« Syphiliser » Saint-Malo ?
Prophylaxie et tourisme sur la Côte d’Émeraude pendant la Grande Guerre
p. 339-353
Texte intégral
1Hospitalisé à Saint-Malo à partir de janvier 1915, puis résidant sur la Côte d’Émeraude jusqu’en juin 1916, le compositeur belge Georges Antoine laisse à l’historien qui s’intéresse à la Première Guerre mondiale une bien étrange correspondance1. En effet, c’est l’image d’une sorte d’enclave de villégiature, évoluant au rythme des salons et des concerts, dans un temps comme presque en dehors de la guerre, qui émane des dizaines de lettres qu’il adresse à ses proches pendant cet exil breton.
2Pourtant, tous les Malouins ne vivent pas en dehors de la guerre et la région, comme toutes les autres, paie un lourd tribut au conflit2. Loin de cette bonne société évoluant comme en vase clos, se profile même, au printemps 1916, soit quelques semaines seulement après le déclenchement de la bataille de Verdun, un étrange danger, celui que fait planer le péril vénérien. À en croire le général d’Amade, commandant la 10e région militaire, la situation est telle qu’elle « menace de plus en plus de compromettre la qualité et aussi quelque peu la quantité » des effectifs3. Les chiffres sont en effet perçus par les autorités comme alarmants puisque les départements des Côtes-du-Nord, d’Ille-et-Vilaine et de la Manche occupent une bien peu glorieuse troisième place au classement national des régions militaires les plus infectées. Particulièrement touché, le secteur de Saint-Malo est l’un de ceux qui inquiètent le plus. Or, dans un conflit total où toutes les ressources sont mobilisées par et pour l’effort de guerre, ce péril revêt rapidement une importance certaine : plus d’hommes infectés, c’est en effet plus de malades qu’il faut traiter pendant de longs mois et donc moins de poilus disponibles pour le front. Aussi, c’est tout naturellement que les autorités prennent les mesures qui s’imposent. Mais, contre toute attente, celles-ci provoquent à Saint-Malo d’importantes résistances, tout particulièrement parmi ceux que nous pourrions appeler, non sans anachronisme, les « professionnels du tourisme ». Dès lors, la prophylaxie4 s’affirme comme une frontière de la mobilisation pour l’effort de guerre et, in fine, invite à nuancer la dimension totale du conflit.
3Après avoir vu comment celui-ci pénètre, au fil des mois, les champs de l’intime et de la sexualité, nous montrerons comment les résistances aux mesures prophylactiques préconisées relèvent d’un espace balnéaire et touristique préservé. Ce faisant, c’est bien un véritable front intérieur, résultant de priorités antagoniques, qui de la sorte se dévoile.
La sexualité : un champ échappant au conflit ?
4La guerre censée être courte – pour ne pas dire « fraîche et joyeuse » – qui éclate en août 1914 ne fait que peu de cas de la sexualité. Mais l’enlisement dans les tranchées et l’impossibilité de percer les défenses adverses, et donc de percevoir à plus ou moins brève échéance une issue au conflit, rend cette question plus prégnante. D’autant plus que le développement des maladies vénériennes laisse entrevoir un champ que les autorités, tant militaires que civiles, sont incapables de réguler.
Août 1914 : une guerre courte donc chaste ?
5Publiée à Saint-Malo quotidiennement puis tous les deux jours à partir du 11 août 1914, La Dépêche reprend « dans un but d’utilité publique, pour faire connaître à tous, les dépêches officielles de la journée et les renseignements administratifs de nature à favoriser l’élan de fraternité sociale que la guerre a suscité dans notre pays5 ». Ce journal constitue à cet égard une source particulièrement intéressante qui montre combien, lors de son déclenchement, le conflit ignore le champ de la sexualité. Si l’ordre moral qu’impose la mobilisation pour la défense de la patrie interfère avec la sphère privée des Malouins, c’est la boisson et non la chair qui focalise alors les attentions. Il est vrai que l’alcool coule à flots lors de la mobilisation générale, ce qui peut expliquer la promptitude de la réaction des autorités6.
6Pour autant, la situation évolue entre 1914 et 1918, laissant entrevoir un processus de totalisation du conflit, tendance inégalement aboutie suivant les espaces considérés. On sait par exemple les mesures prises à Bruxelles à partir de 1915 par les Allemands pour organiser la prostitution afin de répondre aux besoins des nombreux soldats de passage dans cette ville7. Si rien de semblable n’existe à Saint-Malo, cela ne signifie pas pour autant que la Côte d’Émeraude échappe à cette immixtion du conflit dans les pratiques sexuelles.
La nécessité prophylactique
7Il ne fait en effet aucun doute que c’est bien sous l’angle d’une menace portée à l’effort de guerre qu’est envisagée la syphilis. Une circulaire qu’adresse le 5 janvier 1916 Justin Godart, sous-secrétaire d’État du Service de santé militaire, au général commandant la 10e région militaire fait ainsi explicitement le lien entre corps de troupe et maladies vénériennes. Il est vrai que les départements des Côtes-du-Nord, de la Manche et de l’Ille-et-Vilaine occupent à l’été 1916 une bien peu reluisante troisième place au classement des régions militaires les plus infectées (fig. 1), avec plus de 450 cas de blennorragie et 70 de syphilis recensés au cours des mois de juillet et août. On pourra toujours arguer du fait que ces chiffres rapportés à la population globale de ces trois départements sont dérisoires et que la situation de la 10e région n’est peut-être pas aussi inquiétante que celle de la 14e ou du gouvernement militaire de Paris, c’est sans doute l’évolution à la hausse de ces statistiques qui conduit les autorités militaires à réagir aussi promptement8. Dans la subdivision de Saint-Malo et plus particulièrement encore sur la Côte d’Émeraude, la situation semble particulièrement critique. Le général d’Amade souligne par exemple que sur les « 113 militaires atteints d’affections vénériennes hospitalisés en novembre 1917 au centre de Plouguernevel [près de Rostrenen, dans les Côtes-du-Nord], 22 malades ont été contaminés à Saint-Malo9 ».
8Quinze lits sont d’ailleurs réservés dans cette ville aux « civils des deux sexes » atteints par une maladie vénérienne. Ce chiffre paraît d’autant plus important qu’aucune mesure particulière n’est prise à Fougères, Redon ou encore Vitré et que ces lits doivent être ajoutés à ceux que l’hôpital du Rosaire à Saint-Servan affecte aux syphilitiques « selon les besoins ». Au total, en Ille-et-Vilaine, seule la ville de Rennes est mieux équipée avec 24 lits. Mais la situation de Saint-Malo ne doit pour autant pas tromper. Le docteur Peynaud, chargé des malades vénériens à l’hôpital général, n’est pas spécialiste de ces affections et, de surcroît, ne peut compter sur l’aide d’aucun laboratoire d’analyse10. Toutefois, ces lits s’accompagnent de mesures prophylactiques éducatives telles que conférences et projections cinématographiques, ciblant particulièrement l’incorporation des nouvelles classes. L’instruction du 25 septembre 1916 émise par le Sous-secrétariat d’État du Service de santé militaire prescrit également que des séances de dépistage soient organisées au cours de visites de santé qui, réglementairement, doivent se tenir tous les quinze jours. De même, une attention toute particulière est censément portée aux permissionnaires, ceux-ci devant être théoriquement examinés à leur départ puis lors de leur retour11.
Figure 1. – Nombre de cas de maladies vénériennes recensés en juillet et août 1916 par régions militaires.

Source : AD Ille-et-Vilaine, 5 M 120, note sur les maladies vénériennes à l’Intérieur et aux Armées pendant les mois de juillet et d’août 1916, p. 2.
Des mesures peu efficaces
9Il est néanmoins intéressant de remarquer que les mesures prises pour lutter contre le péril vénérien se focalisent grandement sur le prisme prostitutionnel, comme si seules les filles de joie pouvaient transmettre la syphilis. Après avoir identifié Saint-Malo comme un important foyer infectieux, le général d’Amade prie ainsi le préfet d’Ille-et-Vilaine « de vouloir bien intervenir près de la municipalité malouine pour qu’un contrôle plus actif de la prostitution soit exercé dans cette ville notamment au point de vue médical12 ». Et il ne s’agit pas là d’un exemple isolé. La circulaire du 25 septembre 1916 précise que :
« les commandants d’armes, sur la proposition des chefs de corps, consigneront à la troupe les maisons publiques, les débits de boissons, les cafés utilisant des femmes pour le service et autres établissement reconnus comme des foyers de contamination et dans lesquels des militaires auront été infectés ».
10En réalité, l’autorité militaire entend elle-même réguler le commerce des charmes puisque ce texte indique :
« dans tous les cas où ils seront appelés à participer à l’examen des prostituées, les médecins des dépôts des corps s’attacheront à réaliser la visite quotidienne des femmes des maisons de tolérance et la visite bi-hebdomadaire des autres prostituées inscrites13 ».
11On retrouve là la marque de la prostituée comme figure de l’ennemi intérieur au service de l’Allemagne, usant de la « mitrailleuse à tréponème » contre une France qui se veut au contraire « régénérée, purifiée, forte, virile mais chaste14 ». Dès lors, on comprend aisément que soient prises à leur encontre les mêmes mesures que celles qui touchent les ressortissants des puissances ennemies. Si la répression de la prostitution sur la Côte d’Émeraude pendant la Grande Guerre reste encore peu documentée, la chronique judiciaire de la presse locale permet de relever quelques cas. Ainsi, en mars 1916, la tenancière du café L’Étoile du Nord à Saint-Malo est condamnée à six mois de prison pour avoir été jugée coupable « d’outrages aux mœurs et d’excitation de mineures à la débauche15 ». Ajoutons de surcroît qu’il ne semble sur ce point y avoir de distinction à opérer entre pouvoirs civils et militaires puisque le 11 octobre 1916, Justin Godart demande au général d’Amade « d’insister auprès des autorités civiles pour que la surveillance et la répression de la prostitution soient rigoureusement poursuivies16 ». Au cours de l’année 1917, ce sont ainsi 175 prostituées qui sont traduites devant le tribunal de simple police pour défaut de visite médicale, procédures ayant conduit à 122 peines de prison de trois jours chacune17.
12Ces mesures paraissent néanmoins peu efficaces et le volontarisme politique sans réel effet sur le terrain. La répression n’enraye en effet en rien la prostitution, qui semble au contraire se développer à Saint-Malo de manière spectaculaire pendant le conflit. Si le nombre de maisons closes reste stable – deux –, la part des femmes se livrant isolément au commerce des charmes et examinées lors de visites sanitaires passe d’une petite dizaine en mai 1914 à plus de 450 au début de l’année 191918. Et encore, ces chiffres ne comprennent pas les prostituées occasionnelles échappant à tout contrôle, ce qui par ailleurs souligne la relative inefficacité d’une prophylaxie rendue encore plus difficile par une certaine concurrence des autorités. Dans une circulaire datée du 24 octobre 1916, le médecin-inspecteur Vaysse, directeur du service de santé de la 10e région militaire, prescrit pourtant la pleine coopération des praticiens civils et militaires, mais les rivalités sur le terrain ne paraissent pas pouvoir être dépassées19. De surcroît, la guerre elle-même désorganise considérablement les services de police, comme le rappelle le maire de Saint-Malo qui argue que « sur 16 agents, 12 sont mobilisés20 ».
13Cibler les pratiques prostitutionnelles est une chose, agir sur l’acte sexuel en est une autre. Et sans surprise l’autorité militaire ne parvient pas à réguler l’épidémie. Pour le seul premier trimestre 1918, ce sont ainsi 15 nouveaux cas de syphilis qui sont observés à l’hôpital annexe de Saint-Malo21. Et ces chiffres n’ont rien d’exceptionnels puisque le nombre de prostituées hospitalisées en cette commune pour des pathologies vénériennes ne cesse de progresser, passant de 33 en 1915 à 50 en 191822. On voit donc bien que le coït continue, au moins pour partie, à échapper au conflit.
Résistances antiprophylactiques
14Mais, dans leur volonté de placer leurs liaisons dangereuses – quand bien même celles-ci seraient tarifées – en dehors du périmètre de la guerre, les amants trouvent des alliés inattendus en la personne d’un certain nombre de responsables malouins, soucieux de préserver l’image des stations balnéaires de la Côte d’Émeraude.
Grande Guerre et tourisme
15Situé à une cinquantaine de kilomètres de Saint-Malo, le Mont-Saint-Michel dit bien l’impact de la guerre sur les pratiques touristiques. Avec le tocsin sonné le 1er août 1914 à 17 h, le rocher se vide en quelques instants. Mais la situation ne dure pas longtemps et, dès le mois de septembre 1914, la Société des amis du Mont-Saint-Michel note que « l’Abbaye reçoit la visite de nombreux Belges, réfugiés, blessés, convalescents, et d’un grand nombre de Touristes23 ». Au printemps 1915, le bulletin de cette association affirme que « le nombre des visiteurs militaires augmente chaque dimanche ; et les territoriaux cantonnés dans les villages proches du Mont, deviennent des hôtes très assidus de la ville24 ». Si l’activité touristique semble s’arrêter pendant l’hiver, elle reprend dès mars 1916, à la faveur du temps plus clément. La fréquentation lors des fêtes de Pâques permet même aux hôteliers d’augurer que « la saison venant de débuter si heureusement sera, malgré la guerre, bonne cette année » et le bulletin de la Société des amis du Mont de décrire « les longues files de visiteurs » qui attendent de rentrer dans l’abbaye25.
16Si au Mont-Saint-Michel la volonté de prier pour le salut d’un proche au front peut se confondre, au moins pour partie, avec la pratique touristique, cet exemple ne paraît néanmoins pas totalement exceptionnel. Ainsi, en octobre 1915, Le Salut, un bihebdomadaire paraissant sur l’arrondissement de Saint-Malo, publie un court article intitulé « Étés comparés » dont l’incipit résume bien l’intention : « Le mouvement des voyageurs sur le tramway de Dinard à Saint-Briac pendant les saisons 1914 et 1915 nous a paru être le criterium le plus sûr des effets que produit chez nous la guerre26. » Ramassé, le propos fait la part belle aux statistiques et à des chiffres qui, globalement, trahissent une fréquentation moitié moindre en 1915 qu’en 1913 (fig. 2). Or si l’on adhère à l’idée que la presse est aussi un reflet de l’opinion, alors on admettra que cet article témoigne des craintes des « professionnels du tourisme ».
17Ces données brutes, bien que difficilement vérifiables, tendent à montrer que la Première Guerre mondiale constitue un indéniable obstacle à l’activité touristique sur la Côte d’Émeraude. Le conflit est d’ailleurs ressenti d’autant plus durement que l’armée témoigne dès les premières semaines d’une gestion particulièrement rigoureuse des deniers publics, optimisant au maximum les dispositions juridiques qui lui sont favorables. C’est ainsi par exemple que le propriétaire du Grand Hôtel de Paramé ne parvient pas à obtenir une indemnité, son établissement ayant été réquisitionné en août 1914 pour servir de cantonnement à un bataillon du 247e régiment d’infanterie pendant moins de vingt et un jours27.
Figure 2. – Fréquentation du tramway reliant Dinard à Saint-Briac d’après Le Salut.

Un argument économique
18Pour autant, et les chiffres publiés en octobre 1915 tendent à confirmer cette idée, la guerre ne signifie nullement l’arrêt du tourisme, même si on observe, de la part des professionnels, quelques adaptations au contexte particulier créé par le conflit. Lors de l’été 1915, le conseil municipal de Saint-Malo formule ainsi le vœu « qu’en raison de la saison balnéaire les cafés fussent autorisés à rester ouverts jusqu’à 11 heures [et] que les militaires permissionnaires fussent admis à fréquenter les cafés dans les mêmes conditions que les civils », ce qui certes leur est refusé par la préfecture mais rappelle incidemment qu’il y a bien, malgré la guerre, une « saison balnéaire28 ».
19Bien entendu, le conflit se prolongeant bien au-delà de ce qui avait été anticipé, la situation de l’économie touristique se révèle assez délicate, malgré une hausse progressive de l’activité. L’examen des dossiers de l’administration fiscale relatifs à la contribution exceptionnelle sur les bénéfices de guerre en apporte par ailleurs la confirmation. Déclarant sur l’exercice 1914-1915 des recettes 40 % moins importantes qu’en 1912-1913, le propriétaire de l’Hôtel de l’Univers n’en enregistre pas moins une activité qui, sans jamais atteindre les niveaux d’avant-guerre, est en constante hausse jusqu’en octobre 191829. Cafetier place Chateaubriand à Saint-Malo, Baptiste Licardies déplore certes en 1915 des recettes en baisse de 40 % par rapport à l’année précédente30, mais celles-ci repartent ensuite légèrement à la hausse en 191731.
20Dans ces conditions, il n’y a rien d’étonnant à ce que l’annonce, au début de l’année 1916, du repli à Saint-Malo du dépôt du 46e régiment d’artillerie de Chalons, et plus précisément encore de ses 900 soldats et 1200 chevaux, soit saluée avec enthousiasme par la presse locale32. De la même manière, on comprend aisément que toute mesure perçue comme étant une entrave réelle ou potentielle à l’activité touristique soit vigoureusement combattue, quand bien même celle-ci serait nécessaire à l’effort de guerre. C’est ainsi que certains rechignent clairement à accueillir sur leur territoire un dispensaire antisyphilitique afin de ne pas être trop associés au péril vénérien. Partant du principe que « la prostitution n’existe pour ainsi dire pas à Saint-Servan, où il n’y a pas de filles publiques », le maire de cette commune déclare, avis médical à l’appui, « ne pas reconnaître l’utilité » de l’établissement d’un tel dispensaire33. Prétextant pour sa part des contingences matérielles, le maire de Paramé entend également placer sa réponse sur le terrain économique, indépendamment des nécessités imposées par l’effort de guerre. En effet, expliquant au représentant de l’État qu’il « n’existe pas d’hôpital dans [sa] commune ni de locaux susceptibles d’être transformés en dispensaires antisyphilitiques », cet édile ajoute qu’il y aurait selon lui lieu « de rechercher ces sortes d’établissements en tout autre lieu qu’une station balnéaire dont le commerce spécial déjà très atteint par l’état de guerre ne pourrait que souffrir d’avantage du fait de l’installation » de telles structures34. En d’autres termes, les communes de la Côte d’Émeraude n’hésitent pas à se démarquer de l’impératif prophylactique commandé par l’effort de guerre afin de protéger l’image de leurs stations balnéaires.
De la mentalité provinciale
21Un tel positionnement peut surprendre tant il paraît révéler un espace échappant clairement à la totalisation du conflit. Or cette aire est probablement moins restreinte qu’on ne pourrait le penser. Dans le « rapport sur la création de dispensaires antivénériens dans le département d’Ille-et-Vilaine » qu’ils produisent en juillet 1916, les docteurs Athanase Follet et Mathieu-Pierre Weil désignent comme principal obstacle à leur œuvre prophylactique « la mentalité provinciale qui ne s’accommode pas de la correcte indifférence que chacun devrait avoir vis-à-vis des actes de son prochain35 ». Il est bien entendu difficile de définir cet état d’esprit particulier. Saint-Malo est une petite ville où tout le monde se connaît plus ou moins36 et où tout, peu ou prou, se sait – ou croit se savoir. Il n’y a pour s’en convaincre qu’à compulser la litanie des Malouins morts pour la France publiée par Le Salut ou L’Union malouine et dinannaise : chaque défunt y est présenté comme le fils de tel ou tel honorable commerçant, le neveu de telle ou telle notabilité ou l’époux de telle ou telle dame éminemment respectable.
22L’amour, encore plus lorsqu’il est tarifé, n’échappe pas à cette mentalité provinciale qui, par bien des égards, peut être assimilée à une forte contrainte sociale pouvant au final aboutir à des comportements allant à l’encontre des impératifs dictés par la mobilisation totale. Les archives font ainsi régulièrement état des difficultés qu’il y a à assurer la publicité des examens antivénériens. Dans une lettre adressée au préfet d’Ille-et-Vilaine le 8 septembre 1916, le maire de Saint-Malo explique ainsi qu’il lui « semble difficile de faire connaître publiquement ces consultations […] car ce serait indiquer le mal dont sont atteintes les personnes qui se présenteraient ». Et d’ajouter, définitif : « Ce qui est possible à Paris ne l’est pas à Saint-Malo, toutes les personnes se connaissant à peu près. Or il est à remarquer que c’est par crainte d’être reconnues que beaucoup de personnes hésitent à se faire traiter37. »
23La circulaire du 25 septembre 1916 n’est d’ailleurs pas sans méconnaître cette réalité puisqu’elle impose des pratiques qui, assurément, contrastent avec la réalité des Conseils de révision de la Belle époque. Ainsi, ce texte expose que « chaque homme sera examiné isolément et séparément. La visite sera entourée de toutes les mesures de discrétion possibles38 ».
24La peur d’être associé à la syphilis témoigne de champs – la sexualité mais également le tourisme – qui paraissent donc au moins pour partie échapper à la logique de totalisation du conflit. On voit de plus que la pudibonderie tient un rôle au moins aussi important que la préservation de certains intérêts commerciaux dans les résistances anti-prophylactiques que l’on peut observer sur la Côte d’Émeraude pendant la Première Guerre mondiale.
Combattre sur le front intérieur de la prophylaxie
25Pour autant, la lutte contre les maladies vénériennes en tant que fruits de conduites moralement répréhensibles ne date pas de la période 1914-1918. Sans doute est-ce d’ailleurs ce qui permet de comprendre pourquoi l’instruction du 25 septembre 1916 du sous-secrétariat d’État du service de santé militaire sur le traitement et la prophylaxie de la syphilis et autres blennorragies insiste tant sur la nécessité de ne pas les considérer « comme des maladies honteuses et sur l’intérêt qu’il y a à se présenter sans retard à la visite du médecin en cas d’accident39 ». Ce faisant, prévention et soins se révèlent composer un champ ne recoupant les préceptes édictés par la guerre totale que par aubaine, et de surcroît de manière assez partielle quoique durable.
Le poids de la honte
26Maladie honteuse, le combat contre la syphilis révèle moins « une guerre dans la guerre40 » qu’une limite du caractère total de cette dernière puisque l’avilissement, le déshonneur et la culpabilité liés aux pathologies vénériennes restent les plus forts. D’ailleurs, tout se passe comme si, avec la mobilisation générale, était instauré un ordre encore plus moral, défense de la patrie oblige, que lors de la Belle époque. L’Ouest-Éclair en est ainsi un exemple édifiant puisque si le terme de « syphilis » revient régulièrement au début des années 1910 dans les colonnes du quotidien breton, notamment par l’intermédiaire de publicités pour des produits promettant des guérisons non seulement « définitives » mais « sérieuses41 », on ne retrouve plus aucune occurrence de cette pathologie entre le 1er août 1914 et le 9 avril 1916, jour de la parution d’une réclame pour les célèbres « comprimés de Gibert ». Tout se passe comme si la maladie était non seulement honteuse mais en dehors du champ des préoccupations, la guerre primant tout ou presque, au moins jusqu’à Verdun.
27Ceci rappelle que le conflit est perçu par certaines franges de la population comme se déroulant aussi sur le plan des mœurs. Ainsi, un arrêté pris par le préfet d’Ille-et-Vilaine en octobre 1917 a pour conséquence l’interdiction des « bals et danses de toute nature » dans les établissements publics du département et donc de la Côte d’Émeraude42. Or on sait, à la suite des travaux d’Alain Quillevéré sur les bals clandestins pendant la Seconde Guerre mondiale, combien la répression de certaines danses, de couple tout particulièrement, participe d’une politique d’assainissement des mœurs dont les racines plongent bien avant 191443. Avec la guerre, l’impératif de la morale patriotique converge avec les critères définissant la décence des conduites.
28Plus significatif encore, le numéro du 27 janvier 1916 de la Semaine religieuse du diocèse de Rennes, hebdomadaire qui comme son nom ne l’indique pas couvre également celui de Saint-Malo, reproduit une lettre pastorale des évêques de Venise, destinée à lutter « contre la littérature pornographique ». S’il n’est ici pas question de prostitution, le texte invite sans détour à une chasteté toute prophylactique et, dressant un symptomatique parallèle entre abstinence et victoire, s’achève par cette déclaration sans appel : « Ce n’est pas le récit lubrique ou l’image obscène qui sauront tenir ferme le soldat du front devant les canons et les terreurs de la mort44 ! » En réalité, ce sont le mariage et le modèle traditionnel de la famille que défend ici l’Église, comme en témoignent les hommages appuyés rendus en juillet 1918 par La Semaine religieuse du diocèse de Rennes à cette femme de Louvigné-du-Désert ayant eu 11 enfants, 77 petits-enfants et 42 arrière-petits-enfants ou encore aux époux Rozé de Saint-Jacques-de-la-Lande, parents de 22 enfants45. On observera d’ailleurs que sur ce point l’archevêché et la région militaire ont des intérêts communs et c’est presque sans surprise que l’on apprend que la marraine du dernier-né de ce fertile couple n’est ni plus ni moins que Mme d’Amade, ce qui donne l’occasion à son général de mari de rappeler lors du baptême que « la dépopulation de la France a été la cause la plus agissante de la guerre actuelle46 ».
Le pragmatisme de l’Oncle Sam
29Dans ces conditions, on mesure aisément le poids de la honte entourant ces maladies sexuellement transmissibles qui heurtent la morale non seulement chrétienne mais aussi patriotique voire, on l’a vu, balnéaire. Celle-ci apparaît d’autant plus rigide qu’elle contraste singulièrement avec la conduite des troupes américaines qui, éloignées de leurs bases, optent pour une politique plus pragmatique. En effet, comme s’il était conscient de ne pas pouvoir contrôler les pulsions de ses soldats, l’Uncle Sam paraît éluder le volet sexuel, comme s’il ne voulait rien savoir de l’intimité de ses boys, pour ne se focaliser que sur le plan médical. C’est d’ailleurs cette crainte du péril vénérien qui conduit les autorités américaines à interdire à leurs troupes la fréquentation des deux maisons de tolérance de Saint-Malo, celles-ci étant jugées peu sûres sur le plan sanitaire. Or l’arrivée des Sammies coïncide avec une forte augmentation de la prostitution clandestine sur la Côte d’Émeraude47, pratique combattue de longue date par les autorités françaises qui préfèrent une action régulatrice à but prophylactique par l’intermédiaire du bordel, lieu perçu comme étant plus aisément contrôlable, notamment du point de vue sanitaire.
30Dans un rapport adressé le 11 mai 1919 au ministre de l’Intérieur, le responsable de la prophylaxie des maladies vénériennes à Saint-Malo regrette « la manière de voir de nos amis américains, très élevée en ce qui concerne la morale » mais qui se révèle être « au point de vue pratique trop éloignée » de celle adoptée par les autorités françaises48. Cette position, habituellement défendue par l’historiographie, fait largement écho à un système de représentations opposant des autorités américaines convaincues de la chasteté de leurs soldats et un gouvernement français résolument réglementariste49. Or il apparaît que la position des États-Unis est avant tout pragmatique. Plutôt que de tenter d’agir sur les circonstances de l’acte sexuel, les Américains ouvrent à Saint-Malo, afin d’empêcher que les germes vénériens ne se développent après une éventuelle contamination, quatre « stations prophylactiques ». Celles-ci se doublent d’un important volet répressif qui témoigne d’une perception différente du front intérieur. Ainsi, la méthode américaine impose à tout soldat de passer dans une de ces « stations » dans les trois heures suivant un rapport sexuel pour recevoir un traitement, sous peine d’être traduit en Conseil de guerre en cas d’inaptitude au combat pour cause de maladie vénérienne50. En d’autres termes, c’est moins le champ de la sexualité qui ici se trouve en porte-à-faux avec les impératifs de la guerre totale que celui de la non-acceptation des traitements préventifs.
L’ombre portée de la Grande Guerre
31Mais, si le pragmatisme américain contraste aussi singulièrement avec la manière dont les autorités françaises envisagent cette épidémie, c’est probablement aussi parce que les enjeux ne sont pas tout à fait les mêmes. Le médecin-inspecteur Vaysse, directeur du Service de santé de la 10e région militaire en est un bon exemple. S’adressant au préfet d’Ille-et-Vilaine, il affirme que « le développement inquiétant des maladies vénériennes porte atteinte pour le présent au maintien de nos effectifs et peut par la suite faire craindre pour l’avenir de la race51 ». Tout porte d’ailleurs à croire qu’il ne s’agit pas là d’une opinion isolée tant la situation démographique de la France paraît susciter des craintes. C’est ainsi par exemple qu’est créée en septembre 1918 au sein du conseil général d’Ille-et-Vilaine une commission chargée d’étudier « les moyens d’arriver à un relèvement de la natalité52 ».
32Pour quelques-unes des franges les plus conservatrices de l’opinion, la Grande Guerre constitue assurément une aubaine permettant l’instauration d’une plus grande rigueur morale et sexuelle. Aussi est-ce sans doute pourquoi les mesures prophylactiques se prolongent sur la Côte d’Émeraude bien après le 11 novembre 1918, révélant toutefois quelques rapides adaptations aux temps nouveaux nés de la Grande Guerre. En février 1919, comme si la syphilis était désormais associée au péril rouge et non plus au Boche, c’est le contingent de soldats russes employés aux chantiers navals de Saint-Malo qui fait l’objet d’une inspection menée par le Service de santé de la 10e région militaire53. Loin de se terminer avec l’Armistice, l’offensive prophylactique doit se comprendre dans les années d’après-guerre dans le cadre d’un nouveau processus de totalisation, issu de la saignée des tranchées, mêlant perspectives de dépopulation et redressement d’un pays sorti certes victorieux mais exsangue du conflit54. Et, à la différence de la période 1914-1918, les intérêts hygiénistes croisent ceux des stations balnéaires, dont le plan d’urbanisme est, on le sait, indissociable de l’idée de salubrité du territoire55. C’est d’ailleurs ce qu’affirme explicitement Octave-Louis Aubert – l’un des principaux promoteurs du tourisme en Bretagne – au début de l’année 1919 en déclarant :
« Nous devons tout faire par patriotisme d’abord, puis pour aider au relèvement économique de la France par le tourisme, pour que chacune de nos provinces garde toute sa beauté.
Gardons contre les plans maladroits et d’esthétique égalitaire nos vieilles maisons de nos vieilles cités ; garantissons nos monuments historiques contre les restaurations impies ; nos menhirs contre les entreprises des constructeurs de maisons et aussi, sauvons ce qui reste des forêts de la Bretagne chevelue. Telle est la campagne du Touring-Club. Elle n’exclut pas, au contraire, toutes les méthodes d’éducation, sanitaires et industrielles, pour assurer partout, dans l’habitation et sur la vie, la propreté et l’hygiène56. »
*
33Particulièrement éclairant, un tel propos nous rappelle combien peuvent être étroits les rapports entre tourisme et hygiénisme, et donc prophylaxie des maladies vénériennes. Certes, en 1914, la question de la sexualité ne se pose pas. Et comment d’ailleurs pourrait-il en être autrement, chacun étant alors accaparé par les impératifs de la mobilisation générale puis de la concentration des troupes, sans évoquer le déroulement même des opérations qui, jusqu’à la fin de la Course à la mer, ne laisse que peu de répit57 ? Il y a donc là une différence majeure avec la Seconde Guerre mondiale où, dès juin 1940, les troupes allemandes organisent la prostitution en France occupée par souci de prophylaxie raciale58. Mais avec le « long 191559 » et plus encore en 1916, la sexualité est rattrapée par le conflit, situation qui impose la mise en place de mesures prophylactiques qui vont sur la Côte d’Émeraude à l’encontre de certains intérêts touristiques.
34Les liens avec la notion de « guerre totale », conflit où tous les moyens sont mis en œuvre pour la victoire, n’en deviennent dès lors que plus paradoxaux, construisant ainsi des rapports inédits au concept de front intérieur. En effet, si les intérêts touristiques ne sont pas nécessairement ceux de la prophylaxie des maladies vénériennes entre 1914 et 1918, tel n’est plus le cas après la signature de l’Armistice. Tout se passe comme si, en définitive, la guerre contre la dépopulation héritée de la Grande Guerre était plus totale que la « der des ders » elle-même. Curieux constat qui ne peut qu’inviter à se pencher sur l’histoire des acteurs du tourisme pendant la Première Guerre mondiale60.
Notes de bas de page
1 Georges Antoine, Lettres de la Grande Guerre, édition établie par Fabienne Cagnati-Musique et Christophe Pirenne, Revue de la Société liégeoise de musicologie, n° 21-22, 2003.
2 Éric Joret et Yann Lagadec (dir.), Hommes et femmes d’Ille-et-Vilaine dans la Grande Guerre, Rennes, conseil général d’Ille-et-Vilaine/Société archéologique et historique d’Ille-et-Vilaine, 2014.
3 Archives départementales (AD) d’Ille-et-Vilaine, 5 M 120, prophylaxie antivénérienne, instructions (1916-1928), rapports (1915-1921), minute du directeur du service de santé de la 10e région militaire en date du 5 mai 1916.
4 Pour une approche globale de la prophylaxie des maladies vénériennes pendant la Première Guerre mondiale on renverra à Jean-Yves Le Naour, « Sur le front intérieur du péril vénérien (1914-1918) », Annales de démographie historique, 2002/1, n° 103, p. 107-120, et Vincent Viet, La Santé en guerre 1914-1918. Une politique pionnière en univers incertain, Paris, Les Presses de Sciences Po, 2015, p. 537-549.
5 Archives Municipales (AM) Saint-Malo, 32 W 200, Jules Haize, « À nos lecteurs », La Dépêche, 11 août 1914, n° 1, p. 1.
6 Pour de plus amples développements sur la consommation d’alcool et la répression de l’ivresse en Haute Bretagne en août 1914, on se permettra de renvoyer à Erwan Le Gall, La Courte Grande Guerre de Jean Morin, Spézet, Coop Breizh, 2014, p. 118-120. Voir aussi la contribution de Stéphane Le Bras dans le présent ouvrage.
7 Benoit Majerus, « La prostitution à Bruxelles pendant la Grande Guerre : contrôle et pratique », Crime, Histoire & Sociétés, vol. 7, n° 1, 2003, p. 5-42.
8 AD Ille-et-Vilaine, 5 M 120, note sur les maladies vénériennes à l’Intérieur et aux Armées pendant les mois de juillet et d’août 1916, p. 2.
9 Id., lettre du général d’Amade au préfet d’Ille-et-Vilaine, 12 décembre 1917.
10 AD Ille-et-Vilaine, 5 M 120, services annexes d’hôpitaux, services existant avant l’exécution des instructions des 6 mars, 31 mai 1916 et 5 juin 1917.
11 AD Ille-et-Vilaine, 5 M 120, instruction du sous-secrétariat d’État du service de santé militaire sur le traitement et la prophylaxie des maladies vénériennes, 25 septembre 1916 (instruction du 25 septembre 1916 désormais).
12 Id., lettre du général d’Amade au préfet d’Ille-et-Vilaine, 12 décembre 1917.
13 Id., instruction du 25 septembre 1916.
14 J.-Y. Le Naour, Misères et tourments de la chair durant la Grande Guerre. Les mœurs sexuelles des Français 1914-1918, Paris, Aubier, 2002, p. 156.
15 « Bonne leçon », Le Salut, 35e année, n° 27, 31 mars-1er avril 1916, p. 1.
16 AD Ille-et-Vilaine, 5 M 120, lettre du sous-secrétaire d’État au service de santé militaire au général commandant la 10e région militaire, 11 octobre 1916.
17 Id., lettre de l’adjoint faisant fonction de maire de Saint-Malo au préfet d’Ille-et-Vilaine, datée du 5 janvier 1918. Rien ne dit dans ce courrier si parmi les 122 peines prononcées certaines concernent plusieurs fois la même personne.
18 Id., rapport au ministre de l’Intérieur, 11 mai 1919.
19 Id., lettre du médecin-inspecteur Vaysse au préfet d’Ille-et-Vilaine datée du 24 octobre 1916 et lettre du maire de Saint-Malo au préfet d’Ille-et-Vilaine, 8 septembre 1916 : « M. Peynaud étant chargé du service des vénériens à l’Hôpital général, il est probable qu’il n’admettra pas l’ingérence d’un autre médecin dans son service. »
20 Id., lettre du maire de Saint-Malo du 5 janvier 1918 (datée 1917).
21 Id., état des statistiques des maladies vénériennes pour le 1er trimestre 1918.
22 Id., rapport au ministre de l’Intérieur, 11 mai 1919.
23 « Journal du Mont-Saint-Michel pendant la Guerre », Les Amis du Mont-Saint-Michel, n° 11, octobre 1914-janvier, avril, juillet 1915, p. 384-386.
24 Ibid., n° 12, octobre 1915-janvier 1916, p. 403.
25 Ibid., n° 13, avril-juillet 1916, p. 11.
26 « Étés comparés », Le Salut, 34e année, n° 79, 12-13 octobre 1915, p. 2.
27 AM Saint-Malo, 4 H 11, correspondance du 1er janvier 1917.
28 « Fermeture des cafés », Le Salut, 34e année, n° 71, 14-15 septembre 1915, p. 2
29 AD Ille-et-Vilaine, 2P B 91, contribution sur les bénéfices exceptionnels de guerre, dossier Adrien Malapert.
30 Dans plusieurs dossiers, l’administration fiscale estime d’elle-même la baisse de l’activité se situant autour de 40 %.
31 AD Ille-et-Vilaine, 2P B 91, Baptiste Licardies.
32 « Le 46e d’artillerie à Saint-Servan », Le Salut, 35e année, n° 14, 15-16 février 1916, p. 2. Sur l’attractivité économique et fiscale de l’armée dans le département d’Ille-et-Vilaine, on se permettra de renvoyer à Erwan Le Gall, Une entrée en guerre. Le 47e régiment d’infanterie au combat (août 1914-juillet 1915), Talmont-Saint-Hilaire, CODEX, 2014, p. 34, et « La construction tumultueuse du quartier Margueritte », Place publique Rennes et Saint-Malo, n° 34, mars-avril 2015, p. 95-99.
33 AD Ille-et-Vilaine, 5 M 120, le maire de Saint-Servan au préfet d’Ille-et-Vilaine, 26 août 1916.
34 Id., le maire de Paramé au préfet d’Ille-et-Vilaine, 7 juillet 1916.
35 Id., rapport sur la création de dispensaires antivénériens dans le département d’Ille-et-Vilaine.
36 Lors du recensement de 1911, les villes de Saint-Malo et Paramé ont une population cumulée de 25000 habitants. Gilles Foucqueron, Saint-Malo, 2000 ans d’histoire, t. I, G. Fouqueron Éditions, 1999, p. 497.
37 AD Ille-et-Vilaine, 5 M 120, lettre du maire de Saint-Malo au préfet d’Ille-et-Vilaine, 8 septembre 1916.
38 Id., instruction du 25 septembre 1916.
39 Id.
40 J.-Y. Le Naour, Misère et tourments…, op. cit., p. 129.
41 L’Ouest-Éclair, n° 5617, 3 mai 1914, p. 12.
42 « Interdiction des Bals et de la Musique dans les Établissements publics », L’Union malouine et dinannaise, 66e année, n° 44, 3 et 4 novembre 1917, p. 3.
43 Alain Quillevère (préface de Pascal Ory), Bals clandestins pendant la Seconde Guerre mondiale, Morlaix, Skol Vreizh, 2014, p. 81-84.
44 « Contre la littérature pornographique », La Semaine religieuse du diocèse de Rennes, 52e année, n° 20, 27 janvier 1916, p. 307.
45 « Les familles nombreuses : à Louvigné-du-Désert, une grand’mère a eu jusqu’à 130 descendants », La Semaine religieuse du diocèse de Rennes, 54e année, n° 30, 27 juillet 1918, p. 465 ; « 22 enfants du même père et de la même mère », La Semaine religieuse du diocèse de Rennes, 54e année, n° 28, 13 juillet 1918, p. 438.
46 « Discours de M. le général d’Amade », La Semaine religieuse du diocèse de Rennes, 54e année, n° 40, 5 octobre 1918, p. 633.
47 AD Ille-et-Vilaine, 5 M 120, rapport au ministre de l’Intérieur, 11 mai 1919.
48 Id.
49 J.-Y. Le Naour, « Le sexe et la guerre : divergences franco-américaines pendant la Grande Guerre (1914-1918) », Guerres mondiales et conflits contemporains, n° 197, mars 2000, p. 103-116.
50 Bruno Lecaplain, La lutte antivénérienne en Ille-et-Vilaine de 1914 à 1930, mémoire de maîtrise d’histoire sous la direction de Jacqueline Sainclivier, Rennes, université Rennes 2 Haute Bretagne, 1990, p. 127-128.
51 AD Ille-et-Vilaine, 5 M 120, le directeur du service de santé de la 10e région militaire au préfet d’Ille-et-Vilaine, 24 octobre 1916.
52 « Au Conseil général », L’Ouest-Éclair, n° 5882, 6 septembre 1918, p. 3.
53 AD Ille-et-Vilaine, 5 M 120, l’officier régional des contingents russes de la 10e région au préfet d’Ille-et-Vilaine, 21 février 1919.
54 Luc Capdevila, François Rouquet, Fabrice Virgili et Danièle Voldman, Sexes, genre et guerres (France, 1914-1945), Paris, Payot, 2010, notamment p. 149-150.
55 Johan Vincent, L’intrusion balnéaire. Les populations littorales bretonnes et vendéennes face au tourisme (1800-1945), Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2007, p. 64-65.
56 Octave-Louis Aubert, « L’Armorique », L’Ouest-Éclair, n° 7144, 24 février 1919, p. 1.
57 Pour voir en quoi l’entrée en guerre est une radicale accélération du temps, on se permettra de renvoyer à E. Le Gall, Une entrée en guerre…, op. cit.
58 Insa Meinen, Wehrmacht et prostitution sous l’Occupation (1940-1945), Paris, Payot, 2006.
59 Sur ce concept John Horne, « De la guerre de mouvements à la guerre de positions : les combattants français », dans John Horne (dir.), Vers la guerre totale, le tournant de 1914-1915, Paris, Tallandier, 2010, p. 79.
60 Tel est le sens de l’appel lancé par Yves-Marie Evanno et Johan Vincent, « Tourisme et Première Guerre mondiale. Pratique, prospective et mémoire (1914-2014) », En Envor, revue d’histoire contemporaine en Bretagne, n° 6, été 2015, en ligne.
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