Chapitre 13. Les îles de la Compagnie
p. 351-384
Texte intégral
1La Compagnie des îles de l’Amérique n’a pas vocation à simplement gérer un territoire, elle doit au contraire avoir une vision conquérante. Le contrat établi en 1626 entre la première compagnie des îles et le cardinal de Richelieu prévoit ainsi de « faire habiter et peupler les îles de Saint-Christophe et la Barbade, et autres situées à l’entrée du Pérou, depuis le onzième jusqu’au dix-huitième degré de la ligne équinoxiale1 ». Les débuts difficiles de la colonie de Saint-Christophe ne lui permettent pas de se lancer dans de nouvelles conquêtes, mais des missions d’exploration sont menées pour évaluer le potentiel des îles voisines. Le rétablissement de la Compagnie en 1635 amorce une nouvelle étape de l’expansion française dans les Petites Antilles avec la prise de la Guadeloupe et à la Martinique et l’extension de la zone de privilège « depuis le dixième jusqu’au vingtième degré au-deçà de la ligne équinoxiale2 ». En 1642, son périmètre d’intervention est étendu jusqu’au trentième degré3. La monarchie apparaît à travers ces concessions extrêmement soucieuse de son expansion territoriale, non seulement parce qu’elle permet l’affirmation commerciale de la France dans l’Atlantique, mais encore parce qu’elle permet de projeter l’autorité de l’État dans un espace lointain en s’affranchissant des limites physiques du royaume. La Compagnie est un instrument fondamental de ses velléités impérialistes.
2Mais existe-t-il un plan d’expansion ? Et quels en sont les grands axes ? La concurrence des nations hollandaise et anglaise influence vraisemblablement les projets de conquête, au risque d’attiser les tensions. Les Anglais sont les plus offensifs. Ils convoitent même les Grandes Antilles. Si leurs premières tentatives d’implantation à la Jamaïque en 1597 et en 1635 se révèlent infructueuses, ils seront plus heureux en 16554. Mais comment concilier expansion territoriale et peuplement des îles ? Ne vaut-il pas mieux assurer un établissement et bien le défendre et le peupler que se disperser sur plusieurs sites ? Le passage des hommes d’une île à l’autre peut laisser craindre le dépeuplement de certaines, d’autant que le flux migratoire vers les Antilles demeure faible. Les associés ont rapidement compris que le nombre d’hommes désireux de s’établir aux îles était assez réduit. Ils sont lucides. Aussi mènent-ils une politique appropriée et pleine de mesure.
Le désir d’îles nouvelles
3L’expansion territoriale de la Compagnie suit différentes modalités. Ainsi le premier contrat de 1626 charge très clairement Pierre Belain d’Esnambuc et Urbain de Roissey de ne pas rester à Saint-Christophe et de pousser leur avantage sur la Barbade et les îles proches5. C’est dans cet esprit que d’Esnambuc envoie des navires en reconnaissance dans la Caraïbe. Il tente même, il est vrai pressé par les événements, car les Français ont été chassés de Saint-Christophe par les Espagnols en 1629, de s’établir dans d’autres îles. Mais le nombre d’hommes dont il dispose alors limite ses velléités. Il ne part à la conquête de la Martinique et de la Dominique qu’après avoir affermi son pouvoir et renforcé ses appuis. Mais en 1635, la Compagnie choisit une autre stratégie en ne confiant à chaque capitaine que la conquête et le gouvernement d’une seule et unique île. Ainsi, quand L’Olive et du Plessis partent pour la Dominique, la Guadeloupe ou la Martinique leur est-il notifié que s’ils conquièrent deux îles, ils en tiendront chacun une6. Ils ne doivent pas s’établir ailleurs. Les capitaines généraux n’ont pas vocation à fonder de nouveaux établissements. La Compagnie entend dorénavant maîtriser son développement territorial. Il doit être mesuré et contrôlé pour ne pas risquer de fragiliser les efforts entrepris et de compromettre les équilibres régionaux.
La Compagnie et les projets de colonisation
4La Compagnie est rarement à l’origine des conquêtes. Elle soutient en revanche les projets pour la colonisation d’îles nouvelles qu’elle reçoit tout au long des années trente et quarante. Il est pour cela malaisé de parler d’une planification de l’expansion. Les associés apparaissent davantage comme des opportunistes. Mais s’il n’existe pas à proprement parler de plan, il apparaît néanmoins que la Compagnie a ses préférences. Elle privilégie dans un premier temps les projets qui permettent d’affermir ses positions dans les îles nouvellement découvertes, la Martinique et surtout la Guadeloupe7. Dans un second temps, au mitan des années quarante, elle envisage de s’établir dans des îles plus lointaines. Jean-Baptiste Dutertre veut croire que ce sont les exigences du terrain qui ont conduit à envisager de nouvelles conquêtes8. Pourtant, la plupart des projets n’émanent pas des hommes des îles mais d’officiers métropolitains.
5En 1636, la Compagnie autorise le capitaine Girault qui lui en a fait la demande à prendre possession en son nom de l’île de la Désirade. Les directeurs se chargent de négocier avec lui un contrat9. Cela ne coûte pas grand-chose aux associés car tout est à la charge du capitaine comme dans la plupart des contrats de ce type. Il s’agit vraisemblablement aux yeux des directeurs d’assurer la protection de la Guadeloupe. Cependant, en 1637, Girault est en mauvaise posture car il a perdu de nombreux hommes lors de la traversée. La Compagnie, ayant à cœur de voir ce projet se concrétiser, lui permet de passer à la Désirade avec trente hommes de Saint-Christophe10.
6En 1637, Martin de Maunoy présente à ses amis un projet de colonisation d’une île porté par le baron de Vanves. Après examen, les associés lui accordent le gouvernement de l’île qu’il conquerra. Il obtient « en domaine et toute justice le quart de ladite île ». Les autres terres seront distribuées par la Compagnie à des particuliers. Il pourra avoir soixante personnes à son service, exempts de tous les droits dus à la Compagnie, et recevra le vingtième des fruits marchands de toute ladite île pour son entretien. Les obligations du baron sont de faire bâtir un fort à ses frais, de payer les officiers qui seront envoyés par la Compagnie et de faire passer « à ses frais et dépens », deux ou trois cents familles dans les deux ou trois ans à venir. « À faute de satisfaire à toutes lesdites clauses et conditions dans ledit temps, ladite concession […] est déclarée nulle et de nul effet11 ». C’est ce qui a dû se produire, car on n’entend plus parler de cette affaire par la suite. Nous ne savons les raisons de l’intérêt du baron de Vanves pour les Antilles. Son identité demeure elle aussi mystérieuse. S’agit-il du seigneur de Vanves, Jean Le Prévost, sieur de Saint-Germain de Lassis, dont la nièce Marie Le Prévost a épousé Louis Houël, le père du futur associé de la Compagnie et capitaine général de la Guadeloupe, ou de son fils aîné Jean Le Prévost12 ? Auquel cas la mort des deux hommes en 1637 expliquerait l’abandon du projet de colonisation.
7Le cas de la Tortue apparaît, dans ce contexte, un peu particulier, non seulement en raison de l’éloignement de l’île des bases françaises, mais encore des modalités de sa conquête. La Tortue est convoitée par la Compagnie depuis de longues années mais c’est le capitaine général de Saint-Christophe, Philippe de Longvilliers de Poincy, qui, guettant le bon moment, réussit l’implantation en envoyant Le Vasseur pour prendre l’île au nom de la Compagnie en 1641. Cependant, l’éloignement ne permet pas d’assurer un contrôle véritable de l’île et Le Vasseur rompt bientôt le lien avec la Compagnie sans être autrement inquiété.
8Le 3 mars 1645, Nicolas Fouquet présente aux associés un projet de Constant d’Aubigné pour habiter l’île de Marie-Galante13. Le projet leur semble de prime abord séduisant. Le fait que d’Aubigné connaisse un peu les îles pour y séjourner depuis quelques temps – il s’est établi à la Martinique en 1644, puis il s’est fixé à la Guadeloupe14 après quelques déconvenues en France lui – donne une certaine crédibilité15. Cependant ils ont quelques réticences à le suivre dans cette affaire car ils craignent d’une part que le gouverneur Charles Houël n’en porte ombrage car cette île est proche de la Guadeloupe, et d’autre part qu’il en résulte des complications, l’île étant convoitée par d’autres nations. Ils s’assurent pour cela de l’avis de Houël et prennent les devants en invitant d’Aubigné à « s’habituer en une autre île au lieu de celle de Marie-Galante en cas qu’elle se trouve habitée par les Irrois [Irlandais16] ». Le risque indien n’est pas en revanche évoqué par les associés. Pourtant, il existe, car l’île est fréquentée par les Indiens de la Dominique qui y font leurs jardins. Raymond Breton souligne pour sa part qu’ils attachent une grande importance à l’île de Marie-Galante et qu’ils n’apprécieront pas de la voir occupée par les Français17. Les associés connaissent vraisemblablement cette situation mais elle n’est pas selon eux un obstacle. Forts de l’aval de Houël, ils préparent bientôt une commission et un contrat. Ils invitent Constant d’Aubigné à une réunion à Paris le 31 mars 1645 afin de s’entendre sur les derniers points de l’entreprise. Ce dernier s’engage ainsi à passer soixante Français par an pendant six ans. Les nouveaux habitants seront exonérés des droits dus à la Compagnie pendant trois ans afin de favoriser leur installation, et ceux qui viendront d’une autre île devront payer les droits accoutumés. Le gouvernement lui est cédé pour trois ans renouvelables. Il nommera aux charges. Il obtient vingt hommes exempts des droits pour son service. Les papiers sont signés et d’Aubigné prête alors le serment de gouverneur de l’île de Marie-Galante entre les mains de d’Aligre18. L’affaire connaît une succession de contretemps malheureux qui la font relever de l’épopée. Constant d’Aubigné quitte la France à la fin de l’année 164519. Entretemps, sa femme a quitté Marie-Galante pour s’établir à la Martinique. D’Aubigné s’installe à Saint-Christophe auprès de Poincy20. D’Aubigné aurait-il changé ses plans ? Louis Merle pense qu’il a des vues sur Saint-Christophe, mais sans véritablement les expliciter. Ses intrigues ne porteront pas et toute la famille d’Aubigné regagne définitivement la France à la fin de l’année. Constant d’Aubigné meurt à Orange le 31 août 1647 – et non aux Antilles comme il apparaît dans de nombreuses biographies anciennes21. Son passage aux îles n’a pas laissé beaucoup de traces dans l’histoire des îles, il n’est même pas évoqué par Dutertre.
9Marie-Galante continue cependant d’animer les conversations des associés. Le 8 février 1647, ils confient la conduite de la colonisation de l’île à deux anciens capitaines de Saint-Christophe, Louis Haussier dit de La Fontaine et Antoine Camot22. Il s’agit avant tout d’offrir une terre d’accueil aux colons qui ont été chassés de Saint-Christophe par Poincy pour avoir soutenu le nouveau lieutenant général du roi Patrocle de Thoisy et qui se trouvent disséminés dans les îles anglaises et hollandaises, pour les rassembler. Haussier et Camot espèrent beaucoup du projet car ils demeurent attachés aux îles. Ils ne réussissent cependant pas mieux que les autres dans leur entreprise de fondation d’une colonie à Marie-Galante. Ils engloutissent sans grands résultats les 2000 livres que madame Patrocle de Thoisy leur obtient de la reine-régente Anne d’Autriche. Dutertre rapporte que leur situation laisse indifférent les colons qui ne veulent « prêter un sol pour l’établissement de cette prétendue colonie ». Les deux capitaines abandonnent. Camot s’établit à la Martinique où du Parquet le reçoit à bras ouverts23. Haussier, vraisemblablement d’esprit plus aventureux, participe à l’expédition montée par le baron de Dormeilles pour la Terre-Ferme. Il disparaît sur la côte des Guyanes en compagnie du capucin Pacifique de Provins et de vingt-deux hommes lors d’une reconnaissance en 164824.
10Au milieu des années quarante, ce sont principalement les îles lointaines qui attirent le plus l’attention des Français, notamment la Grenade et Tobago au sud, et dans une moindre mesure les Lucayes au nord. Cette réorientation des projets peut s’expliquer par les échecs rencontrés dans les tentatives de colonisation des petites îles près de Saint-Christophe, la Martinique et la Guadeloupe. Par ailleurs, Hollandais et Anglais ont pris le contrôle d’un grand nombre d’îles. Il faut donc regarder plus loin.
11Les projets visant la Grenade sont assez anciens et assez nombreux, mais ils ne se concrétisent que tardivement. L’île est fréquentée dans les années vingt par les Hollandais car elle est sur la route du sel vénézuélien d’Araya, puis ils la délaissent25. La Grenade attire bientôt l’attention de Poincy. Le rapport que lui fournit Bonnefoy, qui y passe en venant du continent, lui laisse quelques espoirs. Cependant, la présence de nombreux Indiens ne le rassure pas et il préfère ne pas se risquer dans cette aventure. L’éloignement de l’île de Saint-Christophe a vraisemblablement aussi pesé dans cette décision. Le lieutenant général de la Guadeloupe, Aubert, qui cherche une île où se replier en cas de conflit avec Houël, y dépêche à son tour quelques temps plus tard le sieur Postel pour évaluer la situation. Mais il est bien trop accaparé par ses disputes avec Houël pour s’occuper avec toute l’attention requise de cette entreprise26.
12Le 7 juillet 1645, la Compagnie commet alors un gentilhomme bourguignon, Philbert de Nouailly, sieur de La Tour de Néron, comme gouverneur de la Grenade et des Grenadines pour quatre ans27. L’homme ne manque ni d’idées ni d’audace. Il a probablement forgé ce projet quand il est passé au large de l’île, après l’échec de l’expédition de Charles Poncet de Brétigny au Maragnan28. Il n’avait visiblement pas, malgré ses aventures, conservé un souvenir trop pénible de son séjour outre-mer.
13Nouailly est un homme consciencieux. Il prépare soigneusement son expédition. Il choisit deux carmes de Touraine pour l’accompagner : Maurile de Saint-Michel et Ambroise de Sainte-Anne. Il est intéressant de noter le recours à un ordre qui n’est pas dans une démarche missionnaire. En effet, les carmes de Touraine sont un ordre réformé plutôt enclin à la pénitence et la prière. Les raisons de ce choix semblent relever d’un concours de circonstance. Maurile de Saint-Michel rapporte en effet que c’est en se rendant à Nantes que Nouailly a croisé le chemin d’Ambroise de Sainte-Anne et qu’il l’a convaincu de venir avec lui à la Grenade. Cette version est corroborée par Nouailly dans une lettre au révérend père Léon de Saint-Jean dans laquelle il parle d’une « rencontre »29. Les pères Ambroise de Sainte-Anne et Maurile de Saint-Michel reçoivent l’approbation de leur provincial pour cette mission30. Le 2 juin 1646, Nouailly intéresse à son affaire un certain Beaumanoir qu’il fait lieutenant général. La Compagnie avalise la nomination le 11 juillet31. Il s’entend aussi avec des marchands nantais, Pierre Despinose et François Suhard, pour qu’ils équipent un navire pour passer des engagés en échange des productions à venir32. L’expédition quitte la France le 18 juillet 1646 et arrive aux îles à la fin du mois d’août. Nouailly rencontre Poincy à Saint-Christophe dans l’espoir de susciter son intérêt pour la colonisation de la Grenade, mais ce dernier ne lui apporte aucune aide, voyant en lui une créature de la Compagnie avec qui il est en conflit33. Nouailly n’abandonne pas son projet. Il nomme en 1647 sénéchal de la Grenade l’ancien juge de Saint-Christophe, Pierre Chirat34. Mais il est bientôt à court de ressources et ne peut satisfaire à ses engagements dans l’immédiat, aussi réclame-t-il à la Compagnie de nouveaux délais pour faire partir un bateau. Le 8 mai 1648, les associés lui laissent jusqu’à la Toussaint 1649 pour mener à bien son entreprise35. Mais Philbert de Nouailly n’arrive pas à trouver les moyens et les hommes nécessaires pour poursuivre son ambition malgré tous les efforts déployés, et laisse le champ libre à d’autres.
14En 1645, les associés examinent une demande de Louis Hurault, comte du Marais, Vueuil et Chateaupair, et de Charles de Saint-Rémy pour l’obtention en toute propriété et seigneurie de l’île de Tobago qui semble alors abandonnée depuis que les Hollandais en ont été chassés par les Espagnols venus de Trinidad, vraisemblablement aidés par les Indiens, en 163336. Les Anglais de la Barbade ont bien tenté de s’y installer en 1639 et en 1642 mais ils ont dû céder devant la résistance des Indiens37. L’île est à prendre. Après avoir remis une première fois l’examen du projet qui leur est soumis parce qu’ils n’étaient pas assez nombreux pour décider, les associés se retrouvent le 12 décembre 1645 chez Nicolas Fouquet. Fouquet et Berruyer sont chargés de trouver un accommodement avec les deux capitaines. Un contrat et une commission sont établis le 24 décembre. L’assemblée du 5 janvier 1646 approuve l’accord38. Mais le projet de colonisation ne connaîtra même pas un début de concrétisation39.
15En 1646, un gentilhomme angevin, Pierre Rousseau, forme le dessein d’aller habiter l’île de Lucaye (Bahamas). Il s’en ouvre à la Compagnie et lui demande une commission. Les associés accueillent favorablement cette proposition et se décident à traiter avec lui le 2 mars 164640. Il ne semble pas que les négociations aient abouti, car il n’est plus question des Lucayes par la suite. La proximité des établissements espagnols rend le projet difficilement réalisable41. Ce sont finalement les Anglais qui s’établissent dans l’archipel en 164842.
16Si la Compagnie des îles de l’Amérique aspire à voir la fondation de nouveaux établissements, force est de constater que malgré de nombreuses tentatives, seules Saint-Christophe, la Guadeloupe et la Martinique sont sous son autorité dix ans après sa reformation. L’impréparation des expéditions par les hommes qui lui soumettent leurs projets et le manque d’appui des pouvoirs locaux en sont les raisons principales. Si la faisabilité et les risques sont bien évalués par les associés, leur expertise connaît des limites car les éléments dont ils disposent pour apporter une réponse demeurent ténus et ne sont pas toujours vérifiés. Il subsiste une bonne part d’inconnu. La bonne fortune ou la Providence doivent y pourvoir. Cela demeure une aventure.
Le cas des îles peuplées de Caraïbes
17La Dominique et Saint-Vincent sont les deux grandes îles peuplées par les Caraïbes. Elles accueillent les Indiens des autres îles chassés par les Français et les Anglais. Elles sont proches des implantations françaises, et sont donc convoitées. Elles comptent plusieurs milliers d’Indiens43. En 1635, d’Esnambuc prend possession de la Dominique, mais les Français ne s’y établissent pas44. L’île reste aux mains des Indiens45. La seule présence française attestée dans l’île est celle des religieux dominicains. Elle est intermittente. Le 19 janvier 1642, Raymond Breton et Charles de Saint-Raymond partent à la Dominique pour six semaines « pour le salut des Sauvages » contre l’avis du lieutenant général de la Guadeloupe, Aubert, qui craint pour leurs vies et peut-être aussi pour la fragile paix instaurée avec les Indiens. Il s’en ouvre au supérieur de la mission, le père de La Mare, et à Poincy pour les faire rentrer. L’accueil des Indiens n’est pas très bon à la Dominique. Les chefs caraïbes refusent de donner l’hospitalité aux missionnaires. Seul l’un des amis des Français, le capitaine Baron, accepte de les prendre avec lui à Cabesterre. La mission ne dure guère. Le 12 mars 1642, les deux religieux s’en retournent avec Baron à la Guadeloupe, cédant vraisemblablement aux injonctions des autorités46. Poincy sait que les autres puissances ont des vues sur l’île, ce qui pourrait être préjudiciable à la défense des intérêts français, aussi propose-t-il aux associés « d’y loger quelques Français pour la défense et sûreté des Sauvages et par leur moyen pouvoir y établir la traite pour les Français ». La Compagnie suit l’analyse du commandeur et lui demande de tout tenter pour s’établir dans l’île47. Poincy, vraisemblablement retenu par d’autres affaires, ne donne cependant pas suite. La Dominique devient en revanche un enjeu entre les ordres missionnaires qui rivalisent pour s’y implanter et entreprendre l’évangélisation des populations autochtones. Les dominicains l’emportent malgré l’offensive menée par les capucins auprès du lieutenant général du roi, Patrocle de Thoisy, en 1646, pour les favoriser48. Le dominicain Raymond Breton demeure l’un des seuls Français à se rendre régulièrement à la Dominique. Il y effectue plusieurs séjours en 1646, en 1648, en 1649 et en 165049. Quelques capitaines de navire visitent aussi les Indiens de la Dominique pour faire des échanges, voire entretiennent des relations d’amitiés avec eux, mais il n’existe pas d’établissement français dans l’île.
18L’autre grande île peuplée de Caraïbes, Saint-Vincent, suscite peu l’intérêt des Français. Les Anglais ont bien tenté de s’y établir mais ils en ont été chassés par les Indiens50. Seuls les jésuites envisagent d’y établir une mission car le gouverneur du Parquet entretient des relations d’amitié avec les chefs de l’île51. Le père supérieur Jean Hallay envoie André Dejean fonder la mission de Saint-Vincent en 1652, mais il reste peu de temps sur place car il est rappelé dans le courant de l’année à la Martinique. Au mois de mars 1653, Guillaume Aubergeon s’établit à son tour à Saint-Vincent. Il est rejoint par François Gueymu, probablement vers le mois de juin52. Mais les relations entre Caraïbes et Français sont tendues. Le 23 janvier 1654, la situation vire au drame. Des Indiens entrent dans la chapelle des jésuites et tuent Aubergeon à coups de massue alors qu’il s’apprête à dire la messe. Gueymu, qui est proche de l’autel, et deux garçons qui servent la messe subissent le même sort. Leurs os servent à faire des sifflets, les meurtriers conservent les soutanes53. Cela met un terme aux grands espoirs entretenus par les jésuites. Ils ne reviendront que de nombreuses années plus tard. En 1660, le traité de paix franco-caraïbe sanctuarise les deux îles de la Dominique et de Saint-Vincent qui restent aux Indiens54. Les Français et les Anglais abandonnent alors toute velléité de conquête. Mais les missionnaires poursuivent leurs visites.
Les gouverneurs à l’assaut des îles 1648-1650
19Les capitaines généraux prennent à partir de 1648 l’initiative de fonder des établissements dans les îles proches de leur gouvernement afin de conforter leur pouvoir et leur emprise territoriale. Chacun privilégie un ensemble d’îles particulier qui n’entre pas dans le périmètre des autres. L’absence de délibérations de la Compagnie pour cette période nous empêche de connaître le sentiment des associés sur ces conquêtes et les conditions exactes de leur réalisation. Les commandants de ces nouveaux établissements sont directement nommés par les capitaines généraux et non par la Compagnie. Il n’y a pas trace de commission dans les archives.
20Charles Houël envoie en 1648 trente hommes sous le commandement du sieur du Mé prendre le contrôle des trois îles des Saintes au large de la Guadeloupe « au nom du roi et des seigneurs de la Compagnie ». Il envisage essentiellement leur rôle stratégique dans la lutte contre les « forbans » qui y trouvent facilement refuge et menacent les intérêts français. Le 18 octobre 1648, le dominicain Mathias Dupuis y aborde la croix. Mais la sécheresse contraint les Français à abandonner le site. Quelques années plus tard, en 1652, une nouvelle tentative d’implantation a lieu sous la conduite de Buisson Le Hazier pour mettre l’île en culture « avec bon nombre d’hommes55 ». La même année 1648, Houël prend possession de l’île de Marie-Galante au nom du roi et des seigneurs de la Compagnie. La colonie forte de quarante ou cinquante hommes est placée sous l’autorité du sieur Le Fort. Ce dernier rentre à la Martinique après avoir fait construire un fort et des habitations. En 1653, Marie-Galante est attaquée par des Indiens de la Dominique revenant d’un raid sur Antigua. Houël charge alors son frère, le chevalier Houël, de reprendre l’île avec une centaine d’hommes. S’il réussit dans son entreprise, l’établissement demeure toujours sous la menace des Indiens de la Dominique toute proche56. Il semblerait que Marie-Galante ait été un sujet d’entente entre Houël et les associés en 1648. Dutertre cite en effet une lettre du gouverneur de la Guadeloupe dans laquelle il leur demande de lui donner l’île en toute propriété pour « le récompenser de ses peines », c’est-à-dire pour le dédommager des nombreux investissements qu’il a consentis. Il affecte même de se placer sous la protection de la Compagnie, à condition qu’elle ne prenne que « des droits fort médiocres sur les habitants », et qu’il puisse transporter soixante Noirs57.
Carte 8. Les îles sous influence française en 1650.

21Les autres capitaines ne sont pas en reste.
22Poincy regarde vers le nord, vers Saint-Martin et Sainte-Croix, où de nombreux Français se sont déjà établis. Mais pour l’heure, ces îles sont contrôlées par d’autres puissances. Saint-Martin est tenue par les Espagnols depuis qu’ils en ont chassé les Hollandais en 163358. La situation de Sainte-Croix est plus complexe. Elle est disputée par les Français, les Anglais et les Hollandais qui sont les premiers à s’y être installés. Le gouverneur hollandais s’impose mais les tensions avec les Anglais, qui bénéficient de renforts toujours plus nombreux venant de Saint-Christophe et des îles Vierges, sont fortes. À la fin de l’année 1645, les Anglais s’imposant dans l’île. Le gouverneur hollandais est blessé à mort et les Français, qui le soutenaient, sont chassés et se replient sur la Guadeloupe59. L’affirmation anglaise sur l’île n’est pas du goût du puissant voisin espagnol qui mène en 1647 un raid sur la côte est60. Le 10 août 1650, cinq vaisseaux partis de Porto Rico avec mille deux cents hommes à leur bord fondent sur Sainte-Croix. L’opération de débarquement menée de nuit est un succès, cent-vingt Anglais sont tués lors des combats. Les Espagnols laissent trois semaines aux derniers Anglais pour évacuer l’île. Des barques sont envoyées par le gouverneur anglais de Saint-Christophe pour les rapatrier61.
23Tout change ensuite. En 1648, les Espagnols abandonnent Saint-Martin dont l’entretien leur apparaît trop onéreux et démolissent le fort et les citernes. Quelques Français et Hollandais, qui y vivaient cachés, envoient alors un courrier aux gouverneurs de leurs nations respectives pour les informer de la situation. Le gouverneur hollandais de Saint-Eustache, Abraham Adriesen, dépêche sur place le 14 février 1648 le capitaine major Martin Thomas. Poincy envoie de son côté le sieur de La Tour. Mais ce dernier n’est pas accueilli courtoisement par les Hollandais de Saint-Martin. Aussi Poincy se résout-il à l’épreuve de force en envoyant sur place son neveu Robert de Longvilliers avec trois cents hommes. Ils arrivent le 17 mars 1648. Français et Hollandais s’entendent finalement pour se partager l’île le 23 mars 164862. Le départ des Espagnols de Sainte-Croix quelques temps plus tard aiguise tout autant les appétits. Les premiers à réagir sont là encore les Hollandais qui envoient aussitôt deux barques de Saint-Eustache. Cependant, elles tombent sur les gardes de la forteresse laissés par les Espagnols et doivent s’en retourner. Poincy, plus prudent, prépare son action en choisissant des hommes déterminés pour combattre les Espagnols et prendre l’île par la force. Une troupe de cent-soixante hommes débarque à Sainte-Croix sous le commandement de Vaugalan en 1650. Les Espagnols, qui se sont repliés dans la forteresse, capitulent bientôt et regagnent Porto Rico63. Assurément Poincy nourrit un grand dessein pour Sainte-Croix, mais il redoute aussi une réaction des autres puissances, aussi envoie-t-il trois cents hommes de Saint-Christophe pour conforter la colonie française. Il nomme Auger, gouverneur. Il ne confirme pas Vaugalan auquel le gouvernement semblait promis64. Poincy regarde aussi vers la petite île voisine de Saint-Barthélemy. Il y envoie le sieur Legendre en 1648 dans la crainte de voir une autre puissance s’y établir65. Le 25 avril 1648, Poincy avertit le chancelier Séguier de la prise des îles de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy66. L’établissement demeure peu peuplé et fragile67.
24L’expédition aux îles Vierges voulue par Poincy en 1647 relève d’une tout autre logique. Il s’agit avant tout pour lui de se débarrasser des habitants qui ont soutenu le lieutenant général du roi pour les îles, Patrocle de Thoisy, et ont pris le parti du roi. Dutertre pense que le choix de Poincy d’envoyer ces hommes peupler et habiter les îles Vierges est de ne pas s’attirer les foudres de la reine régente, déjà dûment alarmée par sa conduite et la situation des îles, en menant une répression féroce à l’encontre des partisans de son protégé. L’expédition est une manière diplomatique d’éloigner les « indésirables ». Les soixante hommes chargés d’établir une colonie aux îles Vierges sont placés sous le commandement de Le Verrier, « un homme sans esprit, sans lettre et sans expérience », rapporte Dutertre. Ils embarquent sur le navire de Jean Pinart au mois de septembre 1647 et abordent la plus grande île qui avait été reconnue par les Anglais. L’île, fort proche de Porto Rico, est particulièrement surveillée par les Espagnols qui aussitôt montent une expédition pour repousser les Français. Ces derniers ne peuvent résister à l’assaut et préfèrent se retirer dans les montagnes dont ils descendent quand les Espagnols se sont retirés. Cependant ils n’ont plus aucun moyen de subsistance. La situation devient critique. Un petit groupe d’hommes décide finalement de quitter l’île sur une embarcation de fortune. Ils dérivent dans la mer des Caraïbes puis sont pris en charge par un navire marchand qui croise leur route et les conduit à Porto Rico. De là, ils regagnent la France68.
25Du Parquet s’intéresse lui aux îles qui sont au sud de l’arc antillais : Sainte-Lucie et la Grenade, mais il redoute l’attitude des Indiens. Sainte-Lucie a connu un premier établissement anglais, mais en 1640, les Anglais en ont été chassés par les Indiens de Saint-Vincent. Les forts, les magasins et les maisons ont été détruits69. Du Parquet envoie en 1650 le sieur de Rousselan avec trente-cinq ou quarante hommes pour prendre le contrôle de l’île. L’emplacement demeure défensif et peu exploité, et Dutertre note lors de son passage en 1656, qu’il n’y a qu’un fort de palissade avec un canon et une vingtaine d’hommes entretenus pour, dit-il, « empêcher les Anglais de s’en emparer ». Les Français restent paisiblement à Sainte-Lucie jusqu’en 1654 quand les Indiens, menant des incursions contre les habitations isolées des Français, enlèvent la famille du commandant La Rivière et tuent Haquet, un parent de du Parquet, en octobre 1656. La situation des Français devient de plus en plus compromise. Les hommes quittent finalement l’île. Du Parquet doit envoyer une nouvelle expédition pour y rétablir son autorité. Les Français tiennent fermement leurs positions face aux Indiens qui les harcèlent et les Anglais qui veulent en profiter pour leur prendre l’île70.
26Du Parquet est très intéressé par la Grenade, mais elle a été attribuée par la Compagnie à Nouailly. L’échec de ce dernier lui permet de se lancer à son tour. Il prépare dûment l’expédition en envoyant le capitaine La Rivière, qui a coutume de pêcher dans ces eaux, faire des repérages et prendre contact avec les Indiens. Du Parquet quitte la Martinique avec quarante-cinq hommes le 14 mars 1649. Le 18, il débarque à la Grenade et prend possession de l’île au nom du roi. Il s’emploie aussitôt à édifier un fort et à faire planter des vivres, notamment des patates et du manioc. Les Indiens apprécient peu l’établissement des Français. La Rivière tâche de les rassurer en leur expliquant qu’ils sont là pour les protéger des Anglais. Les marchandises apportées et échangées avec eux les amadouent, mais ils exigent que les Français restent à l’endroit qu’ils ont investi et ne s’installent pas ailleurs. Du Parquet rentre alors à la Martinique en laissant le gouvernement à son cousin Jean Le Comte71. En septembre 1649, du Parquet revient avec de nouveaux habitants72. Mais la cohabitation avec les Indiens n’est pas facile. Ces derniers attaquent les habitations des Français avec le soutien de ceux de Saint-Vincent et de la Dominique. L’île, loin des autres établissements, vit difficilement. Le carme Maurile de Saint-Michel rapporte qu’il y a une centaine de Français en 1650 « qui s’y multiplient et fortifient peu à peu, non sans se défier avec raison des Sauvages, qui feront leur possible pour les en bannir73 ».
27L’action des capitaines généraux permet ainsi d’étendre l’emprise de la Compagnie sur les Petites Antilles. Du moins en théorie, car à cette époque la Compagnie n’a plus vraiment autorité sur eux. Cela lui permettra en revanche d’en demander un bon prix lors de leur vente.
La maîtrise de l’expansion territoriale
28Si les associés laissent à des particuliers le soin de conquérir de nouvelles îles, ils en décrivent les modalités. Ainsi, ne peuvent-ils s’établir que là où il n’y a aucun prince chrétien74 et uniquement en leur nom et celui du roi. Les associés se réservent aussi l’organisation des territoires. Ils régulent ainsi les mouvements de population, suggèrent les lieux de regroupement des habitants pour la formation de bourgs, font construire des équipements et des infrastructures propres à supporter les nécessités du commerce, et des chemins et des routes. Ils apparaissent comme les premiers aménageurs des îles. Leurs décisions s’appuient sur les rapports et les états que leurs agents sur place leur ont transmis pour être au plus près des réalités du terrain antillais.
La maîtrise des mouvements de population
29Les associés doivent maintenir un équilibre délicat entre les établissements afin que les nouvelles fondations ne nuisent pas au développement des plus anciennes. Pour cela, ils font inscrire dans tous les contrats que les particuliers doivent faire venir des colons de France pour ne pas dépeupler les îles. En 1635, ils ne permettent à L’Olive et du Plessis de ne transporter que quarante habitants de Saint-Christophe, domestiques compris, à la Dominique, à la Guadeloupe ou à la Martinique75. Cependant, les associés savent assouplir ces règles quand certains établissements sont en difficulté et menacent d’être abandonnés s’ils ne sont pas secourus. Ils demandent alors aux capitaines généraux de faciliter les passages. En 1641, par exemple, ils invitent du Parquet et ses officiers à laisser passer à la Guadeloupe ceux qui le désirent, à condition toutefois que la Martinique ne soit pas désertée. En 1645, ils rappellent aux gouverneurs qu’ils ne doivent pas « désemparer leurs îles sans cause très importante et nécessaire et sans en donner avis à la Compagnie76 ». Si les habitants déjà établis dans les îles peuvent participer à de nouvelles conquêtes et s’établir dans les îles nouvelles, cela se fait dans certaines limites. Ils ne bénéficient pas en général des mêmes avantages fiscaux que les primo-arrivants. Les Français des îles qui veulent s’établir à la Grenade ne peuvent ainsi prétendre à une exemption totale des droits et doivent en acquitter la moitié77.
30Mais il est difficile d’empêcher les habitants de se transporter sur une autre île. Les barques et les navires qui circulent dans les caraïbe sont nombreux, et les gouverneurs ont des arguments pour convaincre bon nombre de colons de venir dans une île nouvelle. Aussi la Compagnie se veut-elle conciliante et s’engage-t-elle à ne refuser aucun congé aux colons désireux de s’établir ailleurs. Ils sont libres. Mais elle exige d’eux qu’ils laissent les équipements en l’état et que les propriétaires vendent ou afferment leurs terres. En revanche, les serviteurs ne disposent pas d’une telle liberté et doivent demeurer avec leur maître78. Elle interdit en 1638 aux habitants de faire sortir des Noirs et des Indiens « des îles où ils sont pour quelque cause que ce soit sans permission expresse par écrit de la Compagnie » pour empêcher les trafics de main-d’œuvre. Les contrevenants verront leurs biens dans les îles confisqués79. La Compagnie maintient ainsi les grands équilibres.
Le développement des bourgs
31Les Français privilégient les implantations à proximité d’un havre naturel sur les côtes sous le vent. Elles se réduisent souvent à quelques cases de serviteurs et d’esclaves autour de celle d’un maître et sont parfois fort éloignées les uns des autres. Le père Jacques Bouton estime ainsi dans une lettre aux associés qu’il faut souvent compter sept à huit lieues d’une habitation à l’autre à la Martinique en 164080. Comme le souligne Anne Pérotin-Dumon, l’habitat dispersé et l’absence de hameaux et de bourgs sont caractéristiques de premiers établissements d’Européens dans les îles, et aux Amériques en général81. La Compagnie en appelle à la formation de bourgs, véritables lieux de vie des colons, afin d’assurer le développement des activités et de la sociabilité. Cela permet en outre de mieux faire face aux attaques des Caraïbes. Elle en définit les fonctionnalités, l’emplacement et d’une certaine façon le plan. Ainsi, les directeurs invitent-ils en 1636 Gentil, d’Esnambuc et du Halde à travailler à la fondation d’un bourg à la Pointe-de-Sable sur l’île de Saint-Christophe. Ils entendent y établir les sièges des autorités et de la justice, les acteurs de la vie économique, une garnison pour offrir la sécurité aux habitants, un établissement religieux et tous les services (notaires, chirurgiens) dont peuvent avoir besoin les habitants. Le centre du bourg est la place d’arme. Les artisans doivent y avoir leur atelier. L’hôtellerie est prévue pour accueillir les marchands et favoriser les affaires82. En 1640, les directeurs chargent le lieutenant général Aubert de veiller à la formation d’un bourg à la Guadeloupe en choisissant un lieu un peu à l’écart du rivage et d’accès facile83. Petit à petit, sous les actions conjuguées des agents de la Compagnie et des capitaines généraux, les habitants se regroupent et forment des noyaux de population mieux contrôlés et mieux protégés, qui s’articulent autour d’une place avec ses magasins et son église, éventuellement son fort. La Martinique compte ainsi quatre quartiers : Le Prêcheur, Fort Saint-Pierre, Le Carbet et Case-Pilote84. En 1645, les directeurs chargent Houël de choisir un site avec les principaux officiers et habitants de l’île, pour faire « une ville » cette fois-ci à la Guadeloupe, « sans néanmoins qu’il soit obligé de suivre en cela la pluralité des voix mais seulement ce qu’il jugera à propos pour le bien de la colonie et sûreté de l’île ». Les artisans de la Guadeloupe seront obligés de s’y établir, c’est une des conditions de leur exemption des droits personnels85. Cependant, pour l’heure, il n’y a pas de ville aux îles. Basse-Terre ne demeure, aux yeux de Dutertre de passage dans l’île au milieu des années cinquante, qu’une bourgade86. Certes Houël, désormais devenu seigneur-propriétaire de l’île depuis son rachat en 1649 à la Compagnie, favorise son développement mais Basse-Terre est encore peu peuplée en 1671. Elle ne compte que quelques centaines d’habitants. Mais est-il possible d’envisager la construction d’une ville à la Guadeloupe telle qu’on la conçoit en Europe à cette époque87 ? Est-elle-même nécessaire ? La ville attendra le xviiie siècle88.
32La Compagnie assure le développement des établissements français en prévoyant les aménagements et les équipements nécessaires. Les gouverneurs et les commis dirigent sur place les travaux et tiennent les associés au courant de leur avancée. Poincy suggère aux associés de nouveaux aménagements : « un des ouvrages le plus utile sera de faire conduire l’eau de notre rivière jusqu’à la mer. Par ce moyen, outre la générale commodité des habitants, on obligera les maîtres des navires de s’arrêter à nos rades, s’ils avaient cette commodité de l’eau qu’ils vont faire chez les Anglais avec qui ils ne traitent pas si volontiers qu’avec nous, et cette seule cause que nous n’avons point d’eau les contraint d’aller ailleurs89 ». Toutes les constructions sont faites par les habitants. Ils peuvent être aidés par des esclaves quand il y en a90.
33Parmi les nombreuses structures et bâtiments (forts, chapelles, magasins) voulus par la Compagnie, les hôpitaux occupent une place à part dans la mesure où ils sont totalement affectés au bien-être des habitants. Ils sont d’une impérieuse nécessité car les épidémies font de nombreuses victimes. L’état sanitaire des Français dans les îles au temps des premiers établissements est assez déplorable. Les hommes sont abattus, mal nourris et maltraités. Madame d’Aubigné rapporte en 1646 que dans les îles on « y perd son temps et sa santé, tant par le mauvais air, que par les mauvaises nourritures ». Le père André Chevillard déplore que les malades sont nombreux et peu soutenus, ils sont « presque tous moribonds et languissants faute d’assistance dans leurs maladies91 ». En 1638, les associés exigent qu’il y ait un hôpital dans chaque île « pour y recevoir les pauvres malades de l’île » auquel ils accordent 2000 de pétun par an. Il est prévu que les hôpitaux disposent de terres pour y faire des vivres pour nourrir les malades et le personnel. Si cette décision témoigne d’un vrai souci des associés pour la situation des habitants, elle n’est pas en adéquation avec la réalité antillaise. D’ailleurs, quelques mois plus tard, constatant probablement l’insuffisance de leur système de financement, ils attribuent une partie des amendes aux hôpitaux. Ainsi, les habitants convaincus de concubinage paieront 2000 livres de pétun pour l’hôpital. Vignory est lui condamné à payer 3 ou 4000 mille livres d’amende à l’hôpital de Saint-Christophe pour avoir passé illégalement des femmes dans les quartiers anglais92. Du Parquet estime le 17 août 1639 qu’il ne dispose pas des finances nécessaires pour faire fonctionner un hôpital à la Martinique et l’attribution des amendes ne résout rien car, souligne-t-il, les habitants sont si pauvres et endettés qu’ils ne peuvent pas les payer. Quant aux 2000 livres de pétun que la Compagnie compte lui allouer, elles lui paraissent dérisoires, elles ne couvrent même pas selon lui les gages d’un homme. Il note qu’il faudrait en outre un chirurgien et des médicaments93. Dans ces conditions, les gouverneurs tardent à exécuter l’ordre de la Compagnie et les associés doivent intimer à Poincy de faire travailler « au plus tôt » à l’hôpital. Les associés tentent de trouver de nouvelles ressources en attribuant aux hôpitaux toutes les rentrées exceptionnelles, en particulier les successions94. Les hôpitaux demeurent dans ces conditions très modestes et ont peu de moyens.
34Les îles ne sont cependant pas dénuées de tout personnel de santé, la Compagnie y veille, mais il est peu nombreux. François Lethullier est un des premiers chirurgiens que l’on connaisse. Il est originaire de Honfleur. Il est engagé par Cavelet du Herteley en 1627 et passe à Saint-Christophe avec d’Esnambuc et Roissey. Pichon est le chirurgien de d’Esnambuc dans les années vingt. Le sieur Boulon officie, lui, à la Martinique en 1638 où il est bientôt rejoint par un chirurgien envoyé par la Compagnie. Boulon œuvre au Fort, et du Parquet le confirme dans sa tâche après la mort de son oncle. Il reçoit alors 6000 livres de pétun. En 1639, il n’y a guère que deux chirurgiens officiant à la Martinique95. Ils sont aussi quelques-uns à la Guadeloupe vers 1640-1641. La Compagnie régule leur exercice et leur rémunération en exigeant qu’ils soient « payés selon les usages et conventions96 ». Les chirurgiens qui passent aux îles sont en général des engagés. Ils s’enrichissent vite aux îles car ils n’hésitent pas à demander de fortes sommes pour exercer leur art. Pierre Le Breton réclame ainsi 900 livres de pétun à la Compagnie pour avoir soigné son commis Tesson en 164397. Mais tous les chirurgiens passés aux îles n’exercent pas leur métier. Certains préfèrent se consacrer à leur habitation et s’affirmer dans la société antillaise. Girault, qui est venu avec du Plessis, délaisse son métier pour devenir juge. Aubert devient lui lieutenant général de la Guadeloupe, puis capitaine de compagnie de milice à Saint-Christophe98. Si certains chirurgiens établis semblent bien connaître leur affaire, leur savoir est en général assez limité, « la plupart ne savent autre chose que saigner et raser » avoue Dutertre. Ainsi, si le sieur de Busac est qualifié de « très excellent opérateur », le chirurgien personnel de L’Olive est en revanche un « ignorant » ne sachant que faire des saignées99. Il n’y a pas de médecins aux îles.
35Les religieux suppléent en maintes occasions le manque de personnel. Ils se font infirmiers. Le jésuite Joseph Molère qui exerce pendant trente-huit ans à Saint-Christophe et à la Martinique, est un des rares pères à connaître son affaire car il était pharmacien en Nouvelle-France avant de rentrer dans les ordres100. L’apport des religieux en temps de crise sanitaire s’avère appréciable, mais ils sont particulièrement exposés et paient leur engagement de leur vie. Le dominicain Armand de la Paix meurt le 4 août 1648 après avoir porté secours aux marins touchés par la « peste ». Ses confrères, Mathias Dupuis et Jean de Saint-Paul, sont eux aussi souffrants, l’un est à l’agonie, et l’autre est gravement malade101. Le jésuite Louis Conard meurt en soignant les malades à Saint-Christophe le 8 septembre 1648. Le jésuite Jacques de La Valière s’occupe à Sainte-Croix des « pestiférés ». Il y construit une chapelle dédiée à l’Immaculée Conception. Il passe deux mois auprès des malades avant d’être à son tour atteint. Il meurt en décembre 1650102. Les chirurgiens qui sont à bord des navires peuvent éventuellement intervenir à terre lors d’une escale.
Le contrôle effectif du territoire
36Les Français ne contrôlent pas l’intégralité du territoire des îles où ils se sont établis. Les côtes sous le vent connaissent la majorité des implantations. Les côtes au vent sont délaissées. L’intérieur du territoire est peu et mal connu, du moins dans les premiers temps. Les Français n’exercent pas leur autorité sur tout le territoire des îles dont bon nombre sont partagées avec les Indiens (la Guadeloupe et la Martinique), les Anglais (Saint-Christophe), et les Hollandais (Saint-Martin). La Guadeloupe est formée de deux ensembles, Basse-Terre et Grande-Terre. Durant la première moitié du xviie siècle, la Grande-Terre n’est pas peuplée par les Français qui n’y font aucun établissement, quoiqu’ils en fréquentent les eaux. La Grande-Terre demeure une zone en dehors de la juridiction française. Les esclaves fugitifs, les marrons, s’y réfugient103. À la Martinique, la situation est comparable. L’île est coupée en deux. Les Français se sont établis sur la côte sous le vent. La Cabesterre, la côte au vent, demeure aux mains des Indiens caraïbes. C’est le fruit du compromis de 1635 entre Français et Indiens. Les relations sont peu nombreuses mais on se fréquente à l’occasion de parties de pêche et de chasse. Les frontières avec les Européens sont précises et établies par traité. Cependant des chemins permettent de se rendre visite.
37La Compagnie semble se satisfaire de ces partitions et veut maintenir les bonnes relations de voisinage. Si elle est attentive à son bon droit et refuse les provocations et les empiétements, elle invite dans le même temps ses agents à la prudence. À la fin des années quarante cependant, la vision des associés évolue. La population commence à croître à la Guadeloupe. La situation économique de l’île s’est grandement améliorée. En 1646, la Compagnie entend lancer la colonisation de la Grande-Terre en nommant tout spécialement auprès de Houël un nouveau lieutenant général dédié à cette tâche, Michel Bernard, sieur de Dalleville. Elle lui promet en outre une commission de capitaine de milice et une terre de deux milles arpents. Il s’engage à faire passer dans l’année cent habitants à qui il distribuera des terres et qui seront déchargés des droits personnels pour une année104. Cependant, les événements dans les îles en décideront autrement et le projet ne connaîtra de réalisation que bien plus tard. Il n’entre pas dans les intentions des directeurs de la Compagnie de prendre le contrôle de la partie indigène de l’île de la Martinique105.
38Si une bonne partie des circulations, notamment à Saint-Christophe, se font par voie de mer, la Compagnie est soucieuse de faciliter les déplacements terrestres dans les îles pour aller d’une habitation à l’autre et faciliter l’accès des colons aux magasins. Elle donne ses instructions pour l’ouverture de chemins reliant les quartiers habités par les Français. Leur entretien est principalement assuré par les colons et les engagés qui sont de garde dans les forts106. Les chemins sont souvent étroits et ne sont pas toujours très faciles à emprunter en raison de la pente et des intempéries. Le père Bouton les trouve fort rudes. L’incommodité des chemins est reconnue comme un motif d’empêchement pour ne pas venir siéger au conseil de guerre de la Guadeloupe en 1646107. Ils sont généralement bordés d’arbustes portant de petites noix108.
La protection des établissements français
39Il appartient à la Compagnie de maintenir à tout prix les îles sous son autorité et celle du roi. Elle doit pour cela dès 1626 entretenir les forts et assurer les approvisionnements en munitions109. Ses obligations en matière de défense sont précisées en 1635 dans trois des seize articles du nouveau contrat signé avec le pouvoir (les articles 5, 7 et 9). L’article 5 mentionne très clairement que : « lesdits associés pourront faire fortifier des places et construire des forts, et établiront des colonies aux lieux qu’ils jugeront les plus commodes pour la sûreté du commerce et conservation des Français ». Ils pourront même « y faire fondre canons et boulets, forger toutes sortes d’armes offensives et défensives, faire poudre à canon, et toutes autres munitions nécessaires pour la conservation desdits lieux » (article 7). L’article 9 leur permet de « mettre tels capitaines et gens de guerre que bon leur semblera dans les forts qui seront construits èsdites îles, et aussi sur les vaisseaux qu’ils y enverront110 ». La politique de défense des associés comporte trois axes : le recueil d’informations, la construction des forts et l’envoi d’armes et de munitions111. La mise en œuvre est confiée sur place aux capitaines généraux, aidés de leurs lieutenants généraux et de leurs officiers.
L’identification des menaces
40Les associés s’inquiètent régulièrement des conditions de défense des îles et prennent dans ce domaine toutes leurs responsabilités. C’est un des principaux sujets traités lors de leurs réunions mensuelles dans les années trente. Ils chargent ainsi le sieur Auger de dresser les plans de la Martinique et de Saint-Christophe et de travailler aux dessins des fortifications qui seront à faire112. En 1635, ils demandent à leur commis à Saint-Christophe, Jean Gentil, un état des défenses de l’île, des fortifications et des armes disponibles. Le 2 avril 1636, les directeurs enjoignent L’Olive de « redoubler de soins pour la conservation de l’île » quand ils apprennent la mort de du Plessis113. Les directeurs ne sont pas les seuls à s’inquiéter de la situation militaire des îles. Les marchands de Dieppe avec qui ils ont passé contrat leur font part de leurs craintes à plusieurs reprises. Le 5 mars 1636, Salomon Faulcon souligne la faiblesse des Français qui « peuvent être facilement chassés » de la Guadeloupe. En 1647, au plus fort des tensions entre les gouverneurs dans les îles, les associés n’ont de cesse de les appeler à s’entendre tant pour « pouvoir à la sureté que pour tenir les Caraïbes en devoir de se conserver contre les mauvais desseins qu’ils pourraient avoir114 ».
41Les associés redoutent plusieurs agresseurs : premièrement les Espagnols qui peuvent ruiner leurs établissements lors d’une nouvelle intervention, deuxièmement les Anglais avec lesquels ils sont en rivalité et qui n’attendent qu’un faux pas de leur part pour reprendre l’offensive, et troisièmement les Indiens qui mènent des raids meurtriers sur les quartiers des Français dans l’espoir de les chasser. Les menaces n’ont pas changé depuis le début de la colonisation. En 1628, Guillaume Coppier soulignait les craintes que lui inspiraient les Caraïbes, les guerres sempiternelles avec les Anglais et la proximité des Espagnols115. De la même façon, le gouverneur anglais de Saint-Christophe, Thomas Warner craint les Indiens, les Espagnols et… les Français116. Ces menaces croissent en intensité en raison de l’importance des conflits entre les puissances en Europe. La déclaration de guerre de la France à l’Espagne en 1635 pèse lourdement sur la conduite des affaires dans les îles. Les associés informent les capitaines généraux et leurs agents de l’évolution des alliances et des conflits. Les officiers du roi doivent agir en connaissance de cause. La révolte de la Catalogne en 1640 et la trêve de dix ans entre les Portugais et Hollandais font l’objet d’une note des directeurs dans laquelle ils invitent Poincy à ne pas offrir aux Espagnols la protection de la France car cela contreviendrait aux traités faits avec les Portugais et les Hollandais qui défendent de donner assistance à leurs ennemis communs117. Cependant, les motifs de discorde entre Français, Anglais et Hollandais ne manquent pas à propos des îles. Les associés en hommes prudents et avisés recherchent par-dessus tout des solutions pour apaiser les tensions et offrir un climat propice aux affaires. Leur souci permanent de la paix avec les Anglais et les Indiens en sont des signes intangibles.
La menace espagnole
42La menace espagnole est assurément celle qui pèse le plus sur l’avenir des établissements français. Les îles des Antilles ont été dévolues aux Espagnols depuis le partage de 1493 et le traité hispano-portugais de Tordesillas de 1494. Les Espagnols ne peuvent tolérer que d’autres nations s’installent dans un espace qu’ils considèrent comme leur appartenant. Ils réagissent rapidement et fermement face aux tentatives d’implantation étrangères dans les Petites Antilles. Ils reprennent ainsi (quoique provisoirement) Saint-Christophe en 1629, Tobago en 1633, Saint-Martin et la petite île de Santa Catalina, que les Anglais appellent Providence, en 1641118. Ils interviennent à plusieurs reprises à La Tortue : en 1638 pour en chasser Anglais et Français, puis en 1643, mais sans grande réussite cette fois-ci119. Ils empêchent tout établissement sur l’île de Santa Ana proche de Sainte-Croix120. Ils échouent en revanche en 1642 à Bonaire bien défendue par le gouverneur hollandais Pieter Stuyvesant, mais ils détruisent les équipements de l’île121. En général, les Espagnols ne restent pas sur place une fois la victoire acquise, permettant alors aux colons qui ont été chassés de revenir et de renforcer leurs défenses. Ils perdent donc progressivement le contrôle des Petites Antilles. Ils croisent régulièrement au large des îles pour protéger leurs propres établissements et faire aiguade notamment à la Dominique122. Les colons français vivent dans la crainte permanente d’une intervention espagnole. Les pères dominicains qui accompagnent L’Olive et du Plessis redoutent une attaque des Espagnols sur la Guadeloupe où ils viennent de débarquer, « on attendait en tremblant la flotte espagnole » écrit ainsi Raymond Breton123. Les associés sont vigilants. Au mois d’août 1635, craignant que les Espagnols n’exploitent le mémoire sur la situation de Saint-Christophe fait par leur commis et intercepté par les corsaires de Dunkerque, ils préparent dans l’urgence un important envoi d’armes – cent mousquets avec les bandoulières, deux cents piques, vingt-quatre hallebardes, des mèches, de la poudre, du plomb et des moules pour faire des balles – à destination de d’Esnambuc. Jean Cavelet du Herteley prend contact avec des capitaines au Havre, à Fécamp et à Harfleur, pour acheminer au plus vite les armes et les munitions124. Mais ce n’est pas la seule résolution prise par les associés dans cette affaire. Il est aussi arrêté qu’en cas de prise d’un navire transportant du courrier, par une puissance ennemie, toutes les lettres seront jetées à la mer125. Il ne faut donner aucun renseignement à l’ennemi. Les associés regardent attentivement toutes les informations venant des îles pour ajuster leur politique et soutenir l’effort de défense. Ils s’inquiètent régulièrement auprès des gouverneurs des mouvements des flottes étrangères. En 1636, les Espagnols longent les côtes de la Guadeloupe. Raymond Breton, qui assiste anxieux à leur passage, note avec soulagement qu’ils se contentent d’ôter leurs chapeaux pour saluer les pères et de proférer des insultes à l’encontre des colons126. En 1638, ils passent devant l’île de Saint-Christophe. Le 17 août 1639, du Parquet écrit aux associés qu’ils n’ont pas croisé au large des îles cette année127. La menace est plus forte en 1640, mais la flotte espagnole est défaite par les Hollandais avant d’arriver aux îles128. En 1642, Poincy envoie à la Compagnie un rapport sur le débarquement des troupes espagnoles sur l’île de Santa Catalina. Si la menace ne semble pas immédiate, la Compagnie l’invite tout de même à se tenir sur ses gardes129. En 1646, alors que la confusion règne dans les îles françaises en raison de la rébellion de Poincy, les Espagnols réussissent à s’emparer d’un navire rochelais, qui était dans la rade de la Guadeloupe sans protection130. Si les alertes sont nombreuses, aucune ne vient vraiment perturber la vie des Français.
Les tensions avec les Anglais
43Les rapports franco-anglais sont plus complexes car les deux nations partagent la même ambition dans les Petites Antilles, ce qui exacerbe leur rivalité, tout en s’appuyant l’une l’autre pour faire face aux dangers communs. Mais les Anglais jouent de leur supériorité. En 1629, ils tentent de s’imposer à Saint-Christophe au mépris de leurs engagements. L’expédition de Cahusac y a mis un terme. Quelques temps plus tard, les Anglais voyant la colonie française prospérer, tentent de prendre des terres aux Français. Ils ont aussi des vues sur les 40000 livres de pétun entreposées à Basse-Terre. Ils mènent une opération de diversion en provoquant les colons de Cabesterre dans l’espoir qu’ils appellent à leur secours ceux de Basse-Terre et laissent ainsi le pétun sans surveillance. Mais la manœuvre est déjouée et les habitants préfèrent brûler les marchandises convoitées plutôt que de le voir tomber entre leurs mains. D’Esnambuc réclame alors aux Anglais le remboursement du pétun131. Les Anglais tentent à nouveau d’empiéter sur la partie française de l’île à la Pointe-de-Sable en profitant du fait qu’en grandissant l’arbre qui sert de délimitation des quartiers dévolus aux uns et aux autres – un figuier – a modifié la frontière. Mais d’Esnambuc ne l’entend pas ainsi et réunit un conseil avec les principaux officiers et les agents de la Compagnie pour décider d’une riposte. Leur proposition de conciliation ayant été rejetée par les Anglais, d’Esnambuc mobilise les habitants et arme les esclaves. La menace opère et le gouverneur Thomas Warner retrouve d’Esnambuc sous le figuier pour parlementer. Les Français obtiennent satisfaction. Une nouvelle délimitation des terres de Saint-Christophe est faite. Le figuier source de la discorde est abattu et un puits creusé pour signifier la frontière. Il est dit le puits de l’accommodement132.
44L’entretien de bonnes relations avec les Anglais apparaît souhaitable et nécessaire aux associés en raison de la configuration du principal établissement français dans les Antilles, Saint-Christophe, et de la fragilité des autres. Ils sont très attachés au respect de l’accord conclu en 1627 et entendent non seulement le voir respecté mais encore régulièrement renouvelé pour assurer la sécurité des habitants. L’accord est reconduit tout au long de la période : le 15 juillet 1637 par Warner, du Halde, le juge Boitière, le capitaine Saint-Martin et Gentil, le 3 octobre 1638 par La Grange et Warner, le 14 septembre 1644 par Poincy et Warner et le 18 octobre 1649 par Poincy et Roland Rich133. Les modalités demeurent les mêmes. Les relations entre Français et Anglais semblent tout de même s’apaiser au fil du temps. Les gouverneurs se fréquentent. En 1635, le dominicain Pierre Pélican se rend à Saint-Christophe pour s’entretenir avec le général des Anglais134. Poincy reçoit à dîner Thomas Warner, sa femme et sa famille le 3 août 1640. Ils prévoient de se retrouver régulièrement afin d’évoquer les affaires communes et dissiper les malentendus. Le 22 octobre 1640, quand les Anglais suspectent le gouverneur de la Martinique, qui a des vues sur Sainte-Lucie, d’avoir appuyé l’offensive menée sur l’île par les Indiens de Saint-Vincent avec lesquels il entretient de bonnes relations, comme avec les capitaines indigènes de la Martinique, pour les en chasser, il faut à Poincy déployer des trésors de diplomatie pour assurer Warner que les Français ne sont en rien compromis dans ces événements135. Faut-il pour autant parler de bonne entente entre les deux nations dans les îles ? L’apparente courtoisie entretenue entre les gouverneurs masque mal une grande méfiance. La correspondance des gouverneurs anglais montre qu’ils sont très soupçonneux à l’égard des Français. En 1639, Warner alerte le comte de Carlisle de la progression française dans les îles de la Caraïbe. Il lui demande de la poudre pour pouvoir faire face à une agression. Carlisle, attentif à l’évolution de la situation dans l’île, lui fait bientôt parvenir ce qu’il réclame136. Poincy ne croit pas à cette époque à l’avenir radieux de l’établissement français de Saint-Christophe. Il perçoit le partage de l’île entre Français et Anglais et les tensions que cela génère au quotidien comme autant d’entraves à l’affirmation et au développement de l’établissement français. Aussi, suggère-t-il d’abandonner Saint-Christophe et de privilégier la Guadeloupe. Mais les associés se refusent à cette idée137.
45Les tensions perdurent entre Français et Anglais sans toutefois déboucher sur des conflits ouverts. La cohabitation dans les îles n’est pas toujours aisée. Ainsi, plusieurs Français et Hollandais doivent-ils quitter Sainte-Croix sous la pression des Anglais de l’île. Ils promettent au capitaine Paul, un Anglais, qui commande le navire sur lequel ils ont embarqué de lui céder les terres et les habitations qu’ils ont abandonnées. Mais quand ils arrivent en juillet 1645 à la Guadeloupe, ils le font arrêter en l’accusant de les avoir enlevés, et donc d’avoir commis un acte de piraterie. Triste petite revanche. En 1645, un autre capitaine anglais saisit le navire de Bouline alors qu’il était dans la rade d’une des îles des Antilles, et jette à la mer le capitaine et ses hommes138. De leur côté, les Français se saisissent du moindre faux pas des Anglais pour occuper les îles qu’ils abandonnent. Les missionnaires français font de fréquentes incursions en territoire anglais pour apporter la bonne parole aux catholiques anglais. Le carme Maurile de Saint-Michel passe par des chemins peu courus pour leur rendre visite au mois de novembre 1646. Il reste parmi eux une dizaine de jours pour leur dire la messe et les confesser139. Les jésuites poussent leur avantage. Le jésuite d’origine irlandaise John Stritch, plus connu dans les chroniques sous son nom francisé de Jean Destriche, fait construire une chapelle à la Pointe-de-Sable, non loin du quartier des Anglais, dans l’espoir de faire venir quelques catholiques anglais. Il se rend auprès des Irlandais de Montserrat en se déguisant en marchand140. Ces initiatives sont peu goûtées des gouverneurs qui ne veulent pas compromettre les relations qu’ils ont nouées. Poincy refuse pour cela à Maurile de Saint-Michel une nouvelle intervention dans les quartiers anglais de l’île à la fin de l’année 1646, « les hérétiques ayant murmuré de ce voyage141 ». Comme le dit le bon père, il convient de ne pas « troubler la paix des deux nations142 ».
La position de la Compagnie à l’égard des Indiens
46Les Indiens des Petites Antilles ont subi de nombreuses violences de la part des Européens, et des Français en particulier, qui se sont approprié leurs terres. Saint-Christophe est le théâtre d’une véritable tragédie en 1627. De nombreux Indiens sont massacrés, tandis que les autres s’enfuient vers les îles voisines ou se refugient à l’intérieur des terres. Cela contribue au dépeuplement indigène de l’île143. La conquête de la Martinique par d’Esnambuc en 1635 n’est pas davantage pacifique. Les Indiens se soulèvent d’ailleurs contre les Français et font appel aux habitants de Saint-Vincent, de la Dominique et de la Guadeloupe. Du Pont qui a été chargé par d’Esnambuc de pourvoir à la défense de l’île après son départ, ordonne aux hommes de se replier dans le fort et fait charger « trois pièces de canon, de balles de mousquet, de clous, et de mitraille, jusqu’à l’embouchure » pour disperser les Indiens qui se sont massés alentour. Les parties arrivent à un accord après de nombreux combats à la fin de l’année 1635144. Il n’y a guère que le protestant Charles de Rochefort pour soutenir que l’installation des Français a été généralement faite « par l’agrément des caciques et des principaux d’entre les Caraïbes, qui ont désavoué tous ceux des leurs qui ont voulu aller au contraire ». Il explique les nombreux morts indigènes par la nécessaire sévérité qu’il faut déployer à l’encontre de ceux qui n’honorent pas les alliances qu’ils ont contractées. Il minimise les violences145. Il existe assurément une certaine défiance des Indiens à l’égard des Français. Le dominicain Raymond Breton écrit ainsi en 1647 que les Indiens ne veulent pas de la venue des missionnaires dans leur île car ils pensent qu’ils viennent pour prendre leurs terres et les chasser comme ils l’ont fait à Saint-Christophe et à la Guadeloupe146. Si certains chefs indigènes, « les capitaines », sont proches des Français et s’entendent avec eux, notamment pour faire des affaires, d’autres sont beaucoup plus réticents. L’accueil assez mitigé reçu par le dominicain Raymond Breton et son compagnon à la Dominique en 1642 en est l’expression147. Du Parquet rapporte que certains Indiens qui désirent s’installer à la Martinique parmi les Français en sont empêchés par ceux des autres îles. Le jésuite Jean Hallay souligne en 1657 que les Indiens ont une « aversion naturelle » pour les Français148. Le propos est à nuancer. Les Indiens se méfient certes de tous les Européens mais ils savent aussi composer avec eux en tissant des alliances et en usant de leurs rivalités afin de limiter la progression de ceux qui menacent leur territoire. À Tobago, ils aident les Espagnols à chasser les Hollandais. C’est bien pour cette raison que les Français font tout pour les attirer vers eux149. Ils sauront même user des Indiens pour lutter plus tard contre les Anglais150.
47La façon dont doivent être considérées les populations indigènes n’est pas évoquée dans le contrat de 1626 entre la Compagnie et le pouvoir, tout au plus est-il indiqué qu’elles devront se soumettre à l’autorité du roi et être instruites dans la religion catholique. Mais la commission délivrée par Richelieu à d’Esnambuc et Roissey concède le droit de leur faire la guerre pour assurer la défense et la conservation de Saint-Christophe151. Il existe très clairement un impératif, la protection des établissements français. Elle doit être assurée à tout prix.
48La Compagnie adopte en 1635 une politique moins agressive à l’égard des Indiens qui entend concilier prudence et intelligence afin de mieux juguler le risque qu’ils peuvent représenter. Les associés excluent pour cela tout recours à la violence. Ils demandent d’ailleurs à L’Olive et à du Plessis d’indiquer dans le procès-verbal le consentement des habitants au cas où l’île qu’ils prennent est habitée152. Les associés ne conçoivent une colonisation qu’en douceur, « l’intention principale de sa majesté en l’établissement des colonies ayant été pour l’instruction des Sauvages153 ». Ce souci de concorde apparaît dans tous les contrats signés entre les associés et les capitaines154. Mais que comprennent les Indiens à ce qui leur est demandé ? Saisissent-ils toutes les implications des accords conclus ? Les associés ne sont pas des naïfs, ils savent que les Indiens peuvent se montrer vindicatifs, aussi mettent-ils les îles en défense, mais il convient ni de les chasser, ni de leur faire la guerre. La grande crainte des associés est de voir leurs efforts ruinés par une attitude imprudente ou agressive qui provoquerait un soulèvement général soutenu par les Indiens des îles voisines de Saint-Vincent et de la Dominique. Les Indiens ont une très forte réactivité aux événements. Ils sont aussi très mobiles et solidaires les uns des autres. La politique de la Compagnie n’est pas sans ambiguïté. Car en encourageant les capitaines à conquérir des îles, elle est à l’origine du processus de violence. Le rapport de force est bien à l’origine des relations entre Français et Indiens, même si la Compagnie tente de mieux prendre en considération leur sentiment.
49Les intentions des associés ne sont toujours suivies par les capitaines généraux. L’Olive, qui ne porte pas les Indiens dans son cœur, mène en 1636 à la mort de du Plessis, la guerre contre les Indiens de la Guadeloupe malgré les conjurations des habitants et des missionnaires invitant au respect des Indiens et des ordres de la Compagnie155. Les combats sont coûteux en hommes. Les Indiens font des raids sur les habitations et ruinent l’économie locale naissante. L’île n’est plus approvisionnée et les vivres manquent. Dutertre parle de soixante à quatre-vingts morts parmi les Français après les attaques menées par les Indiens en 1636, sans compter les prisonniers156. Le 26 mars 1636, Berruyer, qui est alors à Dieppe, apprend avec stupéfaction d’un des capitaines qui revient des îles les desseins de L’Olive. Il alerte aussitôt les associés. Une réunion se tient à Paris une semaine plus tard durant laquelle ils se prononcent pour rappeler au gouverneur qu’il doit vivre en bonne intelligence avec les Indiens et ne pas leur faire la guerre157. L’Olive méprise les nouvelles injonctions de la Compagnie et poursuit son offensive158. La guerre s’installe entre les Français et les Indiens à la Guadeloupe. Quand en 1638, L’Olive tombe malade, Poincy prend en main l’organisation de la défense de l’île en envoyant Sabouilly à la Case-du-Borgne et La Vernade à Basse-Terre159. Les escarmouches se poursuivent. En 1640, Sabouilly fait en canot le tour de la Guadeloupe pour surprendre les Indiens et les chasser. Mais il tombe sur eux au Cul-de-Sac. Les Indiens blessent plusieurs Français. L’un meurt de ses blessures et un autre doit être amputé d’un bras. Vingt ou trente Indiens sont tués160. La Compagnie veut le règlement du conflit. Elle commissionne un nouveau lieutenant général à la Guadeloupe, Aubert161. Il rencontre en 1640 des Indiens venus lui demander la paix162. On se promet de part et d’autre de ne pas se faire de tort et de se comporter en amis. Des otages sont échangés pour garantir l’accord. Le capitaine Baron laisse ainsi son fils auprès d’Aubert tandis qu’Aubert lui remet l’un de ses serviteurs. Les relations apaisées entre Français et Indiens facilitent la reprise des échanges, et les Indiens de la Dominique peuvent escompter obtenir des Français des cognées, des serpes, des couteaux et des outils contre des poissons, des lézards et des tortues163. Cependant, Aubert demeure sur ses gardes. En 1641, il empêche le père de La Mare et Jean-Baptiste Dutertre de se rendre à la Dominique avec le chef indien qui les a invités car il craint que la paix ne soit assurée164.
50La Compagnie insiste auprès de du Parquet pour qu’il assure les Indiens de la partie orientale de la Martinique des intentions louables des Français et qu’il n’entend pas les en chasser. Elle attend qu’ils se rangent de son côté et dénoncent tout projet qui pourrait être monté contre eux. Dans le même temps, elle envoie des armes et des munitions à du Parquet165. Du Parquet se veut rassurant. Il écrit ainsi à la Compagnie le 25 juin 1639 : « nous vivons ensemble comme si nous étions tous Français ». Il l’assure de son intransigeance à l’égard de quiconque compromettra cette amitié. Il rapporte que de nombreux Indiens viennent régulièrement dans l’île, et que certains envisagent même de s’y établir166. Pourtant, la situation est plus tendue qu’il ne veut bien le dire. Les Indiens de la Dominique font un raid sur la Martinique et enlèvent deux Indiens dans la case de Lespérance. Du Parquet fait aussitôt arrêter l’un des chefs caraïbe, le capitaine Kayerman, et le fait mettre aux fers. L’homme réussit cependant à s’échapper mais il est mordu par un serpent lors de sa fuite et meurt de sa blessure. Les Français redoutent une riposte des Indiens à l’annonce de la mort de leur chef. La tension monte encore d’un cran entre Français et Indiens. Du Parquet presse Poincy de mener une attaque préventive. Le 20 janvier 1640, Poincy tempère son ardeur et ne l’autorise qu’à riposter s’ils viennent à l’attaquer. La Compagnie se range à l’avis de Poincy et place du Parquet sous son autorité167. Du Parquet redouble les défenses. Le calme revient. Poincy récompense l’attitude de du Parquet en le faisant premier capitaine des nouvelles compagnies créées à Saint-Christophe. La Compagnie lui renouvelle sa confiance en établissant à son nom une commission de gouverneur et sénéchal de la Martinique en 1643168.
51Les établissements français ne sont cependant jamais à l’abri des raids des Indiens de la Dominique et de Saint-Vincent. En 1642, les Indiens de Saint-Vincent lancent une attaque sur la Guadeloupe et massacrent sept Français. La Compagnie s’inquiète de ce brusque accès de violence. Berruyer fait part le 10 novembre 1642 au dominicain Raymond Breton des précautions à prendre. Le supérieur du noviciat de Paris demande à Armand de la Paix le 2 avril 1643 qu’il n’expose pas les religieux169. Les établissements anglais sont eux aussi fréquemment soumis aux pressions des Indiens. En 1645, six pirogues avec quarante à cinquante hommes chacune attaquent l’île anglaise d’Antigua. Ils prennent quelques colons qu’ils emmènent comme esclaves dans leurs carbets. Les Indiens se vantent de leurs exploits aux Français qu’ils rencontrent170.
La Compagnie et les fauteurs de troubles
52La Compagnie n’entend pas voir la paix avec les Indiens et les Anglais compromise par des agissements coupables de certains. Elle réclame aux gouverneurs des sanctions contre tous les fauteurs de troubles. En 1636, elle fait poursuivre un certain d’Alençon pour avoir enlevé un « Sauvage » de la Dominique, ce qui a provoqué une attaque des Indiens sur Saint-Christophe et coûté la vie à cinq habitants. L’homme n’en est visiblement pas à son premier méfait car il apparaît dans une autre affaire en 1633 dont malheureusement nous ne savons rien171. Le coup pendable accompli par Languillet empoisonne les relations avec les Anglais en 1636. En distrayant quelques hommes, vraisemblablement des engagés, de la partie anglaise de Saint-Christophe au grand préjudice de leur maître, il entraîne de vives protestations. Les associés réagissent vivement et promettent d’entamer des poursuites contre lui. Ils exigent la réparation du préjudice pour les Anglais et pour eux en évoquant « le trouble que cela a apporté et peut apporter à l’établissement de la colonie172 ». En 1639, un fugitif nommé La Bare trouve refuge chez les Anglais. Afin d’assurer ses arrières et d’empêcher qu’il ne soit remis aux Français de Saint-Christophe, il rapporte au gouverneur un prétendu complot orchestré contre lui par Poincy qui « le voulait empoisonner au premier festin qu’il lui ferait ». Les Anglais prennent les choses très au sérieux. Poincy réussit cependant à « étouffer cette brouillerie » et la tension retombe dans l’île. La Compagnie félicite Poincy pour la façon dont il a géré l’affaire avec les Anglais et l’invite à châtier sévèrement La Bare173.
La politique de défense des îles
53La politique de défense de la Compagnie aux îles repose sur trois éléments : les forts, les navires et la milice, auxquels elle attribue pour leur entretien une partie de son pétun. Elle envoie aussi des armes et des munitions de métropole.
Les forts et les navires
54Les forts sont les premiers éléments défensifs construits par les Français quand ils abordent une île. Les premiers Français venus à Saint-Christophe dans les années vingt avaient construits deux forts174 que d’Esnambuc et Roissey consolident lors de la prise de possession officielle de l’île. Chaque installation dans une île nouvelle voit la construction d’un nouveau fort. Ainsi quand Cahusac prend Saint-Eustache en 1629, il fait bâtir un fort. Il sera utilisé par la suite par les Hollandais quand ils s’établiront à leur tour dans l’île175. Les deux capitaines qui prennent la Guadeloupe au nom du roi et de la Compagnie font construire deux forts en 1635. L’Olive fait bâtir un petit fort, « qui est bien clos » observe le père Pélican, qu’il nomme le Fort Saint-Pierre, « parce qu’il avait pris possession de l’île et arboré les armes de France la veille de sa fête ». Du Plessis s’établit avec ses gens au-delà d’une petite rivière « à trois portées de mousquet » de son compagnon176. D’Esnambuc fait promptement bâtir un fort à la Martinique sur le bord de la mer en 1635 « qu’il munit de canons, et de tout ce qui était nécessaire pour le bien défendre ». Le fort est nommé le Fort Saint-Pierre, « soit pour satisfaire à la dévotion particulière dont il honorait ce prince des apôtres, soit à cause qu’il avait mis pied à terre et qu’il avait pris possession de l’île, le jour de l’octave des saints Apôtres, saint Pierre et saint Paul177 ». Le fort sert tout autant à signifier la présence française qu’à assurer un rôle militaire. Les Français font de même dans les autres territoires américains où ils s’installent. Cette politique est partagée par les autres nations. Les Anglais sont tout aussi soucieux de protéger leurs établissements et font eux aussi construire des forts178. Le traité franco-anglais de partage de 1627 stipule que les gouverneurs s’engagent à « fortifier et munir ladite île de Saint-Christophe de tout leur pouvoir, contre tous efforts, descentes et incursions de leurs ennemis publics et autres qui voudraient leur donner détourbier et empêchement en ladite possession179 ». Il est en revanche difficile de savoir si les uns et les autres s’inspirent de la politique de fortification du littoral américain développée par les Espagnols180.
55Les premiers forts se limitent bien souvent à une plate-forme avec quelques pièces de canon entourée d’une palissade. Ils doivent permettre d’éloigner les navires ennemis et d’assurer la protection des populations derrière les palissades. Ils sont parfois placés dans des endroits improbables. Ils sont bientôt déplacés et reconstruits. L’Olive et du Plessis délaissent le site du Fort Saint-Pierre pour s’établir plus au sud, l’un en Cabesterre et l’autre à Basse-Terre181. Poincy fait démolir le Fort Saint-Pierre édifié à la Basse-Terre à l’initiative de La Grange Fromenteau, qui est en très mauvais état et mal situé pour en faire bâtir un autre, qu’il fait nommer le Fort de la Basse-Terre. Il choisit un lieu plus avantageux, « plus avant dans la mer […] pour défendre l’entrée aux vaisseaux ennemis ». La construction demeure modeste. C’est une simple plate-forme supportant quatre canons. Il fait faire les mêmes travaux à la Pointe-de-Sable, et à Cabesterre, puis il fortifie la Montagne pour la rendre la citadelle de l’île182. À peine nommé lieutenant général, Jacques Dyel du Parquet renforce les défenses de la Martinique. Il fait construire sur une presqu’île pour protéger un port naturel bien abrité, un nouveau fort au sud de l’île au Cul-de-Sac, Fort-Royal183. Il en fait renouveler les palissades en 1639. Mais il manque cruellement de poudre et les canons de la place n’ont pas d’affûts184. Le site est intéressant stratégiquement mais le père jésuite Robert Hampteau, chargé d’examiner l’affaire par Fouquet, préconise l’abandon de l’endroit qu’il juge trop malsain. D’ailleurs Poincy déplore qu’un grand nombre de gardes sont malades. Il n’est pas davantage persuadé de son intérêt stratégique185. Le premier mai 1641, la Compagnie ordonne de raser Fort-Royal186. Ses recommandations ne sont pas suivies et le fort demeure.
56Poincy pense à des constructions plus importantes. Il bénéficie pour mener à bien ses projets de l’adresse des deux frères Le Gry qui demeurent au Gros Morne, et des tailleurs de pierre, des maçons et des charpentiers qu’il a amenés de France. Il semble qu’en matière de conception des forts, Poincy doive beaucoup à Le Vasseur auprès de qui il prend conseil. « Poincy fit tant d’estime de sa personne, qu’il semblait ne prendre conseil que de lui », écrit le dominicain Dutertre. Il le charge de visiter les quartiers de l’île et d’indiquer les lieux où il devrait bâtir des forteresses et la manière de les construire187. Le modèle de fort le plus abouti est certainement à cette époque celui bâti par Le Vasseur à la Tortue. Le Vasseur choisit pour le placer une roche en plate-forme, autour de laquelle il fait faire des terrasses régulières pour accueillir trois ou quatre cents hommes. Au milieu de cette plate-forme s’élève une grande roche en haut de laquelle il y a un logement et le magasin des poudres. Plusieurs pièces de canons sont placées sur la plate-forme pour défendre l’entrée du havre. Le Vasseur se vante en octobre 1642 auprès des associés de la Compagnie de la qualité des défenses de l’île188. Si elles arrêtent les Espagnols en 1643, elles n’évitent pas la prise de l’île par le chevalier de Fontenay en 1652, puis par les Espagnols en 1654189.
57Les canons sont en général fournis par la Compagnie. Elle s’engage en 1636 à envoyer deux canons pour le fort de L’Olive et deux pour le fort de du Plessis à la Guadeloupe. Un marchand de Dieppe, Jacques Mel, traite avec les deux capitaines pour la livraison des pièces190. La Compagnie rencontre de nombreuses difficultés pour trouver les canons promis. Le 4 février 1637, elle décide d’acheter un canon au Havre pour Saint-Christophe pour la somme de 1500 livres de pétun payable à destination aux périls et fortune des vendeurs. Cavelet du Herteley est chargé de mener la négociation et de faire faire un affût pour la pièce191. Le 16 juillet 1637, la Compagnie promet d’envoyer à Saint-Christophe deux canons d’Angleterre192. Mais les deux pièces convoitées lui échappent. Elle mandate alors l’un des associés, Martin de Maunoy, de négocier l’achat de canons de 12 à Calais avec Fly, le receveur de Richelieu193. La Compagnie entreprend aussi d’acheter à Dieppe quatre pièces de canons, dont deux pour Saint-Christophe et deux pour la Martinique194. Le lieutenant général de la Guadeloupe, Aubert, achète avant de quitter la France deux pierriers avec trois boîtes pour 66 livres au sieur Deslandre que la Compagnie lui promet de régler195.
58Mais les forts des îles ne sont pas toujours bien entretenus, faute d’attention ou de personnel qualifié. Du Parquet ne dispose pas de beaucoup de moyens à la Martinique. Tous leurs canons sont démontés car les affûts ne valent rien. Il n’a pas de poudre pour tirer plus de « quatre coups ». Quand le nouveau gouverneur de la Guadeloupe, Charles Houël, descend à Fort-Royal le 5 septembre 1643, il ne peut que constater l’état déplorable dans lequel l’a laissé L’Olive : la maison n’est palissadée que de foin et les ouragans ont tellement ravagé les jardins qu’il n’y a presque plus de vivres196.
59Les bateaux constituent le deuxième élément de la défense des îles. La commission donnée à d’Esnambuc et Roissey en 1626 établit qu’ils doivent « tenir en état et apprêt de défense tel nombre de vaisseaux, navires et pataches que besoin sera, les armer et équiper d’hommes, canons, vivres et munitions requises et nécessaires » pour protéger le trafic vers les îles et qu’« ils pourront faire la guerre » et « combattre, poursuivre, aborder et attaquer, vaincre, saisir et prendre par toute voie d’armes et d’hostilité197 ». Tous les navires qui viennent aux îles participent à l’occasion à leur défense ou au transport des armes et des hommes d’une île à l’autre. On leur préfère les canots et les barques dans la lutte contre les Indiens.
Les obligations militaires des habitants
60Il n’y a pas de troupes régulières dans les îles à cette époque . Le service des armes est assuré par les habitants organisés en compagnies de milice, en général au sein d’un quartier d’habitation, sous le commandement de capitaines. Cette obligation est stipulée dans les contrats d’engagement de la Compagnie. Ainsi, comme le note le carme Maurile de Saint-Michel : « Tous nos Français sont ici soldats198. » Saint-Christophe compte ainsi huit compagnies en 1646. La première est celle de Poincy, elle est dite la compagnie colonelle. Les autres compagnies portent le nom de leurs capitaines. Il y a quatre compagnies à la Guadeloupe, tout comme à la Martinique199. Les officiers sont nommés par les capitaines généraux qui ont donc de cette façon une forte emprise sur les quartiers. Mais tous les habitants ne sont pas contraints à la garde des forts. Les agents de la Compagnie, les officiers, les artisans et les hommes à leur service en sont déchargés.
61Les habitants supportent mal cette obligation de service. Ils préfèrent se consacrer à leurs activités plutôt que d’assurer la défense des possessions françaises, tâche pour laquelle ils sont au final peu préparés. D’Esnambuc entend en 1636 décharger les habitants de Saint-Christophe de la garde du fort pour avoir un service plus efficace et permettre la mise en valeur de l’île, contre une redevance. La Compagnie trouve la solution louable mais s’inquiète de l’avis des habitants et demande à d’Esnambuc de lui adresser leur « consentement ». En juillet 1637, la Compagnie décharge les habitants des droits des obligations militaires de la garde du fort s’ils consentent à payer une garnison. Elle promet d’envoyer les soldats nécessaires dont elle fixe au préalable les devoirs200. Les suites de l’affaire ne sont pas connues, mais en 1647 Poincy assure que les deux cents soldats promis n’ont jamais été envoyés par la Compagnie et qu’il a du prendre en charge leur solde sur ses deniers personnels201. En 1645, la Compagnie autorise le gouverneur Charles Houël à décharger de la garde les habitants de la Guadeloupe et à faire une garnison de trente hommes, dans la mesure où la dépense n’excède pas 25000 livres de pétun au plus par an. À la Martinique, le gouverneur du Parquet impose à tous les habitants de donner 50 livres de pétun pour dédommager ceux qui montent la garde202. Le service de milice continue cependant d’être assuré par la grande majorité des habitants.
Les envois d’armes
62Il revient à la Compagnie d’envoyer les armes et les munitions nécessaires à la défense des établissements français. Le premier transport d’armes attesté se produit en 1627. Le Saint-Pierre, un navire de 120 tonneaux commandé par Girard Vaullart, se rend à Saint-Christophe avec des hommes, des marchandises et des armes203. La Compagnie affrète régulièrement des navires pour transporter les armes et les munitions dans les années trente. Elle sollicite systématiquement les capitaines à qui elle a donné un congé pour passer quelques fournitures. Le capitaine Labbé doit par exemple emporter huit mousquets et autant de bandoulières pour le commis de la Martinique ou celui de Saint-Christophe204. La Compagnie répond généralement favorablement aux demandes des gouverneurs. Poincy se distingue pour alerter régulièrement la Compagnie de ses besoins afin d’assurer « la sûreté de Saint-Christophe ». Mais du Parquet se plaint en 1639 d’être peu écouté et de ne pas avoir suffisamment de munitions pour tenir ses positions en cas d’attaque205.
63Les envois consistent en armes blanches (épées, piques, hallebardes), en armes à feu (mousquet, arquebuses), en munitions (poudre, mèche, moule à balle) et en matériaux de fabrication des balles et de réparation (fer, cuivre). Le montant en valeur n’est pas toujours évoqué. Il se monte en général à plusieurs milliers de livres. Ils représentent une grande part des investissements de la Compagnie. Bien souvent, elle doit vendre le pétun qui est dans ses entrepôts en France ou contracter des emprunts pour assurer ces envois. Les associés empruntent à cet effet 4000 livres le 25 août 1635 et 3000 livres en 1639206. Les armes et les munitions sont stockées dans des entrepôts particuliers. Il existe notamment un magasin d’armes à Saint-Christophe. Le 4 février 1638, la Compagnie nomme pour trois années Renard garde-magasin aux gages de 1000 livres de pétun. Il a à son service trois hommes exemptés des droits. Du Parquet ne peut cependant procéder à la construction d’un magasin pour les armes à la Martinique car il ne dispose pas d’ouvriers pour le construire. Il n’a d’ailleurs de son propre aveu rien à y mettre207. Les armes qui sont envoyées par la Compagnie ne sont pas toutes destinées au service de garnison. Une part doit être vendue aux habitants. La Compagnie est soucieuse de la bonne réception des armes et de leur conservation. Elle demande régulièrement des inventaires à ses commis qui en sont les gardiens et dépositaires. Le 7 juillet 1638, elle écrit à Volery pour savoir si les armes qui ont été envoyées par le bateau du capitaine Fel sont arrivées208. Les informations concernant les envois d’armes et de munitions sont moins nombreuses dans les délibérations de la Compagnie dans les années quarante, mais c’est aussi que les directeurs estiment en avoir envoyé assez durant la décennie précédente et jugent leur nombre suffisant.
64Les envois d’armes ne sont pas le seul fait de la Compagnie. En effet, les marchands de Dieppe doivent supporter l’effort de défense de la Guadeloupe en vertu du contrat qu’ils ont signé avec les capitaines et la Compagnie. Par ailleurs, plusieurs particuliers se lancent dans ce commerce. Ainsi, deux Nantais, Jean Burot et Louis de La Pélonnye, s’entendent avec un capitaine du Pouligen pour faire passer à Saint-Christophe des armes et des munitions en 1639209.
Tableau 25. Les envois d’armes par la Compagnie.
date de l’ordre | types d’armes et de munitions | destination | valeur |
Le 7/03/1635 | armes et munitions | Saint-Christophe | 1500 ou 1600 livres |
Le 25/08/1635 | 100 mousquets avec les bandoulières et fourchettes, 200 piques, 24 hallebardes, 600 mèches, un millier de poudre, 500 livres en balles, moules à balle | Saint-Christophe | 4000 livres |
Le 5/03/1636 | 2 canons, 30 mousquets, 30 cuirasses, un millier de poudre | la Guadeloupe | |
Le 3/12/1636 | canons, armes et munitions | îles | 2000 livres |
Le 4/03/1637 | 800 livres de poudre, 50 mousquets | Saint-Christophe | |
Le 1/07/1637 | 4 milliers de poudre | Saint-Christophe Martinique | |
Le 16/07/1637 | deux canons, 300 balles 400 mousquets, 4000 livres de poudre, 2000 livres de mèches, 48 moules à balle, vingt douzaines d’épées, 2000 livres de plomb en balles | Saint-Christophe Martinique | |
Le 6/10/1638 | 1500 livres de poudre210 , 200 piques, 100 hallebardes | Saint-Christophe | |
Le 5/01/1639 | 1500 livres de poudre, 600 livres de mèche | Martinique | |
Le 1/06/1639 | armes, poudre, mèches | Martinique | |
Le 1/06/1639 | armes, poudre, mèches | Saint-Christophe | |
Le 7/09/1639 | un millier de poudre, 500 de mèche, 100 mousquets et bandoulières, 100 piques, 6 moules à balles, 30 hallebardes | Saint-Christophe | |
Le 19/02/1640 | 800 livres de poudre, 100 mousquets, 400 piques, 50 hallebardes | Saint-Christophe | |
Le 2/05/1640 | armes, munitions | Saint-Christophe | |
Le 5/05/1640 | mousquets, bandoulières, piques, hallebardes, arquebuses à fusil, poudre, balles | Guadeloupe | 2625 livres |
Le 13/09/1641 | armes, poudre, munitions | îles | 4000 livres |
Le 4/06/1643 | poudre | Guadeloupe | |
Le 2/03/1646 | 200 livres de poudre |
Source : ANOM, F2A13.
65La Compagnie recrute des artisans pour assurer l’entretien des armes et fabriquer des munitions. Elle trouve en 1636 un arquebusier parisien prêt à passer à Saint-Christophe avec deux de ses compagnons à ses frais. Elle s’engage à soutenir les trois hommes durant les six premiers mois de leur séjour dans l’île. Elle leur promet 3000 livres de pétun par an et des terres pour faire des vivres. Elle charge le chirurgien de l’île, Girault, de les prendre en charge à leur arrivée211. En 1637, elle recrute des armuriers. Elle fait remettre des outils au juge Boitière. En 1638, elle demande au maître canonnier Deshayes de retourner à la Guadeloupe « et d’y servir avec affection » et l’autorise à passer deux hommes avec lui sans frais. Elle accorde au maître armurier Robert Rivière l’exemption de la garde et des corvées en considération de son métier212.
66Force est de reconnaître que la Compagnie réussit à protéger ses établissements des différentes menaces. Les forts tiennent. Les navires réquisitionnés par les capitaines généraux assurent assez efficacement leur rôle. Les miliciens réussissent à contenir les Indiens caraïbes. Ils possèdent d’indéniables qualités. Ils connaissent le terrain et ont de l’expérience. Cosimo Brunetti souligne leur agilité à courir dans les bois et à arpenter la montagne, et de conclure : « cent soldats de la Martinique ne feraient aucune difficulté d’en battre trois ou quatre cents nouvellement venus d’Europe213 ».
67Pour la monarchie, cette délégation de la défense des îles à la Compagnie est une aubaine, car elle ne lui coûte rien. Cependant, l’efficacité du dispositif dépend pour une bonne part du nombre d’habitants. Or, les établissements français sont peu peuplés. Elle doit donc se résoudre intervenir à Saint-Christophe en 1629 en envoyant l’escadre de Cahusac. D’Esnambuc use, lui, d’autres expédients en armant les esclaves quand le besoin se fait sentir214. La déclaration de la guerre de la France à l’Espagne en 1635 conduit cependant la monarchie à être plus attentive à cette question et à superviser les défenses des établissements français. Richelieu est ainsi le destinataire de plusieurs mémoires sur l’état des îles en 1640215. Une disposition nouvelle apparaît dans le contrat de 1642. Si les missions de la Compagnie sont maintenues, la monarchie évoque la possibilité d’une intervention militaire en cas de besoin, « et s’il arrive que ladite Compagnie veuille entreprendre sur les îles étant en l’obéissance des princes ennemis, sa majesté pourra l’aider de vaisseaux, soldats, armes et munitions, selon les occurrences et l’état de ses affaires216 ». Les enjeux de la colonisation des îles dépassent, et de loin, les simples aspects mercantiles, ils doivent être vus à la lueur de la politique étrangère de la monarchie. Ils s’intègrent dans une vision globale de l’ordre du monde.
Notes de bas de page
1 Acte d’association des seigneurs de la Cie des îles de l’Amérique, Paris, le 31/10/1626, dans DT/1667, t. 1, p. 8.
2 ANOM, F2A13, Contrat du rétablissement de la Cie des îles de l’Amérique, Paris, le 12/02/1635, p. 2.
3 ANOM, F2A13, Contrat entre la Cie et le cardinal, le 29/01/1642, p. 42.
4 H. Mcd. Beckles, « “The Hub of Empire”… », op. cit., p. 219 ; C. P. Lucas, A Historical Geography of the British Colonies, op. cit., p. 98-99.
5 Com. de Richelieu aux Srs. d’Esnambuc et du Roissey, Paris, le 31/10/1626, dans DT/1667, t. 1, p. 12.
6 ANOM, F2A13, Traité de la Compagnie avec L’Olive et du Plessis, Paris, le 14/02/1635, p. 17 ; ANOM, F2A13, Com. à L’Olive et du Plessis, Paris, le 27/02/1635, p. 79.
7 Délibération, le 2/05/1640, p. 392.
8 « La colonie s’augmentait tous les jours par le commerce et la fréquentation des navires français et hollandais qui amenaient quantité de nouveaux habitants, et quelquefois des esclaves mores, qu’ils allaient acheter en Guinée, ou qu’ils prenaient sur les Espagnols le long des côtes du Brésil ; et comme ces nègres font toute la force et la richesse des îles, la Compagnie en retirait déjà de grands revenus. Enfin l’île se trouva si peuplée, que l’on prit résolution de faire de nouveaux établissements dans les îles voisines », DT/1667, t. 1, p. 63-64.
9 Délibération, le 3/12/1636, p. 286. Nous ne connaissons malheureusement pas les termes du contrat signé. Les archives des notaires ne conservent pas la trace de cet acte.
10 Délibération, le 2/12/1637, p. 316.
11 Délibération, le 1/07/1637, p. 297-299.
12 J.-B.-P. de Courcelles, Nobiliaire universel de France, Paris, Au bureau général de la noblesse de France, 1821, t. 18, p. 155 ; AN, Y, 156, Contrat de mariage de Marie Le Prévost et Louis Houël, fol. 148v. Jean Le Prévost tient la seigneurie de Vanves « pour partie », l’autre partie revenant à l’abbaye Sainte-Geneviève (H. Chailley, Vanves des origines au début du XXe siècle, Paris, Le livre d’histoire, 2007, p. 67 et 77).
13 Délibération, le 3/03/1645, p. 482. Louis Merle veut croire qu’en 1645 d’Aubigné a déjà une habitation à Marie-Galante. Sa venue en France aurait donc pour but de régulariser sa prise de possession de l’île (L. Merle, Constant d’Aubigné, op. cit., p. 125).
14 Il embarque à La Rochelle avec sa petite famille sur l’Isabelle de la Tremblade (AD 17, E, minutes Dougnet, Contrat, La Rochelle, le 19/04/1644. Pub. dans L. Merle, Constant d’Aubigné, op. cit., p. 118-119).
15 La vie de Constant d’Aubigné est une longue suite de méfaits et d’excès. Il est accusé de plusieurs meurtres dont celui de sa première femme. Il ne réussit pas mieux en affaires. Il est criblé de dettes. Il s’attire aussi les inimitiés des puissants comme le duc d’Épernon et Richelieu qui l’accuse de collusion avec Gaston d’Orléans. Il demeure en prison de nombreuses années avant d’être élargi après la mort du cardinal (L. Merle, Constant d’Aubigné, op. cit., p. 46, 64, 84-87 et 96).
16 Délibération, le 3/03/1645, p. 482 ; Délibération, le 12/12/1645, p. 497.
17 PDP, p. 27 ; Bret/RF, p. 125.
18 Délibération, le 31/03/1645, p. 486 ; ANOM, F2A13, Traité entre MM. les directeurs et M. d’Aubigné, Paris, le 31/03/1645, p. 63-65.
19 L. Merle, Constant d’Aubigné, op. cit., p. 116-117.
20 MSM, p. 98 ; E. Cabart de Villermont, cité dans A. de Boislille, Paul Scarron et Françoise d’Aubigné, Paris, Bureau de la revue, 1894, p. 40 ; Madame d’Aubigné à madame de Villette, la Martinique, le 2/06/1646, dans Mémoires pour servir à l’histoire de madame de Maintenon, Maestricht, Jean-Eudes Dufour/Philippe Roux, 1778, t. 6, p. 35-38.
21 L. Merle, Constant d’Aubigné, op. cit., p. 129. Gréard dit qu’il est mort à la Martinique (O. Gréard, « Introduction », dans Mme de Maintenon, Extrait de ses lettres, avis, entretiens, conversations et proverbes sur l’éducation, Paris, Hachette, 1899, p. II). Le jésuite Louis Laguille le fait assez curieusement mourir à la Grenade où le comte de Cérillac l’aurait appelé (L. Laguille, Fragmens de mémoire sur la vie de madame la marquise de Maintenon, 1737. Pub. dans E. Fournier, Variétés historiques et littéraires, t. VIII, Paris, P. Jannet, 1857, p. 60-61). Or à cette époque, la Grenade n’est pas encore occupée par les Français. Quant aux projets de Cérillac, ils datent de 1655 (DT/1667, t. 1, p. 504). La fille de Constant d’Aubigné, Françoise, la future madame de Maintenon, gardera toute sa vie durant un souvenir douloureux de son enfance antillaise quoiqu’elle en parle peu.
22 ANOM, F2A13, Traité avec Haussier et Camot, Paris, le 8/02/1647, p. 71-73. La Fontaine et Camot quittent Saint-Christophe à bord d’un navire de Flessingue en 1646 (DT/1667, t. 1, p. 307).
23 DT/1667, t. 1, p. 398 et 401.
24 Ibid., t. 1, p. 401 ; P. Boyer du Petit Puy, Briève relation, op. cit., p. 453 et 460 ; Dupuis, p. 65. La Fontaine rentre en France avec la Ramée et Patrocle de Thoisy sur le bateau du capitaine Mancel en 1647. Il est à Saint-Malo le 17 mai 1647 (DT/1667, t. 1, p. 392).
25 J.-P. Moreau, Les Petites Antilles, op. cit., p. 210.
26 DT/1667, t. 1, p. 426.
27 Délibération, le 7/07/1645, p. 491-492 ; DT/1667, t. 1, p. 426. Un contrat est signé quelques jours plus tard (ANOM, F2A13, Traité de l’isle de la Grenade, Paris, Paris, le 10/07/1645, p. 65).
28 MSM, p. 77. Nouailly quitte Rouen le 8 août 1643 à la tête d’une des compagnies de l’expédition de Brétigny vers la Guyane. Après les drames qui voient somber la colonie, il fonde lui-même avec une soixantaine d’hommes un éphémère établissement français au Surinam. Sur l’entreprise de Brétigny, voir P. Boyer du Petit Puy, Véritable relation de tout ce qui s’est fait et passé au voyage que M. de Brétigny fit à l’Amérique occidentale, Paris, Pierre Rocolet, 1654.
29 MSM, p. 77 ; AD 35, 9H7, n° 68, Nouailly à Léon de Saint-Jean, Nantes, le 4/04/1646, 3 fol.
30 Léon de Saint-Jean obtient du général de l’ordre à Rome, Leo Bonifilius, le 2 avril 1646 les pouvoirs pour envoyer des religieux (AD 35, 9H7, n° 54, Notes chronologiques, pas de date, pas de n° de fol. ; MSM, p. 77-78). Léon de Saint-Jean est le provincial de Touraine (1600-1671). Homme de grande spiritualité, il a été visiteur apostolique en France, et confesseur de Louis XIII et de Richelieu. Il donne en 1642 les derniers sacrements au cardinal, qui meurt dans ses bras (J. Ryan, « The Carmelite Missions in the Caribean 1646-1664 », Historical Records and Studies of the United States Catholic Historical Society, 49, New-York, Yonkers, 1962, p. 35 ; M. Carmona, Richelieu, Marabout, 1986, p. 694).
31 ANOM, F2A13, Com. de lieutenant général, Paris, le 11/07/1646, p. 236. Dutertre interprète mal cette commission en croyant que Beaumanoir reprend à son compte l’entreprise de la Grenade (D/1667, t. 1, p. 426).
32 AD 44, 4E2, étude Mariot, 1466, n° 303, Contrat d’association, Nantes, le 14/08/1645, pas de n° de fol.
33 MSM, p. 79, 97 et 116.
34 AN, MC, étude I, 122, Nomination de Pierre Chirat sénéchal de la Grenade, Paris, le 24/05/1647.
35 Délibération, le 08/05/1648, p. 507.
36 Les Hollandais prennent l’île de Tobago et fondent la Nouvelle Oüalchre en 1628. La Compagnie de Flessingue envoie plus de deux cents hommes dans cet établissement (Ch. de Rochefort, Tableau de l’île de Tobago ou de la Nouvelle Oüalchre, dans Rochefort, t. 2, p. 320-321 ; M. Devèze, Antilles, Guyanes, la mer des Caraïbes, op. cit., p. 149-150).
37 C. G. Pestana, The English Atlantic in an Age of Revolution, 1640-1661, Harvard UP, 2004, p. 250 ; L. Gragg, Englishmen Transpanted. The English Colonization of Barbados, 1627-1660, Oxford UP, 2003, p. 147.
38 Délibération, le 3/11/1645, p. 495 ; Délibération, le 12/12/1645, p. 497 ; ANOM, F2A13, Traité avec les Srs. de Veuil et Saint-Rémy, Paris, le 24/12/1645, p. 67-69 ; ANOM, F2A13, Com. aux Srs. de Vueuil et Saint-Rémy, Paris, le 24/12/1645, p. 234 ; Délibération, le 5/01/1646, p. 498.
39 Les marchands de Flessingue de la famille Lampsius réoccupent la place en 1652 (M. Devèze, Antilles, Guyanes, la mer des Caraïbes, op. cit., p. 150).
40 Délibération, le 2/03/1646, p. 501.
41 L’argument est repris plus tard par Brunetti pour expliquer la situation de ces îles (C. Brunetti, « Information succinte de quelques établissements aux pays de l’Amérique méridionale », op. cit., p. 33).
42 Les Anglais regardent ces îles depuis quelques années. Le 9 juin 1647, la Company of adventurers for the plantation of the islands of Eleutheria est montée. Le capitaine William Sail mène l’expédition à l’automne suivant (G. Gardyner, A Description of the New World, op. cit., p. 55 ; W. H. Miller, « The Colonization of the Bahamas, 1647-1670 », WMQ, third series, 2, no 1, 1945, p. 33-36).
43 PDP, p. 35. Le jésuite Jean Hallay compte 8000 Indiens dans chaque île de la Dominique, de Saint-Vincent et de la Grenade (BnF, coll. Moreau, n° 841, J. Hallay, Relation des Isles de la Martinique et de Saint-Christophle, fol. 159r). Pelleprat parle de 9000 à 10000 Indiens à Saint-Vincent vers 1655 (Pelleprat, Relation, op. cit., 1re partie, p. 70).
44 Acte de prise de possession de la Dominique, le 17/11/1635, dans Margry, p. 8-9.
45 Le capucin Pacifique de Provins évalue la population indienne à 3000 âmes en 1645 (PDP, p. 35).
46 DT/1667, t. 1, p. 199 ; Bret/RF, p. 58. Le 23 mars 1642, Poincy se fend d’une lettre au père de La Mare pour lui demander de rappeler les deux religieux (Poincy à de La Mare, Saint-Christophe, le 23/02/1642, dans DT/1667, t. 1, p. 200-201).
47 Délibération, le 3/04/1642, p. 425.
48 Voir à ce sujet É. Roulet, « Les desseins missionnaires de Pacifique de Provins pour l’Amérique », dans B. Grunberg (éd.), Les Indiens des Petites Antilles, Paris, L’Harmattan, 2011, p. 129-146.
49 Bret/A, p. 144, 148 et 150 ; Bret/B, p. 174, 180, 182 et 186 ; Bret/RF, p. 123. En 1646, Breton doit accepter de partir à la Dominique avec un capucin. Ce dernier, ne pouvant se faire au pays, s’en retourne assez rapidement, laissant le dominicain seul parmi les Indiens (ibid.).
50 J.-P. Moreau, Les Petites Antilles, op. cit., p. 210.
51 Anonyme de Saint-Vincent, Description de l’île de Saint-Vincent, op. cit., p. 298.
52 P. Pelleprat, Relation, op. cit., 1re partie, p. 70 et 72 ; B. David, Dictionnaire, op. cit., t. 1, p. 113.
53 ARSI, Franc, 45-II, fol. 289r, 291r ; P. Pelleprat, Relation, op. cit., 1re partie, p. 82-83 et 85 ; DT/1667, t. 1, p. 466 ; ARSI, Gallia, 106, Duvivier à G. Nickel, Saint-Christophe, le 26/06/1657, fol. 303r.
54 Traité franco-anglo-caraïbe, le 31/03/1660, dans DT/1667, t. 1, p. 577-578.
55 DT/1667, t. 1, p. 417 et t. 2, p. 34 ; Bret/D, p. 204.
56 DT/1667, t. 1, p. 417 et 421, et t. 2, p. 35 ; Lettre de Houël, Sainte-Marie, le 20/10/1653, dans DT/1667, t. 1, p. 419 ; P. Pelleprat, Relation, op. cit., 1re partie, p. 32.
57 DT/1667, t. 1, p. 441.
58 T. G. Mathews, « The Spanish Domination of Saint Martin (1633-1648) », Caribean Studies, 9, n° 1, 1969, p. 21. Dutertre dit qu’en 1638 monsieur de Saint-Martin a reçu une commission du roi pour prendre l’île (DT/1667, t. 1, p. 410). Nous ne l’avons pas retrouvée dans les archives.
59 PDP, p. 39-40 ; Rochefort, t. 2, p. 19 ; DT/1667, t. 1, p. 448-449.
60 T. G. Mathews, « The Spanish Domination of Saint Martin (1633-1648) », op. cit., p. 21.
61 DT/1667, t. 1, p. 449.
62 Ibid., t. 1, p. 408 et suiv. et t. 2, p. 32 ; Com. d’Abraham Adriesen à Martin Thomas, Saint-Eustache, le 16/02/1648, dans DT/1667, t. 1, p. 409-410 ; Ordonnance à M. de Longvilliers, Saint-Christophe, le 16/03/1648, dans DT/1667, t. 1 p. 411-412 ; Articles signés entre les commandants français et hollandais, le 23/03/1648, dans DT/1667, t. 1, p. 412-414.
63 DT/1667, t. 1, p. 448-452 et t. 2, p. 37.
64 ID. ; Rochefort, t. 2, p. 19.
65 DT/1667, t. 1, p. 416 et t. 2, p. 33. Le dominicain parle en un autre endroit de son œuvre d’un commandement confié à un certain Jacques Gente.
66 Bibliothèque de l’Institut de France, ms Godefroy 273, t. 1, Poincy à Séguier, Saint-Christophe, le 25/04/1648, fol. 494.
67 En 1656, les Indiens en chassent les Français. La paix est faite en 1659. Poincy envoie alors une trentaine d’hommes. Ils ne seront jamais très nombreux. Dutertre dit qu’ils ne sont qu’une centaine en 1664 (DT/1667, t. 1, p. 417).
68 DT/1667, t. 1, p. 404 et suiv. L’épisode est aussi très brièvement évoqué par Brunetti (C. Brunetti, « Information succinte de quelques établissements aux pays de l’Amérique méridionale », op. cit., p. 33) et Maurile de Saint-Michel (MSM, p. 133-134).
69 MSM, p. 102 ; Poincy, Mémoires envoyés aux seigneurs de la Cie des îles de l’Amérique, Saint-Christophe, le 15/11/1640, dans J. Rennard, Tricentenaire, op. cit., p. 102. Il semble que l’attaque des Indiens ait été motivée par l’enlèvement de quatre des leurs par les Anglais. Le capitaine Judlee était parti de Saint-Christophe avec 300 ou 400 hommes en 1638 pour s’établir à Sainte-Lucie (C. P. Lucas, A Historical Geography of the British Colonies, op. cit., p. 205-206).
70 DT/1667, t. 1, p. 434-438 et t. 2, p. 36-37.
71 DT/1667, t. 1, p. 426-427 et 429 ; Anonyme de Grenade, L’Histoire de l’île de la Grenade, op. cit., p. 141-142 et 144-146. Le Comte tient le gouvernement de l’île mais n’a que le titre de lieutenant.
72 Anonyme de Grenade, L’Histoire de l’île de la Grenade, op. cit., p. 148.
73 DT/1667, t. 1, p. 430-433 ; Anonyme de Grenade, L’Histoire de l’île de la Grenade, op. cit., p. 150 ; MSM, p. 284.
74 Cette exigence apparaît dès le premier contrat signé entre les associés et d’Esnambuc et Roissey. Ils partent « pour faire habiter et peupler les îles […] situées à l’entrée du Pérou, […] qui ne sont point possédées par des princes chrétiens, […] afin de faire instruire les habitants desdites îles en la religion catholique, apostolique et romaine » (Acte d’association des seigneurs de la Cie des îles de l’Amérique, Paris, le 31/10/1626, dans DT/1667, t. 1, p. 9-10).
75 ANOM, F2A13, Traité de la Cie avec L’Olive et du Plessis, Paris, le 14/02/1635, p. 19.
76 Délibération, le 22/12/1641, p. 435 ; Délibération, le 3/03/1645, p. 482.
77 ANOM, F2A13, Traité de l’isle de la Grenade, Paris, Paris, le 10/07/1645, p. 66.
78 Délibération, le 5/01/1639, p. 349.
79 Délibération, le 1/09/1638, p. 338.
80 Mémoire du père Bouton, cité dans Délibération, le 2/01/1641, p. 405.
81 A. Pérotin-Dumon, La ville aux îles, op. cit., p. 100.
82 Délibération, le 3/09/1636, p. 279 ; ANOM, F2A13, Instructions pour le Sr. Gentil, Paris, le 3/09/1636, p. 105. Pour Dutertre un quartier comporte un fort ou un corps de garde, une église, des magasins, et un lieu où on tient le poids, reprenant en cela les instructions des directeurs (DT/1667, t. 2, p. 25).
83 ANOM, F2A13, Instruction au Sr. Aubert, Paris, le 5/05/1640, p. 152.
84 DT/1667, t. 2, p. 25 et suiv.
85 Délibération, le 3/03/1645, p. 481.
86 DT/1667, t. 2, p. 14. Pour le jésuite Jean Hallay, il n’y a aux îles ni ville, ni village (BnF, coll. Moreau, n° 841, J. Hallay, Relation des Isles de la Martinique et de Saint-Christophle, fol. 161v).
87 Une ville à l’époque moderne ne se définit pas par rapport à un nombre d’habitants mais par ses privilèges et ses attributions. Ses murailles symbolisent sa domination du pays (R. Mousnier, Les institutions de la France, op. cit., t. 1, p. 437).
88 Le bourg de Basse-Terre compte 320 habitants en 1671. Il est comparable à celui de Port Royal à la Jamaïque (630 habitants en 1662) et de Montréal (600 habitants en 1663). Vers 1750, la population de Basse-Terre est de 2000 habitants (A. Pérotin-Dumon, La ville aux îles, op. cit., p. 88, 102, 120 et 282).
89 Poincy à Fouquet, le 16/10/1639, dans DT/1667, t. 2, p. 7.
90 Délibération, le 19/02/1640, p. 376.
91 Madame d’Aubigné à madame de Villette, la Martinique, le 2/06/1646, dans Mémoires pour servir à l’histoire de madame de Maintenon, op. cit., t. 6, p. 35 ; Chev, p. 49-50 ; DT/1667, t. 1, p. 20.
92 Délibération, le 1/12/1638, p. 345 ; Délibération, le 3/08/1639, p. 363.
93 Du Parquet à Fouquet, Saint-Christophe, le 17/08/1639, dans DT/1667, t. 1, p. 110.
94 Délibération, le 7/09/1639, p. 364 et 367. La succession de Clérier qui leur revient est ainsi attribuée pour moitié au futur hôpital de Saint-Christophe.
95 AD 76, TH, reg. 183, Charte-partie, le 13/01/1627, dans Anth, t. 2, p. 533 ; DT/1667, t. 1, p. 6 ; Du Parquet à Fouquet, Saint-Christophe, le 17/08/1639, dans DT/1667, t. 1, p. 110-111.
96 Délibération, le 3/09/1636, p. 279.
97 Délibération, le 6/08/1643, p. 460.
98 Maurile de Saint-Michel écrit à ce propos : « il n’y a point de personnes mieux venues dans ce pays que les chirurgiens et qui soient plutôt capables d’y faire fortune, car ils y sont médecins et apothicaires, faute d’autres. Le sieur Girault homme d’esprit, lyonnais, y alla comme chirurgien et y a changé sa lancette en une plume, puis en une épée, car il est devenu capitaine fort riche et a marié sa fille avec un des neveux de monsieur le général, qui pourra être un jour Madame la générale » (MSM, p. 169-170).
99 DT/1667, t. 1, p. 99 et 144.
100 B. David, Dictionnaire, op. cit., t. 1, p. 175. Il arrive en 1652 aux îles.
101 DT/1667, t. 1, p. 423-424 ; Bret/B, p. 182.
102 P. Pelleprat, Relation, op. cit., 1re partie, p. 33-34 ; ARSI, Franc, 33-II, fol. 361r ; ARSI, HS, 48, fol. 64v ; « Notice », dans P. Pelleprat, Relation des missions des pères de la Compagnie de Jésus dans les îles et, dans la Terre Ferme de l’Amérique méridionale, PUL, 2009, p. 280.
103 F. Régent, La France et ses esclaves, op. cit., p. 165. En 1668, une trentaine de marrons s’y sont installés.
104 ANOM, F2A13, Com. de lieutenant général à M. Bernard, Paris, le 18/04/1646, p. 235 ; ANOM, F3, 221, Traité entre les directeurs des isles de l’Amérique et le Sr. de Dalleville, Paris, le 18/04/1646, fol. 241-242.
105 Les incursions des Indiens précipitent la Martinique dans la guerre après la mort de du Parquet en 1658. À la fin de l’année 1658, les Français contrôlent toute l’île. Le traité de 1660 consacre leur suprématie (Arrêt du conseil souverain de la Martinique, le 24/03/1660, dans DT/1667, t. 1, p. 573-574 ; Traité franco-anglo-caraïbe, le 31/03/1660, dans DT/1667, t. 1, p. 577-578 ; DT/1667, t. 1, p. 542 et 546 ; ANOM, C8B1, Arrêt du conseil souverain de la Martinique, le 6/04/1660, fol. 1 et 2).
106 Délibération, le 19/02/1640, p. 376.
107 Mémoire du père Bouton, cité dans Délibération, le 2/01/1641, p. 405 ; DT/1667, t. 1, p. 424 ; Ordonnance de M. le général pour l’établissement d’un conseil de guerre, la Guadeloupe, le 1/08/1646, dans DT/1667, t. 1, p. 322-323.
108 DT/1667, t. 2, p. 141.
109 MAE, MD, Am., 4, Contrat pour l’établissement des Français à l’île Saint-Christophe, Paris, le 31/10/1626, Pub. dans Margry, p. 99.
110 ANOM, F2A13, Contrat du rétablissement de la Cie des îles de l’Amérique, Paris, le 12/02/1635, p. 1-6.
111 Nous reprenons ici les éléments de plusieurs contributions que nous avons consacrées à cet aspect de l’activité de la Compagnie : « Mousquets, piques et canons… la défense des Antilles françaises au temps de la Compagnie des îles 1626-1648 », dans D. Plouviez, (éd.), Défense et colonies dans le monde atlantique xve-xxe siècle, Rennes, PUR, 2014, p. 201-217 ; « Les miliciens dans les Antilles françaises dans la première moitié du xviie siècle (1625-1664) », dans B. Deruelle, A. Guinier, (éd.), Cultures et identités combattantes, Paris, Publications de la Sorbonne, 2017, p. 181-197.
112 ANOM, F2A13, Délibération, le 6/01/1635, p. 318 ; ANOM, F2A13, Com. au Sr. Auger, Paris, le 6/01/1638, p. 124-125.
113 Délibération, le 25/08/1635, p. 251 ; Délibération, le 2/04/1636, p. 260.
114 Délibération, le 5/03/1636, p. 258 ; Délibération, le 31/03/1647, p. 503.
115 G. Coppier, Histoire et voyage, op. cit., p. 132.
116 Petition of James earl of Carlisle, sir James Hay and Archibald Hay to the privy council, mai 1639, CSP, t. 1, p. 295
117 Délibération, le 6/06/1641, p. 414.
118 M. Devèze, Antilles, Guyanes, la mer des Caraïbes, op. cit., p. 149-150 ; DT/1667, t. 1, p. 410 ; K. O. Kupperman, Providence Island 1630-1641, op. cit., p. 336-341. Poincy fait le récit de l’offensive espagnole sur Santa Catalina aux associés (Délibération, le 3/04/1642, p. 426-427).
119 DT/1667, t. 1, p. 169 et 172 ; A.-O. Exquemelin, Histoire des aventuriers flibustiers, op. cit., p. 74-75 et 78-79. Les Espagnols ont semble-t-il déjà mené une opération contre les Anglais de la Tortue au début des années trente (Minute of a Court for Association Island, Brooke House, le 19/03/1635, dans CSP, t. 1, p. 200).
120 T. G. Mathews, « The Spanish Domination of Saint Martin (1633-1648) », op. cit., p. 21. Ils y interviennent à deux reprises en 1640 et en 1646. Ils détruisent alors un petit fort.
121 M. Devèze, Antilles, Guyanes, la mer des Caraïbes, op. cit., p. 149 ; L. M. Rupert, Creolization and Contraband : Curaçao in the Early Modern Atlantic World, Athens (Georgie), University of Georgia Press, 2010, p. 40 ; Resolution made at fort Amsterdam on Curaçao, le 6/01/1643, dans Ch. T. Gehring (éd.), Curaçao Papers 1640-1665, New York, The New Netherlands Research Center/The New Netherland Institute, 2011, p. 8.
122 MSM, p. 112. Les flottes d’Espagne faisaient auparavant halte à la Guadeloupe. Thomas Gage raconte en 1625 la mésaventure de plusieurs de ses compagnons de voyages qui, étant allés à terre, sont attaqués par les Indiens de la Guadeloupe et tués à coups de flèches (T. Gage, Thomas Gage’s Travels in the New World, op. cit., p. 25-26). En 1646, les Espagnols abordent la Dominique pour prendre de l’eau et enlèvent au passage quatre Indiens (Bret/RF, p. 124).
123 BnF, ms fr. 15466, P. Pélican à J.-B. Carré, la Guadeloupe, le 28/05/1635, fol. 86v ; Bret/RF, p. 124. On relève leur présence en 1646 à la Dominique (Bret/B, p. 142).
124 Délibération, le 25/08/1635, p. 251-252. Le 5 septembre, Berruyer est chargé de s’entretenir à Dieppe avec Cavelet du Herteley pour faire envoyer les armes (Délibération, le 5/09/1635, p. 254). En mars 1636, les armes ont bien été acheminées mais elles n’ont pas encore été payées (Délibération, le 5/03/1636, p. 259).
125 Délibération, le 5/09/1635, p. 254
126 Bret/RF, p. 93.
127 Bret/RF, vp, p. 107 ; MSM, p. 112 ; Du Parquet à Fouquet, Saint-Christophe, le 17/08/1639, dans DT/1667, t. 1, p. 111.
128 DT/1667, t. 1, p. 156. Elle a pour tâche de ruiner les positions hollandaises au Brésil. Elle perd une soixantaine de vaisseaux dans la bataille.
129 Délibération, le 3/04/1642, p. 426-427.
130 DT/1667, t. 1, p. 327. Ce navire commandé par Boutain avait été saisi sur l’ordre de Thoisy et chargé d’armes.
131 DT/1667, t. 1, p. 38 ; I. Guët, « Origines des petites Antilles », op. cit., 2, p. 271 ; I. Guët, Le colonel François de Collart, op. cit., p. 33.
132 DT/1667, t. 1, p. 60 et suiv. Margry place l’incident en 1634. Guët parle, lui, de l’année 1633 (Margry, p. 43 ; I. Guët, Le colonel François de Collart, op. cit., p. 33).
133 Délibération, le 2/09/1637, p. 305 ; Treaty, le 15/07/1637, dans V. Langford Oliver, The History of the Island of Antigua, op. cit., p. X ; ANOM, F352, Extrait d’une convention faite par M. le commandeur de Poincy et le Sr. Warnard, le 24/09/1644, fol. 68v ; ANOM, F352, Extrait d’autre convention faite par les Français et Anglais, le 28/10/1649, fol. 68v-69r ; Articles et accords faits entre les deux nations résidentes, habitant à l’île de Saint-Christophe, 1654, dans DT/1667, t. 1, p. 476. Poincy renouvelle le traité avec les Anglais de Saint-Christophe en 1654 en tant que bailli de l’Ordre de Malte (ibid.). En 1660, le commandeur de Salles qui a succédé à Poincy à la tête de l’île signe avec l’Anglais Wats (ANOM, F352, Extrait des articles et accords faits et conclus entre les deux nations française et anglaise, 1660, fol. 69r-70r).
134 Bret/RF, p. 90.
135 Poincy, Mémoires envoyés aux seigneurs de la Cie des îles de l’Amérique, Saint-Christophe, le 15/11/1640, dans J. Rennard, Tricentenaire, op. cit., p. 102 et 105.
136 Petition of James earl of Carlisle, sir James Hay and Archibald Hay to the privy council, mai 1639, CSP, t. 1, p. 295 ; Warrant to the officers of ordnance to deliver to the earl of Carlisle, sir James Hay and Archibald Hay the proportion of powder requested, le 28/05/1639, CSP, t. 1, p. 295.
137 Regnoult à Fouquet, le 28/12/1639, dans DT/1667, t. 1, p. 146 ; DT/1667, t. 1, p. 188.
138 PDP, p. 39-40.
139 MSM, p. 151-152.
140 P. Pelleprat, Relation, op. cit., 1re partie, p. 38-39.
141 MSM, p. 162.
142 Ibid., p. 151-152.
143 DT/1667, t. 1, p. 5-7.
144 Ibid., t. 1, p. 102-103.
145 Rochefort, t. 2, p. 6.
146 Bret/RF, p. 125.
147 Le capitaine Henriconte « refusa tout plat » de les accueillir dans son carbet et le capitaine Hamichon « leur dénia sa case ». Seul le capitaine Baron accepte de les héberger (ibid., p. 117).
148 Du Parquet à Fouquet, le 17/08/1639, dans DT/1667, t. 1, p. 111 ; BnF, coll. Moreau, n° 841, J. Hallay, Relation des Isles de la Martinique et de Saint-Christophle, fol. 158v.
149 Rochefort prête à d’Esnambuc la crainte de voir cette entente se réaliser pour les chasser de Saint-Christophe (Rochefort, t. 2, p. 7). Du Parquet rapporte en 1638 à la Compagnie que le dessein des Espagnols est de s’unir aux Indiens pour lutter contre les Français (Délibération, le 5/01/1639, p. 351).
150 Ph. de Beaumont, Lettre du Révérend Père Philippe de Beaumont, […] écrite à M. C.A.L, Poitiers, Jean Fleuriau, 1668, p. 8-10 ; DT/1667, t. 4, p. 79 et suiv.
151 MAE, MD, Am., 4, Contrat pour l’établissement des Français à l’île Saint-Christophe, Paris, le 31/10/1626, fol. 65. Pub. dans Margry, p. 99 ; Com. de Richelieu aux Srs. d’Esnambuc et du Rossey, Paris, le 31/10/1626, dans DT/1667, t. 1, p. 12.
152 ANOM, F2A13, Instruction aux Srs. de L’Olive et du Plessis, Paris, le 7/03/1635, p. 80.
153 Délibération, le 1/09/1638, p. 338.
154 Constant d’Aubigné peut s’installer à Marie-Galante à condition de ménager « l’affection des peuples sauvages [et] qu’il n’aura point de guerre avec eux » (ANOM, F2A13, Traité entre MM. les directeurs et M. d’Aubigné, Paris, le 31/03/1645, p. 65).
155 DT/1667, t. 1, p. 87-88 ; Bret/RF, p. 90-91 ; Bret/A, p. 140.
156 Bret/A, p. 140 ; DT/1667, t. 1, p. 89.
157 Berruyer à Fouquet, Dieppe, le 26/03/1636, cité dans Délibération, le 2/04/1636, p. 260 ; Délibération, le 2/04/1636, p. 260.
158 DT/1667, t. 1, p. 82.
159 Bret/RF, p. 90-91, 102, 110 et 116 ; DT/1667, t. 1, p. 192-193 ; Délibération, le 4/04/1640, p. 390.
160 Bret/RF, p. 115 ; DT/1667, t. 1, p. 151.
161 Délibération, le 4/04/1640, p. 391 ; ANOM, F2A13, Com. de lieutenant général à Aubert, Paris, le 4/04/1640, p. 150-151.
162 Bret/RF, p. 116 ; DT/1667, t. 1, p. 192-193 et 196-197.
163 Rochefort, t. 2, p. 32-33.
164 Bret/RF, p. 116.
165 Délibération, le 5/01/1639, p. 351.
166 Du Parquet à la Compagnie, le 25/06/1639, dans DT/1667, t. 1, p. 114 ; Du Parquet à Fouquet, Saint-Christophe, le 17/08/1639, dans DT/1667, t. 1, p. 111.
167 Chirat à la Compagnie, le 8/11/1639, dans DT/1667, t. 1, p. 114 ; Du Parquet à Poincy, le 24/11/1639, dans DT/1667, t. 1, p. 115 ; Com. à du Parquet, Saint-Christophe, le 20/01/1640, dans DT/1667, t. 1, p. 116 ; Poincy à la Compagnie, Saint-Christophe, le 25/01/1640, dans DT/1667, t. 1, p. 115 ; Délibération, le 19/02/1640, p. 379-380 ; Bouton, p. 26.
168 Poincy à Fouquet, le 4/07/1640, dans DT/1667, t. 1, p. 117 ; DT/1667, t. 1, p. 116-118 ; Délibération, le 7/09/1639, p. 368 ; ANOM, F2A13, Com. de sénéchal à du Parquet, le 1/04/1643, p. 184-185.
169 Bret/RF, p. 118-119.
170 PDP, p. 36-37.
171 Délibération, le 2/07/1636, p. 275. Il peut s’agir du capitaine Dallenson qui vient aux îles à la fin de l’année 1635 sur le Revenge (Contrat, le 25/09/1635, cité par Anth, t. 2, p. 145).
172 Délibération, le 2/07/1636, p. 275. Il doit s’agir du capitaine Paul Languillet. Il vient aux îles à la fin de l’année 1635 (AD 76, TH, reg. 206, Charte-partie, le 4/08/1635. Pub. dans Anth, t. 2, p. 552-555). On le trouve dans les sources sous le nom de Languillier, Languillet et Languille.
173 DT/1667, t. 1, p. 135-136 ; Délibération, le 7/09/1639, p. 364. La Bare était emprisonné à Saint-Christophe comme soldat pour un délit dont nous ne connaissons pas la teneur. Les circonstances de son évasion sont tout aussi énigmatiques.
174 MAE, MD, Am., 4, Contrat pour l’établissement des Français à l’île Saint-Christophe, le 31/10/1626. Pub. dans Margry, p. 101.
175 DT/1667, t. 1, p. 27.
176 BnF, ms fr. 15466, P. Pélican à J.-B. Carré, la Guadeloupe, le 28/05/1635, fol. 86v ; DT/1667, t. 1, p. 77. Voir aussi : B. Kissoun, « Fortifications des îles. Trois siècles d’architecture militaire en Guadeloupe : xviie-xixe siècle », Bulletin Monumental, 163-4, 2005, p. 343-356.
177 DT/1667, t. 1, p. 101 et 102-103.
178 Minutes of a Court for Association Island, Warwick House, le 21/04/1635, dans CSP, t. 1, p. 204 ; Minutes of a Comittee for Providence Island, Broke House, le 23/06/1635, dans CSP, t. 1, p. 210 ; The Company of Providence Island to capt. Daniel Elfrith, Admiral there, Londres, le 28/03/1636, dans CSP, t. 1, p. 230.
179 Partage des terres de l’île de Saint Christophe, Saint-Christophe, le 13/05/1627, dans DT/1667, t. 1, p. 18.
180 Sur la politique de fortification espagnole, voir : J. A. Calderon Quijano, Las fortificaciones españolas en América y Filipinas, Madrid, Mapfre, 1996.
181 Bret/RF, p. 89 ; Bret/A, p. 140 ; Bret/B, p. 166.
182 DT/1667, t. 1, p. 127 et 157-158.
183 L. Verrand, « Fortifications militaires de Martinique, 1635 – 1845 », Journal of Caribbean Archaeology, Special Publication #1, 2004, p. 156.
184 Poincy à Fouquet, le 16/08/1639, dans DT/1667, t. 1, p. 108.
185 Hampteau à Poincy, dans Poincy, Mémoires envoyés aux seigneurs de la Cie des îles de l’Amérique, Saint-Christophe, le 15/11/1640, dans J. Rennard, Tricentenaire, op. cit., p. 106-107.
186 Délibération, le 1/05/1641, p. 411.
187 DT/1667, t. 1, p. 156-157 et 169-170.
188 Ibid., t. 1, p. 171-172 ; Délibération, le 10/05/1643, p. 453.
189 DT/1667, t. 1, p. 180 et suiv.
190 Délibération, le 5/06/1636, p. 249 ; Délibération, le 9/12/1644, p. 475 ; Délibération, le 8/05/1648, p. 508.
191 Délibération, le 4/02/1637, p. 289.
192 Délibération, le 16/07/1637, p. 299.
193 Délibération, le 5/08/1637, p. 302 ; Sommaire du voyage fait par le Sr. d’Infreville, Paris, le 23/03/1631. Pub. dans Sourdis/C, t. 3, p. 184 et 195.
194 Délibération, le 7/10/1637, p. 309-310.
195 Délibération, le 22/12/1641, p. 436-437.
196 Poincy à Fouquet, le 16/08/1639, dans DT/1667, t. 1, p. 108 ; DT/1667, t. 1, p. 225.
197 Com. de Richelieu aux Srs. d’Esnambuc et du Roissey, Paris, le 31/10/1626, dans DT/1667, t. 1, p. 13.
198 « [lesdits] hommes susnommés [devront] obéir au gouverneur, travailler aux forteresses et faire la garde ainsi que les autres habitants », Contrat d’engagement, le 9/05/1635, dans ANTH, t. 2, p. 550 ; MSM, p. 136.
199 MSM, p. 136 ; DT/1667, t. 1, p. 316 ; L. Chauleau, Dans les îles du vent, op. cit., p. 61.
200 Délibération, le 7/06/1636, p. 261 ; Délibération, le 16/07/1637, p. 300.
201 BnF, ms fr. 18593, Mémoire touchant les différends entre les Srs. de Poincy et Patrocle et les associés de la Cie des îles de l’Amérique, fol. 417r ; Extrait des registres du conseil d’État, dans DT/1667, t. 1, p. 380.
202 Délibération, le 3 mars 1645, p. 482 ; DT/1667, t. 2, p. 441 ; P.-F.-R. Dessalles, Annales du conseil souverain de la Martinique, op. cit., t. 1-1, p. 4.
203 AD 76, TH, reg. 183, Acte d’affrètement, le 20/05/1627. Pub. dans Anth, p. 539.
204 Délibération, le 2/03/1639, p. 352-353.
205 Délibération, le 6/06/1641, p. 412 ; Du Parquet à Fouquet, Saint-Christophe, le 17/08/1639, dans DT/1667, t. 1, p. 111.
206 Délibération, le 25/08/1635, p. 252 ; Délibération, le 7/09/1639, p. 367.
207 Délibération, le 4/02/1638, p. 322 ; Du Parquet à Fouquet, Saint-Christophe, le 17/08/1639, dans DT/1667, t. 1, p. 111.
208 Délibération, le 7/07/1638, p. 333.
209 G. Saupin, « Les marchands nantais et l’ouverture de la route antillaise », op. cit., p. 176.
210 Les abréviations utilisées dans le manuscrit pour les quantités sont équivoques. Mais Margry note lui aussi 1500 livres (BnF, Naf, 9318, Actes d’assemblées de Compagnie des îles d’Amérique, p. 73).
211 Délibération, le 2/07/1636, p. 274-275.
212 Délibération, le 6/08/1636, p. 276 ; Délibération, le 7/10/1637, p. 309 ; Délibération, le 2/06/1638, p. 329 ; Délibération, le 3/06/1644, p. 472.
213 C. Brunetti, « Relation des isles de l’Amérique, Antilles en l’estat qu’elles estoient l’année 1660 », dans S. H. Anderson, « Cosimo Brunetti… », op. cit., p. 29.
214 DT/1667, t. 1, p. 61. Le recours aux esclaves en temps de guerre se poursuit au xviiie siècle (F. Régent, La France et ses esclaves, Paris, Pluriel, 2009, p. 186 ; F. Régent, « Armement des hommes de couleur et liberté aux Antilles : le cas de la Guadeloupe pendant l’Ancien Régime et la Révolution », Annales historiques de la Révolution française, 348, avril-juin 2007, p. 41-56).
215 Il reçoit un mémoire de Poincy et un autre de Martin de Maunoy (Délibération, le 6/06/1640, p. 401).
216 ANOM, F2A13, Contrat entre la Cie et le cardinal, Paris, le 29/01/1642, p. 42.
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Un constructeur de la France du xxe siècle
La Société Auxiliaire d'Entreprises (SAE) et la naissance de la grande entreprise française de bâtiment (1924-1974)
Pierre Jambard
2008
Ouvriers bretons
Conflits d'usines, conflits identitaires en Bretagne dans les années 1968
Vincent Porhel
2008
L'intrusion balnéaire
Les populations littorales bretonnes et vendéennes face au tourisme (1800-1945)
Johan Vincent
2008
L'individu dans la famille à Rome au ive siècle
D'après l'œuvre d'Ambroise de Milan
Dominique Lhuillier-Martinetti
2008
L'éveil politique de la Savoie
Conflits ordinaires et rivalités nouvelles (1848-1853)
Sylvain Milbach
2008
L'évangélisation des Indiens du Mexique
Impact et réalité de la conquête spirituelle (xvie siècle)
Éric Roulet
2008
Les miroirs du silence
L'éducation des jeunes sourds dans l'Ouest, 1800-1934
Patrick Bourgalais
2008