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L’Ouest et le politique

 | 
Michel Lagrée
, 
Jacqueline Sainclivier

2e partie. L’ouest intérieur

Architecture publique et politique au xixe siècle. Les demandes de secours pour les églises paroissiales en Maine-et-Loire

Michel Lagrée

Texte intégral

  • 1 AN F19 4 878, Broc, lettre, sans date [1862], de la comtesse de la Poëze au ministre lui rappelant (...)

M. Hamille faites instruire de suite j’ai promis1.

  • 2 AN, F19 4 943, Doué, Notre-Dame, lettre de Louvet du 1er mai 1869.
  • 3 AN, F19 5 348, Allonnes, lettre du préfet du 7 novembre 1898.
  • 4 Charon-Bordas Jeannine, Les sources de l’histoire religieuse aux Archives Nationales de la Révolut (...)
  • 5 Leniaud Jean-Michel, L’administration des Cultes pendant la période concordataire, Paris : Nouvell (...)
  • 6 Doctorat d’histoire en cours sous la direction de Michel Lagrée. Une étude sur les mairies pourrai (...)

1En 1869, le député Louvet soutient la reconstruction de Notre-Dame de La Chapelle-sous-Doué, à Doué-la-Fontaine, commune intéressante du fait de son « attachement à la cause de l’ordre et de sa fidélité aux institutions impériales2 ». En 1898, c’est le préfet qui appuie le dossier d’Allonnes : « L’honorable M. Pottier maire de cette commune, conseiller général républicain du canton Nord-Est de Saumur, me prie d’insister auprès de vous afin de hâter la solution de l’affaire3 ». Le soutien au régime en place est une préoccupation permanente, la subvention aux communes une arme de tous temps utilisée ; le secours pour les édifices cultuels est donc un élément du système politique, quel que soit le pouvoir en place. Les courriers des préfets, les visites des députés sont constants ; tout juste ces manifestations viennent-elles de bords différents suivant les époques. Les Archives Nationales conservent en série continue les dossiers de demande de subvention sur les crédits de l’État pour les constructions et réparations aux églises et aux presbytères4. Du fait du régime concordataire, il s’agissait là en effet d’administration publique5. Une étude sur les églises paroissiales nous a valu d’effectuer un dépouillement systématique de ces dossiers pour le Maine-et-Loire6. Y apparaissent régulièrement les intérêts croisés de la notabilité, des pouvoirs locaux et des enjeux nationaux.

Entregent

  • 7 AN, F19 5 348, Angers, Saint-Léonard, visite de Guignard, le 11 janvier 1895, lettre du curé Charb (...)

2L’intérêt de la bonne conduite de l’entreprise conduit bien sûr à la séduction des différents pouvoirs. Comme l’évêque peut flatter le préfet ou le ministre, le curé peut flatter le maire, l’évêque ou le préfet. C’est ainsi que le docteur Guignard, député-maire d’Angers, peut rendre visite au service des Cultes en 1895, fort de l’appui du curé de Saint-Léonard, le père Charbonnier : « Je ne sache pas que mon affaire vous ait causé le moindre chagrin », y ont été réunies en effet « les meilleures bonnes volontés, la plus grande union, l’unanimité, et à son occasion vous avez fait œuvre éminemment utile, populaire, dont tout le monde vous sait gré à Angers7 ».

  • 8 AN, F19 4 832, Russé (Allonnes), lettre du curé Aubry (chevalier de la Légion d’Honneur) au minist (...)
  • 9 AN, F19 4 943, Blaison-Gohier, lettre du curé à l’Empereur, sans date, reçue le 2 décembre 1869, l (...)
  • 10 AN, F19 4943, Candé, lettre d’Olivier Walsh du 8 mai 1857, CIGED du 30 mai et renvoi au préfet du (...)

3De telles flatteries s’adressent au plus haut niveau et… atteignent la plus grande innocence. Le curé de Russé demande ainsi 100 F de plus pour son clocher au ministre des Cultes afin de « donner un bon carillon à la naissance du Prince Napoléon8 ». On va même jusqu’à écrire au premier personnage de l’État. C’est l’initiative que prend le curé de Blaison en 1869 : « je vois, en effet, toutes les églises qui nous environnent relevées à neuf pour la plupart, les autres magnifiquement réparées avec le généreux concours de Votre Majesté, on dit qu’il en est de même dans toute l’étendue de l’empire français ». Cette lettre est pourtant insuffisante ; elle est d’ailleurs appuyée quelques jours plus tard par celle du vicomte Olivier Walsh, à Savennières, mais surtout chambellan de l’Empereur. Entre temps, le Comité des inspecteurs généraux estimait que les travaux de réparation, projetés sans concours de la fabrique ni de la commune, n’étaient pas « de première nécessité » ; il ne proposait qu’un secours de 800 F, en raison de l’intérêt archéologique de l’église, alors que le préfet proposait 1 850 F. Il a fallu l’appui de Segris en février – il était alors ministre de l’Instruction publique – pour obtenir un secours de 2 000 F, par « décision spéciale9 ». La même situation s’était produite pour l’église de Candé en 1857. Le curé ayant écrit séparément à l’Empereur et à l’Impératrice, Olivier Walsh écrit le lendemain, 8 mai, au ministère pour l’obtention du secours ; précisant même : « dans le cas contraire, je m’adresserai à leurs Majestés, croyant très utile que sur la foi et le bon esprit qui règnent dans ce département et au moment surtout des élections, le nom de l’Empereur soit béni par les fidèles qui lui devront une église en rapport avec leurs besoins ». C’était parfaitement méconnaître le dossier qui s’avère catastrophique et, malgré cet appui de poids, le Comité obtient le renvoi de l’affaire en demandant la suspension immédiate des travaux s’ils sont déjà commencés, une expertise et le projet d’un « architecte capable10 ».

  • 11 AN, F19 4 832, Longué, lettre du Secrétaire des commandements de S.M. l’Impératrice, 12 janvier 18 (...)
  • 12 « Ce jour-là, la neige couvrait la terre de vingt-cinq centimètres au moins. Malgré la difficulté (...)
  • 13 AN, F19 4 878, Loiré, CIGED du 2 août 1861 ; l’avis au général de Rochebouet est envoyé en même te (...)

4Il faut dire que les interventions directes auprès de l’Impératrice avaient quelques chances d’être entendues, ainsi du curé de Longué en 1855, qui lui demandait sa propre souscription : « le vœu émis par cet ecclésiastique a excité la pieuse sollicitude de sa Majesté » ; pas suffisamment malgré tout pour convaincre totalement la Direction des Cultes devant l’énormité des travaux entrepris. Alphonse Durand pourtant, qui rapportait le dossier devant le Comité des inspecteurs généraux, s’était montré sensible aux « puissantes recommandations intervenues en faveur de cette œuvre », qui s’ajoutaient à l’importance des sacrifices faits par la fabrique et aux « grandes considérations religieuses » rendant la reconstruction indispensable ; aussi proposait-il un secours de 25 000 F, malgré ses vives critiques envers un projet qu’il jugeait disproportionné. C’est l’administration semble-t-il qui a fait renvoyer le dossier pour diminutions et a décidé ensuite d’un secours de 15 000 F11, après une visite du curé Massonneau dans la journée du 25 février12. Le Comité n’aura pas gain de cause en 1861 pour Loiré : il voulait là encore renvoyer l’affaire à cause d’un déficit de 20 000 F pour une dépense annoncée de 51 000 F ; le secours demandé était donc de près de 40  % de la dépense. Il semble bien que l’intervention du général de Rochebouet, commandant d’artillerie de la garde à Versailles, ait été déterminante pour l’obtention d’un secours de 10 000 F13.

  • 14 AN, F19 4 943, Gennes, lettre sans date du curé et du maire, avec annotation du ministre pour Hami (...)
  • 15 AN F19 5 349, Saint-Serge d’Angers, décision de secours du 17 janvier 1901, crédité le 6 février 1 (...)

5La distinction – enjeu politique, exploitation des relations – n’est pas toujours claire. Le curé et le maire de Gennes, le baron de Fontenay, écrivent conjointement au ministre en 1868 pour des réparations à l’église ; un secours de 2 000 F est accordé, soit l’essentiel de la dépense, avec l’appui direct du ministre qui « porte intérêt à M. de Fontenay14 ». Après la tempête de 1 900, le curé de Saint-Serge d’Angers écrit directement au Président du Conseil, Ministre de l’Intérieur, en s’appuyant sur « l’aimable bienveillance de Mlle Marthe Waldeck-Rousseau » ; un secours de 2 000 F complète ainsi la participation communale et la subvention de 4 000 F des Beaux-Arts, bien qu’il soit répété, une fois encore, que ce type de secours doit être réservé aux communes rurales15.

Promesses

  • 16 AN F19 4 878, Vaulandry, lettre de la marquise de Broc, 26 juillet 1861. La marquise avouait égale (...)
  • 17 AN F19 4 878, Broc, cf. note 1.

6Les arbitrages ont lieu au plus haut niveau, bien souvent directement entre le ministre et les députés influents, ou en leur temps les aristocrates en cour, avant même que les formalités administratives ne soient engagées. La marquise de Broc était venue voir Rouland, ministre de l’Instruction publique et des Cultes, pendant l’hiver 1861 pour la restauration de l’église de Vaulandry. Elle lui écrit en juillet, de son château de Turbilly relevant de la paroisse, pour lui rappeler sa promesse et sa « complaisance si connue dans ce département16 ». En 1862, pour de simples réparations à l’église de Broc, Mme de la Poëze, dame du Palais dont le mari est maire de la commune, obtient une promesse directe du ministre, de 3 000 F pour une dépense de 4 600 F seulement17.

  • 18 AN F19 4 878, La Blouère, lettre du curé au ministre, sans date, avec en marge une note pour M. Ha (...)
  • 19 AN F19 4 943, Douces, note du ministre, sans date [1863], avis de secours du 1er mai 1863 ; Louvet (...)

7Il fallait achever l’église de la Blouère ; en 1863 le ministre promet un secours de 5 000 F au comte de Las Cases, député depuis 1857, qui appuyait une requête directe du curé. La question est aussitôt transmise à Hamille qui doit demander « de suite au préfet une très prompte instruction ». Le dossier établi dans les deux mois, d’avril à juin, reste dans les bureaux parisiens jusqu’à son examen par les inspecteurs généraux en février 1864. Le refus du Comité est catégorique devant l’imprudence de la commune « d’autant moins excusable qu’elle ne pouvait se faire aucune illusion sur l’insuffisance de ses ressources » ; en marge de l’avis cependant, cette note : « l’avis du Comité est en désaccord avec les promesses ». Un secours de 4 000 F est accordé en avril18. En 1863 encore, le soutien de Louvet, député maire de Saumur et président du Conseil Général, pour les travaux à l’église de Douces permettent d’obtenir un secours de 5 000 F sur les indications du ministre19.

  • 20 AN F19 4 943, Le Puy-Notre-Dame, lettres de Louvet des 13 novembre 1851, 11 juin 1855, 2 mars 1857 (...)
  • 21 AN F19 5 034, Durtal, note sans date [1876] ; les églises de Landemont et de Saint-Martin-du-Fouil (...)
  • 22 AN F19 5 348, Epieds, lettre de de Grandmaison du 23 janvier 1895 ; sur le formulaire de demande d (...)
  • 23 AN F19 5 349, Bourg-l’Évêque, fiche de visite de Laurent Bougère du 1er mars 1901 et note sur l’av (...)

8Il faut dire que la pression des élus locaux était particulièrement forte. Louvet est très soucieux des travaux de restauration de l’église du Puy-Notre-Dame : « Je porte une vive attention à cette commune dans laquelle j’ai été élevé. J’ai réussi à recueillir tant par des offrandes particulières que par un vote de la fabrique 1 300 F », précise-t-il en 1857. Il avait déjà écrit en 1851 et en 1855 et prend maintenant « l’engagement de ne plus rien demander pour cette église qui se trouvera ainsi à peu près complète pour les besoins du culte ». Il écrira portant à nouveau en 1866, à propos d’un secours supplémentaire20. En 1876, une note récapitulative recense huit dossiers soutenus par le sénateur Le Guay, avec un ordre de recommandation : les plus importants étant les églises de Durtal et Jumelles, le presbytère des Cerqueux-sous-Passavant et les objets mobiliers de La Meignanne21. De fait, les élus interviennent autant pour de petites affaires que pour de plus importantes. M. de Grandmaison soutient les réparations à l’église d’Epieds en 1895, alors que la faiblesse des ressources locales aurait dû conduire au rejet de la demande de secours. Une allocation de 2 500 F est finalement accordée, assortie du souhait que l’on ajournât les travaux les moins urgents22. Chaque requête implique une réponse. Le député Bou-gère soutient, par une visite du 1er mars 1901, la restauration de l’église de Bourg-l’Évêque ; il est prévenu de la décision de secours, prise le 22 février 190223.

Les ministres

  • 24 AN F19 4 764, Les Ponts-de-Cé, Saint-Maurille, le préfet n’avait autorisé que des travaux de répar (...)

9Les cabinets ministériels sont particulièrement attentifs au développement de certaines affaires ; les équilibres étant surveillés jusqu’au niveau paroissial. On avait ainsi refusé un secours pour la reconstruction de l’église Saint-Maurille des Ponts-de-Cé en 1847. Les événements de 1848 changent le jeu politique et, dès la fin de l’année, il s’agit de soutenir le parti de l’ordre. Octave Gastineau, membre du cabinet du ministère de l’Instruction publique écrit alors aux Cultes, à la suite d’une lettre reçue d’Angers : « Je vous prie de revenir sur ce refus et de promettre un secours sur les fonds de 1849. Le curé est influent et si nous pouvions obtenir une promesse avant les élections, cela produirait un bon effet ». Le secours sera de 10 000 F en avril 184924.

  • 25 AN F19 4 764, Saint-Germain-des-Prés, lettre du curé à l’évêque, 29 octobre 1848. Freslon venait d (...)

10Les personnalités locales tentent d’influer davantage encore quand elles parviennent aux plus hautes responsabilités. On encourage d’ailleurs ce mouvement localement ; le curé de Saint-Germain-des-Prés s’empresse de rappeler à l’évêque les récentes promesses de Freslon dès qu’il devient ministre de l’Instruction publique et des Cultes, ce que transmet l’évêque auprès de l’administration centrale25.

  • 26 AN F19 4 943, La Daguenière, lettre du 20 mai 1870.
  • 27 AN F19 4 943, Cuon, lettre de La Bouillerie du 18 juin 1873.
  • 28 AN F19 4 943, Fougeré, avis de secours de 2 000 F du 25 juin 1873 et de 1 000 F du 21 juillet 1873 (...)
  • 29 AN F19 5 034, Drain, « je m’intéresse beaucoup à cette affaire » écrivait lui-même le ministre sur (...)
  • 30 AN, F19 5 034, Villemoisan, lettre du cabinet du ministre de l’agriculture, 12 août 1873, visite p (...)

11C’est Segris, en 1870, qui fait écrire par son cabinet du ministère des finances pour des travaux à La Daguenière26. C’est La Bouillerie, lorsqu’il est ministre de l’agriculture et du commerce, qui demande tout à la fois 8 000 F pour Clefs, 4 000 F pour Fougeré, 1 100 F pour Cuon ; c’est-à-dire pour 1873 les travaux les plus importants de ce qu’il nommait « mon canton de Baugé27 ». Il obtient même pour Fougeré deux décisions de secours supplémentaires en moins d’un mois28. Il soutient la même année la demande de secours de 12 790 F, somme proposée par le Conseil général, pour l’église de Drain ; c’est-à-dire la totalité d’un devis supplémentaire. Le dossier arrivait pour la première fois à Paris, alors que l’église était presque terminée ; Hardy, le rapporteur auprès du Comité des inspecteurs généraux voulait rejeter l’affaire mais le comité, tout en condamnant le coût de l’édifice, proposa finalement un secours de 4 000 F, élevé à 6 000 F par l’administration29. Le même La Bouillerie avait fait écrire de son cabinet de l’Agriculture et du Commerce pour soutenir la reconstruction de l’église de Villemoisan ; Segris, ministre de l’Instruction publique était déjà intervenu en février 1870, ainsi que le député Chatelin en 187130.

  • 31 AN, F19 5 034, Armaillé, lettre de Guibourg du 5 mars 1874, note sans date de de Cumont, CIGED du (...)
  • 32 AN F19 5 034, Le Louroux-Béconnais, lettre du curé du 12 novembre 1874, de Mme de Montaignac du 13 (...)

12En mars 1874, le conseiller général de Guibourg (à Nantes) recommande l’église d’Armaillé à M. de Cumont. Tout en assurant le futur ministre de son soutien, « je vous suis dans la grande lutte qui va s’engager pour donner au pays le seul gouvernement modéré qu’il soit possible », il signale à son « cher ami » le rôle éminent de la comtesse d’Armaillé dans l’affaire, autrement dit de la tante du prince de Broglie, alors Président du Conseil. De Cumont s’empresse, une fois en place, de transmettre la demande en l’appuyant de son poids : « je m’intéresse particulièrement à cette affaire » et reconnaît, envers Mme d’Armaillé, devoir joindre « une reconnaissance personnelle à celle de ces braves angevins » ; un secours de 10 000 F est finalement accordé en juin, un mois à peine après le changement du cabinet et malgré l’avis contraire du Comité des inspecteurs généraux31. Les choses vont encore mieux si les intérêts de plusieurs ministres, ou de leurs familles, convergent. Le curé du Louroux-Béconnais avait écrit le 12 novembre 1874 à la marquise de Montaignac, belle-sœur du général Lamoricière, bienfaiteur de l’église, mais surtout épouse de l’amiral de Montaignac, alors ministre de la Marine. Elle écrit tout naturellement le lendemain à de Cumont : « Veuillez faire quelque chose pour le pays (sinon pour le curé). Je n’ai pas besoin de vous dire que c’est le vôtre et qu’on vous y bénira. J’ai préféré vous écrire que de vous en parler hier soir ». Le secours supplémentaire de 10 000 F est accordé dès le 24, apparemment sans examen nouveau par le Comité des inspecteurs32.

Équilibre régional et conquête des campagnes sous le Second Empire

  • 33 C’est en effet l’époque où Cholet remplace Beaupréau comme chef-lieu d’arrondissement.
  • 34 AN F19 4 832, Beaupréau Notre-Dame, lettre du préfet du 6 décembre 1858, qui s’ajoute à celle du 3 (...)
  • 35 Ibid., CIGED du 2 février 1856, et infra.

13Le projet de l’église Notre-Dame de Beaupréau, 120 000 F pour une paroisse de 2 000 âmes, était disproportionné ; le préfet appuie pourtant la demande et obtient finalement le secours après explications : « Au mois d’octobre dernier, j’ai exposé à Votre Excellence les considérations surtout politiques qui me déterminaient à lui faire cette demande » ; il faut « indemniser la commune de la translation du tribunal civil à Cholet33 », il y a surtout « un grand intérêt à empêcher le clergé de continuer à critiquer vivement le transfert ». Le clergé est en effet pour le préfet le « meneur de l’opposition », en particulier le curé de Beaupréau qui « jouit d’une grande influence34 ». Fût-ce pour une « cathédrale35 », il y avait donc tout intérêt à entrer, apparemment du moins, dans les vues cléricales.

  • 36 AN F19 5 118, lettre du préfet du 17 novembre 1858, du curé du 8 avril 1859. Le préfet était contr (...)
  • 37 AN F19 4 832, Saint-Macaire, lettre du préfet du 6 juin 1859 ; avis de secours du 27 janvier 1860.

14Il faut dire que le clergé semblait dominer l’ensemble de la société locale. C’est en tout cas ce qu’affirme le préfet en 1858, avec un agacement évident à propos de Jallais : « dans ce pays, lorsque le préfet n’est pas d’accord avec un desservant jouissant près de Mgr l’évêque d’autant d’influence que le curé de Jallais, il est immédiatement signalé comme un ennemi de la religion et comme s’opposant à tout ce qui peut donner plus d’éclat et plus de grandeur au culte catholique ». La vigueur du catholicisme est d’ailleurs bien réaffirmée par le curé quelques mois plus tard, et l’intérêt pour l’Empire de satisfaire ses vues : « Tout le monde sait combien nos populations sont fidèles quand une fois, elles sont attachées36. » Les Mauges sont en effet un enjeu politique pour le gouvernement et le préfet alors en place. C’est ce qu’il explique en 1859, en justifiant « une mesure irrégulière » à propos de la reconstruction de l’église de Saint-Macaire, déjà largement avancée et déjà renvoyée par le Comité des inspecteurs généraux des édifices diocésains : « Dès le 2 juillet 1857, mon prédécesseur, en vue de soutenir contre une concurrence redoutable dans les élections au Corps législatif la candidature proposée par l’Administration, s’est empressé d’approuver le projet ». Il fallait en effet « assurer dans l’arrondissement de Beaupréau, par une décision qu’il savait vivement désirée, le triomphe de la cause de l’ordre et de la dignité du Gouvernement impérial ». Le secours accordé est finalement de 6 000 F, bien qu’il soit très fâcheux que cette opération ait été irrégulièrement entreprise37.

  • 38 AN F19 4 943, Cholet, Notre-Dame, lettre de Las Cases du 20 février 1861, Note pour son Excellence (...)

15Le souci de ménager le clergé est alors en effet permanent, à Beaupréau sans doute, à Cholet également. Le dossier de la reconstruction de Notre-Dame est, là encore, éminemment politique ; c’est ce qu’explique Las Cases au ministre en 1861 : « Votre Excellence… a bien voulu me promettre de mettre un terme à une vieille lutte entre la municipalité et le curé de Cholet ; lutte que depuis quatre ans je cherche à calmer et que vous pouvez éteindre complètement en approuvant un projet appuyé par toutes les autorités locales ». D’abord de 29 000 F, la demande, très contestée par le Comité des inspecteurs généraux et renvoyée une première fois alors que les travaux étaient largement entamés, avait été ramenée à 18 000 F. C’est en dehors de toute considération régulière que la décision de secours est prise, directement par le ministre : « le chiffre de 18 000 F est peut-être un peu élevé. Son Excellence ayant dans le temps, accordé 15 000 F à Beaupréau, elle jugera peut-être convenable de fixer le même chiffre pour Cholet ». Le secours n’est finalement que de 10 000 F, somme jugée insuffisante par le ministre lui-même38.

  • 39 AN F19 4 943, Candé, lettre du maire, sans date reçue le 3 décembre 1858 ; un secours supplémentai (...)

16La situation délicate de la reconstruction de Candé en 1858 oblige le maire à s’engager auprès du ministre. Certes, Candé est purement urbaine mais très pauvre et l’on a pu constater le soutien du ministère de l’agriculture aux cantons environnants : « le gouvernement songe et veille à l’intérêt des campagnes, et contribue puissamment à changer le cours des idées anciennes, à rallier à l’état de choses actuelles un pays où dominait jadis presque exclusivement l’opinion légitimiste… Le jeune clergé lui-même n’a plus les attachements, les souvenirs et les opinions de l’ancien clergé. Il tend à se rapprocher de plus en plus, tous les jours, des idées et des choses nouvelles ». Aussi de nouveaux secours seraient-ils reçus « avec la plus profonde et la plus sincère reconnaissance par toute la population39 ».

  • 40 AN F19 4 878, lettre du préfet du 14 mars 1862.
  • 41 AN F19 4 878, lettre de Louvet du 10 février 1863, annotée par le ministre, avis de secours du 14 (...)
  • 42 AN F19 4 878, Montjean, lettre du préfet du 12 mars 1863. Las Cases avait lui-même demandé 6 000 F (...)
  • 43 AN F19 4 878, Torfou, lettre du préfet du 11 mars 1864. Le secours n’est accordé qu’en 1865, les c (...)

17On signale bien sûr toutes les communes favorables à l’Empire, comme Saint-Rémy-la-Varenne en 186240. Mais c’est surtout le bon esprit de tout l’ouest du département qu’il faut entretenir et tout particulièrement, au sud, la Vendée : « Gonnord est le commencement de la Vendée ; et tout l’appui que le Gouvernement et l’Empereur prêtent à la religion en ce pays lui est rendu au centuple par l’affection et le dévouement des populations ». Le ministre avait apparemment promis un secours en 1862, mais on n’avait finalement annoncé qu’un secours de 5 000 F à demander pour 1863 ; ce qui aurait provoqué un certain « désappointement ». L’argument de Louvet en faveur de cette « population éminemment religieuse » est suffisamment fort pour que le ministre ordonne à Hamille d’accorder un secours de 10 000 F « en deux exercices », et d’en aviser le député. L’avis de secours est envoyé quatre jours plus tard ; seules probablement les contraintes budgétaires ont obligé à accorder un secours sur trois ans41. La situation budgétaire semble en effet particulièrement tendue en cette année 1863 ; le préfet se plaint des retards : « à Montjean notamment, la population exprime très vivement son mécontentement et malheureusement M. le comte de Las Cases éprouvera les effets d’un ressentiment qu’il ne dépend pas de lui de calmer. Il vaut mieux refuser tout de suite que de faire attendre ; cette année, presque toutes les demandes restent sans réponse42 ». Le même Las Cases soutient la reconstruction de l’église de Torfou auprès du ministre Rouland au début de 1863. En 1864, le préfet utilise cet appui auprès de son successeur, Baroche, pour une commune qui « mérite à tous égards la bienveillance du gouvernement auquel elle est d’ailleurs toute dévouée43 ».

  • 44 AN F19 4 943, Pruniers, lettre du préfet du 29 mars 1870.
  • 45 AN F19 4 943, lettre de Ségris du 3 mai 1870. Le dossier était parti d’Angers le 9 mars.

18C’est que la situation à soutenir n’est pas toujours claire ; le clergé lui-même est parfois divisé. Le préfet demande ainsi, avec succès, à Hamille de permettre des travaux à l’église de Pruniers en 1870 ; l’église est sur la commune de Bouchemaine où se trouvent deux paroisses, et deux curés : « L’un nous est dévoué et l’autre hostile. Il en est résulté des difficultés… Le bon curé ne peut obtenir les réparations les plus nécessaires pour son église44 ». La pression politique, égale jusqu’aux derniers mois de l’Empire, interdit de négliger la moindre affaire. Ségris, alors ministre des Finances, écrit le 3 mai 1870 une lettre « confidentielle » à Hamille, alors directeur des Cultes, quelques jours avant le plébiscite à propos d’une restauration à l’église et au presbytère de Saint-Saturnin pour demander qu’une réponse favorable soit transmise « avant le vote du 8 mai ». L’avis de secours de 3 000 F, couvrant la moitié de la dépense, est envoyé dès le 4 mai45.

La circulaire confidentielle de 1885

  • 46 AN F19 5 193, Auverse, note sans date.
  • 47 AN F19 4 679, crédits annuels, renseignements administratifs.

19La situation s’inverse à l’approche de la fin du siècle et l’intérêt à soutenir les régions républicaines se confirmait. Vers 1884, on souligne le « grand intérêt politique » de la commune d’Auverse46. Cette attitude est formalisée l’année suivante par une circulaire confidentielle envoyée aux préfets. Il s’agissait en premier lieu de répondre à une diminution très importante des crédits disponibles pour les édifices paroissiaux : stable depuis 1875 à 3,15 millions de francs, le budget était passé à 2 millions cette année-là. Il descend à 1,85 million l’année suivante, puis 1,5 million de 1887 à 189547. Il fallait bien arbitrer et établir des priorités devant cette situation de pénurie. Aussi, libre choix est-il laissé au préfet, « meilleur juge » de la situation départementale ou des circonstances locales. Avec cette précision cependant :

  • 48 AN F19 4 682, circulaire confidentielle du 30 novembre 1885. Tous les départements ont répondu, su (...)

Vous voudrez bien aussi en me transmettant, à l’avenir, les dossiers de cette nature, m’indiquer avec précision, la situation politique de chaque commune intéressée et me faire connaître votre avis personnel sur ses titres à la bienveillance du Gouvernement48.

  • 49 AN F19 5 193, Saint-Martin-d’Arcé, note pour le directeur du 27 novembre 1885, lettre du préfet du (...)

20Le préfet ne manque pas de signaler dès lors l’état d’esprit politique de chaque commune. Il commence ainsi dès janvier 1886 à propos de Saint-Martin-d’Arcé, non loin de Baugé, le seul dossier instruit pour 1886 : « la subvention… produirait un bon effet dans la commune dont les habitants ne sont pas hostiles aux institutions républicaines ». On avait d’ailleurs de Paris, pour ce dossier précisément, souhaité différer la décision et attendre « dans un sens ou dans l’autre que le préfet de Maine-et-Loire ait répondu à la circulaire qu’on inspire en ce moment49 ».

  • 50 AN F19 5 193, Saint-Melaine, lettre du préfet du 21 novembre 1888.
  • 51 AN F19 5 348, Trémont, Envoi de la demande de secours par le préfet, 18 mars 1891. Les 2 500 F de (...)
  • 52 AN F19 5 348, Aubigné-Briand, Envoi de la demande de secours par le préfet, 7 mars 1896.
  • 53 AN F19 5 349, Beaucouzé, lettre de Joxé du 6 janvier 1899, opinion confirmée par le préfet le 10 a (...)
  • 54 AN F19 5 348, Gée, lettre au ministre du 31 mars 1897, et carte de visite.
  • 55 AN F19 5 348, lettre de Bazille du 31 mars 1897. La commune en 1896 s’imposait déjà de 70 centimes (...)

21Les indications seront par la suite systématisées : « Pour répondre aux prescriptions de la circulaire confidentielle du 30 novembre 1885, je dois ajouter que la municipalité et la population de Saint-Melaine sont, en grande majorité, dévouées aux institutions républicaines50. » En 1891, la « petite localité » de Trémont est « une des meilleures du département et mérite pleinement la faveur qu’elle sollicite51 ». Aubigné, de même, est en 1896 « entièrement dévouée au gouvernement52 ». En 1899, le député Joxé, pour des réparations peu coûteuses, soutient le dossier de Beaucouzé, « dont je n’ai eu qu’à me louer du point de vue électoral et de l’opinion politique que je représente53 ». En 1897, le député Coudreuse écrit « au nom du maire républicain » de la commune de Gée, pour une simple réparation à la toiture, mais en soulignant « l’intérêt politique qu’il y a à faire droit à cette juste demande54 ». Même appui, cette année encore, du député Bazille pour des travaux à l’église de Rou-Marson : « je vous ai dit combien cette petite affaire était importante au point de vue politique ». Le dossier avait d’abord été repoussé pour insuffisance de ressources locales, mais ne semble pas avoir eu de suite positive malgré une demande d’instruction nouvelle par l’administration55.

  • 56 AN F19 5 348, Segré, La Madeleine, lettre du préfet du 6 janvier 1891, renvoi de la demande du 25 (...)
  • 57 AN F19 5 348, Chanteloup, envoi du préfet du 21 novembre 1895, lettre de Dubief du 15 octobre 1895 (...)

22L’Ouest conservateur était bien sûr étudié de près et la moindre occasion de favoriser l’esprit républicain signalée. Le préfet pense ainsi pouvoir soutenir le dossier somptuaire de la décoration du transept et de l’abside de l’église agrandie de Segré. L’on y est pas, en effet, « manifestement hostile aux institutions républicaines » ; un secours ne produirait qu’une impression favorable. Arguments insuffisants malgré tout : les fonds du ministère étant réservés aux travaux d’architecture, aucun secours n’est accordé pour cette dépense d’ailleurs jugée trop luxueuse56. La situation choletaise, exceptionnelle, de la mairie républicaine de Chanteloup, mérite évidemment attention supplémentaire ; en 1895, le dossier de reconstruction partielle de l’église obtient le soutien du préfet, mais également celui de Dubief, ancien chef, républicain, du troisième bureau des dons et legs57.

  • 58 AN F19 5 349, Saint-Aubin-de-Luigné, CIGED du 16 avril 1890, avis de secours du 19 mai, envoi du p (...)
  • 59 AN F19 5 349, Bauné, avis du ministre au comité du 6 janvier 1899, suite à l’envoi du préfet du 21 (...)

23Une telle opération est parfois l’occasion d’essayer d’infléchir une situation tangente ; quand bien même les travaux envisagés soient des plus contestables. En 1890, le Comité des inspecteurs avait proposé de refuser le secours à la restauration de l’église de Saint-Aubin de Luigné ; on avait finalement précisé que le secours accordé « ne saurait impliquer aucune responsabilité de l’État pour des travaux si mal engagés ». Au moment de refaire la sacristie en 1895, le préfet ne peut être plus clair : « la municipalité et la population de la commune de Saint-Aubin-de-Luigné sont entièrement dévouées à nos institutions… ; la demande de subvention m’a été vivement recommandée par M. Frémy, conseiller général républicain du canton, soumis à la réélection dans quelques semaines… qui a à lutter contre un concurrent réactionnaire redoutable, M. Millevoye ». Il faut attendre août 1904 pour voir un refus de secours pour l’achèvement des travaux, projetés dès 1890 : « le projet était déjà mal engagé en 1890 et 1895 et critiqué à l’époque ; en mai dernier il était encore temps, les modifications sont devenues impossibles58 ». À Bauné en 1899, « le préfet fait remarquer que la commune n’est pas absolument hostile et qu’une allocation pourrait produire un bon effet au moment surtout du remplacement de M. Coudreuse décédé » ; la part de l’aristocratie dans la commune était pourtant belle : le maire lui-même, M. de Charette, souscrivait à la construction pour 26 300 F59.

  • 60 AN, F19 5 349, Courléon, CIGED du 10 juillet 1897, visites du maire des 19 juillet 1897 et 12 mai (...)
  • 61 AN, F19 5 349, Brain-sur-Longuenée, CIGED du 22 mars 1902, fiche de visite du maire du 23 mai 1902 (...)

24Néanmoins, en matière d’attributions de secours, les intérêts républicains ne prévalent pas toujours, non plus que l’avis du Comité. Paul du Puy, maire de Courléon, mais conseiller général « réactionnaire » obtient en 1897 un secours de 10 000 F, puis un secours supplémentaire de 1 000 F en 1902. En 1899, avant d’instruire la deuxième demande, le préfet s’était étonné de l’importance du premier secours ; c’est que l’affaire avait été « particulièrement signalée à M. le Directeur par M. Coudreuse, député60 », il est vrai républicain. C’est l’administration encore qui décide d’accorder un secours supplémentaire de 3 000 F pour la reconstruction de l’église de Brain-sur-Longuenée, le 26 mai 1902. Le Comité pourtant « se désintéresse de la question », après avoir constaté que les travaux étaient entièrement terminés et que les prescriptions données lors du premier secours en 1893 n’avaient pas été suivies. Le maire avait en fait obtenu une promesse lors d’une visite en mars ; ce qu’il avait rappelé par courrier, puis lors d’une nouvelle visite le 23 mai. Le préfet n’y peut grand chose et se contente seulement de souhaiter que la notification de secours à cette commune conservatrice soit envoyée après les élections ; ce qui est accepté61.

25Une telle étude est évidemment centrée sur le seul discours politique. À considérer trop cette « écume des jours » de l’intérêt immédiat ou à court terme, on en oublierait sans doute les tendances plus profondes d’un mouvement qui s’avère fondamental dans l’histoire de l’architecture au xixe siècle. Si le Second Empire en est en effet un des moments forts et les années 1880, avec les lois laïques, un des plus faibles, il faut considérer les évolutions propres au mouvement catholique, le sommet de la démographie rurale des années 1860 et surtout la tendance longue de la pratique religieuse. Pour autant, ces mots ont été prononcés ou écrits ; ils ont été efficaces ; ils semblent relever alors de la pratique normale du pouvoir. Rencontre éloquente de la domination et de l’intérêt mais probablement aussi, au sens de l’idéologie aristocratique, du don et du service : souvenirs de l’Ancien Régime ou prémices de « l’ingérence » contemporaine ?

Notes

1 AN F19 4 878, Broc, lettre, sans date [1862], de la comtesse de la Poëze au ministre lui rappelant sa promesse ; apostille en marge.

2 AN, F19 4 943, Doué, Notre-Dame, lettre de Louvet du 1er mai 1869.

3 AN, F19 5 348, Allonnes, lettre du préfet du 7 novembre 1898.

4 Charon-Bordas Jeannine, Les sources de l’histoire religieuse aux Archives Nationales de la Révolution à la Séparation, 1789-1905, Paris, Archives Nationales, 1994.

5 Leniaud Jean-Michel, L’administration des Cultes pendant la période concordataire, Paris : Nouvelles éditions latines, 1988 ; plus récemment, du même auteur, Les cathédrales au xixe siècle, Paris : Eco-nomica, CNMHS, 1993, et tout spécialement le chapitre sur les églises paroissiales p. 459-491. La seule synthèse sur la question des églises au xixe siècle est l’ouvrage en collaboration de N. J Chaline, J.-M. Leniaud, C. Bouchon et C. Brisac, Ces églises du xixe siècle, Amiens : Encrage, 1993.

6 Doctorat d’histoire en cours sous la direction de Michel Lagrée. Une étude sur les mairies pourrait être tout aussi intéressante. Une première esquisse en a été établie pour le Maine-et-Loire par Pascale Humeau, L’idée républicaine dans le Choletais, 1870-1914, maîtrise : Histoire, Angers, 1992, p. 124-141, à la suite de Maurice Agulhon « La mairie », in : Les lieux de mémoire, sous la direction de Pierre Nora, Paris : Gallimard, 1984, p. 167-193. Mais l’investissement majeur au xixe siècle en terme d’équipement communal reste l’église : cf. pour le Maine-et-Loire, coût moyen des constructions communales par arrondissement, 1867-1878, in : Kerouanton Jean-Louis, Investissement religieux et architecture en Maine-et-Loire, DEA : Histoire, Rennes, 1987 : entre 20 000 et 25 000 F en moyenne pour une mairie-école, 80 000 F pour une église, 10 000 à 15 000 F pour un presbytère.

7 AN, F19 5 348, Angers, Saint-Léonard, visite de Guignard, le 11 janvier 1895, lettre du curé Charbonnier à Guignard (à Paris), 9 janvier 1895.

8 AN, F19 4 832, Russé (Allonnes), lettre du curé Aubry (chevalier de la Légion d’Honneur) au ministre, 24 octobre 1855. Un secours de 400 F avait déjà été accordé en février pour l’ensemble des travaux de restauration. Les dernières demandes du curé n’ont pu avoir de suite : le dossier a été retrouvé en mai 1857 dans le bureau de M. Hamille, alors chef de division au ministère.

9 AN, F19 4 943, Blaison-Gohier, lettre du curé à l’Empereur, sans date, reçue le 2 décembre 1869, lettre d’Olivier Walsh du 11 décembre 1869, CIGED du 6 décembre 1869, envoi du préfet du 1er décembre 1869, lettre de Segris du 10 février 1870, avis de secours du 14 février 1870.

10 AN, F19 4943, Candé, lettre d’Olivier Walsh du 8 mai 1857, CIGED du 30 mai et renvoi au préfet du 7 juillet 1857 ; on avait expliqué le cas à Walsh. Le secours n’est accordé que le 24 novembre 1858, mais pour se borner aux travaux « nécessaires pour raccorder les nouvelles constructions aux parties conservées de l’ancienne église ». On reconnaissait alors localement les dimensions exagérées du projet initial ; pour Joly-Leterme (avis du 6 février 1858), il fallait se contenter de mettre les constructions neuves à l’abri afin d’y rendre le culte possible.

11 AN, F19 4 832, Longué, lettre du Secrétaire des commandements de S.M. l’Impératrice, 12 janvier 1855, et lettre du curé à l’Impératrice du 9 ; il est répondu au secrétaire le 12 février que le projet a été renvoyé pour modifications. CIGED du 25 janvier 1855, retour du dossier par le préfet du 13 février et avis de secours du 3 mars 1855.

12 « Ce jour-là, la neige couvrait la terre de vingt-cinq centimètres au moins. Malgré la difficulté de voyager par un temps si affreux, je partis pour Saumur, à pied, sur les trois heures, sans en prévenir personne. À sept heures, je montais en chemin de fer ; à cinq heures du matin, j’arrivais à Paris, où la neige avait été encore plus abondante qu’en Anjou. Ni fiacres, ni omnibus ne roulaient. Je fus obligé de faire à pied le trajet de la gare à l’hôtel du Bon Lafontaine, rue de Grenelle-Saint-Germain. À une heure, j’étais au ministère ; à deux heures, mon affaire était appelée au cabinet de M. Hamille. Là toutes les explications nécessaires furent données : on me promit d’approuver mon plan. À sept heures, je reprenais le chemin de fer ; à cinq heures du matin, j’étais à Longué, sans que personne se doutât que j’eusse fait le voyage de Paris ». Cité par Baussan Charles, Notre-Dame de la Légion d’Honneur, 1987, p. 12.

13 AN, F19 4 878, Loiré, CIGED du 2 août 1861 ; l’avis au général de Rochebouet est envoyé en même temps que l’avis de secours du 15 août 1861. On invitait malgré tout la commune à « s’efforcer de combler le déficit de 10 000 F, soit en faisant de nouveaux efforts, soit en simplifiant le projet ». En fait, la première adjudication était de 40 590 F en 1862 ; des dépenses supplémentaires, puis l’achèvement en 1877 amènent la dépense à 63 000 F au moins.

14 AN, F19 4 943, Gennes, lettre sans date du curé et du maire, avec annotation du ministre pour Hamille, avis de secours du 19 juin 1868.

15 AN F19 5 349, Saint-Serge d’Angers, décision de secours du 17 janvier 1901, crédité le 6 février 1902 ; la lettre du curé est sans date et précède probablement le renvoi de l’affaire au préfet pour instruction du dossier, le 13 août 1900.

16 AN F19 4 878, Vaulandry, lettre de la marquise de Broc, 26 juillet 1861. La marquise avouait également avoir envoyé une pétition à l’Impératrice. Le secours obtenu est de 5 000 F, mais sur avis conforme du Comité des inspecteurs généraux des édifices diocésains.

17 AN F19 4 878, Broc, cf. note 1.

18 AN F19 4 878, La Blouère, lettre du curé au ministre, sans date, avec en marge une note pour M. Hamille, envoi du préfet du 24 juin 1863 rappelant la promesse de secours du 23 avril, CIGED du 6 février 1864, avis de secours du 30 avril.

19 AN F19 4 943, Douces, note du ministre, sans date [1863], avis de secours du 1er mai 1863 ; Louvet appuie encore en 1866 la demande, accordée, de secours supplémentaire.

20 AN F19 4 943, Le Puy-Notre-Dame, lettres de Louvet des 13 novembre 1851, 11 juin 1855, 2 mars 1857, 22 mai 1866.

21 AN F19 5 034, Durtal, note sans date [1876] ; les églises de Landemont et de Saint-Martin-du-Fouilloux, ainsi que le presbytère de Brissac, arrivent en second rang, avant les presbytères des Cerqueux-sous-Passavant et de Rablay. Il était possible à l’époque de demander des secours pour les objets.

22 AN F19 5 348, Epieds, lettre de de Grandmaison du 23 janvier 1895 ; sur le formulaire de demande de secours, en même temps que la référence à cet appui, était indiqué : « Ressources locales beaucoup trop insuffisantes néanmoins soumettre projet au Comité ».

23 AN F19 5 349, Bourg-l’Évêque, fiche de visite de Laurent Bougère du 1er mars 1901 et note sur l’avis de secours du 22 février 1902.

24 AN F19 4 764, Les Ponts-de-Cé, Saint-Maurille, le préfet n’avait autorisé que des travaux de réparation mais un don a ensuite permis d’engager la reconstruction complète. Lettre du préfet du 23 novembre 1848, lettre du cabinet de l’Instruction publique du 30 novembre 1848, secours du 11 avril 1849. M. Gastineau espérait-il une promesse rapide avant les élections présidentielles, ou préparait-t-on déjà les législatives ?

25 AN F19 4 764, Saint-Germain-des-Prés, lettre du curé à l’évêque, 29 octobre 1848. Freslon venait d’être élu à la Chambre pour le Maine-et-Loire.

26 AN F19 4 943, La Daguenière, lettre du 20 mai 1870.

27 AN F19 4 943, Cuon, lettre de La Bouillerie du 18 juin 1873.

28 AN F19 4 943, Fougeré, avis de secours de 2 000 F du 25 juin 1873 et de 1 000 F du 21 juillet 1873 ; le ministre est prévenu à chaque reprise. Il suivait d’ailleurs l’affaire, en tant que député, depuis 1871, avant même que le dossier ne soit instruit par le préfet : lettre de La Bouillerie du 1er juillet renvoyée au préfet le 12 pour instruction, avis du préfet du 31 août 1871.

29 AN F19 5 034, Drain, « je m’intéresse beaucoup à cette affaire » écrivait lui-même le ministre sur une lettre officielle du 20 septembre 1873 ; CIGED du 20 octobre 1873, avis de secours du 6 novembre.

30 AN, F19 5 034, Villemoisan, lettre du cabinet du ministre de l’agriculture, 12 août 1873, visite précédente des députés Châtelin accompagné du député de Vendée de la Bassetière, 12 septembre 1871, intervention de Segris du 12 février 1870. Ce dossier était particulièrement appuyé : le baron Legay, secrétaire général du ministre de l’Intérieur, M. de Montaignac, la comtesse d’Auberville.

31 AN, F19 5 034, Armaillé, lettre de Guibourg du 5 mars 1874, note sans date de de Cumont, CIGED du 11 mai 1874, avis de secours du 11 juin 1874 ; la comtesse d’Armaillé donnait à elle seule 21 000 F sur 52 000 F. Cumont succède à Fourtou le 22 mai, au moment où le cabinet de Broglie est renversé.

32 AN F19 5 034, Le Louroux-Béconnais, lettre du curé du 12 novembre 1874, de Mme de Montaignac du 13, avis de secours du 24. Le ministre de la marine avait une première fois appuyé la demande en juillet, déjà transmise favorablement par de Cumont.

33 C’est en effet l’époque où Cholet remplace Beaupréau comme chef-lieu d’arrondissement.

34 AN F19 4 832, Beaupréau Notre-Dame, lettre du préfet du 6 décembre 1858, qui s’ajoute à celle du 3 décembre accompagnant son avis de la veille ; la lettre au préfet du 27 décembre donnant avis de secours de 15 000 F à la commune fait référence à cet envoi du 6.

35 Ibid., CIGED du 2 février 1856, et infra.

36 AN F19 5 118, lettre du préfet du 17 novembre 1858, du curé du 8 avril 1859. Le préfet était contre l’emplacement choisi. Le dossier s’est ensuite avéré catastrophique, avec un doublement de la dépense initialement prévue : de 177 000 F à 335 000 F.

37 AN F19 4 832, Saint-Macaire, lettre du préfet du 6 juin 1859 ; avis de secours du 27 janvier 1860.

38 AN F19 4 943, Cholet, Notre-Dame, lettre de Las Cases du 20 février 1861, Note pour son Excellence le Ministre du 2 mars 1861, avis de secours du 26 mars 1861, de 10 000 F, regrettant que le déficit de 18 000 F ne puisse être comblé, compte tenu des « louables efforts faits par la localité ». Le ministre aurait même laissé espérer un secours de 80 000 F, selon une lettre du préfet du22 février 1869. Le déficit passait en effet de 29 000 F à 18 000 F, alors que la dépense augmentait de 193 448 F à 210 178 F Le premier renvoi de 1860, le 6 octobre, était très clair pourtant, à la suite de l’avis des inspecteurs généraux, CIGED du 20 juillet : « on ne saurait émettre sur un plan exécuté un avis utile. Cependant il y aurait eu lieu de demander un autre projet beaucoup plus modeste ».

39 AN F19 4 943, Candé, lettre du maire, sans date reçue le 3 décembre 1858 ; un secours supplémentaire ne sera obtenu qu’en janvier 1860.

40 AN F19 4 878, lettre du préfet du 14 mars 1862.

41 AN F19 4 878, lettre de Louvet du 10 février 1863, annotée par le ministre, avis de secours du 14 février 1863. Il s’agit d’un secours supplémentaire lié à la chute d’une partie de la construction neuve, 5 000 F avaient été accordés en 1855.

42 AN F19 4 878, Montjean, lettre du préfet du 12 mars 1863. Las Cases avait lui-même demandé 6 000 F ; un secours de 4 000 F est accordé le 25 mars, secours supplémentaire demandé après qu’on ait dû modifier l’emplacement du nouveau bâtiment. La « modicité des crédits » était indiquée au préfet dès le 24 décembre 1862.

43 AN F19 4 878, Torfou, lettre du préfet du 11 mars 1864. Le secours n’est accordé qu’en 1865, les crédits étant insuffisants en 1864.

44 AN F19 4 943, Pruniers, lettre du préfet du 29 mars 1870.

45 AN F19 4 943, lettre de Ségris du 3 mai 1870. Le dossier était parti d’Angers le 9 mars.

46 AN F19 5 193, Auverse, note sans date.

47 AN F19 4 679, crédits annuels, renseignements administratifs.

48 AN F19 4 682, circulaire confidentielle du 30 novembre 1885. Tous les départements ont répondu, surtout en mars et avril 1886, après une lettre de rappel du 16 janvier 1886. La fin des années 1880 correspond au creux des travaux aux édifices paroissiaux mais les secours demandés totalisaient tout de même plus de 12 millions sur la France entière (AN F19 4 683, tableau statistique des secours demandés et accordés pour 1885).

49 AN F19 5 193, Saint-Martin-d’Arcé, note pour le directeur du 27 novembre 1885, lettre du préfet du 19 janvier 1886.

50 AN F19 5 193, Saint-Melaine, lettre du préfet du 21 novembre 1888.

51 AN F19 5 348, Trémont, Envoi de la demande de secours par le préfet, 18 mars 1891. Les 2 500 F de secours sont d’ailleurs accordés dès le mois de mai en un seul versement.

52 AN F19 5 348, Aubigné-Briand, Envoi de la demande de secours par le préfet, 7 mars 1896.

53 AN F19 5 349, Beaucouzé, lettre de Joxé du 6 janvier 1899, opinion confirmée par le préfet le 10 avril : le maire, le docteur Guibard, membre de la Commission administrative des Hospices d’Angers, est « entièrement dévoué » au régime.

54 AN F19 5 348, Gée, lettre au ministre du 31 mars 1897, et carte de visite.

55 AN F19 5 348, lettre de Bazille du 31 mars 1897. La commune en 1896 s’imposait déjà de 70 centimes. Le déficit était de 4 629 F sur une dépense de 4 779 F. On demandait seulement 700 F en 1897. Il n’y a pas d’explication à l’abandon du dossier ; seulement un « attendre » au crayon rouge dans la marge.

56 AN F19 5 348, Segré, La Madeleine, lettre du préfet du 6 janvier 1891, renvoi de la demande du 25 février 1891.

57 AN F19 5 348, Chanteloup, envoi du préfet du 21 novembre 1895, lettre de Dubief du 15 octobre 1895, probablement présentée lors de sa visite à la Direction du 16 octobre par le maire Abellard, « le seul maire républicain de l’arrondissement de Cholet », précisait Dubief. Sur Dubief, cf. Leniaud Jean-Michel, L’Administration des Cultes…, p. 135 n. 355 et p. 194.

58 AN F19 5 349, Saint-Aubin-de-Luigné, CIGED du 16 avril 1890, avis de secours du 19 mai, envoi du préfet du 4 juillet 1895 (Louvet avait également écrit le 5 juillet 1895), renvoi du 8 août 1904.

59 AN F19 5 349, Bauné, avis du ministre au comité du 6 janvier 1899, suite à l’envoi du préfet du 21 décembre 1898, formulaire de demande de secours. La demande a d’ailleurs par la suite été appuyée par le député de Grandmaison et le sénateur de Blois.

60 AN, F19 5 349, Courléon, CIGED du 10 juillet 1897, visites du maire des 19 juillet 1897 et 12 mai 1899, lettre du préfet du 7 décembre 1899.

61 AN, F19 5 349, Brain-sur-Longuenée, CIGED du 22 mars 1902, fiche de visite du maire du 23 mai 1902 et lettre du 31 mars, lettre du préfet du 29 mars 1902. Le cas de Brain est compliqué par l’obligation de reconstruction totale reconnue pendant les travaux de reconstruction partielle, initialement prévue.

© Presses universitaires de Rennes, 1997

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