Payot, 1988.
45 S. Farré, « Le CICR et les détenus des camps de concentration nationaux-socialistes (1942-1945) », Revue internationale de la Croix-Rouge, vol. 94, sélection française, 2012/4, p. 191-219.
46 Sur le rapport aux « victimes », cf. D. Fassin, La raison humanitaire. Une histoire morale du temps présent, Paris, Gallimard/Seuil, 2010.
47 Les textes élaborés par d’anciens participants aux opérations nigérianes y consacrent quelques pages : E. Urhobo, Relief Operations in the Nigerian Civil War, op. cit., et A. S. Z. Mohammed, « Relief Services in the Nigerian Civil War », in T. Tamuno et S. C. Ukpabi (éd.), Nigeria Since Independence, t. 7 : The Civil War Years, Ibadan, Heinemann, 1989, p. 234-251.
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