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Florence et la Toscane, XIVe-XIXe siècles

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Jean Boutier
, 
Sandro Landi
, 
Olivier Rouchon

Deuxième partie. Espaces, territoire, ressources

VIII. Florence et le Domaine florentin aux xve et xvie siècles : pouvoir et clientèles

Céline Perol

Texte intégral

  • 1 E. Fiumi, « Volterra e San Gimignano nel medioevo », in G. Pinto, ed., Raccolta di studi, Sienne, (...)
  • 2 La plupart des auteurs des monographies les plus récentes ont participé au séminaire organisé à Sa (...)

1Le Domaine florentin est le résultat de l'agrégation d'entités territoriales sur lesquelles Florence, au fil des siècles, a étendu son pouvoir et qui ont toutefois conservé leur identité communale. Chaque ville préserve ainsi le pouvoir de légiférer, de désigner ses propres magistrats et, en règle générale, de lever les impôts et de gouverner son contado. Dans ce contexte, chaque monographie citadine apporte une contribution essentielle à l'analyse plus large de la formation de l'Etat florentin. Les relations institutionnelles entre les organes florentins et les administrations locales mais aussi les rapports entre les Florentins et les acteurs politiques de chaque cité participent à l'identification des rouages de la pratique des pouvoirs en Toscane et à Florence. À la suite des premières enquêtes d'E. Fiumi sur San Gimignano et Volterra et de D. Herlihy sur Pistoia1, les travaux des années 1980 et surtout de la décennie suivante ont reconstitué avec précision le scénario des interventions florentines et des réactions des dirigeants locaux à Pistoia, Volterra, Cortone, Arezzo, San Miniato ou Colle Val d'Eisa2.

  • 3 Ce fond d'archives constitue la principale source de l'analyse de P. Salvadori sur le patronage de (...)

2Les sources permettant de déterminer le cadre institutionnel, les événements, les moyens d'action et les ambitions des différents protagonistes sont conservées dans les archives communales de chaque communauté et à l'Archivio di Stato de Florence. Il s'agit en premier lieu des statuts communaux et de leurs réformes successives rédigées tous les trois, quatre ou six ans, des délibérations municipales qui font apparaître les thèmes débattus lors des conseils ainsi que des tratte ou listes de citadins où sont tirés au sort les noms des magistrats. Les recueils de missives échangées entre les administrations et les personnages les plus influents constituent en outre une source de renseignements essentielle et le fond conservé à Florence du « Mediceo avanti il Principato » offre en particulier de précieuses informations sur les relations entre les Médicis et les cités du Domaine de 1428 à 14943.

3Considérons dans un premier temps la nature des multiples interventions de la République dans les cités de son Domaine avant d'observer la présence plus spécifique des Florentins dans les affaires locales et enfin les grandes lignes d'une chronique régionale.

Les structures politiques du Domaine

  • 4 Pour une description détaillée et événementielle des relations entre Florence et Pistoia, W. J. Co (...)
  • 5 S. J. Milner, « Capitoli e clienti a Pistoia », in Lo stato territoriale, op. cit., p. 405-430, p. (...)
  • 6 L. Fabbri, « Il patriziato fiorentino e il dominio su Volterra », in ibid., p. 385-404, p. 386.

4La République de Florence s'impose à plusieurs cités toscanes par une vocation pacificatrice déterminée et se trouve amenée à défendre les intérêts des populations placées sous sa tutelle (sotto custodia). Le processus de soumission de la ville de Pistoia est à ce titre significatif. Florence, ville proche et puissante, contribue à limiter l'ampleur des conflits entre les milites et les autres habitants de la cité dès le xiiie siècle4. Au siècle suivant, les accords conclus entre les deux cités en 1329 et les concessions établies en 1351 et en 1365 répondent à la fois au souci de mettre fin aux luttes de factions locales, d'assurer la paix et le contrôle florentin dans cette partie de la Toscane. Cette intervention a une dimension militaire et Florence entreprend tout d'abord de reconstruire à ses propres frais la forteresse de Pistoia en 1351, prévoit l'élection par les habitants de la ville d'un capitaine de garde (di guardia) placé à la tête d'un corps de 60 fantassins tandis que les places fortes du contado sont investies par les Florentins. En 1373, dans un second temps, l'élection des représentants du commandement militaire est transférée à Florence, échappant ainsi aux habitants de Pistoia5. Plus au sud, l'intervention de Florence à Volterra en 1361 répond comme à Pistoia à une volonté de mettre fin aux conflits entre familles dirigeantes et se concrétise par l'instauration d'un contrôle militaire, Florence obtenant une concession de la forteresse pour dix ans6.

  • 7 F. Salvestrini, « San Miniato al Tedesco : il ceto dirigente e il potere fiorentino », in ibid., p (...)
  • 8 Pour l'ensemble des références concernant la ville de Cortone, C. Perol, Cortona, pouvoirs et soci (...)
  • 9 Sur la politique fiscale de Florence dans son Domaine, G. Petralia, « Fiscalità, politica e domini (...)

5Quelques années plus tard, en 1369, San Miniato est occupée par la force armée florentine pour assurer la défense des populations face aux prétentions des Visconti de Milan7. Au début du xve siècle cependant, il n'est plus question de tutelle militaire et l'intégration de nouvelles communautés s'accompagne d'une occupation immédiate des postes de contrôle urbains et ruraux. Ainsi lorsque la ville de Cortone est achetée par Florence en 1411, la soumission de la communauté et le contrôle de la frontière ombrienne sont marqués par l'envoi de quatre châtelains (castellani) florentins chargés de prendre possession de la forteresse et de l'enceinte urbaine, et des structures défensives du contado8. En échange de cette protection, fort coûteuse pour la République, Florence exige le paiement de taxes de guerre, en particulier la tassa delle lance dont l'imposition se généralise dans les années 1380, instituée notamment à Volterra en 13869.

  • 10 A. Zorzi, « Lo stato territoriale fiorentino (sec. xiv-xv) : aspetti giurisdizionali », Società e (...)

6Le commandement militaire des territoires placés sous la simple tutelle ou garde de Florence comme celui des entités directement et formellement soumises est assuré par un capitaine. À ce dernier est confié la défense militaire de la cité, le recrutement des troupes et la surveillance du territoire et l'administration de la justice10. Ses fonctions sont enfin d'ordre politique, puisqu'il a la charge de défendre à la fois les principes de la libertas de la ville assujettie et les intérêts de Florence. Il est ainsi responsable de l'application de la législation urbaine, participe aux assemblées municipales et, à Cortone par exemple, aucune délibération ne peut être validée et aucune missive envoyée sans son autorisation ou celle de son vicaire. Il veille de plus à calmer les conflits entre les protagonistes de la vie politique locale et doit garantir la concorde civile. Par ses responsabilités judiciaires et son rôle d'arbitre, le capitaine se substitue en partie à la figure du podestat. Si dans certaines villes, comme à Cortone en 1411, sa présence est imposée dès l'acte de soumission, venant clairement concrétiser avec les forces armées l'intégration de la cité dans le Domaine, l'intrusion d'un magistrat florentin apparaît bien plus progressive à Pistoia comme à Volterra où la fonction de capitaine du peuple apparaît dès 1361 pour devenir au cours des années capitaine de garde, chargé de garantir la paix entre les familles de la cité. Ce n'est qu'en 1385, au terme d'un accord bilatéral entre les deux villes, que ce magistrat devient le représentant officiel de la République à Volterra et que sa désignation est transférée à Florence.

  • 11 G. Chittolini, « Statuti e autonomie urbane. Introduzione », in Statuti. città, territori in Itali (...)

7La tutelle que la République florentine accorde ou impose est enfin de nature législative. Chaque cité conserve son pouvoir de légiférer et ses propres statuts communaux qui sont l'émanation du même principe de jus commune. La carte législative de la Toscane florentine apparaît ainsi extrêmement hétérogène et tend même à se diversifier sous l'impulsion de Florence qui favorise l'autonomie des centres mineurs et des communautés rurales et donc la rédaction de nouvelles lois11. La permanence des législations locales ne peut être lue comme une simple marge d'indépendance accordée aux territoires soumis par la cité dominante. Conserver le droit de légiférer signifie aussi compiler de nouveaux corpus quand Florence l'ordonne et avec son approbation. La rédaction de nouveaux statuts est un acte de soumission. Florence ordonne ainsi à la communauté de Cortone de rédiger des statuts dès l'achat de la ville, choisissant les neuf réformateurs chargés de leur compilation et fournissant le modèle du Livre Premier concernant les magistratures citadines.

8Ce contrôle perdure au-delà de la première soumission, pendant tout le xve siècle. Ainsi les statuts de Pise de 1476 sont rédigés sur l'invitation de Florence et suivant ses directives. Pour être validée et avant d'être appliquée, chaque législation doit de plus être approuvée par le bureau des Riformagioni florentin. Cette condition sine qua non est un élément essentiel de l'intervention de la République dans le gouvernement de chaque communauté ; tout statut promulgué dans le Domaine et ses réformes successives sont validés à Florence et leur copie est conservée, encore aujourd'hui, dans les archives florentines.

9Si la documentation ne permet pas toujours de considérer la nature et le poids des instructions florentines dans la rédaction ou la réforme d'un corpus législatif, il apparaît cependant certain que Florence s'attache tout particulièrement à contrôler la distribution des cartes politiques dans les cités de son Domaine.

10Le pouvoir de médiation de Florence ne s'impose pas seulement par l'usage des armes ou la désignation d'un magistrat étranger. Ainsi à Pistoia, Florence étant devenue l'arbitre de l'opposition entre la faction des Panciatichi et celle des Cancellieri, les commissaires florentins ordonnent en 1376 une réforme municipale pour assurer un nouvel équilibre des pouvoirs dans la cité. Ils prévoient en particulier de doubler le nombre des bourses pour les magistratures principales, celles de gonfalonier de justice, d'Anciens et de Douze Bonshommes. Elles ne seront plus au nombre de quatre - soit une par quartier - mais de huit divisées en deux compagnies. La compagnie de San Paolo se trouve contrôlée par la famille Panciatichi et la compagnie de San Giovanni par celle des Cancellieri. Les deux factions en présence dans la cité se trouvent ainsi équitablement représentées dans le gouvernement citadin et cette bipartition, reprise dans les interdits qui s'imposent aux candidats désignés, sera appliquée jusqu'en 1455. Garantissant la concorde civile, Florence se présente comme le principal chef d'orchestre de la vie municipale et peut ainsi prétendre imposer un contrôle de fait sur la cité qui ne sera institutionnalisé qu'en 1401.

11Les circonstances sont différentes mais la dynamique identique à Volterra. En 1361, Florence offre son appui à l'opposition qui s'organise contre la famille des Belforti, seigneurs de la cité depuis une vingtaine d'années, et établit des accords avec les nouveaux dirigeants. Puis face à la résistance du parti des Belforti et à la violence des luttes entre factions, elle s'impose dans un second temps comme la principale médiatrice, tirant les fils d'une action diplomatique qui fait de la cité dominante la cité super partes et la nouvelle garante de la paix. C'est dans ce contexte qu'elle obtient l'extension des fonctions du capitaine du peuple puis le monopole de cette fonction en 1385, analysés plus haut. Florence saura conserver son rôle de médiation et ses talents de réconciliatrice au xve siècle.

  • 12 O. Muzzi, « Le gerarchie locali di Colle Val d'Eisa e la formazione del dominio fiorentino, sec. x (...)

12Si le rôle des différents acteurs et leurs intérêts respectifs apparaissent toujours plus aisés à identifier dans un contexte de conflits déclarés, s'il apparaît clairement que les violences intra-muros ont pu constituer un terrain propice à l'intrusion d'une troisième force politique et à l'affirmation d'une autorité régionale, les autres réalités urbaines soulignent une forte concomitance entre les premières interventions florentines et la redistribution des cartes politiques dans la cité. Ainsi l'intégration de Colle Val d'Eisa dans le Domaine florentin, entre 1349 et 1429, correspond à l'éviction des plus anciennes familles de magnats de la cité, les Tancredi, Trinci et autres Ruggeri et à la mise en place d'une nouvelle élite citadine composée de quelques familles anciennes, de casati secondaires et de nouveaux venus12. Cet élargissement de la classe dirigeante s'accompagne d'une reprise économique, résultat de l'introduction de la cité dans un marché régional orchestré par Florence.

13Dans la cité de San Miniato, dans les mêmes années, l'application de nouvelles institutions voulues par Florence aboutit à la désignation d'une nouvelle élite locale et à l'exclusion de plusieurs familles de magnats, représentant de l'ancien régime du xiiie siècle et des luttes de factions du début du xive siècle. Se crée alors un fort parti d'opposition à l'ingérence florentine dans la cité composée des magnats exclus du gouvernement de la cité et d'exilés pisans soutenus par les Visconti de Milan. En 1370, à la suite d'une violente rébellion, la confiscation des biens des résistants par les capitani di parte florentins offre à Florence l'occasion de prendre possession d'un grand nombre de maisons fortes, de tours et de donjons dans le territoire et ainsi de renforcer sa position militaire dans la région.

  • 13 C. Perol, « Gli attori di un compromesso », in ibid., p. 461-477.

14Suivant une logique identique, mais dans un contexte politique bien moins mouvementé, la soumission de Cortone en 1411, au lendemain de la chute du régime seigneurial de la famille des Casali (1409), entraîne la formation d'une nouvelle élite urbaine placée à la tête de nouvelles magistratures désignées par de nouveaux statuts communaux rédigés sur ordres florentins13. Les magistratures instituées dans le livre Premier du corpus de 1411 offrent de nombreuses similitudes avec le système florentin. Six prieurs, soit deux par tercier, sont placés pour deux mois à la tête du pouvoir exécutif. Ils sont désignés par extraction de bourses et soumis à une série d'interdictions de cumul et de renouvellement des charges. Les réformateurs désignés par Florence pour rédiger les statuts sont de plus tenus de composer les bourses d'extraction, conditionnant ainsi la composition du gouvernement urbain. Le choix des réformateurs porte sur un petit nombre d'individus qui forment, pendant un demi-siècle, avec l'aval tacite de Florence, une société politique compacte favorisant la carrière municipale de quelques individus et d'un nombre restreint de familles. Se trouvent ainsi sur le devant de la scène municipale des familles d'origines bien diverses : les descendants des plus fervents opposants aux Casali exilés depuis des décennies, des anciens familiers des seigneurs évincés et de nouvelles familles récemment enrichies. L'hétérogénéité du groupe constitue alors une garantie d'équilibre politique et de concorde civique. À cette première phase de concentration des pouvoirs succède à partir des années 1460 une période d'élargissement du groupe. Les longues carrières bien remplies, la présence massive d'un petit nombre de lignages n'apparaissent plus. Aucune missive, aucune délibération, aucune législation ne permet de saisir ce phénomène qui n'a pu apparaître qu'à travers une étude prosopographique exhaustive de la société politique locale. Et l'on peut noter, voire regretter, que ce type d'approche reste limité pour les villes toscanes du xve siècle.

15Au-delà des circonstances particulières et des vicissitudes locales, ces exemples soulignent l'interaction subtile qui s'établit dans toutes les villes entre la politique d'ingérence florentine et l'éclatement ou la recomposition des groupes dirigeants citadins. Arbitre ou élément perturbateur, Florence entreprend dans tous les cas de s'imposer comme une source de pacification, de cohésion et de légitimation, faisant preuve à la fois d'opportunisme et de pragmatisme.

Les Florentins et le Domaine

  • 14 L. De Angelis, « Ufficiali e uffici territoriali della repubblica fiorentina tra la fine del secol (...)
  • 15 L. fabbri, op. cit., p. 396.
  • 16 P. Salvadori, Dominio e patronato, op. cit., p. 33 et sq.

16S'interroger sur la nature des relations entre Florence et les villes sujettes signifie, en second lieu, considérer la présence des citadins florentins et de leurs familles dans le Domaine. Les Florentins sont tout d'abord amenés à intervenir en tant que représentants de la République, dans les fonctions de capitaine, capitaine de garde ou podestat. Ces fonctions ont été, au cours du xive siècle, confisquées ou créées par la République pour être insérées dans les tratte florentines. L'administration territoriale florentine n'accorde qu'une marge de manœuvre limitée à ses représentants, prévoyant un contrôle étroit de leurs interventions et de leurs relations avec la population locale14. Si les capitaines sont tenus de suivre à la lettre les directives florentines au risque de compromettre leur carrière, s'il leur est interdit d'accepter des cadeaux, ils jouent cependant un rôle essentiel dans les échanges entre les deux cités, qui dépasse leur rôle militaire et judiciaire et leurs fonctions premières. Le capitaine s'impose rapidement comme le principal intermédiaire entre les deux pôles et conserve cette prérogative bien au-delà de son mandat. Le phénomène a notamment été observé à Volterra dès les années 1390 où le capitaine de garde se présente non seulement comme le représentant de Florence, garant des intérêts de la République et de la commune de Volterra, mais aussi comme le défenseur d'intérêts d'ordre privé. C'est ainsi qu'entre 1394 et 1429, les capitaines successifs ont pu imposer aux habitants de Volterra leur choix pour la désignation des magistrats étrangers de la cité, en particulier celle de podestat15. De même les autres fonctions réservées traditionnellement aux étrangers dans les cités comme celles de notaire dei danni dati, de chancelier ou de médecin ont pu faire l'objet de monopoles de la part de Florentins16. Les prérogatives florentines dépassent cependant les murs des palais communaux.

  • 17 R. Bizzocchi, Chiesa e potere nella Toscana del Quattrocento, Bologne, 1987.
  • 18 P. Salvadori, Dominio e patronato, op. cit., p. 17 et sq.
  • 19 Nombreux sont les travaux consacrés au rôle politique des clientèles à Florence : A. Molho, « Il p (...)
  • 20 R. Black, op. cit., p. 332.

17Le pouvoir épiscopal se trouve ainsi investi très tôt ; choisis par les Florentins parmi des Florentins, les évêques sont des instruments de contrôle territorial à part entière17. La ville de Cortone accueille dès 1424 un évêque florentin et les hommes qui se succéderont sur le siège épiscopal de la ville jusqu'à la fin du xvie siècle seront pour leur grande majorité des Florentins, exception faite d'un Pisan et de trois Cortonais. Les évêques florentins ont pu favoriser leurs proches et leurs alliés par leur gestion des bénéfices ecclésiastiques et se trouvent directement impliqués dans les réseaux florentins. Administrateurs laïques ou ecclésiastiques, les Florentins s'imposent de plus en tant que propriétaires fonciers, investissant en particulier dans les zones les plus fertiles, notamment dans le territoire pisan18. Le Domaine apparaît ainsi, au même titre que l'espace intra-muros et ses campagnes les plus proches, comme le lieu d'action économique et politique des Florentins et de leurs familles. S'y expriment clairement non seulement les ambitions individuelles et les solidarités lignagères mais aussi le jeu des clientèles qui constitue une dynamique essentielle de la vie politique florentine19. La mise en orbite des cités toscanes s'accompagne ainsi d'une extension spatiale du réseau de clientèle et l'acquisition d'un bienfaiteur florentin apparaît comme un atout fondamental pour négocier avec la République. Dès 1387, la ville d'Arezzo recherche ainsi des patrons florentins offrant en échange d'une protection et d'un appui auprès des organes centraux un accès garanti à la charge de notaire dei danni dati. Plusieurs grands personnages se succèdent ainsi sur la scène d'Arezzo comme le principal patron florentin de la cité20. La fréquence des noms cités dans les registres ou provisions de la commune permet de connaître l'identité, le nombre et la succession des différents Florentins sollicités pour défendre les intérêts fiscaux ou économiques de la ville sujette. Une intervention aussi informelle qu'intensive des Florentins a pu être observée aussi bien dans de grandes cités comme Arezzo ou Pistoia que dans le centre secondaire de Pescia. Elle tend aussi à se confirmer à Volterra au cours du xve siècle où les banquiers florentins jouent un rôle central dans les finances de ville. C'est notamment le cas des Serragli, des Capponi, Martelli et Peruzzi. Niccolò Serragli intervient ainsi dans la politique et les grandes opérations financières de Volterra de 1400 à 1425 et après sa faillite, d'autres compagnies florentines prennent naturellement le relais.

  • 21 F. Salvestrini, op. cit., p. 548-549.

18D'autres cités offrent l'exemple de Florentins descendants d'« immigrés » qui deviennent les représentants privilégiés de leur ville d'origine. C'est ainsi qu'à San Miniato, la médiation la plus efficace a été assurée dans le premier tiers du xve siècle par la famille Chellini installée depuis plusieurs générations à Florence et qui investit dans le territoire de San Miniato à cette époque. Le médecin Giovanni Chellini en particulier joue un rôle de liaison de premier plan entre les éléments les plus récents de l'élite locale et les grandes familles florentines. Il apparaît comme un agent double favorisant à la fois les investissements des Florentins dans la ville et le territoire de San Miniato et les carrières des jeunes notaires les plus ambitieux de la cité à Florence21. À Cortone, où les réseaux de clientèle n'ont pu être identifiés et qui semble donc restée en marge de la « région florentine », il faut attendre les années 1520 pour voir s'imposer un médiateur dans la cité. Il s'agit de Silvio Passerini, florentin originaire de Cortone, devenu évêque en 1521. Silvio Passerini supervise l'administration de Cortone dès les années 1510, intervenant en personne pour livrer les ordres des officiers florentins comme pour défendre les intérêts de ses concitoyens. Cette fonction d'intermédiaire apparaît notamment à travers les délibérations communales où les prieurs reconnaissants s'accordent pour organiser de grandes festivités lors de ses visites et décident de faire peindre les armes du cardinal dans la salle du conseil par l'illustre Luca Signorelli. L'accueil réservé par la cité au pape Médicis Léon x en novembre 1515 est l'expression du rôle de Silvio Passerini dans la ville.

19L'exemple de Cortone illustre ainsi la place prépondérante d'un homme qui s'est imposé grâce à ses relations privilégiées avec la famille des Médicis. S'il faut attendre le xvie siècle pour observer le rôle des Médicis à Cortone, leur présence en Toscane s'affirme bien plus tôt. Plusieurs monographies urbaines et l'ouvrage de P. Salvadori centré sur ce thème ont permis d'observer le synchronisme voire la corrélation entre la prise de pouvoir de l'illustre famille à Florence et le patronage qu'elle exerce dans les villes sujettes. Les lettres conservées dans le fond du Mediceo avanti il Principato soulignent le rôle de Côme l'Ancien à partir de 1434, assisté par la suite de ses deux fils Pierre et Jean et de ses alliés parmi lesquels se distingue notamment, dans les années 1458-1460, Luca di Buonaccorso Pitti. Ces hommes entretiennent une correspondance importante avec les villes de Pise, Arezzo, Pistoia, Prato ou Volterra. Prenons l'exemple de cette dernière qui bénéficie à plusieurs reprises de l'intervention des Médicis au cours du xve siècle. À la suite de son opposition au Catasto, Volterra se trouve dans un premier temps privée de l'administration de son contado et de ses revenus. Elle recouvre cependant ses droits à partir de 1431 grâce aux Médicis, dans un contexte de tensions entre ces derniers et les Albizzi. À partir de 1434, les Médicis, maîtres de Florence, accordent d'importants privilèges à leur protégée : ils effacent ses dettes sur les six dernières années et réduisent la taxe des lances de 2 340 à 1 000 florins. Pierre le Goutteux et son frère Giovanni se présentent alors comme les protecteurs de la ville. Si ces interventions s'inscrivent dans une politique clientélaire déjà en place dans la seconde moitié du xive siècle par les patriciens florentins, elles semblent cependant suivre une logique nouvelle.

20Le cas de Pistoia permet d'observer que dans un premier temps, les Florentins étaient intervenus dans la cité pour appuyer l'une ou l'autre des deux factions. Ce fut le cas notamment des Albizzi florentins qui s'allièrent au Panciatichi de Pistoia en 1375. Dans la première moitié du xve siècle, Neri di Gino Capponi fit une brillante carrière florentine tout en s'imposant comme le principal patron de Pistoia et en jouant comme ses prédécesseurs sur l'opposition des deux partis. Avec Côme l'Ancien une nouvelle stratégie se met en place qui sera poursuivie par Laurent le Magnifique. Les deux hommes se situent au-dessus des partis et ignorent délibérément la réalité du jeu politique local, alimentant ainsi une opposition croissante au parti médicéen.

21L'avènement de Laurent le Magnifique en 1469 constitue un second tournant dans l'administration du Domaine. Le volume et le ton des missives qui circulent entre communautés locales et Florence changent. Laurent intensifie la fréquence de sa correspondance avec les cités et étend l'aire géographique de son action politique à l'ensemble du Domaine. Il tend à gouverner personnellement, ou par l'intermédiaire de ses proches, et privilégie sa fonction de médiateur et d'arbitre au détriment de l'exercice direct et formel du pouvoir. À ses menaces voilées, à ses promesses persuasives répondent parfois les résistances voire les révoltes des communautés qui acquièrent de nouvelles marges de manœuvres et de concertation dans l'administration de la justice, de la fiscalité ou de leurs marchés. Cette politique repose sur un équilibre fragile orchestré par un arbitre unique. La mort de Laurent en 1492 et l'exil des Médicis en 1494 remettent ainsi en cause les relations entre Florence et les villes du Domaine. La mise en place du gouvernement populaire a des répercussions sur l'ensemble du territoire ; les révoltes se succèdent et la République perd, provisoirement, près d'un quart de son territoire en quelques années (cf. carte).

La crise du domaine florentin, 1494-1512

La crise du domaine florentin, 1494-1512

Cartographie : Alexandre Laclau EHESS

Conflits et révoltes

  • 22 Sur l'histoire régionale et événementielle de la Toscane au Moyen Âge, la principale référence est (...)
  • 23 D. Herlihy, C. Klapisch-Zuber, Les Toscans et leurs familles. Une étude du catasto florentin de 14 (...)

22Jusqu'au dernier tiers du xve siècle, les soulèvements qui éclatent dans les villes du Domaine ont été l'expression de refus, ponctuels, de l'arbitrage et de l'ingérence de la République22. La construction de l'État territorial florentin se trouve ainsi ponctuée de conflits qui mettent en relief la nature des compromis, l'identité des acteurs politiques et leur moyen de pression. Ainsi à Colle Val d'Eisa, les révoltes de 1370, 1389, 1395 et l'ultime rébellion de 1432 sont à la fois l'expression d'une opposition à la nouvelle élite mise en place à la suite des réformes institutionnelles promues par Florence et la manifestation d'un refus de l'ingérence florentine dans cette partie de la Toscane, refus soutenu par Pise et Milan, deux ferventes rivales de la cité dominante. Factions locales, concurrences régionale et péninsulaire se trouvent ainsi strictement imbriquées. La rébellion de Pistoia en 1401 semble s'inscrire dans la même logique. Elle correspond en effet à un rapprochement entre une faction dominante du pouvoir urbain et les Visconti de Milan. Cette nouvelle alliance remet en cause les liens étroits entre les familles aristocratiques de Pistoia et les Florentins et donc la tutelle militaire et politique de ces dernières assurées jusqu'à présent pacifiquement. La peine imposée par Florence est double : la ville se trouve séparée juridiquement de son contado et privées de ses recettes fiscales. Quelques années plus tard, la rédaction du Catasto en 1427-1429, vaste recensement de l'ensemble des biens et des familles des habitants de la ville, du contado et du district florentins, suscite une opposition dans plusieurs villes du Domaine23. Volterra, Colle, Cortone, Montepulciano et, avec moins de virulence, Castiglion Fiorentino refusent en effet de suivre les directives florentines et leurs soixante-cinq représentants sont emprisonnés à Florence et frappés d'amendes. Les conséquences sont importantes pour la ville de Volterra qui se trouve privée de l'administration de son contado et de ses impôts de 1429 à 1431.

23Les deux derniers événements confirment l'importance des moyens de pression dont peut disposer Florence pour contraindre les villes de son Domaine à respecter les règles des contrats établis. La suppression du contado et des entrées fiscales constituent sans aucun doute non seulement un acte de soumission fort comme nous l'avons vu plus haut à Pise mais aussi des armes de dissuasion particulièrement efficaces. Au-delà des sanctions ponctuelles qui restent provisoires, les conflits sont pour Florence l'occasion de renforcer son contrôle sur le territoire et ses populations. Au terme du conflit de 1401, la ville de Pistoia recouvre certes rapidement une partie de ses prérogatives — la gestion de sa fiscalité ainsi que le prélèvement et la répartition des impôts indirects et directs dans son contado -, mais la nature des relations entre les deux cités, jusqu'alors pacifique, et la nature du contrôle florentin se trouvent définitivement modifiées. Les recteurs florentins envoyés pour assurer l'administration du contado restent en effet en place au détriment des citadins qui ont pourtant théoriquement recouvert leurs droits. Les tensions entre ces derniers et les ruraux s'intensifient à l'occasion des multiples ponctions fiscales, Florence s'imposant alors comme un arbitre inefficace. Une nouvelle phase d'intégration dans le Domaine florentin commence ainsi pour Pistoia, sous le signe d'un partage ambigu des pouvoirs.

  • 24 A. Brown, « Il linguaggio dell'impero », in Lo stato territoriale, op. cit., p. 265 ; M. Luzzati, (...)

24La construction d'un État régional qui s'affirme dans la seconde moitié du xve siècle et l'ingérence personnelle des Médicis tendent à modifier la nature des relations et donc des tensions entre la République et chaque cité. Ainsi les conflits qui se succèdent dans le dernier tiers du Quattrocento s'inscrivent dans un nouveau registre et culminent dans ce qu'il convient de désigner comme une crise de la politique territoriale florentine. La révolte de Volterra qui éclate en 1472 en constitue le premier épisode. L'obtention du monopole de l'alun produit dans le territoire de Volterra, précieuse pour l'industrie lanifère, ne constitue vraisemblablement que la toile de fond d'un conflit éminemment politique24. Ce dernier oppose, d'une part, la compagnie chargée de l'exploitation de la mine, financée par deux habitants de Volterra, des Florentins et des Siennois et, d'autre part, la population de Volterra et ses représentants. Laurent de Médicis est invité à arbitrer le litige bien que figurant parmi les investisseurs. Privilégiant ses intérêts personnels, il prend parti pour la compagnie et suscite la colère du peuple de Volterra. Une émeute éclate au cours de laquelle les deux autochtones membres de la faction médicéenne sont assassinés. Laurent prend alors les armes contre la ville avec l'aide du duc d'Urbino. Après un mois de siège, Volterra capitule, elle est mise à sac et gravement punie : cinquante citoyens sont exilés ou faits prisonniers, les mines d'alun passent sous domination florentine et surtout, peine suprême, la ville de Volterra et son territoire se trouvent à partir de cette date intégrés dans le contado florentin. Il ne s'agit plus de tutelle militaire ou d'accords bilatéraux, ni de patronage médicéen mais d'une soumission effective de la cité, plus d'un siècle après les premières incursions florentines dans l'histoire de Volterra.

  • 25 R. Black, op. cit., p. 355.

25Les événements se précipitent et le rythme des révoltes s'accélère à partir de 1494. À cette date le roi de France Charles VIII arrive en Toscane ; Pierre de Médicis, au pouvoir depuis la mort de son père Laurent en 1492, est contraint de quitter Florence et un gouvernement populaire se met en place en décembre qui dirigera la cité jusqu'en 1512 et au retour des Médicis. La ville de Pise profite de cette situation, de l'appui des Français et des forces anti-florentines de la péninsule pour restaurer sa République et se soustraire au pouvoir florentin. La ville conservera son indépendance jusqu'en 1509. La rébellion gagne plusieurs centres mineurs de l'Ouest du Domaine : Livourne, Rosignano, Bibbona. Plus au nord, Sarzana est intégrée dans le territoire de Gênes et Pietrasanta dans l'État de Lucques. Sont aussi concernées des communautés de la vallée occidentale de l'Arno et enfin de nombreuses localités de l'Est de la Toscane. La ville de Montepulciano passe sous domination siennoise de 1495 à 1511. Dans ce contexte, la sauvegarde du Domaine nécessite d'accorder de nouvelles concessions aux villes restées soumises, en particulier Pistoia et Arezzo. L'absence des Médicis entraîne cependant une violente guerre civile dans la cité de Pistoia où la lutte des factions jugulée depuis des siècles par Florence devient sanglante. De son côté, Arezzo, attachée au parti médicéen, se soulève contre le gouvernement florentin en 1502. Les représailles seront dures : quatre-vingts Arétins sont exilés et partent pour Sienne, d'autres se voient confisquer leurs biens. La charge de chancelier échappe désormais aux citadins qui doivent supporter de 1503 à 1514 la présence d'un certain Girolamo Palamedi, venu de la petite cité voisine de Borgo San Sepolcro25.

26Cette crise est sans aucun doute l'expression des secousses qui ébranlent le pouvoir républicain florentin, la chronique florentine et régionale ne faisant alors plus qu'une. Elle est aussi le résultat de la politique clientélaire des Médicis mise en place sous Côme et surtout sous Laurent. L'absence des Médicis de Florence entre 1494 et 1512 bouleverse la pratique des pouvoirs, tissés entre Florence, leur famille et les cités du Domaine, laissant un vide béant. La famille des Médicis restaurera ses pouvoirs à la fois citadins et territoriaux, la ville d'Arezzo parvenant ainsi à recouvrir ses droits en 1514 grâce au pape Léon X.

Un espace multipolaire ?

  • 26 C'est notamment ce que suggère le titre de l'ouvrage de J. Brown, À l'ombre de Florence (ln the Sh (...)

27Si les événements qui frappent les cités du Domaine peuvent être directement associés aux vicissitudes de la République et de la famille des Médicis au tournant du xvie siècle, si les relations qui s'établissent entre Florence et les dirigeants locaux s'inscrivent clairement dans le jeu politique florentin, animé par des dynamiques formelles et informelles similaires, si certains historiens peuvent prétendre dans les dernières lignes de leur monographie locale avoir contribué à l'écriture de l'histoire de Florence26, il convient cependant de distinguer l'histoire de la Toscane et de ces cités d'une part et l'histoire de Florence et de ses relations avec les communautés sujettes. Les historiens de l'État florentin sont d'accord pour considérer la dichotomie classique entre centre et périphérie comme un outil d'analyse désormais désuet. Les travaux les plus récents mettent l'accent sur le rôle fondamental des réseaux de clientèles, indissociables de l'analyse des institutions et des rapports d'ordre administratif. Chaque ville offre un scénario distinct et un processus d'intégration spécifique, qui met en évidence le caractère pragmatique et non linéaire de la politique florentine. Mais l'approche reste toujours bilatérale et la perspective régionale de la formation d'un État territorial composé de nombreuses communautés urbaines et rurales se trouve ainsi tronquée.

  • 27 Ce thème a fait l'objet, pour la période précédente, d'un ouvrage collectif récent ; I podestà del (...)
  • 28 C. Perol, « Territoires urbains et états régionaux en Toscane au début du xve siècle », 5e Confére (...)

28Il convient aujourd'hui de décentrer ou de décentraliser l'histoire de la Toscane pour comprendre la nature des relations qu'entretiennent entre elles les cités sujettes, pour analyser l'évolution de sous-régions ou sous-territoires, l'importance des liens que conservent les communautés frontalières avec les grandes cités qui leur sont proches et entrent en concurrence avec Florence : Lucques, Sienne, Pérouse, Rome... Plusieurs pistes s'ouvrent aux historiens. L'analyse de zones frontalières permet notamment d'observer comment le Domaine s'est formé en concurrence et en opposition avec les autres grands centres qui constituent des pôles économiques ou intellectuels attractifs. En outre, les études menées ces dernières années invitent à approfondir l'analyse des carrières régionales des Toscans qui obtiennent les charges de podestat, de notaire dei danni dati, de juge ou familier du capitaine et constituent un ensemble régional de magistrats27, dont la mobilité contribue à la construction d'une entité régionale. Les échanges sont aussi d'ordre matrimonial et si l'on peut remarquer que les monographies citadines se sont attachées à mettre en relief les alliances de quelques membres des classes dirigeantes locales avec des Florentins, elles ont peu souvent tenu compte des alliances régionales qui mériteraient une analyse d'ensemble. Les échanges d'ordre économique constituent enfin un vaste champ d'études qui reste encore aujourd'hui largement inexploré. Les réseaux de crédit, que nous avons eu l'occasion d'étudier, constituent une approche intéressante qui révèle l'importance des liens financiers non seulement entre les populations locales et les Florentins mais aussi entre Toscans28. Ils permettent notamment de réexaminer la hiérarchie des cités toscanes. Ainsi, une ville qualifiée de secondaire comme San Gimignano s'impose encore au début du xve siècle comme un centre important dans le réseau régional des créances et des échanges.

29L'étude des liens transversaux entre villes du Domaine peut ainsi offrir de nouvelles perspectives de recherche et éclairer d'un nouveau regard la construction d'une région au-delà des schémas d'analyse qui tendent à focaliser l'attention sur la cité dominante. La formation de l'Etat territorial florentin repose certes sur le pragmatisme des gouvernements qui se sont succédé à Florence et sur l'ambition des familles florentines, comme sur l'importance des liens de dépendances réciproques qui ont été tissés entre Florence et chaque communauté du Domaine, mais elle est aussi indissociable des relations extra-florentines qui participent au xive siècle comme au xvie siècle à la construction d'une région multiforme et multipolaire.

Bibliographie

Orientation bibliographique

BENADUSI, Giovanna, A Provincial Elite in Early Modem Tuscany. Family and Power in the Creation of the State, Baltimore, Johns Hopkins University Press, 1996.

BROWN, Judith, In the Shadow of Florence. Provincial Society in Renaissance Pescia, New York- Oxford, Oxford University Press, 1982.

Connell, William J., La città dei crucci. Fazioni e clientele in uno stato repubblicano del Quattrocento, Florence, Nuova Toscana editrice, 2000.

Connell, William J., Zorzi, A.ndrea, eds, Florentine Tuscany. Structures andPractices of Power, Cambridge, Cambridge University Press, 2000.

Connell, William J., Zorzi, Andrea., eds, Lo stato territoriale fiorentino (sec. xiv-xv), ricerche, linguaggi, confronti, Pise, Pacini, 2001.

Perol, Céline, Cortona, pouvoirs et sociétés aux confins de la Toscane, xve-xvie siècle, Rome, École française de Rome, 2004.

Salvadori, Patrizia, Dominio e patronato. Lorenzo dei Medici e la Toscana del Quattrocento, Rome, Edizioni di Storia e Letteratura, 2000.

Notes

1 E. Fiumi, « Volterra e San Gimignano nel medioevo », in G. Pinto, ed., Raccolta di studi, Sienne, 1983 ; D. HERLIHY, Medieval and Renaissance Pistoia. The Social History of an Italian Town, 1200- 1430, New-Haven, 1967 (trad. it„ Florence, 1972).

2 La plupart des auteurs des monographies les plus récentes ont participé au séminaire organisé à San Miniato en juin 1996 par W. J. Connell et A. Zorzi, qui a donné lieu à deux ouvrages : Florentine Tuscany. Structures and Practices of Power, Cambridge, 2000 et Lo stato territoriale fiorentino (sec. xiv- xv), ricerche, linguaggi, confronti, Pise, 2001. R. Black s'est intéressé à Arezzo, L. Fabbri à Volterra, O. Muzzi à Colle Val d'Eisa, C. Perol à Cortone et S. J. Milner a consacré un article à Pistoia, ville également étudiée par W. J. Connell (La città dei crucci. Fazioni e clientele in uno stato repub- blicano del Quattrocento, Florence, 2000). Rappelons les travaux antérieurs de J. Brown sur Pescia (In the Shadow of Florence. Provincial Society in Renaissance Pescia, Oxford-New York, 1982 (trad. it., Pescia, 1989) et de G. Benadusi sur Poppi (A Provincial Elite in Early Modem Tuscany. Family and Power in the Creation of the State, Baltimore, 1996).

3 Ce fond d'archives constitue la principale source de l'analyse de P. Salvadori sur le patronage des Médicis en Toscane qui en fait une présentation dans son introduction (Dominio e patronato. Lorenzo dei Medici e la Toscana del Quattrocento, Rome, 2000, p. 8-12). Pour une analyse quantitative de cette correspondance, W. J. Connell, La città dei crucci..., op. cit., p. 125-134.

4 Pour une description détaillée et événementielle des relations entre Florence et Pistoia, W. J. Connell, op. cit.

5 S. J. Milner, « Capitoli e clienti a Pistoia », in Lo stato territoriale, op. cit., p. 405-430, p. 411-412.

6 L. Fabbri, « Il patriziato fiorentino e il dominio su Volterra », in ibid., p. 385-404, p. 386.

7 F. Salvestrini, « San Miniato al Tedesco : il ceto dirigente e il potere fiorentino », in ibid., p. 527- 550, p. 530.

8 Pour l'ensemble des références concernant la ville de Cortone, C. Perol, Cortona, pouvoirs et sociétés aux confins de la Toscane, xve-xve siècle, Rome, 2004.

9 Sur la politique fiscale de Florence dans son Domaine, G. Petralia, « Fiscalità, politica e dominio nella Toscana fiorentina alla fine del medioevo », in Lo stato territoriale, op. cit., p. 161-188.

10 A. Zorzi, « Lo stato territoriale fiorentino (sec. xiv-xv) : aspetti giurisdizionali », Società e Storia, XIII, 1990, p. 799-825, p. 809 et sq.

11 G. Chittolini, « Statuti e autonomie urbane. Introduzione », in Statuti. città, territori in Italia c in Germania tra medioevo e età moderna, Bologne, 1991 p. 7-45 ; E. fasano guarini, « Gli statuti delle città soggette a Firenze tra Quattro e Cinquecento », ibid., p. 69-72 ; J. Black, « Gli statuti comunali e lo stato territoriale fiorentino : il contributo dei giuristi », in Lo stato territoriale, op. cit., p. 23-46.

12 O. Muzzi, « Le gerarchie locali di Colle Val d'Eisa e la formazione del dominio fiorentino, sec. xIv- xvI », in Lo stato territoriale, op. cit., p. 431-460, p. 442-444.

13 C. Perol, « Gli attori di un compromesso », in ibid., p. 461-477.

14 L. De Angelis, « Ufficiali e uffici territoriali della repubblica fiorentina tra la fine del secolo xiv e la prima metà del xv », in Lo stato territoriale, op. cit., p. 73-92, p. 89.

15 L. fabbri, op. cit., p. 396.

16 P. Salvadori, Dominio e patronato, op. cit., p. 33 et sq.

17 R. Bizzocchi, Chiesa e potere nella Toscana del Quattrocento, Bologne, 1987.

18 P. Salvadori, Dominio e patronato, op. cit., p. 17 et sq.

19 Nombreux sont les travaux consacrés au rôle politique des clientèles à Florence : A. Molho, « Il patronato a Firenze nella storiograiiaanglofona », Ricerche Storiche, XV, 1985, p. 5-16 ; D. Kent, The Rise of the Medici. Faction in Florence, 1426-1434, Oxford, 1978 et « Dinamica del potere e patronato nella Firenze di Cosimo de' Medici », in I ceti dirigenti nella Toscana del Quattrocento, Florence, 1987, p. 49-62 ; D. Kent, F. W. Kent, Neighbours and Neighbourhood in Renaissance Florence. The Distria of the Red Lion in the Fifteenth Century, Locust Valley (NY), 1982 ; C. klapisch-züber, « Compérage et clientélisme à Florence (1360-1520) », Ricerche storiche, XV, 1985, p. 61-76 et La maison et le nom. Stratégies et rituels dans l'Italie de la Renaissance, Paris, 1990 ; R. F. E. Weissman, « Taking patronage seriously : Mediterranean values and Renaissance society », in F. W. Kent, P. Simons, eds, Patronage, Art and Society in Renaissance Italy, Oxford, 1987, p. 25-45.

20 R. Black, op. cit., p. 332.

21 F. Salvestrini, op. cit., p. 548-549.

22 Sur l'histoire régionale et événementielle de la Toscane au Moyen Âge, la principale référence est à ce jour l'ouvrage de M. Luzzati, Firenze e la Toscana nel medioevo. Seicento anniper la costruzione di uno Stato, Turin, 1986.

23 D. Herlihy, C. Klapisch-Zuber, Les Toscans et leurs familles. Une étude du catasto florentin de 1427, Paris, 1978, p. 40-41.

24 A. Brown, « Il linguaggio dell'impero », in Lo stato territoriale, op. cit., p. 265 ; M. Luzzati, op. cit., p. 208-209.

25 R. Black, op. cit., p. 355.

26 C'est notamment ce que suggère le titre de l'ouvrage de J. Brown, À l'ombre de Florence (ln the Shadow of Florence, op. cit.) et ce que déclare W. J. Connell dans les dernières pages de son ouvrage sur Pistoia (La città dei crucci, op. cit., p. 244).

27 Ce thème a fait l'objet, pour la période précédente, d'un ouvrage collectif récent ; I podestà dell'Italia comunale, I, Reclutamento e circolazione degli uffciali forestieri (fine xii sec. -metà xiv sec.), Rome, 2000 ; pour la Toscane, cf. la contribution d'O. Muzzi (« I rettori forestieri a Colle Val d'Eisa, sec. xiii-1350 »).

28 C. Perol, « Territoires urbains et états régionaux en Toscane au début du xve siècle », 5e Conférence européenne d'Histoire urbaine, Cités européennes : réseaux et carrefours, Berlin, 30 août -2 septembre 2000.

Table des illustrations

Titre La crise du domaine florentin, 1494-1512
Légende Cartographie : Alexandre Laclau EHESS
URL http://books.openedition.org/pur/docannexe/image/15788/img-1.png
Fichier image/png, 1,1M

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