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Chapitre X. Les responsabilités municipales dans les carrières des élus
p. 271-296
Texte intégral
1Le temps passé au service de la municipalité ne représente qu’une fraction de l’itinéraire suivi par un notable qui est parvenu à se faire admettre dans le bureau servant. D’autres responsabilités ont pu précéder ou suivre cet engagement au service de l’administration urbaine. Afin de mieux saisir ce que pouvait représenter une fonction municipale dans la vie d’un notable, il convient d’abord de mettre au net les motivations qui le poussaient à briguer un tel mandat nécessairement contraignant. Si des expériences administratives ou des nominations dans la hiérarchie milicienne ont complété le travail dans le corps de ville, à quels moments se placent-elles et sont-elles obligatoires ou recommandées ? L’étude des âges auxquels tous ces notables ont connu la consécration électorale et gouvernementale est un indicateur fort précieux pour mesurer ce que représente l’engagement municipal dans la trajectoire globale d’une carrière. N’oublions pas non plus toutes les ressources de l’institution, les entrées aux séances élargies offrant aux anciens magistrats l’occasion de prolonger leur contrôle sur la vie administrative nantaise ou de montrer leur conscience civique supérieure.
Le cheminement vers la municipalité
La naissance d’une ambition
Volonté de pouvoir et éthique municipale
2Entrer au bureau servant, c’est détenir avec d’autres un pouvoir plus ou moins grand sur l’orientation de l’administration urbaine, car c’est bien dans cette structure, qui se trouve au cœur du dispositif institutionnel municipal, que se prennent les décisions les plus importantes. Les recherches effectuées sur la qualité de la participation des membres du bureau municipal ont montré que la plupart d’entre eux avaient pris au sérieux leur promotion.
3Sur les huit personnes formant la tête de la communauté, la majorité manque moins d’une séance sur cinq. Quelques individus, moins bien intentionnés, faiblissent parfois, spécialement dans le dernier tiers du xviie siècle, et glissent jusqu’à 30 % d’absences. Le laisser-aller n’est pas lié à une fonction particulière, mais plutôt à la personnalité des titulaires comme le montre la variabilité des prestations des maires, des échevins et des syndics1. Certains parcours sans faute ont même existé à partir du milieu du siècle. Le recensement des réunions avec quorum respecté donne une bonne image du xviie siècle où les séances de travail se sont presque toujours déroulées dans des conditions légales. Les défaillances réelles, qui sont toujours citées à propos des exemples de lutte contre l’absentéisme, doivent donc être ramenées à leur juste mesure, c’est-à-dire à leur dimension très minoritaire sur plus d’un siècle de vie politique locale2.
4L’application municipale se rattache à la conscience de la nécessité d’organiser la police générale de la ville afin d’assurer la meilleure cohésion sociale possible, face aux tensions occasionnées par la succession impressionnante des crises économiques et démographiques qui perturbent la ville tout au long du siècle. Cette politique préventive des émotions populaires conduite par une élite de la richesse qui sait se mobiliser pour assurer un approvisionnement minimal du marché céréalier, se double naturellement d’une réglementation générale et ordinaire des lieux de travail et des marchés qui reste l’activité prioritaire d’un bureau de ville, à côté du maintien de l’ordre où la répression des vagabonds et des mendiants se mêle à l’assistance offerte aux éléments plus pauvres. Ce réflexe réglementaire s’inspire toujours de l’idéal d’harmonie sociale enraciné dans le catholicisme tridentin qui connaît un bel épanouissement dans une ville qui ne lui jamais ménagé son soutien. Les maires et échevins nantais fondent leur police urbaine dans la même éthique que celle qui inspire encore les magistrats des villes de la frontière nord du royaume au xviiie siècle3. L’urgence des situations a longtemps fait de ces dépenses des priorités au détriment des travaux publics4.
5Il est d’autres problèmes où les intérêts collectifs rejoignent les intérêts particuliers de l’élite dirigeante qui se mobilise autour de la municipalité pour la défense des intérêts acquis. Puisqu’il s’agit de marchander la prolongation des privilèges par le versement d’un don gratuit, reste à savoir comment ce financement peut être réuni. Le recours à une taxation spécifique où les aisés seront appelés à contribuer davantage ou l’appel aux octrois urbains qui rejette la charge sur la consommation de l’ensemble des habitants mettent directement en jeu les intérêts de la classe dirigeante qui préfère la seconde solution5. Il ne semble pas avoir existé au xviie siècle de débat interne dans les bureaux servants ou les structures élargies sur le bien fondé d’une orientation qui semblait évidente à tous les intéressés. À la grande surprise et désapprobation de ses collègues, le subdélégué-maire Mellier défendit pendant son long mandat de dix ans le principe du financement des privilèges par les privilégiés eux-mêmes6.
6Prendre part à la vie municipale, c’est aussi fonder son action sur une certaine image de la cité. L’élite nantaise n’avait jamais admis le bien fondé du transfert à Rennes du parlement de Bretagne en 1561. Avec la Ligue et le duc de Mercœur, les Nantais crurent à la revanche puisque le gouverneur provincial décida d’implanter dans la ville un parlement fidèle pour contrer celui de Rennes, coupable de fidélité à un roi hérétique. La défaite politique de la Ligue entraîna celle de Nantes et on peut se demander à quoi rêvait la municipalité de 1602 qui proposa le rachat du recouvrement des droits originels qui partageaient la cour en alternance entre les deux villes en portant l’affaire devant les États provinciaux7. Cette image de Nantes, capitale de la Bretagne, explique que l’avocat Jean Boutin de Chambalan, neveu du maire de 1575, d’une famille ultra-catholique très engagée derrière Mercœur, ait cru nécessaire de prendre sa plume en 1619 pour combattre les prétentions de la ville de Rennes qui voulait confisquer les sessions des États de Bretagne. Dans son apologie de la communauté de Nantes qui a « pouvoir de créer un maire qui a la garde et le gouvernement de la ville et est préposé pour le bien et le salut des citoyens, comme un tuteur à ses pupilles, ou comme avait anciennement un consul à Rome… », il insiste sur le prestige politique et économique ancien de la ville et sur sa reconnaissance comme principale capitale de la Bretagne jusqu’au milieu du xvie siècle8. L’échec de la tentative de monopole rennais et la relative fréquence des tenues des États à Nantes au xviie siècle ont pu apparaître comme une consolation face à la perte irrémédiable du parlement et à la promotion de Rennes comme capitale politique de la Bretagne, situation renforcée après 1689 avec l’installation de l’intendance.
L’attrait des privilèges du corps de ville
7L’ambition qui poussait à concourir au bureau servant s’alimentait également au spectacle des avantages réservés aux membres du corps de ville. Dans une société corporative où les questions de préséance occupaient une si grande place et où les privilèges fondaient l’échelle des dignités, il était important de s’introduire dans une communauté qui assurait quelques avantages financiers, mais surtout un prestige social rehaussé grâce aux privilèges honorifiques et au rang supérieur où elle s’exposait parmi les autres dans les célébrations publiques.
8Les lettres patentes de François II avaient précisé : « Les maires et eschevins jouiront de tous tels et semblables privilèges, prééminences, pouvoir, immunitez, franchises, libertez que les maire et eschevins de nostre ville d’Angers »9. Cela signifiait entre autres une dispense des taxes de tutelle et de curatelle, de l’impôt nommé « billot » pour le vin de leur crû et surtout du logement des gens de guerre. Après 1571, ils furent aussi dispensés du guet et de la garde. En 1625, les frais personnels de fonctionnement pris sur les amendes de police furent portés de 200 à 400 livres10. Cette habitude se perpétua jusqu’en 1693, malgré une sévère réduction à 100 livres par arrêt du conseil du 18 juillet 1681, mais ne fut pas reprise dans la définition de la mairie officière. Il fallut attendre l’arrivée de Mellier à la mairie pour obtenir en même temps la restauration et le doublement des gratifications versées dorénavant sous forme monétaire plutôt qu’en matériel d’écriture11. Le maire avait également la jouissance d’un appartement dans l’Hôtel de ville avec usage du jardin intérieur.
9Les privilèges les plus importants se rattachaient à la représentation en corps dans les cérémonies publiques majeures de la vie nantaise, que ces dernières soient laïques ou religieuses. Rappelons que lorsque la tenue des États de Bretagne était fixée à Nantes, le bureau servant entier était associé aux délibérations de l’ordre du Tiers. Lors des entrées de ville des grands personnages, le corps de ville avait cet immense privilège d’être la seule compagnie à se donner en spectacle devant la foule de ses administrés. Les grands bureaux prenaient un soin extrême à l’organisation de ces fêtes dans lesquelles la population était associée par le biais de la milice bourgeoise12.
10Les parades les plus stratégiques pour l’entretien de l’image du corps de ville demeuraient pourtant les cérémonies religieuses avec procession, car la municipalité devait affronter la compétition permanente qui animaient tous les grands corps dans la définition de la hiérarchie officielle de la société d’ordres citadine. Dans l’ordre traditionnel de la Fête-Dieu, le corps de ville marchait immédiatement devant les dignitaires du clergé qui entouraient l’évêque portant le Saint-Sacrement, tandis que les officiers de la chambre des comptes suivis de ceux du présidial venaient immédiatement derrière13 En 1688, le bureau servant dut se dresser contre l’évêque qui voulait supprimer le prie-dieu et le fauteuil réservé au maire dans l’église Saint-Nicolas le jour de cette cérémonie14.
11Les difficultés apparues autour de la fête de l’Assomption illustrent parfaitement cet aspect si important de la vie politique locale au xviie siècle. Le 10 février 1638, Louis XIII ordonna l’établissement d’une procession de la fête de la mère du Christ. Jusqu’en 1642, les maires et échevins en service comme les anciens ont marché immédiatement derrière la chambre des comptes, devant le présidial et l’Université, ce qui finit par provoquer une terrible crise de jalousie des deux dernières compagnies. L’affaire fut réglée par un arrêt du conseil du 21 mai 1643 qui maintint l’ordre initial avec interdiction de troubler les processions, ce qui entraîna le retrait des plaignants scandalisés de l’humiliation ainsi infligée. Ce boycott dura jusqu’en 1686, date où l’Université sollicita une redéfinition du défilé. L’arrêt du conseil du 5 mai 1686 déclassa le corps de ville en faisant glisser le présidial et l’Université immédiatement derrière la chambre des comptes, ce qui sanctionnait la perte de prestige de l’institution municipale dans le milieu officier sous le règne de Louis XIV. La municipalité essaya de défendre sa supériorité historique, mais dut se résoudre au compromis établi dans la déclaration royale du 19 août 1702 avec un nouveau positionnement à gauche du présidial. De nouvelles contestations venues des officiers de justice furent éteintes par l’édit de décembre 1706 et la déclaration du 5 février 171815.
12La cérémonie annuelle d’installation des nouveaux édiles déployait aussi des fastes qui n’étaient pas sans séduire les ambitieux16. Le bureau de ville était surtout très fier de voir son premier magistrat marcher immédiatement au côté gauche du gouverneur de ville, reléguant derrière lui à cette occasion le Sénéchal, son principal rival dans la personnalisation du pouvoir urbain. Toutes les escortes, dans lesquelles s’affirmaient les couleurs de la ville, contribuaient à célébrer avec éclat la réalité de l’autorité municipale. Les archers municipaux, qui portaient « quazaques noires et blanches doublées et parsemées d’hermines de velours noir et blanc, avecq les armes de la ville au devant et au derrière desdistes quazaques entourées de leurs cordelières et ornement de brodage or et argent fin » et qui se déplaçaient munis de leurs épées et hallebardes, contribuaient à l’exaltation de ce pouvoir urbain en représentation17.
13Le passage dans le bureau servant assurait également le privilège posthume d’une belle cérémonie d’inhumation. Le corps de ville, en grande tenue officielle, avec les robes noires des édiles, se rassemblait à la maison commune pour aller en cortège au domicile du défunt. Il marchait, accompagné des archers avec leurs hallebardes aux pointes couvertes de crêpe. Pendant le trajet entre le domicile et l’église, quatre ou six échevins servants ou anciens étaient choisis pour porter le drap mortuaire. Après la célébration, les élus rentraient groupés à l’Hôtel de ville18.
14Le maire jouissait de privilèges supplémentaires. Un écusson aux armes de la ville restait fixé au dessus de la porte de son logis personnel pendant toute la durée de son mandat. Il était aussi de tradition de commander à un artiste son portrait en pied qui servait de décoration à la galerie haute de l’Hôtel de ville qui s’enrichissait ainsi d’une nouvelle représentation à chaque nomination19. En 1721, Mellier justifie « l’usage aussi ancien que l’établissement de la mairie de Nantes, afin que les citoyens de ladite ville puissent décorer leur salle d’assemblée des images desdits maires pour retracer, par une tradition de reconnaissance, les noms, les qualités et les louables actions de ceux desdits maires qui, par leur activité et leurs soins, auront rendu leur ministère reconnaissable à la postérité et pour que les uns ny les autres ne soient pas exclus des honneurs qu’on a décernés à leurs prédécesseurs »20. Malheureusement pour l’histoire iconographique de la vie municipale nantaise, presque tous ces tableaux ont disparu dans la tourmente révolutionnaire, victimes de leurs insignes aristocratiques21.
15En 1667, le bureau servant décida d’offrir pour la première fois à François Lorido, un marchand réélu pour une deuxième année, « une épée et un porte-épée décents et convenables à la dignité du maire ». Ce maire avait porté l’épée, comme colonel de la milice, aux États de Bretagne tenus à Vannes à la fin de 1667, sans avoir à subir aucune contestation. Le bureau de ville en tira une si grande fierté qu’il décida de maintenir ce présent pour tous les futurs maires22. Cette distinction supplémentaire fut soigneusement entretenue jusqu’à la fin de l’Ancien Régime.
16Pendant les deux tiers du xviie siècle, la municipalité a pu attirer les ambitieux pour ses privilèges d’anoblissement accordés par le roi François II en 1559 et confirmés par ses successeurs. Mais la réformation de la noblesse ordonnée par Colbert en 1667 ayant très sérieusement perturbé cette noblesse de cloche, ce mode d’ascension ne concerne plus les échevins élus dans le dernier tiers du siècle. Beaucoup de familles roturières ont d’ailleurs préféré abandonner leurs droits au début du xviiie siècle, soit pour se contenter de leur condition, soit pour obtenir par d’autres moyens un anoblissement beaucoup plus sûr.
Des responsabilités préalables
17À côté des responsabilités municipales, il existait d’autres fonctions où les notables étaient appelés à montrer leur sens de l’organisation et où ils étaient déjà à même de satisfaire leur goût du pouvoir et leur sens civique, que ce soit dans des organismes professionnels ou dans des regroupements de quartier. Peut-on alors parler d’un « cursus honorum » couronné par les fonctions municipales ?
18Dans le grand bureau du 30 avril 1686, le procureur du roi-syndic rappelle les conditions réglant l’inscription sur la liste d’aptitude à l’échevinage. Si les auditeurs aux Comptes et les conseillers au présidial peuvent être présentés au nom du simple privilège de leur charge, les avocats et les procureurs doivent « avoir esté marguillier de leur paroisse, rendu leur compte et payé leurs dettes ». Les marchands doivent en plus être passés « par les charges de directeur et administrateur de l’hospital et de consul des marchands pour faire preuve entière de leur capacité, intégrité pour l’administration de la police de la ville puisqu’il est vrai de dire que la seule science ne suffit pas et qu’il faut adjouter la cognoissance particullière des affaires dommestiques du pays ». Cette déclaration de principe ne décrit pourtant pas la réalité puisque son auteur conclut « qu’il seroit à désirer que cet antien usage fust rétabli pour le bien de la communauté puisqu’il estoit vray de dire que dans les temps où cette antienne coutume estoit observée les charges n’estoient remplie que de personnes de science, de sage expérience et d’ung mérite cognu »23. Réalité perdue ou idéalisme mythique ?
19Cherchant à interpréter le retrait des officiers de justice de l’échevinage, le syndic a tendance y voir l’effet d’un relâchement dans les critères d’élévation au bureau de ville, ce qui aurait été favorable à l’entrisme des marchands, catégorie de notables pour laquelle ces exigences préalables étaient les plus nombreuses. Soucieux de trouver des explications nantaises à l’accroissement du contrôle financier du pouvoir central, il a peut-être tendance à imaginer une situation qui n’a jamais existé réellement.
Les responsabilités de type économique
20Elles concernent uniquement les marchands dont certains sont nommés consuls de la Contractation ou consuls et juges consuls du tribunal de commerce.
21La première fonction consistait à assurer la direction de l’association formée par les marchands de Nantes en liens avec Bilbao et intéressait donc tous les plus importants négociants travaillant en direction du marché espagnol demeuré longtemps le premier horizon commercial nantais puisque les Hollandais confisquaient une large partie du trafic vers l’Europe du nord. La date exacte de l’apparition de l’association n’est pas facile à préciser : Jeulin la voyait comme la suite logique de « la Compania de los señores del salvo conducto » du temps de François Ier, mais une attitude plus critique a été adoptée par Lapeyre dans son étude sur la famille Ruiz. Le premier document conservé dans les archives nantaises ne date que de 1601 : il s’agit de la liste des membres de l’association24. Jusqu’à sa suppression en 1733, l’accession au poste de consul a toujours été convoitée, même si l’importance relative des échanges a beaucoup diminuée à partir de 1670.
22Les rapports déjà étudiés du consulat du Commerce et de la municipalité ont souligné les liens étroits entre les deux institutions nées conjointement25, même si à partir de la fin du xviie siècle un esprit d’émancipation a déterminé de plus en plus l’attitude du Commerce qui a même refusé d’obéir à l’arrêt du conseil du 30 août 1701 établissant une chambre de commerce à Nantes, préférant fonctionner en « Général du commerce », ce qui a contribué à renforcer encore plus le rôle des consuls26.
23Les quatre marchands élevés au poste de maire de Nantes au xviie siècle avaient déjà une connaissance du bureau servant pour y avoir siégé comme échevin une vingtaine d’années auparavant. Seul Jacques de Bourgues a dirigé la Contractation, les autres n’étant même pas membres de la confrérie. Si cette absence de participation est logique pour Lorido ou Mesnard, qui appartiennent à des familles de marchands de draps et soie, elle est plus surprenante pour Libault qui se livre au commerce de gros. Ce dernier, qui fut un des pionniers sur la très nouvelle route antillaise à partir de 1640, a peut-être jugé inutile de s’intégrer à une association liée à un trafic et une orientation en perte de vitesse. Jacques de Bourgues, exemple parfait de cette élite hispano-nantaise qui domine le commerce nantais depuis la fin du xve siècle, était comme prédestiné à la direction de la Contractation, poste déjà dévolu à son père en 1602, accordé ensuite à son frère Étienne en 1629 et 1630, à son neveu François (1659-1661) et à ses fils René (1662-1663) et Jean (1673-1674).
24Trois sur quatre, Libault étant la seule exception, sont aussi passés par deux fois au tribunal de commerce, d’abord comme simple consul et ensuite comme juge. Toutes ces responsabilités ont été exercées avant l’élévation au poste de maire. Tous ont été élus consuls avant d’être élus échevin et pour de Bourgues, avant sa nomination à la tête de la Contractation qui s’intercale entre les deux fonctions. Tous sont revenus au consulat comme juge supérieur après le mandat échevinal. Une seule distinction dans l’élite marchande donne donc toutes ses chances à un candidat à l’échevinage, mais un cursus plus riche est manifestement exigé au xviie siècle pour la promotion d’un maire d’origine marchande, sans que cette précaution soit une règle absolue comme le prouve l’itinéraire de Gratien Libault. Rappelons cependant que son père René avait été choisi comme consul en 1636-1637 et que son frère aîné Guillaume a exercé au tribunal en 1644-1645 et 1655-1656.
25Sur les cent échevins retenus dans l’échantillon servant de base à notre étude, 49 ont travaillé comme marchands. Les élus apparus sur les listes de la Contractation sans avoir été nommés consuls ont été également retenus car leur appartenance à la confrérie a pu les soutenir dans la compétition électorale.
26Un peu plus de 71 % des échevins d’origine marchande ont exercé à un moment ou à un autre une responsabilité économique et la plupart d’entre eux y ont travaillé avant d’accéder à l’échevinage. Ce sont les charges du consulat qui reviennent le plus souvent, d’abord parce qu’elles sont annuelles, sans prolongation possible, ce qui imprime une grande vitesse de rotation, ensuite parce qu’elles concernent tous les types de marchands, y compris les marchands drapiers, alors que le poste de consul de la Contractation est redistribué moins souvent et n’intéresse prioritairement que les marchands en gros traitant l’essentiel de leurs affaires avec le marché ibérique. Les 2/3 des échevins marchands ont donc siégé comme consul au tribunal de commerce, ce qui les a certainement favorisés dans leur promotion au bureau servant puisque, pour la plupart, cette première distinction se place avant leur élection à la municipalité. Une moitié est revenue une seconde fois au consulat dans la charge supérieure de juge-consul, comme chef de la compagnie, mais cette fois, en nette majorité, après le mandat municipal. Pour ceux-là, l’échevinage n’est donc une étape majeure dans une carrière qui n’est pas terminée. Les huit consuls de la Contractation se partagent en deux groupes égaux : ceux qui furent appelés avant l’échevinage correspondent à la première moitié du siècle quand l’association conservait toute sa puissance, ceux qui y parvinrent après sont de la fin du siècle, dans la phase de déclin.
27Si l’exercice de responsabilités professionnelles apparaît donc comme une étape préparatoire pour la majorité des élus marchands, n’oublions pas quand même l’existence d’une forte minorité de presque 30 % qui accède au bureau municipal sans aucune distinction économique préalable. Ces exemples qui appartiennent presque tous à la deuxième partie du siècle et au début du xviiie siècle correspondent à des situations variées qui expliquent plus ou moins cette originalité. On relève sur cette liste deux maîtres apothicaires, deux marchands casseurs d’acier, trois marchands droguistes, trois marchands drapiers et quatre marchands en gros dont deux membres de la Contractation. Toute interprétation apparaît bien délicate à formuler car si certains n’ont pas été distingués par insuffisance professionnelle ou sociale, comment ont-ils pu être élus et nommés à la municipalité ? Le cas de Louis Montaudoin pousse aussi à relativiser la situation individuelle en la replaçant dans le contexte de la puissance familiale27. Même si son parcours personnel n’est pas éclatant, il est poussé et protégé par l’influence familiale, et spécialement celle de son frère aîné qui est un des maîtres à penser de l’oligarchie négociante des années 1710.
Les fabriques paroissiales
28Chaque paroisse était administrée par un conseil qui regroupait le recteur, les juges de la juridiction d’où relevait le quartier, trois trésoriers du temporel paroissial appelés fabriqueurs et un ensemble de douze notables choisis parmi les anciens fabriqueurs ayant rendu et soldé leurs comptes28 Dans la pratique nantaise telle qu’elle apparaît dans la documentation, on ne convoquait pas seulement les douze élus, mais aussi les anciens fabriqueurs ayant obtenu leur quitus et même les propriétaires de biens dont les intérêts pouvaient être touchés par la résolution d’un problème particulier29. Si la paroisse semble être toujours être une cellule de base essentielle au xvie siècle, spécialement pour la levée des taxations ou pour l’organisation de l’assistance aux pauvres, elle semble plus en retrait au siècle suivant. À la différence d’Angers par exemple, elle n’a jamais constitué une structure essentielle de la vie politique que ce soit pour les élections ou la consultation de la « maire partie » des habitants, sauf lors de l’assaut fiscal de la monarchie contre les privilèges à la fin du règne de Louis XIV. Le savoir-faire acquis dans la gestion du temporel paroissial pourrait toutefois avoir été fort apprécié au moment de la sélection des édiles.
29Le 27 décembre 1643, les fabriqueurs de Saint-Léonard « font savoir qu’il y aura chapitre après la grand-messe pour en eslire d’austres a leur place ». Le général a dressé la liste des éligibles qui est décomposée en deux parties avec quatre noms pour « les bourgeois » et cinq noms pour « les artizans ». Le procèsverbal du 7 janvier 1644 indique la présence de vingt et un votants qui groupent très bien leurs suffrages : le procureur Jean Guyho, sieur de La Sauldraye, obtenant dix neuf voix et l’artisan Pierre Gallard dix sept30. Les représentants du monde de l’atelier et de la boutique ne correspondent pas à des familles municipales. Parmi les quatre bourgeois proposés deux sont parents avec des notables de la sphère municipale. Le fabriqueur Jean Guyho est le fils de l’avocat Mathurin Guyho vainement proposé au roi comme échevin en 1602, mais élu et désigné comme syndic municipal de juillet 1607 à septembre 1613, et il est lui-même candidat malheureux à l’échevinage en 1659. Le médecin Étienne de Bourgues, sieur du Pareslé, recteur de l’Université en 1654, fils du marchand Étienne de Bourgues, consul de la Contractation en 1629 et 1630 et échevin de 1639 à 1642, est le neveu de Jacques de Bourgues, premier maire marchand du xviie siècle (1646-1648).
30La recension des fabriqueurs au travail sur Saint-Saturnin de 1654 à 1659 a donné quinze noms. Trois sont devenus échevins et quatre autres appartiennent à une famille qui s’est illustrée dans la municipalité avec un mandat échevinal ou plus simplement avec la miserie municipale. Sept ou huit trésoriers viennent de la marchandise, contre un notaire royal et un maître chirurgien. Étant donné la grande supériorité numérique des fabriqueurs par rapport aux échevins, l’importance des liens qui unissent les deux types de fonction apparaît assez forte si on retient le critère familial, tout en fléchissant nettement lorsqu’on ne considère que les individus eux-mêmes. Si pour les marchands Jean Ollivier et Julien Gourdet la responsabilité fabricienne se place une dizaine d’années avant l’accès au bureau de ville, le notaire Pierre Belon est choisi comme fabriqueur dans la première année de son échevinage.
31Les indications trouvées dans les registres paroissiaux ne concernent que dix sept échevins sur les cent analysés : neuf ayant exercé cette responsabilité et huit étant cités pour un membre de leur famille, c’est-à-dire trois pour leurs frères, trois pour des cousins, un pour un oncle et un autre pour son fils. Si la proportion reste extrêmement faible, la méthode utilisée laisse sans doute échapper un certain nombre d’exemples. On ressent ici plus que jamais la nécessité d’une enquête approfondie sur la sociologie des fabriques nantaises. Pour les maires, la proportion tombe encore plus bas avec seulement six exemples sur cinquante. Seuls Jacques de Bourgues, fabriqueur de Saint-Nicolas en 1609 et maire en 1646, et Louis Mesnard, fabriqueur de Saint-Saturnin en 1650 et maire en 1682, allient les deux responsabilités. Les autres exemples, Pierre et Jean Poullain, Gratien Libault, Joseph le Roulx sont cités pour la responsabilité fabricienne de leurs pères ou grands-pères. Remarquons aussi que presque tous les exemples proposés correspondent à des notables marchands, la seule exception venant de l’avocat du roi au présidial Joseph Le Roulx, maire alternatif par commission en 1708-1709, dont le père, avocat au parlement, fut nommé fabriqueur de Sainte-Croix en 1670, un an avant son décès.
32À partir d’enquêtes aussi partielles, on ne peut émettre que des hypothèses qui restent à vérifier. Si la promotion fabricienne a lancé une minorité des édiles, la plupart ont pu triompher aux élections municipales sans ce préalable. Cet échelon du cursus honorum est sans doute plus important pour les notables visant l’échevinage car les candidats au poste de maire sortant de familles plus puissantes peuvent se permettre de négliger une telle phase préparatoire, mais également pour un notable d’origine marchande car c’est le seul moyen pour lui de s’intégrer au général de la paroisse alors que les officiers et avocats jouissent du privilège d’entrer directement s’ils le désirent aux assemblées délibérantes.
L’administration des hôpitaux
33Au début du xviie siècle existaient deux grands établissements hospitaliers placés en partie sous la responsabilité de la municipalité. Un premier Hôtel-Dieu avait été édifié par le conseil des bourgeois entre 1502 et 1507, dans la zone intramuros, à la confluence de l’Erdre et de la Loire. Son administration fut confiée à deux notables laïcs désignés dans une assemblée ou siégeait le capitaine de ville, les officiers de la justice royale et des bourgeois représentant « la plus saine et mayre partie des habitants ». Le 29 juillet 1555, le chapitre cathédral négocia l’introduction d’un député dans la direction de l’hôpital d’Erdre contre la cession des bâtiments de l’aumônerie Saint-Clément au conseil des bourgeois en échange d’un autre lieu31 Lors de la construction d’un nouvel Hôtel-Dieu dans l’île Gloriette, cette convention fut aisément reconduite dans l’acte du 16 décembre 165532.
34En 1568, à l’exemple de bien d’autres cités du royaume, une assemblée tenue à l’évêché, avec les officiers du roi et le corps de ville nouvellement établi, résolut de créer un bureau des pauvres pour coordonner toute l’assistance dont la politique fut définie dans un règlement qui est resté la base de toute l’aide sociale sous l’Ancien Régime33. Ce bureau supérieur formé de trois députés pour les chapitres, la cour de Nantes (Sénéchaussée et présidial) et le corps de ville, reçut alors la mission de superviser la gestion de tous les établissements de soins.
35En 1572, le corps de ville décida l’acquisition d’une maison, agrandie en 1599, pour y « retirer, et médicamenter les pestiférés ». Ce « sanitat » servit alternativement d’hôpital des pestiférés et de centre de soins pour les pauvres34. Réagissant très rapidement à une initiative du parlement de Bretagne d’avril 1649 concernant Rennes, le corps de ville décida le 16 janvier 1650 d’affecter les locaux du sanitat à l’accueil des pauvres assistés, précédant ainsi de peu un nouvel arrêt du parlement étendant cette politique à l’ensemble de la province35. La direction du nouvel établissement, promu au rang d’hôpital général en 1671 pour se conformer aux exigences de l’édit royal de juin 1662 instituant ces derniers dans tout le royaume, fut confié à un collectif de 15 membres placés sous la présidence de l’évêque de Nantes. On y distinguait les quatre députés des grands corps urbains, les chapitres, la chambre des comptes, le présidial, le corps de ville, et onze députés des paroisses de la ville et des faubourgs. Ces mandataires étaient appelés gouverneurs ou pères ou directeurs des pauvres renfermés36. Par réalisme, le quorum avait été fixé à cinq présents et le mandat n’était que de six mois. Le fonctionnement connût bien des difficultés car les fabriques paroissiales nommaient des bourgeois sans leur demander leur avis, ce qui conduisit à un réel absentéisme dans cette catégorie. Ces défaillances répétées servirent à justifier la liquidation de la représentation paroissiale en 1725. Le bureau fut réduit à 13 membres, les représentants des corps traditionnels étant aidés maintenant de huit notables choisis par eux pour quatre ans avec renouvellement par moitié37.
36Au xviie siècle, le bureau servant désignait donc des notables comme administrateurs des pauvres de l’Hôtel-Dieu pour une durée de six mois qui pouvait être renouvelée et un trésorier des pauvres de l’Hôtel-Dieu pour un mandat annuel débutant toujours à la Saint-Jean. Les noms relevés dans les registres montrent une nette préférence pour les marchands, peut-être pour leur supériorité en technique comptable. Les marchands drapiers ou commerçants de mer appartenaient sans doute à la frange supérieure du commerce, mais beaucoup ne semblent pas inclus dans la sphère municipale. Beaucoup de patronymes ne se retrouvent pas sur les listes politiques consultées. Il semble exister un écart certain entre les habitants qui se chargent de l’administration quotidienne de l’Hôtel-Dieu et le niveau échevinal. Par contre, les notables nommés par le bureau servant comme pères des pauvres au bureau central issu du règlement de 1568 appartiennent souvent aux familles municipales. Sous le règne de Louis XIV, c’est même un échevin en charge qui est délégué dans cette structure qui ne peut plus servir de tremplin.
37Quelques exemples peuvent illustrer ces habitudes. Le 15 juin 1628, le bureau servant nomme quatre marchands, comme gouverneur, trésorier, administrateur des pauvres. Pasquier Turpin, nommé père des pauvres, sort du consulat du commerce (16261627), mais ne sera jamais échevin. Le trésorier Mocquard est à rapprocher de René Mocquard, miseur municipal de 1586 à 1589, échevin de 1593 à 1596, mais lui-même ne parvient pas à l’échevinage, comme d’ailleurs les simples administrateurs38. Le 7 janvier 1687, le sous-maire marchand Le Roy remplace le procureur Mabille, ancien sous-maire, comme père des pauvres au bureau central. Le 26 juin 1687, le bureau désigne Pierre Caillerie, marchand, comme trésorier. Le 29 janvier 1690, le sieur Bacco, marchand, est continué pour six mois dans la responsabilité d’administrateur des pauvres de l’Hôtel-Dieu39. Aucun des deux ne connaîtra l’échevinage. Le représentant du corps de ville à l’hôpital général est aussi pris parmi les échevins en charge comme le montre la désignation du notaire de La Lande comme « directeur des pauvres du sanitat » dans la séance du 5 juillet 168140.
38Il est difficile de dire que les charges d’assistance liées à l’administration des hôpitaux étaient une étape essentielle du cursus municipal puisque bien des administrateurs et des trésoriers de l’Hôtel-Dieu ne sont pas issus de famille échevinale et que, dans la seconde moitié du xviie siècle, ce sont des échevins en fonction qui ont été députés au bureau des pauvres.
Les postes d’officiers de milice bourgeoise
39Tous les liens institutionnels étroits entre la milice et le bureau de ville, les services divers rendus par cette troupe d’habitants et le parallélisme intégral des mécanismes de désignation ont déjà été soulignés. Toutes ces convergences laissent supposer une grande ressemblance sociologique entre le corps municipal et les cadres supérieurs de la milice. Faut-il à partir de cette présomption considérer le passage par ce type de responsabilités comme une étape préalable à l’accession au bureau servant ?
40Le 26 avril 1598, au sein du processus de soumission et de normalisation de la ville ligueuse, Henri IV a imposé des élections selon le nouveau principe de trois candidats par poste. Comme à cette date existaient 14 compagnies de milice, le scrutin a donc dégagé 126 personnes dignes d’occuper les charges de capitaine, lieutenant ou enseigne, 42 officiers étant finalement retenus par le pouvoir royal41. En partant de l’expression la plus large, on constate que plus de la moitié des notables proposés ont un lien avec la municipalité. Naturellement, les situations recensées sont très différentes les unes des autres. Il convient d’éliminer dix exemples pour lesquels la fonction municipale n’apparaît que très postérieurement car elle ne concerne que des descendants. Pour 18 autres exemples, il ne s’agit que de parenté avec des magistrats du corps de ville. Restent donc 37 individus attachés directement au bureau municipal, dont un miseur. Dans cette minorité, huit notables n’ont bénéficié que d’une sélection par l’assemblée électorale nantaise, sans obtenir la consécration royale. Les proposés au roi pour la milice ayant eux-mêmes exercé des responsabilités municipales dans le bureau servant tombent donc à 28, c’est-à-dire à environ 22 % de l’ensemble. En ne retenant que les officiers installés, la proportion (17 %) de notables intégrés à l’échevinage est encore un peu plus réduite.
41Quatre décennies plus tard, un sondage indique une plus grande interpénétration des deux institutions, même si les cumuls demeurent minoritaires, à l’exception des seuls capitaines de l’espace intramuros. La coupure entre les compagnies de la ville et celles des faubourgs semble très nette, les notables des quartiers extramuros, à l’exception des quartiers portuaires de la Fosse, n’étant pas de taille à rivaliser avec l’élite sociale et culturelle des quartiers intérieurs pour l’admission à la municipalité.
42Une analyse des officiers de milice sous le règne personnel de Louis XIV a montré que sur les 17 maires en fonction, six seulement ont été désignés comme capitaine de compagnie avant d’être appelés à la direction du corps de ville. Deux autres ont quand même fait partie de la sélection nantaise. Sur les 113 échevins en fonction, 53 ont été concernés par la milice (46,9 %), 17 se contentant d’une présélection et 36 étant confirmés par le pouvoir royal (31,9 %). Dans les trois premières décennies, l’accès aux responsabilités d’officier s’est effectué après le mandat échevinal ; pendant les trois dernières, plutôt avant42. Cette inversion, qui manifeste une perte de prestige de la milice nantaise, peut être liée à la transformation éphémère des charges en offices vénaux, apparaît surtout comme une conséquence de la conquête de l’échevinage par les marchands et les procureurs. Dans un premier temps, le déficit de prestige social induit par la désertion des officiers de justice assure le succès de notables qui doivent encore parfaire leur respectabilité. Vers 1690, la nouvelle adéquation entre commerce et échevinage étant bien établie et la compétition entre marchands s’étant aiguisée, les distinctions préalables sont devenues décisives.
43Si des cumuls assez fréquents ont entretenu un jumelage entre les deux institutions, cela ne semble concerner qu’une minorité des maires et échevins. Certains n’ont jamais exercé de responsabilités municipales et d’autres ne furent liés au corps de ville que par l’effet de la parenté, avec un décalage d’une ou deux générations. Des officiers ont obtenu leur meilleur grade après leur passage au bureau servant. Les deux institutions se renouvellent à des rythmes très différents, les responsables de la milice pouvant demeurer très longtemps dans leur grade, les édiles obéissant à une règle de rotation très rapide, décalage toutefois compensé par le nombre de grades miliciens qui dépasse largement celui des postes du bureau servant. La milice n’a donc jamais été une étape absolument indispensable pour accéder au bureau municipal, mais la fréquence des cumuls et des liens familiaux constatés lui confère la plus grande intimité institutionnelle avec le corps de ville.
L’engagement municipal dans la vie des notables
L’expérience du bureau servant dans une carrière
Entrée en charge des maires
44Les deux classes les mieux représentées (35 à 44 ans) totalisent 17 exemples, ce qui ne fait pas la moitié, et pour avoir une majorité (23 exemples sur 39), il est nécessaire de prendre la fourchette 3549 ans. Ces trois classes intermédiaires se dégagent nettement de l’ensemble des classes d’âges répertoriées, laissant en amont un groupe réduit de six maires très jeunes et en aval un groupe un peu plus étoffé de dix maires plus âgés, l’expérience acquise au fil des années demeurant quand même une valeur sûre. Cette première approche montre donc que les notables du xviie siècle accédaient à la direction de la municipalité en pleine maturité, ni très jeunes, ni très vieux43. Cette réalité n’est pas contestée, mais bien plutôt confirmée par l’adjonction des dix exemples complémentaires qui relèvent d’une estimation.
45La majorité des exemples se trouve toujours dans la fourchette 3949 ans avec une proportion de 57,1 % contre 58,8 % dans la première mesure. La seule nuance perceptible concerne l’affermissement du niveau 40-44 ans, ce qui incite à ne pas trop vieillir notre maire type qui apparaît plutôt comme un notable de 35 à 45 ans, dans la force de l’âge, en pleine possession de ses moyens physiques et intellectuels, déjà expérimenté sans pour autant avoir attendu d’être devenu un « vieux sage » pour briguer avec succès la direction de la communauté de Nantes44. Furetière, dans son dictionnaire publié en 1690, parle de la jeunesse, c’est-à-dire « la fleur de l’âge », entre 15 et 30 ans et de la force de l’âge, c’est-à-dire « l’âge mûr ou l’âge viril » de 30 à 50 ans. On commence à vieillir au delà de 50 ans, « l’âge décrépit » débutant à 75 ans. Le dictionnaire de Trévoux édité en 1704, prolonge la jeunesse jusque vers 30/35 ans et la maturité jusque vers 50/60 ans, après quoi commence le déclin de l’âge qui mène à la caducité à partir de 80 ans45.
46Les plus jeunes sont parvenus très tôt à ce poste parce qu’ils ont bénéficié d’appuis familiaux considérables. La plupart sont des héritiers, six sur huit sont fils de maires. Le plus jeune de tous, René Bernard de La Turmelière, élu et désigné à 22 ans, appartient à un lignage illustré par son arrière grand-père, miseur de 1539 à 1546, son grand-père, sous-maire en 1575 et 1576, et son père, maire de 1613 à 161546. Il a surtout été porté par les Harouys (famille de sa mère) qui dominent la vie politique nantaise dans ces premières décennies du xviie siècle. Trois Charette sur les sept maires du siècle appartiennent à cette tranche d’âge. Comme les membres de cette famille puissante d’officiers de justice monopolisent la charge de sénéchal et comme celle-ci mène très facilement au poste de maire, cette forte présence n’étonne pas. Il faut même leur adjoindre Jacques Raoul, intégré au clan par son mariage avec Yvonne Charette, fille du premier maire, qui est le seul notable auquel la dynastie a bien voulu confier momentanément l’office de sénéchal47. Un cas particulier avec Julien Proust qui accède à la tête du bureau municipal à 28 ans en 1693, tout simplement parce qu’il a acquis l’office de maire perpétuel alors qu’il n’avait aucune expérience professionnelle dans une quelconque cour de justice48.
47Dans les plus âgés se retrouvent les quatre marchands, avec le doyen d’âge Jacques de Bourgues installé en 1646 à 69 ans49. Ces notables venus du négoce ont donc dû attendre d’être quasiment sorti de leur activité professionnelle pour obtenir cette responsabilité. Peut-être n’étaient-ils pas trop pressés, peut-être faut-il voir ici la conséquence du décalage qui les place en position inférieure dans l’estime sociale par rapport aux officiers du roi. La présence de deux officiers des Comptes, l’auditeur Jean Regnier et l’avocat général Pierre Noblet, traduit certainement le manque de puissance sociale de deux anoblis qui s’intéressent tardivement à la municipalité au moment même où leur illustre compagnie s’en démarque de plus en plus50. Notons enfin que deux candidats plus âgés ont été imposés par la monarchie contre la volonté du corps électoral : Gabriel Hus en 1599, pour le récompenser des services financiers et diplomatiques rendus pendant la Ligue ; Christophe Juchault, en 1642, avec mission de remettre de l’ordre dans la police municipale sérieusement perturbée par la montée de la xénophobie dans les années trente.
Entrée en charge des échevins
48Les trois classes d’âges les mieux pourvues correspondent à celles qui ont été dégagées dans le tableau des maires, mais la hiérarchie interne suggère un léger vieillissement. Ce n’est plus la classe des 35/39 ans qui domine, mais celle des 45/49 ans, ce qui donne un ordre complètement renversé. L’échevin type apparaît donc comme un notable âgé de 40 à 50 ans alors que le maire type n’avait que 35 à 45 ans. Comme pour les maires, la minorité d’élus qui dépassent ces âges moyens est plus importante que celle des plus jeunes et la classe des 55/59 ans est assez bien fournie comme pouvait l’être celle de 60/64 ans chez les maires. Ce gonflement marque bien la préférence du corps électoral pour les responsables d’âge mur, parvenant aux affaires de la ville après de longues années d’expérience professionnelle. Cette différence traduit également une inégalité de prestige entre les familles. Les échevins qui sont issus de familles moins puissantes doivent attendre plus longtemps pour accéder au bureau de ville.
49Dans les 68 échevins connus, 35 sont d’origine marchande et 33 d’origine officière ou de profession libérale. Les premiers semblent entrer en fonction plus tardivement que les seconds. Les trois classes d’âges les mieux fournies ouvrent une fourchette de 40 à 60 ans pour les marchands et seulement de 35 à 50 ans pour les autres, ce qui s’explique sans doute par une pression plus forte des activités professionnelles pour les premiers, la plupart devant attendre le relais de leurs enfants devenus adultes pour dégager le temps nécessaire à l’exercice des responsabilités municipales.
50Pour mesurer une éventuelle évolution de l’âge moyen d’entrée en fonction au cours du long xviie siècle, ce dernier a été divisé en trois séquences égales de quatre décennies. La première période, qui souffre d’une insuffisance statistique, montre des élus entre 25 et 60 ans, avec un noyau central à peine majoritaire inscrit dans les classes d’âges 35/45 ans. La seconde période, mieux étoffée, se distingue avec deux échevins qui dépassent 65 ans, mais se caractérise plutôt par un regroupement assez compact d’une nette majorité des élus entre 40 et 50 ans. La troisième période, dont les élus vont de 24 à 68 ans, a cependant son groupe central plus dispersé puisque ce sont les classes d’âges 30/50 ans qui sont les mieux fournies. Sur l’ensemble du siècle, l’évolution n’est pas linéaire car s’il est possible de proposer une élévation de l’âge moyen du premier au second tiers, celle-ci n’est pas confirmée dans les années 1680-1720 marquées par une tendance au rajeunissement des élus. Les classes d’âges les mieux représentées font passer de 35/39 ans pour 1598-1640 à 45/49 ans pour 1640-1680 et à 40/45 ans de 1680 à 1720.
51Il est difficile de tirer une quelconque conclusion de la promotion de douze notables de 35 ans au niveau des origines sociales que de la répartition chronologique, même si la dernière période concentre d’avantages d’exemples. Trois d’entre eux seulement sont des fils d’échevins, aux quels peut-être joint le frère cadet de René Montaudoin qui a certainement bénéficié du prestige de son frère aîné appelé avant lui au bureau servant
52Dans les quatre échevins de plus de 60 ans : deux marchands et deux robins. La nomination du procureur François Gérard à 68 ans en 1713 illustre parfaitement le caractère exceptionnel de ces promotions tardives : proposé au roi dès 1685 à 40 ans, il n’avait pas été retenu ; sélectionné par le corps électoral une seconde fois à 50 ans en 1695, il avait de nouveau connu l’échec51. Les raisons d’un troisième succès électoral, entériné cette fois par le pouvoir central, demeurent bien mystérieuses.
53De 1598 à 1718, 19 procureurs du roi-syndics se sont succédé dans les bureaux servants. Les registres paroissiaux ont livré les dates de naissance de huit d’entre eux et il a été possible d’estimer grossièrement celles de neuf autres. Pour Mathurin Guyho (1607-1613) et René Reliquet (1672-1677) mort en charge, les données étaient trop insuffisantes pour donner des repères fiables.
54La dispersion des résultats empêche de conclure à un âge privilégié pour l’élection et la désignation au poste de procureur syndic de la municipalité. L’équilibre relatif qui règne dans les classes 35/55 ans traduit la souplesse d’un recrutement qui n’obéissait qu’aux principes les plus élémentaires du droit électoral nantais, avec comme tradition, le respect presque systématique du choix de ce premier employé municipal dans le corps des avocats au parlement. Le corps politique nantais cherchait ainsi à confier la supervision des dossiers municipaux à un juriste expérimenté, ayant déjà derrière lui au moins dix ans d’expérience des affaires juridiques, donc à un spécialiste du droit en pleine activité professionnelle. Les trois derniers procureurs-syndics sont à considérer d’une manière particulière puisqu’ils n’ont pas été proposés par les suffrages des habitants, ayant pu acquérir cette charge érigé en office en 1692. Ce changement n’a pas vraiment bouleversé les habitudes puisque l’avocat René Dachon a prêté serment au bureau servant à 50 ans et que son successeur Julien Bodard s’y est intégré à 41 ans. Toutefois, la transformation de la fonction en office royal a permis l’accession au bureau servant de François Moricaud, jeune avocat de 26 ans, le plus jeune syndic de tout ce long xviie siècle.52
Promotions internes dans la municipalité
55En se tenant à la division chronologique, les possibilités d’un cursus municipal ne cessent de diminuer de 1565 à 1789, le dernier tiers du xvie siècle livrant 24 exemples, l’ensemble du xviie siècle 15 exemples et le xviiie siècle seulement dix résultats.
Du statut d’employé municipal au poste d’échevin
56Les résultats soulignent nettement le décalage entre les fonctions d’employés municipaux et les responsabilités de maire ou d’échevin, avec une exception significative pour les syndics. À Nantes, il est extrêmement rare de voir un greffier, un miseur ou un contrôleur accéder ensuite à une autre responsabilité dans le bureau servant. Il est curieux de constater que l’ouverture à la judicature seconde à partir de 1669, y compris aux notaires royaux, n’a pas permis à un greffier de se hisser parmi les échevins53.
57La période pendant laquelle les miseurs ont pu nourrir quelque espoir de promotion s’étend de 1565 à 1620 où on relève alors six exemples positifs. Ensuite, le divorce est consommé, pour des raisons différentes selon les deux siècles. Le plus beau parcours est à inscrire à l’actif de Jean Fruneau, miseur en 15711572, échevin de 1577 à 1578, maire de Nantes en 1586 et 1587. Ceci reste exceptionnel, sans doute lié aux luttes politiques internes et à la poussée du parti ligueur à partir de 157654. Selon les statuts initiaux, le miseur était nommé pour un an, avec possibilité de reconduction. La durée moyenne est de deux ans jusqu’en 1580, de trois ans jusqu’en 1600, de quatre à cinq ans jusqu’en 162355. Globalement, il n’existe donc pas de différence radicale entre la rotation des échevins et celle des miseurs jusqu’à cette date, malgré une évolution divergente à long terme. Ces ressemblances et les quelques exemples de promotion font penser à une certaine unité sociologique, même si les heureux bénéficiaires restent minoritaires (six sur dix-neuf).
58À partir des années 1620, la miserie se sépare définitivement du bureau servant pendant que le maintien en fonction s’allonge considérablement56. Ce divorce, qui correspond à une professionnalisation de la fonction, s’explique partiellement par l’augmentation de la charge de travail du miseur qui profite de la décomposition de la fonction de contrôleur. La réunion en 1674 de la miserie particulière des ponts de pierre, séparé depuis 1558 de la trésorerie générale, a gonflé singulièrement la comptabilité. Cette accentuation du travail se mesure également à l’aune des rémunérations qui se composent d’une prime municipale et d’une commission de trois deniers pour livre sur le montant de la ferme des octrois57. À partir de 1668, mais surtout à partir de la transformation du poste en office, une autre évolution explique la séparation croissante qui éloigne les miseurs et le bureau servant. Nicolas Paulus, receveur des décimes du diocèse de Nantes, mais aussi secrétaire du trésorier général des États de Bretagne, apparaît ainsi comme le premier traitant véritable à s’être intéressé à la comptabilité municipale. Cette anticipation, qui rapproche le maniement des deniers urbains des finances de la province, préfigure la solution du xviiie siècle. En effet, après des perturbations liées à la politique des offices, la miserie de Nantes a fini par être contrôlée par une famille de grands financiers qui s’est illustrée dans la Ferme Générale58.
59Les contrôleurs ont eu encore moins de possibilités de promotion que les miseurs, ce qui paraît logique si l’on pense à la hiérarchie administrative des fonctions59. Seuls les deux premiers marchands nommés ont ensuite accédé à l’échevinage, imitant en cela les autres employés municipaux. Les autres marchands désignés ont sans doute été victimes de la dégénérescence de la fonction qui a vu son prestige fondre en même temps que son importance administrative.
Du syndicat au poste d’échevin ou de maire
60Malgré le rôle essentiel du procureur-syndic au sein de la municipalité, l’histoire n’a pas consacré la tradition d’une promotion interne. Avec seulement treize exemples sur plus de deux siècles, c’est plutôt l’image d’une séparation qui prévaut. La répartition chronologique oppose pourtant des périodes très différentes. La deuxième moitié du xvie siècle, prolongée jusque vers 1620, témoigne, avec sept exemples, d’une certaine proximité entre syndics et échevins. Une longue période qui court de 1620 à 1720 environ est placée sous le signe d’un divorce quasi-total, avec un seul exemple vraiment exceptionnel. Un xviiie siècle, qui naît vers 1720, restaure des liens de plus en solides entre la fonction de syndic et le reste du bureau municipal, avec cinq exemples de jumelage.60
61Louis Michel s’inscrit dans une tradition familiale. Fils du syndic Mathieu Michel, cet avocat au présidial a d’abord approché les problèmes locaux dans une responsabilité d’échevin de 1579 à 1581, pour les retrouver peu de temps après avec la fonction de syndic de 1586 à 1598, ses options ligueuses ayant certainement joué en sa faveur. Remplacé par Henri IV, contre la volonté des Nantais qui l’avaient placé en tête des élections de 1598, il refait surface dès 1601, sans doute de nouveau plébiscité et cette fois ci reconnu par le roi. Il est continué en 1604 et ne cède la place qu’en 1607. Au total, presque vingt et un an de présence dans le bureau servant avec une simple interruption de trois ans : trois ans initiaux comme échevin, dix-huit ans comme syndic. Son rival, Guillaume Dachon, d’abord promu à l’échevinage de 1588 à 1590, nommé syndic par Henri IV de 1598 à 1601, a dû se contenter de trois années61. François Touraine, avocat au présidial et ensuite sénéchal du Chapitre cathédral, commence lui aussi par l’échevinage de 1604 à 1607 avant de conserver le poste de syndic pendant quatre mandats de 1613 à 1623, le dernier étant interrompu par son décès en charge62. Pour être complet, il faut signaler que son prédécesseur, l’avocat Mathurin Guyho, a été sélectionné aux piques échevinales nantaises de 1602 au troisième rang, sans être retenu par Henri IV. C’est donc un candidat malheureux, mais sociologiquement intégré au milieu de l’échevinage, qui compense son manque de chance avec le syndicat de 1607 à 161363.
62La seconde phase semble correspondre dans une première lecture des résultats chiffrés à une nette séparation puisqu’on ne relève que deux-exemples positifs. Étienne Touraine a d’abord terminé le mandat d’un échevin décédé, de décembre 1642 à septembre 1644, avant de travailler comme syndic de 1648 à 165464. L’avocat Philippe de Cazalys a essayé l’échevinage comme le montre le scrutin de 1657 où il obtient le second rang aux piques. Il est d’ailleurs à noter qu’il s’est présenté en même temps à la sélection du procureur syndic où il s’est placé en troisième position. C’est pourtant dans ce poste que le gouvernement de Mazarin l’installe le 12 avril 1658. Proposé à la continuation par les électeurs de 1660 à 1666, la monarchie accepte deux fois et refuse la dernière, ce qui le limite à trois mandats (16581666). Avec son expérience d’échevin de 1675 à 1678, il totalise ainsi presque douze ans de responsabilité municipale65.
63Deux exemples sur quatorze titulaires, la cause paraît entendue ! Il faut sans doute nuancer la brutalité de cette première lecture statistique en se souvenant des syndics malchanceux aux élections. Rappelons pour mémoire les déboires de Jean Coupperie, avocat au parlement, syndic de 1632 au début de 1636, qui sort de charge pour acheter le très important office de président du présidial en 1637 et qui est proposé sans succès par le corps électoral de 1638 à 1648 pour le poste de maire66. Jacques Langlois montre parfaitement comment certains notables se présentaient conjointement aux deux types de responsabilité. Après avoir vainement essayé de se faire désigner syndic en 1660, il concourt de nouveau en 1663 tout en réussissant à se hisser en tête du scrutin échevinal. C’est pourtant l’échec sur les deux tableaux, la préférence royale se portant sur des rivaux. Il obtient quand même en 1666 le poste de syndic qu’il assume pendant presque six ans67. Ces trois notables auraient pu modifier la proportion, seul l’arbitrage royal les a privés de la double responsabilité68.
64L’explication de ce divorce demeure malaisée, surtout lorsqu’on compare les origines sociales des uns et des autres. Presque tous les administrateurs sont tirés de l’ordre des avocats et, si cela peut être insuffisant pour une promotion comme maire, il n’existe pas de barrage social pour l’accès à l’échevinage qui recrute au même niveau, surtout dans la deuxième moitié du siècle.
De l’échevinage au poste de maire
65Cette promotion interne est restée minoritaire, même si la voie d’accès n’était pas impossible. Trente notables seulement correspondent à la définition, en y incluant un syndic élevé ensuite à la dignité de maire : 12 exemples sur 23 maires au xvie siècle, 11 exemples sur 46 au xviie siècle (15981692) et 7 exemples sur 19 au xviiie siècle. Se dessinent ainsi deux époques favorables qui encadrent une phase caractérisée par une séparation plus nette entre les fonctions. Pour dresser un ordre chronologique plus précis, disons que le xvie siècle apparaît nettement comme le moment privilégié contrastant avec un long xviie siècle qui s’étire de 1598 à 1735, tous les exemples du xviiie siècle se concentrant dans le demi-siècle compris entre 1735 et 1789 qui se rapproche ainsi de la phase initiale (7 exemples sur 13 maires).
66Dans la période 1565-1598, cette liaison échevinage-mairie est une spécialité des riches marchands qui représentent neuf exemples sur douze. Cette différence de cursus entre les marchands et gens de justice peut se comprendre dans la mesure où la création de la municipalité a été imposée par la lutte aux cours nantaises très réticentes, ce qui a obligé l’oligarchie commerciale à s’investir dans la nouvelle institution. L’accès direct de la robe au poste de maire correspond aussi naturellement à une supériorité admise dans l’échelle des dignités.
67La période 1598-1735 est d’abord caractérisée par la rareté des promotions internes dans le bureau servant. Il s’agit avant tout de dénivellation de puissance sociale. Onze exemples de promotion additionnent quatre marchands, trois conseillers et deux avocats du roi au présidial, un sénéchal des régaires et un auditeur aux Comptes. Par contre, les grands officiers du siège comme le président du présidial, le lieutenant, le procureur du Roi, le sénéchal, l’alloué, ou les présidents et maîtres de la chambre des comptes ne connaissent jamais cette étape préalable. Deux ou trois exceptions ne perturbent guère ce qui reste une règle de la haute société nantaise. En septembre 1686, dans une réponse à une question du procureur du roi du présidial de Toulouse, le bureau de ville indique que la tradition laissait les officiers supérieurs des Comptes et du présidial accéder directement à la fonction de maire, tandis que les auditeurs et les conseillers devaient passer d’abord par la fonction d’échevin, mais que ces exigences ont été abandonnées « depuis quelques années »69.
Engagement municipal au-delà du bureau servant
68La convocation de l’ancien bureau, formé des maires et échevins sortis de charge, permettait ainsi à ceux qui le désiraient de continuer à suivre la politique administrative et d’influer sur l’élaboration de la stratégie municipale à des moments particulièrement importants. Dans un premier temps, il nous a semblé intéressant de préciser quelle était la durée moyenne théorique de cette forme de participation, c’est-à-dire le temps écoulé entre le départ du bureau et le décès du magistrat municipal.
69L’étude repose sur 38 maires, un maire alternatif par commission ayant été acculé à la démission et les actes de décès manquant pour les onze autres. À partir, d’une base représentant 80 % de l’effectif, il apparaît que pour la moitié des notables (20/38), le temps municipal n’excède pas 15 ans. Toutefois, comme les maires entrent en fonction en pleine maturité sans attendre la consécration de la vieillesse et qu’ils font partie d’une élite sociale à longue espérance de vie, un nombre significatif d’entre eux a pu prolonger considérablement cette disponibilité. Pour un tiers, la participation éventuelle excède 25 ans.
70La ventilation des échevins montre des ressemblances, mais aussi des différences avec celle des maires. Comme dans le tableau précédent, le « temps municipal » d’une moitié des élus est inférieur à quinze ans, mais pour 20 % seulement, contre presque le tiers des maires, supérieur à 25 ans. Cet affaiblissement relatif des longues durées apparaît logique puisqu’il correspond à une entrée en fonction plus tardive des échevins. Les échevins sortis de charge se sont donc trouvés en moins bonne position pour bénéficier de la possibilité de prolonger leur intérêt pour la politique municipale nantaise.
71Pour vérifier le comportement réel des notables sur le terrain, ont été retenus trois registres de délibération parlant pour le milieu du règne de Louis XIV, à une époque de remise en cause des privilèges urbains. Ils couvrent une période qui s’ouvre au 13 mars 1687 et qui se clôt avec le 26 novembre 1691. Pour toutes les séances élargies dans lesquelles les anciens maires et échevins étaient prioritairement convoqués, ont été relevés les noms de tous les présents. Un notable très consciencieux répondant à toutes les invitations se serait déplacé 41 fois. Deux procès-verbaux ne sont pas utilisables, le greffier n’ayant pas détaillé les membres du grand bureau, ce qui laisse un base de référence de 39 séances. Toutes ne connaissent pas le même succès et les anciens échevins répondent beaucoup mieux aux invitations que les anciens maires nettement plus absentéistes. La réunion du 30 avril de chaque année, dans laquelle le corps de ville exerce son droit oligarchique de cooptation des candidats dignes d’être placés sur les listes d’éligibilité, est naturellement celle qui obtient le plus grand succès.
72D’après les actes de décès, sept anciens maires, sont concernés par la période analysée. Louis III Charette de La Gascherie, sénéchal de Nantes, établit soigneusement la différence entre les assemblées générales corporatives qu’il préside de droit et les grands bureaux simples ou élargis où le maire préside et dans lesquels il ne se déplace jamais. Le samedi 30 juillet 1689, il justifie son empêchement par un surplus de travail, ce qui provoque un recul de la séance au lendemain, en pure perte !70. Le cas de Paul Cassard est différent puisqu’il est demeuré en fonction jusqu’au 21 juin 1690. Force est de constater qu’il ne prolonge pas du tout cette responsabilité dans l’année qui suit sa sortie de charge.
73Le bilan oppose donc deux défaillants à cinq anciens maires plus coopératifs. L’alloué Claude Bidé se contente d’apparitions épisodiques. L’avocat du roi au présidial Guillaume de Lisle, sorti du bureau servant depuis le 11 août 1688, manifeste un certain intérêt pour la vie municipale puisqu’il participe à neuf séances sur les trois années étudiées, ce qui le rapproche du marchand Louis Mesnard, modèle de conscience civique et de dynamisme chez les anciens maires avec vingt citations réparties toutefois sur plus de quatre ans puisqu’il est sorti de charge dès 1683. Le président aux Comptes René de Pontual et le conseiller au présidial Mathurin Giraud doivent être salués à leur juste mérite car, si leurs performances sont les plus faibles, ils ont quitté le bureau servant depuis fort longtemps. Le premier, octogénaire, s’intéresse encore aux délibérations après plus de trente ans et le second, qui a quitté sa fonction depuis plus de vingt ans, a participé à huit séances réparties sur trois ans seulement puisque la mort est venue le surprendre le 4 mai 1690.
74Selon les registres des délibérations consultés, 36 anciens échevins sont entrés à un moment ou à un autre dans une séance municipale élargie de 1687 à 1691. La participation régulière commence avec les échevins de 1672 car en amont les décès ne laissent que quelques notables dont certains, comme Antoine François de La Brillandière, manifestent encore un vif intérêt pour la politique municipale. Dans les élus de 1672 à 1688 qui intéressent plus particulièrement cette analyse, on ne relève que quatre échevins totalement défaillants. François Gauvain et Germain Laurencin, absentéistes mais récemment sortis de charge, ont peut-être revu leur attitude dans les années ultérieures.
75En plaçant la barre à 19 séances sur les 39 possibles, on dégage une élite de 12 anciens échevins qui prolongent ainsi avec une bonne continuité leur engagement dans la vie politique locale. Ces notables, caractérisés par un intérêt soutenu pour les affaires urbaines et une conscience civique supérieure, représentent ainsi le tiers des anciens échevins qui ont répondu aux convocations. En descendant la barre à 13 séances, c’est-à-dire à une participation pour trois invitations, c’est un ensemble de 21 élus qui est ainsi souligné, soit environ 56 % de l’effectif. Certains chiffres très faibles, mais pas tous cependant, correspondent à des notables décédés pendant la période étudiée et dont la bonne volonté a pu être contrariée par la fatigue ou la maladie.
76Le tiers le plus performant est composé de six marchands et de six juristes (quatre procureurs, un avocat et un notaire), ce qui pourrait suggérer que ces derniers sont relativement plus actifs dans l’ancien bureau étant donné leur plus petit nombre à la fin du siècle. L’assiduité la meilleure est le fait d’un procureur et d’un notaire royal suivis de près par un marchand et un avocat. Ce dernier, que le greffier municipal range parmi les anciens échevins dans ses procès-verbaux, est en réalité un ancien procureur syndic qui confirme par son score élevé combien ce premier fonctionnaire municipal tenait une place importante dans l’élaboration des décisions des bureaux servants. En novembre 1691, dans le cadre de la défense de privilèges d’exemption des lods et ventes, une députation a été envoyée à la cour : c’est l’ancien syndic Nicolas Hervouët qui a été chargé d’accompagner le maire71.
77La comparaison de l’assiduité des anciens maires et de celle des anciens échevins suggère une réelle différence d’attitude envers les convocations aux séances élargies de la municipalité, après le passage au bureau servant. Les échevins sont beaucoup plus nombreux à se déplacer et assurent des taux de présence nettement supérieurs. Comme ils ont toujours eu la maîtrise de la décision dans les bureaux servants où une orientation est toujours décidée à « la pluralité des voyes », il en est ainsi dans les grands bureaux même élargis aux députés des trois grands corps nantais, où la même procédure est respectée comme le montre le compte rendu de l’assemblée du 31 juillet 1689 où le greffier note que « monsieur le maire ayant, suivant l’usage, pris les voyes de tous messieurs présens a l’assemblée, a esté d’un commun consentement arresté72… » Peut-être est-ce d’ailleurs cette conscience d’être vraiment au centre du pouvoir municipal qui explique cet attachement supérieur à la vie municipale nantaise !
Conclusion
78L’ambition qui suscite une candidature à la municipalité procède toujours, selon un dosage variable selon les individus, de la conscience civique de la nécessité d’une organisation collective de la vie urbaine et de la volonté de s’octroyer ou de défendre un certain nombre de privilèges personnels ou collectifs. Dans certaines familles, il existe une sorte de tradition du service public. La protection des franchises urbaines qui profitent surtout dans leur aspect fiscal à la haute bourgeoisie, le partage des privilèges financiers et honorifiques réservés au corps de ville, la perspective d’un passage de la roture vers la noblesse, au moins jusqu’en 1667, suffisent à expliquer pour les plus individualistes un intérêt pour un mandat municipal.
79Les recherches effectuées ont montré qu’il serait très exagéré de parler d’un cursus préalable obligatoire ou même seulement recommandé. Parmi les élus d’origine marchande, c’est une minorité de presque 30 % qui accède au bureau servant sans aucune distinction professionnelle antérieure. Les 70 % qui restent illustrent néanmoins la protection apportée par les consulats du Commerce et de la Contractation. Le passage par les fabriques paroissiales est également un bon moyen de se faire remarquer au sein de l’élite nantaise et de nouer de solides relations fort utiles le jour d’une élection. Pourtant, cette étape ne paraît pas indispensable. Elle est toutefois beaucoup plus utile aux marchands qu’aux robins et aux échevins qu’aux maires, question de puissance sociale ! L’acceptation des charges liées à l’administration des hôpitaux ne peut que soutenir une ambition municipale, sans que ce service soit réellement un tremplin pour le bureau servant. Seules les charges de pères des pauvres et à la rigueur de trésorier de la police des pauvres ont montré des liens fréquents, mais sous le règne de Louis XIV les rapports se sont inversés puisque ce sont des échevins qui sont envoyés siéger au bureau des pauvres. Les cumuls entre les postes d’officiers de milice et les fonctions municipales semblent très importants au xviie siècle. Remarquons toutefois que cela ne concerne que les compagnies des quartiers où l’élite sociale préfère résider. Les regrets justifiés du procureur syndic de 1686 attribuent ce laxisme dans le recrutement des avocats, procureurs et marchands à une évolution datée de la seconde moitié du siècle.
80Les maires prennent la présidence du bureau municipal entre 35 et 45 ans, dans la force de l’âge, en pleine possession de leurs moyens physiques et intellectuels. Les échevins attendent un peu plus longtemps puisque la plupart ont entre 40 et 50 ans. Les candidats d’origine marchande sont normalement plus âgés que les robins lorsqu’ils sont intégrés à l’institution. Il n’existe pas d’évolution linéaire dans ce long xviie siècle car si une tendance au vieillissement s’observe de 1598 à 1670, elle est contrariée par une évolution inverse de 1670 à 1720. Même si le corps politique nantais n’aime guère laisser des responsabilités à des notables trop jeunes qui risquent de manquer d’expérience professionnelle ou de maturité dans le jugement, il n’attend pas pour autant que les candidats soient devenus d’honorables vieillards, à l’approche de la mort, pour leur confier la gestion des affaires urbaines.
81Les exemples de promotion interne dans les structures municipales demeurent des exceptions, spécialement pour la période analysée. Si la coupure entre les fonctions de contrôleur et de greffier a toujours existé, les liens entre la charge de miseur et l’échevinage ont disparu vers 1620. C’est également à cette époque que s’observe un éloignement relatif entre les fonctions de syndic et d’échevin, phénomène complètement remis en question à partir de 1718, et surtout dans la seconde moitié du xviiie siècle. Le passage par l’échevinage avant l’obtention du poste de maire se raréfie entre 1598 et 1735, à cause de la pression plus forte des principaux officiers des Comptes et surtout du présidial sur cette responsabilité.
82En profitant des traditions d’élargissement du bureau servant, tous les élus avaient la possibilité de prolonger jusqu’à leur décès leur engagement municipal. Un sondage sur la fin du siècle a montré que les anciens échevins répondaient beaucoup mieux que les anciens maires à cette invitation, un tiers acceptant de se déplacer à une séance sur deux.
Notes de bas de page
1 Saupin (G.),La vie municipale à Nantes sous l’Ancien Régime, thèse 3ecycle, Nantes, 1981, p. 166-169.
2 AMN BB 38, l’année 1637 n’est pas fameuse. Plusieurs bureaux sont renvoyés par manque de présents
(3 mai, 26 août, 10 septembre, 24 septembre et 10 décembre).
3 Guignet (Ph.), Le pouvoir dans la ville au xviiie siècle. Pratiques politiques, notabilité et éthique sociale de part et d’autre de la frontière franco-belge, Paris, 1990, p. 97-103 et 318.
4 Brothier (G.), Le régime de la Loire et les ponts de Nantes à l’époque moderne, maîtrise, Nantes, 1974.
5 Saupin (G.), « Les Nantais et la défense de leurs privilèges sous le règne de Louis XIV », BSAHNLA,1993, tome 129, p. 87-103.
6 Gaston-Martin, Nantes au xviiie siècle ; l’administration de Gérard Mellier, Nantes-Toulouse, 1928, livre III, chapitre 3.
7 OGEE, Dictionnaire historique et géographique de la province de Bretagne, nouvelle édition, Rennes, 1853, tome II, article Nantes, p. 178.
8 B.M. Nantes, n° 50 288, Boutin (J.), Apologie de la communauté de Nantes et autres communautés de Bretagne pour contrer la préséance prétendue de la communauté de Rennes à la tenue des États de la province, Nantes, 1619.
9 AMN AA 3.
10 AMN BB 121. Étaient sollicités pour le maire « un gict d’argent avec une bourse de velours, dix huit livres de cire, une rame de pappier, un escriptoire, deux ganifz et un cent de plumes », et pour les échevins presque le même lot avec comme différence seulement 12 livres de cire.
11 AMN BB 73, séance 10-11-1720.
12 Saupin (G.), « Les entrées de ville à Nantes au xviie siècle », MSHAB, 1994.
13 Paugam (Y.), Les fêtes à Nantes au xviiie siècle, Maîtrise, Nantes, 1976.
14 AMN BB 57, séance 17-02-1688.
15 Morin (M.) et Roux (M.-A.), Les entrées de ville et les querelles de préséance à Nantes aux xviie et xviiie siècles, maîtrise Nantes, 1971, p. 52-79.
16 Descriptions variées dans les registres de délibération. Par exemple : AMN BB 115, 22-06-1615 ou 30-08-1616 ; AMN BB 116, 12-01-1661, 01-09-1667 ; AMN BB 73, 01-07-1720.
17 AMN BB 151, Facture de 657 livres pour six uniformes payée au maître brodeur Pierre Castelet 14121645.
18 AMN BB 42, 30-04-1651 ; BB 46, 09-12-1671 et 16-01-1672. AMN BB 116, Séance 27-09-1678, condamnation de quatre huissiers à 10 livres d’amende pour ne pas s’être réunis au corps de ville pour marcher au convoi funèbre d’Étienne Grilleau, marchand, ancien échevin.
19 AMN CC 127. Le compte du miseur Mocquart porte une dépense de 20 écus pour les portraits de Jacques de Marques et de Jean Fruneau, maires en 1585 et 1586-1587, « ainsi que les précédents maires d’icelle ville ». En 1623, le peintre Jean Lagouz demanda 100 livres pour le portrait de Louis de Harouys, tarif maintenu en 1634 pour André Dubot. En 1662 et 1669, le peintre parisien Georges Champaigne produisit deux tableaux pour 300 livres chacun. Les mesures d’austérité proposées par les commissaires royaux chargés du redressement financier de la municipalité se traduisirent par une réduction à 150 livres (arrêt du conseil du 10 septembre 1688).
20 AMN BB 131. A.C. du 21 mars 1721 : 300 livres par suite de l’allongement du mandat à deux ans.
21 Six seulement ont été sauvés à la création du musée archéologique de Nantes. Il s’agit des portraits de Charles Harouys (1588), Christophe Juchault (1642), Gratien Libault (1671), Louis Mesnard (1682), J.-B. Gellée de Prémione (1756), Georges Guérin (1786). L’Hôtel de ville possède aujourd’hui les portraits de Guillaume Harouys (1572), René Moricaud (1738), et Gérard Mellier (1720-1729).
22 AMN BB 132.
23 AMN BB 55, f. 16v.
24 Jeulin (P.), « Aperçus sur la Contractation », Annales de Bretagne, tome XL, n° 2, 1932, p. 284 et n° 3, 1933, p. 457. Lapeyre (H.), Une famille de marchand : les Ruiz, Paris, 1955, p. 228. AMN HH 194, liste des consuls.
25 Gabory (E.), La marine et le commerce de Nantes au xviie siècle et au commencement du xviiie siècle, Rennes, 1902, p. 264.
26 Quenet (M.), Le général de commerce de Nantes. Essais sur les institutions corporatives coutumières des négociants au xviiie siècle, thèse droit, Rennes, 1973, p. 25-37 et 75-80.
27 Responsabilités des Montaudoin. René : consul 1707-08, échevin 1709-12, juge consul 1715-16, proposé maire en 1718 et en 1730. Jacques : consul 1721-22, consul Contractation 1728, juge consul 1734-35. Thomas : consul 1720-21, échevin 1730-33, consul Contractation 1732, juge consul 1733-34.
28 ADLA G 469, fabrique Sainte-Croix 1712-1718 et G 470 (1719-1724). ADLA G 500, 502, 523, fabrique Saint-Saturnin.
29 ADLA G 502, Saint-Saturnin 1750-1788, nomination des douze notables et des trois fabriqueurs. ADLA G 505, arrêt du parlement 8 mai 1787 et requête du général de Saint-Saturnin 3 juillet 1787, nouvel arrêt du parlement du 20 juillet 1787.
30 ADLA 4E 2/143, notaire Belon.
31 ADLA H 485 ; AMN BB 4, f. 4 et GG 684 et 685 (Mars 1557).
32 AMN BB 43, délibération 16-12-1655.
33 Maître (L.), Histoire administrative des anciens hôpitaux de Nantes, Nantes, 1875, p. 131-136.
34 AMN DD 32.
35 AMN BB 42, séance 16-01-1650.
36 Croix (A.), La Bretagne aux 16e et 17e siècles. La vie, la mort, la foi, Paris, 1981, t. I, p. 675 et 683.
37 Maître (L.), op. cit., p. 245-248, arrêt du conseil 19 février 1725.
38 AMN BB 33 jeudi 15-06-1628.
39 AMN BB 56, f. 39, séance 26-06-1687 ; BB 57, séance 07-01-1689 ; BB 58, séance 29-01-1690.
40 AMN BB 58, f. 114.
41 AMN BB 24, F 6 => F 14.
42 Moriceau (S.), Les officiers de milice bourgeoise à Nantes, 1661-1715, maîtrise, Nantes, 1994, p. 79-82.
43 Bois (J.-P.), Les vieux, de Montaigne aux premiers retraités, Paris, 1984, p. 147-160.
44 Croix (A.), op. cit., tome I, p. 198-199. Cet auteur a relevé l’âge au décès dans les registres paroissiaux du faubourg Saint-Jacques, au bout des ponts, quartier où la longévité n’est certainement pas la meilleure. De 1619 à 1667, 47,7% des adultes de sexe masculin décèdent à plus de 50 ans, 26,7% à plus de 60 ans, 10,1% à plus de 70 ans. Les notables ont une espérance de vie plus longue que les gens du peuple. Il faut d’ailleurs souligner la rareté des décès en charge.
45 Bois (J.-P.), « Le vieillard dans la France moderne : XVIIe et xviiie siècles », Histoire, Économie et Société, n° 1, 1984, p. 69-70.
46 AMN II 94. ADLA 25 J-D, fichier Freslon, Nantes, volume II.
47 AMN GG 73, Saint-Donatien, 05-08-1618. Saulnier (F.), Le parlement de Bretagne, Rennes, 1909, tome II, p. 744.
48 La Nicollière (S. de) et Perthuis (A.), op. cit., p. 341-342.
49 Ibid., p. 269-270.
50 ADLA 25 J-D, Freslon, Nantes, volumes 14 et 16.
51 AMN BB 53 : 1685, 3e rang ; BB 61 : 1695, 6e rang ; BB 70 : 1713, 3e rang.
52 AMN II 97.
53 Saupin (G.), op. cit., tome II, p. 182-186, tableau récapitulatif p. 187. Seul le premier greffier Guillaume Le Bret est promu échevin à sa sortie de charge en 1570.
54 D’après les actes des registres paroissiaux, Jehan Fruneau semble très lié aux Brenezay et aux Laubier, deux familles nettement engagées dans la Ligue. Il est marié avec Jehanne Bernard qui a d’abord épousé Jehan Laubier, et par là même se trouve être beau-père du maire ligueur de 1592-1594. Par les Laubier, il est en relation avec Yves de Brenezay, beau-frère du maire ligueur, frère d’Antoine de Brenezay, maire en 1580, sénéchal de Nantes sous Mercoeur de 1590 à 1598. Voir AMN GG 173, Saint-Nicolas, baptême Jehanne Fruneau, 22-11-1570. AMN GG 175, Saint-Nicolas, baptême de Yves de Brenezay, 18-11-1579.
55 Saupin (G.), op. cit., tome III, p. 159 et 205-207. Sur 19 miseurs (1568-1622), on compte 13 consuls du commerce, deux avant, onze ensuite. La miserie apparaît quand même comme une possibilité d’accélération de l’ascension sociale en servant de tremplin pour des fonctions de prestige.
56 La moyenne entre 1628 et 1690 s’établit à 13 ans 4 mois, et encore faut-il noter plusieurs interruptions imprévues. Le marchand Jean Fachu est renvoyé par la municipalité en 1635 après près de douze ans de service, à la suite d’une faillite retentissante, fait unique dans les annales nantaises. Il reste redevable de 15 953 l 17 s 7 d. (AMN CC 165). Son remplaçant, Antoine Nidelet, héritier d’une dynastie marchande, fils du dernier miseur-échevin, conserve le poste pendant presque vingt ans jusqu’à sa mort en 1665. Si Georges Mangin ne conserve la fonction que dix ans, Nicolas Paulus la tient pendant vingt ans également, même s’il se fait seconder progressivement par son fils à partir de 1679. Louis Thiercelin, qui ne se décide pas à acheter l’office créé en 1689, est obligé de quitter le service après seulement cinq ans de travail.
57 AMCC 181 (1679-1680) et AMCC 182 (1680-1682). Indications de Paulus. Dans les statuts initiaux, les gages montent à 72 livres. Dès les années 1620, la municipalité a jugé nécessaire de réévaluer en ajoutant une prime extraordinaire de 240 livres. En 1670, une seconde prime de 150 livres pour travaux difficiles précède la récupération du salaire du miseur des ponts après 1674 (240 livres).
58 Saupin (G.), op. cit., tome II, p. 196 à 198, 201 et 202.
Durand (Y.), Les fermiers généraux au xviiie siècle, Paris, 1971, p. 106-112-238-246-248-298-342.
59 Vailhen (J.), op. cit., tome I, p. 108-112.
60 Saupin (G.), op. cit., tome II, p. 208-211.
61 AMN BB 24, scrutin du 25-04-1598.
62 AMN BB 28, scrutin du 01-05-1616. Touraine devance deux candidats : Maillard et Luzeau. AMN BB 29, scrutin du 01-05-1619.
63 AMN BB 25, 01-05-1602 ; BB 26, 01-05-1607 : Guyho n’a pu obtenir que le second rang. Devancé par un autre avocat, Poydéan de La Prussière, il est plus chanceux auprès du Conseil du roi.
64 AMN BB 39, scrutins de 1639 et 40 ; BB 41, installation 22-01-1648. AMN BB 42, scrutin du 01-05-1650, accord de continuation. Scrutin du 01-05-1654, les électeurs veulent le garder. Le roi lui préfère Lyrot du Chastelier (3e).
65 AMN BB 43, 01-05-1657, 12-04-1658 ; BB 44, 01-05-1663 ; BB 45, 01-05-1666 : le gouvernement lui préfère son second, Jacques Langlois, également avocat.
AMN BB 48, 07-06-1675, Cazalys est au deuxième rang des piques.
66 AMN BB 35, scrutin de 1632 : troisième position derrière deux autres avocats, Lyrot et Luzeau. AMN B 37, en 1635, accord parfait pour sa continuation. Pour le poste de maire, sélections nantaises et échecs nationaux en 1638, 1639, 1640, 1641, 1642, 1643, 1644, 1645 (BB 38-40).
67 AMN BB 43, 01-05-1660, il n’est que second. AMN BB 44, 01-05-1663, second pour le poste de syndic, mais premier des six pour l’échevinage. AMN BB 45, 01-05-1666, toujours second pour la charge de syndic, il l’obtient néanmoins. AMN BB 46, 01-05-1669, accord de continuation.
68 Même en ajoutant ces candidats malchanceux, cela n’inverse pas la proportion qui correspond alors à quatre exemples de proximité, avec les responsabilités de maire ou d’échevin, sur quatorze titulaires.
69 AMN BB 55, f. 61 (01-09-1686).
70 AMN BB 58, f. 8-9.
71 AMN BB 58, f. 148, séance 09-11-1691.
72 AMN BB 58, f. 9-10.
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Nantes au XVIIe siècle
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