Chapitre 4. Le profil des associés de la Compagnie
p. 113-131
Texte intégral
1Les destinées de la Compagnie des îles de l’Amérique sont entre les mains d’un petit nombre d’actionnaires. Nous en connaissons 45 pour la période qui va de 1635 à 1648, et ils ne sont jamais plus d’une quinzaine à opérer en même temps. Ils font l’objet de portraits assez contrastés. Ils n’ont généralement pas une très bonne image dans les chroniques de leur temps. Ils sont souvent décrits comme incompétents ou âpres au gain, voire les deux. Ce jugement peu nuancé vise avant tout à les disqualifier. Il est toujours question « des associés », ce qui facilite toutes les généralisations. Mais, certains de leurs contemporains soulignent au contraire la qualité et le sérieux du travail qu’ils ont accompli. Mathias Dupuis célèbre les nobles desseins « de cet illustre corps des seigneurs de la Compagnie » et indique qu’« ils mirent sérieusement la main à l’œuvre et pourvurent en même temps à la conservation de la colonie française qui était à Saint-Christophe, et à l’établissement d’une nouvelle à la Guadeloupe ». Raymond Breton loue leurs « intentions […] de maintien de la paix avec les Sauvages1 ».
2Qui sont donc les actionnaires de la Compagnie des îles de l’Amérique ? Ils ont vraisemblablement des compétences qu’ils peuvent mettre à son service, et leur parcours professionnel peut nous éclairer sur la façon dont ils entendent la conduire. Quelques nuances sont certainement à apporter, car avec le temps, les associés changent. Certains décèdent, d’autres partent, de nouveaux arrivent. La physionomie de la Compagnie en est-elle affectée ? Quelle place les nouveaux arrivants prennent-ils ? Ont-ils un profil particulier ?
Les associés de 1635
La liste de 1635
3La réunion du 31 janvier 1635 permet d’établir une liste assez sûre des actionnaires de la Compagnie. Richelieu, François Fouquet, Guénégaud, les héritiers de Marion qui est décédé en 16282, Bardin, Martin de Maunoy, le commandeur de La Porte, de Launay Razilly, Cavelet du Herteley, Berruyer et Cauville assistent à l’assemblée ou se font représenter3. Charles de Pradines intervient au nom de Marie de Fourcy, la veuve du maréchal d’Effiat qui est décédé en 16324. Tous les associés ne sont pas là. Cornvel Morant, Ladvocat et de Flécelles ne se sont pas déplacés et n’ont pas donné de procuration. La Compagnie semble donc constituée à cette époque de quinze actionnaires. L’élargissement de l’actionnariat de la Compagnie s’avère modéré depuis 1626, qui est la seule date de référence pour laquelle nous bénéficions d’une autre liste. Pour une bonne part, les associés de 1635 sont les fondateurs de 1626, nous en retrouvons neuf : Richelieu, Guénégaud, Bardin, Martin de Maunoy, Cavelet du Herteley, Morant, Ladvocat, de Flécelles et Cauville, auxquels il faut ajouter les héritiers de Marion et de d’Effiat. Soit onze donc. Il y a donc continuité de l’actionnariat5.
4Force est de constater que le profil des associés a un peu changé depuis 1626. Les financiers de l’appareil d’État dominent toujours, ils sont six, mais leur part dans la Compagnie a diminué, elle n’est plus que de 40 %. Cela s’explique par le nombre plus important des actionnaires qui est passé de treize à quinze, et par l’âge encore tendre des héritiers des associés décédés qui sont sans profession. En effet, les parts de Marion et de d’Effiat sont revenues à leurs enfants mineurs sous l’autorité de leurs mères et tutrices. Ils figurent dans la catégorie « autres ».
Figure 7. Les milieux socio-professionnels des associés en 16356.

La physionomie de la Compagnie en 1635
5Les profils des associés sont désormais plus divers. La présence dans la Compagnie d’hommes issus des rangs de la marine royale est le trait le plus significatif à relever. Amador de La Porte est intendant général de la Marine7, Claude de Launay Razilly est chef d’escadre des vaisseaux du roi en Bretagne et vice-amiral en 1637 et Jacques Berruyer est capitaine des ports de Veulettes et Petites-Dalles-en-Caux8. Ils sont tous trois entrés dans la Compagnie avant sa reformation, mais nous ne savons pas exactement à quelle époque. Launay Razilly passe pour un expert en questions maritimes. Ses avis sont recherchés. Richelieu sollicite son avis. Il écrit ainsi en 1626 au chevalier de Razilly, son frère : « je serai bien aise que monsieur de Launay, votre frère, s’en revienne ici, ayant toujours besoin d’avoir auprès de moi quelqu’un qui m’instruise aux affaires de la mer9 ». Le cardinal le consulte notamment sur les questions de construction navale, d’achat de navires et d’aménagements portuaires10. Ils entretiennent une certaine amitié, et le cardinal s’inquiète de sa santé quand il est malade11. Amador de La Porte est l’oncle du cardinal. Il a sa confiance et reçoit en délégation le gouvernement de plusieurs places, dont par exemple celle du Havre. En 1631, il apparaît comme gouverneur de La Rochelle, Brouage, Ré et Oléron12. Il est commandeur de l’Ordre de Malte, grand prieur de Champagne puis en 1639 grand prieur de France13. La Porte et de Launay Razilly apportent une forme de caution à la Compagnie et un certain sérieux dans les affaires maritimes. Peut-être ont-ils été sollicités sur la faisabilité de certaines opérations.
Figure 8. Comparaison des milieux socio-professionnels des associés entre 1626 et 1635.

6La Porte et de Launay Razilly interviennent peu dans les assemblées. La Porte ne vient à aucune réunion. Il se fait représenter aux assemblées générales par Isaac Martin de Maunoy14. Launay Razilly est plus régulier. Il assiste aux assemblées générales et est assez souvent présent aux réunions mensuelles en 164015. Ils ne restent cependant pas dans la Compagnie. Amador de La Porte vend sa part en 163916. Launay Razilly s’investit de moins en moins avec le temps. En 1642, il cède une part à François Dalesse, seigneur d’Éragny17. Mais il demeure un associé. Il vient à quelques réunions en 164518. Il ne paraît plus par la suite. Leur rôle dans la vie de la Compagnie est cependant difficile à mesurer. La parenté du commandeur de La Porte avec le cardinal et son appartenance à l’Ordre de Malte sont des éléments fondamentaux à prendre en compte. Ils expliquent sa place et son influence dans les affaires de la Compagnie qui éclate véritablement avec la nomination de Philippe de Longvilliers de Poincy, autre membre éminent de l’Ordre, comme capitaine général de Saint-Christophe en 1638.
7Jacques Berruyer en revanche s’affirme, comme nous le verrons plus loin, comme l’un des éléments les plus dynamiques de la Compagnie. Il est de toutes les réunions (ou presque) et de toutes les négociations avec le pouvoir ou les partenaires de la Compagnie.
L’évolution de l’actionnariat de la Compagnie
La tendance générale
8L’actionnariat de la Compagnie connaît peu d’évolution entre 1635 et 1648. Le nombre d’associés demeure peu important malgré les tentatives d’élargissement de l’actionnariat voulu par les directeurs19. Il s’étoffe cependant un peu. Il passe d’une moyenne de 13 associés en 1626, à 15 en 1635 et à 17 voire 21 en 1645. Les données nous manquent pour les dernières années pour être plus précis. Les associés sont et ne demeurent qu’une poignée. Ils sont 45 sur l’ensemble de la période selon les délibérations et les contrats.
9Les associés ne remettent pas en cause leurs engagements envers la Compagnie. Seuls quatorze d’entre eux quittent la Compagnie après sa reformation, soit un taux de départ de 31,1 %. Sept départs sont du fait d’associés de plein exercice (Mallier du Houssay, Pradines, Cauville, Ferrier, Morant, Modica, Bardin). Trois autres sont le résultat de la vente des parts par les veuves alors que leurs enfants et héritiers sont encore mineurs, quelques années après avoir accepté la succession (la veuve de d’Effiat vend ses parts en 163520, et les veuves de Guénégaud et de Marion les leurs en 164321), et trois autres (Martin de Maunoy, du Chalard, Gaugnot) sont consécutifs au renoncement à l’héritage d’Isaac Martin de Maunoy en 1644 et 1645. Le dernier départ correspond à un transfert à un parent, Mulot cède sa part à son neveu de La Cour. Pierre Cavelet vend ses parts en 1640 et 164222. Nous relevons secondement vingt arrivées. Le solde est très largement positif, il y a plus d’entrants que de sortants, d’où une augmentation graduelle et légère du nombre des associés au fil des années.
Figure 9. Les entrées et les départs de la Compagnie.

10Les associés de 1626 se montrent fidèles à l’entreprise qu’ils ont fondée et seule la mort les empêchera de poursuivre l’aventure. Ainsi, sur les treize associés de 1626, quatre seulement quitteront la Compagnie au cours de son existence (30,7 %), six décèderont quand ils en sont membres (46,1 %) et deux (de Flécelles et Ladvocat) demeureront jusqu’en 1648 en son sein (15,3 %).
Les grands équilibres
11La Compagnie repose à partir de 1635 sur quatre grands groupes de personnes : les financiers, les commis de l’État, les maîtres des requêtes et les hommes de la marine royale. Ils représentent 27 des 35 profils professionnels connus, soit 77,1 % de l’ensemble. Cinq parts (Marion, d’Effiat, Dalesse, Richelieu, Guénégaud) sont détenues par des enfants, qui les ont eues par héritage, parfois en indivision, et cinq profils d’associés ne sont pas connus.
12Les équilibres entre les différents groupes d’appartenance sont établis dès 1635 et ne bougent ensuite qu’à la marge. Les financiers dominent toujours la Compagnie mais leur part s’amenuise avec le temps. Ils représentaient plus de 69 % des associés en 1626, ils ne sont plus que 40 % en 1635 et tombent encore un peu ensuite pour se situer autour de 30 %23. Cette place se stabilise donc autour d’un tiers. Certains groupes (maîtres des requêtes) se renforcent (un peu), d’autres (les conseillers des cours de parlement) font une apparition (timide). Cependant, les nouvelles arrivées ne signifient pas une rupture dans le recrutement des associés. En effet, des financiers comme le contrôleur général des sorties de Champagne et Picardie Sébastien Cazet et le trésorier de France Pierre Chanut entrent dans la Compagnie. Les proches de Richelieu qui ont disparu sont remplacés par d’autres comme Julius de Loynes et Étienne d’Aligre. Le pouvoir garde un œil sur la Compagnie.
Figure 10. Les milieux socio-professionnels des associés de la Compagnie (1635-1648)24.

13Si les compétences prêtées à certaines personnes ont favorisé leur entrée dans la Compagnie, les liens d’amitié et les opportunités sont à l’origine de bien d’autres. L’arrivée dans le capital de la Compagnie du chanoine de la Sainte-Chapelle et confesseur de Richelieu, Mulot, en est une illustration parfaite25. Certains associés n’agissent visiblement pas pour leur propre compte. Ils acquièrent des parts qu’ils cèdent peu de temps après au principal bénéficiaire, sans que l’on sache vraiment leur intérêt dans l’opération ou même ses raisons. Charles Fournier de Carles de Pradines représente les intérêts de la maréchale d’Effiat auprès de la Compagnie des îles de l’Amérique. Il est tuteur de ses enfants et administre ses biens et ses terres jusqu’en 163926. Il est présent à l’assemblée du 31 janvier 1635 et signe les articles de reformation de la Compagnie le 13 février 163527. Il acquiert la moitié de la part de d’Effiat le 20 février 1635. Il la revend quelques mois plus tard à François Fouquet pour mille livres28. La maréchale n’entendait peut-être pas céder sa part à Fouquet, d’où cet arrangement. Le marchand rochelais Jacques Loyau sert de prête-nom dans la cession des parts d’Amador de La Porte à Amador de Modica en 1639, ce qui entraîne d’ailleurs une certaine confusion car les directeurs ne savent pas qui, de Loyau ou de Modica, ils doivent considérer comme associé de la Compagnie. Loyau, sommé de s’expliquer, « reconnaît n’avoir accepté ledit transport qu’à la prière et au profit du sieur Amador de Modica, […] auquel il déclare que lesdites deux parts appartiennent ». La question ne sera tranchée que plusieurs années plus tard par un nouvel acte notarié établi par le notaire Chesneau à La Rochelle, le 2 décembre 1641 qui éclaircit la situation29. Modica est finalement « admis et reçu en la Compagnie à la charge d’entretenir les articles de société et délibération de ladite Compagnie » le 24 février 164230.
François Fouquet et la redistribution des parts
14L’arrivée de nouveaux actionnaires dans la Compagnie est savamment orchestrée par François Fouquet au début de l’année 1635, parallèlement à la reformation de la Compagnie. Il façonne et accentue sa nouvelle physionomie. Au mois de février 1635, il achète les parts de Claude Cornuel31, et de la veuve du maréchal d’Effiat32 puis, quelques semaines plus tard, celle de Claude Mallier du Houssay33. Il les revend presque aussitôt. Le 5 décembre 1635, il avise la Compagnie de sa volonté de céder une part à Jean Rozée. La vente se réalise le 25 janvier 163634. Il vend une part à Pierre Chanut le 1er juin 163835. Il cède une part à Jacob Bontemps en décembre 163836. Il vend enfin une part à de Ricouart en 164037. Mais comment François Fouquet a-t-il choisi les entrants ? Les cas de Jean Rozée et de Jacob Bontemps apportent quelques enseignements.
15Jean Rozée est l’un des plus gros marchands de la place de Rouen et figure dans de nombreuses affaires commerciales. En 1624, il fonde avec des marchands rouennais et dieppois, une compagnie de commerce, la Société du Sénégal et du Cap-Vert. Ils envoient des bateaux au Sénégal en 1626. Ils sont à l’origine de l’établissement de Saint-Louis38. Rozée obtient de Richelieu le 24 juin 1633 le monopole du commerce du Sénégal et de Gambie pour dix ans. Il se livre ainsi au commerce des esclaves39. Les capucins de Normandie Alexis de Saint-Lô et Bernardin de Renoüard partent à bord de l’un des navires de la Compagnie commandé par Émery de Caen à destination du Cap-Vert au mois d’octobre 1635. Ils écrivent à leur retour l’histoire de cette expédition qui est imprimée à Rouen en 1637 où ils adressent tout spécialement leurs remerciements à « monsieur de Lozen, monsieur Rozée et monsieur le conseiller Caron40 ». Rozée est aussi à l’origine de la Compagnie du Cap du Nord qui a le privilège commercial pour les Guyanes entre l’Orénoque et l’Amazone en 1633. Une première expédition est organisée en 1637 pour occuper le site de Cayenne41. L’activité de Rozée ne connaît pas de limites géographiques. Ses origines demeurent incertaines. Il est présenté dans les délibérations comme un marchand de Rouen, puis plus loin, comme un Hollandais. Deux hypothèses sont alors à considérer. Soit il s’agit d’un protestant venu de Hollande comme de nombreux coreligionnaires et resté en contact avec la communauté protestante de Rouen qui demeure importante, comme dans toute la Normandie, dans le première moitié du xviie siècle, soit il s’agit d’un marrane portugais établi en Hollande. En 1629, le parlement de Rouen se plaint des nouveaux chrétiens portugais qui, après avoir passés par Londres et Amsterdam, professent ouvertement le judaïsme, et s’oppose aux lettres de naturalisation accordées par le pouvoir42.
Figure 11. Les parts achetées et revendues par les Fouquet père et fils.

16Jacob Bontemps est capitaine ordinaire de la Marine. Il est originaire du Havre mais est établi à Dieppe43. C’est un marin et un marchand. Il est l’un des rares associés – avec Charles Houël – à se rendre dans les îles. En 1645, il transporte à bord d’un de ses navires le nouveau lieutenant des îles pour le roi, Patrocle de Thoisy44.
17La présence de ces marchands dans la Compagnie participe à la diversification du profil des associés et illustre la réorientation de la Compagnie vers des acteurs plus au fait des choses du commerce. Elle recherche des avis éclairés pour faciliter la prise de décision. Il convient peut-être de modérer cette participation. En effet, Bontemps n’assiste qu’une seule fois à une réunion, le 19 février 164045. Rozée sera lui directeur de la Compagnie des îles de l’Amérique de 1639 à 164146, mais il se fera plus discret par la suite. Les deux hommes sont en revanche d’indéniables relais dans les ports pour favoriser les affaires de la Compagnie. L’avis de Bontemps est sollicité en 1646 pour connaître l’aide à apporter à la Guadeloupe47. Rozée participe à l’affrètement de bateaux de la Compagnie. Il sert de banquier en avançant de l’argent pour mener certaines opérations. Il emprunte 12000 livres le 23 août 1646 en son nom pour six mois48.
18François Fouquet se constitue-t-il ainsi une clientèle ou renforce-t-il son réseau d’affaire ? Joue-t-il sa propre partition ou exécute-t-il des ordres de Richelieu ? La monarchie espère pouvoir entraîner dans cette aventure des gens de condition en déclarant que les prélats, les ecclésiastiques, les seigneurs et les gentilshommes, et les officiers du conseil ou des cours qui participeront à la Compagnie « ne diminueront en rien de ce qui est de leur noblesse, qualités, privilèges et immunités49 ». Il est difficile de savoir pour le compte de qui Fouquet agit. Les compétences des nouveaux entrants en matière de commerce ne sont peut-être pas les seuls critères qui ont été retenus et qui ont joué en leur faveur, même si elles sont recherchées, car il apparaît qu’ils appartiennent à des cercles très actifs dans le domaine colonial proches du pouvoir. Nous pouvons observer de nombreuses connexions entre les associés de la Compagnie des îles de l’Amérique qui laissent supposer l’existence de réseaux.
Les liens entre les hommes
19Les associés ont de nombreuses choses en commun. Ils appartiennent au même milieu placé sous le signe de la finance et de l’office, et sont proches du pouvoir, ce sont des fidèles de Richelieu et pour certains ensuite, de Mazarin. Ils entretiennent des relations étroites qui les font participer à un même groupe, partager les mêmes intérêts et s’intéresser aux mêmes affaires.
Des intimes
20La Compagnie est pour les associés un patrimoine qu’il faut défendre et transmettre. Ils entendent pour cela premièrement, garder leurs parts afin de faire fructifier leur investissement et secondement, s’assurer de la bonne intelligence des nouveaux associés en privilégiant les membres de leur famille. Les pères favorisent leurs fils. Guénégaud fait ainsi entrer dans la Compagnie son fils du Plessis, François Fouquet, son fils Nicolas, Cavelet du Herteley, son fils Pierre Cavelet. Le sieur de La Cour, conseiller du roi et commissaire des guerres, reçoit par contrat la part de son oncle, Mulot50. Il s’agit d’une donation qui laisse à Mulot « la jouissance des fruits et profits ». Le 26 septembre 1643, Mulot renonce à l’usufruit de « tous et uns chacuns lesdits profits échus avant ladite donation et qui échuront ci après », et la Compagnie peut accueillir de La Cour en son sein51. Mulot a déjà favorisé un sien parent, son neveu Louis Mulot, pour occuper une charge dans les îles pour la Compagnie52. Il avance aussi de l’argent à son domestique, Pierre Soussy, qui veut passer à Saint-Christophe pour y faire du coton en 163553. Nicolas Fouquet vend une part dans la Compagnie à son cousin Pierre Daniau, écuyer, seigneur et châtelain de Saint-Gilles La Cove le 13 mars 164354. Les mariages apportent leur lot de nouveaux associés. En 1642, Jacques Berruyer fait acheter les parts de Launay Razilly par son gendre, François II Dalesse, sieur d’Éragny55. À la mort de Dalesse en 1645, sa veuve accepte « la continuation de la société tant en son nom que comme tutrice et ayant la garde noble de leurs enfants et nomme Jacques Berruyer pour assister pour eux aux assemblées56 ». Charles Houël intervient en faveur de son beau-frère Jean de Boisseret57. En 1645, Jean Bardin cède ses parts à son gendre Henri de Creil58. Pierre Chanut appuie l’octroi de la charge d’intendant général dans la Compagnie à son beau-père Leumont59. Les alliances matrimoniales occupent ainsi une grande place dans la constitution et dans l’affirmation du groupe des associés. Nous pouvons encore relever que le neveu du commandeur de La Porte, Charles II de La Porte, duc de la Meilleraye, épouse en 1630 la fille du maréchal d’Effiat, Marie Ruzé60. Le maréchal d’Effiat est de son côté témoin du mariage de Nicolas Ladvocat61. Ces unions se poursuivent sur les générations suivantes. Ainsi, la petite-fille de Thomas Morant, Marie-Anne Olivier de Leuville, épouse-t-elle Antoine Ruzé, marquis d’Effiat62. La Compagnie est bien une affaire de famille.
21Ces pratiques ne sont pas totalement originales. L’homogamie est une caractéristique des groupes dominants de la société d’Ancien Régime. La participation des fils et des frères, voire des parents plus éloignés, aux affaires est générale dans le monde des financiers au xviie siècle. Les unions matrimoniales favorisent les associations et la convergence de leurs intérêts63. Mais dans le cas qui nous occupe, elles ne visent pas seulement à assurer la reproduction des élites et à affirmer l’appartenance à une catégorie sociale, mais aussi à consolider le capital de la société et à conforter leur place dans celle-ci.
22Les relations étroites entretenues par les associés, assorties d’une bonne dose de confiance, conduisent à des échanges de services et à des participations dans des affaires privées. François Fouquet loue par exemple à Jean Bardin Le Royer sa maison de la rue de Jouy pour six ans en 163964. De l’argent circule. Nicolas Fouquet dépose chez Pierre Chanut 100000 écus65. Il emprunte aussi de l’argent à Ladvocat, son cousin par alliance, en mettant en gage la fortune de sa femme66. Fouquet lui signe une promesse pour un montant de 150000 livres en 1661, dans le cadre visiblement d’une affaire assez complexe67. Nicolas Ladvocat achète au maréchal d’Effiat des offices, notamment un office de greffier, le 10 mars 163268. Le fils du maréchal d’Effiat, Henri de Cinq-Mars, emprunte à Guénégaud la somme de 10000 écus69. Jean de Boisseret négocie, lui, avec Pierre Chanut le 15 août 1637, la cession pour 8 820 livres tournois d’une tierce partie des indivis « de tous et chacuns des héritages en nature de court et plant, plusieurs maisons dessus étant, labeur, herbage, pâturage et prés situés ès paroisses de Pennedepie et Saint-Gatien », près de Honfleur qu’il détient avec Marie Le Prévost, veuve de Louis Houël, parent de Charles Houël70. Jean Rozée est en relation d’affaires avec Jacob Bontemps. Il lui cède en 1638 ses droits sur la Guyane71.
La connexion canadienne
23L’un des traits originaux des associés entrés dans la Compagnie des îles de l’Amérique après 1635 est leur implication dans les affaires canadiennes. Ils sont tous de près ou de loin liés aux compagnies de colonisation d’Amérique du Nord. Ils s’y sont rencontrés et connus en leur sein. Ils appartiennent généralement à la Compagnie de la Nouvelle-France ou des Cents-Associés. Il existe bien quelques incertitudes sur le moment auquel ils ont rejoint cette compagnie, mais ce sont pour la plupart des associés de la première heure72. Jean de Lauson, sieur de Lirec, est à ce titre assez emblématique. Il a la confiance du cardinal de Richelieu qui lui confie l’intendance des affaires de Nouvelle-France en 1627. Les associés de la Compagnie de la Nouvelle-France se réunissent chez lui à Paris pour décider de l’orientation de la conduite de leur entreprise73. Lauson tient régulièrement le cardinal au courant des affaires. Il lui livre aussi ses remarques à propos du peu de souci des échevins et marchands de Rouen pour les questions de législation commerciale74. Il acquiert une part dans la Compagnie des îles de l’Amérique en 1636. Il devient un an plus tard un des associés de la Compagnie de la Nouvelle-France75. La part des associés de la Compagnie des îles ayant des intérêts dans la Compagnie de la Nouvelle-France n’est pas nouvelle, d’Effiat et Richelieu étaient déjà impliqués, mais elle augmente fortement jusqu’à représenter un tiers des associés connus entre 1635 et 1648 (en fait 14 sur 45).
Tableau 4. Les participations des associés dans les compagnies pour le Canada.

24La Compagnie de la Nouvelle-France fournit aussi à la Compagnie des îles après 1635 des administrateurs, des capitaines de navires et même des notaires pour rédiger ses contrats. Ainsi René de Béthoulat, sieur de La Grange Fromenteau, associé de la Compagnie de la Nouvelle-France en 1629 devient-il lieutenant général de l’île de Saint-Christophe en 1638. Le notaire parisien Martin Haguenier, lui aussi l’un des associés du Canada, gère quelques contrats pour le compte de la Compagnie des îles de l’Amérique76. Le secrétaire Jean de Beauvais a des parts dans la Compagnie de la Nouvelle-France77. Plusieurs associés participent également à des compagnies particulières canadiennes chargées de mettre en valeur un territoire particulier. Ils forment la Compagnie de Miscou qui a reçu de la Compagnie de la Nouvelle-France une concession pour la traite des pelleteries dans le Saint-Laurent78. Antoine Cheffault, François Fouquet, Jean de Lauson, Jacques Berruyer et Jean Rozée sont parmi les associés de la Compagnie de Beaupré organisée le 1er mars 163679. Claude de Launay Razilly a fondé une compagnie de pêche en Acadie avec Nicolas Denis et un certain Bazille, puis la Compagnie Razilly-Condonnier avec le parisien Jean Condonnier pour la mise en valeur de l’Acadie. Ils couvrent d’autres intérêts car le premier intervient au nom de son frère, Isaac de Razilly, et le second au nom de Philippe de Longvilliers de Poincy, tous deux membres de l’Ordre de Malte80.
25L’entrée dans la Compagnie des îles de l’Amérique favorisée, par Fouquet et Richelieu, de ces hommes connaissant les affaires canadiennes vise certainement à la dynamiser. Ils ont acquis une certaine expérience dans le commerce et dans la conduite de la colonisation au Canada qui est recherchée. Leur savoir-faire peut aider au développement des Antilles. Par ailleurs, ces hommes se connaissent. Ils se sont côtoyés. Ils savent jusqu’où ils peuvent se faire confiance. Leur entrée dans la Compagnie des îles de l’Amérique témoigne aussi d’un certain intérêt pour les Antilles. L’affaire leur semble assurément prometteuse, ils ne s’y seraient pas risqués sinon. Les compagnies canadiennes et antillaises apparaissent ainsi intimement liées. La Compagnie de la Nouvelle-France figure-t-elle pour autant un modèle dont il faut s’inspirer ? La question demeure entière. Nous y reviendrons.
26Les associés de la Compagnie des îles se retrouvent dans de nombreuses autres compagnies et poursuivent leurs collaborations après la vente des îles et la fin de celle-ci. Nicolas Fouquet, Berruyer, de Loynes, d’Aligre, de Creil et Cazet participent ainsi à la Compagnie des Indes orientales fondée par le capitaine Rigault le 30 janvier 164281. En 1652, ce dernier obtient du duc de Vendôme le renouvellement du privilège, espérant entraîner avec lui les acteurs de l’ancienne compagnie82. Mais l’entente entre les associés ne dure pas. Cela provoque une scission qui nécessite un arbitrage royal et conduit à la fondation d’une nouvelle compagnie, la Compagnie de Madagascar en 165683. Il est vrai aussi qu’entre-temps, les spécialistes des affaires coloniales et maritimes, Berruyer et Loynes, sont décédés. Quant à de Creil et d’Aligre, ils ne veulent pas prendre part à la nouvelle compagnie. Plusieurs anciens de la Compagnie des îles (la duchesse d’Aiguillon, Chanut, du Plessis, Guénégaud) entrent dans la Compagnie de la Chine en 1660. Les familles d’Aligre, Guénégaud et Ladvocat prennent des participations dans la Compagnie des Indes orientales voulue par Colbert en 166484. Le monde des compagnies est finalement un cercle assez étroit. Le capital a tendance à se concentrer entre les mains de quelques-uns. Il est difficile pour autant d’établir si tous ces hommes forment réellement un groupe de pression structuré et influent qui puisse exiger du pouvoir des privilèges et des concessions extraordinaires.
27Si la Compagnie des îles de l’Amérique a pu s’enrichir de l’expérience de celle de la Nouvelle-France d’une manière ou d’une autre, il semble qu’elle a à son tour donné une impulsion à d’autres compagnies. Au xixe siècle, Arthur Malotet, le biographe d’Étienne de Flacourt, l’un des principaux acteurs de la colonisation de Madagascar, évoque très clairement l’exemple qu’elle a donné aux autres compagnies85. Mais quelle est la nature de cette filiation ? Nous pouvons relever que les statuts de la Compagnie de Madagascar s’inspirent largement de ceux de la Compagnie des îles de l’Amérique. Il est ainsi stipulé à l’article i : « Il plaira au roi de faire don à ladite nouvelle compagnie, par lettres patentes vérifiées où besoin sera, du fonds et propriété de l’île de Madagascar dite Saint-Laurens, autres îles et côtes adjacentes, avec pareils droits, pouvoirs et privilèges que Sa Majesté a ci-devant accordés à la Compagnie des îles de l’Amérique, pour Saint-Christophe et autres îles par son édit… [c’est nous qui soulignons]86 ». Les concessions de la monarchie sont de fait assez semblables à celles accordées aux autres compagnies à la même époque. Il est plus intéressant de noter que la structure de la Compagnie de Madagascar repose sur les mêmes éléments structurels que la Compagnie des îles de l’Amérique : une assemblée générale annuelle (article xiii), des réunions hebdomadaires (et non pas mensuelles) à jour fixe au domicile d’un des directeurs (article xvi), quatre directeurs élus pour quatre ans et renouvelables par moitié tous les deux ans (article xiv) et un responsable de la recette de la Compagnie (article xv). La transmission des parts fait l’objet de plusieurs articles dans les mêmes termes que dans le règlement de la Compagnie des îles de l’Amérique (articles xxiii et xxiv)87.
28Le fait que les mêmes personnes participent aux différentes compagnies a pu contribuer à la diffusion d’un modèle de fonctionnement. Ainsi, la Compagnie de la Nouvelle-France aurait influencé le fonctionnement de la Compagnie des îles de l’Amérique qui, aurait servi à son tour de modèle à la Compagnie de Madagascar.
Le cercle des dévots
29Les liens familiaux et les relations d’affaires n’expliquent pas à elles seules la constitution de l’actionnariat de la Compagnie. La religion tient aussi une place importante. Plusieurs associés se distinguent en effet par une grande piété et sont très actifs dans le mouvement de la Contre-Réforme catholique. Jean Bardin-Royer, Thomas Morant, Henri de Creil, François Fouquet, Pierre Chanut montrent un profond attachement aux choses de la foi. Ils effectuent des fondations. Jean Bardin fait une première fondation au noviciat de Paris des jésuites dont il est proche en 1634. Il se retire à Poitiers quelques années avant sa mort. Poussé par son confesseur, il fait une nouvelle fondation de 2000 livres de rente sur les aides et les gabelles le 10 novembre 1639 pour l’entretien de deux professeurs de théologie au collège de Poitiers que le général de l’ordre accepte par le décret du 19 juin 1640. Mais la faculté n’entend pas ouvrir ses portes aux jésuites. Et le roi Louis XIII doit intervenir en personne au mois de janvier 1642 pour demander l’intégration des deux professeurs par lettres patentes88. Thomas Morant fonde pour sa part sur ses terres du Mesnil-Garnier en Normandie un couvent de dominicains réformés en 1620. Il accorde aux frères prêcheurs par contrat le 1er avril 1620, 1 500 livres de rentes et d’entretien, à savoir 900 livres en fond de terre et 600 livres à prendre sur les gages du présidial de Caen. Il ajoute bientôt 200 livres pour les luminaires et le chauffage. Le 7 mars 1625, il leur promet 300 livres supplémentaires89. Il fait en 1620 une fondation en faveur du collège jésuite de Mont à Caen. Il vend aussi plusieurs maisons aux jésuites à Paris en 162990. L’un des derniers associés entrés dans la Compagnie, Henri de Creil, fonde lui de nombreuses années plus tard la chapelle des Grands-Carmes à Paris en 167991. Il participe au même mouvement d’affirmation religieuse et de réussite sociale.
30Un réseau influent semble se profiler derrière tous ces hommes, avec des ramifications éminemment complexes, c’est celui de la Compagnie du Saint-Sacrement. Cette dernière est fondée en 1630 par Henri de Lévis, duc de Ventadour, pour poursuivre les buts de la Contre-Réforme92. Elle est fortement hiérarchisée, la Compagnie parisienne commande aux autres compagnies en province. C’est une société secrète, aussi est-il difficile d’en connaître tous les membres malgré les travaux d’Alain Talon. Plusieurs d’associés fréquentent assidûment des membres bien connus de la Compagnie du Saint-Sacrement. Le maréchal d’Effiat connaît les Lévis-Ventadour. Sa veuve est en affaire avec Charles de Lévis en 163593. La proximité du monde de la robe et du milieu dévot est une des caractéristiques de l’époque94. Il existe une certaine porosité entre ces différents groupes, mais les associés sont-ils pour autant des confrères ? Les attentions particulières et les préoccupations communes ne sauraient suffire à affirmer l’appartenance de certains associés à la Compagnie du Saint-Sacrement. Attardons-nous aux cas de François Fouquet et Pierre Chanut. Ce sont deux hommes bien connus pour leur ancrage dévot.
31François Fouquet et sa femme Marie de Maupéou soutiennent les œuvres de Pierre de Bérulle, de saint François de Sales et de saint Vincent de Paul. Toutes leurs filles se sont faites religieuses. Elisabeth rejoint sa tante, Marguerite de Maupeou, à l’abbaye cistercienne du Parc-aux-Dames près de Crépy-en-Valois. François Fouquet verse de nombreux dons aux œuvres des chartreux, des oratoriens, et des visitandines. Il est un soutien indéfectible des jésuites95. Il s’occupe des questions ecclésiastiques au sein du conseil des affaires du cardinal et de la gestion des bénéfices96 aux côtés des hommes d’Église, Isaac Habert, futur évêque de Vabres, Claude Morel, Antoine Froissard et Claude Bruillard, abbé de Coursan97. Si rien ne démontre que François Fouquet ait été un confrère, la proximité de ses enfants avec la Compagnie du Saint-Sacrement permet d’envisager cette hypothèse, qui n’en devient que plus vraisemblable98. Madeleine Élisabeth de Maupéou fréquente en effet plusieurs confrères, dont le père Suffren, l’un des fondateurs de la Compagnie du Saint-Sacrement, et Jean Eudes. Un de ses parents, Arnould de Saint-Amant, archidiacre d’Agde participe à l’établissement de la Compagnie à Montpellier99. Nicolas Fouquet a peut-être aussi été un confrère. S’il n’a pas été de la Compagnie, il en connaît les membres et sait s’appuyer sur eux100.
32Pierre Chanut est aussi un homme versé dans la religion. Il est en relation avec Bérulle. Il s’adonne aux exercices spirituels des jésuites101. Il connaît le diplomate Claude de Mesmes, comte d’Avaux, un membre éminent de la Compagnie du Saint-Sacrement avec qui il partage une même sensibilité religieuse102. Claude de Mesmes est attaché au rayonnement du catholicisme et s’implique dans le développement des missions à l’étranger et notamment au Canada103. Ils participent aussi au même univers professionnel en cette époque troublée de la fin de la Guerre de Trente ans en suivant les négociations de paix. Claude de Mesmes est à Münster en 1645104. Pierre Chanut reçoit à la même époque le poste d’ambassadeur en Suède, un des principaux protagonistes du conflit. Les deux hommes échangent ainsi de nombreuses lettres et se promettent de se rencontrer lors des pourparlers de paix105. Mais Pierre Chanut est-il pour autant un membre de la Compagnie du Saint-Sacrement comme certains le prétendent106 ?
33Ainsi donc, François Fouquet et Pierre Chanut apparaissent sinon comme des confrères, du moins comme des relais de la Compagnie du Saint-Sacrement. Leur forte implication dans la Compagnie des îles de l’Amérique peut laisser entrevoir une forte influence des idéaux de celle-là dans la conduite de celle-ci.
Un homme de tous les réseaux : Pierre Chanut
34Pierre Chanut par sa participation aux différents cercles d’influence et réseaux incarne à lui seul le système de la Compagnie des îles de l’Amérique. Premièrement, Il est un homme appartenant au milieu dévot. Deuxièmement, il a une expérience certaine des affaires commerciales et financières. Il vient du milieu du négoce de province. Son père faisait le commerce des toiles vers l’Espagne107. Certes, Pierre Chanut ne reprend pas l’affaire familiale, mais il n’en demeure pas moins initié aux mécanismes marchands. Il investit dans les compagnies de commerce. Le 21 janvier 1637, il entre dans la Compagnie de la Nouvelle-France. Il possède des parts aussi dans un navire qui va vers les Antilles, le Saint-Louis108. Il acquiert une part dans la Compagnie des îles de l’Amérique en 1638109. Chanut appartient au monde des financiers. Il achète en 1623 la charge de trésorier de France et de conseiller du roi en la généralité de Riom110. Troisièmement, il a le sens du service de l’État. Il poursuit son ascension sociale dans l’ombre du cardinal de Richelieu. C’est un fidèle. En 1641, il entre au conseil du roi pour s’occuper des affaires diplomatiques111. Il est chargé d’ambassades en Suède et aux Provinces-Unies112. L’homme est précieux. Le comte Louis-Henri de Brienne, le fils du secrétaire d’État, qui le rencontre à La Haye alors qu’il fait son tour d’Europe, souligne ses qualités : « on ne sait laquelle on doit plus admirer en lui, de la probité des mœurs ou de l’érudition singulière, de l’habileté qu’il s’est acquise par une suite d’emplois honorables qui lui ont tous réussi, dans le mouvement des affaires et des plus importantes négociations113 ».
35Pierre Chanut entretient d’étroites relations avec plusieurs associés. Il est très lié aux Fouquet. Il travaille avec Nicolas Fouquet à un projet sur les finances du royaume qu’il doit interrompre quand il est nommé ambassadeur en Suède114. Ce dernier le fait entrer en 1661 dans le conseil de commerce qu’il vient de créer à la demande du roi où il rejoint Colbert, d’Aligre et Olivier III Lefèvre d’Ormesson115. Il écrit à son propos qu’il est « très capable et très fidèle ». Il lui donne une place de choix dans le plan de Saint-Mandé qu’il élabore en 1657 quand il se sent menacé par Mazarin116. Chanut connaît bien les affaires de Fouquet et s’en entretient d’ailleurs fort imprudemment avec Jean-Baptiste Colbert en 1661. Il fourbit, malgré lui, les armes qui seront utilisées plus tard contre le surintendant117. Chanut demeure cependant un de ses soutiens dans l’adversité, même s’il se range dans le camp du roi. Il lui témoigne de l’attention118. Nicolas Fouquet souligne leur grande amitié119. Ces relations se placent tout autant sur le terrain public que sur le terrain privé.
36Chanut manifeste un très grand souci pour les affaires de la Compagnie des îles de l’Amérique. Il en est à plusieurs reprises le directeur. On peut penser que son implication de plus en plus grande dans les affaires diplomatiques puis l’annonce de son départ pour la Suède sont à l’origine de la vente de sa part dans la Compagnie. Mais il demeure fortement attentif à ses évolutions et suit de près les affaires des Antilles. Il garde une certaine influence auprès des associés. En 1659, il tente ainsi de ramener à la raison Charles Houël qui est en conflit avec sa sœur, madame de Boisseret, avec qui il partage par moitié la propriété et seigneurie de la Guadeloupe depuis la vente de l’île par la Compagnie. Il le conjure « d’y apporter la sagesse, la justice et la modération, sans lesquelles il est impossible que cette affaire se démêle heureusement ». Un partage de l’île est finalement décidé en 1659120. Cependant, il est rapidement contesté. Chanut doit être de ceux qui interviennent alors auprès du roi pour qu’il oblige Houël « à vivre en paix avec ses neveux121 ». Il participe ensuite à Paris à la commission arbitrale qui, le 18 octobre 1660, s’efforce de faire respecter le partage122. Il intervient encore en 1661 pour faire rappeler en France le gouverneur du Parquet qui s’oppose aux projets de Nicolas Fouquet d’extension de son domaine de Trois-Rivières à la Martinique, sans y parvenir123.
Notes de bas de page
1 Dupuis, p. 2-3 ; Bret/RF, p. 90-91. Breton apparaît ainsi comme un relais insigne de son autorité à la Guadeloupe face au gouverneur L’Olive.
2 Moreri, t. 7, 1759, p. 258 ; ACB/D, t. 9, 1775, p. 549.
3 Délibération, le 31/01/1635, p. 243.
4 Moreri, t. 3, 1759, p. 796.
5 Cornvel est un cas particulier dans la mesure où il quitte la Compagnie avant sa reformation. Il n’entre pas dans ce calcul.
6 Nous avons arrondi les pourcentages pour en avoir une lecture plus facile.
7 États statistiques de la marine de France 1631-1639, dans Sourdis/C, t. 3, p. 365.
8 ANOM, F2A13, Contrat du rétablissement de la Cie des îles de l’Amérique, Paris, le 12/02/1635, p. 1.
9 Richelieu à Razilly, Paris, le 1/12/1626, dans Richelieu/L, t. 2, p. 295-296.
10 M. Vergé-Franceschi, La société française au XVIIe siècle, Paris, Fayard, 2006, p. 112.
11 Richelieu à Razilly, Paris, le 10/12/1626, dans Richelieu/L, t. 2, p. 304.
12 J. Bergin, Pouvoir et fortune de Richelieu, op. cit., p. 92. Voir le Comptes de la recepte et despence faicte pour la citadelle et fortification du Havre de Grâce, dans Richelieu/D, p. 543.
13 M. de Goussancourt, Le martyrologe des chevaliers de saint Jean de Jérusalem dits de Malte, Paris, S. Piget, 1654, p. 393.
14 Délibération, le 31/01/1635, p. 243 ; Délibération, le 5/12/1635, p. 254 ; Délibération, le 3/12/1636, p. 281.
15 Il vient à l’assemblée générale en 1636, 1637, 1640, 1641 et 1642 mais la boude en 1638, 1644 et 1645.
16 Délibération, le 24/02/1642, p. 422.
17 Ibid., p. 421. Le contrat est passé à Paris chez Mouffle et Chaussière le 25 janvier 1642.
18 Il est présent aux assemblées du 3 mars 1645 et du 31 mars 1645.
19 Délibération, le 2/12/1637, p. 315-316.
20 AN, MC, étude XIX, 409, Acte de vente, Paris, le 20/02/1635, pas de n° de fol.
21 Nicolas Fouquet acquiert deux parts de madame de Guénégaud et de ses enfants le 2 janvier 1643 (Délibération, le 1/04/1643, p. 446). En ce qui concerne les parts de Marion, nous nous appuyons sur la déclaration de Nicolas Fouquet (FOUQ/D, t. 8, 1666, p. 58).
22 Il cède à d’Aligre le tiers des deux quarante-cinquièmes le 5 décembre 1640 (Délibération, le 22/12/1640, p. 404) et à Sébastien Cazet deux parts le 16 juin 1642 (Délibération, le 26/06/1642, p. 429).
23 Cette part passe à 34,21 % si nous ne prenons pas en compte les profils inconnus, et même 39,33 % si nous ne considérons que les profils professionnels connus, enfants non compris.
24 Nous avons arrondi les pourcentages pour une meilleure lecture.
25 G. Tallemant des Réaux, Historiettes, Paris, J. Techener, 1852-1860, t. 2, p. 45.
26 Mémoires inédits de Charles Fournier de Carles de Pradines, seigneur de Romesac (1665-1669), dans Revue du Berry, 1903, p. 246. Il s’agit d’une édition partielle par E. Hubert du manuscrit de ses mémoires qui figure dans AD 36, 2J, 101, fonds Lemaigre, Charles Fournier de Carles de Pradines, Mémoires, 42 fol.
27 Délibération, le 31/01/1635, p. 243 ; ANOM, F2A13, Articles accordés entre les associés de la Cie des îles de l’Amérique, Paris, le 13/02/1635, p. 14.
28 AN, MC, étude XIX, 409, Acte de vente, Paris, le 20/02/1635, pas de n° de fol. ; AN, MC, étude XIX, 409, Acte de vente, Paris, le 3/05/1635, pas de n° de fol.
29 Le contrat passé le 5 février 1639 devant Chesneau, notaire à La Rochelle, le mentionne comme seul bénéficiaire des deux quarante-cinquième dans la Cie des îles (Délibération, le 24/02/1642, p. 422). Ce Jacques Loyau semble jouer un grand rôle dans le milieu d’affaire rochelais. En 1636, il prête 1 200 livres à Nicolas Denis, à peine revenu du Canada et futur agent de la Cie des îles de l’Amérique à La Rochelle, pour la bonne marche de ses affaires (C.-J. d’Entremont, Nicolas Denys, op. cit., p. 28).
30 Délibération, le 24/02/1642, p. 422.
31 AN, MC, étude LI, 493, Acte de vente, Paris, le 15/02/1635, pas de n° de fol.
32 Les parts de la maréchale sont acquises dans un premier temps par Bardin et Pradines (ANF, MC, étude XIX, 409, Acte de vente, Paris, le 20/02/1635, pas de n° de fol) et revendues aussitôt à François Fouquet (ANF, MC, étude XIX, 409, Acte de vente, Paris, le 24/02/1635, pas de n° de fol. ; AN, MC, étude XIX, 409, Acte de vente, Paris, le 3/05/1635, pas de n° de fol).
33 Le contrat est passé devant Fieffé et Duschene le 3 mars 1635 (ANF, MC, étude LI, 505, IAD de Fr. Fouquet, Paris, le 4/08/1640, pas de n° de fol).
34 Délibération, le 5/12/1635, p. 257 ; Délibération, le 7/12/1636, p. 283.
35 AN, MC, étude LI, 499, Acte de vente, Paris, le 1/06/1638, pas de n° de fol. ; AN, MC, étude LI, 500, Acte de vente, Paris, le 10/12/1638, pas de n° de fol.
36 AN, MC, étude LI, 500, Acte de vente, Paris, le 10/12/1638, pas de n° de fol. Bontemps est reçu dans la Compagnie le 5 janvier 1639 (Délibération, le 5/01/1639, p. 348).
37 Ricouart est invité à prendre place en son sein pour délibérer des affaires lors de l’assemblée du 2 mai 1640 (Délibération, le 2/05/1640, p. 391).
38 M. Zylberberg, « Les relations internationales de Rouen dans le premier xviie siècle », dans J.-P. Cléro (éd.), Les Pascal à Rouen 1640-1648, Rouen, Publications de l’université de Rouen, 2001, p. 38 ; J. Chailley-Bert, Les compagnies de colonisation sous l’Ancien Régime, op. cit., p. 22. Saint-Louis devient un établissement permanent en 1638 (Ph. Haudrère, L’empire des rois, op. cit., p. 106).
39 A. Ly, La Compagnie du Sénégal, op. cit., p. 67 ; M. Zylberberg, « Les relations internationales de Rouen… », op. cit., p. 38 et 40.
40 Alexis de Saint-Lô, Relation du voyage du Cap-Verd, op. cit., p. 1, 4 et 211.
41 M. Zylberberg, « Les relations internationales de Rouen… », op. cit., p. 40 ; Ph. P. Boucher, Les Nouvelles-Frances : la France en Amérique, 1500-1815, Sillery, Septentrion, 2004, p. 52. La colonisation de Cayenne est un échec. Les renforts envoyés en 1640 ne suffisent pas et en 1642, il ne reste plus que quelques colons (M. Zylberberg, « Les relations internationales de Rouen… », op. cit., p. 4). En 1643, Poncet de Brétigny conduit une nouvelle expédition mais elle est décimée par les maladies et les attaques des Indiens (Ph. Haudrère, L’empire des rois, op. cit., p. 120 ; M. Devèze, Antilles, Guyanes, la mer des Caraïbes, op. cit., p. 124).
42 M. Zylberberg, « Les relations internationales de Rouen… », op. cit., p. 45.
43 R. Le Blant, « La première compagnie de Miscou, 1635-1645 », RHAF, 17-3, 1963, p. 365.
44 Lettre de cachet au capitaine Bontemps, Paris, le 22/08/1645, dans DT/1667, t. 1, p. 286.
45 Délibération, le 19/02/1640, p. 375.
46 Il est élu pour deux ans en compagnie de Martin de Maunoy et de Pierre Chanut (Délibération, le 1/12/1638, p. 346).
47 Délibération, le 23/08/1646, p. 502.
48 Ibid., p. 502.
49 ANOM, F2A13, Contrat du rétablissement de la Cie des îles de l’Amérique, Paris, le 12 février/1635, p. 4-5.
50 Il est reçu dans la Compagnie lors de l’assemblée du 10 mai 1643 (Délibération, le 10/05/1643, p. 452).
51 Délibération, le 7/10/1643, p. 462.
52 Délibération, le 3/12/1636, p. 285.
53 J. Petitjean Roget, « Saint Christophe… », op. cit., p. 46.
54 Délibération, le 1/04/1643, p. 447. Sur les liens de parenté entre les deux hommes, voir D. Dessert, Fouquet, op. cit., p. 132.
55 Délibération, le 24/02/1642, p. 421. François Dalesse a épousé Denise-Marie Berruyer le 28 mai 1639 (J.-B. de L’hermite-Souliers, Inventaire de l’histoire généalogique de la noblesse de Touraine et pays circonvoisins, Paris, Veuve Alliot et Gilles Alliot, 1669, p. 89).
56 Délibération, le 1/12/1645, p. 496.
57 Boisseret acquiert une part de Chanut (Délibération, le 10/05/1643, p. 352).
58 Délibération, le 2/06/1645, p. 490. L’épitaphe du tombeau de Henri de Creil dans la chapelle des carmes de la place Maubert à Paris indique qu’il a épousé Françoise Bardin (A.-L. Millin, Antiquités nationales, Paris, M. Drouhin, 1792, t. 4, p. 21).
59 Chanut épouse la fille de Claude Clerselier de Leumont, Marguerite, en 1627 (J.-F. de Raymond, Pierre Chanut, op. cit., p. 33).
60 Moreri, t. 8, 1759, p. 491.
61 Archives privées du Fayel, IAD de N. Ladvocat, le 15/02/1675, pas de n° de fol.
62 Le Mercure galant, septembre 1698, p. 258-259.
63 Fr. Bayard, Le monde des financiers, op. cit., p. 271-272.
64 Le bail de location est établi à Paris le 19 avril 1639 par Vigeon pour un loyer de 2 200 livres (ANF, MC, étude LI, IAD de Fr. Fouquet, Paris, le 4/08/1640, cote 80).
65 Chanut à Colbert, Livry, le 1/09/1661, dans F. Ravaison, Archives de la Bastille op. cit., t. 1, 1866, p. 376. Cela représente 305 000 livres (État des biens de N. Fouquet en septembre 1661, dans D. Dessert, Fouquet, op. cit., p. 350). Christian Petitfils donne un montant légèrement différent de 303 995 livres en s’appuyant sur le manuscrit 7167 de la Bibliothèque de l’Arsenal (J.-C. Petitfils, Fouquet, op. cit., p. 545). La somme a été déposée sous le prête-nom d’un clerc, Porlier (D. Dessert, Fouquet, op. cit., p. 352). Il doit s’agir de l’abbé Imbert Porlier, neveu de Pierre Chanut (L. de Ribier, Un diplomate auvergnat sous Louis XIV, op. cit., p. 42).
66 J.-C. Petitfils, Fouquet, op. cit., p. 140 et 225.
67 Archives du Fayel, IAD de N. Ladvocat, le 15/12/1675 pas de n° de fol. ; Bibilothèque de la Sorbonne, coll. Victor Cousin, ms 1, Billet de Fouquet, le 11/04/1661, fol. 32.
68 Archives du Fayel, IAD de N. Ladvocat, le 15/12/1675.
69 BnF, ms fr. 3833, Cinq-Mars à sa mère, pas de date, fol. 210. Pub. dans H. Lacaille, « La vente des biens de Cinq-Mars (avril 1643) », Annuaire-Bulletin de la Société de l’histoire de France, 30, n° 2, 1893, p. 240.
70 Acte de vente, le 15/08/1637, dans Bréard, p. 192-194.
71 Ph. Boucher, Les Nouvelles Frances, op. cit., p. 54.
72 Richelieu, d’Effiat, Isaac Martin de Maunoy, Jacques Berruyer, Jean Rozée, Isaac de Razilly figurent dès 1629 parmi les cent associés (Liste des Cent-Associés, le 17/05/1629, dans Collection de manuscrits… relatifs à la Nouvelle-France, op. cit., vol. 1, p. 80-85 ; BnF, ms fr. 18593, Noms et qualités des associés de la Cie de la Nouvelle-France, 1642, fol. 343-346v).
73 Articles et conventions de société et compagnie, le 7/05/1627, dans Édits…, concernant le Canada, op. cit., p. 16. Voir aussi Mémoires et documents relatifs à l’histoire du Canada. De la famille des Lauson, Montréal, 1859, p. 65-66. Sur le milieu social de Lauson, voir R. Le Blant, « Jean de Lauson et Marie Gaudart : leur appartenance à une structure sociale », RHAF, 3-1, 1969, p. 110-121. Voir aussi J.-P. Charmeil, Les trésoriers de France à l’époque de la Fronde. Paris, A. et J. Picard, 1964, p. 356-357.
74 Lauson à Richelieu, Rouen, le 3/01/1627, citée par D. L. M. Avenel, « note », dans Richelieu/L, t. 2, p. 345 ; Richelieu à de Lauson, le 15/01/1627, dans Richelieu/L, t. 2, p. 345 ; Lauson à Richelieu, Paris, le 30/06/1630, dans Richelieu/L, t. 2, p. 345.
75 Délibération, 4/06/1636, p. 269 ; Délibération, le 3/12/1636, p. 283 ; G. Carpin, Le réseau du Canada, op. cit., p. 444.
76 Liste des Cent-Associés, le 17/05/1629, dans Collection de manuscrits… relatifs à la Nouvelle-France, vol. 1, op. cit., p. 81 et 82 ; BnF, ms fr. 18593, Noms et qualités des associés de la Cie de la Nouvelle-France, 1642, fol. 343v et 344. Voir aussi les listes des associés données par M. Trudel, La seigneurie des Cent-Associés, op. cit., t. 1, p. 415 et suiv.
77 M. Trudel, La seigneurie des Cent-Associés, op. cit., t. 1, p. 432.
78 R. Le Blant, « La première compagnie de Miscou, 1635-1645 », RHAF, 17-3, 1963, p. 363. La date de la concession du territoire remonte au 15 novembre 1632 (G. Carpin, Le réseau du Canada, op. cit., p. 98). La Compagnie de Miscou est constituée avant le premier janvier 1636.
79 La Cie de la Nouvelle-France concède les seigneuries de Beaupré et de l’île d’Orléans le 15 janvier 1636 (R. Gariépy, « Deux joyaux du patrimoine foncier : les seigneuries de Beaupré et de l’île d’Orléans », Cap-aux-Diamants : la revue d’histoire du Québec, 4-1, printemps 1988, p. 37). Les autres associés de la compagnie sont Jacques Castillon, Jacques Duhamel et Noël Juchereau des Chatelets.
80 R. Baudry, « Charles d’Aulnay et la Compagnie de la Nouvelle-France », RHAF, 11-2, 1957, p. 220 et 223 ; J. Dawson, Le fondateur de la Hève. Isaac de Razilly, op. cit., p. 1-7 ; G. Carpin, Le réseau du Canada, op. cit., p. 247.
81 Formation et Statuts de la Cie de Madagascar, 1656, dans A. Malotet, Étienne de Flacourt, op. cit., p. 306-307. Le marchand parisien, Antoine Desmartins, très actif aux Antilles figure aussi parmi les associés. Philippe Haudrère note aussi la présence du neveu du commandeur de La Porte, La Meilleray (É. de Flacourt, Histoire de la Grande Isle, Madagascar, Paris, INALCO/Karthala, 2007, p. 380 ; Fouq/D, t. 8, 1666, p. 52 ; C. Allibert, « note », dans É. de Flacourt, Histoire de la Grande Isle, op. cit., p. 624 ; Ph. Haudrère, L’empire des rois, op. cit., p. 135-136). La Compagnie des Indes orientales bénéficie pour dix ans du droit excusif de trafiquer à Madagascar (Ph. Haudrère, L’empire des rois, op. cit., p. 135-136).
82 Renouvellement du privilège de la Cie de l’Orient par le duc de Vendôme, dans A. Malotet, Étienne de Flacourt, op. cit., p. 305. Sur les multiples soubresauts de cette compagnie, voir A. Malotet, Étienne de Flacourt, op. cit., p. 268-272.
83 A. Malotet, Étienne de Flacourt, op. cit., p. 271. La Compagnie s’intitule dans la documentation Cie française de l’Orient en l’île de Madagascar dite de Saint-Laurent et autres îles adjacentes (Lettres patentes, Bayonne, le 12/05/1660, dans A. Malotet, Étienne de Flacourt, op. cit., p. 314).
84 Liste des souscripteurs, 1660, dans J. Du Fresne de Francheville, Histoire de la Compagnie des Indes orientales, Paris, De Bure, 1746, p. 382 ; ANOM, C18, Articles pour la Cie pour le voyage de la Chine, du Tonkin et de la Cochinchine, le 15/04/1660, fol. 7-10 ; BnF, Z, Thoisy, 89, Liste des intéressés en la Cie des Indes orientales, fol. 168-171v.
85 « Le roi accordait à la Compagnie les mêmes privilèges que ceux qui avaient été accordés précédemment à la Cie des îles d’Amérique », A. Malotet, Étienne de Flacourt, op. cit., p. 272.
86 Statuts de la Cie de Madagascar, 1656, dans A. Malotet, Étienne de Flacourt, op. cit., p. 308.
87 Ibid., p. 308-314.
88 B. G. Rolland, Compte-rendu aux chambres assemblées concernant les collèges que les ci-devant soi-disants jésuites occupaient à Poitiers, le 7/06/1764, dans Recueil de plusieurs ouvrages de M. le président Rolland, Paris, P. G. Simon/N. H. Nyon, 1783, p. 601-602 ; Lettres patentes, Saint-Germain-en-Laye, le 19/01/1642, dans J. Delfour, Les jésuites à Poitiers (1604-1762), Paris, Hachette, 1901, p. 381. L’intendant du Poitou, François de Villemontée, les remet aux jésuites le 15 février 1642. Rolland semble mélanger les dates en disant qu’en janvier 1652, Louis XIV confirme par lettres patentes la fondation de Bardin et reconnaît au collège le privilège de fondation royale (B.-G. Rolland, Compte-rendu aux chambres assemblées, op. cit., p. 602).
89 BnF, Naf, 2449, Factum pour les religieux réformés du couvent de Mesnil-Garnier, p. 107. Sur cette fondation voir J. Frémin, « L’histoire du couvent dominicain du Mesnil-Garnier, dans le Cotentin », Annales de Normandie, 45e année, n° 4, 1995, p. 419-430.
90 A. Bruas, Les de Morant, barons et marquis du Mesnil-Garnier, Angers, Lachèse et Dolbeau, 1892, p. 23 ; BnF, Naf, 2449, Factum sommaire pour M. Morant, maître des requêtes, contre madame de Montauglan, fol. 1.
91 A.-L. Millin, Antiquités nationales, ou Recueil de monumens pour servir à l’histoire générale et particulière de l’empire françois, Paris, M. Drouhin, 1792, t. 4, p. 21.
92 A. Tallon, La Compagnie du Saint-Sacrement 1629-1667, Paris, Éd. du Cerf, 1990, p. 19-20 ; J.-P. Gutton, Dévots et société au XVIIe siècle, op. cit., p. 18. Henri de Lévis n’ayant point d’enfant, décide de prendre l’état ecclésiastique et devient chanoine de l’église de Paris. Il cède alors son titre à son cadet, Charles. Il appartient à l’une des premières familles du royaume. Il est le fils d’Anne de Lévis, duc de Ventadour († 1622), pair de France, gouverneur et sénéchal du haut et du bas Limousin, et lieutenant général du Languedoc (Moreri, t. 6, 1759, p. 283).
93 Ils sont liés dans plusieurs affaires privées. Voir en particulier ANF, MC, étude XIX, 409, le 23/06/1635, pas de n° de fol.
94 J.-P. Gutton, Dévots et société au XVIIe siècle, op. cit., p. 29.
95 D. Dessert, Fouquet, op. cit., p. 38, 48-51 et 312.
96 Fouquet à Richelieu, Paris, le 19/02/1630, dans Richelieu/P, t. 5, p. 95 ; Fouquet à Richelieu, Paris, le 26/03/1630, dans Richelieu/P, t. 5, p. 155 ; Fouquet à Richelieu, Lyon, le 11/08/1630, dans Richelieu/P, t. 5, p. 507-508.
97 J. Bergin, Pouvoir et fortune de Richelieu, op. cit., p. 61.
98 Son fils François V (1611-1673), abbé de Saint-Sever et de Saint-Sens, évêque de Bayonne, d’Agde, puis archevêque de Narbonne, appartient à la Compagnie (L. Carey Rosett, « A la recherche de la Compagnie du Saint-Sacrement à Montauban », Revue d’histoire de l’Église de France, 1954, 40-125, p. 223).
99 D. Dessert, Fouquet, op. cit., p. 190-192.
100 M. Vergé-Franceschi, Colbert, la politique du bon sens, Paris, Payot, 2003, p. 164 et 173 ; D. Dessert, Fouquet, op. cit., p. 192.
101 J.-F. de Raymond, Pierre Chanut, op. cit., p. 30 et 35.
102 BnF, ms fr., 17962, Chanut au comte d’Avaux, Stokholm, le 6/01/1646, fol. 51 v.
103 Claude de Mesmes (1596-1650) participe à la Société de Notre-Dame de Montréal avec Louis Laisné de la Marguerie (M.-C. Daveluy, « Bibliographie de la Société de Notre-Dame de Montréal (1639-1663) et de ses membres, accompagnée de notes historiques et critiques », RHAF, 13-4, 1960, p. 596).
104 Claude de Mesmes a été ambassadeur à Venise en 1627, puis négociateur de nombreux traités entre les puissances nordiques. Il est en particulier à l’origine du rapprochement entre le Dannemak et la Suède en 1634. Il obtient à la fin de sa vie la surintendance des finances (Ch. Dezobry, Th. Bachelet, Dictionnaire général, op. cit, t. 1, p. 194). Sur la carrière diplomatique de Claude de Mesmes, voir A. Tischer, « Claude de Mesmes, Count d’Avaux (1595- 1650) : The Perfect Ambassador of the Early 17th Century », International Negotiation, XIII, 2008, p. 197-209.
105 La rencontre ne se produira pas pour des raisons familiales et personnelles (J.-F. Raymond, Pierre Chanut, op. cit., p. 43).
106 C’est notamment ce que soutient J.-F. de Raymond, Pierre Chanut, op. cit., p. 16.
107 J.-F. de Raymond, Pierre Chanut, op. cit., p. 20.
108 Ibid., p. 33.
109 Délibération, le 2/06/1638, p. 326-327.
110 J.-F. de Raymond, Pierre Chanut, op. cit., p. 24 ; J.-P. Charmeil, Les trésoriers de France, op. cit., p. 137.
111 J.-F. de Raymond, Pierre Chanut, op. cit., p. 34.
112 Il est ambassadeur en Suède de 1645 à 1649 puis en Hollande jusqu’en 1654 (M.-N. Bouillet, Dictionnaire universel d’histoire et de géographie, Paris, Hachette, 1847, t. 1, p. 351 ; J.-P. Charmeil, Les trésoriers de France, op. cit., p. 137).
113 Mémoires inédits de Louis-Henri de Loménie, Paris/Leipzig, Ponthieu et Cie, 1828, t. 1, p. 386-387.
114 N. Fouquet à Mazarin, septembre 1656, dans Colbert/L, t. 1, 1861, p. 498.
115 J.-C. Petitfils, Fouquet, op. cit., p. 328.
116 Il veut qu’il prenne en charge une partie de ses affaires en cas d’arrestation et conseille sa femme (Projet de Saint-Mandé, dans D. Dessert, Fouquet, op. cit., p. 359).
117 D. Dessert, Fouquet, op. cit., p. 165.
118 Il fait sa soumission au monarque après l’arrestation de Fouquet, « j’ai seulement à vous supplier de vos bons offices auprès du roi pour faire qu’il ne tire aucune conséquence contre ma fidélité à son service de ce que j’ai voulu rendre service à monsieur Fouquet », (BnF, Mélanges Colbert, 103, Chanut à Colbert, le 1/10/1661, fol. 133-134, dans D. Dessert, Fouquet, op. cit., p. 166 ; Chanut à Colbert, Livry, le 12/09/1661, dans F. Ravaison, Archives de la Bastille, op. cit., t. 1, p. 362). Voir aussi J.-C. Petitfils, Fouquet, op. cit., p. 375.
119 Fouq/D, t. 8, 1666, p. 60.
120 Chanut à Houël, Paris, le 10/04/1659, dans DT/1667, t. 1, p. 55-557 ; Lots et partages de la Guadeloupe et autres îles, le 3/08/1659, dans DT/1667, t. 1, p. 567-569.
121 Dutertre parle en effet d’une intervention des « amis communs » de Houël et d’Hinselin (DT/1667, t. 1, p. 569). Le roi adresse une lettre à Poincy pour qu’il rétablisse le calme (Le roi à Poincy, Saint-Jean-de-Luz, le 25/05/1660, dans DT/1667, t. 1, p. 570).
122 DT/1667, t. 1, p. 571.
123 J.-C. Petitfils, Fouquet, op. cit., p. 309.
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