Le Maghreb à la Cité internationale universitaire de Paris

Une histoire politique et sociale (1925-2011)

Guillaume Denglos et Pierre Vermeren

p. 121-142


Texte intégral

1L’histoire des Maghrébins à la Cité internationale universitaire de Paris a très tôt été marquée par une forte politisation. Du nationalisme au gauchisme, de nombreux étudiants venant des trois pays de l’Afrique du Nord française se sont formés au militantisme politique à Paris, du début des années 1920 aux indépendances, puis jusqu’aux années 1980, dans le cadre de la coopération. Cette histoire s’inscrit dans la sphère coloniale, puis dans celle de l’opposition de plus en plus ouverte aux régimes nationalistes autoritaires en place au début des années 1960. Les maisons du Maroc et de la Tunisie, ainsi que le projet avorté de création d’une maison de l’Algérie, illustrent ce rapport étroit entre circulation estudiantine des deux côtés de la Méditerranée. On voit ainsi s’entrecroiser le contrôle étatique, la formation des élites et la contestation politique de la part d’étudiants ayant acquis dans la capitale française les moyens de s’affirmer face aux autorités.

Paris, capitale des nationalismes maghrébins : l’impossible création d’un pavillon de l’Afrique du Nord (1925-1940)

2La question de la construction d’un pavillon pour étudiants nord-africains, et plus globalement du logement des étudiants venant des colonies, se pose dès la deuxième moitié des années 1920. Dès 1925, le fondateur de la Cité universitaire de Paris, l’ancien ministre André Honnorat, n’est pas hostile à la construction d’une maison spécifique pour les Nord-Africains, mais il se heurte très vite au refus des résidents généraux Lucien Saint (Tunisie) et Théodore Steeg (Maroc), ainsi que des gouverneurs généraux de l’Algérie, Pierre Bordes, puis Jules Cardes. Le 13 septembre 1928, le ministère des Affaires étrangères annonce à André Honnorat que Théodore Steeg « a décidé de contribuer à l’aménagement d’un certain nombre de chambres dans la Cité universitaire de Paris, et qu’un crédit de 200 000 francs a été prévu à cet effet au budget chérifien ». Cependant, « il n’entre pas dans les intentions de la résidence générale de préconiser la construction d’une maison nord-africaine. Il serait à craindre, en effet, que les étudiants originaires de nos diverses possessions s’y rencontrent et y acquièrent, à notre détriment, un sentiment de solidarité musulmane qui, jusqu’ici leur a fait défaut. Pour occuper les chambres réservées au Maroc, M. Steeg aurait l’intention de désigner, en principe, des étudiants français, et exceptionnellement seulement des étudiants musulmans. Ainsi, les étudiants français ou indigènes de l’Afrique du Nord auront toute facilité pour se mêler aux étudiants français de la Métropole1 ». À court terme, les autorités coloniales du Maroc et de l’Algérie préfèrent financer quelques chambres, parfois avec l’aide d’entreprises comme la Banque d’État du Maroc, que de s’engager dans un projet de plus grande ampleur. Cette position est maintenue tout au long des années 1930, malgré les tentatives d’André Honnorat, notamment auprès de Lyautey, de Lucien Saint, résident général à Rabat de 1929 à 1933 et des délégations financières de l’Algérie2. Pour agrandir la Cité universitaire, André Honnorat est alors plus heureux dans ses relations avec les pays d’Amérique du Nord et d’Amérique Latine, d’Europe ou l’Extrême-Orient (Japon…). Pour les colonies françaises, seul l’Indochine construit un pavillon en 1930.

3La lettre du ministère des Affaires étrangères rappelant la position de Théodore Steeg établit les bases du problème posé par l’arrivée dans la deuxième moitié des années 1920 de la première génération, dite génération des pionniers3, d’étudiants maghrébins dans la capitale française. Nonobstant la présence d’Habib Bourguiba, qui loge à la chambre no 114 du pavillon Deutsch de la Meurthe en 1925-19264, l’absence relative du « Maghreb » à la Cité dans l’entre-deux-guerres est également due à la faiblesse du nombre d’étudiants et à leur potentielle dangerosité pour les autorités coloniales (outre le fait que l’Algérie est alors un territoire national français). Concernant les étudiants tunisiens en France, on en compte environ 130 en 1933, et environ 300 à la fin des années 19305. Les Algériens et les Marocains sont encore moins nombreux. On compte à peine 37 étudiants algériens en 19326. Quant aux Marocains, seuls une dizaine parviennent à obtenir le baccalauréat à la fin des années 1920, et partent effectuer leur cursus universitaire dans la capitale française. L’exemple de Bourguiba est néanmoins symbolique, car il incarne la trajectoire de ces étudiants venus apprendre la culture française pour mieux ensuite combattre la puissance coloniale. Souvent formés dans les écoles du colonisateur, ces jeunes constituent les premiers cadres d’un mouvement nationaliste qui se veut unitaire, en voulant transformer, sémantiquement tout d’abord, l’Afrique du Nord française en « Maghreb ». La faiblesse numérique est compensée par une forte politisation et la constitution d’associations très dynamiques, à l’image de l’Association des étudiants musulmans nord-africains (AEMNA)7.

4En effet, durant l’entre-deux guerres, Paris est incontestablement la capitale des nationalismes maghrébins8. C’est dans cette ville que se côtoient, que s’organisent, et se politisent dans une relative liberté des mouvements les étudiants et les travailleurs nord-africains. Le processus de structuration des nationalismes apparaît, dans un premier temps, contrasté. Il est déjà avancé en Tunisie, avec la création en 1920 du parti du Destour par le cheikh Abdelaziz Thaâlbi. Du côté algérien, la naissance de l’Étoile nord-africaine à Paris, et de son journal El Ouma en 1926 à l’initiative de Messali Hadj, majoritairement composée d’ouvriers kabyles, participe au même processus visant à émanciper les colonisés par la conquête de droits, sans envisager encore clairement l’indépendance. Au Maroc, c’est par le biais de la première génération des étudiants, issus de l’école des fils de notables mise en place par Lyautey, que les jeunes nationalistes échangent et se structurent politiquement avec les militants tunisiens et algériens de Paris. L’AEMNA constitue la matrice des revendications politiques et culturelles des jeunes élites nord-africaines. C’est dans cette association qu’on retrouve, pour reprendre l’expression de Charles-Robert Ageron, tout le « gotha du nationalisme maghrébin9 ». La création de la revue Maghreb à Paris en 193210, à l’initiative de l’avocat Robert-Jean Longuet11 et des jeunes étudiants nationalistes Mohamed Hassan Ouazzani, Ahmed Balafrej, Omar Abdeljalil ou Habib Thameur, incarne la posture à la fois nationale et pan-maghrébine des revendications anticoloniales. Néanmoins, la répression des mouvements nationalistes au Maroc et en Algérie en 1937, puis en Tunisie l’année suivante, ainsi que le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale, brisent provisoirement cette dynamique et l’accès des étudiants maghrébins à la Métropole.

La création des maisons du Maroc et de la Tunisie : le contrôle par le logement (1945-1953)

5Tout change à la Libération. À la rentrée 1945-194612, la Cité universitaire de Paris accueille 120 étudiants algériens (dont cinq femmes), 55 Tunisiens (dont dix femmes) et 50 Marocains (dont dix femmes). Le chiffre paraît faible au regard des 3 134 étudiants logés dans l’ensemble du parc longeant le boulevard Jourdan. Pourtant, si l’on se penche sur le nombre d’étudiants « coloniaux » (323), les Nord-Africains représentent les deux tiers des effectifs. Cette augmentation significative oblige les autorités à réagir. En effet, personne n’a oublié que c’est à Paris que se sont formés les cadres des partis politiques nationalistes qui contestent directement l’autorité française sur place, en réclamant désormais l’indépendance : Parti du peuple algérien (1937), Parti du Néo-Destour (1938), Parti de l’Istiqlal (1943), Parti démocratique de l’indépendance (1946), Mouvement pour le triomphe des libertés démocratiques (1946)… Face à la crise du logement dans le Paris de l’après-guerre, des hôtels et des foyers servent de dérivatif pour les Nord-Africains qui n’ont pas trouvé de place à la Cité universitaire. Le siège de l’AEMNA au 115 du boulevard Saint-Michel accueille un foyer offrant une salle de réunion et un restaurant à un prix raisonnable. Le foyer ferme en novembre 1947, mais la cantine continue de fonctionner grâce à une subvention de l’Office de Tunisie13. À l’automne 1945, un Foyer marocain est installé au 21 de la rue Serpente, avec « vraisemblablement des fonds nationalistes ou fournis par des commerçants marocains sympathisants de l’Istiqlal14 ». Pour contrer cette influence nationaliste, les autorités de Rabat acquièrent en octobre 1946 un hôtel situé au 26 rue Bonaparte, non loin de l’ancien appartement de… Lyautey ! Transformé en foyer, cet hôtel est destiné à la fois aux Français du Maroc et aux Marocains. Ces derniers, majoritairement indépendantistes, sont plus importants en nombre. La tension ne cesse de s’accroître entre les deux groupes du fait de la crise politique entre le résident général Alphonse Juin et le sultan Sidi Mohamed Ben Youssef. Que ce soit à Tunis ou à Rabat, les administrations coloniales décident de prendre les devants pour améliorer le contrôle de cette population dès les années 1946-1947. Le résident général de France en Tunisie, le général Charles Mast, et son directeur de l’Instruction publique Henri Gaston, entreprennent en octobre 1946 les démarches pour réaliser une « maison des étudiants tunisiens ». Au Maroc, le général Alphonse Juin, résident général depuis mai 1947, enjoint le 26 novembre son directeur de l’Instruction publique Roger Thabault de « viser aux réalisations les plus urgentes » :

« C’est pourquoi j’insiste pour la mise rapide en chantier d’un pavillon du Maroc à la Cité universitaire de Paris. Des renseignements récents me poussent à renoncer à la création d’un foyer dont les avantages apparaissent incertains dans la situation présente. Le crédit supplémentaire que vous comptez demander pour des bourses pourra peut-être bénéficier à certains élèves français ; l’intérêt politique commande néanmoins de faire un effort en faveur des musulmans. Mises à part les subventions qui nous permettront de reprendre à Paris principalement un contrôle nécessaire, ce crédit devra permettre de quadrupler au moins la somme consacrée l’an dernier aux étudiants musulmans et d’augmenter le taux des bourses (d’une évidente faiblesse) comme leur nombre15. »

6Le choix des architectes, Jean Sebag pour la Maison de la Tunisie, et Albert Laprade16 pour la Maison du Maroc n’est pas anodin. Tous deux ont fait carrière grâce à leurs liens avec les milieux résidentiels. Albert Laprade est, entre autres, l’architecte choisi par Lyautey pour réaliser le bâtiment de la résidence générale à Rabat en 1918. C’est également lui qui a construit le musée des Colonies17, ainsi que les pavillons du Maroc et de la Tunisie pour l’exposition coloniale du bois de Vincennes en 1931. Un projet piloté, là encore, par Lyautey… Enfin, Laprade connaît bien la Cité universitaire. Il a déjà édifié la Maison de Cuba « Abreu de Grancher » en 1933, et il conduit après-guerre la construction de la Maison des étudiants d’Outre-mer (Lucien Paye). Quant à Jean Sebag, c’est un proche de Bernard Zherfuss, architecte en chef du gouvernement tunisien. Né en 1909 à Tunis dans une famille juive tunisienne, Jean Sebag a participé à la construction d’un sanctuaire musulman à Sidi Bou-Saïd ainsi qu’à la création de 120 logements à Hussein-Dey en Algérie18. Faisant partie du Mouvement moderne, il a également plusieurs projets de construction de logements en cours en région parisienne (notamment à Boulogne-Billancourt), lorsqu’il est chargé d’établir les plans de la Maison de la Tunisie à la Cité universitaire. Fort de cette volonté politique, le processus de construction des deux pavillons est mené à bien. Suite à l’engagement des autorités françaises en Tunisie et au Maroc auprès de l’Académie de Paris et de la Fondation nationale de la Cité universitaire, la donation de la Maison de la Tunisie est effectuée le 9 juillet 1948, et celle de la Maison du Maroc le 7 juillet 194919. Les permis de construire sont délivrés en 1951. La Maison du Maroc va cependant prendre du retard.

7En effet, outre le bâtiment financé par la résidence générale, l’entrepreneur Jean Walter obtient du général Juin l’autorisation de construire un pavillon de 92 chambres supplémentaires. Jean Walter n’est pas un inconnu des autorités coloniales. En 1925, il détecte à une vingtaine de kilomètres d’Oujda, au lieu-dit de Zellidja, un important filon de zinc et de plomb. Cette trouvaille minière fait sa fortune. Il fonde la Société anonyme minière de Zellidja20. Souhaitant faire œuvre de bienfaisance, il crée en 1938 les « bourses Zellidja », puis en novembre 1945 la « Fondation nationale des bourses Zellidja ». Il s’agit de permettre à des jeunes gens de 17 à 19 ans d’effectuer de un à trois voyages en solitaire dans un pays étranger pour approfondir un sujet de recherche. En 1949, 300 bourses sont ainsi attribuées aux lycées de la France métropolitaine, ainsi que du Maroc et de la Tunisie. Les conditions que Jean Walter posent pour la construction de son pavillon eurent le don d’agacer la Fondation nationale et le recteur Jean Sarrailh21. En effet, Jean Walter précise, en janvier 1950, que cet immeuble est destiné uniquement à des boursiers Zellidja et à des étudiants français du Maroc, sans immixtion d’étudiants métropolitains. Il souhaite également que deux chambres soient affectées à des élèves que lui-même ou ses héritiers désigneront. Dans le cas où l’ensemble du bâtiment ne serait pas rempli, « une préférence serait donnée aux élèves algériens, et ensuite aux élèves alsaciens ou francs-comtois22 »… Ces conditions sont en totale contradiction avec la règle du brassage. Jean Toutée, un des personnels administratifs les plus influents de la Cité, émit des critiques virulentes :

« Il ne semble pas qu’il y ait de grandes difficultés à réaliser la chose sous la forme d’un avenant à la Convention Maroc si ce dernier est d’accord. […] Ceci dit, je suis consterné de voir prendre aussi délibérément le contre-pied de ce qui est la base même de l’œuvre. Ségrégation des étudiants marocains, construction d’une pure et simple caserne sans aucune possibilité d’échanges, même internes, et même de simples contacts. L’ensemble du Maroc porte à 300 chambres alors que nous savons ce que donnent les maisons de cette dimension (300 chambres de Marocains : bonne chance au Directeur…). Bien entendu, on ne peut refuser 100 chambres de plus et nous aurons à nous débrouiller pour limiter les dégâts. Mais on ne peut se défendre de l’impression que M. W. ne sait ce que c’est que la Cité et que s’il le savait il entendrait peut-être raison avant qu’il ne soit trop tard23. »

8D’autre part, la Fondation nationale souhaite que le « pavillon Zellidja » soit jumelé avec la Maison du Maroc. Ces critiques furent entendues par Jean Walter. Un compromis est finalement trouvé lors du conseil d’administration de la Fondation nationale de la Cité du 2 juillet 1951. Les deux immeubles sont reliés par une galerie. Sur le plan administratif, le pavillon Walter est remis gratuitement à l’État chérifien, pour être ensuite rétrocédé à l’université de Paris. Le cabinet Laprade est chargé de dessiner « l’ensemble marocain ».

9L’architecture de la Maison de la Tunisie se veut avant tout fonctionnelle et moderne. Rien dans la façade ne rappelle l’architecture traditionnelle de la Régence. Le bâtiment comporte deux ailes inégales donnant sur une cour intérieure qui a été aménagée en un patio planté d’arbres et d’arbustes. La Fondation accueille une cafétéria, une bibliothèque, une salle de lecture, une salle de réunion avec une scène-plateau. Les 126 chambres ont chacune un cabinet de toilette individuel tandis que chaque étage possède ses services sanitaires (douches et WC) et une cuisine24. La décoration intérieure mêle modernité et tradition arabo-berbère réinventée. Les chambres ainsi que les espaces collectifs sont équipées en tapis confectionnés par des artisans tunisiens. Diverses décorations murales ont également été confiées aux peintres Ben Abdallah et Boucherle25.

10À la Maison du Maroc, c’est le classicisme qui prévaut avec une touche traditionnelle rappelant l’esthétique du pays d’origine. Ainsi, une porte monumentale et des tuiles de couleurs vertes rappellent l’architecture marocaine, sans cependant tomber dans le style néo-mauresque de l’entre-deux-guerres alors en vogue dans l’Empire chérifien. Une tour de six étages relie le bâtiment principal à une galerie, elle-même se raccordant au bâtiment de la Fondation Zellidja. Comme la Maison de la Tunisie, le pavillon du Maroc est équipé pour chaque étage des services communs (douches, WC, cuisines) et possède une salle de réunion capable d’accueillir une centaine de personnes. Une cafétéria complète les équipements mis à disposition des résidents26. Alors que la situation est en passe de s’améliorer pour les Marocains et les Tunisiens, les étudiants algériens continuent de vivre dans des conditions souvent précaires. Étant « légalement des Français comme les autres, ils ne bénéficient pas d’un pavillon national à la Cité universitaire, ni d’hôtel réservé27 ». En novembre 1953, ils se regroupent en une Union des étudiants algériens de Paris (UEAP) et en profitent pour rédiger une Charte revendicative :

« 1o) Pré salaire ou bourse généralisée ; 2o) pavillon de l’Algérie à la Cité universitaire ; 3o) Voyage gratuit annuel ; 4o) débouchés assurés en Algérie28. »

11En février 1955, l’UEAP mène une enquête sur le logement des étudiants algériens. Sur 100 d’entre eux, seuls 10 sont, désormais, logés à la Cité universitaire dans différents pavillons, 22 dans des maisons communautaires d’étudiants (comme la résidence Jean Zay d’Antony) et 68 dans des chambres d’hôtels ou chez des particuliers29. Alors que les pavillons du Maroc et de la Tunisie sont sortis de terre, le problème reste entier pour les Algériens à la veille de la guerre d’indépendance.

Le moment nationaliste (1953-milieu des années 1960)

12L’image d’un Maroc et d’une Tunisie modernes véhiculée par l’architecture masque mal le profond malaise qui ébranle cette région. L’ouverture du pavillon tunisien le 15 avril 1953, et celle du pavillon marocain le 15 octobre 1953 s’effectuent alors que la situation politique dans les protectorats est explosive. L’arrivée à Tunis du résident général Jean de Hautecloque en janvier 1952, puis l’assassinat du syndicaliste Ferhat Hached en décembre de la même année amorcent un cycle de violences qui ne cesse qu’en 1955. Au Maroc, la déposition musclée et l’exil en Corse, puis à Madagascar, du sultan Sidi Mohamed Ben Youssef le 20 août 1953 par le résident général Augustin Guillaume et une camarilla de prépondérants autour du contrôleur civil Philippe Boniface, ouvrent également une période de graves troubles où les attentats et les répressions policières se mêlent inextricablement. Les directeurs des deux pavillons sont nommés directement par la résidence générale. Eugène Tardieu, inspecteur de l’Instruction publique, est désigné en mars 1953 premier directeur de la maison de la Tunisie à l’initiative du résident général Jean de Hautecloque. Pour la Maison du Maroc, c’est à Jean Arnaud, ancien directeur de la Télévision et de Radio Maroc, que le résident général Augustin Guillaume décide « de confier la direction du pavillon marocain de la Cité universitaire, tâche particulièrement délicate au moment où il est essentiel de ramener à la France de jeunes intelligences égarées par les mirages du nationalisme30 ».

13En parallèle, les organisations étudiantes maghrébines sont en pleine recomposition. L’AEMNA, devenue entre-temps l’AEMNAF (l’AEMNA en France), perd du terrain au profit de nouvelles organisations. L’idéal pan-maghrébin, encore vif au sortir de la guerre, perd définitivement du terrain par rapport aux patriotismes nationaux. Dès 1951, des étudiants marocains déposent une demande d’autorisation pour la création d’une Union nationale des étudiants marocains31 (UNEM), qui est refusée sur recommandation du général Juin. Il faut attendre 1954 pour qu’une Union des étudiants marocains de Paris voie le jour. L’Union générale des étudiants tunisiens (UGET) est fondée à Paris en juillet 1953, suivie deux ans plus tard par l’Union générale des étudiants musulmans algériens (UGEMA). Face à ces concurrents, l’AEMNAF disparaît en 1956, au moment où le Maroc et la Tunisie obtiennent leurs indépendances.

14À la rentrée universitaire 1953-1954, on compte 148 résidents algériens (dont 19 femmes), 154 marocains (dont 15 femmes) et 212 tunisiens (dont 28 femmes). Cette population demeure sous étroite surveillance. Cela n’empêche pas certains de jouer au chat et à la souris avec les agents des Renseignements généraux. Ainsi, un officier de police constate, dépité, qu’il « est possible » que l’étudiant en médecine aux idées nationalistes Meddah Abdelaziz « ait été hébergé clandestinement par des compatriotes étudiants logeant à la Maison du Maroc de la Cité universitaire, aucun contrôle efficace n’ayant été exercé jusqu’ici sur les occupants de cet immeuble32 ». Il n’est en effet pas rare que les militants du Hizb33 domiciliant dans le pavillon du Maroc comme Ezzedine Laraki, futur ministre de l’Éducation, ou Mohamed Mehdi Abdeljalil, « déploient, dans les milieux estudiantins nord-africains de la Cité Universitaire et du Quartier latin, une vive activité en faveur des théories nationalistes préconisées par l’Istiqlal34 ». Une perquisition est effectuée le 15 juillet 1954 par un commissaire de police et deux inspecteurs, en vertu d’une commission rogatoire délivrée par un juge d’instruction de Casablanca, dans la chambre de l’étudiant en médecine Ahmed Snoussi. Soupçonné de trafic d’armes, ce dernier est finalement relaxé35, la police l’ayant confondu avec son frère…

15Toutefois, les policiers ont bien noté « la présence de diverses inscriptions à l’intérieur de la Maison du Maroc en bordure des trottoirs “Vive le Maroc libre” ». Peu avant son départ de son poste de directeur de la Maison du Maroc en 1955, Jean Arnaud confie à son successeur Yves Renouard que « sur le plan psychologique et moral, la situation est plus délicate. J’ai hérité en octobre 53, avec la consigne de prendre tout le monde, d’une soixantaine d’étudiants de la rue Bonaparte marqués par la propagande communiste et nationaliste et cette hypothèque à gêné mon action. Après avoir eu de vastes projets culturels, j’ai dû me résoudre à un semi-immobilisme. Ce n’était pas dans mon tempérament36 »… Malgré les difficultés de son prédécesseur, et avec l’appui de la Fondation nationale, Yves Renouard, historien médiéviste enseignant à la Sorbonne, parvient à éviter une explosion de la Maison, en misant sur les activités culturelles et aidant activement les résidents à la réussite de leurs études (création d’une bibliothèque bien fournie en ouvrages scientifiques, proximité avec les étudiants…)37. Le retour du sultan d’exil le 16 novembre 1955 et l’indépendance du pays a également bien aidé à calmer les esprits.

16Dès l’indépendance de la Régence acquise, les nouvelles autorités tunisiennes tentent de reprendre en main la maison face aux autorités françaises. Le 23 septembre 1957, l’ambassade de Tunisie saisit le ministère des Affaires étrangères « d’une demande relative à la modification des statuts, et notamment l’article 3 de l’acte de donation, aux termes duquel peuvent être admis, indistinctement les étudiants tunisiens et français nés ou résidents en Tunisie38 ». L’ambassade de Tunisie conteste également le fait que le directeur soit de nationalité française. Le manque d’universitaires tunisiens capables de diriger la Maison à cette époque est une des causes expliquant que le premier directeur tunisien n’est nommé qu’en 196239. À la Maison du Maroc, il faut attendre 1964 ! D’autre part, la question de la mixité n’est pas d’actualité au pavillon tunisien (à l’image de la majorité des maisons de la Cité avant 1968)40. Le directeur s’oppose fermement à l’admission d’étudiantes craignant « une promiscuité fâcheuse avec nos jeunes gens41 ». Dès la fin des années 1950, la Maison de la Tunisie devient un bastion des autorités bourguibiennes et le reste pendant des décennies. Peu après la crise de Bizerte, au cours de laquelle l’armée française affronte les troupes tunisiennes pour le contrôle de la base navale, entre le 19 et le 23 juillet 1961, la Maison de la Tunisie est victime d’un attentat à l’explosif : un engin est lancé contre la façade vitrée de la salle de réunion le 14 août 1961. Divers locaux du sous-sol, du rez-de-chaussée et des deux premiers étages sont endommagés par les éclats de verre42.

17Cet attentat fait aussi écho au contexte de la guerre d’Algérie. La création d’un pavillon algérien à la Cité universitaire revient sur la table dès 1954 à l’initiative du gouvernement général de l’Algérie43. Le 8 avril 1955, une conférence s’ouvre au ministère de l’Éducation nationale pour examiner le projet. Le résultat des discussions aboutit à un refus. La dégradation de la situation sécuritaire sur place joue un rôle central dans cette décision44. Faute de documents sur les activités politiques des étudiants algériens à la Cité universitaire durant la guerre d’indépendance, il est très difficile de savoir leur degré de militantisme. Étaient-ils sympathisants du Front de libération nationale (FLN) ? Du Mouvement national algérien (MNA) ? Il est probable qu’il y eut une forte solidarité des résidents marocains et tunisiens envers leurs « frères » algériens.

18En mai 1956, à la stupeur des étudiants d’extrême droite du Cercle Fustel de Coulanges, des tracts en faveur de l’indépendance de l’Algérie « ont été abondamment distribués » dans la Cité « et la police appelée n’est survenue que lorsque cette distribution a été achevée45 ». Plus généralement, les effectifs d’étudiants algériens en France n’ont cessé d’augmenter depuis le début des années 1950. Cependant, dès 1956, l’UGEMA décide de disperser ses militants vers d’autres pays. Dès la rentrée 1957-1958, 33 boursiers décident de poursuivre leurs études hors de France. L’arrestation du secrétaire général de l’UGEMA, le 12 novembre 1957, à Montpellier, et la tenue de son troisième congrès à huit clos en région parisienne, du 23 au 26 décembre 1957, actent la proximité de cette organisation avec le FLN. L’UGEMA est cependant dissoute le 28 janvier 1958, tandis que la Section universitaire de la fédération de France du FLN subit une importante vague d’arrestations jusqu’en 195946. Le contexte de la guerre d’Algérie et son intensité à Paris (rafles d’Algériens, règlements de comptes entre le FLN et le MNA, journée du 17 octobre 1961, drame du métro Charonne…) ont joué un rôle supplémentaire dans le militantisme des étudiants Nord-Africains jusqu’en 1962, avant que la solidarité maghrébine ne se fracasse sur la rivalité entre les régimes de Ben Bella et d’Hassan II dès 1963. Une fois les indépendances obtenues, la Cité universitaire va être désormais le théâtre, à des degrés divers, de la montée de la contestation des nouveaux régimes autoritaires de la part des étudiants gauchistes.

L’année 1968 et la décennie 1970 : les voies divergentes du « Maghreb » à la Cité universitaire

19Le mouvement de mai 1968 a eu des répercussions contrastées sur la Cité internationale universitaire de Paris47. Si certaines maisons ont clairement été touchées par la prise de contrôle des résidents de gauche ou par une grève des loyers (Fondation hellénique, Collège d’Espagne, Maison de l’Italie, Fondation Andrea de Gouveia, Maison de l’Outre-mer, Fondation argentine…), d’autres résidences sont restées calmes, voire hostiles aux mouvements de protestations contre le pouvoir gaulliste (Maison des étudiants arméniens, Fondation Biermans-Lapôtre, Maison du Mexique, Maison des étudiants canadiens, Fondation des États-Unis…). Ce contraste peut s’appliquer aux maisons du Maroc et de la Tunisie. Si la première a joué un rôle marquant dans l’histoire de mai 1968 à la Cité, la seconde n’a pas bougé. En parallèle, les négociations pour la création d’une maison de l’Algérie, pourtant bien avancées, échouent du fait des aléas de la coopération entre la France et son ancienne colonie, indépendante depuis six ans à peine.

20Le Délégué général de la Cité internationale universitaire de Paris, Pierre Marthelot, décide, peu après son entrée en fonction, de relancer le projet de construction d’une maison de l’Algérie en décembre 1966. L’ambassadeur d’Algérie en France, Rhéda Malek, est dès le départ au courant de la démarche. Dans sa séance du 27 septembre 1967, le conseil d’administration de la Fondation nationale de la Cité internationale universitaire de Paris entérine la décision de construire un pavillon pour les étudiants algériens. Un accord de principe avec les diplomates algériens semble se dessiner. Le 11 mars 1968, soit deux mois avant la révolte étudiante, une importante réunion entre la Fondation nationale, le Quai d’Orsay, l’association « France-Algérie » et l’ambassade d’Algérie, a pour objectif « d’examiner comment on va procéder pour trouver le promoteur et les fonds ». Le procès-verbal48 rendant compte des discussions des représentants des quatre entités laisse à penser que le processus de construction de la maison de l’Algérie est bien lancé.

21Pierre Marthelot se montre confiant. Il indique au secrétaire d’ambassade chargé des affaires culturelles, M. Benstaali, que le terrain, situé au 48 boulevard Jourdan, peut accueillir un immeuble de 150 chambres destiné aux étudiants algériens. En ce qui concerne le promoteur de la future maison, le Délégué général propose trois solutions aux autorités algériennes. La maison pourrait être gérée soit par le gouvernement algérien, soit par une association existante, soit par une entité créée à cet effet. M. Benstaali précise « qu’il faudrait envisager avec une attention particulière la solution consistant à créer une association ad hoc qui pourrait comprendre, par exemple, le gouvernement algérien, le gouvernement français, une association “France-Algérie”, peut-être aussi l’Algérie, la France, etc… ». Le Délégué général estime le coût de 7 à 10 millions de francs. Les travaux pourraient démarrer durant l’année universitaire 1970-1971. De son côté, M. Poussard, directeur adjoint des relations culturelles du Quai d’Orsay, « estime qu’il est bon de préciser aussi que la création d’une maison à la Cité universitaire ne signifie pas la création d’un foyer d’accueil pour tous les ressortissants du pays considéré arrivant à Paris. Il s’agit uniquement d’une maison de résidence, d’études et de loisirs pour étudiants algériens qui suivent des cours de faculté ou d’enseignement supérieur à Paris ». Un rapport technique est transmis à M. Benstaali qui confirme l’intérêt de son gouvernement pour le projet. Il promet de transmettre « incessamment à Alger un compte-rendu de la présente réunion » et de répondre aux questions concernant le promoteur, le mode de financement et le choix de l’architecte49.

22Malgré l’optimisme affiché par toutes les parties en présence, deux événements mettent fin au projet. D’une part, le terrain choisi est occupé par des bâtiments provisoires que gère l’École normale supérieure de jeunes filles. Le « déménagement était prévu pour 1968-1969. Mais le calendrier a été remis en question par la décision du ministère de l’Éducation nationale d’affecter provisoirement le bâtiment destiné à l’École normale supérieure à une unité pédagogique des étudiants en chirurgie dentaire, d’où le report de la Maison de l’Algérie50 ». Ce contretemps est doublé par la décision d’Edgar Faure, ministre de l’Éducation nationale, ne pas augmenter le nombre d’étudiants sur le site de la Cité universitaire51. Malgré les protestations des autorités de cette dernière, le projet est donc abandonné en juillet 1969 à l’initiative de la France. Un rapide coup d’œil sur le contexte difficile de la coopération entre les deux pays à la fin des années 1960 permet d’avoir une idée sur les raisons de fonds qui ont poussé le gouvernement français à interrompre le projet. Si un accord est trouvé le 27 décembre 1968 pour régler l’émigration des Algériens en France, cela ne signifie pas que les relations entre Alger et Paris soient redevenues normales. L’alignement de l’Algérie sur les pays de l’Est, la rhétorique tiers-mondiste du régime de Houari Boumediene, le départ du général de Gaulle en 1969, la limitation des entrées des ouvriers algériens en France et les taxations commerciales52 ont certainement pesé sur le processus décisionnel final. La création d’une maison de l’Algérie devient un véritable serpent de mer revenant régulièrement sur la table, sans jamais aboutir.

23En ce qui concerne la Maison du Maroc, la révolte de 1968 a clairement constitué une période de basculement. Tous les ingrédients étaient réunis pour une explosion de la contestation à l’égard du régime hassanien. Le démantèlement d’un présumé complot de l’Union nationale des forces populaires (UNFP) en 1963, les émeutes populaires de Casablanca en mars 1965, l’enlèvement de Mehdi Ben Barka en plein Paris en octobre 1965, et la répression imposée par le général Mohamed Oufkir à la gauche marocaine, ne pouvait que radicaliser les étudiants. À l’intérieur de la Maison, Abdelmalek El-Ghoul, le premier directeur marocain nommé en 1964, tente de faire régner un ordre moral auprès des résidents (refus des visites féminines, pas de compromis avec les revendications des étudiants proches de l’UNEM…). Si le successeur d’El-Ghoul, Omar Senoussi, parvient « selon la consigne de son gouvernement53 », à tenir à peu près son établissement, la maison apparaît en état de quasi dissidence dès 1966. Comme le remarquent les Renseignements généraux, « prévue pour héberger 300 étudiants, dont un tiers d’étrangers, cette résidence est pratiquement totalement occupée par des ressortissant marocains. Toutefois, la direction s’abstenant d’exercer un contrôle strict des résidents, des clandestins y trouvent asile. Depuis l’indépendance du Maroc, la gestion de l’établissement était assurée par un fonctionnaire du gouvernement chérifien ». La crise de mai 1968 sert de détonateur, alors que la situation dans la maison est tendue :

« Aussi, dès le déclenchement des troubles dans l’Université, le directeur a-t-il été contraint, sous la pression des résidents gauchistes, de quitter son poste pour être remplacé par un “Comité de gestion” formé d’étudiants extrémistes. Aussitôt, l’Ambassade du Maroc a cessé de subvenir à l’entretien de l’établissement, position sur laquelle elle n’est pas revenue depuis lors. La Maison du Maroc n’a, depuis, jamais cessé d’être un foyer d’activiste politiques aux mains des membres de l’Union nationale des étudiants du Maroc (UNEM), sympathisants de l’Union nationale des forces populaires (UNFP), fondée par Mehdi Ben Barka, et du parti de libération et du socialisme (PLS), dirigé par Ali Yata, emprisonné à Rabat depuis août 1969. Ces éléments ne manquent jamais d’utiliser la salle des fêtes de la résidence pour tenir meetings et réunions, chaque fois que l’actualité leur en fournit les raisons54. »

24Le directeur d’origine marocaine ayant été chassé, il est remplacé provisoirement, à l’initiative de la Fondation nationale, par François Della Sudda. Ce dernier est une figure importante. Ancien professeur, militant anticolonialiste membre du Parti socialiste unifié (PSU) et bon connaisseur du Maroc et de l’Algérie55, Della Sudda va soutenir tout au long de son mandat les revendications politiques des résidents marocains hostiles au régime hassanien, quitte à entrer en conflit avec le Délégué général Pierre Marthelot. D’une manière générale, avant qu’il ne soit frappé par les tentatives de coup d’État de Skhirat en juillet 1971, puis du « Boeing » en août 1972, le régime hassanien n’arrive pas à contrôler de manière satisfaisante ses opposants en France. Le « régime d’exception » (1965-1970), puis le multipartisme de façade, que prône le pouvoir, l’empêche de sélectionner au mieux des étudiants fidèles.

25Ce n’est pas le cas en Tunisie où le Parti socialiste destourien (PSD)56, seule structure politique autorisée, ainsi que les « organisations nationales57 », encadrent au plus près la société à partir du début des années 196058. Ce contexte explique pourquoi, contrairement aux résidents marocains, les Tunisiens sont restés en dehors de l’agitation estudiantine. Sur les 140 étudiants que compte la maison, 90 % des résidents sont de nationalité tunisienne, dont une majorité sont des boursiers du gouvernement tunisien et de la coopération technique du gouvernement français. L’autorité du directeur Abdelaziz Ghacham, un docteur en médecine préparant l’agrégation, est, selon les Renseignements généraux, quasi absolue. Pour être admis comme résident, il faut montrer patte blanche. Ainsi, les « résidents, tous favorables au régime destourien du président Bourguiba, sont membres de l’Union générale des étudiants tunisiens (UGET) dont le siège se situe rue de Monsigny dans le 2e arrondissement59 ». Dans ces conditions, on comprend aisément que « les événements de mai-juin 1968 n’aient eu aucune incidence sur le comportement des résidents de la maison. Faisant tous l’objet d’une sélection sévère sur le plan politique par les autorités tunisiennes, ils se sont cantonnés dans la plus prudente neutralité. D’autre part, l’autorité exercée par le directeur n’autorise aucun désordre de quelque nature que ce soit ». Contrairement à la Maison du Maroc, « aucun clandestin n’a pu trouver asile dans cette fondation60 ».

26Deux ans après les événements de mai 1968, plusieurs maisons continuent d’être en état de quasi sécession, à l’image du Collège d’Espagne, de la Fondation argentine, de la Maison de l’Afrique et bien entendu de la Maison du Maroc. Cette dernière « continue, selon le délégué général de la Cité, à vivre hors des règles communes ». De plus, « la maison vit au jour le jour dans une situation dont la frénésie politique qui l’anime n’arrive pas à masquer la gravité61 ». Les années 1970-1975 marquent l’apogée de la dissidence de la Maison du Maroc. Le comité des résidents est contrôlé par l’UNEM et la salle de conférences sert de lieu de meeting pour nombre d’organisations réprimées dans le royaume, à l’image du Mouvement du 23 mars et d’Ilal Amam (En avant !). Une occupation par les résidents se déroule au début de l’année 1970 pour protester contre la mise en résidence surveillée du militant de l’UNEM Hamid Barrada par la police française62. Face à la menace d’un rattachement de la Maison à la Fondation nationale et à un retour de l’ambassade du Maroc au sein du conseil d’administration, une grève de la faim est déclenchée en juin 1970, sous le slogan « Assassins de Ben Barka, vous n’entrerez pas. Non au retour de l’ambassade63 ! » À la suite de ces manifestations, un statu quo précaire s’installe. Devant une telle situation, la Fondation nationale décide, en juin 1970, de fermer l’établissement le 15 juillet. Cependant, « cette mesure, que l’administration veut salutaire, a déjà un double effet : elle entraîne de violentes réactions de la part des résidents et elle plonge les autorités chérifiennes dans l’embarras. Celles-ci redoutent en effet, en reprenant la direction de la maison, de se trouver rapidement en difficulté avec les éléments révolutionnaires64 ». La fermeture est finalement annulée.

27Le retour des étudiants « insurgés » au pays est marqué par le sceau de la répression. L’exemple le plus célèbre est celui d’Anis Balafrej. Fils d’Ahmed Balafrej65, il participe à l’agitation estudiantine dans la maison du Maroc66 alors qu’il étudie à l’École centrale de Paris. De retour au Maroc, il continue à militer dans les rangs de l’extrême gauche et crée à l’automne 1971 une agence de presse clandestine. Enlevé, il est mis au secret dans la prison de Derb Moulay Cherif et torturé. Il est condamné à quinze ans de prison en août 197367. Cet épisode fut marqué par une chaîne de solidarité des étudiants français à son égard. Il est surtout concomitant de la dissolution de l’UNEM le 24 janvier 1972. Devant les menaces de fermeture de la salle de conférences, et surtout de la Maison, par la Fondation nationale, une nouvelle grève de la faim de plus de 36 jours se déroule en août-septembre 1974. Fortement médiatisé, cet événement n’empêche pas la fermeture pour près de sept ans de la salle de conférences, véritable « Agora » de l’opposition de gauche en exil68. Si la Maison du Maroc reste un foyer de contestation durant toute la décennie 1970, l’université marocaine est progressivement mise au pas. Lorsque l’UNEM est à nouveau autorisée en 1978, une nouvelle génération marquée par l’islamisme en prend progressivement le contrôle dans les années 198069.

28En parallèle, la Maison de la Tunisie paraît bien plus calme. Certes, elle est brièvement occupée à deux reprises. Dans la nuit du 22 au 23 février 1972, une centaine d’étudiants venus de l’extérieur tentent d’occuper la maison pour protester contre la politique sociale et sécuritaire du président Bourguiba. Ils sont finalement expulsés par la police à trois heures du matin70. Au début du mois 1974, une grève de la faim d’étudiants tunisiens de gauche ayant pris possession du salon est stoppée « dans le calme sans que nous [la direction de la maison] ayons eu besoin d’avoir recours à la police71 ». Néanmoins, le contraste est important avec la Maison du Maroc. À aucun moment le pavillon tunisien et son comité des résidents, majoritairement destourien, ne rentre en dissidence effective avec le pouvoir du Moujahid Al-Akbar72.

La rupture des années 1980 ou l’émergence de nouvelles élites moins politisées

29Pour affaiblir leur opposition de gauche, les régimes maghrébins amorcent au milieu des années 1970 de nouvelles politiques éducatives et universitaires centrées sur l’arabisation, le démantèlement des filières de sciences humaines et le conservatisme social et religieux. La réislamisation des sociétés du sud de la Méditerranée va concourir à l’affaiblissement de la gauche et va laisser place à une nouvelle génération d’étudiants moins politisés. De plus, la fin des accords de coopération avec la France dans le domaine éducatif, au profit de professeurs arabisés, rebat les cartes de l’accueil des jeunes universitaires. Comme le remarque en 1989 la direction générale des relations culturelles, scientifiques et techniques du Quai d’Orsay, le problème que pose la situation des étudiants maghrébins en France « présente trois caractéristiques essentielles : l’importance de l’effectif en cause, l’insuffisance des ressources des non boursiers du Gouvernement français, la baisse du niveau des étudiants73 ». Si les fils et les filles des élites francophones continuent d’être formées dans les écoles et les lycées français (c’est particulièrement vrai au Maroc), les écarts se creusent irrémédiablement avec la majorité des élèves sortis de l’école publique arabisée.

30Les nouvelles générations maghrébines qui arrivent à la Cité universitaire à partir des années 1990 ont de moins en moins à voir avec les étudiants contestataires des décennies précédentes. Ces tendances structurelles se conjuguent avec les tentatives de reprise en main du pavillon marocain. Celui-ci est en effet menacé de fermeture par la Fondation nationale de la Cité, du fait de son endettement chronique depuis 1975. En juin 1980, un véritable ultimatum est envoyé aux autorités marocaines pour éponger 900 000 francs d’impayés. La décision de ces dernières de rénover la maison apparaît comme l’ouverture d’une nouvelle page. Le bâtiment est « marocanisé » sous l’angle de la « tradition et du modernisme » par la volonté d’Hassan II et de son décorateur attitré André Paccard avec l’ajout, entre autres, d’un patio andalou, d’un hamam, d’une salle de prière et d’un salon décoré de zelliges74. La nouvelle inauguration, le 6 octobre 1982, en présence du Prince héritier (l’actuel roi Mohamed VI) et du ministre de l’Éducation responsable de l’arabisation, Ezzedine Laraki, marque symboliquement la fin de la « dissidence gauchiste », mais certainement pas la fin du dynamisme culturel de cette institution durant la décennie 1980. Si les comités de résidents élus sont encore marqués à gauche pour plusieurs années, les islamistes deviennent majoritaires en 1995 et le restent jusqu’à la fin des années 1990. En parallèle, « une crise des squats » éclate durant l’hiver 1995-1996, puis entre 2001 et 2002. L’expulsion par la police des squatteurs et une nouvelle rénovation de la maison de 2002 à 2008 entérinent la « normalisation » d’un lieu au passé rebelle.

31De son côté, la Maison de la Tunisie connaît également un agrandissement en 1984. En 1989, un conflit éclate entre Tahar Manoubi, le directeur, et le comité des résidents. Ce dernier ne supportant visiblement pas la volonté de la nouvelle administration de mettre fin à certains passe-droits dans le pavillon. Le comité envoya « un dossier noir du directeur de la Maison de la Tunisie » au président Zine El-Abidine Ben Ali en personne. Isolé, le directeur fut remercié dans la foulée75… Ce bâtiment demeure jusqu’à la rénovation de la fin des années 2000 et la révolution de 2011, une des maisons les plus contrôlée de la Cité universitaire76. Depuis le Printemps arabe marqué par la chute du régime de Ben Ali, la Maison de la Tunisie apparaît en plein renouveau sur le plan culturel. Quant à la Maison du Maroc, les manifestations du Mouvement du 20 février de 2011 n’ont eu aucun impact sur le fonctionnement de l’établissement et du comité des résidents.

32Les quatre générations d’étudiants maghrébins qui se sont succédées à la Cité universitaire ont été marquées au fer rouge par les aléas politiques de leurs pays. Les pavillons du Maroc et de la Tunisie ont été, chacun à leur manière, les réceptacles des tensions politiques et sociales de leurs sociétés respectives. De la génération des pionniers de l’entre-deux guerres marquée par le nationalisme, en passant par celle du combat pour l’indépendance, de la contestation gauchiste et de la crise du système d’enseignement arabisé, toutes ont marqué de leur empreinte la Cité internationale universitaire de Paris. Les maisons du Maroc et de la Tunisie ont vu défiler une partie importante des élites ayant accédé, après leurs études, à des postes importants, que ce soit dans les domaines politique, économique ou culturel. Du tunisien Noureddine Hached77 à l’écrivain marocain Tahar Benjelloun, un inventaire à la Prévert ne suffirait pas pour montrer l’étendue des cadres des États maghrébins passés par la Cité. À cet égard, le nom du projet d’un nouveau pavillon baptisé « Habib Bourguiba78 » symbolise, et cristallise, les parcours politiques et intellectuels des Nord-Africains, devenus Maghrébins, depuis la fondation de la Cité universitaire en 1925.

Photographie de la Maison du Maroc prise probablement en janvier 1954 (c) CIUP/DR.

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Photographie de l’entrée d’honneur de la Maison du Maroc prise du côté du boulevard Jourdan, 31 octobre 1970 (AN, 20090013/ 1176).

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Couverture du Mémorandum transmis par le comité des résidents de la Maison du Maroc au délégué général de la Cité, 1972-1973 (AN, 20090013/ 1176).

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Couverture du Mémorandum exposant les revendications du comité des résidents durant la grève de la faim de juin 1974 (AN, 20090013/ 1176).

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Notes de bas de page

1 Dossier pavillon du Maroc (AN AJ16/7043).

2 Voir à ce sujet la correspondance d’André Honnorat avec Lyautey et Lucien Saint (AN 20090013/213).

3 Vermeren Pierre, La formation des élites par l’enseignement supérieur au Maroc et en Tunisie, thèse d’histoire, université de Paris VIII, 2000, dactyl.

4 Bourguiba est aussi accompagné d’une poignée de ses compatriotes à la Cité universitaire (Bessis Sophie et Belhassen Souhayr, Bourguiba, éd. Tunis, Elyzad, 2012, p. 60-62).

5 Vermeren Pierre, La formation des élites marocaines et tunisiennes. Des nationalistes aux islamistes (1929-2000), Paris, La Découverte, 2002, p. 83.

6 Ezzerelli Kaïs, « Les étudiants à l’école de la politique », in Générations. Un siècle d’histoire culturelle des Maghrébins en France, Paris, Gallimard, coll. « Génériques/CNHI », 2009, p. 95.

7 Ageron Charles-Robert, « L’Association des étudiants musulmans nord-africains en France durant l’entre-deux guerres. Contribution à l’étude des nationalismes maghrébins », Revue française d’histoire d’Outre-mer, t. lxxx, no 258-259, 1983.

8 Goebel Michel, Paris, capitale du tiers monde. Comment est née la révolution anticoloniale (1919-1939), Paris, La Découverte, 2017.

9 Ageron Charles-Robert, art. cité, 1983, p. 27.

10 Denglos Guillaume, La revue Maghreb. Une publication franco-marocaine engagée (1932-1936), Paris, L’Harmattan, 2015.

11 Fils du député socialiste Jean Longuet, il est également l’arrière-petit-fils de Karl Marx.

12 « Statistiques des résidents originaires de l’Union française » (AN AJ16/7031).

13 Vermeren Pierre, La formation des élites par l’enseignement supérieur, op. cit., p. 357.

14 Ibid., p. 357-358.

15 Lettre du général Juin au directeur de l’Instruction publique, 26 novembre 1947 (Archives diplomatiques de Nantes, 1 MA 30/5).

16 Culot Maurice et Lambrichs Anne, Albert Laprade. Architecte, jardinier, urbaniste, dessinateur, serviteur du patrimoine, Paris, Norma Éditions, 2007.

17 Situé près de la Porte Dorée, le bâtiment abrite aujourd’hui la Cité de l’Immigration.

18 AN AJ/52/1278, dossier d’élève ; Cité de l’architecture et du patrimoine, fonds dossiers d’œuvres de la direction de l’Architecture et de l’Urbanisme (DAU), 133 ifa, DAU-0-SEBJE ; « Agence de l’architecte Jean Sebag, avenue Marceau à Paris », Architecture d’aujourd’hui, no 58, février 1955, p. 96-97.

19 La donation est un dispositif juridique garantissant l’unité de propriété au profit des universités de Paris tout en permettant au pays concerné d’avoir la jouissance de la maison et de pouvoir l’exploiter en pleine responsabilité.

20 Dubois Jean, « Le créateur des mines de Zellidja », in Hommages à Jean Walter, 1957, p. 16 (AN 20090013/1174). Cette société devint en 1929 la « Société nouvelle des mines de Zellidja ». Ibid., p. 8-9. Lire également Passavant Éric, « Réformer les lycées français de l’extérieur », Cahiers de la recherche sur l’éducation et les savoirs [en ligne], no 9, 2010, mis en ligne le 1er octobre 2012.

21 Dossier « pavillon Walter » (AN AJ16/7043).

22 Lettre de L. Bardury à M. L. Pehuet (secrétaire général administratif), 27 janvier 1950 (AN 20090013/1176).

23 Note de Jean Toutée adressé à Raoul Dautry, M. Pehuet et au secrétariat de la Fondation nationale, 31 janvier 1950 (AN 20090013/1176).

24 « Synthèse sur la Maison de la Tunisie à la Cité universitaire de Paris », L’Oblique, p. 2-4.

25 « Maison de la Tunisie à la Cité universitaire de Paris. Jean Sebag, architecte », L’architecture aujourd’hui, no 47, avril-mai 1953, p. 62-68.

26 Badiche Mohamed, Labourdette Régis, Kouam Mohamed, « Fondation Maison du Maroc. Albert Laprade, Jean Vernon, Bruno Philippe, Jean Walter », Architectures de la Cité internationale universitaire de Paris, Fondation Maison du Maroc, 2015.

27 Pervillé Guy, Les étudiants algériens de l’université française 1880-1962, Paris, Éditions du CNRS, 1984, p. 51.

28 Ibid.

29 Ibid.

30 Lettre du ministre de l’Éducation nationale au recteur des Académies de Paris, 3 décembre 1952 (AN AJ16/7043).

31 L’UNEM sera finalement fondée à l’indépendance du Maroc en 1956.

32 Note du 21 novembre 1953 (Archives de la Préfecture de police de Paris, HA 23).

33 Le « parti », ici l’Istiqlal.

34 Note du 21 novembre 1953 (Archives de la Préfecture de police de Paris, HA 23).

35 Rapport du commissaire de police des quartiers du Parc-Montsouris et du Petit Montrouge sur la perquisition effectuée par la Sureté nationale à la Cité universitaire (Maison du Maroc), 20 juillet 1954 (Archives de la Préfecture de police de Paris, HA 23).

36 Lettre de Jean Arnaud à Yves Renouard, 16 juin 1955 (AN AB/XIX/43332, fonds Renouard).

37 Lire à ce sujet la correspondance manuscrite d’Yves Renouard pour les années 1955 et 1958 (AN AB/XIX/43332, fonds Renouard).

38 Lettre du secrétaire d’État aux Affaires étrangères au ministre de l’Éducation nationale, 23 septembre 1957 (AN AJ16/7044).

39 Dossier de nomination de Mohamed Talbi comme directeur de la Maison de la Tunisie, octobre 1962 (AN 20090013/1196).

40 Blanc Brigitte, La Cité internationale universitaire de Paris. De la Cité-jardin à la cité-monde, Paris, Lieux-dits Éditions, 2017, p. 305-307.

41 Lettre du directeur de la Maison de la Tunisie au Secrétaire d’État à l’Éducation nationale de Tunisie, 4 novembre 1957 (AN 20090013/1197).

42 « Synthèse sur la Maison de la Tunisie à la Cité universitaire de Paris », L’Oblique, p. 4 et consulter le dossier « Attentat Maison de la Tunisie août 1961 » (AN 20090013/1196).

43 Matuszewski Violette, La Cité internationale universitaire de Paris et ses relations avec le Maghreb. Succès et échecs. 1925-1970, Mémoire de Master 2 sous la dir. de Didier Musiedlak, 2013-2014, p. 89.

44 Ibid.

45 Cercle Fustel de Coulanges, Paris le 18 juin 1956 (AN AJ16/7033).

46 Pervillé Guy, op. cit., p. 172-174.

47 Pour une synthèse complète des événements de mai 1968 à la Cité universitaire, il faut se référer à une source de premier ordre : Préfecture de Police, Direction des Renseignements généraux et des jeux, « La Cité internationale de l’Université de Paris », juin 1970 (Archives de la Préfecture de Police de Paris, GD 57).

48 « Réunion en vue de la création d’une Maison de l’Algérie », lundi 11 mars 1968, dossier « Projet de maison de l’Algérie » (AN 20010243/15).

49 Ibid.

50 Voir dans le dossier « Divers projets de création de maisons (1924-1995), Projet d’une maison de l’Algérie, note » (AN 20090013/1199). Voir également Matuszewski Violette, op. cit., p. 96.

51 Matuszewski Violette, op. cit., p. 95-97.

52 Vaïsse Maurice, La grandeur. Politique étrangère du général de Gaulle, éd. Paris, CNRS Éditions, 2013, p. 460-473, et Arihir Mustapha, Les relations extérieures franco-algériennes à l’épreuve de la reconnaissance. De 1962 à nos jours. Analyse de la coopération et de la réconciliation, Paris, L’Harmattan, 2015, p. 100-103.

53 Préfecture de Police, Direction des Renseignements généraux et des jeux, « La Cité internationale de l’Université de Paris », juin 1970, p. 56-57 (Archives de la Préfecture de Police de Paris, GD 57).

54 Ibid., p. 56-57.

55 [https://www.europe-solidaire.org/spip.php?article41902], consulté le 4 mars 2020.

56 Il s’agit de la nouvelle appellation du Néo-Destour à partir d’octobre 1964.

57 Pour les étudiants, l’UGET devient le seul syndicat autorisé.

58 Chouikha Larbi et Gobe Éric, Histoire de la Tunisie depuis l’indépendance, Paris, La Découverte, 2015, p. 20-21.

59 Préfecture de Police, Direction des Renseignements généraux et des jeux, « La Cité internationale de l’Université de Paris », juin 1970, p. 70-71 (Archives de la Préfecture de Police de Paris, GD 57).

60 Ibid.

61 Rapport moral sur l’année 1970 présenté par le Délégué général M. Laurent (Archives diplomatiques de La Courneuve, DG RCSRT/111).

62 Hamid Barrada avait été mis en résidence surveillée peu avant une visite du roi Hassan II auprès du président Georges Pompidou. Les autorités françaises craignaient qu’il perturbe le séjour du monarque à Paris.

63 Photographie de la façade du pavillon marocain donnant sur le boulevard Jourdan (AN 20090013/1176).

64 Ibid.

65 Ahmed Balafrej a été l’un des premiers étudiants marocains à Paris dans les années 1930. Il s’engage dans le nationalisme marocain à cette époque. Membre fondateur de l’Istiqlal, il devient chef du gouvernement marocain en 1958.

66 Entretien avec Anis Balafrej en juin 2012.

67 Dalle Ignace, Les trois rois. La monarchie marocaine de l’indépendance à nos jours, Paris, Fayard, 2003, p. 407-409.

68 Entretien avec Mostafa Bouaziz, professeur d’histoire contemporaine de l’université Hassan II de Casablanca et témoin de cet événement.

69 Vermeren Pierre, Histoire du Maroc depuis l’indépendance, Paris, La Découverte, 2006, p. 59-60.

70 « Pneumatique à M. Bourcier, Agence France Presse » (AN 20090013/1198).

71 Lettre du directeur A. Frad à Pierre Marthelot, 7 mai 1974 (AN 20090013/1198).

72 Le « combattant suprême ». C’est le surnom de Bourguiba depuis la fin des années 1930 dans les cercles du Néo-Destour.

73 Note « Les étudiants marocains en France », 7 juillet 1989 (Archives diplomatiques de La Courneuve, DGRCST/104).

74 « Inauguration par le prince héritier de la Maison du Maroc de Paris », Article du journal Le Matin du 6 octobre 1982 (AN 20090013/1177).

75 Dossier « Tahar Manoubi » (AN 20090013/1196).

76 Entretiens avec des anciens résidents des années 1990 et 2000.

77 Ambassadeur et homme politique tunisien. Il est le fils du syndicaliste Ferhat Hached assassiné en décembre 1952 par l’organisation d’extrême droite coloniale « La main rouge ».

78 [http://www.ciup.fr/maison-tunisie-pavillon-habib-bourguiba/accueil/programme/], consulté le 4 mars 2020.


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