Le jour où Lyon est devenu Ville-Affranchie
Mémoire d’un siège sous la Restauration
p. 277-290
Texte intégral
1La mémoire de la Révolution à Lyon a été largement, et depuis longtemps, confisquée par les héritiers des victimes du siège de la ville du 7 août au 9 octobre 1793 : la France républicaine s’était alors unie contre la capitale des Gaules, soulevée dans une coalition de circonstance réunissant girondins, clergé constitutionnel, réaction catholique et royaliste, sous le commandement militaire du colonel Précy. Après la victoire du général Kellermann et des représentants en mission, leurs successeurs, l’Armée révolutionnaire et les administrations provisoires avaient développé une intense offensive culturelle et tenté d’écrire une histoire immédiate du siège et de ses conséquences, en particulier à travers les articles du Journal républicain des deux départemens de Rhône et de Loire, d’esprit hébertiste1. Si l’on rappelait la figure de Toulon révolté (« la putain des rois »), on chantait peu, au final, la réalité lyonnaise, niée jusque dans un décret du 12 octobre 1793 : « Lyon fit la guerre à la liberté, Lyon n’est plus. » Il fallait cependant compter avec la fréquente mention des jugements du Tribunal révolutionnaire ou des juridictions d’exception de Commune-Affranchie, avec des hymnes patriotiques et des procès-verbaux de cérémonies civiques et déchristianisatrices. L’essentiel de l’analyse reposait en fait sur l’étude des causes géopolitiques, sociales, morales, structurelles et conjoncturelles de l’insurrection lyonnaise, occasion d’un tableau des réseaux de la contre-révolution extérieure et intérieure, d’une mesure de l’émotion suscitée par la décapitation du roi, d’une dénonciation du luxe avilissant chez les Lyonnais « presque tous marchands ou esclaves de marchands » – une mise au ban des métiers de l’argent qui ramenait indubitablement le lecteur aux leçons des orateurs antiques.
Figure 1. – Siège de Lyon en octobre 1793, BnF-Gallica.

2L’historiographie lyonnaise, au moins jusqu’aux années 1920 (et la révision entreprise par Édouard Herriot), et les discours officiels sur la décennie révolutionnaire semblent cependant dévolus à deux moments-clés :
- à la mémoire condamnable des « Chalier », jacobins « exagérés » d’extraction modeste qui dominèrent pendant quatre-vingts jours la municipalité avant d’être renversés le 29 mai 1793, au prix de quarante morts puis de l’exécution, le 16 juillet, du meneur Joseph Chalier. Il est immédiatement élevé par les républicains au rang de martyr de la Révolution, et fêté comme tel au niveau national, tandis que nombre de ses partisans demeurent emprisonnés ;
- à la répression d’une cité de 150 000 habitants que la Première République avait rebaptisée « Commune-Affranchie », en réaction et aux tentations fédéralistes et au danger incarné par la reconquête royaliste qu’organisait l’ancien échevin Imbert-Colomès, fort de l’armée du colonel Précy et de puissants réseaux clandestins catholiques et laïcs2. Environ 1700 Lyonnais de toutes conditions en tombèrent victimes, guillotinés, fusillés, mitraillés de novembre 1793 à la mi-avril 1794, tandis que les plus belles façades de la ville, place Bellecour, jugées d’une fortune insolente, étaient martelées ou détruites3. Nombre de mémoires patriciennes sont dévotement dédiées depuis deux cents ans aux condamnés, conduisant même par deux fois à des tentatives de béatification (1926, 1986)4.
3Ces épisodes ont été préemptés a posteriori, et longuement, par les mémoires royalistes. Leur élaboration de l’histoire permet de taire ou de justifier la Terreur blanche, répandue à partir de février 1795 par les Muscadins et les Compagnons de Jésus contre les « mathevons », les jacobins du cru ou les hommes de l’Armée révolutionnaire en charge de l’administration de l’ancienne capitale des Gaules (environ 400 victimes, notamment dans les prisons). Alors que Bonaparte, de retour d’Elbe, est acclamé à Lyon le 13 mars 1815, où le comte d’Artois avait trois jours plus tôt reçu un accueil mitigé, les ultras revenus au pouvoir sont obsédés par l’alliance objective toujours possible entre les bonapartistes et les anciens « Chalier ». Ils y répondent par la propagande, la dénonciation et la rumeur de complots réels ou imaginaires, et une répression concomitante : 5 000 condamnations politiques entre juillet 1815 et décembre 1816, l’exécution du général d’Empire Mouton-Duvernet en juillet 1816, des épurations administratives, la répression de la conspiration et du soulèvement populaire du 8 juin 18175. Les rumeurs demeurent cependant chroniques (en 1820, entre l’assassinat du duc de Berry et le séjour du duc d’Angoulême), les émotions toujours possibles (ainsi, en 1822). Ces lourds héritages humains et historiques, sans cesse rejoués, pèsent lourdement à l’heure où la « chambre retrouvée » de 1824 marque l’écrasante victoire des ultras (415 sur 430 députés). Le concours de l’académie de Lyon, en 1824-1825, paraît comme un aboutissement de la réaction antijacobine.
Intentions et réseaux d’un concours académique
4En 1795, à l’heure où les symboles de l’an II sont éradiqués, le maire de Lyon donne le signal de cette réaction en demandant à ses administrés d’être « les terroristes des terroristes », haine pareillement répandue par le Journal de Lyon et du département du Rhône6. La mémoire des victimes lyonnaises du siège est brièvement honorée par l’édification d’un cénotaphe provisoire, brûlé l’année suivante par les « néojacobins », avant qu’un monument du souvenir n’émerge en 1819. Il ne survivra pas aux réaménagements urbains opportuns de la Troisième République, en 1890, en plein centenaire de la Révolution. En 1901, une chapelle expiatoire lui succède dans une rue des Brotteaux7. Dans le Programme des prix proposés par l’Académie royale des sciences, belles-lettres et arts de Lyon pour 1824 et 1825, concocté trente ans après les faits, est proposée « une pièce de vers sur le Siège de Lyon en 1793 » susceptible d’être couronnée d’une médaille d’or d’une valeur de 600 F ; les concurrents doivent envoyer leurs œuvres, portant en entête une devise ou une épigraphe répétée dans un billet cacheté contenant leur nom, leur qualité, leur adresse (p. 3)8. Le prix n’est pas distribué en 1824 mais reporté l’année suivante après étude des 44 œuvres parvenues.
5L’académie de Lyon, comme toutes les structures semblables sur le territoire national, avait été supprimée en 1793 et refondée en l’an VIII ; son ralliement à la Restauration est massif. Plusieurs de ses membres avaient péri en l’an II : trois avaient été guillotinés, trois étaient morts pendant le siège de la ville, dont deux en combattant. Le savant cénacle, autant qu’on puisse le reconstituer9, est désormais composé d’au moins 45 membres titulaires, d’une moyenne d’âge de 57,5 ans : 12 gens de justice (avocats, magistrats), 11 professionnels de santé (chirurgiens, médecins, pharmaciens, praticiens de l’École vétérinaire de Lyon), six hommes de sciences (botaniste, agronome, physiciens, mathématiciens), quatre architectes, cinq hommes de lettres, deux plasticiens, deux hauts fonctionnaires, deux bibliothécaires, un ecclésiastique. Se côtoient en fait d’anciens bonapartistes, comme Benoît Georges Najac, haut fonctionnaire sous l’Empire, des libéraux tel Adrien de Gasparin, fils d’un ancien Conventionnel, agronome et économiste ami intime de Guizot, et des partisans militants du régime. On compte parmi eux André Suzanne d’Albon, issu d’une vieille noblesse d’épée, qui a fui à Coblence puis, rentré sous l’Empire, a été nommé maire de Lyon en 1813, élu député du Rhône en 1815 – il sera pair de France en 1827 ; l’abbé Pierre-Étienne Bonnevie, ancien émigré désormais chanoine de la Primatiale de Lyon, ami de Chateaubriand, qui le cite dans ses Mémoires d’outre-tombe et dans sa Correspondance ; Paul Béraud, auteur dès 1794 d’une Relation du siège de Lyon, et surtout Pierre-Simon Ballanche, théoricien de la réaction catholique10.
Figure 2. – Michel Hénin, Aux malheureuses et innocentes victimes immolées à Lyon après le siège de leur patrie : monument élevé aux Brotteaux en 1795 et abattu en 1796, eau-forte, Archives départementales du Rhône, 1L 380.

6Seuls 9 des 44 auteurs du concours ont été identifiés, tous originaires de la région lyonnaise sauf un propriétaire de la région de Bergerac11. Ils sont majoritairement issus d’une bourgeoisie urbaine et lettrée : un traducteur d’Homère, un étudiant en droit, un académicien et homme de lettres, un avocat, un officier et un vétéran du siège de Lyon12. Le vainqueur du concours bénéficie d’un réseau bien établi au sein des académiciens lyonnais : Anne Bignan (1795-1861) est en effet le fils d’un député du Dauphiné aux États généraux et le neveu de Jean-Claude Fulchiron, polytechnicien et auteur dramatique, membre de l’académie de Lyon. Titulaire de plusieurs prix aux concours généraux de 1813 et 1814, Anne, qui a fréquenté le lycée Bonaparte et est accueilli en l’Académie des lettres de Cambrai, s’est fait connaître cinq ans plus tôt pour ses traductions d’Homère, comme il est consacré par les prix et accessits que lui valent ses vers de la part de l’Académie française, de l’Académie des jeux floraux, entre autres. Il vient juste d’être adoubé par la Société royale des bonnes lettres, le 23 mai 1825, pour son poème lyrique L’avènement de Charles X, ou les Trois visions. Il se veut pour les Lyonnais le successeur d’Horace : « Barbarus, heu ! cineres insistet victor et urbem/Dissipabit insolens13. »
7La seconde proposition, ex aequo avec la précédente, est issue des travaux de l’étudiant en droit François Coignet, originaire de Saint-Chamond où il assurera le secrétariat de la mairie à partir de 1829. S’étant déjà commis dans des fables ou des poésies légères, conscient de la gravité d’un dithyrambe héroïque et soucieux de ne pas être contredit par les grands témoins survivants, il prétend contre toute évidence à l’exactitude chronologique, ce qui ne va guère avec le genre privilégié. Il place son poème sous la protection de Voltaire, dont il cite La Henriade – en l’honneur d’Henri IV, déjà présent chez Bignan, qui redevient sous la Restauration une figure tutélaire référente. Déclinée dans la pierre et dans le verbe, la mémoire de 1793 est mise en abîme dans un récit qui réunit différentes générations : sollicité par son fils de seize ans, un vieillard, prosterné devant le monument expiatoire élevé en souvenir des victimes, lui raconte le siège. Il invite à une déambulation romantique le rêveur solitaire. Il va frémir de concert avec le récitant et son auditeur à l’évocation des « tigres » révolutionnaires et des flots de sang répandus, qui sacralisent un sol sur lequel la vie a repris14.
8Deux mentions honorables sont également accordées à une ode, dont les académiciens ne parviennent pas à identifier l’auteur15, qui n’a pas suivi les consignes, et à une élégie, Rhodaniennes (due à un jeune homme de 23 ans, Alexis Montandon, futur coauteur, en 1826, d’une Biographie contemporaine des gens de lettres de Lyon, et correspondant à Paris de la Société littéraire de Lyon), introduites respectivement par ces citations : « Moriamur, et in media arma ruamus, /Una salus victis, nullam sperare salutem16 » ; « Ingenium sacri miraris abesse Maronis17 ». L’ode compare les Lyonnais assiégés et les compagnons de Léonidas, et met en avant la trilogie « Honneur, patrie et liberté ». L’élégie insiste sur les horreurs qui suivent la reddition lyonnaise, les fusillades des Brotteaux (« Voyez-vous ces martyrs qu’on entraîne à la tombe !/Le plomb va disperser leurs membres mutilés ») ; ce grand moment de sacrifice, comme le veulent les théocrates contemporains, préfigure la renaissance espérée (« Venez puiser aux cieux l’oubli de vos douleurs : / La cité des nobles malheurs/Doit renaître bientôt plus brillante et plus belle »)18.
Manichéisme et amphigouri : l’univocité de l’histoire
9Les trois auteurs identifiés voient leur ouvrage publié, après le rapport fait par l’académicien et homme de lettres Jean Julien Trélis19. Ce dernier valorise les efforts « liant aux plus grands évènemens de notre histoire […] les plus honorables souvenirs et les plus hautes leçons […], des tableaux tour à tour touchants ou terribles », associant ce que « la pitié a de plus tendre, le dévouement de plus noble, le courage de plus héroïque, et les vertus de plus sublime », avantages que lui semble réunir le sujet mis au concours. Cependant, derrière l’emphase, Trélis reconnaît aussi la médiocrité de ce dernier : dans une Europe qui, il est vrai, compte, selon ses dires, à peine dix-sept poètes talentueux, il ne distingue aucun espoir, même au prix d’un travail soutenu. Les apprentis du concours lyonnais sont « pour la plupart restés fort en dessous de leur objet », superficiels, impersonnels et flous (tant et si bien que leur production aurait pu « tout aussi bien convenir au siège de Namur ou de Ptolémaïs qu’à l’héroïque résistance de Lyon ») ; d’aucuns ont au contraire noyé leur ouvrage sous les détails. L’amphigouri des textes confine à l’absurdité, les berges du Rhône devenant par exemple chez Bignan de lointains rivages. Des tournures prosaïques, des rimes bancales, des expressions impropres sont regrettées. Des chutes brutales au milieu des tirades montrent une incapacité à filer les métaphores, à construire du sens, et désarçonnent aussi le lecteur. Ainsi chez Coignet, qui compare la ville assiégée à un lion harcelé par des serpents, jusqu’à offrir autant d’invraisemblances zoologiques :
Un lion assailli par de nombreux serpens,
Dont la langue en espoir de carnage s’abreuve,
Longtemps debout, insulte à ces monstres rampans,
Cède, et la troupe avide, à la nage élancée,
Autour de sa victime enlaçant ses anneaux,
L’œil en feu, la crête dressée,
Ivre de tout son sang qui ruisselle à longs flots
De son corps déchiré disperse les lambeaux20.
10Dans leur effort pour élever un cénotaphe aux seules victimes royalistes du siège de Lyon, il y a sans doute chez ces auteurs plus de récurrences que de fulgurances, de mirlitons que de lyres. Leur jeunesse en plus, ils partagent bien des caractéristiques avec les louangeurs de la Restauration plus globalement étudiés par Corinne Legoy : une diversité sociale limitée, un tropisme provincial favorable à un arc rhônalpin gagné aux ultras, une appétence pour la culture classique et pour un engagement et une mission d’édification dans l’espace public. Au nom de celle-ci, ils font un usage immodéré du pathos dans un temps affectif bâti sur des hantises, des obsessions, des songes prophétiques, un devoir d’émotion que rappellent injonctions, exhortations, imprécations, déplorations. Comme le veut Ballanche, la sollicitation du cœur est au centre de leurs récits édifiants, en lieu et place des tares supposées de leurs adversaires, renvoyés à la tératologie : la froide raison révolutionnaire, la gravité républicaine, l’insensibilité ou les passions irrépressibles et fanatiques. Leurs visées mémorielles manichéennes les conduisent à une hypertrophie du récit sanguinolent de l’événement traumatisant, du crime originel, à une juxtaposition de couches temporelles, une monumentalisation du passé et une conjuration de l’avenir propres à définitivement oublier la parenthèse révolutionnaire. Le topos de la vertu dans le malheur irrigue leur martyrologe, tout entier destiné à consolider les communautés politiques qui s’y retrouvent, à les souder dans une parole de gloire21.
11Des poèmes tirés du marais de l’oubli, il ne ressort rien de la complexité des positionnements politiques des Lyonnais durant le printemps et l’été 1793, ainsi que de l’incompréhension croissante qui gagne les relations entre Paris et Lyon, mésintelligence qui, avivée de part et d’autre au gré d’un « double jeu de miroirs déformants », conduit à la rupture entre les deux villes, au nom de la République22. Dans le sillage des relectures de l’événement proposées par les auteurs royalistes dès l’époque de la réaction thermidorienne, ne reste plus que l’affrontement radical de deux mondes, de deux systèmes de valeurs définis par leur altérité absolue. D’un côté, une histoire longue et immuable, celle des rois et de la religion chrétienne, celle de cette « chaîne des temps » que la Restauration est supposée avoir renoué. Temporalité heureuse que celle-ci, où chacun éprouve le bonheur simple d’être à sa juste place, dominante ou dominée, dans un ordre stable.
Lyon vivait heureux au sein de l’abondance,
Fruit de son industrie et d’un commerce immense,
Il imposait partout de fort riches tributs,
Par l’art de ses brocarts et de ses fins tissus.
Dans ses paisibles murs la bienfaisante Saône,
Coulait tranquillement pour s’allier au Rhône.
Et ses somptueux quais offraient dans tous les temps,
D’élégants promenoirs et chantiers abondants.
Le peuple était content, le temps était prospère,
Quand on vit sans soucis, on sent peu la misère !
L’ouvrier imprévoyant, comme ils le sont toujours,
Chaumait [sic] chaque semaine au moins deux ou trois jours.
Il revenait joyeux s’asseoir sur sa banquette,
Après avoir laissé reposer sa navette […]
Le fameux siècle d’or inventé par la fable,
Sous le bon Louis Seize, était bien véritable23 !
12D’un autre côté, une histoire courte et désordonnée, brutale et barbare, un ordre contre-nature et monstrueux (« Une révolution vient pour tout bouleverser/Et sous des noms pompeux, inaugurer l’enfer/Car les révolutions sont des épidémies/L’on ne prévoit jamais quand elles sont finies24 »). Les humbles, par excès d’ignorance autant que par une trop longue habitude du confort d’être pauvres dans une société bien faite, s’y trouvent manipulés par des hommes assoiffés de sang et de pouvoir. Ceux-là sont emmenés par le « cruel Robespierre », dont le seul but était de faire régner la « terreur » et « l’anarchie ». Si le repaire des brutes révolutionnaires est essentiellement parisien, selon ces poètes, quelques-uns de ces hommes de sang se répandent toutefois dans la bonne ville de Lyon. Cette « populace », excitée par Chalier, y demeure cependant toujours minoritaire et comme étrangère au reste de la civitas.
Par l’intrigue des clubs, Bertrand est élu maire ;
Magistrat sans vertu, faible de caractère,
Dans le crime à grands pas par Chalier entraîné ;
Que de maux ont suivi son règne infortuné !
Hélas ce choix forcé précurseur de l’orage
Nous annonça des maux pires que le pillage !
Rappellerai-je ici ces graves attentats
Qu’ont toléré trois jours d’indignes magistrats ?
Nos citoyens ont vu ces bandes de furies,
Ces femmes ressemblant aux hideuses harpies,
Forcer chaque demeure, et leur rapace main
Avec impunité se charger de butin ;
Mais ces événements que les bons cœurs plaignirent
Ne sont rien près de ceux qui bientôt les suivirent.
On ouvre un nouveau club aux oratoriens,
Où se rendent le soir les plus vils citoyens.
Là, Chalier tonne, éclate en style incendiaire,
Excite à mille excès la classe populaire ;
« Méritez, leur dit-il, l’heureuse égalité,
Par le sang doit fleurir l’arbre de liberté ;
Sans-culottes marchez, osez tout entreprendre
Vôtre [sic] salut dépend du sang qu’il faut répandre25. »
13C’est évidemment rappeler aux contemporains cette idée reçue de la prose royaliste, qui se ressaisit sans cesse de l’histoire des violences politiques des années 1790 pour signifier l’inévitable régression des hommes à la bestialité dès lors qu’ils cèdent aux idéaux révolutionnaires. Les participants au concours de 1824-1825 opposent, d’une part, les bons Lyonnais, construits littérairement comme des « ultra-personnes » amenées, par la multitude des détails qui les caractérisent, au « degré ultime de l’humanité » (le troisième poème se plaît par exemple à nommer et à rapporter les hauts faits de maints minores qui firent la gloire de Lyon en ce temps-là) ; de l’autre, les révolutionnaires, Lyonnais ou Parisiens, qui, à l’exception des chefs (les Robespierre, Chalier, Dubois-Crancé…), ne sont quant à eux que des ébauches d’hommes sans nom, foule insaisissable et hideuse, « populace » déshumanisée (« tigres », « harpies », « hordes », « cohortes », « assassins »…) tout entière résumée par ses engagements politiques. Ce procédé scripturaire fait des sans-culottes autant d’« hommes-objets », supports d’un discours centré sur l’inhumaine valeur de cette monstrueuse chimère (qualifiée d’hydre sanglante26) qu’est la Révolution.
14La révolte des Lyonnais contre les outrances des « Chalier »27 n’en est que plus légitime28. L’immense majorité de la population reprend militairement le contrôle de la situation, le 29 mai 1793, en s’emparant de l’Hôtel-de-Ville où se sont réfugiés les jacobins. Là est, pour ces poètes, l’acte inaugural de « l’année terrible » de Lyon. Dans le récit, la justesse de la cause ne fait aucun doute. Elle est signifiée par l’effort de guerre quasi unanime à l’intérieur de la cité assiégée. Une fois les terroristes éliminés, les ouvriers et autres éléments les plus humbles de la société sont tous admirables de dévouement, ainsi que les vieillards, les femmes et les enfants, cette ronde solidaire des générations que revendiquait pareillement la Révolution. Au représentant Dubois-Crancé, qui aurait laissé sciemment se décomposer les corps morts de ses propres soldats sous les murs de la ville, afin d’y répandre la peste, les Lyonnais ne répliquent jamais que par des combats conventionnels, face à face, en dépit de la déloyauté, de la fourberie et de la dissimulation employées par les soldats adverses. La dureté extrême de la violence subie – par ailleurs bien réelle – constitue, de fait, l’objet fondamental de ces poèmes, comme le signalent avec force les choix lexicaux opérés par les auteurs, qui provoquent une amplification rhétorique de l’horreur vécue.
Les mots et les images de la propagande

15Nous avons procédé à l’analyse lexicométrique de douze poèmes représentant environ un cinquième du total des vers soumis au concours de l’académie de Lyon. Dans ce siège de papier, le vocable utilisé rend l’encerclement total, le confinement des Lyonnais dans la cité martyre sans issue : les « murs », les « murailles », les « remparts », les « portes » de la ville sont omniprésents, qu’entourent d’une étreinte mortelle les armées ennemies composées, selon certains, de rien moins que 100 000 hommes… au prix de quelques accommodements avec le réel, puisque durant le premier mois du siège les Lyonnais pouvaient assez aisément sortir de la ville par l’ouest, où la présence des troupes de la Convention (dont les effectifs totaux sont plutôt de l’ordre de 25 000 soldats, fin septembre) était encore relativement discontinue. Dans cette ville repliée sur elle-même, le « sang » coule à flot, le « malheur » accable les Lyonnais (quand la « joie », elle, est fort peu mentionnée), ainsi que la « tristesse », la « douleur » et les « pleurs ». Les « combats », les « soldats » et les « troupes », les « coups », l’« horreur », les « crimes » – partant, une violence dont on ne reconnaît pas la légitimité –, la « fureur » et la « rage » sont omniprésents. La « mort » elle-même est quotidienne, qui produit ses « tombes », ses « tombeaux », ses « cercueils ». Symboliquement, il n’est pas anodin que la « nuit » soit la temporalité privilégiée de la narration du siège – le terme « jour », certes deuxième mot le plus utilisé par les poètes, ne renvoie pas toujours à un moment particulier de la journée. Si les assiégeants ont effectivement fait feu sur la ville aux heures nocturnes (ce qu’ils appelaient le « feu du soir », de 9 h à minuit, en général29), dans le cadre d’une stratégie militaire plus générale visant à saper le moral et la résistance des Lyonnais, force est cependant de constater qu’ils ont tout autant attaqué aux heures diurnes. L’obscurité favorise la mise en scène d’un trait récurrent, et bien réel, du siège : l’usage des boulets rouges et des bombes incendiaires par les armées de la Convention, qui devaient provoquer de très importants dégâts dans la ville (« foudres », « frappes », « débris », « incendies », en soulignent les conséquences). Deux moments fixent plus particulièrement le souvenir de cet embrasement : l’explosion des réserves de poudres stockées à l’Arsenal, dont le souffle défigure tout le quartier30 ; le bombardement de l’Hôtel-Dieu, surmonté du dôme de Soufflot, érigé en symbole d’une guerre qui prend aussi pour cible les malheureux, les faibles et les démunis31.
16Aux ravages incendiaires s’ajoute bientôt, et c’est la deuxième scène des malheurs de la ville, le tarissement des ressources alimentaires qui devait amener avec lui la disette puis la famine et, pour tous les contributeurs, l’affaiblissement physiologique de la population lyonnaise. « J’ai vu l’élite de ses braves/D’une armée arrêter l’effort, /Repousser le joug des esclaves, /Lasser la famine et la mort », témoigne Terrasson32. La grandeur et la noblesse de la cause de Lyon en ressortent confortées puisque la cité continue, malgré les privations – là aussi bien réelles –, à se défendre avec bravoure. Cernée, affamée, brûlée, peuplée par le deuil, la « cité des Césars » devait tenter un dernier geste héroïque avant de succomber entièrement : la sortie de la ville par ce qu’il restait en son sein de soldats vivants, conduits par le commandant des forces assiégées en personne, le colonel Précy, le 9 octobre 1793 au petit matin. L’histoire de ce moment final et dramatique du siège – la colonne est très vite mise en déroute, et Précy fuit vers la Suisse – permet de conclure sur les opérations militaires, soulignant une dernière fois la valeur collective de Lyonnais, certains que leur combat mérite leur sacrifice ultime plutôt que leur reddition. Cette sortie ne fait, en réalité, « que » 10 % de victimes parmi les 700 personnes qui y participent, les autres étant, pour l’essentiel, arrêtées par les troupes de la Convention33.
17Enfin, le dernier acte est bien sûr la terrible répression qui s’abat sur la ville dès les lendemains du siège et jusqu’au printemps 1794. Mais, contre toute attente, elle n’occupe pas, dans le récit, une place éminente. Les représentants du peuple en mission présents dans la ville lors de la répression sont soit totalement ignorés (Fouché), soit marginalement évoqués (Collot d’Herbois n’est mentionné qu’à six reprises, Couthon deux fois seulement, d’ailleurs dans le même poème et à deux vers d’intervalle). L’épisode, aussi sinistre que fameux, des canonnades de la plaine des Brotteaux, dont la postérité fera grand cas, n’est guère mis en avant34, même si le sujet de la répression contribue au climat d’épouvante qui oppresse la ville35. S’en tenant en cela au sujet du concours proposé par l’Académie, les poètes se sont donc surtout concentrés sur le siège, sa genèse, son déroulé et ses horreurs spécifiques, et ont peu évoqué les principaux protagonistes, sauf Chalier, Dubois-Crancé et Précy.
18Toute la difficulté pour les auteurs tient à ce que le sort des armes, habituellement considéré comme source de légitimation pour la cause victorieuse, a basculé en faveur des révolutionnaires en 1793. Pour surmonter ce dilemme, les poètes usent volontiers d’un procédé narratif qui distingue deux temporalités bien différentes : celle des événements racontés (1793) et celle de leur narration (1824). Partir et revenir en 1824 permet alors de présenter la victoire des troupes de la Convention comme un trompe-l’œil, condamné tant par l’histoire des hommes que par Dieu lui-même, qui a « prescrit un terme au bonheur des méchants ». Lyon est revenu aux siens comme le trône et l’autel ont été rétablis. Cette histoire à nulle autre pareille d’une victorieuse défaite s’offre alors comme une contribution explicite et efficace à la lutte séculaire menée contre le principe révolutionnaire. Songeons à ce poème qui s’ouvre en rapportant l’histoire d’un jeune voyageur de l’année 1824. Épris des valeurs révolutionnaires, il recueille le témoignage d’un vieillard aux abords du monument expiatoire des Brotteaux, et se convertit aussitôt à la monarchie restaurée :
Pour moi, l’esprit frappé des lugubres tableaux
De ces temps où les lois sont aux mains des bourreaux,
Je rejette bien loin ces funestes maximes
Dont le poison répand la semence des crimes.
Je reconnais le joug de ce pouvoir sacré
Par qui de l’ordre au moins le règne est assuré.
Enfin si désormais ma patrie en alarmes
Voit briller à ses yeux de parricides armes :
Ô mes concitoyens, dirai-je, gardez-vous
De souiller par vos mains, de briser par vos coups
Le sceptre de vos rois. Sauvez-le des tempêtes,
Ses débris en tombant écraseraient vos têtes36.
19Si le « pacte de pardon et d’oubli » que Louis XVIII avait cru pouvoir placer au cœur de sa Charte, en 1814, a très vite vécu à l’échelle nationale – les régicides contraints à l’exil, en janvier 1816, en savent quelque chose –, ces dizaines de poèmes du mitan des années 1820 ne signalent pas seulement qu’il en va de même à l’échelle locale. Ils témoignent également des usages pluriels que fait la société lyonnaise des événements traumatiques de l’année 1793 (ici sous la forme de la poésie) pour conjurer dans le présent le péril de la subversion sociale et politique. Car, dans les années 1820, le principe révolutionnaire hante plus que jamais une bonne partie de l’oligarchie urbaine, à commencer par celle ralliée aux ultras, toute à sa volonté de revanche. À l’heure où la « réaction absolutiste » connaît, en 1824, un tournant majeur avec l’accès au trône de Charles X, les choix narratifs opérés par les poèmes adressés à l’académie de Lyon participent à leur manière de cette lutte. Ils cherchent à établir de façon édifiante l’incompatibilité toujours valable des deux conceptions de la cité qui se sont affrontées à la fin du xviiie siècle. Ils font, en dernier ressort, la preuve par le recours à un passé déjà mythifié que l’inégalité des hommes peut être heureuse dès lors qu’elle est placée sous l’égide de la monarchie, de l’Église et de cette bourgeoisie marchande qui fit les riches heures de Lyon, à rebours de la liberté, et plus encore de l’égalité républicaines, jugées funestes. L’occultation des divisions internes à la société lyonnaise de 1793, remplacées par un affrontement politique manichéen jusqu’à l’extrême, produit en partie par les luttes de la Restauration, provoque alors une perte de l’intelligibilité historique du siège de Lyon. Il n’en reste plus, et jusqu’à nos jours souvent, que le souvenir du sang, des larmes et de la violence : le souvenir d’une « année terrible ».
Notes de bas de page
1 Trénard Louis, Histoire sociale des idées. Lyon, de l’Encyclopédie au préromantisme, Paris, PUF, 2 vol., 1958 ; « Les périodiques lyonnais dans les luttes révolutionnaires (1792-1794) », dans Rétat Pierre, La Révolution du journal, Paris, CNRS, 1989, p. 297-306 ; Bourdin Philippe, Le Noir et le Rouge. Itinéraire social, culturel et politique d’un prêtre patriote (1736-1799), Clermont-Ferrand, Presses universitaires Blaise-Pascal, 2000 ; du même, « Entre Rhône et Allier, les délégués des représentants en mission : dévolution et interprétation des pouvoirs », dans Chagny Robert (dir.), La Révolution française : idéaux, singularités, influences, Presses universitaires de Grenoble, 2002, p. 329-344 ; « Artistes et missions patriotiques en Rhône et Loire (1793-1794) », dans Bourdin Philippe et Loubinoux Gérard (dir.), Révolution française et arts de la scène, Clermont-Ferrand, Presses universitaires Blaise-Pascal, 2004, p. 131-162 ; « Terreur et journalisme culturel dans Commune-Affranchie », dans Seth Catriona et Wauters Éric, Un siècle de journalisme culturel en province (1785-1885) en Normandie et dans d’autres provinces, Presses de l’université de Rouen et du Havre, 2011, p. 55-74.
2 Chopelin Paul, Ville patriote et ville martyre. Lyon, l’Église et la Révolution (1788-1805), Paris, Letouzé et Ané, 2010.
3 Biard Michel, 1793. Le siège de Lyon, entre mythes et réalités, Clermont-Ferrand, Lemme Éditions, 2013.
4 Benoît Bruno, L’identité politique de Lyon, entre violences collectives et mémoire des élites (1786-1905), Paris, L’Harmattan, 1999 ; du même, « Histoire, mémoire et identité politique : l’exemple de la Révolution à Lyon », AHRF, n° 305 (1-1996), p. 491-509 ; Dujardin Philippe, « Politique du deuil, politique de la perplexité, Lyon 1993 », Cahiers d’histoire, n° 3-4/1993, p. 365-389.
5 Ribe Georges, L’opinion publique et la vie politique à Lyon lors des premières années de la seconde Restauration. La réaction ultra et l’expérience constitutionnelle (17 juillet 1815-9 janvier 1822), Paris, Librairie du recueil Sirey, 1957 ; Bourguignat Nicolas, « La ville, la haute police et la peur : Lyon entre le complot des subsistances et les manœuvres politiques, 1816-1817 », Histoire urbaine, n° 2-2000, p. 131-147 ; Bourguet-Rouveyre Josiane, « Les bonapartistes dans les conspirations de 1815 à 1823 », dans Gainot Bernard et Serna Pierre (dir.), Secret et République, 1795-1840, Clermont-Ferrand, Presses universitaires Blaise-Pascal, 2004, p. 129-143 ; Boisson Nicolas, Une approche socio-historique de la violence au xixe siècle : le cas d’une conspiration à Lyon en 1817, mémoire de master, université Pierre-Mendès-France (Grenoble III), 2008. Anciens « Chalier » et bonapartistes mobilisent, via une structure pyramidale, cloisonnée, autorégulée et ritualisée, comparable à la Charbonnerie, et via des comités militaires secrets, les municipalités rurales périphériques de Lyon, beaucoup de gardes nationaux, d’artisans, cocardes tricolores au revers et revendications bonapartistes ou frumentaires à la bouche. Réprimée par le général Carruel, le préfet du Rhône Chabrol et le maire de Lyon Mallet de Fargues – ces deux derniers, Auvergnats d’origine, ayant servi depuis 1791 au moins les réseaux de la Contre-Révolution –, leur révolte de la faim est traduite par les ultras comme une tentative de sédition républicaine favorisée par les mesures trop laxistes du pouvoir, une réminiscence des grandes heures jacobines de 1793. Le ministère de la police générale se montre dubitatif. Le lieutenant de police Charrier de Sainneville et le colonel Fabvier, sous les ordres du maréchal Marmont envoyé pour enquêter par Decazes, ont le courage de dénoncer la manipulation des ultras, prouvant que des infiltrés et des provocateurs issus de leurs rangs ont incité les révoltés au mouvement, que la surveillance et la répression de l’an II ne sont pas incarnées par ceux que l’on croit. Leurs écrits leur valent une condamnation pour diffamation, finalement payée par une souscription de 12 000 libéraux lyonnais. Un traitement judiciaire expéditif conduit à 23 condamnations à mort (dont 11 exécutées de village en village, 11 par contumace, 1 commuée), 24 déportations, 4 peines de travaux forcés, 39 emprisonnements correctionnels – pour 118 individus traduits devant les tribunaux.
6 Fuoc Renée, La réaction thermidorienne à Lyon (1795), Lyon/Paris, IAC, 1957.
7 Biard Michel, op. cit., p. 90.
8 Programme des prix proposés par Lyon l’Académie royale des sciences, belles-lettres et arts de Lyon pour 1824 et 1825, Lyon, Imprimerie Durand et Perrin, 1823.
9 D’après le site en ligne du CTHS.
10 Ozouf Mona, « Ballanche : l’idée et l’image du régicide », dans L’Homme régénéré. Essais sur la Révolution française, Paris, Gallimard, 1989, p. 183-210.
11 Bibliothèque de l’Académie des sciences, belles-lettres et arts de Lyon (BASLAL), ms. 244 : œuvres soumises au concours de poésie de 1824-1825. Merci à Pierre Crépel de nous avoir signalé l’existence de cette source et de nous en avoir facilité l’accès.
12 Alexandre Sennerat, vétéran du siège de Lyon ; Dupuis, officier au 32e régiment, en garnison sur place ; Henri Terrasson, d’Aix-en-Provence, auteur d’une traduction en vers de l’Enfer de Dante, d’un Essai d’imitations d’Eschyle en vers, d’une traduction en vers de Jérusalem délivrée, et qui s’est rangé derrière les constitutionnels pour plaider la clémence et la liberté dans son ode à La mort du duc de Berry (1820) ; Eugène Gromier, avocat à Bourg-en-Bresse, né en 1794, futur auteur des Byroniennes, un recueil d’élégies (1827), qui a épousé en 1815 Anna Catharina Augustina de Kuhlewein (1788-1846), une Hollandaise fille d’un officier au service de l’Autriche puis de la République batave : autant de liens avec l’histoire contemporaine qui comptent à l’heure de versifier.
13 « Hélas ! le Barbare victorieux foulera nos cendres » (Horace, Épodes, ode XVI : « Aux Romains »).
14 Coignet François, Le siège de Lyon. Poème dithyrambique, Paris, Dupont et Roret, 2e édition, 1825.
15 Breghot du Lut Claude, Compte rendu des travaux de l’Académie royale des sciences, belles-lettres et arts de Lyon pendant le second semestre de 1825, lu dans la séance publique du 31 août 1825, Lyon, Barret, 1825, p. 44 ; Dumas Jean-Baptiste, Histoire de l’Académie royale des sciences, belles-lettres et arts de Lyon, t. 2, Lyon, Gilberton et Brun, 1839, p. 534-535.
16 « Mourons, et précipitons-nous au milieu des armes. Le seul salut pour les vaincus est de n’attendre aucun salut » (Virgile, Énéide, livre II).
17 « Tu es étonné de ne pas rencontrer un génie divin comme Virgile » (Martial, Épigrammes, livre VIII).
18 Montandon Alexis, Le siège de Lyon, Lyon, Rusand, 1825.
19 Archives statistiques du département du Rhône, t. 2, Lyon, Barret, 1825. « Rapport de la commission chargée de l’examen du concours pour le prix de poésie », p. 365-386.
20 Ibid., p. 370.
21 Legoy Corinne, L’enthousiasme désenchanté. Éloge du pouvoir sous la Restauration, Paris, Société des études robespierristes, 2010.
22 Biard Michel, op. cit., p. 5-25.
23 BASLAL, ms. 244, La Lyonniade, poème en quatre chants ou relation exacte du mémorable siège de Lyon en l’année 1793, 1824.
24 Ibid.
25 BASLAL, ms. 244, Le siège de Lyon en 1793, poème en quatre chants, 1824.
26 Ibid., Le siège de Lyon en 1793, ode, 1824 : « Quel hydre aux têtes renaissantes/Remplit l’Europe de terreur, /Et vibre ses langues sanglantes, /Instruments de mort et d’horreur ? »
27 Ibid., Le siège de Lyon en 1793, poème en quatre chants, 1824 : « Chalier, qui siège alors au club, au tribunal/doit à l’aide des siens, dès l’aube matinale/placer au pont-morand la machine fatale/ là conduits, mis à mort, les proscrits arrêtés/dans le fleuve aussitôt doivent être jetés ;/et le Rhône emportant leurs dépouilles sanglantes/doit donner le signal aux provinces tremblantes. »
28 Koï Takashi, Les « Chalier » et les sans-culottes lyonnais, thèse de 3e cycle sous la dir. de Maurice Garden, université Lyon II, 1974.
29 Biard Michel, 1793, le siège de Lyon…, op. cit., p. 50-51.
30 BASLAL, ms. 244, Lyon assiégé, ode, 1824 : « Ô revers ! L’arsenal soudain saute, et s’embrase/le salpêtre détruit nos murs, nos ateliers./L’éruption terrible, en ses débris écrase/celui qui déserta ses paisibles foyers. »
31 Ibid., Le siège de Lyon en 1793, poème en quatre chants, 1824 : « L’asile du malheur, des maux, de la souffrance, /Qu’éleva de nos rois l’auguste bienfaisance/Où l’art le plus divin secourt l’humanité, / Ce temple saint n’est point par Crancé respecté ;/Le barbare se fait un plaisir exécrable/De saper de Soufflot le chef-d’œuvre admirable ;/Vainement sur le dôme on place un drapeau noir/Sur l’hospice le feu ne cesse de pleuvoir. »
32 Ibid., Le siège de Lyon en 1793, ode, 1824.
33 Chopelin Paul et Couriol Étienne, « La sortie de l’armée lyonnaise (9-11 octobre 1793) », dans Bulletin de la Société historique, archéologique et littéraire de Lyon, XXXVI, 2011, p. 303-332.
34 BASLAL, ms. 244. Le poème n° 10 est de ceux, peu nombreux, qui évoquent ces canonnades. Il rapporte ainsi les exécutions du 15 frimaire an II : « Le peuple contemplant ce cortège terrible, / se sentait attendri sur le supplice horrible./Les malheureux à peine arrivent aux Brotteaux, /Que soudain le signal est transmis aux bourreaux./Les canons ont vomi la matière enflammée ;/Telle du haut des cieux part la foudre allumée ;/La mitraille en éclats, tombant avec fracas, /Sur deux cent neuf martyrs fait jaillir le trépas./À l’instant renversé, le fils meurt sur son père, /L’ami sur un ami, le frère sur un frère ;/Expirants, mutilés, souffrant de maux affreux, /Ils remplissent les airs de leurs cris douloureux ;/Des assassins tout prêts, armés par la furie/Achèvent par le fer de terminer leur vie. »
35 Ibid., poème n° 11 : « Muse, fuyons ces murs en proie à des bourreaux !/Mon crayon se refuse à ces sanglants tableaux./Et comment peindre encore ce long tissu de crimes ?/Ces échafauds roulants, ces moissons de victimes, /Ces foudres des combats, choisis pour remplacer/Le glaive de la mort trop prompt à s’émousser, /Et Lyon, tout saignant du fer de l’anarchie, /Paré du titre amer de commune affranchie ! »
36 BASLAL, ms. 244, Le siège de Lyon, poème élégiaque, 1824.
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