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La Révolution à l'œuvre

 | 
Jean-Clément Martin

Deuxième partie. Champ du politique

Au-delà de la Terreur : mouvements démocratiques et masses populaires dans la France du Directoire

Antonino De Francesco

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Géographique :

France

Texte intégral

1Il est certain que depuis les années du bicentenaire l’histoire politique de la Révolution a été largement renouvelée ; cependant, je voudrais tout d’abord expliquer pourquoi je ne partage pas du tout la conviction qu’à cet égard les mises au point faites en 1989 représentent en quelque sorte un point de départ. Les célébrations de cette année-là se sont le plus souvent intégrées aux axes de recherches définis depuis les années 1970, tandis que les années qui suivirent le bicentenaire de 1989 se chargèrent de faire tabula rasa du contexte politique et culturel où s’étaient jusqu’à ce moment-là placées les études révolutionnaires. Il me paraît donc que l’affirmation selon laquelle l’intérêt porté à la période révolutionnaire se serait déplacé, dès 1989, vers des domaines déchargés de symbolique politique, est pour le moins curieuse. Je sais bien que l’on répète depuis les années 1990, que la société européenne en général serait affectée par la crise du politique, mais il me semble que le fait de concentrer l’attention sur les dynamiques révolutionnaires implique tout de même le plus souvent le cas contraire. Les historiens notamment ont bien conscience de la nouvelle situation politique apparue au lendemain de 1989 et donc, que leur perception de 1789 et de ses conséquences en tient largement compte.

  • 1 Je renvoie aux Actes du colloque de Clermont-Ferrand, La République directoriale, textes réunis pa (...)

2À cet égard, du côté français, mais je crois que la considération pourrait être valable pour l’Europe continentale, visiter de nouveau la politique révolutionnaire a été placé sous le signe de la recherche d’un laboratoire de la modernité, et cela se traduit par l’attention donnée à une époque culturelle, qui, indépendamment de la surenchère idéologique, est tout de même réputée être à l’origine des transformations politiques au xixe siècle. Il va de soi que cette piste de recherche permettait (ou imposait) de se débarrasser tout d’un coup – d’une manière plus ou moins silencieuse, plus ou moins directe, plus ou moins avouée – des travaux universitaires qui avaient connu un succès réel, après la seconde guerre mondiale et jusque dans les années soixante-dix, pour des raisons idéologiques bien évidentes. Bref, au lendemain de 1989, il fallait en tout cas abandonner l’approche traditionnelle de l’année 1793, jusque là censée représenter par excellence le passage héroïque de la Révolution, donc une ligne de partage évidente entre la phase de la montée démocratique et celle de l’involution conservatrice qui aboutirait inévitablement à brumaire. Il s’agissait d’ailleurs d’un sacrifice en quelque sorte obligé, parce que nul ne pouvait plus douter que les fortunes de l’an II revenaient d’une historiographie aux lourdes implications idéologiques qui était désormais dépassée. D’où, parmi d’autres chantiers de recherche, une attention renouvelée pour l’histoire des institutions et un intérêt porté à la genèse de catégories politiques à la base de la contemporanéité, d’où la reprise en main de certains dossiers – tels que les années du Directoire, qui concernent directement cette communication – largement oubliés auparavant par l’historiographie. Et, dans ce contexte, en particulier, ni l’épuisement, ni la répétition ne peuvent être reprochés aux historiens : car les recherches des dernières années ont révélé une image largement méconnue de la politique au temps du Directoire1. Elles ont mis en évidence la richesse d’une pratique qui se dit de manières diverses, qui se lit à différents niveaux, dans une vision qui assure l’évidence de la vivacité d’un mouvement démocratique autrefois réputé largement battu et replié dans la vaine attente d’un autre Incorruptible.

  • 2 Voir surtout B. Gainot, 1799. Un nouveau jacobinisme ? La démocratie représentative, une alternati (...)
  • 3 I. Woloch, Jacobin legacy. The Democratic Movement under the Directory, Princeton, University Pres (...)

3En revanche, comme on le sait depuis les travaux récents, l’identité politique de la gauche à l’époque directoriale est marquante, car la mise en exercice de la Constitution de l’an III et la révolution de fructidor lui assurent une marge d’initiative qui se traduit, autant par le biais de la liberté de parole et de la liberté d’association, que par le biais des compétitions électorales, ou par l’occupation d’un espace public. Au nom de la souveraineté populaire, les démocrates de l’époque directoriale acceptent les règles du jeu politique dictées par la Constitution, réclament leur droit à l’opposition en vue d’une prise du pouvoir par la voie électorale, théorisent et mettent au point une pratique de la démocratie représentative qui est à la base des transformations politiques de la France du xixe siècle2. Même en tenant bien compte des travaux de Woloch et de Suratteau3, la redécouverte des néo-jacobins – mais eux se faisaient appeler, et fort à raison à mon avis, comme on le verra ensuite, les républicains de 1792 – appartient à ces dernières années et elle ne peut donc représenter une opération neutre, car elle nous dit la nécessité, après 1989, de chercher d’autres pistes de recherche à l’histoire politique de la Révolution.

  • 4 À ce propos, voir S. Luzzatto, L’autumno della rivoluzione. Lotta e cultura politica nella Francia (...)

4Toutefois, avouons-le tout de suite, il s’agit d’une perspective de travail qui court le risque de s’égarer dans l’effacement de la Terreur dans le panorama de la politique révolutionnaire, car la recherche d’un mouvement démocratique qui ne se réfère plus à l’exemple de l’an II semble entraîner la conviction que la période directoriale avait concouru, de façon déterminante, à la formation d’une culture politique originale, bien peu redevable, quant à l’élaboration d’un nouveau radicalisme, à celle du gouvernement révolutionnaire. Or, de ce point de vue, tout cela me parait exact, mais fort imprécis. Il est vrai que l’anti-jacobinisme forcené dont fit preuve la culture politique du Directoire fournit des informations évidentes sur la reprise de certains groupes – tout de même républicains qui avaient été plus ou moins violemment écartés du jeu politique à l’occasion de 1793 –, et par la suite cette agressivité nous explique beaucoup de choses sur le soudain revirement que d’autres groupes encore furent contraints d’opérer après la chute de Robespierre4 ; mais, il reste quand même évident que la prise de distance souvent déclarée face au gouvernement révolutionnaire implique la persistance d’un lien profond entre la démocratie post-robespierriste et l’an II, ceci permet de mieux appréhender les termes dans lesquels, au lendemain de la mise en exercice de la Constitution de l’an III, les néo-jacobins posèrent la Terreur en rappel dramatique des nombreuses difficultés sur la voie d’une démocratie accomplie. C’est pourquoi, ce n’est pas tant l’importance d’une époque directoriale redécouverte qui intéresse ici (ce n’est pas encore le temps des bilans), que ce qu’elle implique quant à l’ouverture d’autres chantiers de recherche.

  • 5 En ce qui concerne l’Italie, voir A. M. Rao, Esuli. L’emigrazione politica italiana in Francia, 17 (...)

5Or, en ce qui concerne l’histoire du mouvement démocratique, il me paraît d’emblée opportun de revenir sur les coordonnées de la culture politique au lendemain de Thermidor : liberté de presse et d’association, refus de la dictature, acceptation de la pratique électorale, éloge de la démocratie représentative, politique étrangère agressive postulant la libération des peuples, et rendue d’autant plus vigoureuse par les victoires militaires, cosmopolitisme révolutionnaire fondé sur une véritable solidarité politique avec les patriotes des républiques-sœurs, qui élargit d’une manière irréversible l’espace démocratique (je songe en particulier au xixe siècle en Europe). Bref, en ce qui concerne le moment directorial, il apparaît bien important de souligner comment, durant ces mêmes années, ont pris forme et se sont développées des relations étroites entre les démocrates français et les jacobins des républiques-sœurs et combien celles-ci ont entraîné une dynamique politique empruntée au conditionnement mutuel, avec l’expérience révolutionnaire de la France qui allait lourdement influencer l’expérience politique des républiques alliées et vice versa5.

  • 6 Voir les précisions apportées par L. Guerci, Istruire nelle verità repubblicane. La letteratura po (...)

6Mais, ceci étant dit, existe-t-il un intellectuel qui puisse incarner d’une manière exemplaire la culture politique de la démocratie post-robespierriste ? Plusieurs, cela va de soi, mais dans l’économie de mon exposé, lourdement marqué par la dimension internationale de la démocratie post-robespierriste, je pense que le nom de Thomas Paine est le plus évident. Apparemment, on pourrait avancer plus d’une objection : d’une part la biographie intellectuelle de Thomas Paine est bien définie avant la saison du Directoire (ses ouvrages les plus importants ont été créés et publiés avant la mise en exercice de la constitution de l’an III) ; de l’autre, sa carrière politique a été brusquement interrompue par la mise en état d’arrestation au temps du gouvernement révolutionnaire, et qu’au lendemain de Thermidor il était désormais privé d’un rôle politique actif. Toutefois, si l’on examine ses fortunes politiques, les choses apparaissent bien différentes, car l’Anglo-Américain devenu Français par la volonté de la Convention nationale, représentait tout au long des années directoriales, en France comme dans les républiques-sœurs, l’exemple vivant de la démocratie politique, dont les nombreuses traductions de ses ouvrages sont le témoignage le plus convaincant6.

7Prenons, par exemple, la Justice agraire, l’ouvrage que Thomas Paine fit imprimer en français en l’an V, grâce à la traduction de son ami Lanthenas. On y trouvera lumineusement défini le programme des groupes démocratiques au temps du Directoire. Paine y déclare que « la constitution actuelle est le système de gouvernement le mieux organisé qui ait encore paru » mais il ajoute tout de suite qu’« il y a une erreur dans les principes. L’égalité du droit de suffrage ne s’y trouve point » ; d’où la constatation que cette profanation des droits de l’homme a éteint l’enthousiasme révolutionnaire des Français et, par conséquent, a fait le jeu de Babeuf, qui s’était appuyé sur cette violation pour convaincre quelques patriotes de la nécessité de conspirer pour arriver à la démocratie sociale envisagée par la constitution de 1793. C’est pourquoi Paine condamne vigoureusement les conspirateurs qui avaient organisé « un directoire secret de leur création particulière (ce qui est exactement l’inverse de l’élection et de la représentation) et leur aveuglement a été tel qu’ils ont cru que la société… se livrerait aveuglement à l’administration de cette autorité créée dans le secret et dans l’intimité du parti ».

  • 7 Th. Paine, La justice agraire opposée à la loi et monopole agraire ou plan d’amélioration du sort (...)
  • 8 Ibidem, p. 20-21.

8Si Paine se réjouit que le complot ait été découvert, il déplore en revanche les raisons profondes qui ont permis à Babeuf de mettre en œuvre tous les mécontents : ainsi exhorte t-il Babeuf même et tous ses partisans à examiner « l’état de la France depuis l’établissement de la constitution… [à le] comparer avec le fatal gouvernement révolutionnaire de la Terreur et ils trouveront en un si petit intervalle de temps, la différence la plus étonnante, celle qui se trouve entre la famine et l’abondance » ; toutefois, il considère que la Constitution doit être corrigée en revenant au suffrage universel, qui est la meilleure de toutes les garanties contre les conspirateurs7. De plus, le rétablissement de la parfaite égalité politique entraînerait une révolution dans l’état de la civilisation qui doit accompagner et perfectionner les changements intervenus entre temps dans le système de gouvernement. D’où la conviction que les droits de l’homme sont nécessairement associés au bonheur des peuples et donc à la reprise d’un programme social, que Paine développe sous le signe d’un système d’impôt sur la transmission des propriétés qui, en assurant une rente a tout citoyen au moment de l’accomplissement de la 50e année de sa vie, pouvait en soustraire la plupart au joug de la misère et permettre aussi bien le triomphe du nouvel ordre que l’expansion de la Révolution là, où la guerre et la politique ont échoué8.

  • 9 G. Kates, « From liberalism to radicalism : Tom Paine’s Rights of Man », Journal of the history of (...)

9Or, il me parait certain que la Justice agraire fournit des indications intéressantes sur la perspective politique à laquelle Paine va se consacrer dans les années suivantes. En particulier, l’ouvrage en question nous livre une image de Thomas Paine inscrite dans la culture politique de la démocratie post-robespierriste, car le refus de la Terreur et de la dictature babouviste emboîte le pas au suffrage universel, à la démocratie représentative et à la justice sociale. Reste à s’interroger, sur les raisons profondes qui menèrent Thomas Paine dans cette direction. Il est certain qu’il s’agit d’une position prise sous la pression de la conspiration de Babeuf et du retour en force des royalistes, mais il ne faut non plus oublier que la démocratie représentative et une sorte de welfare, même si on restait encore dans le vague, étaient de toutes les manières déjà bien envisagés dans la seconde partie des Droits de l’homme, parue en France, en février 1792. Ainsi, dans les ouvrages de Paine, la question de la continuité s’impose d’emblée et nous invite à définir le fil conducteur qui, sous le signe de la réflexion autour des années révolutionnaires, mène des Droits de l’homme à la Justice agraire. À ce sujet, l’analyse des Droits de l’homme mise au point dès 1989 par Gary Kates nous en dit beaucoup ; en distinguant entre une première partie, parue en février 1791, favorable somme toute à la monarchie parlementaire et à Lafayette, et une seconde, publiée juste un an après, où la démocratie et le welfare y sont annoncés de manière explicite contre Lafayette et Sieyès, contre la monarchie, contre le système censitaire. Kates nous montre combien Paine, quant à sa pensée, était redevable à la pratique politique révolutionnaire, contre une tradition historiographique – d’Outre Manche comme d’Outre Atlantique – ; et il nous dit combien l’expérience de la Révolution française permettait à l’Anglo-Américain, devenu pourtant Français, de poser les questions qui allaient dominer le panorama du radicalisme politique au xixe siècle9.

10Et cette perspective s’affine encore, si l’on considère le chemin politique de Thomas Paine tout au long des années révolutionnaires, parce qu’il est bien connu que les Droits de l’homme naissent de sa fréquentation des brissotins, que la chute des girondins lui valut le cachot, que Thermidor seulement lui permit de s’en sortir, qu’à cette époque-là il faut situer le Siècle de la raison (un ouvrage encore dominé par l’espoir que la nouvelle civilisation révolutionnaire remplacera la superstition). Mais, il ne me semble pas que l’on ait suffisamment souligné la circonstance que la conspiration de Babeuf et le complot royaliste lui parurent, entre l’an IV et l’an V, pouvoir ruiner la République, et que la théorie d’une démocratie aussi bien représentative que sociale – le bastion de la reprise républicaine aux années Trente du xixe siècle – se soit donc entièrement définie en se plaçant dans un contexte politique fragile, marqué par un défi menaçant lancé à la constitution de l’an III, à droite comme à gauche.

11C’est bien sous cet aspect qu’à mon avis les années directoriales ont contribué d’une manière déterminante à redéfinir la question de la démocratie telle que la pratique révolutionnaire l’avait mise à l’ordre du jour entre 1791 et 1792. Il va de soi que, sous cet angle, se pose à nous le problème du retour sur le mouvement girondin (en lui restituant une primauté républicaine et démocratique que l’historiographie lui a longtemps nié), en en repensant cependant l’histoire bien au-delà de la Terreur, pour rendre une identité précise tout au long des années révolutionnaires à tous ceux qui avaient échappé à la répression de l’an II. En effet, les lignes de continuité entre la première période républicaine et les années directoriales sont nombreuses : l’intérêt pour le monde américain, le cosmopolitisme, l’attention pour la dimension fédérative du processus révolutionnaire, la sacralité du passage électoral entendu comme manifestation profonde de la volonté générale, le soutien résolu au système représentatif, la liberté économique comme soulagement des couches les plus pauvres de la société, la guerre bien au-delà des frontières naturelles, sont autant d’indications importantes. Toutefois, la conscience que l’espace politique s’est restreint – à cause de la Terreur d’abord, des complots babouviste et royaliste ensuite – nous empêche d’entrevoir une ligne de continuité entre un moment républicain et l’autre, et nous incite à revenir sur les trajectoires politiques des révolutionnaires par le biais de la prosopographie.

  • 10 Qu’il me soit permis à ce propos de renvoyer à mon Il governo senza testa. Movimento democratic e (...)
  • 11 G. Kates, The Cercle social, the Girondins, and the French Revolution, Princeton, University Press (...)

12L’examen des démocrates de l’époque directoriale, en redessinant leur profil de carrière à partir de la radicalisation du processus politique au lendemain de la fuite de Varennes, et à travers le filtre de leur confrontation avec la Terreur, permettrait en effet de mesurer la conviction, encore bien répandue, qu’en l’an III le refus de la Convention de revenir de manière critique sur les motivations de l’insurrection fédéraliste ratifia tout simplement la dissolution de l’héritage politique girondin10. En revanche, le poids du souvenir de la Terreur et l’angoisse face à la fragilité de l’ordre républicain, deux réflexions qui concourent lourdement à caractériser le climat politique et culturel de la saison directoriale, nous forcent à constater que la démocratie post-robespierriste, en faisant de la pédagogie populaire l’antidote du jacobinisme, reprend le discours politique girondin. Qu’il soit suffisant, à ce propos, de mentionner l’activité culturelle et politique de Jean-Baptiste Louvet et de son imprimerie en l’an IV, ou la reprise de l’activité éditoriale du Cercle Social dans les années suivantes (en quelque sorte mésestimées par Gary Kates lui même)11 pour appréhender combien l’angoisse d’une soudaine dissolution de l’ordre constitutionnel favorisait la critique de la culture révolutionnaire, et combien la conscience de l’impréparation culturelle du peuple de France poussait les démocrates à insister sur la dimension pédagogique de l’engagement politique. Bref, la culture politique de la Gironde continuait à informer la gauche française à l’époque directoriale, mais les certitudes révolutionnaires s’étaient en quelque sorte évanouies face au spectre de l’impréparation politique du peuple français dont témoignaient dans le même moment les fortunes babouvistes et royalistes.

  • 12 P. Fromageot, « Laurent Lecointre, député de Seine-et-Oise, à la Législative et à la Convention, 1 (...)

13C’est pourquoi l’on ne peut parler de la Terreur comme d’un simple et malheureux accident sur le chemin de la démocratie politique : en revanche, dans la perspective que j’envisage, il serait très important de revenir d’une manière équilibrée sur l’héritage du drame de l’an II dans la conscience des années révolutionnaires qui suivent la chute de Robespierre. Prenons, pour illustrer ce propos, le cas d’un homme qui refusa la Terreur et en même temps nia l’honneur politique aux girondins, l’ex-dantoniste Laurent Lecointre, grand accusateur des membres du gouvernement révolutionnaire, mais aussi le grand opposant au retour des 73 députés girondins dans le sein de la Convention parmi lesquels Thomas Paine. Au lendemain du coup d’état de brumaire, à l’occasion du vote populaire de ratification de la Constitution de l’an VIII, Lecointre exprima par son vote « le refus le plus formel et le plus fortement prononcé contre ce projet de constitution », mais il ajouta à cette déclaration : « S’il en résulte que la majorité des citoyens qui composent le Peuple Français a voté en faveur du projet présenté, ce citoyen qui aime sa patrie, il regardera comme un devoir de sacrifier ce que ses lumières, sa raison, ses anciens serments lui dictent pour obéir à un acte – qu’il ne pourra jamais aimer, quoique devenu pacte social – à cause de l’adhésion qui lui aura été donnée par la majorité des citoyens composant le peuple français12. »

14D’après cette déclaration, est-ce qu’on pourrait voir en Lecointre un représentant de la démocratie post-robespierriste ? Oui et non. D’un côté, il est certain qu’il partage la culture politique directoriale car – comme Thomas Paine, d’ailleurs – il garde un profond respect pour la sacralité de la pratique électorale, réputée comme la seule expression de la volonté générale, mais il est en même temps aussi vrai qu’il ne se pose pas la question – et là la distinction avec Paine est nette – de la nécessité d’un état de civilisation préliminaire qui, seul, pourrait assurer une valeur profonde et véritable à la liberté politique. À cet égard, le discours de Lecointre ne manque pas d’un lien profond avec la culture politique de la démocratie, mais il exprime des idées qui ne tirent point de conclusions de ce qui s’est déroulé entre temps en France et propagé dans l’Europe des républiques sœurs.

15Soit les élections lui apparaissent, ipso facto, comme la démonstration de l’aptitude du peuple à gérer les affaires publiques, soit il n’avait pas encore une idée précise du message bonapartiste, il n’en est pas moins vrai que ses paroles ne sont pas du tout en phase avec la problématique politique débattue à cette époque, car la persistance de cette attitude face à la volonté générale indique que Lecointre ne renie rien de son expérience politique et en même temps exclut la dimension abrupte de la Terreur dans les événements révolutionnaires. En revanche, dans les années du Directoire, la réflexion du « parti » démocratique n’excluait pas du tout qu’à l’occasion de l’an II, la démagogie et la fureur des intrigants aient d’abord trompé le peuple et l’aient enchaîné ensuite par la Terreur : d’où le désastre culturel et politique d’une société qui avait cru en la possibilité d’une république démocratique et qui n’avait reçu que de la violence de la part d’un personnel politique animé par un esprit de persécution. L’insistance à vouloir disqualifier l’expérience du gouvernement révolutionnaire avait en effet pour contrepartie un dessein politique, qui, en imposant l’idée de la nécessité d’une pédagogie démocratique, visait à établir la capacité concrète du peuple à gérer la chose publique.

  • 13 Voir Th. Paine, Age of reason, New York, Swords, 1794, p. 153-188 : Epitome of Lequinio’s Prejudic (...)
  • 14 M.-J. Lequinio, Guerre de la Vendée et des chouans, Paris, Impr. du Cercle social, an III, p. 190  (...)

16Tel est le cas de Marie-Joseph Lequinio, un homme qui avait été proche des Girondins (c’est le Cercle Social qui imprima en 1793 ses Préjugés détruits, un ouvrage dont Thomas Paine fait la préface dans la première édition en langue anglaise du Siècle de la raison)13, mais aussi conventionnel en mission en Vendée et qui, dans son essai d’histoire de la guerre civile, met en évidence le fait que la violence paysanne dérivait de la fureur de certains émissaires du pouvoir parisien qui avaient contraint les collectivités – par le pillage et les mauvais traitements, par le mensonge et la trahison – à choisir la cause de la réaction. La conséquence que l’on devait déduire c’était que – à cause de la Terreur – l’instruction et le bonheur du peuple s’étaient brutalement affaiblis, et que la Révolution aurait pu vaincre ces obstacles dans la seule hypothèse où les élites révolutionnaires auraient tout mis en œuvre pour traduire les intérêts profonds des collectivités. Des collectivités jusqu’alors dominées par la violence terroriste et par la superstition religieuse, rendues somme toute indifférentes à la nouvelle culture envisagée par la Révolution14. Les masses populaires semblaient, au lendemain de l’an II, en difficulté dans l’exercice même de leurs droits, en proie aux anciennes valeurs et donc susceptibles de redevenir révolutionnaires par le seul biais d’un effort renouvelé en faveur de l’instruction civique.

  • 15 Voir par exemple, C. Pelegatti, Filosofia del popolo o sia dialoghi tra un filosofo e un contadino (...)

17C’est pourquoi le souci d’éduquer le peuple, par un programme d’éducation morale, à apprécier les biens que donne la liberté, redevenait, dans la France du Directoire heureusement échappée à l’intrigue babouviste et à la popularité du royalisme, une perspective centrale pour le triomphe de la cause démocratique. D’où l’autre œuvre de Lequinio, la Philosophie du peuple, ouvrage paru en 1796 et bien connu dans les cercles patriotiques des républiques-sœurs15, qui indiquait pour l’équilibre social le bastion de l’égalité politique, et qui prônait la cause de l’éducation morale pour le bien et le progrès des collectivités de France. Toutefois, cette fièvre pédagogique n’était pas sans danger : bien que parue dans le milieu jacobin, cette nouvelle attitude qui prônait un retour aux masses par les formes et les moyens de la diffusion de la morale républicaine, ne pouvait que rencontrer un écho favorable auprès des milieux modérés dont la méfiance face à l’exercice direct de la souveraineté populaire ne s’était guère démentie depuis 1792. La convergence de ces intérêts politiques pourtant bien différents avait lieu sur le terrain du maintien de l’ordre né de la Révolution et favorisait, par conséquent, une synthèse politique empruntée au triomphe révolutionnaire coûte que coûte, dont le 18 fructidor ne tarda pas à tirer parti. En effet, ce qui était nécessaire pour le Directoire, se débarrasser d’une opposition parlementaire dominée, à tort ou à raison, par des éléments contre-révolutionnaires, l’était encore davantage pour le mouvement néojacobin pour qui le royalisme, sous quelque forme qu’il se présente, restait une menace constante.

18C’est pourquoi, en ce qui concerne le mouvement démocratique, les effets de la journée du 18 fructidor sont dominés par l’ambivalence : d’une part l’épuration des conseils permit à nombreux anciens jacobins de rentrer sur la scène politique, mais d’autre part, il n’est pas douteux que l’espoir fondé d’un nouveau départ qui permettrait le correctif de la diffusion, enfin, de la vertu républicaine était né à l’ombre de l’acceptation d’un coup d’état, qui visait à corriger la différence de taille entre la théorie et la pratique du suffrage. Par conséquent, il ne faut pas mésestimer le fait que le temps fécond du jacobinisme dans la France du Directoire cache une ambiguïté bien profonde, parce que la reprise révolutionnaire au lendemain de fructidor a révélé combien la saison de la liberté et les progrès de la démocratie n’étaient absolument pas liés intimement ni à la diffusion de la morale républicaine, ni donc au consensus populaire. En d’autres termes, il ne faut pas oublier, que les victoires électorales en l’an VI et en l’an VII représentaient l’espoir et le vœu nourris par les démocrates d’un peuple français de plus en plus résolu à reprendre en mains les destins révolutionnaires, mais n’impliquaient aucune conséquence directe.

19Ce qui nous est curieusement confirmé par l’interprétation que les néo-jacobins font des triomphes des armées françaises à l’étranger. Au lendemain de la campagne d’Italie, et jusqu’à la guerre contre la seconde coalition, plutôt que d’affirmer l’expansion révolutionnaire, les victoires françaises en Europe leur semblent relancer, d’une façon qui tourne au drame, la question de la minorité culturelle et donc politique, des masses. Il paraissait aux néo-jacobins que, face à des peuplades brisées par le poids de la domination nobiliaire et religieuse, le Directoire s’était inconsidérément lancé dans une aventure de conquêtes, qui présentait des caractères communs avec celle du gouvernement révolutionnaire dans la province française en 1793. À ce propos, les démocrates français sont bien convaincus que dans les républiques-sœurs, les collectivités, écrasées par un despotisme séculaire, sont très méfiantes par rapport à la Révolution. Cependant, face à cette situation dramatique, ils craignent que la conduite du Directoire ne prépare de loin – comme en Vendée – la Contre-Révolution des pays où la République portait la guerre. En Italie comme en Suisse, d’ailleurs, les agents de Paris semblent les descendants directs des envoyés du gouvernement révolutionnaire dans les provinces françaises en l’an II, car, en faisant malheureusement preuve de corruption et d’immoralité et en se désintéressant du bonheur de plusieurs collectivités différentes de mœurs, de religion, d’intérêt, de climat et de langage, ils les tournent inévitablement vers la Contre-Révolution.

20C’est pourquoi les démocrates français, qui avaient déjà expérimenté en 1793 le drame de la guerre civile allumée en Vendée et dans les départements fédéralistes, montrent une forte initiative contre la corruption et l’immoralité dont font malheureusement preuve les autorités même de la France, et prennent soudainement parti pour les patriotes italiens, helvétiques ou bataves, qui réclament l’indépendance d’action face à l’oppression administrative et financière du Directoire. À leur avis la ligne politique du gouvernement de Paris, qui prétend s’immiscer dans des contextes bien particuliers et tout à fait différents de ceux de la France, risque de plonger les alliés dans le drame d’une guerre civile qui les empêcherait de répandre la vérité révolutionnaire.

21L’an 1799, avec la perte de l’Italie et les graves tensions dans les républiques batave et helvétique, sembla pourtant la réplique, amplifiée, du drame connu par la France à l’occasion de 1793. À l’époque, la République française, dominée par un gouvernement de factieux et d’intrigants, avait failli sombrer dans la violence. En 1799, les républiques-sœurs en Italie s’étaient par contre écroulées et la défection des Cisalpins, des Romains et des Napolitains était l’ouvrage encore une fois d’un exécutif immoral qui, par des mesures oppressives, avait aliéné des armées et un mouvement révolutionnaire des peuples, qui sans elles leur seraient restés attachés. Ainsi, méfiance par rapport à l’exécutif au nom de la primauté du corps législatif, recherche d’un exercice possible de la souveraineté, conscience que la dimension politique de la Révolution avait largement pris au dépourvu les masses populaires, effroi face au manque d’éducation civique et de moralité de la classe dirigeante qui avait tout d’abord profité de la Terreur et qui s’était ensuite mise à la tête des affaires publiques : bref, le discours de la démocratie à l’époque du Directoire ne manque pas d’approfondissement critique et donc d’originalité, mais il est certain aussi que sous le poids de la conjoncture occasionnée par la guerre en Europe, il exprime de plus en plus des idées dont on pourrait faire une adroite utilisation dans un but contraire.

  • 16 Paris-Strasbourg, Levrault, an IX (1801), vol. I, p. 12 : « Le système politique que j’abhorre le (...)

22Prenons à ce propos l’exemple d’un autre écrivain d’origine étrangère, l’anglaise Helen Mary Williams, elle aussi en son temps très proche des Girondins, elle aussi en son temps une victime de la dictature robespierriste, qui en l’an IX, dans son Aperçu de l’état des mœurs et des opinions dans la République française vers la fin du xviiie siècle, introduisait un lien entre le règne des jacobins en 1793 en France et la terreur royale en 1799 à Naples16. Apparemment, les deux épisodes sont opposés. En revanche, dans le récit proposé par l’écrivain anglais, on retrouve deux exemples sanglants des conséquences qu’on doit inévitablement tirer du manque de préparation culturelle. En France, c’était les Jacobins qui portaient la responsabilité de la Terreur, parce que, eux seuls, en s’appuyant sur l’intrigue et sur l’esprit de faction, avaient prétendu dominer les progrès de la Révolution et avaient donc privé le peuple d’un esprit public qui était pourtant en train de se développer, et qui aurait seul pu empêcher la montée de la vague meurtrière. À Naples, en revanche, le peuple avait été livré à la violence par un aveuglement et un abrutissement dont le roi de Naples et les prêtres avaient sordidement fait preuve. Et toutefois, les conséquences de la terreur royale dans le Midi de l’Italie ressemblaient singulièrement à celles des robespierristes, car toutes les deux avaient comporté l’écrasement d’une classe politique qui, en France comme en Italie, ne songeait qu’à faire jouir d’une équitable liberté la nation, et à soulager les besoins d’un peuple longtemps vexé et opprimé, en propageant la lumière et l’instruction qui, seules, auraient fait aimer la Révolution. D’où la crise qui avait failli ruiner la France à l’occasion de la guerre en 1799, car les défaites de l’armée provenaient de l’impréparation d’une classe politique qui avait été lourdement affaiblie et fragmentée par la Terreur.

  • 17 Ibidem, vol. II, p. 17.

23C’est pourquoi Miss Williams se distinguait désormais des démocrates ne partageant pas du tout les critiques envers Brumaire : elle convenait qu’il fallait gémir sur les circonstances qui avaient rendu indispensable la prise du pouvoir de Bonaparte – et notamment la disparition, qui remontait à l’époque de la Terreur, d’une classe politique vouée au bonheur du peuple – mais, confrontée à la réalité des faits, elle réagissait en acceptant le coup d’état : « Ne soyez pas surpris si je ne partage nullement l’humiliation que, suivant vous, cet événement fait éprouver aux amis de la liberté… le manque de réflexion, ou l’ignorance des détails de cette affaire, peut seul obscurcir un moment le triomphe de ceux qui croient que l’existence de la liberté en Europe repose sur la destinée de la République française17. »

  • 18 Ibid., vol. II, p. 290.

24D’après Miss Williams, l’état politique de la France de l’an VIII était d’ailleurs « la démocratie purgée de tous ses inconvénients. Il n’y a plus ici de populace à remuer au forum ou dans les clubs : la classe ignorante n’exerce plus aucune influence ni sur la législature, ni sur le gouvernement ; pourtant, plus de démagogues. Tout se fait pour le peuple et au nom du peuple ; rien ne se fait par lui ni sous sa dictée irréfléchie : et tandis que sa force colossale anime toutes les parties de l’organisation publique, tandis que sa souveraineté, source véritable, source unique de tous les pouvoirs, imprime à leur différents actes un caractère solennel et sacré, il vit tranquille sous la protection des lois ; ses facultés se développent, son industrie s’exerce et s’étend sans obstacles ; il jouit, en un mot, des doux fruits d’une véritable liberté, garantie par un gouvernement assez fort pour être toujours protecteur18 ».

  • 19 Voir à ce propos les articles parus dans A. de Francesco (dir.), La democrazia alla prova della sp (...)

25Il s’agissait d’une ouverture de longue durée par rapport au bonapartisme qui allait définitivement distinguer Miss Williams de la gauche française : confrontée à l’éventualité de la dissolution de la liberté face à la menace des armées étrangères, elle avait réagi par des applaudissements à Bonaparte et s’était effectivement démarquée des démocrates qu’elle refusait de suivre dans leurs positions critiques face à Brumaire. Ainsi, en 1799, en rejetant la démocratie représentative et les critiques à la constitution de l’an VIII au nom d’un pouvoir qui se voulait populaire mais en même temps excluait l’intervention sur la scène politique des masses, Miss Williams révélait désormais une inflexion politique évidente. Toutefois, les circonstances qui la conduisirent à faire ses premiers pas dans le bonapartisme portent à croire que son acceptation de Brumaire ne constituait pas du tout un brusque glissement d’un champ politique à un autre, car nul ne peut douter de la sincérité d’un parcours politique qui l’avait précédemment vue partager tout d’abord les espoirs révolutionnaires des girondins et ensuite celles de la démocratie post-robespierriste. Le jugement d’ensemble qu’elle porte sur l’œuvre du Directoire – dont la faiblesse et la corruption avaient failli faire perdre la Révolution – nous confirme à cet égard l’impression que ses critiques face à l’exécutif naissaient à gauche, et nous révèle d’autre part que le succès de Bonaparte plongeait également ses racines dans la culture de la démocratie post-robespierriste19.

26En clair, on ferait tort à la complexité des choses si l’on considérait les années du Consulat comme une époque de minorité politique par rapport aux années précédentes. En revanche, au lendemain de la prise de pouvoir de Bonaparte, en France comme dans les républiques alliées, tandis que les modérés, les conservateurs, quelques réactionnaires aussi, vont se regrouper, plus ou moins obtorto collo, sous le drapeau du Consulat, la démocratie parait incertaine. Brumaire était méprisable parce qu’il avait détruit la Constitution et la liberté, et le coup d’état paraissait aussi rassembler et résumer toutes les voix, qui à gauche s’étaient précédemment déclarées contre la politique du Directoire. Cependant, cette dichotomie est longtemps restée lettre morte en historiographie et cela a empêché de retrouver le sens d’une liaison entre la tradition démocratique et le bonapartisme qui était néanmoins bien évidente aux contemporains. Et d’ailleurs comment interpréter l’exaltation des patriotes italiens, suisses, bataves face à Brumaire ? Est-ce qu’ils étaient tous tellement fascinés par le héros revenu d’Orient qu’ils se félicitaient les uns aux autres ? Est-ce qu’ils avaient tous tellement perdu les données de la conjoncture politique qu’ils s’abandonnaient à l’enthousiasme ? La vérité, cela va de soi, est ailleurs : et notamment, dans l’espoir que les patriotes d’Europe nourrissaient pour une soudaine reprise victorieuse de la guerre et dans les vœux qu’ils faisaient pour un nouvel ordre international où les jeunes républiques seraient enfin devenues alliées et non plus satellites de la France. Ces manifestations d’enthousiasme ont été insuffisamment prises en considération par l’historiographie qui a d’ailleurs refusé toute comparaison avec le cas français. Par contre, une recherche sur les adhésions au Consulat de la part des démocrates ne serait pas à mon avis tout à fait inutile, et je crois que les conditions culturelles ici à peine esquissées, pourraient être à ce propos de quelque importance.

Notes

1 Je renvoie aux Actes du colloque de Clermont-Ferrand, La République directoriale, textes réunis par Ph. Bourdin, B. Gainot, Paris, Société des études robespierristes, 1998, 2 vol.

2 Voir surtout B. Gainot, 1799. Un nouveau jacobinisme ? La démocratie représentative, une alternative à Brumaire, Paris, CTHS, 2001 ; P. Serna, Antonelle. Aristocrate révolutionnaire, 1747-1817, Paris, Éditions du Félin, 1997, p. 241-388.

3 I. Woloch, Jacobin legacy. The Democratic Movement under the Directory, Princeton, University Press, 1970 ; J.-R. Suratteau, Les élections de l’an VI et le coup d’État du 22 floréal (11 mai 1798), Paris, Les Belles-Lettres, 1971.

4 À ce propos, voir S. Luzzatto, L’autumno della rivoluzione. Lotta e cultura politica nella Francia deltermidoro (trad. fr., L’automne de la Révolution : luttes et cultures politiques dans la France thermidorienne, Paris, Champion, 2001).

5 En ce qui concerne l’Italie, voir A. M. Rao, Esuli. L’emigrazione politica italiana in Francia, 1792-1802, Napoli, Guida, 1992, p. 61-109.

6 Voir les précisions apportées par L. Guerci, Istruire nelle verità repubblicane. La letteratura politica per il popolo nell’Italia in rivoluzione (1796-1799), Bologna, il Mulino, 1999, p. XXX.

7 Th. Paine, La justice agraire opposée à la loi et monopole agraire ou plan d’amélioration du sort des hommes, Paris, Marchands de nouveautés, an V, p. 4-6.

8 Ibidem, p. 20-21.

9 G. Kates, « From liberalism to radicalism : Tom Paine’s Rights of Man », Journal of the history of ideas, 60, 1989, p. 569-587.

10 Qu’il me soit permis à ce propos de renvoyer à mon Il governo senza testa. Movimento democratic e federalismo nella Francia rivoluzionaria, 1789-1795, Napoli, Morano, 1992, p. 412-42.

11 G. Kates, The Cercle social, the Girondins, and the French Revolution, Princeton, University Press, 1985.

12 P. Fromageot, « Laurent Lecointre, député de Seine-et-Oise, à la Législative et à la Convention, 1742-1805 », Revue de l’histoire de Versailles et de Seine-et-Oise, 1899, p. 65-7.

13 Voir Th. Paine, Age of reason, New York, Swords, 1794, p. 153-188 : Epitome of Lequinio’s Prejudices destroyed.

14 M.-J. Lequinio, Guerre de la Vendée et des chouans, Paris, Impr. du Cercle social, an III, p. 190 : « Habitants du pays, simples cultivateurs, propriétaires ou fermiers, mais tous originaires de la localité, attachés nécessairement à leur propriété, à leur famille, à leur terme, et n’ayant aucun intérêt au désordre, ayant au contraire tout intérêt à voler, et ne se le permettant pas, trompés par le fanatisme et croyant de bonne foi se battre pour la divinité, méprisant la vie et la perdant souvent avec un courage héroïque… on les a contraints par le pillage et les mauvais traitements par le mensonge et la trahison de choisir entre deux partis, ou de rejoindre l’armée catholique… ou d’être fusillés sans miséricorde ; est-il étonnant qu’ils aient choisi le premier lot ? »

15 Voir par exemple, C. Pelegatti, Filosofia del popolo o sia dialoghi tra un filosofo e un contadino sui principi della politica e della morale ad istruzione degli abitanti della campagna, Milano, 1798.

16 Paris-Strasbourg, Levrault, an IX (1801), vol. I, p. 12 : « Le système politique que j’abhorre le plus est celui de la terreur, soit qu’elle se présente sous la forme des jacobins de France, ou des royalistes de Naples. »

17 Ibidem, vol. II, p. 17.

18 Ibid., vol. II, p. 290.

19 Voir à ce propos les articles parus dans A. de Francesco (dir.), La democrazia alla prova della spada. Esperienza e memoria del 1799 in Europa, Milan, Guerini, 2003.

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