Une administration entre cour et ville, les Menus Plaisirs du roi dans le Paris des Lumières
p. 251-265
Texte intégral
1La cour de la fin du xviie et du xviiie siècle a longtemps souffert de l’ombre portée par Versailles, le château incarnant à la fois l’apogée et la décadence du système de cour, mécaniquement mises en relation avec la spatialisation de la discontinuité entre la cour et la ville. L’historiographie récente a au contraire réévalué le fonctionnement de la cour à l’époque des Lumières tout en insistant sur la continuité socio-spatiale, voulue par le souverain et maintenue dans la pratique, entre la cour et la ville1. La sédentarisation de la cour à Versailles se traduit en effet à la fois par l’extension de l’espace palatial et par une très forte intensité de relations avec Paris. De même que les hôtels dédiés aux services du gouvernement se multiplient simultanément à Versailles et dans la capitale2, de même les services dédiés à la gestion symbolique et matérielle de la cour s’étendent aussi bien au plus près du château qu’au plus près de leurs fournisseurs et du public parisien.
2C’est notamment le cas du Garde-Meuble de la Couronne, qui se fait construire par Gabriel un hôtel à la fois fonctionnel et fastueux place Louis XV, mais aussi des Menus Plaisirs du roi qui deviennent au xviiie siècle une véritable organisation au service de la représentation monarchique3. La polyvalence et l’ubiquité de ces héritiers de l’Argenterie médiévale témoignent du développement d’un cérémonial affectant l’ensemble des faits et gestes du souverain en lien avec le déploiement de la vie de cour dans une demeure privilégiée par plusieurs souverains successifs. Sous l’autorité des Premiers Gentilshommes de la Chambre et de l’intendant contrôleur des Menus Plaisirs, ils gèrent et produisent les décors du spectacle monarchique – des « affaires de la Chambre » (lever, toilette) aux rituels d’État (sacre, pompes funèbres) en passant par le théâtre de cour (comédies, opéras, bals). Animant la vie de cour qui se déploie essentiellement à Versailles, mais aussi à Fontainebleau, Compiègne, Choisy, Saint-Hubert et Trianon, les Menus Plaisirs ont pour centre administratif et logistique la ville de Paris. Le fonctionnement concret et symbolique de cette institution manifeste ainsi la persistance de formes d’itinérance de la cour et d’interaction entre milieu urbain et milieu curial, même après la « sédentarisation » de la cour à Versailles. C’est donc la double capitalité propre à la monarchie administrative de droit divin qui s’exprime ici. Les relations que les Menus Plaisirs tissent avec Paris participent ainsi d’une intégration socio-économique, administrative et politique de la cour et de la ville, à travers laquelle se joue également la configuration du service public à partir du service du roi. C’est ce que nous interrogerons en analysant successivement la dépendance des Menus Plaisirs envers les métiers parisiens pour le service de la cour, puis l’implantation à Paris d’un hôtel spécifique à l’administration au milieu du xviiie siècle et, enfin, les usages qui pouvaient être faits de cet espace au service du public.
Un réseau de fournisseurs parisiens entre Maison du Roi et hôtels aristocratiques
3Les comptes de l’administration des Menus Plaisirs permettent d’en connaître les fournisseurs et constituent un remarquable observatoire de la dépendance économique de la cour envers les métiers parisiens. Les courtisans y recouraient pour tenir leur rang à la fois dans l’exercice palatial de leur charge auprès du souverain et dans la gestion de leur hôtel parisien4. La Maison du Roi devait quant à elle pourvoir aux besoins personnels du roi et de la famille royale, mais aussi de tous ceux qu’elle employait à un service honorifique, domestique ou logistique dans le cadre de la mise en œuvre du cérémonial royal. C’est donc l’ensemble de la société de cour, dans toutes ses acceptions, qui s’approvisionnait directement et indirectement auprès de ces marchands et artisans. À cet égard, la configuration spatiale et logistique dans laquelle se déploie la vie de cour à l’époque de la monarchie administrative s’inscrit dans la continuité des logiques médiévales d’une région résidence polarisée par Paris5 – métropole à même d’approvisionner en toutes circonstances une cour nombreuse en produits de première nécessité comme en produits de luxe. Les comptes des Menus Plaisirs témoignent en effet de l’atonie économique de Versailles au xviiie siècle, en tout cas de l’incapacité de cette ville nouvelle à pourvoir aux besoins du souverain.
4Grâce aux mémoires que les fournisseurs remettaient à l’administration et qui ont été systématiquement conservés pour la seconde moitié du xviiie siècle, il est possible de se fonder sur l’auto-identification à laquelle artisans et marchands procédaient afin de les localiser. Il apparaît dès lors clairement que la Maison du Roi s’approvisionnait majoritairement auprès de marchands et d’artisans parisiens : 45 fournisseurs déclarent résider à Paris en 1786, pour 15 à Versailles et 15 autres à Fontainebleau6. Les Parisiens concentraient en outre une part de la valeur totale des achats bien supérieure à celle qu’ils représentaient du nombre total de fournisseurs : les fournitures faites par les artisans et marchands parisiens représentent dix fois la valeur de celles faites par des fournisseurs versaillais. Le déséquilibre observé doit en outre être corrigé à la hausse, ces mentions étant plus fréquentes dans le cas de marchands peu connus et implantés hors de Paris. La proportion de fournisseurs parisiens parmi les 190 fournisseurs était donc en réalité encore plus importante.
5Si les fournisseurs installés dans les villes de résidence de la cour, qu’il s’agisse de Versailles, de Fontainebleau ou de Compiègne, sont bel et bien sollicités par l’administration curiale, c’est en fait pour assurer le fonctionnement de cette dernière et non pour satisfaire les besoins du roi et de la famille royale. Des artisans vitriers, couvreurs ou paveurs vont ainsi pourvoir à l’entretien des « magasins » des Menus Plaisirs dans ces villes, afin de garantir la viabilité de ces espaces de stockage et de fabrication. Ceux qui fournissent directement le matériel nécessaire pour les fêtes et les cérémonies, a fortiori pour le soin du corps du souverain, sont en revanche parisiens. Les fournisseurs implantés à Paris ne détiennent donc pas seulement la plupart des marchés conclus avec la cour : réalisant leurs transactions dans une logique d’échanges encastrés socialement où la qualité des vendeurs et des acheteurs participe de la valeur des biens, ils exercent une domination qualitative sur les fournisseurs versaillais et bellifontains7. Le recours aux métiers parisiens participe d’un système d’approvisionnement lié à un système de distinction sociale. Le roi s’avère ainsi prioritairement fourni par les artisans les plus réputés sur le marché parisien, mais aussi les mieux intégrés par leurs titres et privilèges au corps des officiers de la Maison du Roi ou à l’administration des Menus Plaisirs – qui délivrait au xviiie siècle ses propres brevets.
6Même si on constate une convergence entre le nombre de métiers mobilisés et le nombre de fournisseurs – par exemple 118 métiers différents pour 153 fournisseurs en 1762 –, les Menus Plaisirs ne pouvaient fonctionner avec un seul représentant attitré pour chaque métier. La diversification était nécessaire pour respecter les règles de convenance, c’est-à-dire d’une hiérarchisation des choses en fonction de celle des êtres et des circonstances. Apparier le statut juridique et social des fournisseurs à celui des destinataires des objets, s’avérait en outre d’autant plus nécessaire que cette institution prenait aussi bien en charge des cérémonies à caractère sacré que des fêtes profanes, et que son implication croissante dans des productions théâtrales avait simultanément entraîné le développement d’un personnel moins intégré au corps des officiers de la Maison du Roi, et d’une politique d’achat de biens à l’usage direct des comédiens et des artistes8.
7Le groupe des fournisseurs des Menus Plaisirs s’est donc toujours trouvé dénué d’homogénéité socio-juridique. Des fournisseurs non privilégiés, ne jouissant d’aucun titre distinctif, ni d’aucun monopole de l’administration curiale approvisionnaient la cour à la fin du xviie siècle et n’ont cessé de voir leur poids s’accroître par la suite. Les administrateurs des Menus Plaisirs se montrent effectivement tout aussi pragmatiques que sensibles aux logiques symboliques et juridiques des échanges. Outre la qualité intrinsèque des produits, la capacité à répondre rapidement à la demande, voire la recherche de meilleurs prix deviennent des critères de choix des fournisseurs et d’attribution de leurs produits à tel ou tel usager à la cour. On retrouve une part minoritaire, mais nettement plus significative du point de vue de la valeur totale des biens achetés, des fournisseurs des Menus Plaisirs des années 1762 et 1786 dans une série d’almanachs de commerce tels que l’Almanach Dauphin – ainsi de marchands-merciers ou marchands d’étoffes comme Le Normand ou Buffault9. Or ces fournisseurs ne bénéficiaient pas systématiquement d’un statut distinctif. Certains d’entre eux l’acquièrent, d’autres non, mais la plupart demeurent au service de la cour jusqu’à la fin de l’Ancien Régime, la réputation acquise sur le marché parisien participant des dynamiques de stabilisation et de recomposition du groupe des fournisseurs. On observe ainsi la tension entre une logique somptuaire et une logique gestionnaire résultant du double effet du dynamisme économique de Paris et des contraintes financières pesant sur l’État royal dans la seconde moitié du xviiie siècle.
8La manière dont les marchands et artisans parisiens s’auto-qualifient permet également de repérer leur localisation exacte dans la ville et de mettre en évidence une topographie des Menus Plaisirs, qui en traduit spatialement les logiques d’achat de « biens courants et non [majoritairement] de fantaisie10 ». L’aire de fonctionnement que dessine l’implantation des différents fournisseurs se compose en effet de plusieurs ensembles11. On trouve en premier lieu les quartiers d’implantation traditionnelle des charpentiers et des métiers du bâtiment – cœur historique de la ville, faubourg Saint-Antoine. Les Menus Plaisirs les mobilisent en effet intensément en fournissant à la cour des décors architecturés de plus en plus de complexes, non seulement pour les cérémonies et les fêtes, mais encore pour les spectacles ordinaires de la cour12. Se superposent à ce premier espace les anciens et les nouveaux quartiers de résidence nobiliaire, où se concentrent marchands et artisans spécialisés dans les biens de consommation haut-de-gamme : Marais, île de la Cité, faubourg Saint-Germain, faubourg Saint-Honoré. S’ajoutent enfin les environs de l’hôtel spécifiquement construit pour les Menus Plaisirs dans les années 1760 au cœur des quartiers neufs de l’Ouest de la capitale, comme la Chaussée d’Antin. Dans la deuxième moitié du siècle, la multiplication et la diversification des fournisseurs, qui accompagnent l’intégration de la production au cœur de cet hôtel, ainsi que l’augmentation des dépenses des Menus Plaisirs tendent à renforcer la concentration des marchands et artisans dans cette zone. L’hôtel des Menus Plaisirs fonctionne en effet comme un pôle de consommation qui se rapproche des fournisseurs autant qu’il les attire et comme une plateforme de redistribution des biens acquis et transformés vers les différents espaces du cérémonial royal, notamment les villes de résidence.
L’hôtel des Menus Plaisirs à Paris : l’administration en ses murs, le roi en sa ville
9Si le roi vient fort peu en personne à Paris au xviiie siècle, la ville n’en fait pas moins l’objet d’un important investissement par les institutions monarchiques, et non par les seules élites nobiliaires. Aménagements du palais du Louvre, aménagements urbains, explosion de l’habitat administratif caractérisent un processus au cœur duquel se déploie la politique immobilière des Menus Plaisirs. L’administration n’avait d’ailleurs pas déserté Paris lors de l’installation de la cour à Versailles, les échanges qu’elle entretenait avec les métiers urbains l’ayant amenée à conserver des espaces de conservation et de fabrication dans les demeures royales de la capitale.
10C’est à la fin du xviie siècle que l’importance prise par les fêtes de cour, mais aussi par les pompes funèbres13, avait entraîné la spécification de ces espaces désignés sous le terme de « magasins », avant que n’émerge progressivement un personnel se consacrant à leur entretien et qu’ils ne deviennent le point d’ancrage des officiers, des employés et des artisans impliqués dans la prise en charge de la représentation royale par les Menus Plaisirs. Si l’hôtel des Menus Plaisirs construit au tournant des années 1760 peut être considéré comme l’un des symboles des mutations administratives et urbaines du Paris des Lumières, il ne s’en inscrit donc pas moins dans l’histoire longue de l’institution curiale et de la région résidence que l’Île-de-France continue d’être pour le roi et au sein de laquelle des magasins des Menus sont disséminés et eux aussi remaniés.
11Si une rue dédiée à l’intendant, puis commissaire des Menus Plaisirs de 1756 à 1792, Papillon de La Ferté, se trouve aujourd’hui à proximité de la rue Bergère où fut élevé ce nouvel hôtel, c’est dès les années 1740 que se fait jour un mouvement de fond destiné à améliorer la conservation des effets et à structurer un véritable réseau de locaux fonctionnels. Le premier des magasins à être profondément restructuré est d’ailleurs celui de Versailles, notamment à l’occasion des doubles noces du dauphin, fils de Louis XV, en 1745 et en 174714. Officialisant à la fois la charge de Garde-Magasin général basé à Paris et celles de ses aides, implantés dans les résidences royales, le règlement pris en 1752 confirme de même la complémentarité des locaux parisiens et des locaux existant dans les différentes demeures royales :
« Il sera incessamment établi un Garde Général des magazins de l’argenterie et menus plaisirs lequel donnera bonne et suffisante caution de sa gestion et aura sous luy deux aides à son choix, l’un pour servir aux magazins de Paris et l’autre à ceux de Versailles, fontainebleau et autres maisons Royales, ou il y auroit des magazins établis15. »
12Les magasins parisiens s’avèrent en effet doublement nécessaires, comme interface avec les artisans parisiens et comme plate-forme de redistribution des matériaux et des objets, non seulement vers Versailles, mais aussi vers les autres résidences royales que la monarchie est loin d’avoir délaissées au xviiie siècle, la cour faisant notamment des séjours réguliers à Compiègne et à Fontainebleau. C’est donc au service d’un système spatial et cérémoniel largement hérité que l’administration des Menus Plaisirs met des moyens gestionnaires inédits en se faisant construire un hôtel spécifique. Ce chantier est de fait assez exceptionnel à une époque où l’on se contentait fréquemment de récupérer des bâtiments existants. Après les avoir évincés des Tuileries puis du Louvre16, après les avoir installés dans différents bâtiments loués quai Conti17, on renonça à acheter pour les Menus Plaisirs les terrains occupés en dernier lieu à la Chaussée d’Antin18, afin de lancer un chantier dans une zone encore plus éloignée du centre historique19 :
« Tous ces Batiments seroient toujours mal tournés, mal dégagés par des cours trop étroites et la depense de l’acquisition des Reformes et des nouvelles constructions excederoient celles a faire pour l’etablissement en entier dans un terrein vague.
D’ailleurs quoy qu’il ne soit pas possible d’avoir au centre de Paris un corps de bâtiment aussi considerable, l’endroit ou l’on propose la construction d’un nouvel hotel est beaucoup plus à portée des quartiers ou sont les artistes et ouvriers qui ont relation avec les Menus20. »
« Sa Majesté jugea a propos d’acheter du S. L’Evesque Garde Magazin, un grand terrein rue Bergère, sur lequel Elle a fait construire un hôtel et Magazin assez vastes pour contenir les effets servans aux spectacles et aux catafalques […] ce Bâtiment fut commencé en 1760 : il fut meublé dans le courant de l’année 1764 : Les Bureaux Etablis et les Logemens habités en 176521. »
13Confondant la même année acquisition des terrains par le souverain et début des travaux, le deuxième mémoire accentue le caractère rationnel de la décision tout en la portant au crédit de l’autorité royale. Il estompe en outre la longue histoire des espaces des Menus Plaisirs pour souligner la rupture que matérialise le nouvel hôtel, alors même que les travaux furent officiellement confiés à Lévêque – pour qui la charge de Garde-Magasin Général avait été créée dès 1752 –, afin de capitaliser sur ses investissements au cœur de ce dispositif d’échanges et de production que constituaient les Menus Plaisirs et que cette appropriation du projet par l’administration – sans parler de la régularisation de la propriété royale – intervint d’ailleurs plusieurs années après qu’il eut entrepris acquisitions et travaux. Au-delà du brouillage des circuits de décision, notamment au nom des relations de confiance personnelle qui existaient par exemple entre Lévêque et le duc d’Aumont, alors Premier Gentilhomme de la Chambre, la construction de l’hôtel parachevait le processus enclenché par les restructurations opérées à Versailles et à Fontainebleau et répondait à des besoins avérés. C’est pourquoi elle put finalement être défendue par l’administration qui présenta à la Chambre des Comptes un bilan global de ses choix immobiliers où la fiction de la décision royale et du projet concerté exacerbait le caractère novateur de la mise en œuvre d’espaces consacrés à une gestion rationalisée de la production matérielle des instruments de la représentation royale. Les lettres patentes de 1769 qui valident l’ensemble des dépenses et des opérations présentent ces dernières comme une triple réponse aux spécificités des missions des Menus Plaisirs, à l’accroissement de leurs tâches, notamment du fait de l’ampleur (re)prise par les représentations théâtrales dans la vie de cour, et aux contraintes censées peser sur les dépenses du fait de l’endettement de l’État. Elles développent donc un argumentaire que l’on retrouve dans des textes antérieurs et postérieurs pour justifier les compétences, les dépenses et les choix de l’administration des Menus Plaisirs érigés en véritable politique :
« Sur ce qui nous a été représenté que le manque de Magazins suffisants pour les services multipliés de nôtre argenterie, Menus, Plaisirs et affaires de nôtre chambre avoit jusqu’à présent donné lieu à des dépenses considérables, soit par l’impossibilité de conserver les effets destinés à l’exécution des fêtes, Pompes, Cérémonies, et autres parties affectées à ces différents services, soit par l’extrême difficulté de faire usage desdits effets lorsque les occasions le requéroient…
Nous aurions en même tems considéré que nombre des effets qui étoient cy devant déposés tant nôtre château du Louvre qu’en la salle des Machines de celuy des Thuileries en avoient été transférés lors de la destination par nous faite des dits chateaux pour d’autres objets, dans des endroits, qui quoi que tenus à gros loyers ne se sont point trouvés asses spatieux pour prévenir des inconveniens auxquels nous étions depuis longtems dans l’intention de remédier, ce qui nous auroit determinés à ordonner tant à Paris, Versailles, Choisy et fontainebleau, qu’en quelques autres de nos maisons Royales l’établissement de magazins, dont l’étendue peut contenir les Tentes, Maisons de Bois, et autres parties essentiellement utiles pendant notre séjour es dites Maisons ainsi que les Décorations, machines, Lustres, Girandoles, Habillements de Théâtre et autres dépendances du service relatif à nos spectacles.
Et d’autant que prenant le parti de former lesdits Etablissements nous étions certains de garantir lesdits effets d’un dépérissement aussi préjudiciable à nos intérêts que nuisible au bien de notre service, nous aurions en conséquence donné successivement nos ordres pour la construction des Bâtimens nécessaires à la garde, et conservation de tous les objets dependants du détail de nos Menus22. »
14L’argumentaire placé en préambule des lettres patentes synthétise ainsi les différents enjeux au cœur de la stratégie immobilière des Menus Plaisirs. Intervenant à tous les moments de la vie de cour, qu’ils soient exceptionnels ou quotidiens, et dans tous ses espaces, l’hôtel parisien et son réseau de magasins constituent d’abord une amplification de leur polyvalence et de leur ubiquité. La mise au point de locaux à la fois suffisamment grands pour contenir matériaux et accessoires nécessaires à tous les types de circonstances, émancipés des contraintes du temps curial et connectés à l’espace palatial conditionne donc l’efficacité de l’administration des Menus Plaisirs. Ce paradoxe est particulièrement bien illustré par l’exemple des tentes du roi, maisons de bois et autres abris temporaires, dont les Menus étaient chargés dans le cadre de leur participation au fonctionnement de la Chambre. L’affirmation de la propriété du roi sur ses propres effets, la capacité de ses serviteurs à pérenniser ces derniers passait par une opération de soustraction à leur accaparement par les courtisans en vue d’usages particuliers23. C’est ce mécanisme qui avait prévalu à Versailles et à Fontainebleau et qui fut ensuite poussé à son paroxysme avec la concentration des moyens à Paris, où des sommes bien plus considérables furent mobilisées pour la mise en œuvre d’un bâtiment conçu à l’aune des missions cérémonielles et des objectifs gestionnaires des administrateurs24.
15L’hôtel parisien avait en effet vocation à permettre l’articulation de toutes les compétences des Menus Plaisirs dans la représentation royale, de manière à pouvoir remployer les matériaux et les biens transformés d’une pompe funèbre à l’autre, d’un spectacle à un autre, voire d’un type de circonstance à un autre. Au-delà des économies que les remplois étaient censés favoriser, il s’agissait de réaffirmer l’emprise de l’administration curiale sur les processus mêmes de fabrication, qui ne pouvaient être simplement délégués à des artisans extérieurs. Les magasins n’étaient pas seulement des espaces de conservation, mais des « Emplacemens assez vastes pour les travaux des Peintres et pour ceux des Tailleurs, Couturieres et Brodeuses Employez pour l’Etablissement des grands spectacles25 ».
16Le choix de l’espace parisien pour implanter un hôtel fonctionnel est en effet solidaire d’un processus de transformation d’une ancienne institution en véritable organisation, dotée d’un personnel propre – dont la mise en forme et en liste s’adosse au réseau des magasins au sein duquel ils sont affectés – et d’une capacité à intégrer la production matérielle du cérémonial. Pour ce faire, les moyens spatiaux furent vraisemblablement consolidés par des ressources juridiques en recourant à une forme de contractualisation dite « par économie ». Ce type de marché se caractérise par les modalités de choix de l’entrepreneur – qui exclut l’adjudication pour privilégier des fournisseurs connus – et par l’intervention directe du commanditaire dans la conduite des travaux – raison pour laquelle ce dernier pouvait établir des listes de paiement à la journée26. Outre les occurrences de l’expression « par économie » dans les états de la dépense, c’est la grande fréquence des mentions de paiements à la journée ainsi que la présence de listes annexées aux mémoires des entrepreneurs des Menus Plaisirs qui indique la systématisation du recours à cette forme de contractualisation. Elle permettait en effet de faire travailler les fournisseurs et leurs ouvriers habituels comme exceptionnels dans l’enceinte même des magasins. Dans les faits, le nouvel espace s’avère à même d’accueillir des chantiers où travaillaient des centaines de personnes27. Les Menus Plaisirs agissent ainsi à l’aune de l’administration centrale qui y recourait pour la construction des bâtiments publics et les grands chantiers d’infrastructure. Ils participent ainsi à la construction par l’État royal et ses agents de l’intégration organisationnelle dans le cadre du double service du roi et du public en outil essentiel de la réforme et de la modernisation. Il est à cet égard significatif que les lettres patentes de 1769 insistent sur le choix du recours au contrat « par économie », afin de garantir la satisfaction des objectifs gestionnaires assignés à ce projet :
« Mais pour que la distribution desdits logements fut faite de maniere que chaque attelier et magazin particulier se trouva conforme à sa destination, nous avons préféré de faire faire tous les dits ouvrages par économie au lieu de marchés fixes, attendu qu’en confiant la direction d’aménagemens de ce genre à des gens au fait dudit détail, nous étions également certains d’eviter des changements et reconstructions contraires à nos vues, et de jouir sans délai, ainsi que nous l’avons récemment éprouvé, de tous les avantages résultants desdits Etablissements28. »
17Espace de conservation et de fabrication, l’hôtel est aussi un espace administratif défini par son rôle d’interface entre la cour et la ville ainsi qu’entre service du roi et service du public. C’est ce que révèle clairement l’énumération des différentes composantes des nouveaux magasins :
« Sa Majesté […] a fait construire un hôtel et Magazin assez vastes pour contenir les effets servans aux spectacles et aux catafalques : un Theatre pour les repetitions des Opera, une salle d’assemblée pour MM. les Premiers gentilshommes de la Chambre : des logements pour le Garde Magazin et les Commis nécessaires aux Travaux29. »
18Si l’hôtel est le lieu où les artisans et les marchands livrent ou font fabriquer matériaux et biens transformés sous la surveillance du Garde-Magasin Général et des autres chefs des Menus, c’est aussi l’endroit où l’intendant des Menus et les Premiers Gentilshommes de la Chambre peuvent se réunir. Or leurs débats et décisions ont non seulement trait à la gestion administrative et matérielle de la mise en œuvre du cérémonial royal, mais aussi à l’exercice de la tutelle monarchique sur les théâtres privilégiés. Destiné aux répétitions des spectacles de cour – de manière à éviter les frais de déplacement des artistes tout en garantissant la qualité des représentations –, le théâtre pouvait plus globalement servir à l’évaluation des comédiens du roi, dans la perspective d’une plus grande implication du pouvoir dans la police et la formation de ces troupes de moins en moins exclusivement tournées vers le service personnel du souverain et celui de la cour. La mise en place d’un hôtel spécifique au moment du renforcement du contrôle des Menus sur les comédies facilita les réformes des années 1780 qui accentuèrent la tutelle monarchique sur l’Académie royale de musique tout en mettant à sa disposition les magasins de la rue Bergère, à la fois pour user de leur contenu et pour y développer l’École de chant, de danse et de déclamation30. La matérialisation de l’administration curiale par un lieu fonctionnel implanté au cœur du Paris en plein expansion, à proximité des artisans, mais aussi des financiers bailleurs de la monarchie, eut donc doublement vocation à la relégitimer. Elle fut censée en garantir à la fois la bonne gestion des moyens et leur redéploiement, sous son contrôle, à destination des sujets.
De la ville de cour à la capitale culturelle ?
19Bien que l’administration curiale se soit isolée des complexes palatiaux en désertant le Louvre et les Tuileries, elle avait conservé dans la capitale une monumentalité à même de proclamer sa participation au fonctionnement de l’État et à la représentation du prince. Au-delà de la fonctionnalité de l’édifice, ce sont donc les modalités de la visibilité de l’administration royale qui sont en jeu avec l’hôtel des Menus. Les plans et dessins en soulignent le caractère monumental mais « sans faste », comme l’avait souhaité Papillon de La Ferté31.
20Les bâtiments acquièrent une certaine noblesse, du fait de la combinaison de leurs dimensions à une façade principale ornementée de bossages – caractéristique depuis la Renaissance des demeures patriciennes – et à un portail surmonté d’un tympan sculpté. Construits dans l’esprit des théories de « l’architecture parlante32 », ils furent dénoncés comme d’autres bâtiments publics pour déroger au principe de convenance. Un extrait des Mémoires secrets en critique par exemple la visibilité excessive. Contraire à la discrétion censée s’attacher aux locaux utilitaires33, elle serait symptomatique d’une regrettable confusion entre édifice public et monument :
« Le public s’étoit flatté qu’on auroit saisi cette occasion pour achever une partie du Louvre, où il sembloit qu’on pût placer [l’hôtel de la Monnaie] : le desir qu’on a de voir à sa perfection cet immortel monument, fait faire des vœux à tous les bons citoyens pour qu’on prenne enfin les moyens d’y parvenir ; ce qui s’exécuteroit facilement en peu de temps, en y mettant successivement des objets utiles que l’on place journellement ailleurs avec beaucoup de dépense, et sans rien ajouter à la beauté et à la magnificence de la ville comme l’hôtel des menus plaisirs du roi, le garde-meuble de la couronne, etc et d’autres qu’on se propose de faire34. »
Fig. 1. – Élévation du bâtiment principal des Menus Plaisirs sur la rue Bergère. Arch. nat., Cartes et Plans, NIII Seine 848, n° 11.

Fig. 2. – Porte d’entrée des Menus Plaisirs sur la rue Bergère. Ibid.

21Dans un contexte de rénovation urbaine et d’embellissement de Paris, le public se prononcerait en faveur de l’aménagement du Louvre, tant à rebours de l’éloignement des institutions monarchiques de la ville, que de leur éviction de l’espace palatial traditionnel en son sein. C’est au Louvre que les Menus Plaisirs et le Garde-Meuble avaient autrefois trouvé abri, c’est là qu’ils devaient rester35. C’est au cœur de ce palais, où ils auraient dû continuer à faire cohabiter leurs travaux avec ceux des Académies, qu’ils trouvaient leur légitimité. De fait, l’administration centrale, a fortiori curiale, était d’autant plus soupçonnée de dérives bureaucratiques et somptuaires, qu’elle s’émancipait spatialement des résidences royales et aristocratiques, au nom d’une rationalisation de sa gestion36.
22À la fois centre administratif et lieu de curiosité, l’hôtel des Menus Plaisirs apparaît dans les guides de voyage aux côtés des hôtels de la Monnaie, de la Ferme ou des Postes, eux-mêmes toujours mêlés aux hôtels particuliers au sein de la catégorie hybride des « hôtels ». Son signalement met pourtant l’accent sur sa dimension artistique et culturelle :
« Hôtel des Menus Plaisirs du Roi, rue Bergere, Fauxbourg Montmartre, au-delà des Boulevards. On y voit une Salle des Spectacles dans laquelle on fait les répétitions des Opéra & Ballets qui se jouent devant le Roi. C’est aussi l’entrepôt de toutes les machines qui servent aux divertissements destinés pour Sa Majesté37. »
23En limitant les allers-et-venues des artistes qu’ils faisaient répéter à Paris, les Menus Plaisirs évitaient d’autant moins d’éloigner de leur public des comédiens prisés que ces répétitions pouvaient être ouvertes au public. Publier dans la littérature apodémique38 la tenue à Paris des répétitions des spectacles de cour, c’était donc affirmer simultanément la supériorité des plaisirs du roi et la capacité du souverain à les partager avec ses sujets, dans la lignée de la politique théâtrale voulue par Richelieu, puis par Louis XIV.
24Loin de symboliser le seul asservissement du goût de la cour à celui de la ville, l’hôtel des Menus Plaisirs devenait un lieu de sélection et d’appropriation du répertoire par la monarchie. En y organisant en 1765 une représentation d’un opéra de Mondonville, Thésée, pour décider avec l’aide de « connoisseurs et amateurs » s’il le ferait donner à la cour39, le maréchal de Richelieu affirmait que le service du roi, y compris par l’organisation de ses divertissements, relevait de l’appareil d’État. Ces choix devaient s’effectuer dans l’espace de l’administration et non plus (exclusivement) chez des particuliers, fût-ce dans la demeure de tel ou tel des Premiers Gentilshommes de la Chambre.
25Cette fonction en faisait un espace de transaction entre le pouvoir royal et un public de spectateurs se revendiquant de plus en plus comme des citoyens. L’administration des Menus étant impliquée dans la censure du répertoire dramatique du fait de la tutelle qu’elle exerçait sur les théâtres privilégiés40, l’hôtel pouvait offrir un terrain où négocier des accommodements, comme ce fut le cas à propos du Mariage de Figaro41. Les autorités compétentes étant divisées – le lieutenant de police Le Noir et le Garde des Sceaux Miromesnil étaient opposés à l’autorisation des représentations ; le baron de Breteuil, secrétaire d’État de la Maison du Roi, y était plutôt favorable –, la Correspondance de Grimm rend compte du compromis qui aurait été trouvé dans la préférence donnée à l’hôtel des Menus sur le Théâtre-Français comme lieu de représentation42. L’œuvre de Beaumarchais ne fut donc pas seulement étourdiment prise en charge par Marie-Antoinette et la noblesse de cour à Trianon, une transaction officielle autour de l’œuvre s’ébaucha à Paris même dans l’espace des Menus. Afin d’être épurée et amendée, celle-ci fut même jouée devant un comité choisi d’hommes de lettres, au sein duquel siégeait Chamfort, membre de l’Académie française et auteur pensionné par les Menus Plaisirs43.
26La salle de répétition offrait en fait dans la seconde moitié du xviiie siècle une salle de spectacle supplémentaire à l’ensemble des trois troupes privilégiées par le roi – a fortiori dans le contexte de mise en commun des moyens matériels avec l’Opéra et son école, érigée en École de chant, de danse et de déclamation. En dénigrer l’acoustique et la qualité – pourtant dues à une structure acquise auprès de l’Opéra-Comique, après sa fusion avec les Italiens44 –, en souligner les limites en termes d’usages artistiques, notamment lorsqu’elle était temporairement utilisée par telle ou telle troupe privilégiée45, devenait alors un moyen indirect de critiquer l’administration royale des arts46.
Conclusion
27L’hôtel des Menus constitue donc un lieu dont la complexité des fonctions et des usages est à l’aune des attributions de l’administration qu’il incarne et qui se trouvait au service du roi et du public. Espace conçu au regard des exigences de la coordination de ceux qui y travaillaient, les magasins n’étaient pas que le lieu de la production matérielle d’une représentation royale destinée à être confisquée par l’espace versaillais. Ils donnaient aussi à voir les ressorts de la représentation de cette figure royale à la fois princière et étatique, invisible et démultipliée, qu’avait inventée Louis XIV et que les Menus Plaisirs se vouaient à réinventer pour la perpétuer. Cette figure s’y déclinait dans l’espace même de l’hôtel, centre administratif et productif, mais aussi dans les « effets » qui y étaient conservés. En affirmant la propriété du roi sur ces matériaux et ces objets, c’est-à-dire en les retirant d’une circulation sociale à la cour sous forme de dons, les Menus Plaisirs contribuaient à les constituer en collection. Comme au Garde-Meuble, l’affirmation du statut juridique particulier de ces objets ouvrait la voie à leur patrimonialisation et à leur exhibition devant le public47. En faisant visiter les magasins48, en exhibant les biens nécessaires au service de manière permanente – les modèles et les maquettes49 – ou temporaire, comme les couronnes et les insignes royaux et chevaleresques que les Menus Plaisirs remettaient à neuf pour le sacre du souverain50, en associant ce patrimoine matériel au patrimoine immatériel du répertoire des théâtres privilégiés – nos futurs « classiques » inventés par leurs multiples représentations à la cour et à la ville au croisement desquelles se trouvait la salle de spectacle de l’hôtel –, grands officiers et administrateurs de la Maison du Roi contribuaient ainsi à la consolidation du statut de Paris comme capitale culturelle51.
Notes de bas de page
1 Lilti A., Le monde des salons. Sociabilité et mondanité à Paris dans la seconde moitié du xviiiie siècle, Paris, Fayard, 2005.
2 Coquery N., L’espace du pouvoir. De la demeure privée à l’édifice public. Paris 1700-1790, Paris, Seli Arslan, 2000.
3 Lemaigre-Gaffier P., Du cœur de la Maison du Roi à l’esprit des institutions. L’administration des Menus Plaisirs au xviiie siècle, thèse de doctorat, université Paris 1, 2011 (publiée sous le titre Administrer les Menus Plaisirs du Roi. La cour, l’État et les spectacles dans la France des Lumières, Ceyzérieu, Champ Vallon, 2016). Les références dans cet article sont à la thèse.
4 Coquery N., L’hôtel aristocratique. Le marché du luxe à Paris au xviiie siècle, Paris, Publ. de la Sorbonne, 1998.
5 Voir l’article de Boris Bove dans le même volume.
6 Arch. nat., O13077-3080.
7 Pour une synthèse, voir par exemple Grenier J.-Y., L’économie d’Ancien Régime. Un monde de l’échange et de l’incertitude, Paris, Albin Michel, 1996.
8 Lemaigre-Gaffier P., op. cit., t. II, p. 265-283.
9 Almanach Dauphin, Paris, 1777 ; Tablettes royales de renommée ou de Correspondance et d’indication générale des Principales Fabriques, Manufactures et Maisons de Commerce, Paris, Royer, 1786 et 1788.
10 Arch. nat., O1 2809, « Mémoire ».
11 Sur la géographie de la boutique parisienne, voir Coquery N., L’hôtel aristocratique…, op. cit., et Ead., Tenir boutique à Paris au xviiiie siècle. Luxe et demi-luxe, Paris, CTHS, 2011.
12 Lemaigre-Gaffier P., op. cit., t. II, p. 265-283.
13 Sabatier G. et Saule B. (dir.), Le roi est mort ! Louis XIV, 1715, Paris-Versailles, Tallandier-Château de Versailles, 2015.
14 Sur ce point, signalons cependant que la documentation, certes souvent ambiguë quant à la nature des travaux et « constructions », fait aussi du magasin de Versailles (la fameuse « salle » des Menus Plaisirs où s’ouvrirent les États-Généraux en 1789) un bâtiment original.
15 Arch. nat., O1 2809, « Règlement que le Roy veut et ordonne être observé par les Intendants et controlleurs généraux de l’Argenterie, Menus, Plaisirs et affaires de la Chambre de SM et à l’égard d’iceux, comme aussi par le trésorier desdites parties et par le Garde général des magazins de l’argenterie et menus », art. 8.
16 Arch. nat., O1 2812A, dossier n° 1, « Etablissement des differens Magazins des Menus plaisirs du Roy ».
17 Probablement là où se trouvaient les magasins du Garde-Meuble installés depuis le xvie siècle dans l’hôtel du Petit-Bourbon (Castelluccio S., Le Garde-Meuble de la Couronne et ses intendants du xvie au xviiie siècle, Paris, CTHS, 2004, p. 22-24).
18 L’importance des frais du déménagement de 1758 à la Chaussée d’Antin peut être connue par les états de dépenses de 1758 (Arch. nat., O1 2866) et les pièces justificatives correspondantes (Arch. nat., O1 3002). Le loyer en est mentionné dans les états de dépenses de 1762 (Arch. nat., O1 2886, 4e état, loyer de 7 000 livres tournois pour une maison à Paris, « chaussée d’Antin au coin du Boulevard, servant de magazin des menûs »).
19 Étienne P., Le faubourg Poissonnière. Architecture, élégance, décor, Paris, Délégation à l’Action artistique de la Ville de Paris, 1986.
20 Arch. nat., O1 2812A, dossier n° 1, mémoire anonyme s. l. n. d.
21 Ibid., « Etablissement des differens Magazins des Menus plaisirs du Roy ».
22 Arch. nat., O1 2812A, dossier n° 1, « Projet de lettres patentes ».
23 Arch. nat., O1 3224-3232.
24 Dans le « Détail sommaire des Parties des depenses concernant les acquisitions, constructions, Réparations et autres frais relatifs au Batiments Pour les Magazins des Menus Plaisirs du Roy » (Arch. nat., O1 2812A, dossier n° 5), le coût des acquisitions s’élevait en 1767 à 160318 livres tournois pour Paris, 60300 livres tournois pour Choisy et 31212 pour Compiègne ; celui des travaux à 1055273 livres tournois pour Paris, 72837 livres tournois pour Choisy, 127518 livres tournois pour Fontainebleau et 10894 pour Versailles.
25 Arch. nat., O1 2812A, dossier n° 1, « Etablissement des differens Magazins des Menus plaisirs du Roy ».
26 Condette-Marcand A.-S., Bâtir une généralité. Les travaux publics dans la généralité d’Amiens au xviiie siècle, Paris, Comité pour l’histoire économique et financière de la France, 2001.
27 Lemaigre-Gaffier P., op. cit., p. 197-205.
28 Arch. nat., O1 2812A, dossier n° 1, « Projet de lettres patentes ».
29 Ibid., « Etablissement des differens Magazins des Menus plaisirs du Roy ».
30 Lemaigre-Gaffier P., op. cit., t. II, p. 351-354 ; Serre S. et Giroud V. (dir.), La réglementation de l’Opéra de Paris (1669-2015) : édition des principaux textes normatifs, Paris, École nationale des Chartes, à paraître ; Delattre Emmanuelle, Les enfants de Terpsichore. Histoire de l’École et des élèves de la danse de l’Opéra de Paris (1783-1913), thèse de doctorat, université Paris-Saclay (UVSQ), 2016.
31 Papillon de La Ferté D. P. J., Journal des Menus Plaisirs du Roi. 1756-1780, Clermont-Ferrand, Paléo, p. 51.
32 Coquery N., L’espace du pouvoir…, op. cit., p. 165-171. Sur l’« architecture parlante », voir Pérouse de Monclos J.-M., Histoire de l’architecture française, t. II : De la Renaissance à la Révolution, Paris, Mengès/Caisse nationale des Monuments historiques et des sites, 1989, p. 407-434 ; Rabreau D., Claude Nicolas Ledoux, Paris, Monum/Éditions du Patrimoine, 2005.
33 Morin C., Au Service du château. L’architecture des communs des châteaux en Île-de-France au xviiie siècle, Paris, Publ. de la Sorbonne, 2008.
34 Bachaumont L. (Petit de), Mémoires secrets pour servir à l’histoire de la République des Lettres depuis 1762 jusqu’à nos jours ou Journal d’un observateur, Londres, Adamson, t. XVIII, 1784 (17 octobre 1781).
35 Le Garde-Meuble s’était plus précocement installé hors de l’enceinte du Louvre, mais l’hôtel du Petit-Bourbon demeurait à proximité immédiate du Louvre (Castelluccio S., op. cit., p. 68-75).
36 Coquery N., L’espace du pouvoir…, op. cit., p. 165-171.
37 Hurtaut P.-T.-N. et Magny, Dictionnaire historique de la ville de Paris et de ses environs, 1779, rééd. Genève, Minkoff, 1973, t. II, p. 281. Voir aussi : Alletz P.-A. et Hébert, Almanach parisien en faveur des Etrangers et des Personnes curieuses, Indiquant par ordre alphabétique tous les monumens des Beaux-Arts, répandus dans la Ville de Paris & aux environs, Paris, Duchesne, 1781, p. 109-110.
38 C’est-à-dire l’ensemble de la littérature de voyage et des « arts de voyager ».
39 Bachaumont L. (Petit de), op. cit., t. II, p. 233-234.
40 La censure des représentations était sous la responsabilité du lieutenant général de police.
41 Voir Petitfrère C., Le scandale du « Mariage de Figaro ». Prélude à la Révolution française ?, Bruxelles, Complexe, 1989.
42 Correspondance littéraire, philosophique et critique de Grimm et Diderot depuis 1753 jusqu’en 1790, Paris, Furne, 1829-1830, t. XII, p. 104. Sur les répétitions qui y eurent effectivement lieu avant interdiction, ibid., p. 106 et 109.
43 Ibid., p. 105-106. Lemaigre-Gaffier P., op. cit., p. 349-351.
44 Saint-Victor J.-B. de, Tableau historique et pittoresque de Paris depuis les Gaulois jusqu’à nos jours, Paris, Lesage/Librairie classique élémentaire, 1822, t. I, p. 255. Sur la salle, Papillon de La Ferté D.-P.-J., op. cit., p. 53 ; pour une description, voir Prod’homme J.-G. et Crauzat E. de, Les Menus Plaisirs du Roi. L’école royale et le conservatoire de musique, Paris, Delgrave, 1929, p. 41-45. Des décors spécifiques pour le théâtre de répétition étaient également conservés dans les magasins des Menus (BM Besançon, fonds Pâris, ms. n° 22).
45 Bachaumont L. (Petit de), op. cit., t. XVIII, p. 30-31 (septembre 1781), p. 56-57 (21 septembre 1781) et p. 118 (2 novembre 1781).
46 Comme la critique dirigée en personne contre les intendants des Menus : Lemaigre-Gaffier P., op. cit., p. 84-96.
47 Castelluccio S., op. cit., p. 43-53, p. 70-75, p. 243-245, p. 265-269.
48 L’intendant des Menus souhaitait ces visites autant qu’il les redoutait : faire voir l’ordre qui régnait dans les ressources de l’administration (Papillon de La Ferté D.-P.-J., op. cit., p. 166) pouvait malgré tout susciter des interprétations malveillantes sur leur richesse.
49 C’est pour cette raison que la visite du magasin de Versailles est recommandée dans Dezallier d’Argenville N.-A., Voyage pittoresque des environs de Paris ou Description des maisons royales, châteaux et autres lieux de plaisance situés à quinze lieues aux environs de cette Ville, Paris, Debure, 1779, p. 104 : « On conserve dans l’Hôtel des menus, le modèle en relief de la salle de Spectacle de la Cour, ceux de la place de Louis XV et de l’École Militaire, que leur délicatesse rend très-recommandable ». On voit par cet exemple que les fonctions d’interaction entre le roi et ses sujets, entre la cour et la ville, n’étaient pas réservées à l’hôtel parisien.
50 Papillon de La Ferté D.-P.-J., op. cit., p. 274.
51 Guichard C. et Savoy B., « Le pouvoir des musées ? Patrimoine artistique et naissance des capitales européennes (1720-1850) », in Charle C. et Roche D. (dir.), Le temps des capitales culturelles. xviiie-xixe siècles, Seyssel, Champ Vallon, 2009, p. 105-108.
Auteur
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Un constructeur de la France du xxe siècle
La Société Auxiliaire d'Entreprises (SAE) et la naissance de la grande entreprise française de bâtiment (1924-1974)
Pierre Jambard
2008
Ouvriers bretons
Conflits d'usines, conflits identitaires en Bretagne dans les années 1968
Vincent Porhel
2008
L'intrusion balnéaire
Les populations littorales bretonnes et vendéennes face au tourisme (1800-1945)
Johan Vincent
2008
L'individu dans la famille à Rome au ive siècle
D'après l'œuvre d'Ambroise de Milan
Dominique Lhuillier-Martinetti
2008
L'éveil politique de la Savoie
Conflits ordinaires et rivalités nouvelles (1848-1853)
Sylvain Milbach
2008
L'évangélisation des Indiens du Mexique
Impact et réalité de la conquête spirituelle (xvie siècle)
Éric Roulet
2008
Les miroirs du silence
L'éducation des jeunes sourds dans l'Ouest, 1800-1934
Patrick Bourgalais
2008