Nicodémisme et Révocation de l’édit de Nantes
p. 277-290
Texte intégral
« Il y avait parmi les Pharisiens un homme du nom de Nicodème, un chef des Juifs.
Celui-ci vint, de nuit, trouver Jésus. »
Saint Jean, 3, 1-2.
1Outre la conversion, l’opiniâtreté et l’exil, il existe un quatrième comportement que l’on peut observer parmi les Nouveaux Convertis (NC) après la Révocation de l’édit de Nantes : le nicodémisme, c’est-à-dire le fait de cacher ses véritables opinions et d’adopter un catholicisme de façade tout en restant intérieurement réformé. Cette attitude a déjà été dénoncée par Calvin dans plusieurs ouvrages, comme en 1544 dans son Excuse à Messieurs les Nicodémites ou quinze ans plus tard dans le Petit traicté monstrant que c’est que doit faire un homme fidèle cognoissant la vérité de l’Évangile, contestant même le terme de « nicodémites » dans la mesure où Nicodème a aussi soutenu le Christ contre tous et a même enseveli son corps avec l’aide de Joseph d’Arimathie1. Cette dénonciation est reprise au moment de la Révocation de l’édit de Nantes par les pasteurs du Refuge dans des ouvrages de controverse ou des lettres pastorales. Le terme de nicodémite est alors peu utilisé car comme Calvin, des pasteurs tels Jacques Basnage trouvent le mot inadéquat mais dénoncent les comportements de ces NC qu’ils accusent d’avoir renié Dieu en abandonnant leur confession2. Les causes de leurs chutes, selon ces mêmes pasteurs, sont à la fois les persécutions subies, les moyens mis en œuvre par l’Église catholique pour attirer les NC, ce que Pierre Jurieu appelle « la séduction », mais aussi l’attachement des NC à leurs biens et leur souhait de ne pas renoncer aux honneurs qu’ils pourraient perdre s’ils ne paraissaient pas de bons catholiques. Il est donc demandé à ceux qui ont abjuré d’imiter l’apôtre Pierre, de se repentir, et ainsi ils seront pardonnés3.
2L’objectif de cette communication est avant tout d’étudier les moyens utilisés par les nicodémites pour tromper l’Église catholique et les difficultés rencontrées par l’historien pour analyser le nicodémisme. C’est véritablement durant cette fin du règne de Louis XIV que cette attitude des NC est la plus importante dans la mesure où c’est au cours de cette période que les persécutions sont les plus fortes et la simulation un moyen d’échapper à la répression. Après la mort de Louis XIV, progressivement les enjeux ne sont plus les mêmes.
3Il est nécessaire tout d’abord de définir différentes catégories de NC selon leur degré de nicodémisme. Pour cela, le meilleur moyen est d’utiliser des sources rédigées par les adversaires, c’est-à-dire par d’anciens catholiques, et tout particulièrement des enquêtes menées auprès des familles de NC par des curés ou des subdélégués au lendemain de la Révocation de l’édit de Nantes. Ces listes de familles sont souvent accompagnées de commentaires tout à fait intéressants. Le nicodémite doit donc être parmi ceux ou celles qui sont considérés comme sincèrement convertis ; il est celui qui réussit à tromper les catholiques, mais peut-être aussi les membres de sa propre famille qui peuvent être devenus de bons catholiques. Le premier exemple que je prendrai est celui de La Charité-sur-Loire4. D’après une enquête datant de la fin du xviie siècle, le curé distingue onze feux de NC, chacun comprenant de un à cinq individus, soit au total trente et une personnes qu’il est relativement facile de surveiller dans cette petite ville et dont l’identité confessionnelle est aisément connue de tous. Le curé s’abstient de tout commentaire à l’égard de ces familles, à l’exception d’une seule : il s’agit de Pierre Tallas, marchand, de sa femme, sa fille, une nièce nommée Denis et une cousine nommée Butet. Le curé ajoute : « Tous font leur devoir avec édification. » Si le curé distingue nettement cette famille, c’est qu’il pense en tenir là une désormais sincèrement convertie ; mais à l’égard des autres, sans l’écrire, il exprime des doutes sur leur attachement au catholicisme. Nous avons cinq personnes susceptibles d’être des nicodémites5. Il ne faut donc pas sous-estimer un phénomène qui est une abjuration intéressée de familles protestantes, pour éviter violences et mesures répressives, abjuration qui « a fini par entraîner peu à peu un catholicisme sincère6 ».
4Le second exemple est celui d’un « état des NC dans la province du Nivernais, généralité de Moulins », datant de 1699, alors que dans cette période entre la guerre de la Ligue d’Augsbourg et celle de Succession d’Espagne, on remarque partout une forte intensité des persécutions7. Dix-neuf familles seulement sont recensées dans cette généralité, beaucoup étant très dispersées. On en trouve ainsi une à Marseilles-les-Aubigny, à Guipy, à Viry, à Fours, à Lormes, à Cuzy, à Montenaison et à Saint-Germain-sur-l’Aubois, et deux à Nevers. Mais je m’intéresserai uniquement aux neuf familles de NC de la petite ville de Château-Chinon dans le Morvan8, soit trente-huit personnes (dont vingt et une de 16 ans ou moins, contre six à La Charité-sur-Loire). Le subdélégué fait des commentaires précis sur les comportements des uns et des autres. Sept des familles de Château-Chinon sont des notables dont cinq appartenant à la même famille, les Étignard :
- Paul Étignard, bailli, « fait exemplairement son devoir », mais sa femme, Marie Mazillier, est « tout à fait opiniâtre et entêtée » ; les enfants sont envoyés à la messe, mais pas au catéchisme ;
- Claude Étignard, sieur de Montcorbin, capitaine de bourgeoisie, vivant seul, « ne fait point du tout son devoir » ;
- Jacques Étignard, lieutenant en l’élection de Château-Chinon, « ne fait son devoir qu’avec peine, il va seulement quelquefois à la messe aux capucins et se cache derrière l’église quand il y est. Sa femme, Rachel Le Sobre, est tout à fait opiniâtre. Les enfants vont, de temps en temps, à la messe et n’ont été qu’une fois au catéchisme » ;
- Jacques Étignard, médecin, âgé de 72 ans, « ne fait point du tout son devoir de catholique » ;
- Philippe Le Sobre, sieur de Daumartin, avocat, « fait son devoir depuis longtemps et travaille à convertir les autres de sa famille. Sa femme [Marie Étignard] ne fait point du tout son devoir, leurs enfants n’assistent point au catéchisme. Ils vont seulement quelques fois à la messe ».
5À cette famille Étignard s’en ajoutent deux autres de notables :
- Pierre Girardot, receveur des tailles, « fait assez mal son devoir, tant pour le spirituel que pour le temporel. Sa femme ne le fait point du tout, ni ses enfants ».
- Judith de Montchanin, veuve d’Isaac Lefebvre, avocat envoyé aux galères car il avait refusé d’abjurer alors qu’il avait été arrêté à la frontière suisse, vit avec sa fille et « elles ne font ni l’une ni l’autre leur devoir9 ».
6Restent deux vieilles filles qui « n’ont pas le sens commun » et Lazare Varot qui a sept enfants et qui vit avec son frère : « ces deux NC font tout à fait bien leur devoir, ils sont pauvres et méritent encore quelques gratifications. »
7Plusieurs remarques peuvent être faites à partir de ces neuf familles. Si les deux vieilles filles sont mises de côté, sur quinze adultes, quatre sont dits bien convertis (que des hommes), un très hésitant, mais probablement plus réformé que catholique, enfin dix sont clairement décrits comme opiniâtres et ne cachent pas leur attachement à leur foi réformée. Les persécutions, accusées d’être selon les pasteurs, responsables du nicodémisme, semblent dans ce cas avoir un impact limité. Mais le subdélégué suggère deux types de mesures pour modifier ces comportements : tout d’abord, il souhaite obliger les hommes à se défaire de leur charge ou à leur interdire d’exercer ; c’est ce qu’il demande pour Claude Étignard, capitaine de bourgeoisie, pour Jacques Étignard, médecin, ou Jacques Étignard, lieutenant de l’élection. Ensuite, retirer les enfants des familles et les enfermer dans des couvents sont des mesures régulièrement demandées. Le subdélégué le propose aussi bien pour les enfants de Paul Étignard, de Jacques Étignard et de Philippe Le Sobre, bien que les sentiments des trois pères semblent très différents à l’égard du catholicisme. Le point commun de ces trois familles est l’opiniâtreté des mères, qui paraît plus importante que celle des pères. Ce comportement conduit le subdélégué à souhaiter l’enlèvement des enfants10.
8L’influence de l’Église catholique semble très retreinte auprès des familles qui, troisième accusation, ne cherchent pas systématiquement à conserver leur rang en simulant leur conversion. En fait nous avons quatre nicodémites potentiels : les deux frères Varot, le bailli Paul Étignard et l’avocat Philippe Le Sobre, sachant que les deux derniers appartiennent à des familles dans lesquelles les opiniâtres existent, mais la conservation d’un office, l’obtention d’une pension de la part du roi ou de l’Église peuvent être des motifs de nicodémisme. Pour l’Église catholique, des NC font certains devoirs des catholiques, mais les ecclésiastiques ne sont pas dupes, ce sont de faux nicodémites. Le fait minoritaire – nous sommes en présence de toutes petites communautés réformées isolées – ne semble pas inciter les NC à cacher leur foi. On pourrait ainsi multiplier les exemples. Près des deux communautés de Château-Chinon et de La Charité-sur-Loire, on possède une enquête sur les NC de Paray-le-Monial11 ou de Vaux-le-Jaucourt. C’est exactement le même phénomène. Autour de Vaux-le-Jaucourt, en 1699, le curé recense vingt-deux NC dans trois lieux différents et il conclut à la fin de l’enquête : « Il faut remarquer que de tous ces nouveaux convertis, il n’y en a pas un seul qui ait fréquenté les sacremens, ils ont tous leurs livres hérétiques. » Ils ne semblent pas nicodémites, quelques-uns allant de temps en temps à la messe, mais le curé ne se fait aucune illusion12.
9Au total, à partir de ces deux enquêtes de NC, cinq de La Charité-sur-Loire, quatre également de Château-Chinon sont susceptibles d’être des nicodémites. Il ne faut pas toutefois considérer qu’il n’existe pas de réelles – voire sincères – conversions au catholicisme parmi les familles de NC, même si au départ l’intérêt social a prévalu en particulier chez les notables13. Comment donc savoir s’ils sont ou non nicodémites ?
10Les registres paroissiaux constituent une première source importante, mais à utiliser avec prudence, dans la mesure où ils permettent avant tout de déterminer davantage des opiniâtres que des nicodémites. Le baptême d’un enfant de NC par un curé n’a à mon sens, dans cette première période du Désert, aucune signification que ce soit de conversion sincère au catholicisme, de nicodémisme ou d’opiniâtreté dans la mesure où les deux sacrements ont la même valeur, cela a été affirmé par Calvin d’une part, et par le concile de Trente d’autre part. Une conversion à l’une ou l’autre confession ne doit théoriquement pas nécessiter un second baptême. En effet, le baptême a la même « substance » dans les deux confessions, comme l’écrit Jean Calvin dans son Institution de la religion chrétienne. Cette conviction est reprise dans la Confession de foi de La Rochelle adoptée par les réformés en 1571 : « Ceux qui sont baptisés en la Papauté n’ont pas besoin d’un second baptême14. » Quant au concile de Trente15, il condamne à l’excommunication celui qui dit « que le baptesme donné mesme par les héretiques au Nom du Père, & du Fils & du Saint Esprit, n’est pas un véritable baptesme ». Lors d’une conversion religieuse vers l’une ou l’autre confession, il n’est généralement pas demandé un nouveau baptême. Toutefois des rituels, que l’on peut qualifier de « rigoristes », de certains diocèses demandent la célébration d’un nouveau baptême16. C’est ce qui se passe au moment de la Révocation de l’édit de Nantes dans le diocèse de Bourges où certains curés rebaptisent des NC qui portaient un prénom vétérotestamentaire17.
11La mort d’un NC est plus problématique pour l’historien, d’autant qu’en avril 1686 une déclaration royale condamne les relaps, c’est-à-dire les NC revenus à leur ancienne foi, à un procès, donc au procès de leur cadavre s’ils sont morts protestants, leurs biens étant confisqués et leur cadavre traîné sur la claie18. Si traîner le cadavre sur la claie est une pratique abandonnée au cours des années 1690, les procès contre les cadavres se poursuivent jusque dans les années 1750 : le dernier procès retrouvé en Nivernais est celui contre le cadavre d’un certain Jacques Étignard en 1754, ce dernier étant probablement le fils de Paul Étignard, le bailli19. Dans cette même famille, Jacques Étignard, le médecin opiniâtre, meurt également relaps en 170120. La mère de Paul Étignard – le bailli – est morte relapse en 1689, mais sans que le cadavre soit traîné sur la claie dans la mesure où ses enfants ont « enlevé nuitament le cadavre de ladite Bernard » pour l’inhumer clandestinement21. Aucun des potentiels nicodémites ne meurt relaps, mais mourir catholique peut être également un choix pour éviter procès et confiscation des biens. L’absence d’un décès dans les registres paroissiaux peut avoir plusieurs causes, dont une sépulture protestante clandestine sans que le curé ait été averti de l’imminence de la mort et de la mort du NC. La famille peut ainsi procéder à la sépulture « nuitamment » dans un jardin ou une pièce de terre appartenant à la famille.
12On rencontre enfin les mêmes difficultés d’interprétation à l’égard des mariages. Si l’édit de Fontainebleau ne mentionne pas d’obligation de célébrer un mariage catholique pour les NC, il faut attendre différents textes de 1697 et 1698 pour que cette obligation soit désormais inscrite dans la loi. La déclaration du 15 juin 1697 condamne les « prétendus mariages », c’est-à-dire des mariages illégaux, et oblige ceux qui se sont unis ainsi « de se retirer par devers les archevêques et évêques pour les réhabiliter suivant les formes prescrites par les saints canons ». La déclaration du 13 décembre 1698 précise désormais l’obligation du mariage catholique pour les NC : « Enjoignons à nos dits sujets réunis à l’Église d’observer dans les mariages qu’ils voudront contracter les solennités prescrites par les saints canons, et notamment par ceux du dernier Concile et par nos ordonnances » (article VII). L’article VIII reprend celui de l’édit de Fontainebleau, mais précise que le baptême doit avoir lieu dans les 24 heures qui suivent la naissance et que la sage-femme doit avertir le curé de la naissance d’un enfant ; ce n’est pas dit explicitement dans l’article, mais c’est avant tout dans une famille de NC. En effet, on observe un peu partout des couples de NC qui dans les années 1690 refusent le mariage catholique et ne procèdent qu’à la signature d’un contrat de mariage chez le notaire et, éventuellement, à une célébration religieuse par un pasteur clandestin ou quelquefois même à l’étranger22. Ces couples opiniâtres sont connus dans la mesure où ils acceptent de faire baptiser leurs enfants par le curé qui signale l’illégitimité des nouveau-nés, mais une telle attitude n’est pas celle de la majorité des couples. Par les registres paroissiaux, il est donc plus facile d’étudier les comportements des opiniâtres que ceux des nicodémites.
13D’autres sources catholiques peuvent permettre des indices ou des confirmations de nicodémisme. C’est le cas par exemple de nouvelles enquêtes sur les NC qui peuvent être organisées en 1724. C’est en effet cette année-là qu’est promulguée la dernière grande loi répressive contre les protestants, loi qui reprend toutes les mesures antérieures : elle montre à la fois un regain des persécutions après une période de recul – mais non d’arrêt de la répression depuis la mort de Louis XIV – et le fait que ces lois sont peu ou pas appliquées23. Dans un tel contexte, des curés ou des subdélégués font donc de nouvelles enquêtes pour savoir contre qui appliquer cette déclaration de 1724. Toutefois, le pouvoir royal s’interroge lui-même sur l’application d’une loi très répressive tout en évitant une nouvelle vague d’émigration comparable à celle des années 1680, car c’est là la principale crainte des autorités24. Une de ces enquêtes sur les NC existe justement pour la communauté de Château-Chinon : elle ne signale plus que six familles de NC, au lieu de neuf vingt-cinq ans plus tôt25. À côté de ces enquêtes, on peut trouver une correspondance entre curés, évêques, intendants, secrétariat d’État à la Maison du roi, concernant souvent des affaires très précises au sujet de ces familles de NC.
14Les mémoires et journaux publiés par des protestants insistent naturellement davantage sur l’opiniâtreté que sur le nicodémisme. Antoine Court, né en 1695, qui décrit ainsi son opposition à aller à la messe alors qu’il est enfant, refusant ainsi tout nicodémisme :
« Il détestait la messe de tout son cœur. Était-ce par connaissance ou par préjugé ? L’un y avait beaucoup plus de part que l’autre ; ses connaissances et ses lumières n’étaient pas encore assez développées et assez étendues pour pénétrer jusqu’au fond de ce mystère d’une invention humaine. Mais, soit connaissance, soit préjugé, il n’y assistait point du tout. Son régent était assez indulgent pour n’y prendre garde ; il n’en était pas de même de ses condisciples. C’étaient des furieux qui à la sortie de l’école, s’élançaient sur lui pour le traîner de gré ou de force dans l’église ; mais il fut assez heureux pour leur résister toujours, ou par la fuite ou par adresse ou par le secours de ses amis26. »
15Ou le Normand Isaac Dumont de Bostaquet qui s’adresse ainsi à l’ecclésiastique entre les mains duquel il vient d’abjurer malgré lui :
« Je lui fis après serment de n’aller jamais à la messe que je ne fusse convaincu des choses que la violence seule nous contraignoit de signer, ni que je changerois point dans ma famille l’ordre qui y étoit établi pour les exercices de piété. À quoi il m’exhorta, et consentit que je prisse du temps pour m’instruire sans entrer dans leurs églises : ce que j’ai exécuté fort religieusement, n’ayant jamais entendu de messe ni participé à leurs mystères27. »
16Enfin, les archives notariales sont essentielles car certains actes permettent de comprendre le nicodémisme de NC, plus par leur absence lors d’un acte que par leur présence, absence qui peut être confirmée par des registres des Églises françaises du Refuge ou par une aide financière accordée par une Église, une ville ou un État à l’étranger.
17Le parfait nicodémite simule jusqu’à la mort, donc on ne peut théoriquement pas le reconnaître. Ceux qui sont nicodémites en 1699 et qui par la suite vont révéler la simulation de leur conversion décident à un moment ou à un autre de rompre avec cette attitude, à l’image souvent de ceux qui abjurent en 1685-1686 et qui dans un délai plus ou moins long passent à l’opiniâtreté. Cela permet de souligner une résistance « élastique » qui se traduit par un certain nombre de compromis à l’égard de l’Église catholique28. Ainsi, par exemple, beaucoup de ceux qui venaient d’abjurer en 1685-1686 refusent de communier lors de la fête de Pâques de 1686 et basculent dès ce moment-là, pour le pouvoir, dans le camp de l’opiniâtreté.
18À La Charité-sur-Loire, une famille dont les membres faisaient « leur devoir avec édification » était celle composée de Pierre Tallas, de sa femme Jeanne Denis, de leur fille, d’une nièce et d’une cousine. L’histoire de cette famille permet de constater la persistance d’un sentiment antiprotestant à l’encontre de certains NC, et en particulier à l’égard de ceux qui semblent sincèrement convertis. Est-ce parce que pour les anciens catholiques un NC est avant tout un ancien protestant et que l’on peut systématiquement douter de sa conversion, ou est-ce un comportement spécifique à l’égard de certaines familles de NC dont le voisinage connaît l’attachement au calvinisme ? Ou est-ce simplement le résultat d’un conflit social ou professionnel, peut-être accru par une différence religieuse ? Par exemple, en 1696, Pierre Tallas et Jeanne Denis déposent plainte contre Jacques Lepage, tanneur, et son épouse : « Par une animosité sans exemple, sans leur en avoir donné jamais aucun sujet, à plusieurs et diverses fois, ladite femme Lepage aurait battu et maltraité ladite Denis à coups de pieds et de poings et d’autres fois à coups de pierres, jusqu’à prendre le fusil duquel elle l’aurait mis en joue pour la tuer29. » Quant à Jacques Lepage, « au lieu de la blasmer et lui en faire correction, au contraire, aurait dit plusieurs atroces paroles » contre Pierre Tallas et sa femme. À l’origine de cette affaire, il existe probablement un conflit entre le dénommé Lepage et un huissier. La femme de Lepage aurait qualifié l’huissier de « diable d’huguenot » selon certains témoins, « partisan des huguenots » selon d’autres. Assistant à cette scène, Pierre Tallas « qui a cru apparemment que ces paroles s’adressaient à luy, luy aurait dit qu’il estait aussy bon catholique qu’elle pouvait estre et que l’on scavait bien ce qu’elle avait coutume de dire et que mesme ce n’était d’aujourd’huy qu’elle luy en voulait ».
19Ce n’est en aucun cas une affaire isolée. Non loin de là, à Nevers, réside une seule famille de NC, celle d’Alexandre Cuzin, un maître chaudronnier. Elle est décrite en 1691 par le curé de leur paroisse : depuis la Révocation de l’édit de Nantes, « ils ont fait leurs devoirs de paroissiens, soit en assistant aux services, y fréquentant les sacrements, et ils ont toujours fait leurs Pasques et communié à Noël dans notre église », et il affirme « n’avoir rien recognu de contraire à nostre religion30 ». Cependant, Cuzin témoigne que « bien qu’on ne leur puisse reprocher qu’ils ayent fait aucune chose contraire à celle catholique apostolique et romaine, en laquelle ils vivent avec plaisir […], certains gens prennent journellement plaisir de passer devant la porte dudit logis dudit Cuzin, luy disent quantités de paroles et luy font plusieurs interrogations pour le provoquer ». Pourquoi une telle attitude ? Il aurait en effet déclaré en 1691 à des soldats, en pleine de Ligue d’Augsbourg : « Notre Roy est un grand prince, mais le prince d’Orange aura, s’il plaît à Dieu, la victoire31 ! » En 1694, il est arrêté parce qu’il « se moquait de la Sainte Vierge et des saints32 ». Cuzin a, un temps, en effet bien trompé le curé car lors de l’enquête de 1699, il est décrit comme « fort opiniastre » et « tout à fait ignorant33 ».
20 À La Charité-sur-Loire, il faut en fait attendre 1712 pour avoir la réponse à notre question sur la famille Tallas. Le 13 février 1712, Jeanne Denis procède au partage de ses biens, puis le 30 mars 1713 elle rédige son testament. Dans le premier des actes, on peut lire : « honneste femme Jeanne Denis, femme de Pierre Tallas, marchande demeurant en cette ville de La Charité authorisée par justice […] pour l’absence dudit Tallas par sa sortie du royaume pour fait de religion34. » Le nicodémisme de Pierre Tallas ne fait donc aucun doute. Dans son testament, Jeanne Denis lègue ses biens à sa nièce et les invocations sont typiquement catholiques. Est-elle une catholique sincère ou une parfaite nicodémite qui a préféré rester en France pour que les biens de la famille ne soient pas confisqués ? Nous ne pouvons répondre à cette question.
21À Château-Chinon, les doutes se portaient sur quatre NC. Aucune nouvelle information n’a été trouvée sur les frères Varot. L’enquête de 1724 lève cependant certains doutes, en particulier sur la famille Étignard. Paul Étignard, le bailli, qui paraissait bien converti, malgré un environnement familial demeuré très attaché à la foi réformée, ne semble plus si catholique, même si l’auteur de l’enquête a des doutes. En effet, il écrit : « Le père fait en apparence son devoir de catholique, allant à la messe et aux services. La femme, le fils et les deux filles ne le font point du tout, et c’est ce qui fait douter de la sincérité du père. » Cette impression est confirmée par la présence dans cette même maison du frère du bailli, Claude Étignard. Ce dernier « ne fait point de devoir, étant l’un des plus opiniâtres. Il a été relégué, même emprisonné pour ses résistances. Cela n’a fait aucun changement. On croit qu’il soutient les autres dans l’erreur ». Paraître catholique en 1699 avait pour objectif de conserver sa charge ou de conforter dans certaines familles une ascension sociale. Le dernier nicodémite potentiel était Philippe Le Sobre, beau-frère de Paul, le bailli. Désormais plus aucun doute, il est mentionné dans l’enquête comme résidant avec ses deux filles et « le père ni les filles ne font aucun devoir de catholicité », alors que vingt-cinq ans plus tôt il était décrit comme cherchant à convertir au catholicisme les autres membres de sa famille ! Clairement, si en 1699, s’afficher catholique est le comportement de la grande majorité, une génération plus tard, ceux qui cachaient plus ou moins leurs sentiments religieux ne cherchent plus à simuler.
22 Pour conclure, je souhaite insister sur l’opiniâtreté des NC même dans de petites communautés réformées après la Révocation de l’édit de Nantes. La résistance n’est pas le seul fait des régions où le calvinisme est fortement implanté. Mais le nicodémisme est bien présent également. Si cette attitude a été condamnée par les pasteurs du Refuge, si elle est devenue le symbole d’une hypocrisie et d’un manque de courage, des auteurs protestants du xviiie siècle en ont fait également le symbole de l’hypocrisie du clergé qui préfère fermer les yeux sur la sincérité de la conversion, se contentant de l’existence d’une unité religieuse du royaume, même de façade. C’est ce qu’exprime parfaitement Jean-Paul Rabaut Saint-Étienne, pasteur de Nîmes et négociateur de l’édit de tolérance de 1787, dans un roman intitulé le Vieux Cévenol. Dans une scène au cours de laquelle dialoguent un aubergiste et un jésuite, alors que dans la rue un cadavre est traîné sur la claie, l’auteur fait dire aux deux protagonistes :
« Il faut convenir disait le maître de la maison qu’il est cruel d’être obligé de changer d’opinion, et de feindre pendant toute sa vie de croire ce qu’on ne croit pas dans le fond du cœur. Je ne suis pas surpris aussi que dans ces derniers moments un mourant qui n’a plus rien à ménager fasse enfin l’aveu de sa véritable croyance et, dans le fond du cœur, je ne saurais lui en faire un crime. J’aimerais mieux n’avoir dans notre religion qu’un petit nombre de croyants, que de gagner 2 ou 3 millions d’hypocrites !
Bon ! lui répondit le jésuite, n’importe ce que ces gens-là croient dans le fond de l’âme, pourvu que le roi soit persuadé de leur conversion et qu’ils aillent à la messe. Vous sentez bien qu’on ne doute point que ce ne soit là des convertis de mauvaise foi. La plupart il est vrai ne sont convertis que par force ou par égard humain mais, enfin, ils sont dans le bercail. À présent c’est à Dieu de les convaincre35. »
Bibliographie
Sources
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Lemétayer G., Les protestants de Paray-le-Monial, de la cohabitation à la diaspora, 1598-1750, thèse de doctorat, université Clermont-Ferrand II, 2009.
Leonard E.-G., Le problème du mariage civil et les protestants français au xviiie siècle, Paris, Fischbacher, 1942.
Wanegffelen T., Ni Rome ni Genève. Des fidèles entre deux chaires en France au xvie siècle, Paris, Honoré Champion, 1997.
Notes de bas de page
1 Cherdon L., « La dénonciation du nicodémisme à l’époque de la Révocation de l’édit de Nantes », BSHPF, 1/2007, p. 47-65. Pour le xvie siècle, voir Wanegffelen T., Ni Rome ni Genève. Des fidèles entre deux chaires en France au xvie siècle, Paris, Honoré Champion, 1997. Cavaillé J.-P., « Nicodémisme et déconfessionnalisation dans l’Europe de la première modernité », Les Dossiers du GRIHL, Les dossiers de Jean-Pierre Cavaillé, Secret et mensonge [http://journals.openedition.org/dossiersgrihl/4499], mis en ligne le 09 octobre 2010, consulté le 29 avril 2014.
2 Cherdon L., « La dénonciation du nicodémisme… », art. cité. Basnage J., Lettre VI, Considérations sur l’état de ceux qui sont tombez, ou Lettres à l’Église de **** sur sa chute, Rotterdam, 1686, p. 399.
3 Cherdon L., « La dénonciation du nicodémisme… », art. cité. Voir également Labrousse É., « Diversité des formes de la résistance à l’abjuration », Les résistances spirituelles, Angers, 1987, p. 51-61 et « Plaidoyer pour le nicodémisme », Revue d’histoire ecclésiastique, 1987, p. 259-270.
4 La communauté réformée de La Charité-sur-Loire est composée de vingt-huit feux à la veille de la Révocation de l’édit de Nantes. À cela s’ajoutent trente-trois familles réparties dans les bourgs environnants. Son poids social est cependant important. Entre 1650 et 1684, les professions de soixante-quatre hommes différents sont connues : quarante-trois sont des notables (marchands, nobles, officiers…). Les artisans sont peu nombreux, mais sont spécialisés dans des activités de luxe (horlogers et orfèvres). Voir Guéneau Y., « Le protestantisme dans le colloque de Sancerre de 1598 à 1685 », Cahiers d’archéologie et d’histoire du Berry, 1972, p. 3-332, et Protestants du Centre, 1598-1685 (ancienne province synodale d’Orléanais-Berry). Approches d’une minorité, thèse de doctorat de 3e cycle, université de Tours, 1982.
5 Arch. dép. de l’Yonne, G 1627. Boisson D., Les protestants de l’ancien colloque du Berry de la Révocation de l’édit de Nantes à la fin de l’Ancien Régime (1679-1789), ou l’inégale résistance de minorités religieuses, Paris, Honoré Champion, 2000, p. 611-612.
6 Labrousse É., « Diversité des formes… », art. cité, p. 54.
7 Arch. nat., TT 260. Didier Boisson, Les protestants de l’ancien colloque du Berry…, p. 634-638.
8 Il n’y a pas de temple réformé à Château-Chinon sous le régime de l’édit de Nantes. Avant 1685, les protestants de ce bourg appartiennent à l’Église de Corbigny : sur les 142 feux de cette Église, seuls trente-deux sont à Corbigny même, et treize à Château-Chinon.
9 Né en 1649, mort le 14 juin 1702 à Marseille, il est arrêté le 4 février 1686 alors qu’il tente de rejoindre la Suisse par Pontarlier. Devant son refus de se convertir, il est condamné aux galères à perpétuité par le Parlement de Besançon. Arrivé à Marseille, il est envoyé quelques mois sur les galères, mais dès février 1687 il est enfermé dans le fort Saint-Jean : « On l’enferma dans un cachot qui servait auparavant d’écurie, dont on ferma si bien les fenêtres qu’il n’y avait que fort peu de clarté. Il a été exposé à une triste solitude et à une infinité de duretés et de rigueurs. » Voir Histoire des souffrances et de la mort du fidèle confesseur et martyr M. Isaac Lefèvre, de Chatel Chignon en Nivernois, advocat en Parlement, Rotterdam, chez Abraham Acher, marchand libraire proche la Bourse, 1703. L’auteur est Étienne Girard, ancien pasteur de Corbigny.
10 Sur cette question de l’enlèvement des enfants, voir Joblin A., Dieu, le juge et l’enfant. L’enlèvement des enfants protestants en France (xviie-xviiie siècle), Arras, Artois Presses Université, 2010. Les établissements qui accueillent le plus d’enfants réformés sont les couvents des Nouvelles Catholiques de Blois et d’Orléans, ainsi que le couvent de la Providence d’Auxerre.
11 Arch. dép. de Saône-et-Loire, G 773. Une lettre d’un ecclésiastique, antérieure à 1699, énumère l’attitude des NC de Paray : le sieur Foulé se déplace entre Paray et Corbigny, où il dispose de biens, pour fuir ecclésiastiques et officiers du roi, « sa fille n’a jamais fait fonction de catholique » et l’ecclésiastique suggère de la placer dans un couvent ; le sieur Labatie qui, « en faisant ses Pasques, a surpris le curé, il communia dans l’ancienne paroisse de Paray qui est une chapelle déserte », mais son fils « ne va ny à la messe ny aux instructions ». Mais « il y a beaucoup d’autres nouveaux convertis qui ne font pas leurs devoirs, qui sont pauvres ou du moins gens de mestiers et je crois qu’il n’y a pas de meilleur moien de les réduire qu’à leur mettre une taxe chaque fois qu’ils manqueroient à l’instruction que feroit le RP recteur ». Il évoque en particulier un certain Faniou, « boiteux », qui « ne tient plus les petites écoles des nouveaux convertis, parce qu’on luy en a fait deffence, mais on dit qu’il va dans les maisons et qu’il fait le ministre […] ». Voir également Lemétayer G., Les protestants de Paray-le-Monial, de la cohabitation à la diaspora, 1598-1750, thèse de doctorat, université Clermont-Ferrand II, 2009.
12 Arch. dép. de Saône-et-Loire, G 774. Dans cette petite communauté, il faut noter Marie Lotin, 25 ans : « elle assiste assez aux offices : pour les prones elle se met dans un lieu où il est presque impossible qu’elle les entende, quoiqu’elle ayt été invitée de s’aprocher. Aux instructions du soir, elle n’y assiste nullement. Elle a ses livres hérétiques, elle se mesle quelques fois de dogmatiser. Elle prétend contracter mariage avec Gabriel Colon de la paroisse de St Pierre de Vézelay. Elle retire chez elle ledit Colon, lequel depuis quatre ou cinq mois boit, mange, couche et fait sa demeure actuelle et permanente chez elle, n’en n’ayant pas d’autre, ce qui est un grand sujet de scandale et de murmure à toute la paroisse et une grande espérance aux autres nouveaux convertis de contracter ensemble de semblables mariages ».
13 Voir en particulier à ce sujet les mémoires du Cévenol Élie Salvaire, Relation sommaire des désordres commis par les Camisards des Cévennes, présenté par Didier Poton, Montpellier, Les Presses du Languedoc, 1997.
14 Confession de foi, article 28 ; voir Fatio O. (dir.), Confessions et Catéchismes de la foi réformée, Genève, Labor et Fides, 1986, p. 124. « Toutefois parce qu’il reste encore quelque petite trace d’Église en la Papauté, et mesme que la substance du baptême y est demeurée, joint que l’efficace et vertu du baptême ne dépend de celui qui l’administre, nous confessons ceux qui y sont baptisés n’avoir besoin d’un second baptême. Cependant à cause des corruptions qui y sont, on n’y peut présenter les enfants sans se polluer. »
15 Concile de Trente, traduction de 1674, VIIe session sur le baptesme, p. 81, canon IV.
16 Aussédat-Minvielle A., Histoire et contenu des rituels diocésains et romains imprimés en France de 1476 à 1800. Inventaire descriptif des rituels des provinces de Paris, Reims et Rouen, thèse de doctorat, Paris I, 1988.
17 Boisson D., Les protestants de l’ancien colloque du Berry de la Révocation de l’édit de Nantes, à la fin de l’Ancien Régime (1679-1789), ou l’inégale résistance de minorités religieuses, Paris, Honoré Champion, 2000, p. 151. Ainsi, le 28 octobre 1685, « en l’église des Filles Religieuses de la Visitation » d’Issoudun, le prénom de Pierre est attribué à Isaïe Roux, celui de Marie-Françoise à Esther Limousin. En effet, dans le diocèse de Bourges, un rituel a été publié en 1666 par l’archevêque Anne de Lévy de Ventadour. Dans le chapitre De l’absolution de l’hérésie ou de l’apostasie, une cérémonie prévoit un baptême pour un NC : il est prévu que les « parrain et marraine luy donneront un nom d’un saint du Nouveau Testament, car d’ordinaire, les hérétiques n’en ont que de l’Ancien Testament ». Il est à remarquer que cette affirmation est très éloignée de la réalité, toutes les études sur la prénomination des protestants au xviie siècle montrent au contraire que les prénoms vétérotestamentaires ne sont portés que par une minorité de réformés.
18 Voir sur cette question Boisson D., « La justice royale et les procès contre les cadavres aux xviie et xviiie siècles », Justice et protestantisme, textes réunis par Didier Boisson et Yves Krumenacker, Lyon, Chrétiens et Sociétés, Documents et Mémoires n° 14, 2011, p. 113-127.
19 Arch. dép. de la Nièvre, B 148.
20 Arch. dép. de la Nièvre, B 95.
21 Arch. dép. de la Nièvre, B 81.
22 Sur la question de la loi et du mariage protestant, voir Bonifas E.-C., Le mariage des protestants depuis la Réforme jusqu’à 1789. Étude historique et juridique, Paris, 1901. Leonard E.-G., Le problème du mariage civil et les protestants français au xviiie siècle, Paris, Fischbacher, 1942. Boisson D., « Bâtardise et confession religieuse : l’illégitimité des enfants de réformés en France au xviiie siècle », dans Avignon C. (dir.), Bâtards et bâtardises dans l’Europe médiévale et moderne, Rennes, PUR, 2016.
23 Pilatte L., Édits, déclarations et arrests concernans la Religion P. Réformée (1662-1751), Paris, 1885, p. 534-550.
24 Dans la généralité voisine du Bourges, l’intendant Courteille (en poste de 1720 à 1728) interroge dans sa correspondance le contrôleur général des finances sur l’application de la déclaration de 1724, à la suite en particulier de la mort d’une relapse de la communauté d’Issoudun : « Je ne sais si l’esprit du Conseil est qu’on suive à la rigueur l’exécution de cette déclaration, je vous supplie de me marquer si je dois presser le procureur du Roy d’Issoudun de faire à cette occasion ce qui est de son ministère » (Arch. nat., G7 128-130, lettre du 16 décembre 1724).
25 Arch. nat., G7 411-414.
26 Mémoires pour servir à l’histoire et à la vie d’Antoine Court (de 1695 à 1729), édition établie par Pauline Duley-Haour, Paris, Les Éditions de Paris, 1995, p. 32-33.
27 Mémoires d’Isaac Dumont de Bostaquet, gentilhomme normand, sur les temps qui ont précédé et suivi la Révocation de l’édit de Nantes sur le Refuge et les expéditions militaires de Guillaume III en Angleterre et en Irlande, édition présentée et annotée par Michel-Edmond Richard, Paris, Mercure de France, 1968, p. 136.
28 Labrousse É., « Diversité des formes… », art. cité, p. 55.
29 Arch. dép. de la Nièvre, B 89.
30 Arch. mun. de Nevers, FF 12.
31 Ibid.
32 Ibid.
33 Arch. nat., TT 260. En Nivernais et en Berry, plusieurs membres de cette famille Cuzin paraissent être des opiniâtres. En octobre 1693, le bailli de Corbigny se rend chez Abraham Cuzin, un horloger, afin de savoir « quelle est son intention pour se disposer à mourir » ; il surprend dans la maison du malade une assemblée réunissant autour de l’horloger six femmes, toutes NC. Plusieurs livres sont confisqués dont une Bible « dont l’impression ne peut estre approuvée par les docteurs de Sorbonne », des psaumes de David et un ouvrage de Théodore de Bèze (Arch. dép. de la Nièvre, B 86). En février 1699, le curé d’Henrichemont dénonce plusieurs couples de sa paroisse dont Étienne Pétineau et Madeleine Cuzin « qui ont été mariés sous toutes ses formes et ont fait leurs devoirs avant et dans le temps de la célébration de leur mariage, mais que depuis qu’ils ont reçu les sacrements, ils ont un tel mépris pour l’Église romaine qu’ils ne l’ont fréquentée ni l’un ni l’autre » (Arch. dép. du Cher, 12 F 98).
34 Arch. dép. de la Nièvre, 3 E 4/52.
35 Borello C., Du Désert au Royaume. Parole publique et écriture protestante (1765-1788), édition critique du Vieux Cévenol et de sermons de Jean-Paul Rabaut Saint-Étienne, Paris, Honoré Champion, 2013, p. 170-171.
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