La vie d’une fédération socialiste pendant les années d’alternance
L’exemple du Calvados (1984-1988)
p. 111-124
Texte intégral
1Quiconque s’intéresse à l’histoire des forces politiques sous la Ve République n’a pas manqué d’observer le basculement à gauche, progressif mais néanmoins spectaculaire, des départements de l’Ouest français lors du dernier quart du xxe siècle. Celui-ci a d’ailleurs été largement analysé par les historiens et les spécialistes des sciences politiques, leur attention se focalisant toutefois sur les premières manifestations de ce mouvement de fond, intervenues au cours des années 1970. Les travaux pionniers de Philippe Braud sur la Bretagne1 ont été ainsi amplement revisités et complétés, concernant la région bretonne mais aussi d’autres territoires. Ils l’ont été du triple point de vue des facteurs explicatifs des réalignements électoraux, des stratégies d’implantation des nouvelles figures politiques lors du rattrapage et, enfin, du rôle tenu par la conquête de ces nouveaux territoires dans l’ascension du PS mitterrandien jusqu’en 19812.
2 Les années du pouvoir, en revanche, n’ont pas encore fait l’objet de travaux aussi développés concernant ces départements. La période n’a pourtant pas été dépourvue d’enjeux pour des fédérations auxquelles l’expansion des années 1970 a procuré une nouvelle dimension sur la scène locale, voire à l’intérieur du parti, et dont le changement de statut est exprimé dès 1981 par l’entrée au gouvernement de plusieurs leaders socialistes issus de l’Ouest, tels Edmond Hervé, Louis Le Pensec et Louis Mexandeau.
3Le Calvados constitue un « spécimen » de ces départements de l’Ouest dans lesquels le socialisme, longtemps en mal d’implantation partisane comme électorale, connaît une progression spectaculaire au cours de la décennie 1970 et devient, en 1981, le môle d’une gauche enfin majoritaire à l’échelle locale. À ce titre, il offre un exemple intéressant de la manière dont l’appareil socialiste a vécu, dans ces zones nouvellement devenues des terres d’expansion, la confrontation avec le pouvoir puis le bref retour à l’opposition3.
Le PS calvadosien avant 1984 : l’ascension électorale et le culte d’Épinay
4Le Calvados a longtemps constitué une zone de grande faiblesse pour la gauche et les socialistes. Des débuts du xxe siècle jusqu’en 1981, la majorité électorale est ainsi constamment demeurée entre les mains des forces politiques de droite. La SFIO a peiné pour conquérir quelques mandats. Elle a dû patienter jusqu’en 1931 pour posséder son premier conseiller général et il lui a fallu attendre 1945 pour faire élire son premier député4. Par ailleurs, le mouvement socialiste départemental a éprouvé bien des difficultés à asseoir sa suprématie à l’intérieur de son camp politique, face aux radicaux pendant l’entre-deux-guerres puis vis-à-vis du Parti communiste par la suite.
5À partir de la décennie 1970, toutefois, le PS refondé à Épinay est le grand bénéficiaire, dans le Calvados comme ailleurs, des réalignements des comportements électoraux de l’Ouest sur ceux du reste du pays. Dans ce processus, fondé à la fois sur le suffrage des nouvelles forteresses ouvrières de la périphérie caennaise (au premier rang desquelles Hérouville-Saint-Clair) et sur le réveil des anciens fiefs de la SFIO (comme la cité ferroviaire de Mézidon-Canon), les élections législatives de 1973 et de 1978, puis les élections présidentielles de 1981, constituent les jalons les plus importants.
6En 1973, le premier secrétaire fédéral du PS, Louis Mexandeau, est élu député de Caen contre le gaulliste Henri Buot, titulaire du siège depuis 1958. Il est le troisième député socialiste de l’histoire du Calvados, mais le premier à être élu au scrutin majoritaire5. Il remporte une victoire dont la portée va s’avérer considérable, car elle légitime la nouvelle stratégie d’union de la gauche décidée par François Mitterrand et relayée localement, en même temps qu’elle démontre que des progrès sensibles sont enfin possibles dans la terre de mission calvadosienne. Parallèlement, lors de ce même scrutin, le PS prend l’ascendant sur le Parti communiste pour la première fois depuis juin 1946, obtenant 18,4 % des suffrages exprimés au premier tour contre 15,7 % pour le PCF.
7En 1978, Louis Mexandeau conserve son siège de député face au maire de Caen Jean-Marie Girault et démontre que le PS est désormais capable de s’enraciner. En parallèle, un autre événement retient l’attention. Pour la première fois de son histoire, le score obtenu par le PS dans le département du Calvados est supérieur à celui réalisé dans le pays : 24,5 % des suffrages exprimés contre 22,6 %. Il ne s’agit pas d’un accident, mais bien d’une césure fondamentale, le début d’un processus au long cours qui va transformer le Calvados en une zone de force du PS en France.
8Les scrutins de l’année 1981 sonnent comme une consécration des progrès enregistrés depuis le début de la décennie précédente. Lors de l’élection présidentielle, pour la première fois depuis 1881, la gauche est majoritaire dans le Calvados. Au deuxième tour, François Mitterrand obtient 50,4 % des suffrages exprimés. Lors des élections législatives, la fédération socialiste recueille 40,9 % des voix et devient la première force politique du département. Elle signe un succès remarquable même si l’ampleur des progrès tient essentiellement à l’abstention massive des électeurs de droite, démobilisés après la défaite de Valéry Giscard d’Estaing à la présidentielle. De surcroît, le PS conquiert un deuxième siège de député, Henry Delisle étant élu dans le territoire de Lisieux-Falaise.
9En ces années, le Calvados n’est pas seulement une illustration de ces fédérations de l’Ouest qui enregistrent d’importants progrès électoraux. Il est aussi un exemple archétypal des nombreuses fédérations moyennes reconstituées après 1971 dans lesquelles le courant mitterrandiste prospère, et qui forment le socle de la domination mitterrandienne sur le parti. Il en est un archétype, à cette réserve près qu’il se situe dans un ensemble géographique assez largement acquis à la « deuxième gauche » et qu’il assume, de ce point de vue, sa singularité idéologique. Ici, le courant mitterrandiste règne sans partage et gagne tous les congrès avec une majorité absolue6. Cette situation trouve son origine dans le fait qu’à la fin des années 1960, la Convention des institutions républicaines (CIR), fondée et dirigée par Louis Mexandeau, était plus dynamique et plus puissante que la fédération SFIO dans le département, un cas rare en France. Le refus des chefs de la fédération du NPS (ex-SFIO) d’adhérer au nouveau parti créé à Épinay, par hostilité à la personne de François Mitterrand et à la stratégie d’union de la gauche, ainsi que le talent indéniable de Louis Mexandeau pour construire un appareil et éveiller les vocations militantes, avaient rapidement fait le reste. Ainsi fut édifiée une fédération dans laquelle François Mitterrand était encensé, l’Union de la gauche célébrée, le congrès d’Épinay mythifié.
10En 1984, à l’aube des années d’alternance, le PS calvadosien est donc une organisation communiant dans le mitterrandisme, dirigée depuis 15 ans par la poigne énergique de Louis Mexandeau. Ses conquêtes électorales des années 1970 lui ont apporté un contingent d’élus dont elle était totalement dépourvu en 1971 ; elle peut s’appuyer sur deux députés, plusieurs mairies (dont Hérouville-Saint-Clair, troisième ville du département) ainsi que sur un nombre croissant de conseillers généraux (14 après le scrutin de 1982). Cependant, si elle a changé de dimension au plan local, elle n’en reste pas moins une fédération moyenne dont les choix comptent peu à l’intérieur du parti, dont l’expansion électorale comporte des lacunes (la ville de Caen demeure solidement arrimée à droite) et dont les succès restent de moindre ampleur que ceux réalisés dans d’autres départements de l’Ouest, notamment en Bretagne. Enfin, les coups d’arrêt ne l’épargnent pas. Elle vient ainsi de subir un cuisant revers lors des élections municipales de 1983 avec la défaite de ses deux députés : Henry Delisle, victime de dissensions internes qu’il n’a pas su éteindre, n’a pas été réélu à la mairie de Mézidon-Canon, et Louis Mexandeau a lourdement échoué dans sa deuxième tentative de conquête de la mairie de Caen. Durant les « années d’alternance », les contrastes du tableau s’accentuent.
La vie interne de la fédération ou l’omnipotence mexandienne
11Dans l’histoire interne de la fédération du Calvados, les années correspondant au premier septennat mitterrandien ont formé une sorte de parenthèse heureuse, située entre une décennie 1970 dominée par les discordes personnelles qui opposèrent Louis Mexandeau à André Paysant puis par le conflit des « deux cultures » à l’approche du congrès de Metz, et une fin des années 1980 qui sera marquée par les répercussions locales de l’éclatement du courant mitterrandiste à l’occasion du congrès de Rennes. Pendant les « années d’alternance », rien ne trouble la cordialité et la tranquillité ambiantes. Ni les vicissitudes de la politique nationale, dans une fédération qui, malgré son inclination traditionnelle pour un socialisme ancré à gauche, a accepté sans remous le tournant de la rigueur accompli en 1983 et qui n’émet pas davantage de protestations face à l’accentuation de celui-ci sous le gouvernement Fabius. Ni les congrès locaux qui, en 1983 comme en 1985, reconduisent sans controverse une majorité fédérale cimentée par la fidélité inconditionnelle au président de la République.
Tableau 1. – Les rapports de force dans la fédération du Calvados au début des années 1980.
ceres | Jospin | Rocard | Rocardiens dissidents | |
1983 Bourg-en-Bresse Mondeville | 18,1 % 19,2 % | 77,2 % 74,2 % | Pas de motion | 4,7 % 6,6 % |
1985 Toulouse Bayeux | Pas de motion | 71,5 % 77,8 % | 28,5 % 22,2 % | Pas de motion |
12Si la vie interne est à ce point caractérisée par la sérénité, c’est aussi parce que la période considérée correspond à un double apogée : celui de la carrière politique de Louis Mexandeau et, par ricochet, celui de sa mainmise sur le parti dans le département. Incarnation du socialisme calvadosien des trente dernières années du xxe siècle, Louis Mexandeau est en effet au sommet de sa très longue carrière. Élu député de la circonscription de Caen en 1973, réélu en 1978 puis en 1981, élu conseiller général en 1973 et réélu en 1979, délégué national du PS en charge des questions d’éducation lors de la seconde moitié des années 1970, il est entré au gouvernement en 1981 comme ministre de plein exercice. Il n’a pas été nommé à la tête du ministère de l’Éducation nationale qui lui semblait pourtant promis, car l’immense polémique qui, fin 1976, avait accompagné la sortie du projet socialiste pour l’éducation rédigé sous sa direction n’était pas oubliée7. Aussi François Mitterrand préféra-t-il nommer le député de Caen à la tête du ministère des Postes et Télécommunications (PTT), un ministère technique mais doté d’une administration numériquement importante et pilotant une filière (les télécommunications) en pleine expansion.
13Le chef de file du PS calvadosien, nommé en 1981 dans le gouvernement Mauroy, fut reconduit dans ses fonctions en 1984 au sein du gouvernement Fabius. Toutefois, il dut solliciter l’intervention du président de la République pour empêcher le nouveau Premier ministre de lui confier un autre portefeuille ministériel, de moindre importance. Il est vrai que ses relations avec Laurent Fabius étaient difficiles et que les démêlés au gouvernement avaient été nombreux entre les deux hommes. Louis Mexandeau n’a pas oublié cet épisode : « Fabius, visiblement, me destinait ailleurs, à une sorte de voie de garage, il faut dire les choses comme elles sont. Moi, j’ai demandé au Président, directement, de pouvoir continuer aux PTT, lui disant : il y a plusieurs projets qui sont en route (ce que j’avais appelé les “fronts combattants”), ils ne sont pas achevés et je préfère finir la législature aux PTT. Il m’a maintenu. Fabius m’avait dit : je te prévoyais ailleurs. Je n’ai pas demandé où, mais je savais que c’était au Plan, à la Réforme administrative…, les voies de garage traditionnelles où l’on a un titre ronflant mais où on bat du vent8 ! »
14Déjà patron incontesté de la fédération en 1981, Louis Mexandeau voit son aura auprès des militants et de la population départementale encore renforcée par ce statut de ministre, de même que sont accrus son entregent et les moyens de son influence. Les signes de son omnipotence à l’intérieur de l’appareil socialiste se rencontrent partout en ces années 1984-1988. En 1986, il est tête de liste aux élections législatives et au scrutin régional. Au sein de la fédération, il rend les arbitrages, choisit les candidats, règle les différends. Les Premiers secrétaires fédéraux successifs (André Ledran jusqu’en 1986, Jean-Claude Carabeufs après cette date) appliquent la ligne sans dévier, tandis que la majorité de la Commission exécutive fédérale est composée de fidèles que l’ancien secrétaire départemental de la CIR a recruté patiemment depuis 1966 et qui se sont installés à la tête des sections. La plus importante section du département, celle de Caen Nord-Ouest, est le bastion du député de Caen ; le secrétaire de section n’y est élu que pour la forme car seul importe, en fait, le choix effectué par Mexandeau. Le secrétaire de section de ces années 1984-1988 le restitue fort bien : « J’adhère à l’été 1983 et je deviens secrétaire de section au congrès suivant, donc en 1985. Mais à une époque où tout fonctionnait à la cooptation pure et simple […] sur la base extrêmement classique du mitterrandisme bon teint. Je suis devenu secrétaire de section parce qu’on l’a bien voulu, parce qu’on l’a souhaité, à condition de défendre strictement et fidèlement, au iota près, la ligne mitterrandiste9. » Aucune responsabilité (député, ministre…) ne faisait perdre de vue à Louis Mexandeau l’activité de la fédération et le maintien de son pouvoir sur cette dernière. Dans ces conditions, les autres barons locaux du socialisme ne se disputent rien d’autre que la place de brillant second au sein d’un appareil politique qui tend à devenir de plus en plus moderne et performant.
L’action politique : le soutien du ministre
15En 1984, la fédération du Calvados dispose, pour déployer son activité politique, de leviers dont elle avait jusque-là toujours été privée. Ainsi, en 1982, elle s’est installée dans un local qui n’a plus rien à voir avec celui, exigu et inconfortable, qu’elle occupait dans la première moitié des années 1970, ni même avec celui du 90 rue Caponière, un peu plus adapté, où les socialistes avaient pris leurs quartiers dans la seconde moitié de la décennie. En 1982, ils s’installent au 19 rue Paul Toutain, non loin de la Prairie, dans des locaux qu’ils occupent toujours en 2015 et qui se révèlent plus spacieux et fonctionnels que ceux de bon nombre de sièges départementaux du PS.
16Les militants de la fédération bénéficient aussi des retombées, directes et indirectes, de la position occupée par Louis Mexandeau au sein du gouvernement. Elles sont loin d’être négligeables, permettant de récompenser des engagements, de rendre des services personnels, d’entretenir des réseaux d’amitié et de fidélité. Louis Mexandeau est, de surcroît, un ministre très politique. Son cabinet se trouve composé exclusivement de personnalités engagées au PS ou très proches de ce dernier. « Il était même un peu réputé pour cela » précise le ministre de l’époque, avant d’ajouter : « Dans les gouvernements de gauche, il y a toujours beaucoup d’alibis pour qu’on mette des gens qui n’appartiennent pas à la gauche et encore moins au Parti socialiste. Dans mon cabinet, il n’y avait pratiquement que des socialistes. [Ils] […] étaient tous membres du parti, dans des sections parisiennes ou de province10. » Parmi ceux-ci figurent plusieurs militants du Calvados. Ainsi, le directeur de cabinet n’est pas un haut fonctionnaire parisien mais un fidèle de toujours du député de Caen : Bernard Loing, professeur d’anglais à l’université de Caen, est en effet un ancien adhérent de la CIR dans le Calvados et un ancien secrétaire de section du PS refondé à Épinay, qui sera plus tard conseiller général du Calvados11. Le chef de cabinet, Claude Bodin, a lui aussi été membre de la CIR du Calvados. François Geindre, maire socialiste d’Hérouville, fait également partie de l’équipe du ministre des PTT, à l’intérieur de laquelle il est en charge du suivi des dossiers industriels locaux. S’ajoute enfin, à Caen, une antenne assez étoffée de collaborateurs du député devenu ministre ; tous ou presque sont des adhérents de la fédération, dont on utilise les compétences et dont on rétribue le militantisme.
17Si les moyens dont bénéficie le PS calvadosien ont changé, les marges de manœuvre de ses élus se sont, elles aussi, trouvées radicalement modifiées par la victoire du 10 mai 1981. De fait, un nouveau rapport avec le territoire se trouve mis en pratique au cours de ces années. Les élus socialistes sont désormais en prise directe avec les problématiques de soutien aux entreprises et d’aménagement du territoire, qui étaient jusque-là l’apanage de la droite. Ils s’engagent ainsi dans le sauvetage des hauts-fourneaux de la Société métallurgique de Normandie (SMN), intégrés en 1982 à l’entité nouvellement nationalisée Usinor-Sacilor. Ils ne pourront que procurer un sursis à l’usine, celle-ci disparaissant en novembre 1993. Ils se mobilisent également, à commencer par Louis Mexandeau, en faveur du plan de reconversion du site de Dives-sur-Mer, où l’usine d’électrométallurgie Tréfimétaux, elle aussi nationalisée en 1982 (par le biais du rachat par l’État du groupe Péchiney), ferme ses portes en 198612.
18Par ailleurs, le ministre socialiste s’évertua à doter la Basse-Normandie de nouveaux équipements ou à faire aboutir des projets d’aménagement. Il entendait combler le retard de la région en la matière. Peu de temps après son installation rue de Ségur, il résuma très directement sa conception des choses au directeur général de la Poste, Jean Babin, et à celui des Télécommunications, Jacques Dondou, leur disant sans ambages : « Il me faut quelque chose à Caen13 ! » En l’occurrence, ce fut un centre de recherches, le Service études des Postes et télécommunications (SEPT)14. De même, le ministre des PTT joua de son amitié personnelle avec Guy Lengagne, nommé secrétaire d’État à la Mer en 1983, pour obtenir la création de la passerelle transmanche Ouistreham-Portsmouth.
19Naturellement, les militants socialistes du Calvados promurent l’action de leur ministre, durant les années du pouvoir et au-delà. Ainsi, après le scrutin de 1986, ils combattirent les tentatives de Michel d’Ornano visant à s’attribuer les mérites de projets lancés sous la mandature précédente. Dans les jours qui entourèrent la cérémonie d’inauguration de la ligne maritime Ouistreham-Portsmouth, ils placardèrent des affiches au slogan éloquent : « Merci la gauche, merci Mexandeau ! ». Par ailleurs, l’ancien ministre des PTT insista pour que, lors de la visite présidentielle en Basse-Normandie des 22 et 23 juin 1987, François Mitterrand s’arrête sur le chantier du SEPT, alors en voie d’achèvement. Il obtint gain de cause contre l’avis des conseillers techniques du cabinet de l’Élysée, qui estimaient cette visite inutile15.
20Cependant, à cette époque, le PS calvadosien a déjà pleinement retrouvé ses réflexes d’opposant et fait flèche de tout bois contre le gouvernement Chirac. Il est vrai qu’il est sorti plutôt revigoré du scrutin législatif de mars 1986.
Les élections : coup d’arrêt ou poursuite de la progression ?
21En mars 1984, à l’occasion d’un scrutin municipal partiel à Ouistreham, ville côtière du Calvados, le maire socialiste André Ledran, dont l’élection survenue en 1983 avait été invalidée, était largement réélu. Le cabinet du président de la République se mit à espérer que ce scrutin soit le signe avant-coureur d’un renouveau à l’échelle nationale, après des élections municipales de 1983 qui s’étaient soldées par la perte de nombreuses municipalités. Une note de Jean Glavany, alors chef de cabinet de François Mitterrand, adressée au secrétaire général de l’Élysée et intitulée « embellie ? », traduisait ce sentiment16.
22Cependant, les élections cantonales de l’année suivante furent de nature à faire déchanter les collaborateurs du chef de l’État. À l’échelle nationale, au terme d’une campagne menée sur fond de chômage en hausse et de popularité du pouvoir en baisse, la droite s’empara de dix départements. Dans le Calvados, ce scrutin donna lieu au premier authentique recul du PS depuis le début de la phase des réalignements électoraux. Les conseillers généraux socialistes, qui étaient 14 après les élections de 1982, ne sont plus que 9 au lendemain du scrutin de 1985. L’échec de Georges Lepeltier, conseiller général sortant, dans le canton de Bourguébus (plutôt ancré à gauche), et surtout la défaite d’André Paysant, une des figures de la fédération, dans le canton de Caen 4, sont des coups sévères portés au PS. Si Louis Mexandeau a, pour sa part, été réélu, encore fut-ce au prix d’un changement de canton17. Le PS a subi de plein fouet la désaffection des couches populaires, qui se sont abstenues en masse en certains lieux de l’agglomération caennaise, provoquant la chute d’André Paysant comme elles avaient entraîné l’échec de Louis Mexandeau aux élections municipales de 1983.
23Néanmoins, ce scrutin, qui avait confirmé l’existence d’un nombre important de déçus du socialisme, n’a pas été le prélude à des déconvenues encore plus lourdes pour le PS départemental. Les élections législatives de mars 1986 le démontrèrent. La constitution de la liste avait pourtant été particulièrement compliquée, la « nationalisation » des comportements électoraux dans le département ayant pour effet inévitable, en rendant possible les « carrières » politiques à gauche, d’aiguiser les ambitions concurrentes au sein de la fédération et, également, de faire du Calvados un terrain envisageable pour d’éventuels parachutages. De fait, si personne ne pouvait songer contester la première place à Louis Mexandeau, le Premier secrétaire fédéral, André Ledran, disputa la deuxième à Henry Delisle, député sortant. Deux mitterrandistes incontestables entrèrent en rivalité, avec chacun des titres à faire valoir mais dont l’un, Henry Delisle, voyait sa candidature desservie par la perte de sa mairie de Mézidon-Canon en 1983, tandis que l’autre, André Ledran, avait le vent en poupe, comme le prouvaient ses récentes victoires à Ouistreham. Finalement, Louis Mexandeau et le courant mitterrandiste du département se prononcèrent en faveur de Ledran. À peine ébauchée, la liste fut remise en cause car, le secrétariat national du PS cherchant des lieux où faire élire des ministres non parlementaires, le Calvados servit de point de chute à Yvette Roudy. La ministre des Droits de la femme occupa la deuxième position sur la liste.
24Lors du scrutin du 16 mars, la droite recouvre la majorité qui lui a échappé lors des élections de 1981 et le bloc RPR-UDF redevient la première force politique du Calvados. Sa liste récolte 46,5 % des voix, contre 35,1 % pour le PS. Cependant, le mode de scrutin proportionnel débouche sur un partage des sièges, un résultat qui fait du Calvados une illustration de la justesse de la stratégie mitterrandienne. Dans le département, la proportionnelle transformait en effet une défaite en voix en un match nul en sièges et même, au bout du compte, en une victoire symbolique des socialistes. En 1981, la fédération ne comptait que deux députés. Cinq ans plus tard, elle en dénombrait trois : Louis Mexandeau, Yvette Roudy et André Ledran. De ce fait, et aussi en raison des pertes enregistrées dans les départements où la vague rose avait été particulièrement puissante en 1981, la force du PS calvadosien apparaissait désormais très voisine de celle de ses homologues de Bretagne, en voix comme en sièges18.
25Indépendamment de la proportionnelle, le socialisme calvadosien avait, de nouveau, réalisé un excellent score, supérieur à la moyenne nationale du PS : 35,1 % contre 31,6 %. Les « années d’alternance » ne marquent donc pas une cassure dans la progression électorale. Tout au contraire, le retournement intervenu à la fin des années 1970, tendant à faire du Calvados un point fort du vote socialiste en France, est confirmé par ces élections de 1986. De surcroît, à l’intérieur du département, les zones de faiblesse ne sont plus des déserts de voix. Dans les cantons ruraux où le PS accomplit ses plus mauvais scores (Cambremer, Vassy…), les résultats obtenus sont supérieurs de 12 ou 15 points à ce qu’ils étaient quinze ans auparavant. C’est le premier signe de la conquête des campagnes par les socialistes, phénomène majeur des « années d’alternance », qui va s’amplifier lors du scrutin présidentiel de 1988.
La conquête des campagnes, fruit de l’exercice du pouvoir et de l’esprit de rassemblement ?
26Jusqu’aux « années d’alternance », l’implantation électorale des socialistes dans le Calvados est demeurée très contrastée. L’agglomération caennaise, et plus particulièrement la ceinture industrielle qui s’est développée en périphérie de la ville de Caen, a été le socle des plus grands succès de la SFIO puis du PS ; des succès obtenus grâce au vote de la population ouvrière venue habiter cette périphérie pour travailler à la SMN à partir des années 1920, dans les usines de la décentralisation industrielle (et notamment à la Saviem, une entreprise d’assemblage de camions) à partir de la fin des années 1950. Cependant, les zones de force traditionnelles du mouvement socialiste sont plus larges. Elles englobent une bande centrale qui traverse le département du nord au sud, comprend les cantons péri-urbains proches de Caen (Troarn, Douvres-la-Délivrande…) et s’étend de la côte jusqu’à la limite de l’Orne avec une excroissance à l’intérieur du pays d’Auge, dans les environs de Mézidon.
27Ces territoires ne ressemblent pas au Bocage hostile, au Bessin inhospitalier, au Nord Pays d’Auge réfractaire, bref à ces espaces ruraux situés sur les flancs du département, où l’on cultive un désamour ancestral pour les « partageux » et où l’expression « terre de mission » employée à propos de la gauche prend tout son sens. La normalisation des comportements électoraux y est très peu prononcée lors de la décennie 1970, les candidats socialistes continuant, dans ces territoires, de mener des combats sans espoir.
28De fait, au début du premier septennat de François Mitterrand, les populations rurales du Calvados demeurent foncièrement hostiles à la gauche. La courte majorité arrachée par le candidat du PS dans le département le 10 mai 1981 n’a pas révélé un changement des mentalités ; elle a été essentiellement le produit du vote des cantons très peuplés de l’agglomération caennaise et de ses environs. Dans les premières années de l’exercice du pouvoir, l’hostilité des campagnes se trouva encore avivée par la politique activiste et dépensière du gouvernement Mauroy, peut-être aussi par la vision catastrophiste de l’alternance que développaient alors l’UDF et le RPR. Le désaccord radical entre les territoires ruraux du Calvados et le nouveau pouvoir socialiste éclata de façon spectaculaire le 2 février 1982, à l’occasion de la visite dans le département de la ministre de l’Agriculture, Édith Cresson. Son déplacement s’inscrivait dans un contexte explosif puisqu’elle cherchait alors à briser la toute-puissance de la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA) dans le monde agricole, en favorisant le pluralisme lors des élections aux chambres d’agriculture. De ce fait, elle était fréquemment chahutée lorsqu’elle visitait une exploitation agricole. Le 2 février 1982, pendant qu’elle visite une ferme à Airan, dans le canton de Bourguébus, un bon millier d’agriculteurs, portant pour certains des pancartes de la FNSEA, convergent vers l’exploitation. À sa sortie, Édith Cresson est prise à partie alors qu’elle regagne son véhicule. Encerclée par la foule, elle est invectivée, bousculée, injuriée, reçoit des œufs et des projectiles divers. Il faut le concours d’un cordon de police et d’un hélicoptère pour que l’infortunée ministre puisse quitter les lieux, les vêtements souillés. La victoire de 1981 n’a donc pas, en dépit de sa force symbolique, effacé la détestation que les socialistes inspirent dans certains milieux.
29Or, la manifestation historique d’un changement en la matière, d’une dilution du vote socialiste dans tout le département, intervient durant les « années d’alternance ». Les élections législatives de 1986 en ont été le premier signe. En 1987, mutatis mutandis, la victoire du candidat du PS Bernard Lambert lors de l’élection cantonale partielle d’Orbec en est une autre préfiguration. Cette victoire, acquise dans un canton rural théoriquement inaccessible à un socialiste, est survenue de manière concomitante avec le déplacement du président Mitterrand en Basse-Normandie, au moment où celui-ci entreprenait de resserrer les liens avec la population à l’approche de la campagne présidentielle19. Elle fut principalement assurée par la division des droites, ces dernières présentant 4 candidats20. Il n’en demeure pas moins qu’elle recouvrait une dimension symbolique forte : dans ce canton où le même candidat, Bernard Lambert, avait été éliminé dès le premier tour en 1976 et en 1982, le succès, obtenu avec près de 54 % des suffrages, apparaissait désormais possible.
30Mais la manifestation la plus évidente et la plus spectaculaire du changement intervient en 1988. Lors du premier tour de l’élection présidentielle, le score de François Mitterrand dans le Calvados fut de nouveau supérieur à sa moyenne nationale (37,4 % des suffrages exprimés contre 34,1 %). Par rapport à 1981, le président sortant gagnait 39000 voix et près de 11 points, cette progression s’accompagnant d’une extension inédite du vote socialiste dans les cantons ruraux traditionnellement hostiles. Dans nombre de ces territoires, François Mitterrand dépassait les 30 %, et même les 35 % des voix, alors qu’en 1981, les suffrages en sa faveur avaient oscillé entre 17 % et 22 %21.
31Le deuxième tour enfonça le clou. François Mitterrand, qui a su se montrer convaincant en candidat consensuel et rassembleur, connaît une réélection triomphale le 8 mai 1988. Il triomphe dans le pays (il est réélu avec 54 % des voix) comme dans le Calvados, où il recueille 55,8 % des suffrages exprimés. Le président sortant a très fortement progressé dans les terres de mission, au point d’être majoritaire dans 34 cantons sur 48, dont ceux de Balleroy, Isigny, Ryes… (cf. cartes 1, 2 et 3)22. Presque tout le Bessin s’est offert à lui et la circonscription du Bocage virois lui a également donné une majorité nette23.
32Le vote socialiste pénètre donc jusque dans les « sanctuaires » de la droite et cesse d’être ce vote purement urbain et populaire sur lequel a reposé la séquence conquérante des années 1970. La tonalité de la campagne de François Mitterrand explique largement ce bouleversement. Dans les années 1970, le défi lancé aux « forces de l’argent » par les socialistes avait rencontré un puissant écho auprès de la nouvelle classe ouvrière issue de la décentralisation industrielle des années 1950-1960, mais il avait été sans effet dans les campagnes. Lors des années 1980, le PS édulcore sa ligne politique au nom de la capacité de la gauche à gouverner dans la durée. Cette mutation, dont la campagne présidentielle de 1988 et ses appels à la « France unie » ont constitué le point d’orgue, fait tomber les préventions des milieux ruraux24.
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33Durant les années 1984-1988, la fédération socialiste du Calvados achève sa transformation en une machine politique moderne, poursuit sa progression électorale et confirme sa capacité à réaliser dans le département des scores supérieurs à ceux du PS à l’échelle nationale. Tandis que ses élus participent davantage à l’aménagement du territoire bas-normand, ses militants confirment les choix structurants accomplis lors de la décennie précédente, à savoir l’engagement derrière François Mitterrand et le rassemblement autour de Louis Mexandeau. Le pouvoir de ce dernier sur l’appareil fédéral atteint son acmé.
34Au milieu des continuités, un changement d’importance s’opère durant cette période, en l’occurrence la progression du vote socialiste dans les campagnes. Les territoires ruraux se révèlent sensibles à l’image nouvelle d’un PS « assagi » et d’un président rassembleur. Certes, après 1988, les positions de la fédération socialiste en milieu rural restent fragiles. Lors du scrutin législatif de 1997, l’élection de ses candidats à Bayeux et à Vire doit beaucoup moins à une conversion des territoires ruraux composant ces circonscriptions qu’aux effets pervers pour la droite du « découpage Pasqua » de 1986, qui avait organisé la « dissémination » des cantons de gauche doté d’un poids démographique élevé dans toutes les circonscriptions législatives. Pour autant, la conquête des campagnes réalisée entre 1986 et 1988 n’a pas été totalement sans lendemain. Après 1988, la rencontre entre l’offre politique des socialistes et la demande locale s’opère à l’échelle du département, même si elle laisse subsister des nuances. Cette adéquation va servir de fondement aux nouveaux succès remportés par le PS au début du xxie siècle, des succès qui parachevèrent la phase de rattrapage ouverte un jour de mars 1973 à Caen.
Notes de bas de page
1 Philippe Braud, « Les élections législatives de mars 1978 en Bretagne », Revue française de science politique, 28e année, n° 6, 1978, p. 1018-1038.
2 Concernant la Bretagne, voir, entre autres, les nombreux travaux de François Prigent : « Les années tournant du socialisme breton ? Le cycle d’Épinay (1971-1981) », in Noëlline Castagnez et Gilles Morin (dir.), Le Parti socialiste d’Épinay à l’Élysée, 1971-1981, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2015, p. 105-117 ; « L’expérience de l’union de la gauche en Bretagne (1967-1978) », in Danielle Tartakowsky et Alain Bergounioux (dir.), L’union sans unité. Le programme commun de la gauche, 1963-1978, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2012, p. 175-187 ; « Les élus socialistes en Bretagne : réseaux, trajectoires et identités, des années 1930 aux années 1980 », in Christian Bougeard (dir.), Un siècle de socialismes en Bretagne, 2008, p. 207-220. Voir également, sur un espace géographique plus large (Ille-et-Vilaine, Calvados et Maine-et-Loire), Gilles Richard, « Les transferts de voix du centre vers le PS dans l’Ouest après 1968 : retour sur une fausse évidence », in Christian Bougeard, Vincent Porhel, Gilles Richard et Jacqueline Sainclivier (dir.), L’Ouest dans les années 1968, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2012, p. 131-143. Pour la Basse-Normandie, un certain nombre de développements sur les réalignements des comportements électoraux au cours de la décennie 1970 figurent dans Michel Boivin, Les élections législatives en Basse-Normandie sous la Ve République, Marigny, Éd. Eurocibles, 2007, 300 p. et dans Michel Boivin, Bernard Garnier et Jean Quellien, Atlas historique et statistique de la Normandie occidentale à l’époque contemporaine, vol. II : Les élections, Caen, Éd. du Lys, CRHQ, 1990.
3 Pour davantage de détails sur la vie de la fédération durant cette période, nous renvoyons à Jérôme Letournel, Socialisme et socialistes dans le Calvados des origines à la fin du xxe siècle (1864-1998), thèse de doctorat d’histoire, université de Caen-Basse-Normandie, 2013.
4 Adrien Rophé fut élu à l’Assemblée constituante en octobre 1945, à la faveur du mode de scrutin proportionnel. Son mandat prit fin dès novembre 1946 ; il ne fut pas réélu lors de l’élection de la première Assemblée nationale de la IVe République.
5 Après Rophé, un autre socialiste, Charles Margueritte, avait été élu député en 1956. Il fut balayé par la vague gaulliste de 1958.
6 Le courant mitterrandiste recueille respectivement 72 % des mandats au congrès de 1973, 68 % en 1975, 69 % en 1977 et encore 52 % en 1979, lors de l’affrontement avec les rocardiens.
7 Ce projet, intitulé Libérer l’école, contenait une proposition recommandant de nationaliser l’enseignement privé. Cette préconisation déclencha une polémique retentissante, qui fit oublier toutes les autres propositions contenues dans le rapport, à tel point que le document fut rebaptisé, dans la presse comme dans le débat public, « rapport Mexandeau sur la nationalisation de l’enseignement privé ».
8 Entretien avec Louis Mexandeau, 7 novembre 2015.
9 Entretien avec Gilles Déterville, 21 avril 1999.
10 Entretien avec Louis Mexandeau, 17 octobre 2015.
11 Bernard Loing quitta le cabinet ministériel un peu avant la fin de la législature et fut nommé Inspecteur général des PTT. Il fut remplacé à la tête du cabinet par François Aron, qui avait lui aussi un engagement au PS.
12 Cette reconversion fut plutôt considérée comme réussie, de nouvelles usines venant s’installer sur place et compenser ainsi une partie des destructions d’emplois liées à la fermeture de Tréfimétaux. Ce fut le cas, en 1985, de l’entreprise Le Magnésium industriel (LMI, propriété du groupe Péchiney) et, en 1987, d’Eurocel (appartenant au groupe japonais Mitsui). Voir notamment Jean Quellien (dir.), Une usine et des hommes, Dives-sur-Mer, Cabourg, Les Cahiers du temps, 2004.
13 « J’ai soigné Caen ! Caen avait été oubliée en comparaison de la Bretagne. […] Jusqu’au jour où j’ai dit à mes deux directeurs généraux, de la Poste, qui était [Jean] Babin à ce moment-là, et des télécommunications, [Jacques] Dondou : il me faut quelque chose à Caen ! » Entretien avec Louis Mexandeau, 10 octobre 2015.
14 Le SEPT, créé en 1983 à l’intérieur du Centre national d’études et des télécommunications (CNET), s’intéressa notamment aux applications en matière de monétique et de télétransmission ; il occupait 170 personnes en 1987.
15 Alain Boublil, conseiller technique à l’Élysée, écrivait ainsi dans une note de préparation du voyage présidentiel : « la visite du Centre d’études proposé par Louis Mexandeau est marginale et ne correspond à rien par rapport aux attentes de la population ». AN, AG/5 (4)/3030.
16 Note de Jean Glavany à Jean-Louis Bianco du 6 mars 1984, dans laquelle le premier faisait observer que le maire de Ouistreham avait progressé de 18 points et de près de 700 voix par rapport à 1983. AN, AG/5 (4)/3472.
17 Le redécoupage de son ancien canton amoindrissant sensiblement les chances de succès d’un candidat de gauche et la fédération ne souhaitant pas offrir à la droite le symbole qu’aurait représenté une défaite du ministre, le patron du PS calvadosien concourut dans le canton de Caen 5, le plus à gauche de tout le département. Il s’imposa avec 62 % des suffrages.
18 On compte ainsi, par exemple, 4 députés socialistes sur 8 dans le Finistère, 2 sur 5 dans les Côtes-du-Nord et 4 sur 10 en Loire-Atlantique.
19 L’élection partielle dans le canton d’Orbec se déroule les 21 et 28 juin 1987, la visite présidentielle en Basse-Normandie a lieu les 22 et 23 juin. Lors de ce déplacement, pour ce qui concerne le seul Calvados, François Mitterrand fait étape à la mairie de Vire, à l’usine Renault Véhicules industriels (ex-Saviem) de Blainville-sur-Orne, à la mairie de Caen, au chantier du SEPT à Caen, à la criée de Port-en-Bessin et, enfin, à l’hôtel de ville d’Hérouville-Saint-Clair.
20 Le principal d’entre eux, Michel Grenier, était un homme avec lequel les socialistes entretenaient un contentieux personnel car, en tant que responsable départemental de la FNSEA, il avait été l’un des principaux instigateurs de la manifestation d’Airan en 1982. Louis Mexandeau ne l’a pas oublié : « Je lui avais dit : un jour, vous nous le paierez ! Parce que, pendant qu’il était assis au repas de la préfecture et qu’Édith Cresson et le préfet, maculés d’œufs pourris et de mottes de terre, étaient en train de se changer pour venir à ce même repas (on les a attendus un bon moment), M. Grenier se pavanait ! » Entretien avec Louis Mexandeau, 7 novembre 2015.
21 Dans les cantons de Balleroy et d’Isigny-sur-Mer, le candidat socialiste recueillait 35,8 %, à Ryes, il obtenait 36 %, au Bény-Bocage, il était crédité de 33,4 %, à Trévières, il récoltait 32,9 %.
22 En 1981, il ne l’avait emporté que dans 14 cantons sur 42.
23 Nous entendons ici la circonscription de Vire telle qu’issue du redécoupage opéré en 1986.
24 Cf. les illustrations 1, 2 et 3 du cahier couleur.
Auteur
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Jérôme Letournel
Docteur en histoire contemporaine. Centre fe recherche d’histoire quantitative (CRHQ), UMR 6583
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