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    Plan détaillé Texte intégral Jules Simon, libéral ou républicain libéral ? À la recherche du point d’équilibre : élaboration d’un républicanisme libéral Conclusion : « Je suis un vieux républicain, mais un républicain libéral conservateur » Notes de bas de page Auteur

    Les Dix décisives

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    Table des matières

    Jules Simon (1814-1896), intellectuel organique du républicanisme libéral sous le Second Empire

    Thomas Branthôme

    p. 21-34

    Texte intégral Jules Simon, libéral ou républicain libéral ? À la recherche du point d’équilibre : élaboration d’un républicanisme libéral Conclusion : « Je suis un vieux républicain, mais un républicain libéral conservateur » Notes de bas de page Auteur

    Texte intégral

    1Le nom de Jules Simon ne parle plus. Délaissé par les études historiques, Simon est de ces personnages dont le temps semble avoir effacé la figure autant que le souvenir. Et pourtant. Professeur de cours sur la morale à l’École Normale qui feront date durant la Monarchie de Juillet, auteur de plusieurs essais majeurs en philosophie, aimé par les classes populaires pour ses travaux sur les ouvriers et adulé par la jeunesse rebelle pour ses interventions en tant que député, il a été durant le Second Empire une des figures les plus en vue du « Parti républicain1 » avant de devenir un des acteurs majeurs du passage à la Troisième République. Comment expliquer dans ces circonstances qu’il soit aujourd’hui si « oublié » ? On peut avancer en première hypothèse que le natif de Lorient est tout simplement frappé de la même nuit que celle qui enveloppe l’ensemble des illustres personnages de la « première » Troisième République (à l’exception peut-être de Jules Ferry et, à degré moindre, de Gambetta). Pour bon nombre des Français actuels, la période est perçue comme lointaine, complexe, noueuse ; ombragée de surcroît par l’épisode de la Commune. La connaissance des « fondateurs » du régime en pâtit. Combien sont ceux qui peuvent désormais parler avec détails de Jules Favre, Ernest Picard, Emmanuel Arago ou Eugène Pelletan ? Mais ce n’est pas tout. Il y a aussi et en plus chez Jules Simon une équivoque idéologique qui nourrit son effacement dans les mémoires : la pensée de Jules Simon gêne les analystes et les historiens des idées politiques. Car Jules Simon est, si on peut dire, trop républicain pour les libéraux et trop libéral pour les républicains. En ayant adhéré à la Deuxième et la Troisième République tout en s’opposant au Second Empire, il ne peut être intégré à la pensée libérale « pure » qui, des Doctrinaires aux vues constitutionnelles de Victor de Broglie ou Prévost-Paradol, fait primer le respect des libertés sur la forme du régime. Dans le même temps, ayant opté pour le groupe des modérés sous la Deuxième République et en ayant fini « à droite2 » sous la Troisième, il s’est aliéné les faveurs de l’histoire républicaine jacobine. De là des éléments biographiques épars qui peuvent en premier lieu laisser perplexe. On peut ainsi lire à quelques endroits qu’il fut un temps accusé d’avoir appartenu à l’Internationale, lui qui s’était toujours proclamé adversaire irrésolu du communisme, ou encore qu’il finira sa vie en se définissant comme « conservateur » après l’avoir passée à combattre pour la « liberté ». Pourtant, pour son premier biographe Léon Séché, « quand on embrasse par la pensée les cinquante ans de sa vie publique, on ne peut s’empêcher d’être ravi par l’esprit d’unité et l’harmonie qui s’en dégagent3 ». Pour saisir cette supposée cohérence de l’œuvre de Jules Simon, il faut suivre le tracé qu’ont emprunté avant lui La Fayette ou Benjamin Constant. Dans ces trois cas, le parcours idéologique, que d’aucuns accusent de palinodies au gré des régimes, s’oriente à la boussole de la liberté. C’est pour être fidèles à cette dernière que La Fayette ou Benjamin Constant se sont déclarés adversaires de tous les « despotismes » (qu’il soit enfant de « l’absolutisme » royal, de la « Terreur » républicaine ou du césarisme bonapartiste). Une même ligne de conduite préside aux choix de Jules Simon. Sur leur modèle, il a désigné dans sa grande œuvre La Liberté (1859) trois adversaires qu’il nomme les « trois absolutismes » (traditionnel, révolutionnaire et empirique). Aussi, sous la Troisième République, c’est la montée de « l’absolutisme révolutionnaire » (i.e. le socialisme) qui le conduira à se dire au milieu des années 1870 « conservateur »… c’est-à-dire pour lui conservateur/protecteur de la liberté4.

    2C’est ici qu’une nouvelle lecture de l’œuvre de Jules Simon doit appeler notre intérêt. Ce mot de « conservateur » qu’il revendiquera en 1876 devant le Parlement (« Je suis profondément conservateur ») est précédé d’un contrepoids de taille, la revendication du républicanisme, renforcé dans son affirmation par un parallélisme des formes parfait (« Je suis profondément républicain »). Le contexte même de ladite phrase ne laisse aucun doute sur la volonté de Jules Simon de graver dans les consciences et les mémoires cette revendication qui est double. C’est en effet à l’occasion de la lecture de son Discours de déclaration ministérielle à la Chambre et au Sénat qu’il fait entendre sa fameuse formule. Jules Simon vient d’être nommé président du Conseil (12 décembre 1876). Il est au zénith de sa carrière politique. Devant le Corps législatif, il énonce, écrit Léon Séché, cette phrase « demeurée célèbre » et dont « ceux qui l’ont entendue n’oublieront jamais l’accent de conviction avec lequel elle fut prononcée » : « Je suis, vous le savez profondément républicain (en disant cela, M. Jules Simon regardait la gauche) et profondément conservateur (ajoutait-il en se retournant vers la droite)5. » La dualité de l’éthos intellectuel du « dernier » Jules Simon est posé. Certains noteront la curieuse absence de l’épithète « libéral ». Curiosité trompeuse : on n’affirme pas ce qui est évident. À ses contemporains qui ne le connaissent que trop bien, Simon n’a pas besoin de réaffirmer ce qui a été la clef de voûte de toute sa vie. La liberté est en effet le trait d’union des tendances républicaines et conservatrices de Jules Simon, celle qui les éclaire et crée par son mouvement le continuum de sa pensée. C’est là que réside le triple intérêt de l’étude de Jules Simon au regard de la « Décennie décisive (1869-1879) ». D’une part, son œuvre philosophique et politique sous le Second Empire, à l’avant-garde de l’opposition républicaine, permet de se rendre compte à quel point les années 1850-1860 représentent, du point de vue républicain, une période d’incubation, voire de gestation, des idées qui formeront le socle de la Troisième République. D’autre part, la difficulté à situer Jules Simon intellectuellement autorise à proposer une nouvelle étiquette pour cerner son œuvre et sa personnalité : « républicain libéral ». Cette étiquette s’inscrit dans la typologie des quatre « sensibilités » du républicanisme français (libéral, jacobin, plébéien et conservateur) que nous avons proposée avec Jacques de Saint-Victor dans notre Histoire de la République en France6. Par son œuvre et son parcours, Jules Simon incarne l’archétype du « républicanisme libéral ». Il nous permet ainsi d’en voir in situ les éléments qui le compose, à la fois au regard des points cardinaux sur lesquels il se fonde et à la fois par les controverses qui l’opposent aux jacobins et aux plébéiens. Enfin et en dernier lieu, Simon illustre le syncrétisme politique (un républicanisme libéral teinté de conservatisme) qui va entraîner le ralliement du grand nombre à la « cause » républicaine durant la décennie 1870 et permettre ainsi au régime républicain de s’amarrer en France.

    Jules Simon, libéral ou républicain libéral ?

    3Il ne fait aucun doute que l’accent incessant mis sur la « liberté » par Jules Simon dans toute son œuvre fait de lui un authentique « libéral7 ». C’est d’ailleurs sous ce vocable que le juriste Philippe Jaunet présente le récit de sa vie dans une récente biographie savamment documentée : Jules Simon, le libéral oublié8. Même quand Simon utilise un autre mot comme dans La politique radicale (1868)9, il s’empresse de préciser : « le radicalisme dans le sens de la liberté ». Pourquoi n’en est-il pas de même avec l’adjectif de « républicain » ? D’abord parce que Jules Simon ne place pas ce mot au cœur de son œuvre littéraire et philosophique. Autrement dit, par une forme de « nominalisme », il y a comme un léger inconfort intellectuel à vouloir le rattacher à un courant dont il ne s’est pas revendiqué expressément à certains moments de sa vie. Pourtant ce phénomène doit être appréhendé avec les spécificités du contexte de l’époque. Il est impossible d’être ouvertement républicain sous le Second Empire. La prise de pouvoir de Louis-Napoléon par le coup d’État du 2 décembre 1851 a entraîné un véritablement « démantèlement » de la République10. Et le progressif « tournant libéral » de l’Empire restauré change peu de choses au sort du républicanisme. Ce dernier, regardé avec défiance, est traqué par la censure et le pouvoir policier. Pourtant le « parti républicain » subsiste, clandestinement. Pour éviter la répression, il use de subterfuges. Il exalte ainsi la « démocratie » ou « la liberté » pour ne pas avoir à dire le mot « république ». Exemple illustre de ces stratagèmes, le livre qui fera office de « bréviaire du Parti républicain » (G. Weill) durant toute la décennie 1860 s’appelle… La Démocratie11. En conséquence, l’absence de référence au mot « républicain » ne doit pas nous tromper : Jules Simon appartient au camp républicain.

    4L’affirmation vaut d’ailleurs tant au regard de sa vie que de son œuvre. Avant de devenir un des « Pères fondateurs » de la Troisième République (« la République des Jules ») et de faire partie des grands géniteurs de « l’École républicaine », membre du Gouvernement de la Défense nationale en 1871, du Gouvernement Dufaure sous la présidence de Thiers entre 1871 et 1873, sénateur inamovible en 1875 et président du Conseil en 1876, le philosophe-homme d’État a traversé tous les bouleversements qui ont précédé l’ancrage de la République. Né en Bretagne au tout début de la « Première Restauration » dans une famille modeste, avec pour parents une mère issue d’une famille royaliste et un père « républicain » ayant participé à la Bataille de Valmy, François-Jules-Simon Suisse dit Jules Simon se révèle très vite de ces élèves studieux que les études vont façonner. Du séminaire libre chez les Lazaristes où il y remporte tous les prix jusqu’à son entrée à l’École Normale où il a pour professeurs Jouffroy, Michelet et Victor Cousin, le jeune Simon découvre tout à la fois son attachement à la liberté et à la morale. Promis à une brillante carrière de Professeur (il est le suppléant de Cousin, le « maître » en Sorbonne), la tentation du « débat public » le tire pourtant de sa neutralité universitaire et le fait basculer dans le monde politique. Faisant publier le manuscrit de L’ouvrière dans la Revue des Deux Mondes, il ne tarde pas à engager aussitôt plusieurs controverses. Afin d’y répondre et de faire entendre pleinement sa voix, il fonde avec deux amis de l’École Normale (Amédée Jacques et Émile Saisset) une revue : La Liberté de pensée. Il côtoie alors ceux qu’on appelle « les Doctrinaires » et gravite dans la nébuleuse du « Parti libéral », tendance « Opposition dynastique ». Pourtant le philosophe de formation dépasse secrètement le champ du libéralisme en admirant l’audace d’Armand Carrel et en plaidant in petto pour le suffrage universel contre le suffrage censitaire. C’est ainsi que le désir de jouer un rôle en politique fait jour. Soutenu par deux Doctrinaires de renom, Rémusat et Duvergier de Hauranne, Simon tente sa chance à la députation de l’arrondissement de Lannion (Bretagne) en 1847, mais il échoue. Ce dernier n’a pas le temps de se lamenter. La révolution de février 1848 éclate et entraîne la mise en place d’une Assemblée constituante qui l’élit le 23 avril 1848. Ses professions de foi de l’époque exposant son programme « libéral et républicain » nous permettent de voir la teneur de son engagement républicain.

    5Bien décidé à dire à ses électeurs, « ce qu’il pense et ce qu’il est », Jules Simon déclare regarder « comme nécessaire le maintien de la République », à la fois parce qu’elle a été « acceptée par toute la France » et parce qu’elle est « reconnue au dehors ». Ces paroles, empreintes de sagesse et de légalisme, pourraient toutefois être celles d’un « républicain du lendemain », comme on trouve en nombre en ce printemps 1848, qui n’accepte la République que comme « un fait accompli ». Mais Jules Simon s’en défend dans le reste de sa proclamation. Sa prise de position en faveur de la forme constitutionnelle républicaine n’est pas uniquement conjoncturelle, elle est structurelle : « De toutes les formes du gouvernement », écrit-il, « la forme républicaine est la plus raisonnable et la plus juste. » Pour la première fois, le penseur libéral dévoile ses préférences politiques en matière institutionnelle. C’est dans la République, rajoute-t-il, que « se concilie le mieux […] la liberté et l’égalité ». Ici Simon embrasse toute l’idée républicaine et non pas uniquement les « journées de février ». Il en appuie la légitimité et le bien-fondé sur « l’histoire » et « la réflexion », sur la Révolution français qui fit naître « l’enthousiasme de la liberté » et sur cette nouvelle révolution, véritable « acte » de « souveraineté populaire », qui en offre désormais « l’intelligence ». Cette déclaration et celle qui suit sont ainsi des documents très précieux qui permettent de mettre à nu toute la pensée du Jules Simon de 1848. Républicain, il est et ne s’en cache plus. Il tient même à préciser les contours de ce républicanisme. Dans une deuxième adresse à ses « chers compatriotes », il désigne la révolution de février comme une « révolution sociale ». Cette réalité qu’« il n’y a pas à dissimuler » s’appuie sur un constat. Une question « plane » au-dessus de « toutes les questions politiques », écrit Jules Simon, la « question sociale ». Cette affirmation démontre les effets de la métempsychose du républicanisme subie entre 1814 et 1848. Totalement absente des combats politiques des « gardiens » de la tradition républicaine au début de la Restauration (La Fayette, Destutt de Tracy ou Daunou), la « question sociale » est venue se greffer au corpus républicain durant la Monarchie de Juillet, régénérant par là même la veine jacobine du républicanisme français. En 1848, un Jules Simon, héritier en ligne direct d’un La Fayette mais travaillé par ces mutations, évoque « le problème de l’organisation du travail12 » ; de la « place » du travailleur et de la nécessité de mettre fin à l’« exploitation de l’homme par l’homme ». Pour autant, on ne saurait qualifier Jules Simon de « républicain jacobin ». Comme le dit Philippe Jaunet, il possède une « fibre sociale assumée » mais refuse de verser dans le socialisme. Ses solutions à la « question sociale » sont celles du républicanisme libéral. Contre les propositions « collectivistes », Jules Simon refuse de « sacrifier le capital » et dénonce la « destruction de la propriété » comme un « crime » et un « fléau ». En outre, le candidat à la députation ne partage pas les vues de ce qu’on appelle alors « la guerre sociale » et qui appelle à une lutte de « classe contre classe ». Formé intellectuellement par les doctrines développées sous la Monarchie de Juillet, Simon croît avant tout dans la grande idée de l’époque : l’association13. « Dans une société bien réglée », énonce-t-il, « le patron et l’ouvrier ne sont pas des ennemis, ce sont des associés qui ne peuvent ni réussir, ni succomber l’un sans l’autre. » Puis, il ajoute : « Association, rapports équitables du capitalisme et du travail, voilà la sagesse. »

    6Cette pensée, toute en équilibre, sera celle du début de la Constituante de 1848, reconnaissant la dimension nécessairement sociale de la République (la « fraternité ») tout en refusant le socialisme, célébrant le « printemps de l’associationnisme » pour mieux vider la conflictualité qui guette le monde du travail. On imagine ainsi que Jules Simon souscrit alors au mot de Lamartine inscrit dans le décret du 5 mars 1848 qui instaure le suffrage universel masculin (« À dater de cette loi, il n’y a plus de prolétaires en France ») et souhaite comme ce dernier, ou comme Armand Marrast, une via media républicaine. Aussi siégera-t-il au milieu des « modérés » jusqu’à sa démission de l’Assemblée en 1849. Trop peu pour en faire un grand républicain ? Sa réaction au 2 décembre 185114 mérite pourtant qu’on lui attribue le qualificatif. Il perdra tout pour s’être ainsi dressé devant le nouvel Empereur. Commenceront pour lui dix-neuf ans de marginalisation par le pouvoir, dix-neuf ans qui affineront son républicanisme.

    À la recherche du point d’équilibre : élaboration d’un républicanisme libéral

    7Penser le républicanisme en termes de « sensibilités », c’est faire valoir qu’il existe des nuances dans son appréhension mais considérer aussi que ces sensibilités peuvent tout aussi bien s’entrecroiser que diverger radicalement. Or, c’est précisément ce comparatif qui permet de saisir au mieux le « contour » du républicanisme de Jules Simon. Car ce dernier est d’abord un républicanisme d’opposition. L’essentiel de sa doctrine va en effet se former dans ces années « d’exil intérieur » (C. Nicolet) que Simon vit avec ses compagnons républicains d’infortune. Cette doctrine s’aiguise dans une passe d’armes qui l’oppose à la fois au Second Empire et au « républicanisme rouge » (plébéien et jacobin).

    8N’ayant été qu’un éphémère député républicain sous la Deuxième République (1 an), ce n’est pas en poste que Jules Simon a pensé le fond de son républicanisme, c’est en sujet récalcitrant du Second Empire. Adversaire déclaré (et il sera élu député à ce titre en 1863 par le département de la Seine), il va forger sa pensée dans la critique de l’état existant. Il s’agira donc d’un républicanisme de contre-attaque, un républicanisme pointant les interdits du régime impérial et agissant sur lui comme une « mauvaise conscience ». Napoléon III dit aimer le « peuple », persifle Simon, mais il ne lui donne ni les moyens économiques ni les moyens de son essor intellectuel. Napoléon III dit revendiquer l’héritage de 1789, sa grande Déclaration et les droits de la Nation. Mais où sont les libertés de conscience, d’opinion et d’enseignement ? Où trouve à s’exprimer la souveraineté de la Nation hors des plébiscites ? Pour appuyer sur toutes ces incohérences, Jules Simon rédige en 1859 ce qui sera grande œuvre, La Liberté15. Dans cet essai qui se propose de « raconter la naissance de la liberté16 », Simon expose sa ligne de crête intellectuelle, celle qui lui permet de surplomber à la fois « l’autoritarisme » et « l’anarchie ». Pour dénoncer le premier, Simon se livre d’abord à la critique de l’Ancien Régime et de ses « entraves ». L’écrivain évoque avec blâme « les parlements, les pays d’états, la noblesse, les corps privilégiés, le clergé, la cour de Rome » et flétrit la censure à travers l’évocation des « ordonnances de prise de corps contre les auteurs » ou contre « ces livres lacérés, brûlés17 ». Derrière cette évocation du passé monarchique, Simon dessine la silhouette du Second Empire et en signe une critique dissimulée car dans le même temps il tresse les louanges de la Constituante de 1789. Admirateur de la première Assemblée nationale de l’Histoire de France, Jules Simon multiplie les propos dithyrambiques. Il évoque, pour décrire ses séances, un « spectacle digne des regards de Dieu, digne de l’admiration18 ». Là aussi, on peut mesurer en contraste le peu d’estime que Simon porte au Corps législatif impérial. Cette passion de Simon pour la Constituante, justifie-t-il, provient de la proclamation qu’elle a su faire en son temps de toutes les libertés : de conscience, de culte, d’opinion, de presse, de commerce19… Mais il y a davantage encore que ces travaux et ces réalisations. Selon lui, la pleine et entière liberté ne peut être atteinte que lorsque les hommes sont « gouvernés par la loi naturelle20 » et c’est ce que les Constituants ont su dire « au monde entier ». Reprenant des raisonnements que l’on trouve notamment chez Thomas d’Aquin, Simon défend en effet l’idée que la loi naturelle rappelle en nous « la présence de dieu », ou pour être plus précis, permet l’articulation entre la liberté et l’intelligence donnée aux hommes par dieu. Cette loi naturelle, argue Simon, doit se traduire par une morale dans les rapports de la vie privée et par du droit dans ceux de la vie publique. L’exaltation de ce droit, émanation de la loi naturelle et au cœur du républicanisme libéral, est une manière pour l’auteur d’enfoncer un coin dans le cœur du Second Empire caractérisé, selon l’auteur, par le seul « fait du prince ».

    9Dans le même temps, cette « loi naturelle », qui a « fondé la législation de 178921 », sert à Jules Simon de palladium contre son deuxième adversaire : le républicanisme rouge. Sous la Révolution, c’est en effet l’oubli de cette loi naturelle qui a fait basculer le cours des choses. Simon écrit :

    « Le drapeau libéral et révolutionnaire s’est trouvé dans les mains d’une bande de parvenus qui ne songeaient qu’à restaurer à leur profit les places, les honneurs, les privilèges, dont ils avaient violemment dépouillé les royalistes. Des représentants du peuple qui, pendant leurs missions, exagérant jusqu’à l’absurde, jusqu’au crime, la doctrine républicaine, avaient fait régner l’égalité par la terreur. »

    10On le voit, droit et moral ont été perdus de vue, selon Simon, à mesure que la Révolution a progressé, ce qui a conduit à la Terreur, cette « furie sauvage22 » qui « soulève le cœur23 ». Comme l’ensemble des libéraux, Jules Simon exècre la Terreur et observe contre son soubassement doctrinal (le jacobinisme) et ses héritiers les jugements les plus durs. En conséquence, après avoir échafaudé un républicanisme contre l’illibéralisme du Second Empire, il s’attaque pour en finir aux républicanismes jacobin et plébéien.

    11Rien n’est plus étranger à Jules Simon que le républicanisme plébéien qu’il nomme « communisme » ou « collectivisme ». En premier lieu, et ce point sera cardinal dans toute son œuvre, Jules Simon s’oppose résolument et de toute son énergie à l’abolition de la propriété. Cette dernière, écrit-il, est sacrée. Légataire à la fois de la pensée de John Locke et de celle des Constituants de 1789, Simon en fait un droit naturel, inaliénable et imprescriptible de l’Homme. Pas plus qu’il ne peut être procédé à une collectivisation des terres, il ne faut envisager la « communauté » des hommes et des biens, dit-il, car elle ne serait qu’une forme déguisée de « couvent ou de caserne ». Simon combat aussi dans le plébéianisme son matérialisme, son athéisme et son goût pour les passions éruptives. Il faut au peuple une religion. Cela assure son bonheur et son salut. Il faut aussi et en outre empêcher ce peuple d’être gouverné par les colères et les ressentiments. Bien sûr, ce vif rejet du « style » plébéien est nourri par le catholicisme issu de l’enfance du jeune Jules et son goût du raffinement, mais la question relève aussi de la tactique. On sait comme en 1839, les républicains de sensibilité libérale, partisans d’un combat centré sur le « cens » électoral, avaient reproché aux Plébéiens l’insurrection (impréparée) lancée par ses chefs (Blanqui, Barbès). Jules Simon, qui en a gardé le souvenir, réfutera toute sa vie la stratégie insurrectionnelle. Il aura l’occasion, en dehors de ses œuvres philosophiques, de le réaffirmer dans un cas concret en 1869. Alors qu’en cette année, dans le journal Le Réveil, Delescluze (futur « leader » de la Commune) appelle à tenter un « coup de force » au mois d’octobre, Jules Simon oppose un veto et écrit :

    « On nous demande si une manifestation à la date du 26 octobre peut servir les intérêts de la démocratie. Nous répondrons, après examen approfondi : Non, elle ne peut les servir ; au contraire, elle aurait pour résultat une répression impitoyable, probablement sanglante ; elle fournirait à la réaction des armes ; elle retarderait pour longtemps la victoire à laquelle nous touchons. Nous sommes unanimes pour conseiller à nos amis de ne descendre dans la rue sous aucun prétexte, de ne pas céder à de généreuses impatiences, de repousser les agents provocateurs24. »

    12L’évocation d’une « victoire » dont Jules Simon écrit « à laquelle nous touchons » montre bien le sentiment d’appartenance que ressent Simon vis-à-vis du camp républicain. Comme du temps des années de Restauration au cours desquelles le « Parti républicain » avait su perdurer en passant dans la clandestinité, le Second Empire triomphant ne fait pas disparaître en effet l’hydre du républicanisme. Reste que ce dernier est profondément divisé. Le coup d’État, l’absence de luttes d’envergure dans les classes populaires, les plébiscites remportés par Louis-Napoléon et le rétablissement de l’Empire soutenu par les masses rurales plongent les républicains dans des années de grandes remises en cause. Exils, désespoirs, brouilles, commentaires acides nervurent le « Parti ». Une nouvelle génération émerge et met à distance les « vieilles barbes quarante-huitardes ». Avec elle et contre les républicains « rouges », Simon écrit : vous voulez « nier et renverser les gouvernements ; nous voulons les fortifier et les éclairer, voilà toute la différence25 ». Ainsi, dans le sillage de Quinet et Michelet qui encouragent à expurger l’Histoire de la Révolution de sa « part maudite » (la Terreur) afin que la République ne fasse plus figure d’épouvante, Jules Simon, aux côtés de Jules Ferry, propose une voie « libérale » au camp républicain. À cette fin, Simon dénonce le « contrat social » comme une fausseté historique. Non, les hommes ne sont pas partis d’un « état sauvage » et non, nous ne naissons pas dans une société sans organisation26. La dénonciation du concept phare de Rousseau qui irrigue le jacobinisme est décisive, car elle conduit Simon à combattre tout le reste de l’arc philosophique jacobin, fustigeant sa propension aux abstractions, à l’idéalisme et au pur volontarisme. La première République a pêché par désir de « tabula rasa », elle a pêché en pensant qu’on pouvait « faire le monde avec les instruments de la raison » sans voir qu’il existait déjà des traditions et des étais (la morale, la famille) sur lesquels reposent les fondations de la société. Ces désaccords sur les présupposés anthropologiques et sociologiques du jacobinisme conduisent Jules Simon en conséquence à s’opposer au républicanisme jacobin en matière de démocratie, de conceptions des droits, sur l’égalité et sur le peuple. L’organisation révolutionnaire via les sociétés populaires que préconisaient les jacobins conduit « la société à être impuissante » écrit Simon27. En République, il est primordial d’investir le jeu parlementaire pour trouver à perdurer et le combat républicain doit viser à l’avènement d’une véritable démocratie représentative et non à l’insurrection ou à la révolution permanente. Il convient pour cela de mettre fin au culte de l’article 35 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1793 et son « droit à l’insurrection ». « La lutte que nous soutenons depuis trois quarts de siècle », écrit-il dans L’ouvrier de huit ans, « n’a été violente que quand elle a été inintelligente28 ». Il faut, ajoute-t-il, substituer au désir de « révolution » un désir de « réforme politique » fondée non sur les armes mais sur le suffrage universel « rendu complet et sincère par le droit de réunion et la liberté de la presse » et qui proclamera non pas l’égalité des faits mais « l’égalité absolue du Droit ». En cette matière comme sur les questions sociales, Simon refuse effectivement le « droit à ». Cette distinction est une vraie ligne de séparation entre le républicanisme jacobin et le républicanisme libéral. Père de ce qu’on nommera plus tard les « droits-créances », le jacobin veut faire reconnaître à l’État et à la société une dette envers les plus démunis. En matière de travail, d’assistance et de chômage, les malheureux doivent pouvoir faire prévaloir un « droit à » ces droits. Le libéral, tout en reconnaissant que l’État doit secourir ses citoyens dans le besoin, nuance en précisant que cela doit se faire dans la mesure du possible. C’est en tous points la position de Jules Simon29 qui encourage la République à faire preuve de « générosité » pour empêcher les ravages de la misère tout en refusant la mise en place d’un « État Providence30 ». La justification est double. D’abord, l’assistance aux yeux de Simon peut s’avérer contre-productive et déboucher sur un « droit à la paresse ». De surcroît, elle passe à côté de la question « morale » du paupérisme. Tout préoccupé qu’il est au « sort des ouvriers » et mu par « l’ardent désir de porter remède à tant de souffrances », Simon fait en effet un constat analogue à celui des socialistes sur le mal qui ronge le monde ouvrier mais diagnostique d’autres remèdes. Dans ses ouvrages consacrés à la question, L’ouvrière (1861) et L’ouvrier de huit ans (1867)31, celui que Georges Weill désigne comme « le plus chrétien des républicains32 », emprunte le même angle que celui des enquêtes pionnières du genre sous la Monarchie de Juillet (Villermé, Villeneuve-Bargemont) et appelle autant à une amélioration du sort matériel des travailleurs qu’à une réforme morale33 : « Le mal », écrit-il, « est surtout un mal moral ; et le problème à résoudre est celui-ci : sauver l’ouvrier par lui-même. […] Si jamais l’atelier est plein et le cabaret vide, la misère sera vaincue34 ». En sus d’un appel à une politique massive d’éducation35, les convictions religieuses de Simon l’entraînent dans une défense d’un « ordre moral » qui soumet les êtres à leur devoir (Le devoir, 185436). Ainsi sa défense des femmes « ouvrières » soulève la question des conditions de travail mais aussi et surtout celle d’un système économique si rude qu’il contraint les femmes à devoir travailler et à abandonner « leur destination naturelle37 », i.e., le foyer domestique et la famille. Ce conservatisme social trouve une résonnance dans le traitement simonien de « l’égalité ». Puisqu’il existe une place et un rôle naturel assignés aux hommes, aux femmes et aux enfants, il ne s’aurait y avoir d’égalité symétrique. Ce désir d’une « égalité mathématique », comme la nomme Simon, blesse par ailleurs la liberté : « Sous le régime de l’égalité absolue, tout dissident est un ennemi, car, s’il dogmatise, il est la théorie du privilège, et s’il pratique, il est le privilège lui-même. Le peuple, c’est-à-dire l’égalité ou la justice, est contre lui en état de légitime défense. De là la dictature révolutionnaire, et sa forme historique, la terreur38 ». Une véritable divergence de vue affleure en conclusion sur la pierre de touche du républicanisme : le peuple39. Le libéral, autant que le jacobin, dit vouloir le bonheur du peuple, sauf que le libéral considère que nul autre que l’individu peut définir ce bonheur. C’est là le grand apport de Benjamin Constant que Jules Simon reprend à son compte :

    « Pour nous, ce que nous demandons en défendant les droits de l’individu, la liberté individuelle, le travail individuel, ce que nous demandons, c’est la famille, c’est la sécurité du foyer, c’est le crédit, c’est la propriété solidement garantie, équitablement organisée ; c’est une société qui aide l’homme, qui le secoure sans l’asservir. Le citoyen, pour nous, est l’homme qui ne relève que de Dieu pour l’avenir, de sa tête et de son bras pour le présent, et qui ne demande rien à l’État, qu’une impartiale justice40 ».

    Conclusion : « Je suis un vieux républicain, mais un républicain libéral conservateur »

    13Aux vues de ses premières années, de sa formation et de ses fréquentations, Jules Simon aurait pu investir l’œuvre « libérale » des Doctrinaires et trouver son compte en matière de liberté sans avoir à s’inscrire dans le combat républicain. Mais la République advint en 1848 et à partir de cet instant, Simon devint « très attaché à la cause républicaine41 ». Cette Deuxième République, on le sait, fut cependant de courte durée et pour Simon, comme pour les « Quarante-huitards », tout fut à reprendre, à commencer par tracer l’épure d’une République stable et exorcisée de ses tentations aussi bien « révolutionnaire » que « césariste ». C’est ce qu’il fera dans toute son œuvre dont on trouve le résumé-programme dans son ouvrage La politique radicale42 : séparation de l’Église et de l’État, liberté d’enseignement, école obligatoire, liberté de la presse, abolition des armées permanentes, droit de réunion et d’association… La Troisième République proclamée par le « 4 septembre », et afin que ce programme puisse trouver une concrétisation dans et par la loi, Simon comme les autres adeptes du républicanisme libéral, entend conjurer le « péril rouge » pour rassurer les possédants sur les capacités de prospérité du régime républicain et de garantie des libertés43. Considérant, on l’a dit, cette cause comme la première loi sociale, Jules Simon ne peut pas envisager une République sans liberté. Il en formule même la synonymie : « La République, c’est la liberté44 ». Mais pas n’importe quelle liberté. Empruntant un cheminement de pensée ouvert avant lui par La Fayette ou les Thermidoriens, Simon défend l’idée qu’il n’y a pas de liberté sans ordre45. Cette conviction, qu’il revendiquera au crépuscule de sa vie en se qualifiant de « républicain libéral conservateur46 », le placera au cœur du paradoxe de la Troisième République, une République qui devra tempérer l’ardeur d’une partie de ses troupes fidèles (les socialistes, puis les radicaux) afin de pouvoir éliminer définitivement son adversaire historique : la Monarchie. Tout au long de la décennie 1870, il faudra en effet convaincre le gros des électeurs que leur bonheur individuel trouverait à s’épanouir davantage dans la République que dans la Monarchie, les convaincre que le calme, la stabilité et l’ordre, cadre nécessaire de ce bonheur, appartiennent désormais au camp républicain. Accepter l’étiquette « conservatrice » comme prix à payer pour devenir une République qui rassure, emporte l’adhésion du grand nombre et trouve ainsi à s’enraciner dans les profondeurs du pays et « les sentiments intimes du peuple », voici que ce fut le legs ultime de Simon à l’Histoire Républicaine. Il est de taille.

    Notes de bas de page

    1 Weill Georges, Histoire du parti républicain en France de 1814 à 1870, Paris, Félix Alcan, 1900, p. 403.

    2 La raison de ce glissement doit autant à sa relation d’hostilité réciproque avec Gambetta qu’aux circonstances politiques de la Troisième République, Simon rompant avec le camp républicain sur la question de la « liberté d’enseignement » et sur le refus d’adhérer à « l’anticléricalisme ». Notons aussi et enfin que Jules Simon, à la fin de sa vie, revendiquait un triptyque comme devise qui se compose des valeurs aujourd’hui dites « de droite » : « Dieu, Patrie, Liberté ».

    3 Séché Léon, Jules Simon, sa vie et son œuvre. Documents nouveaux et inédits, Paris, A. Dupret, 1887, p. 228. Ce jugement était partagé par plusieurs de ses contemporains puisque Agénor Bardoux, président du Centre gauche en 1889, rendit un hommage à Simon cette année-là par un discours qui commençait par ces mots : « Vous recevez, aujourd’hui, la récompense de toute une vie dont la ligne n’a pas fléchi, et qui présente une incomparable unité. »

    4 Ainsi Émile Loubet en formule le témoignage : « Il encourut la colère de la majorité de l’Assemblée nationale, pour son libéralisme jugé excessif. Plus tard, il souleva les récriminations de certains républicains lorsqu’il crut devoir combattre des projets qu’il pensait contraires aux véritables intérêts de la République et de la liberté. »

    5 Séché Léon, Jules Simon, sa vie et son œuvre, op. cit., p. 228.

    6 Branthôme Thomas et Saint-Victor Jacques de, Histoire de la République. Des origines à la Ve République, Paris, Économica, 2018. Pour voir l’exposé de ces quatre « sensibilités », se reporter notamment aux pages 9 à 22.

    7 Pour une discussion sur le concept de libéralisme et la pertinence d’évoquer des « libéralismes » au pluriel, voir Jaume Lucien, L’individu effacé ou le paradoxe du libéralisme français, Paris, Arthème Fayard, 1997.

    8 Jaunet Philippe, Jules Simon, le libéral oublié, Nice, Les Éditions Libre échange, 2017.

    9 Simon Jules, La politique radicale, Paris, Librairie nationale, 1868, p. 1.

    10 Branthôme Thomas et Saint-Victor Jacques de, Histoire de la République, op. cit., p. 594-602.

    11 Vacherot Étienne, La Démocratie, Paris, F. Chamerot, 1860.

    12 Ce questionnement n’est pas d’opportunisme puisque Jules Simon continuera tout au long du Second Empire à étudier le sujet. Cf. Simon Jules, Le Travail, Paris, Librairie internationale, 1866.

    13 Voir Branthôme Thomas, La genèse des libertés sociales. Le droit de s’associer face à l’impératif d’ordre, Paris, LGDJ, à paraître.

    14 Le fait est bien connu et constitue le fait d’arme le plus illustre de la carrière de Jules Simon. Quelques jours après le 2 décembre, Simon s’est présenté devant ses étudiants en Sorbonne et a prononcé un discours resté célèbre : « Messieurs, leur dit-il d’une voie émue, je vous fais ici un cours de morale (il parlait cette année-là de la morale et de la politique de Platon). Je vous dois aujourd’hui, non une leçon, mais un exemple. La France est convoquée demain dans ses comices pour blâmer ou approuver les événements qui viennent de se passer. N’y eût-il qu’un vote de blâme, je viens vous dire publiquement que ce sera le mien. » Le lendemain matin sa révocation paraissait en tête du Moniteur, v. Séché Léon, Jules Simon, sa vie et son œuvre, op. cit., p. 58.

    15 Simon Jules, La Liberté, Paris, Librairie de L. Hachette et Cie, 1859.

    16 Ibid., p. 190.

    17 Ibid., p. 191.

    18 Ibid., p. 190.

    19 Ibid., p. 183-186.

    20 Ibid., p. 12.

    21 Ibid., p. 34.

    22 Ibid., p. 236.

    23 Ibid., p. 240.

    24 Séché Léon, Jules Simon, sa vie et son œuvre, op. cit., p. 105.

    25 Simon Jules, La Liberté, op. cit., p. 203.

    26 Ibid., p. 201.

    27 Ibid., p. 204.

    28 Simon Jules, L’ouvrier de huit ans, Paris, Librairie internationale, 1867, p. ii.

    29 Simon Jules, La Liberté, op. cit., p. 496 et suiv.

    30 La formule est utilisée pour la première fois par Émile Ollivier dans un discours de 1864 et se veut péjorative.

    31 Simon Jules, L’ouvrière, Paris, Librairie de L. Hachette et Cie, 1861 ; Simon Jules, L’ouvrier de huit ans, op. cit.

    32 Weill Georges, Histoire du parti républicain, op. cit., p. 446.

    33 « La hausse même des salaires ne mettrait fin au paupérisme qu’à la condition d’être accompagnée d’une réforme profonde dans les mœurs », in Simon Jules, L’ouvrière, op. cit., préface, p. vii.

    34 Loc. cit.

    35 « Entre nos droits reconnues et l’exercice de ces mêmes droits, il ne reste plus qu’une barrière : c’est l’ignorance. Le peuple qui a les meilleures écoles est le premier peuple ; s’il ne l’est pas aujourd’hui, il le sera demain. Nous voulons une instruction générale, qui nous rende capables d’exercer nos droits citoyens, et une instruction professionnelle, qui nous mette à même de vivre en travaillant. […] Nous disons : Aux Écoles ! comme nos pères disaient : Aux Armes ! » ; in Simon Jules, L’ouvrier de huit ans, op. cit., p. iii-iv.

    36 Ce livre, premier d’une longue liste écrit dans l’opposition au Second Empire, eût un immense succès. En 1860, Hippolyte Taine écrit que « deux cent mille personnes lisent ou ont lu » ce livre, in Jaunet Philippe, Jules Simon, le libéral oublié, op. cit., p. 139.

    37 Simon Jules, L’ouvrière, op. cit., préface, p. vi.

    38 Simon Jules, La Liberté, op. cit., p. 215.

    39 « Pour nous, au contraire, si nous voulons un pouvoir fort et durable, c’est pour qu’il puisse rendre la société stable et heureuse. Nous aimons mieux le peule que vous ; car nous voulons en faire un peuple heureux ; et vous, vous en faites un souverain misérable », in Simon Jules, La Liberté, op. cit., p. 204.

    40 Ibid., p. 513-514.

    41 Weill Georges, Histoire du parti républicain en France de 1814 à 1870, op. cit., p. 336.

    42 Simon Jules, La politique radicale, op. cit.

    43 C’est pour défendre ce projet et trouver une place entre les Radicaux de Gambetta et le « Centre gauche » de Thiers que Jules Simon créera en 1871 avec Jules Ferry, la « Gauche républicaine ».

    44 Cité in Jaunet Philippe, Jules Simon, le libéral oublié, op. cit., p. 337.

    45 Dans une de ses proclamations de candidat à la Législative de 1848, il faisait déjà de « l’ordre » le socle de son engagement : « Toutes les mesures qui pouvaient compromettre l’ordre, toutes sans exception, m’ont eu pour adversaire […] J’ai cru que dans un temps où le monde politique était si profondément troublé, il fallait se montrer conservateur énergique de tous les intérêts sociaux. », in Séché Léon, Jules Simon, sa vie et son œuvre, op. cit., p. 56.

    46 « Je suis un vieux républicain, mais un républicain libéral conservateur ; je ne veux pas être républicain de la nouvelle école, que je considère comme funeste à la République. », in Jaunet Philippe, Jules Simon, le libéral oublié, op. cit., p. 379.

    Auteur

    • Thomas Branthôme
      Maître de conférences en histoire du droit et des institutions, université Paris Descartes
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    1 Weill Georges, Histoire du parti républicain en France de 1814 à 1870, Paris, Félix Alcan, 1900, p. 403.

    2 La raison de ce glissement doit autant à sa relation d’hostilité réciproque avec Gambetta qu’aux circonstances politiques de la Troisième République, Simon rompant avec le camp républicain sur la question de la « liberté d’enseignement » et sur le refus d’adhérer à « l’anticléricalisme ». Notons aussi et enfin que Jules Simon, à la fin de sa vie, revendiquait un triptyque comme devise qui se compose des valeurs aujourd’hui dites « de droite » : « Dieu, Patrie, Liberté ».

    3 Séché Léon, Jules Simon, sa vie et son œuvre. Documents nouveaux et inédits, Paris, A. Dupret, 1887, p. 228. Ce jugement était partagé par plusieurs de ses contemporains puisque Agénor Bardoux, président du Centre gauche en 1889, rendit un hommage à Simon cette année-là par un discours qui commençait par ces mots : « Vous recevez, aujourd’hui, la récompense de toute une vie dont la ligne n’a pas fléchi, et qui présente une incomparable unité. »

    4 Ainsi Émile Loubet en formule le témoignage : « Il encourut la colère de la majorité de l’Assemblée nationale, pour son libéralisme jugé excessif. Plus tard, il souleva les récriminations de certains républicains lorsqu’il crut devoir combattre des projets qu’il pensait contraires aux véritables intérêts de la République et de la liberté. »

    5 Séché Léon, Jules Simon, sa vie et son œuvre, op. cit., p. 228.

    6 Branthôme Thomas et Saint-Victor Jacques de, Histoire de la République. Des origines à la Ve République, Paris, Économica, 2018. Pour voir l’exposé de ces quatre « sensibilités », se reporter notamment aux pages 9 à 22.

    7 Pour une discussion sur le concept de libéralisme et la pertinence d’évoquer des « libéralismes » au pluriel, voir Jaume Lucien, L’individu effacé ou le paradoxe du libéralisme français, Paris, Arthème Fayard, 1997.

    8 Jaunet Philippe, Jules Simon, le libéral oublié, Nice, Les Éditions Libre échange, 2017.

    9 Simon Jules, La politique radicale, Paris, Librairie nationale, 1868, p. 1.

    10 Branthôme Thomas et Saint-Victor Jacques de, Histoire de la République, op. cit., p. 594-602.

    11 Vacherot Étienne, La Démocratie, Paris, F. Chamerot, 1860.

    12 Ce questionnement n’est pas d’opportunisme puisque Jules Simon continuera tout au long du Second Empire à étudier le sujet. Cf. Simon Jules, Le Travail, Paris, Librairie internationale, 1866.

    13 Voir Branthôme Thomas, La genèse des libertés sociales. Le droit de s’associer face à l’impératif d’ordre, Paris, LGDJ, à paraître.

    14 Le fait est bien connu et constitue le fait d’arme le plus illustre de la carrière de Jules Simon. Quelques jours après le 2 décembre, Simon s’est présenté devant ses étudiants en Sorbonne et a prononcé un discours resté célèbre : « Messieurs, leur dit-il d’une voie émue, je vous fais ici un cours de morale (il parlait cette année-là de la morale et de la politique de Platon). Je vous dois aujourd’hui, non une leçon, mais un exemple. La France est convoquée demain dans ses comices pour blâmer ou approuver les événements qui viennent de se passer. N’y eût-il qu’un vote de blâme, je viens vous dire publiquement que ce sera le mien. » Le lendemain matin sa révocation paraissait en tête du Moniteur, v. Séché Léon, Jules Simon, sa vie et son œuvre, op. cit., p. 58.

    15 Simon Jules, La Liberté, Paris, Librairie de L. Hachette et Cie, 1859.

    16 Ibid., p. 190.

    17 Ibid., p. 191.

    18 Ibid., p. 190.

    19 Ibid., p. 183-186.

    20 Ibid., p. 12.

    21 Ibid., p. 34.

    22 Ibid., p. 236.

    23 Ibid., p. 240.

    24 Séché Léon, Jules Simon, sa vie et son œuvre, op. cit., p. 105.

    25 Simon Jules, La Liberté, op. cit., p. 203.

    26 Ibid., p. 201.

    27 Ibid., p. 204.

    28 Simon Jules, L’ouvrier de huit ans, Paris, Librairie internationale, 1867, p. ii.

    29 Simon Jules, La Liberté, op. cit., p. 496 et suiv.

    30 La formule est utilisée pour la première fois par Émile Ollivier dans un discours de 1864 et se veut péjorative.

    31 Simon Jules, L’ouvrière, Paris, Librairie de L. Hachette et Cie, 1861 ; Simon Jules, L’ouvrier de huit ans, op. cit.

    32 Weill Georges, Histoire du parti républicain, op. cit., p. 446.

    33 « La hausse même des salaires ne mettrait fin au paupérisme qu’à la condition d’être accompagnée d’une réforme profonde dans les mœurs », in Simon Jules, L’ouvrière, op. cit., préface, p. vii.

    34 Loc. cit.

    35 « Entre nos droits reconnues et l’exercice de ces mêmes droits, il ne reste plus qu’une barrière : c’est l’ignorance. Le peuple qui a les meilleures écoles est le premier peuple ; s’il ne l’est pas aujourd’hui, il le sera demain. Nous voulons une instruction générale, qui nous rende capables d’exercer nos droits citoyens, et une instruction professionnelle, qui nous mette à même de vivre en travaillant. […] Nous disons : Aux Écoles ! comme nos pères disaient : Aux Armes ! » ; in Simon Jules, L’ouvrier de huit ans, op. cit., p. iii-iv.

    36 Ce livre, premier d’une longue liste écrit dans l’opposition au Second Empire, eût un immense succès. En 1860, Hippolyte Taine écrit que « deux cent mille personnes lisent ou ont lu » ce livre, in Jaunet Philippe, Jules Simon, le libéral oublié, op. cit., p. 139.

    37 Simon Jules, L’ouvrière, op. cit., préface, p. vi.

    38 Simon Jules, La Liberté, op. cit., p. 215.

    39 « Pour nous, au contraire, si nous voulons un pouvoir fort et durable, c’est pour qu’il puisse rendre la société stable et heureuse. Nous aimons mieux le peule que vous ; car nous voulons en faire un peuple heureux ; et vous, vous en faites un souverain misérable », in Simon Jules, La Liberté, op. cit., p. 204.

    40 Ibid., p. 513-514.

    41 Weill Georges, Histoire du parti républicain en France de 1814 à 1870, op. cit., p. 336.

    42 Simon Jules, La politique radicale, op. cit.

    43 C’est pour défendre ce projet et trouver une place entre les Radicaux de Gambetta et le « Centre gauche » de Thiers que Jules Simon créera en 1871 avec Jules Ferry, la « Gauche républicaine ».

    44 Cité in Jaunet Philippe, Jules Simon, le libéral oublié, op. cit., p. 337.

    45 Dans une de ses proclamations de candidat à la Législative de 1848, il faisait déjà de « l’ordre » le socle de son engagement : « Toutes les mesures qui pouvaient compromettre l’ordre, toutes sans exception, m’ont eu pour adversaire […] J’ai cru que dans un temps où le monde politique était si profondément troublé, il fallait se montrer conservateur énergique de tous les intérêts sociaux. », in Séché Léon, Jules Simon, sa vie et son œuvre, op. cit., p. 56.

    46 « Je suis un vieux républicain, mais un républicain libéral conservateur ; je ne veux pas être républicain de la nouvelle école, que je considère comme funeste à la République. », in Jaunet Philippe, Jules Simon, le libéral oublié, op. cit., p. 379.

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    Ce livre est cité par

    • Sussman, Sarah. (2023) Recent Books and Dissertations on French History. French Historical Studies, 46. DOI: 10.1215/00161071-10350103

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    Branthôme, T. (2022). Jules Simon (1814-1896), intellectuel organique du républicanisme libéral sous le Second Empire. In P. Allorant, W. Badier, & J. Garrigues (éds.), Les Dix décisives (1‑). Presses universitaires de Rennes. https://doi.org/10.4000/books.pur.160760
    Branthôme, Thomas. « Jules Simon (1814-1896), intellectuel organique du républicanisme libéral sous le Second Empire ». In Les Dix décisives, édité par Pierre Allorant, Walter Badier, et Jean Garrigues. Rennes: Presses universitaires de Rennes, 2022. https://doi.org/10.4000/books.pur.160760.
    Branthôme, Thomas. « Jules Simon (1814-1896), intellectuel organique du républicanisme libéral sous le Second Empire ». Les Dix décisives, édité par Pierre Allorant et al., Presses universitaires de Rennes, 2022, https://doi.org/10.4000/books.pur.160760.

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    Allorant, P., Badier, W., & Garrigues, J. (éds.). (2022). Les Dix décisives (1‑). Presses universitaires de Rennes. https://doi.org/10.4000/books.pur.160732
    Allorant, Pierre, Walter Badier, et Jean Garrigues, éd. Les Dix décisives. Rennes: Presses universitaires de Rennes, 2022. https://doi.org/10.4000/books.pur.160732.
    Allorant, Pierre, et al., éditeurs. Les Dix décisives. Presses universitaires de Rennes, 2022, https://doi.org/10.4000/books.pur.160732.
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