Chapitre 10. Les receveurs de la Compagnie dans les ports de France
p. 275-293
Texte intégral
1La Compagnie a son siège à Paris mais ses bases opérationnelles sont situées dans les principaux ports de France (Le Havre, Dieppe, Saint-Malo, Nantes, La Rochelle) où elle dispose d’entrepôts et de bureaux sous l’autorité d’un receveur. Les raisons de ces implantations correspondent-elles à des logiques identiques ou signifient-elles une évolution de la stratégie de la Compagnie ? Comment les hommes qu’elle a nommés pour la représenter ont-ils été choisis et quelles sont leurs compétences ? Offrent-ils un profil particulier ? Les associés envisagent-ils par leur intermédiaire de s’implanter plus profondément dans le milieu marchand ?
Les implantations de la Compagnie en métropole
2En 1626, la Compagnie pour les îles établit sa base au Havre. Mais ce n’est pas l’unique lieu fréquenté par ses navires, car certains arrivent ou partent de Port-Louis, mais elle n’y entretient aucun agent en son nom1. En 1635, peu après la signature du contrat avec les marchands de Dieppe, elle nomme un receveur dans la ville normande. Au fil des ans, la Compagnie s’installe à Nantes, à La Rochelle, et à Saint-Malo. Elle a aussi un entrepôt de pétun à Brouage2. Il n’est plus question en revanche de Port-Louis d’où étaient partis d’Esnambuc et Roissey en 16273. Les raisons de l’abandon du site par la Compagnie des îles de l’Amérique ne sont pas connues, mais il est probable qu’il soit intervenu bien avant 1635. Mais qu’espère la Compagnie de ces implantations ?
3Ces ports figurent parmi les principaux de France dans les enquêtes ministérielles4. Ils disposent d’infrastructures qui sont recherchées par les associés. Ils offrent un havre bien protégé des éléments. Ils ont des navires, des capitaines et des équipages propres à animer le trafic. Ce sont aussi des places commerciales et financières animant de vastes réseaux de redistribution des marchandises. L’implantation de la Compagnie sur ces sites semble donc logique du point de vue économique. Mais d’autres facteurs ont pu influer. Les associés ont certainement été sensibles à leur capacité de captation des produits de leurs arrière-pays respectifs, dont ils ont besoin pour les établissements antillais, et à leur pouvoir d’attraction sur les hommes des campagnes alentour, qu’ils envisagent d’envoyer servir au-delà des mers5. L’expérience du commerce au lointain et de la colonisation, notamment en Amérique du Nord, est un autre élément qui a pu intervenir dans leur décision. Les associés n’expliquent jamais leurs choix stratégiques.
Carte 5. Les sites d’implantation de la Compagnie.

4Cependant tous les sites n’ont pas la même importance dans les plans de la Compagnie. Si le volume des marchandises traitées et le montant des transactions ne sont pas connus et empêchent toute pesée quantitative, il apparaît clairement que l’activité de la Compagnie se concentre principalement dans les ports du Havre et de Dieppe. C’est là que tout se joue pour elle (ou presque), que les affaires se réalisent, et que se font les ventes des produits qu’elle fait venir des îles. Et les receveurs des deux ports normands sont tout naturellement les plus importants dans l’organigramme de la Compagnie.
L’importance des places normandes
5Plusieurs indices permettent d’évaluer la place des sites normands dans le fonctionnement de la Compagnie. Les associés mentionnent principalement ces places dans leurs délibérations et les courriers qu’ils adressent à leurs partenaires ou leurs agents. Ils s’inquiètent des comptes du Havre et de Dieppe, et bien moins des autres. Les principaux contrats d’affrètement connus sont signés avec les capitaines normands. Une grande partie des navires qui vont aux îles et qui en reviennent est normande. Les directeurs, notamment Jacques Berruyer, se déplacent fréquemment dans ces villes, ce qu’ils ne font aucunement ailleurs, pour assurer le suivi des opérations les plus délicates. L’ancrage normand de plusieurs associés facilite les prises de contact. Jean Cavelet du Herteley est du Havre, Jacob Bontemps de Dieppe, et Jean Rozée réside une bonne partie de l’année à Rouen. Ils sont le plus à même de signer des contrats avec les capitaines dans les ports de la Manche qu’ils connaissent bien pour les fréquenter depuis longtemps. C’est aussi du Havre et de Dieppe que partent la plupart des engagés et des colons.
6Le Havre se distingue tout particulièrement. C’est un lieu emblématique renvoyant aux origines de la Compagnie, mais qui correspond aussi à une réalité économique. Le Havre occupe une place centrale dans le dispositif de la Compagnie et le fait que la charge de receveur appartienne à un associé, en l’occurrence Jean Cavelet du Herteley, en est un signe manifeste. Il est le seul dans ce cas. La Compagnie entend bien disposer sur place de l’un des siens pour organiser et surveiller ses plus importantes affaires. Le receveur du Havre est le plus actif, et sa recette est la plus conséquente. Le Havre satisfait pleinement les associés qui poursuivent cette implantation. Le Havre bénéficie en outre de l’attention de Richelieu qui réalise de nombreux investissements pour protéger et aménager la place6. C’est probablement ce qui explique que bien des années après, plusieurs compagnies à privilèges y ont des bureaux. La nouvelle Compagnie des Indes occidentales établie par Colbert en 1664 a son siège au Havre. En 1666, elle envoie vingt-neuf navires vers les colonies d’Amérique dont un quart sont armés dans le port normand. En 1709, la Compagnie royale du Sénégal a ses bureaux au Havre7. La Compagnie des îles a peut-être aussi un entrepôt à Honfleur car en 1639 le receveur du Havre Robert Couette y est chargé de la recette des droits8.
7Dieppe a reçu en 1635 de la Compagnie l’exclusivité du départ vers la Guadeloupe. Elle garde, malgré le retrait des marchands de la ville qui s’étaient engagés aux côtés de L’Olive et du Plessis, un rôle important dans le trafic antillais. Dieppe occupe une place significative dans l’espace français au point d’accueillir le jeune Louis XIV pour son premier voyage sur le littoral en 16479.
8La Compagnie peut espérer bénéficier des connections des ports normands avec les autres ports de France. Les marchands normands participent avec d’autres à plusieurs compagnies de commerce. Ainsi, la compagnie fondée par Pierre du Gua de Monts en 1603 comprend des Rouennais, des Malouins, des Rochelais, et même des Basques de Saint-Jean-de-Luz10. Il existe des ententes entre marchands dieppois et nantais, ces derniers affrètent les bateaux des premiers pour les Antilles. Ainsi, le 9 décembre 1639, plusieurs marchands de la Fosse et du Pornic négocient-ils avec le dieppois Nicolas Labbé l’envoi d’un navire de soixante tonneaux, la Catherine, à Saint-Christophe. Le nantais Louis Brétineau, sieur du Plessix, traite lui avec un marchand de Caen en 164211.
La montée en puissance de La Rochelle et Nantes
9La Compagnie décide à la fin des années trente de diversifier ses implantations afin vraisemblablement de développer ses activités et de trouver de nouveaux partenaires. Les ports de l’Ouest sont peu impliqués au début du siècle dans le commerce vers les îles. Ils s’intéressent principalement au Canada et les autorités politiques et administratives locales (parlements, États provinciaux) privilégient leurs intérêts. Les États de Bretagne protègent notamment le trafic malouin vers Terre-Neuve. Cependant, les Antilles commencent à retenir leur attention12. Le volume des affaires traitées à Saint-Malo, Nantes et La Rochelle par la Compagnie demeure modeste mais il croît en importance tout au long de la première moitié du xviie siècle. La Normandie garde cependant la préférence des associés.
10L’activité de la Compagnie à Saint-Malo apparaît peu dans les délibérations. Le gouverneur d’Esnambuc y envoie une patache en 1637. Mais le pétun qui arrive en 1638 sur le navire du capitaine Mirebeau est aussitôt réexpédié au Havre pour y être vendu par Cavelet du Herteley13. L’absence d’un receveur de la Compagnie à Saint-Malo à cette époque – en tout cas sa présence n’est pas attestée dans la documentation – pourrait expliquer ce choix. Saint-Malo semble prendre une plus grande part dans la vie de la Compagnie dans les années quarante, avec la nomination d’un receveur, mais elle demeure modeste. Il n’est d’ailleurs plus fait mention dans les délibérations d’arrivées de navires dans ce port après 1641. Les chroniqueurs évoquent pour leur part peu le rôle de Saint-Malo, sauf à mentionner quelques retours de navires des îles : le gouverneur de la Guadeloupe, Charles Houël, rentre en France en 1644 par Saint-Malo ; le lieutenant général du roi, Patrocle de Thoisy, chassé des îles, arrive à Saint-Malo le 17 mai 1647. Le capitaine Beaugendre embarque les pères carmes Côme de la Présentation, Innocent de Saint-Julien et le frère Léon à Saint-Malo en 164914. Les associés manifestent peu d’intérêt pour la cité corsaire. Pourtant, l’activité des investisseurs malouins est soulignée par le gouverneur Jacques Dyel du Parquet, qui note en 1639 que l’assistance apportée par les navires malouins est essentielle à la Martinique15.
11L’implantation de la Compagnie à Saint-Malo n’est vraisemblablement pas motivée par l’espérance d’un intense trafic, mais davantage par l’expérience de navigation des marins dans des eaux lointaines ou dangereuses, et l’esprit d’entreprise des investisseurs, qui permettent d’assurer et de conforter une certaine activité. Saint-Malo est un point d’appui, éventuellement une base de vente pour le pétun. En 1643, 50000 ou 60000 livres de pétun sont ainsi acheminées en convoi de La Rochelle à Saint-Malo pour y être vendues16. Mais si Saint-Malo occupe déjà une place de choix dans le paysage maritime français, il faut attendre la seconde moitié du xviie siècle pour qu’il devienne un des ports majeurs du royaume. En 1664, il est classé au second rang derrière Le Havre dans l’inventaire des vaisseaux établi à la demande de Colbert. La part américaine est conséquente, mais elle n’est pas ou peu antillaise. Son commerce s’oriente vers Terre-Neuve et l’Espagne17. Le bourgeois de la ville, Jean Briant Larcy, préfère le trafic vers l’Afrique. Il obtient du roi le monopole du commerce de Guinée, de Sierra Leone au cap Lopez le 14 janvier 1634 pour dix ans18.
12La présence de la Compagnie à La Rochelle est attestée en 1637 quand le directeur Jacques Berruyer vient y négocier avec le capitaine Gandouin l’envoi d’armes aux îles19. Quelques navires rochelais sont tout spécialement affrétés par les directeurs. Le trafic se densifie au milieu des années quarante. Jean Rozée monte une grosse expédition de plusieurs navires pour transporter des marchandises aux îles20. Mais La Rochelle est dans l’esprit des associés une base secondaire. Le milieu rochelais s’implique pourtant de plus en plus dans ce commerce au fil des années, et plusieurs capitaines obtiennent des congés de la Compagnie21. Il faut cependant attendre les années 1660-1686 pour que le rôle de La Rochelle s’affirme véritablement sous l’impulsion de Colbert qui veut en faire un point d’appui pour sa politique coloniale. L’évolution du nombre des engagés partant de La Rochelle en est l’illustration. Ils sont malgré tout très modestes : 20 entre 1640 et 1645, 45 entre 1660 et 1665, et 72 entre 1680 et 169022. Marcel Delafosse compte 339 navires quittant La Rochelle pour les îles entre 1670 et 1692 d’après le registre de l’amirauté23. La Compagnie des îles a un entrepôt à Brouage mais ne semble pas y avoir de receveur. Celui de La Rochelle doit y pourvoir. Il y a peut-être simplement un garde-magasin. Brouage n’est pas à cette époque un port exceptionnel. Le commissaire général de la Marine, d’Infreville, souligne que son envasement est préjudiciable à son activité et déplore en 1631 « qu’il ne s’y fait aucun travail quoiqu’il se remplisse24 ».
13L’implantation de la Compagnie à Nantes date de 163725. Le port est alors en pleine mutation en raison de la redistribution des cartes dans le commerce européen. Pour l’heure, les activités demeurent encore traditionnelles, avec un trafic principalement orienté vers l’Espagne au sud, et Dantzig à l’est. Les marchands nantais voient cependant leurs certitudes et leurs pratiques sérieusement ébranlées26. Ils doivent réagir. Si l’essor de Nantes n’est manifeste qu’à partir de 1660, un processus de croissance est perceptible bien plus tôt, même si le milieu négociant nantais reste prudent. Il recherche avant tout un profit rémunérateur. Le déclin des commerces du vin et du sel le conduit à repenser les choses. Dans ce contexte, les Antilles apparaissent pour certains comme une opportunité27. Quelques marchands nantais manifestent dès 1629 leur intérêt pour Saint-Christophe. Ils affrètent un navire d’Olonne. Mais le premier engagement ne date que de 1636, et il faut attendre 1643 pour voir des volumes plus importants transiter par Nantes28.
14Le développement de nouvelles bases par la Compagnie ne signifie pas une bascule de son activité des ports de la Manche vers les ports de l’Atlantique. Son ancrage reste normand. La Compagnie cherche avant tout à développer ses liens avec le milieu marchand et le grand négoce afin de dynamiser les échanges vers les îles et de diversifier ses partenariats. La régression économique de la Normandie a probablement contribué à cette orientation. Les années 1625-1640 sont particulièrement difficiles dans la province en raison des épidémies de peste, de la pression fiscale et de la guerre contre l’Espagne29. Si les autres grands ports de France n’ont pas retenu l’attention de la Compagnie, c’est probablement parce qu’ils sont trop exposés comme Calais, ou parce qu’ils n’offrent pas les perspectives attendues en termes de mobilisation des capitaux, des navires et des hommes.
Les intérêts de Richelieu
15Mais un autre élément a pu influer dans le choix des implantations de la Compagnie. Toutes les places que nous avons mentionnées sont sous l’autorité de Richelieu30. Il détient le gouvernement du Havre depuis 162631. En 1626, le duc Timoléon d’Epinay de Saint-Luc abandonne le gouvernement de Brouage contre le bâton de maréchal. Il revient à la reine-mère Marie de Médicis. En octobre 1629, le roi Louis XIII nomme Richelieu lieutenant général de Brouage, Oléron et Ré. Marie de Médicis garde le gouvernement32. Le cardinal poursuit son emprise sur une région commencée lors du siège de La Rochelle. Les affaires malouines sont plus complexes. Elles relèvent du gouverneur de Bretagne alors entre les mains du duc de Vendôme. En 1629, Richelieu, jaloux de ses nouvelles prérogatives de grand maître et de surintendant de la navigation et du commerce, de France lui interdit d’intervenir dans les affaires maritimes. En 1630, le duc de Vendôme, compromis dans la conjuration de Chalais, est en prison. Le gouvernement de Bretagne est vacant. Les États de Bretagne le proposent alors à Marie de Médicis et promettent la lieutenance générale à Richelieu. Le cardinal obtient finalement le gouvernement pour lui seul. Il a ainsi un regard sur les affaires malouines. Le duc de Vendôme reçoit tout de même une indemnité de 198000 livres. Le 5 décembre 1630, Richelieu reçoit du roi le gouvernement de Ré, de l’Aunis et de La Rochelle après que Jean Caylar d’Anduze, seigneur de Toiras, s’en soit défait contre un bâton de maréchal et 200000 livres. L’affaire nantaise demande plus de temps. Le cardinal lorgne sur la cité ligérienne depuis 1619, mais il doit attendre le mois de mars 1632 pour que le duc de Montbazon lui cède la place contre 200000 livres, plus 18000 livres pour le fort de Pillemil qui commande l’embouchure de la Loire33.
Carte 6. Les gouvernements tenus par Richelieu et les membres de sa famille.

(source : J. Bergin, Pouvoir et fortune de Richelieu, op. cit., p. 348)
16Il est cependant difficile de dire si Richelieu a influé sur le choix des implantations de la Compagnie des îles de l’Amérique dans les ports français ou s’il a pris le contrôle de ces sites dans la perspective de faciliter ses activités. Il tire indéniablement un bénéfice du développement du trafic dans ces ports qui sont sous son commandement. La politique commerciale du cardinal et de la monarchie se confond avec celle de la Compagnie.
Les tâches des receveurs de la Compagnie
17Les receveurs représentent la Compagnie dans les ports et agissent en son nom. Ils défendent ses droits et privilèges. L’instruction qui leur est adressée en 1635, quoique succincte – elle tient en deux folios –, indique leurs principales fonctions en insistant sur les vérifications qu’ils doivent effectuer pour s’assurer du paiement des droits dus à la Compagnie.
Tableau 19. Les receveurs de la Compagnie dans les ports de France.
Le Havre | |
1626-1639 | Jean Cavelet du Herteley |
1639-1642 | Robert Couette |
1642- ? | de Touvant |
Dieppe | |
1635 | Caron |
1636-1645 ? | Michel Manichet |
Nantes | |
1637-1641 | Jacques Fernandes |
1641 | Lescot et Gorge |
La Rochelle | |
1638-1641 | Jean Tuffet |
1641-1646 ? | Nicolas Denis |
Saint-Malo | |
1642 | Heurtault les Tertres |
Source : ANOM, F2A13.
Les instructions de la Compagnie
18La tâche principale des receveurs est de contrôler toutes les arrivées des îles. Ils doivent veiller à ce que les droits de la Compagnie sur les marchandises ont bien été acquittés en regardant les certificats des commis qui les accompagnent, sinon les marchandises sont saisies dans l’attente des papiers qui établissent leur état. Les maîtres de navires ont un an pour produire les documents désirés. Les receveurs doivent aviser les directeurs des navires qui vont et reviennent des îles et signaler tout navire qui n’a pas reçu de congé34. Cavelet du Herteley signale ainsi en 1636 à la Compagnie qu’Antoine Richard de Vateuille a mené des engagés à Saint-Christophe sans avoir demandé de congé de la Compagnie ni pris ses hommes. La Compagnie décide de le poursuivre pour les dommages subis tant en France qu’à Saint-Christophe. Elle en averti par courrier le gouverneur de Saint-Christophe, d’Esnambuc35, certainement pour qu’il se montre à l’avenir plus rigoureux dans l’accueil des capitaines, et son commis Gentil. Fernandes, le receveur de la Compagnie à Nantes, somme en 1639 « le capitaine Desforges de présenter le congé qu’il a eu d’aller aux îles et de faire apparaître comme il a satisfait aux clauses dudit congé à faute de quoi, il fera saisir le vaisseau et pétun dudit Desforges36 ». Les receveurs réceptionnent aussi le pétun de la Compagnie, le stockent dans ses entrepôts, et en assurent la garde. Ils recrutent des hommes pour la manutention et l’enregistrement des marchandises, peut-être aussi pour les écritures. Mais il n’est guère question de ces hommes ni de leurs conditions de travail dans les délibérations. Les receveurs vendent les marchandises de la Compagnie à la demande des directeurs37 et jamais de leur propre initiative. La Compagnie invite ainsi son commis à Dieppe à vendre son pétun à 60 livres le cent en 1636. Elle lui permet en 1639 de le vendre au prix de 20 livres ou 18 livres le cent38. Les receveurs sont parfois sollicités par les directeurs pour connaître s’ils ont des acheteurs potentiels et à quel prix ils peuvent escompter écouler la marchandise.
19Les receveurs organisent aussi les départs des navires et des hommes vers les îles. Ils ont en effet reçu de la Compagnie le pouvoir d’accorder des congés aux capitaines et maîtres de navires, en exigeant expressément qu’ils fassent leur retour « de droite route » au port d’attache, afin de ne pas écouler leur précieuse cargaison dans un autre port, notamment un port étranger ; qu’ils passent trois personnes et portent quatre tonneaux aux îles sans frais ; et qu’ils transportent les marchandises produites dans les îles pour la Compagnie sans fret dans la limite du dixième de leur cargaison39. Ils disposent cependant d’une certaine latitude pour négocier avec les capitaines de navires, tant qu’ils privilégient l’intérêt de la Compagnie40. Les receveurs préparent aussi les départs des navires affrétés par la Compagnie. Ils signent de nombreuses chartes-parties qu’ils envoient ensuite aux associés qui en débattent lors de leurs réunions mensuelles pour qu’ils donnent leur assentiment. Ils assurent le recrutement des engagés, qu’ils soient simples travailleurs ou artisans. En 1636, Michel Manichet est chargé par Cavelet du Herteley de faire embarquer à Dieppe sur le navire de Fromont les chaufourniers qu’il lui envoie. En 1640, il doit chercher des artisans (deux charpentiers, deux scieurs de long, un menuisier, un armurier, un salpêtrier, un potier de terre) et négocier avec eux leurs gages et leur condition de travail et d’exercice dans les îles. Les receveurs sont assez libres dans la rédaction du contrat, les associés n’imposant comme seule exigence que les engagés ne fassent pas de pétun et se consacrent à leur métier41. Les directeurs invitent d’ailleurs les receveurs à solliciter l’aide des curés de paroisse pour faire de la publicité pour les îles et à faire afficher dans les villages le privilège du roi accordé aux artisans42. Les receveurs jouent un rôle majeur dans l’organisation des migrations vers les îles43. Ils recherchent aussi des hommes pour leurs propres affaires ou pour le compte des hommes pour les îles. Ils ont pu aider les marchands de Dieppe à trouver des candidats pour la Guadeloupe.
20Les receveurs avisent régulièrement par courrier les directeurs de leurs actions. Ils écrivent aux commis dans les îles pour leur indiquer ce qu’ils leur envoient afin qu’il n’y ait pas de produits égarés au cours de la traversée par un capitaine ou un homme d’équipage indélicat. Ils les avisent aussi du départ des engagés pour qu’ils les prennent en charge quand ils débarquent. Ainsi en 1638, Manichet prévient-il les commis de l’arrivée imminente d’artisans44.
21Les receveurs manient beaucoup d’argent dans le cadre de leurs fonctions, car ce sont eux qui vendent le pétun de la Compagnie. Les sommes peuvent être importantes car un navire peut transporter entre 75000 et 100000 livres de pétun qui est vendu entre 35 et 50 livres le cent, ce qui représente plusieurs dizaines de milliers de livres45. Par ailleurs, ils reçoivent aussi en mains propres des associés de l’argent pour financer certaines opérations ou à remettre à un particulier ou à un groupe de personnes allant aux îles. Ce peuvent être des aides consenties pour l’entretien des missionnaires, des artisans, ou de certaines personnalités. Cavelet du Herteley se voit ainsi confier 600 livres en 1635 à donner aux dominicains qui vont partir du Havre, et 300 livres en 1637 pour deux pères capucins46.
22Les receveurs doivent rendre des comptes aux associés. Ils doivent fournir leurs registres chaque année pour qu’ils soient examinés et arrêtés par les directeurs. Pierre Cavelet présente les comptes de son père à la Compagnie après son décès. Il remet au nouveau receveur le pétun qui est entre ses mains47. Robert Couette est cautionné par sa mère Anne Aubery48. Les receveurs sont vraisemblablement redevables sur leurs propres deniers de leurs comptes envers la Compagnie.
23Les receveurs sont amnés à communiquer entre eux. Ils transfèrent à la demande des associés des marchandises d’un port à l’autre. En 1643, Tuffet organise ainsi le transport de 50000 à 60000 livres de pétun de La Rochelle à Saint-Malo et prévoit « l’escorte d’autres vaisseaux49 ». Les receveurs assurent le suivi des affaires engagées par les directeurs, notamment en matière d’approvisionnement. Ils sont pour cela en relation avec le receveur de Richelieu à Calais, Guillaume Fly50. En 1637, Martin de Maunoy négocie avec lui pour obtenir plusieurs canons de 18 livres, dont deux pour Saint-Christophe et deux pour la Martinique. Il propose un paiement en pétun, au cours de 20 livres le cent51.
Les activités particulières des receveurs
24Le service de la Compagnie n’est pas exclusif. Ainsi Manichet demeure tabellion royal, et Touvant, lieutenant de l’amirauté52. Ils montent aussi leurs propres affaires. Jacques Fernandes, qui représente la Compagnie à Nantes, a par exemple une petite société de vente de pétun à Salé sur la côte de Barbarie qui intéresse au plus haut point les associés, qui voudraient pouvoir écouler par son intermédiaire 20000 livres de leur propre pétun à 15 livres le cent53. Ils y voient la possibilité de diversifier leurs échanges et un débouché pour leur production alors que le marché européen est engorgé. Ils espèrent tirer bénéfice de la place des marchands français à Salé à cette époque. En 1630, un groupe de marchands protestants de Rouen a demandé à Richelieu l’installation d’un consul de France pour favoriser leurs affaires. L’amélioration des relations entre la France et Salé après des années de tension permet de faciliter les choses. Le 3 septembre 1630, une trêve est signée pour deux ans. Le 17 septembre 1631, la paix est enfin signée. Les marchands français reçoivent les mêmes garanties que ceux des États du sultan, à savoir la liberté commerciale, la juridiction consulaire et même la liberté d’exercer leur culte54. Les marchandises destinées au marché marocain sont le tabac et les épices. Ils servent souvent à racheter les captifs55. Le pétun des îles pourrait donc servir aussi à ces transactions particulières. Il n’est plus question de cette association pour Salé par la suite dans les délibérations de la Compagnie. Il est donc difficile de savoir si le projet a abouti et dans quelle mesure il a éventuellement rapporté quelque chose à la Compagnie.
Les receveurs et la Compagnie
25La Compagnie entend disposer dans les ports d’hommes compétents et d’expérience bien implantés dans le milieu local. Onze receveurs ont exercé pour son compte, mais leurs qualités personnelles et les raisons de leur choix ne sont pas évoquées dans les délibérations.
Des marchands au service de la Compagnie
26Il semble en regardant les profils des receveurs que la Compagnie a privilégié délibérément des personnes familières, quoique à des degrés divers, des affaires commerciales. Une bonne moitié est constituée de marchands ou de facteurs agissant déjà pour le compte de compagnies de commerce comme Tuffet et Denis. Ils sont bien implantés dans la ville. Ils connaissent les capitaines, les maîtres de navires et les bourgeois affréteurs. Certains receveurs appartiennent à l’administration portuaire. Quelques-uns sont proches d’associés de la Compagnie avec lesquels ils sont déjà en affaire et qu’ils côtoient depuis plusieurs années. Les raisons qui les font choisir par les associés lient donc étroitement compétence et réseau de clientèle. Trois cas de figure se dégagent. Au Havre, la Compagnie fait le choix de l’un des siens, Jean Cavelet du Herteley. Son second, Robert Couette, lui succède naturellement à sa mort en 1639. À Nantes, elle confie la charge à Jacques Fernandes en pariant sur la dynamique communauté portugaise. À La Rochelle, Elle sollicite les facteurs des compagnies canadiennes. La part du contexte local est plus difficile à définir, hormis dans le cas nantais.
Figure 16. Les origines des receveurs.

27La Compagnie cherche clairement à tisser des liens avec les professionnels et à user de réseaux déjà établis et non à en constituer un de toutes pièces pour satisfaire ses besoins et ses ambitions. Dans quelle mesure ces nominations ont-elles permis aux associés de s’implanter dans les villes portuaires ? Il est parfois difficile de pénétrer le milieu du négoce sans s’attirer des inimitiés car il existe des tensions entre les différents groupes, clans et familles qui s’attisent quand des affaires s’annoncent prometteuses. La Compagnie ne risque-t-elle pas dans ces conditions de rencontrer quelques difficultés pour s’implanter durablement ?
L’évidence normande
28Cavelet du Herteley est certainement une des personnalités qui a le plus marqué l’histoire de la Compagnie. Receveur au Havre pour le cardinal, représentant de la Compagnie depuis 1626, associé de la Compagnie, il est incontournable. Il ne semble pourtant plus désirer en 1635 poursuivre sa charge de receveur de la Compagnie car il demande à en être déchargé. On peut se demander pourquoi. Est-il las d’effectuer cette tâche ? A-t-il été mis en difficulté sur ses comptes ? Les associés en soulignant que ses registres n’ont jamais été examinés laissent poindre quelques critiques. Mais ils décident de ne plus regarder les actes passés56. Y a-t-il eu des négligences coupables de sa part ? Tout cela n’a pas dû être d’une grande gravité car les associés l’invitent à poursuivre. Cavelet du Herteley se laisse convaincre. Il est reconduit dans ses fonctions jusqu’à sa mort en 1638 lors des différentes assemblées générales57. Il est très actif au Havre, mais on ne sait pas toujours s’il agit en tant que receveur ou en tant que directeur de la Compagnie. Aussi son décès est-il durement ressenti par les associés. Ils peuvent cependant compter sur son second, Robert Couette, qu’il a vraisemblablement choisi pour faire face à ses nombreuses obligations et responsabilités.
29Le 5 janvier 1639, Robert Couette est fait commis de la recette des droits au Havre et à Honfleur, après vérification de ses garanties. À cette date, l’homme était déjà à l’œuvre. Il demande de l’argent à la Compagnie pour acquitter les droits du pétun qui arrive des îles et faire face à de menues dépenses. La Compagnie lui donne 1000 livres58. En 1642, la charge revient au sieur de Touvant59.
30Nous savons peu de choses du premier agent de la Compagnie à Dieppe, le sieur Caron, commis le 7 mars 1635 pour l’année 1635. Il semble qu’il ait été pressenti avant qu’il ne donne son consentement. Les associés l’invitent à accepter cette charge60. S’agit-il du conseiller Caron auquel Alexis de Saint-Lô adresse son histoire de l’expédition au Cap-Vert en 1637 ? Le chroniqueur dieppois du xviie siècle, David Asseline, mentionne un Jean-Baptiste Caron, ancien échevin de la ville, qui est prieur des marchands vers 1643 ou 164461. Cette position importante au sein de la ville en fait, s’il s’agit de notre homme, un choix de premier ordre. Le sieur Caron ne reste pas longtemps le représentant de la Compagnie car lors de l’assemblée du 3 décembre 1636 les associés choisissent Michel Manichet pour lui succéder62. Les raisons de ce changement ne sont pas connues. Manichet semble un choix judicieux. L’homme est bien implanté à Dieppe où il est tabellion juré. Il enregistre à ce titre la procuration des marchands de Dieppe faite à Salomon Faulcon pour aller négocier en leur nom à Paris avec les directeurs de la Compagnie des îles en 163563. Peut-être s’est-il fait connaître des associés à cette occasion. Toujours est-il que Manichet est commis à la recette des droits de la Compagnie à Dieppe en 1636 et qu’il est reconduit dans ses fonctions lors des assemblées générales les années suivantes64. Son nom apparaît pour la dernière fois dans les délibérations en 1645, mais il pu exercer sa charge au-delà65. Il a dû donner entière satisfaction à la Compagnie. Il est le seul receveur de la Compagnie à Dieppe durant toute son existence. Manichet connaît cependant peut-être quelques contrariétés. Il semble visé par une procédure judiciaire en 1642. La Compagnie veut son renvoi devant le Grand conseil. La nature de l’affaire n’est pas connue mais elle n’affecte pas ses relations avec la Compagnie qui le maintient dans son poste66. Manichet a fort à faire en revanche avec les marchands de Dieppe qui ont conclu un contrat avec L’Olive et la Compagnie pour la colonisation de la Guadeloupe. Manichet est très fréquemment sollicité par les associés, davantage même que le receveur du Havre. La mort de Cavelet du Herteley qui les a privés d’un interlocuteur de choix explique peut-être qu’une partie significative de l’activité de la Compagnie glisse du Havre vers Dieppe.
Fernandes et les Portugais de Nantes
31Jacques Fernandes est chargé des affaires de la Compagnie à Nantes de 1637 à 164167. Ce choix, Fernandes est un sujet portugais ou d’origine portugaise, s’explique très certainement par le poids de cette communauté dans le monde marchand nantais, quoique peu importante numériquement68. Les Portugais, pour une bonne part des marranes qui ont fui la répression religieuse, ont trouvé en France, une terre d’accueil. En 1550, le roi de France Henri II par lettres patentes leur a permis de trafiquer et de s’établir. Après 1580, et la conquête du Portugal par Philippe II, l’immigration portugaise s’est encore accentuée et s’est diversifiée. Des catholiques sont même venus à cette occasion s’établir en France69. Aussi est-il difficile de dire si Jacques Fernandes est un marrane. Les Portugais de Nantes se consacrent presque tous aux affaires et forment un groupe assez fermé70. Les registres de la paroisse Saint-Nicolas mentionnent un Jacques Fernandes en 1633. Il est l’époux d’Isabelle Vas71. S’il s’agit de notre homme, il est allié à une des plus importantes familles de la colonie, les Vas72. Un autre Fernandes apparaît fréquemment dans les papiers de l’amirauté, mais nous n’avons pas son prénom, ce qui empêche de savoir s’il s’agit de Jacques73. D’autres Portugais de Nantes jouent un rôle important dans les affaires antillaises. Il en est ainsi d’un certain Rodrigues qui se propose de faire construire deux moulins à pulvériser le tabac en 1646. La Compagnie se montre attentive à ce projet mais attend qu’il obtienne du roi les autorisations nécessaires pour leur construction74. Peut-être s’agit-il de Jean Rodrigues de Moira, un membre éminent de la communauté portugaise de Nantes qui s’est spécialisé dans le transport des engagés vers les Antilles. Guy Saupin relève qu’il a passé pas moins de vingt-quatre contrats d’engagement entre 1641 et 1647. Il est l’un des grands pourvoyeurs en main-d’œuvre. Il investit aussi à Saint-Christophe où il envoie son neveu Pierre de Moira pour s’occuper de ses affaires75. Mais certains associés préfèrent d’autres interlocuteurs à Jacques Fernandes. Claude de Launay Razilly fait part dans une lettre ouverte aux associés en 1637 de sa défiance envers Fernandes en affirmant « qu’il n’était [pas] à propos de donner connaissance de nos affaires à un Portugais, et qu’il ne le tenait pas assez fidèle76 ». Il lui préfère le sieur Suhard. Cette méfiance à l’égard de Fernandes s’inscrit dans un contexte particulièrement difficile pour la communauté portugaise de Nantes qui fait l’objet à cette époque, de la part d’une partie de la population, de nombreuses critiques et de réactions hostiles qui sont parfois violentes. En 1623, les commerçants nantais et espagnols portent ombrage de leur réussite et les membres de l’association marchande de la Contractation tentent d’entraver leur négoce en interdisant le transport de leurs marchandises sur leurs bateaux. À la fin de l’année 1636, des émeutes éclatent à Nantes. Les Portugais en sont principalement les cibles. Des magasins sont pillés et des maisons détruites. Les commerçants nantais persuadent même les échevins de chasser les Portugais de la ville en 1636. Ces derniers ne se laissent pas faire et, certainement mené par leur consul, portent l’affaire devant le parlement de Rennes. L’avocat général ne peut que constater, pour mieux la dénoncer, la jalousie des habitants de la ville. La colonie portugaise est alors placée sous la protection du roi. Le ressentiment contre les étrangers est profond. D’autres incidents éclatent en 1637, mais cette fois-ci, les Portugais ne sont pas les seuls à en faire les frais, les Hollandais sont aussi visés. Un habitant de Nantes, Jean Éon, devenu en religion le père carme Mathias de Saint-Jean, se fait l’écho de ces mécontentements et en appelle à la protection du commerce national en 1646 dans son ouvrage Le commerce honorable77.
32Mais comment interpréter cette préférence de Launay Razilly pour Suhard au détriment de Fernandes ? Ne fait-il que relayer les ressentiments des marchands nantais à l’égard des Portugais, ou bien exprime-t-il un sentiment plus personnel ? À moins qu’il n’ait quelques accointances avec Suhard et qu’il veuille le privilégier dans son désir de trafiquer aux Antilles. La famille Suhard est influente à Nantes. François Suhard est un marchand bien connu de la place78. Launay Razilly a pu nouer des liens avec lui alors qu’il est premier chef d’escadre des vaisseaux du roi en Bretagne (1637)79. Il semblerait que la lutte contre l’influence des Portugais et le désir de profiter du commerce antillais aillent de pair. D’ailleurs, un marchand de la Fosse très actif, Jean Burot, s’illustre tout autant dans l’opposition à la naturalisation des Portugais que dans le commerce vers Saint-Christophe. Il y fait passer avec son associé Louis de La Pélonnye un bateau de soixante-quinze tonneaux avec des armes en 163980. Il fait le commerce du pétun avec Saint-Christophe81. La mise en cause de la qualité du travail de Jacques Fernandes par Claude de Launay Razilly n’est pas partagée par les associés qui lui réitèrent leur confiance. Cependant, ils indiquent qu’il faudra réfléchir « pour l’avenir quelle personne on commettra à Nantes pour les affaires de la Compagnie82 », certainement pour contenter Launay Razilly qui est un homme influent qu’il faut ménager. D’ailleurs, en 1642, la Compagnie accepte de faire passer gratuitement, « en considération dudit sieur de Razilly », une certaine jeune fille aux îles83.
33Jacques Fernandes quitte finalement le service de la Compagnie le 28 juillet 1641. Quelles en sont les motifs ? Launay Razilly aurait-il finalement obtenu gain de cause ou y aurait-il quelque autre raison ? Les différends financiers entre Fernandes avec la Compagnie y ont peut-être une part. Fernandes tarde en effet à remettre l’argent de la vente du pétun. Le premier mai 1641, la Compagnie l’invite à lui donner les obligations qu’il a reçues d’Antoine Castelain pour les 86000 livres de pétun84. Elle est impatiente de voir l’affaire se régler. De Loynes est chargé d’en assurer le suivi. Le 7 juillet 1641, elle lui demande cette fois-ci de recouvrer les sommes dues par le sieur Sabathier. Elle se montre moins compréhensive et menace de saisir le conseil du roi afin d’obtenir un arrêt contre lui. Si dans l’affaire Sabathier, Fernandes ne semble pas entièrement fautif, puisqu’est évoquée la possibilité de le faire saisir si c’est nécessaire, ce qui signifie des manquements de Sabathier, en revanche, il apparaît négligent dans ses comptes. Fernandes met en avant sa bonne foi et demande à s’expliquer devant les associés à Paris « pour donner contentement de tout à la Compagnie85 ». Si les explications ont pu paraître suffisantes, en revanche, la confiance est entamée. À moins que Fernandes n’ait développé d’autres projets qui l’intéressent davantage et se soit démis de cette fonction.
34Le nouveau représentant de la Compagnie à Nantes apparaît dans les délibérations sous le nom de Lescot le 28 juillet 1641. Il appartient lui aussi au milieu marchand, du moins est-il présenté comme tel par les associés en 1642. Mais l’état des receveurs de 1642 mentionne deux personnes, Lescot et Gorge86. Nous ne savons pas le partage de leurs responsabilités. L’activité de Gorge ne fait l’objet d’aucun commentaire de la part des associés dans les délibérations. Il est cependant sollicité dans certaines affaires importantes, il remet notamment en mains propres un courrier à Robert de Longvilliers en 1645 avant qu’il n’embarque87. Lescot et Gorge figurent comme commis de la prévôté lors d’un litige jugé par l’amirauté en 163588.
L’expérience canadienne privilégiée
35La Compagnie fait le choix à La Rochelle de solliciter les facteurs des compagnies du Canada. Il est vraisemblable que les associés s’adressent à eux car ils les connaissent pour les côtoyer dans les compagnies dont ils sont actionnaires, à commencer par celle de la Nouvelle-France, mais aussi parce qu’ils ont l’habitude du monde américain et des nécessités des colonies.
36Jean Tuffet est l’agent de la Compagnie des îles à La Rochelle en 163889. L’historien Robert Le Blant en fait un catholique rochelais qui se serait réfugié à Bordeaux avant de se réinstaller dans la ville de La Rochelle90. Tuffet a une bonne expérience des affaires coloniales. Il s’occupe des affaires de Pierre Desportes de Lignières, un des hommes d’une compagnie particulière du Canada, la Compagnie du Cap-Breton, de 1636 à 1639 pour qui il affrète des navires et signe des chartes-parties91. Il a une part dans la Compagnie de la Nouvelle-France92. Il ne reste que quelques années au service de la Compagnie des îles. Nicolas Denis lui succède en 164193.
37La famille Denys ou Denis est une vieille famille rochelaise fortement impliquée dans le commerce canadien. Nicolas Denis est réputé marchand de la ville. Il accompagne Isaac de Razilly au Canada en 1632 pour fonder un établissement en Acadie. Il établit une pêcherie à Port-Rossignol qu’il exploite avec son frère Simon, et un chantier de charpente. Il est associé dans cette affaire avec Claude de Launay Razilly et un marchand breton, Bazille94. Il rentre à La Rochelle en 1635 après la mort d’Isaac de Razilly car il ne s’entend pas avec son successeur Charles Menou d’Aulnay95. Il continue d’armer durant de longues années des navires pour l’Acadie pour le compte de Claude de Launay Razilly96. Il joue un rôle très actif dans le recrutement des colons vers le Canada97. Cette activité ne doit pas lui suffire, aussi devient-il l’agent de la Compagnie des îles. Sa proximité avec Berruyer et de Launay Razilly a probablement décidé de son emploi. Il est à noter que durant tout le temps passé au service de la Compagnie des îles, il poursuit ses activités pour la colonisation du Canada. Il agit ainsi en 1642 pour le compte de Jacques Berruyer et de la Compagnie du Canada. Il recrute 20 hommes pour le Canada en 1644. Il investit dans une compagnie particulière en Nouvelle-France, la Compagnie de Miscou98. Il associe à ses affaires son frère Jacques, capitaine dans la marine royale. Ils participent ensemble aux compagnies de Miscou et de la Nouvelle-France99. Denis assure parallèlement la préparation et le suivi d’expéditions importantes pour les îles. Il s’occupe ainsi du départ du gouverneur Charles Houël en 1645 à qui il avance 5000 livres dont il ne cessera de réclamer le remboursement aux associés100. Il est difficile de savoir jusqu’à quand il est resté au service de la Compagnie des îles de l’Amérique car les délibérations ne mentionnent plus aucun nom de receveur pour les dernières années101, mais il est certain qu’il n’assure plus sa charge en 1650 car ayant appris la mort de Menou d’Aulnay, il se rend à Cap-Breton avec son frère Simon102. La Compagnie semble satisfaite de son service car elle l’appuie dans ses démarches quand il rencontre des difficultés. Elle saisit ainsi en sa faveur le Grand conseil le 19 mai 1650 pour obtenir le recouvrement de la somme de 2135 livres qui lui est due et qui a été contestée devant la prévôté de La Rochelle. Le Grand conseil tranche en faveur du receveur103. Denis rencontre de grandes difficultés au Canada. Il doit faire face aux prétentions de la veuve de Menou d’Aulnay, puis de son créancier principal, Emmanuel Le Borgne, un marchand rochelais. Il passe en France plaider sa cause auprès du roi qui lui donne raison, mais il n’obtient aucun dédommagement. Il acquiert à la fin de l’année 1653 des droits de la Compagnie de la Nouvelle-France sur la côte et les îles du golfe Saint-Laurent, et devient gouverneur et lieutenant général de ce territoire104.
38Après la dissolution de la Compagnie des îles de l’Amérique, Nicolas Denis garde des liens étroits avec les associés. Il fait une compagnie particulière pour la pêche et la traite avec Jacob et Abraham Duquesne à laquelle se joint le cousin du surintendant Nicolas Fouquet, Christophe Fouquet de Chalain, président du parlement de Rennes et gouverneur de Concarneau105. Il doit lutter pour protéger ses intérêts menacés en Acadie, ce qui nécessite l’intervention de Pierre Chanut, l’un des anciens associés de la Compagnie des îles, auprès de Fouquet de Chalain106.
Le cas malouin
39Si des bateaux de la Compagnie arrivent à Saint-Malo dans les années trente, nous n’avons pas trace d’un agent avant 1640. La délibération du 14 mai 1640 évoque plusieurs commis chargés de mettre la poudre sur une barque qui est prête à faire voile vers la Martinique107. Mais nous ne savons pas son nom. Il est possible que François La Rouvrais dit la Noé, qui reçoit un office de contrôleur général des droits de la Compagnie à la Martinique en 1639108 et qui est de Saint-Malo, ait assumé cette tâche un temps avant de partir aux îles, à moins que cela ait échu au receveur de Richelieu dans ce port109. Le receveur de Saint-Malo est peu évoqué dans les documents de la Compagnie. Heurtault apparaît nommément en 1642110. Il est peut-être apparenté à Paul Heurtault du Tertre, un célèbre capitaine corsaire malouin de la fin du xvie siècle111. Mais nous ne savons pas ce qui a pu aider à sa nomination.
Déceptions et désillusions
40La Compagnie s’inquiète régulièrement du faible investissement de ses agents dans les ports dans la gestion de ses affaires. Leurs multiples activités nuisent au suivi des opérations dont ils ont la charge. Ils se montrent parfois négligents par manque d’attention et de temps. Ils tiennent mal les comptes, et surtout ne se donnent pas beaucoup de peine pour vendre le pétun de la Compagnie à un prix avantageux. Berruyer souligne lors de la réunion du 2 janvier 1641 que Jean Tuffet n’a toujours pas vendu le pétun de La Rochelle et de Brouage et qu’il ne « se met pas beaucoup en peine de trouver un marchand ». Il propose son remplacement112. Il est peut-être trop occupé par ses activités pour le Canada. Mais il est aussi possible que Claude de Launay Razilly ait insisté pour placer son protégé, Nicolas Denis. Jean Tuffet se consacre alors à d’autres projets. Il s’intéresse avec son fils André à l’assèchement du marais poitevin113. À sa mort en 1642, il laisse ses affaires en mauvaise situation. Ses biens sont saisis par ses créanciers114. Mais Nicolas Denis ne satisfait pas toujours la Compagnie des îles qui l’accuse de vendre le pétun à des prix trop bas à son goût, autour de 34-35 livres, alors qu’elle en espère entre 47 et 50 livres pour le moins, et entre 49 et 50 livres au détail115.
41D’autres critiques visent plus clairement les compétences mêmes des receveurs. Au Havre, Robert Couette tient mal ses comptes. En 1642, quand Berruyer examine son exercice, il lui apparaît qu’il est redevable envers la Compagnie de 902 livres. Il adresse alors une procuration à de Thonnaux, lieutenant de l’amirauté du Havre, pour qu’il entame une procédure pour le recouvrement de la somme due. Thonnaux est accueilli assez froidement par le receveur. Couette et sa mère, assistée de leurs parents et amis, donnent assurance du versement d’une partie de la somme à hauteur de 500 livres. La mère de Couette qui s’était engagée en tant que caution en 1638, déclare ne pouvoir payer davantage et prie Thonnaux de défendre sa cause auprès de la Compagnie pour obtenir une remise sur la somme. Les associés se montrent compréhensifs et acceptent le 3 juin 1643 de remettre « à ladite veuve la somme de cent livres en payant comptant ès mains dudit sieur de Thonnaux la somme de cinq cents livres moyennant quoi, ledit Couette et sadite mère demeureront quittes de toutes choses généralement quelconques116 ». Le travail du receveur de Saint-Malo, Heurtault, n’est pas davantage digne d’éloges. Les habitants de Saint-Christophe se plaignent de la piètre qualité des marchandises qu’il a envoyées en 1642117. Il ne semble pas avoir subi de sanction de la part des associés, probablement car il satisfait aux besoins de la Compagnie, à savoir vendre à prix raisonnable le pétun qui arrive des îles.
42Les receveurs de la Compagnie dans les ports de France apparaissent finalement les agents les moins intéressés aux affaires de la Compagnie, hormis Cavelet du Herteley et Manichet. Ils se préoccupent davantage de leurs propres affaires. Le choix de s’adresser à des hommes déjà investis dans les affaires coloniales s’avère peu productif. Et si la Compagnie les garde à son service, c’est peut-être faute de trouver mieux.
Notes de bas de page
1 Trois navires sont à Port-Louis en partance pour Saint-Christophe en 1627 (AD 76, TH, reg. 183, Contrat d’engagement, le 13/01/1627. Pub. dans Anth, t. 2, p. 533).
2 Délibération, le 2/01/1641, p. 407.
3 Port-Louis servira de base d’armement à la Cie des Indes orientales du capitaine Rigault à partir de 1642 (L. Chaumeil, « Abrégé d’histoire de Lorient de la fondation (1666) à nos jours (1939) », Annales de Bretagne, 46-1-2, 1939, p. 66). Cette réaffectation a pu être suggérée par les associés de la Cie des îles de l’Amérique qui composent en partie celle des Indes orientales.
4 Voir le Mémoire de Nicolas Langlois de 1627, le Sommaire du voyage fait par le Sr. d’Infreville de 1631, le Mémoire du chevalier de Clerville de 1663. L’Inventaire général et description de tous les vaisseaux appartenants aux sujets du roi de 1664 permet de se faire une idée des flottes marchandes dans les ports.
5 L’augmentation de la population des villes portuaires dans un contexte démographique général assez sombre témoigne de cette attractivité. Rouen passe de 70000 à 75000 habitants entre 1600 et 1650, Nantes de 25000 à 35000, Saint-Malo de 11000 à 15000/25000. La population du Havre augmente sur le siècle passant de 4000 à 18000 habitantsen 1700. Dieppe en revanche décline et passe de 30000 habitants en 1600 à 20000 vers 1640. La Rochelle se remet difficilement du long conflit avec le roi. Signalons à titre de comparaison que les villes du royaume ne connaissent en moyenne qu’une progression annuelle de 1 % au cours du premier xviie siècle (C. Le Mao, Les villes portuaires maritimes dans la France moderne (xvie-xviiie siècle), Paris, Colin, 2015, p. 108 et 233-234).
6 Compte de la recette et despense faicte pour la citadelle et fortification du Havre de Grâce, durant les années 1637 et 1638, dans Richelieu/D, p. 543-546. Bergin note qu’il « semble avoir mieux réussi à en faire la place la plus forte de France qu’un centre commercial prospère » (J. Bergin, Pouvoir et fortune de Richelieu, op. cit., p. 88).
7 É. Delobette, « Les mutations du commerce du Havre (1680-1763) », Annales de Normandie, 53e année, n° 1, 2003, p. 30 et 35 ; J. Petitjean Roget, « Courant de migration et courant marchand », Annales des Antilles, n° 2, 1995, p. 33.
8 Délibération, le 5/01/1639, p. 348.
9 M. Vergé-Franceschi, Chronique maritime de la France, op. cit., p. 375. Cette visite occupe une place de choix dans les chroniques dieppoises du xviie siècle.
10 É.-H. Gosselin, Documents authentiques et inédits pour servir à l’histoire de la marine normande et du commerce rouennais pendant les XVIe et XVIIe siècles, Rouen, 1878, p. 18 ; G. Macbeath, « Du Gua de Monts, Pierre », Dictionnaire biographique du Canada, vol. 1, Université Laval/University of Toronto, 2003. [En ligne], URL : [http://www.biographi.ca/fr/bio/du_gua_de_monts_pierre_1F.html].
11 AD 44, 4E2, étude Mariot, 1462, n° 565, Contrat, le 9/12/1639, pas de n° de fol. ; G. Saupin, « Les marchands nantais et l’ouverture de la route antillaise », op. cit., p. 178 et 180-181.
12 C. Nieres, « La politique américaine des États de Bretagne du xvie siècle et dans la première moitié du xviie siècle », dans J.-P. Sanchez (dir.), Dans le sillage de Colomb, op. cit., p. 140-141. Les États de Bretagne n’abordent pas durant leurs débats la question des îles avant la seconde moitié du xviie siècle. Voir AD 35, C2705, Table de délibérations de 1567 à 1645.
13 Délibération, le 7/01/1637, p. 288 ; Délibération, le 2/06/1638, p. 330 ; Délibération, le 7/07/1638, p. 330.
14 DT/1667, t. 1, p. 239 et 392 ; Dupuis, p. 71 et 103 ; MSM, p. 195, 245 et 279. Suzanne Bouchereaux pense pour sa part que les trois carmes arrivent dans les îles en 1648 car Innocent de Saint-Julien est mort en 1650 après deux ans de travail missionnaire (S. Bouchereaux, La réforme des Carmes en France, op. cit., p. 416).
15 Du Parquet à Fouquet, Saint-Christophe, le 17/08/1639, dans DT/1667, t. 1, p. 111.
16 Délibération, le 1/04/1643, p. 449.
17 A. Lespagnol, La course malouine au temps de Louis XIV, Rennes, Éd. Apogée, 1995, p. 10-11.
18 Jean Briant et ses associés disposent d’un capital de 160000 livres (A. Ly, La Compagnie du Sénégal, op. cit., p. 67 ; G. Fournier, Hydrographie, op. cit., p. 352).
19 Délibération, le 3/06/1637, p. 293.
20 Délibération, le 13/09/1641, p. 418.
21 Les papiers des notaires Teuleron et Moreau attestent de ce trafic (G. Debien, Les engagés pour les Antilles, op. cit., p. 15-16).
22 M. Reible, « L’émigration coloniale en Angoumois sous Louis XIV et la question protestante », Mémoires de la société archéologique et historique de la Charente, 1958, p. 100 et 150.
23 G. Debien, « Engagés pour le Canada au xviie siècle vus de La Rochelle », RHAF, 6-2, 1952, p. 184.
24 Sommaire du voyage fait par le Sr. d’Infreville, Paris, le 23/03/1631, dans Sourdis/C, t. 3, p. 194.
25 C’est la date de la première mention d’un receveur de la Compagnie à Nantes (Délibération, le 2/09/1637, p. 306).
26 G. Saupin, « Les marchands nantais et l’ouverture de la route antillaise », op. cit., p. 173.
27 P. Bois (dir.), Histoire de Nantes, Toulouse, Privat, 1977, p. 123-124 et 132 ; O. Pétré-Grenouilleau (éd.), Nantes, Éditions Palantines, 2003, p. 64 et 69.
28 O. Pétré-Grenouilleau (éd.), Nantes, op. cit., p. 69 ; G. Saupin, « Les marchands nantais et l’ouverture de la route antillaise », op. cit., p. 175.
29 A. Lemenorel (dir.), Nouvelle histoire de la Normandie, Toulouse, Privat, 2004, p. 156.
30 Les membres de sa famille tiennent d’autres villes portuaires. Brezé tient Calais (et Saumur à l’intérieur), Pontchâteau et Brest, et La Meilleraye, Rouen. Le commandeur de La Porte a le gouvernement d’Angers (J. Bergin, Pouvoir et fortune de Richelieu, op. cit., p. 348).
31 Richelieu tient aussi en Normandie : Honfleur, Graville, Montvilliers et Harfleur (A. James, « Les arsenaux de marine en France avant Colbert », Dix-septième siècle, 253, 2011, p. 659).
32 J. Bergin, Pouvoir et fortune de Richelieu, op. cit., p. 88 ; M. Vergé-Franceschi, Chronique maritime de la France, op. cit., p. 319.
33 J. Bergin, Pouvoir et fortune de Richelieu, op. cit., p. 89-90.
34 ANOM, F2A13, Instruction de la Compagnie aux receveurs, Paris, le 7/3/1635, p. 91.
35 Délibération, le 2/07/1636, p. 276 ; ANOM, F2A13, Instruction pour le Sr. Gentil, Paris, le 3/09/1636, p. 110.
36 Délibération, le 2/03/1639, p. 352.
37 ANOM, F2A13, Instruction de la Compagnie aux receveurs, Paris, le 7/3/1635, p. 89-90.
38 Délibération, le 5/03/1636, p. 259 ; Délibération, le 5/09/1639, p. 374.
39 ANOM, F2A13, Instruction de la Compagnie aux receveurs, Paris, le 7/3/1635, p. 90.
40 Délibération, le 4/04/1635, p. 251.
41 Délibération, le 6/08/1636, p. 276 ; Délibération, le 5/05/1640, p. 396.
42 Délibération, le 7/05/1636, p. 269. Ce privilège est évoqué à l’article 13 du contrat de 1635 (ANOM, F2A13, Contrat du rétablissement de la Cie des îles de l’Amérique, Paris, le 12/02/1635, p. 5).
43 Sur le rôle des institutions et des recruteurs dans l’organisation de la colonisation, voir J.-P. Poussou, « Les chemins de la migration », dans Y. Landry, J. A. Dickinson, S. Paleau, C. Desama, Les chemins de la migration en Belgique et au Québec. xviie-xxe siècles, Beauport, publications MNH, 1995, p. 9-20.
44 Délibération, le 3/03/1638, p. 325.
45 Délibération, le 6/01/1645, p. 478 ; Délibération, le 18/10/1641.
46 Délibération, le 5/12/1635, p. 256 ; Délibération, le 4/03/1637, p. 291.
47 Délibération, le 1/12/1638, p. 347 ; Délibération, le 5/01/1639, p. 348.
48 Délibération, le 21/12/1638, p. 347 ; AD 76, TH, Caution par Anne Aubery, le 16/12/1638, dans Barrey, p. 119.
49 Délibération, le 1/04/1643, p. 448.
50 Fly est receveur à Calais vers 1630 (Sommaire du voyage fait par le Sr. d’Infreville, Paris, le 23/03/1631, dans Sourdis/C, t. 3, p. 184 et 195). Il détient un bail de ferme pour la Picardie en 1632 puis en 1636. Il remet ses comptes au secrétaire du cardinal, Le Masle (J. Bergin, Pouvoir et fortune de Richelieu, op. cit., p. 110-111).
51 Délibération, le 5/08/1637, p. 302 ; Délibération, le 7/10/1637, p. 310 ; Délibération, le 5/10/1639, p. 375.
52 Délibération, le 24/02/1642, p. 423.
53 Délibération, le 5/10/1639, p. 374. Sur le port de Salé, voir L. Maziane, Salé et ses corsaires (1666-1727), un port de course marocain au XVIIe siècle, PU de Caen/Publications des universités de Rouen et du Havre, 2007 ; L. Maziane, « Salé au xviie siècle, terre d’asile morisque sur le littoral Atlantique marocain », Cahiers de la Méditerranée, 79, 2009. [En ligne], URL : [http://cdlm.revues.org/index4941.htm].
54 M. Vergé-Franceschi, Chronique maritime de la France, op. cit., p. 336-337. Le commerce français vers Salé est surtout connu pour la fin du xviie siècle avec l’armement de bateaux à Saint-Malo. Un nouveau traité en 1682 entre Louis XIV et le sultan garantit la liberté de navigation et de trafic (H. Sée, L. Vignols, « Le commerce malouin au Maroc (fin du xviie siècle et début du xviiie) », Annales de Bretagne, 1925, 37-3-4, p. 366).
55 L. Maziane, Salé et ses corsaires, op. cit., p. 112.
56 Délibération, le 31/01/1635, p. 245.
57 Délibération, le 3/12/1636, p. 283.
58 Délibération, le 1/12/1638, p. 347 ; Délibération, le 5/01/1639, p. 348.
59 Délibération, le 24/02/1642, p. 423-424.
60 Délibération, le 7/03/1635, p. 249.
61 Alexis de Saint-LÔ, Relation du voyage du Cap-Verd, op. cit., p. 211 ; D. Asseline, Les antiquités et chroniques de la ville de Dieppe, op. cit., t. 2, p. 258. Le premier février 1650, il se rend avec huit députés de Dieppe auprès du roi Louis XIV à Rouen pour lui dire leur fidélité (ibid., p. 279).
62 Délibération, le 3/12/1636, p. 284. Il n’existe pas de commission à son nom dans le manuscrit de l’ANOM.
63 ANOM, F2A13, Procuration, Dieppe, le 14/04/1635, p. 30.
64 Délibération, le 3/12/1636, p. 284 ; Délibération, le 2/12/1637, p. 316 ; Délibération, le 1/12/1638, p. 347.
65 Délibération, le 2/06/1645, p. 491.
66 Délibération, le 16/12/1642, p. 438 ; Délibération, le 23/12/1642, p. 441.
67 Il est mentionné pour la première fois par les associés le 2 septembre 1637 (Délibération, le 2/09/1637, p. 306).
68 La communauté portugaise de Nantes compte 25 familles entre 1615 et 1650, soit une centaine d’individus dont certains ont obtenu la naturalisation, ce qui est loin de l’estimation donnée par J. Mathorez de plusieurs centaines de Portugais au début du xviie siècle (G. Saupin, « Un mouvement de xénophobie anti-portugaise à Nantes dans les années 1630 », dans J.-P. Poussou, R. Baudry, M.-Ch. Vignal-Souleyrou (éd.), Monarchies, noblesses et diplomaties européennes. Mélanges J.-F. Labourdette, Paris, PUPS, 2005, p. 51).
69 J. Mathorez, « Notes sur l’histoire de la colonie portugaise de Nantes », Bulletin hispanique, 15-3, 1913, p. 318-321.
70 Ibid., p. 326
71 Arch. municip. de Nantes, GG 184, Acte de baptême de Jacques Alvaro Vas Nogeira, le 18/10/1633, fol. 124. Isabelle Vas est la maraine de l’enfant.
72 Les Vas ou Vaz exercent à Nantes leur art dans de nombreux domaine : médecine, commerce, service du roi (J. Mathorez, « Notes sur l’histoire de la colonie portugaise de Nantes », op. cit., p. 327 et suiv.).
73 AD 44, B 4731, n° 15, pas de n° de fol. ; AD 44, B 4731, n° 80, le 15/04/1636, pas de n° de fol.
74 Délibération, le 2/02/1646, p. 500-501.
75 G. Saupin, « Les marchands nantais et l’ouverture de la route antillaise », op. cit., p. 179 ; J. Tanguy, « Les premiers engagés partis de Nantes… », op. cit., p. 69 et suiv.
76 Délibération, le 2/09/1637, p. 306.
77 J. Mathorez, « Notes sur l’histoire de la colonie portugaise de Nantes », op. cit., p. 332-334 ; O. Pétré-Grenouilleau (éd.), Nantes, op. cit., p. 69. Voir J. Éon, Le Commerce honorable, ou Considérations politiques, […] pour l’entretien du négoce de mer en France, Nantes, Guillaume Le Monnier, 1646. Il a peut-être écrit son ouvrage à la demande de Richelieu pour soutenir sa politique commerciale (J.-Y. Grenier, Histoire de la pensée économique et politique, op. cit., p. 114). La Contractation est une association ou une confrérie qui du début du xvie siècle à 1733 réunit des négociants, des courtiers et des capitaines de navires de Nantes et les membres de l’Universidad de mercaderes y maestres de navios de Bilbao (P. Jeulin, « Une page de l’histoire du commerce nantais du xvie siècle au début du xviiie siècle », Annales de Bretagne, 40-2, 1932, p. 286).
78 V. Gallais, « La plume et l’argent. César de Renouard, magistrat et financier nantais (1603-1675) », Annales de Bretagne et des Pays de l’Ouest, 111-1, 2004, p. 52 ; P. Jeulin, « Une page de l’histoire du commerce nantais… », op. cit., p. 475. Son fils, François Suhard le jeune, sera consul en 1651.
79 Généalogie de la famille de Rasilly, op. cit., p. 338.
80 AD 44, 4E2, 100, 466, Contrat, le 29/10/1639, cité par G. Saupin, « Les marchands nantais et l’ouverture de la route antillaise », op. cit., p. 176. Jean Burot (1610-1659) est consul de commerce en 1637-1638. Son père, Guillaume Burot, figure parmi les membres secondaires de la Contractation en 1601.
81 En 1646, il doit 340 livres à un habitant de Saint-Christophe pour du tabac (M. Tanguy, L’essor d’un port, op. cit., t. 2, p. 546-547).
82 Délibération, le 2/09/1637, p. 306.
83 Délibération, le 23/12/1642, p. 442.
84 Délibération, le 1/05/1641, p. 410.
85 Délibération, le 7/07/1641, p. 415.
86 Délibération, le 28/07/1641, p. 417 ; Délibération, le 24/02/1642, p. 423-424.
87 BnF, ms fr. 18593, Gorge à Berruyer, le 4/04/1645, citée dans Inventaire des pièces que produit le Sr. de Thoisy, fol. 394v.
88 AD 44, B 4731, n° 26, le 26/05/1635, pas de n° de fol.
89 Délibération, le 1/09/1638, p. 339.
90 R. Le Blant, « La Compagnie du Cap-Breton 1639-1647 », RHAF, 16-1, 1962, p. 85.
91 G. Debien, « Engagés pour le Canada », op. cit., p. 186 ; G. Carpin, Le réseau du Canada, op. cit., p. 234-235 ; R. Le Blant, « La Compagnie du Cap-Breton 1639-1647 », op. cit., p. 85. Voir en particulier AD 17, E, registres Teuleron.
92 M. Trudel, La seigneurie des Cent-Associés, op. cit., t. 1, p. 420. Sa part passe à sa mort en 1642 à son fils André.
93 Délibération, le 2/01/1641, p. 407.
94 J. Dawson, Le fondateur de la Hève. Isaac de Razilly (1587-1635), LaHave, Lunenburg County Historical Society, 1982, p. 3 et 5 ; B. Pothier, « Nicolas Denys : The Chronology and Historiography of an Acadian Hero », Acadiensis, p. 56. La société est dissoute en 1634 (ANF, MC, étude XVI, 68, Dissolution d’une société, le 11/01/1634, pas de n° de fol.). L’association avait été passée à Auray devant notaires.
95 N. Denys, Description géographique et historique des costes de l’Amérique septentrionale, Paris, Claude Barbin, 1672, t. 1, p. 101-103.
96 C.-J. d’Entremont, Nicolas Denys, sa vie et son œuvre, Yarmouth (Nouvelle-Écosse), imp. Lescarbot Lltée, 1982, p. 30-31.
97 G. Carpin, Le réseau du Canada, op. cit., p. 25.
98 C.-J. d’Entremont, Nicolas Denys, op. cit., p. 28 ; G. Debien, « Engagés pour le Canada », op. cit., p. 187 ; AN, MC, étude XC, 208, Contrat, le 25/04/1645, pas de n° de fol.
99 AN, MC, étude XC, 208, Procuration de N. Denis, La Rochelle, le 27/02/1645, pas de n° de fol. ; R. Le Blant, « La première compagnie de Miscou, 1635-1645 », op. cit., p. 366.
100 Délibération, le 1/12/1645, p. 496.
101 La dernière fois qu’il est mentionné par les associés, c’est le 2 février 1646 (Délibération, le 2/02/1646, p. 499).
102 G. Macbeath, « Denys, Nicolas », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 1, Université Laval/University of Toronto, 2003. [en ligne] [http://www.biographi.ca/fr/bio/denys_nicolas_1F.html].
103 AN, V5, 446, Arrêt du Grand conseil, Paris, le 24/05/1650, pas de n° de fol. Le litige est ancien puisqu’un premier arrêt de cette juridiction a été rendu en sa faveur le 5 janvier 1646.
104 G. Macbeath, « Denys, Nicolas », op. cit. Nicolas Denys est fait gouverneur d’Acadie par le roi (Com. pour N. Denys, dans Collection de manuscrits… relatifs à la Nouvelle-France, op. cit., vol. 1, p. 141-144). Il publie en 1672 une Histoire naturelle des peuples, des animaux, des arbres et plantes de l’Amérique septentrionale et de ses divers climats. Il meurt en 1688 à Nipisiguit lors d’un énième voyage au Canada.
105 C.-J. d’Entremont, Nicolas Denys, op. cit., p. 35-36 ; R. Baudry, « Quelques documents nouveaux sur Nicolas Denys », RHAF, 9-1, 1955, p. 18 ; B. Pothier, « Nicolas Denys : The Chronology and Historiography of an Acadian Hero », Acadiensis, p. 60.
106 N. Denis au président de Chaslin, vers 1657, dans C.-J. d’Entremont, Nicolas Denys, op. cit., p. 470 ; N. Denis au président de Chaslin, Paris le 2/06/1657, dans C.-J. d’Entremont, Nicolas Denys, op. cit., p. 479.
107 Délibération, le 14/05/1640, p. 398.
108 Délibération, le 6/04/1639, p. 356 ; ANOM, F2A13, Com. à La Rouvrais dit la Noé, Paris, le 6/04/1639, p. 146-147.
109 Le sieur de Longras s’occupe de la recette de Saint-Malo pour le cardinal (Sommaire du voyage fait par le Sr. d’Infreville, Paris, le 23/03/1631, dans Sourdis/C, t. 3, p. 187).
110 Délibération, le 24/02/1642, p. 423-424.
111 Il attaque en 1591 un navire de guerre (F. G. P. B. Manet, Biographie des Malouins célèbres nés depuis le 15e siècle jusqu’à nos jours, Saint-Malo, H. Rottier, 1824, p. 60).
112 Délibération, le 2/01/1641, p. 407.
113 Jean Tuffet n’en connaîtra pas le terme. C’est un concurrent, René Sochet de Gontry, qui finit par l’emporter dans ce projet (Y. Suire, « L’œuvre de dessèchement du marais poitevin », Dix-septième siècle, 2003/4, n° 221, p. 623).
114 R. Le Blant, « La Compagnie du Cap-Breton 1639-1647 », op. cit., p. 87. Il place sa mort avant le 22 mars 1642.
115 Délibération, le 23/12/1642, p. 440.
116 Délibération, le 3/06/1643, p. 455.
117 Délibération, le 3/04/1642, p. 425.
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