Le président de la Fédération des industries ferroviaires (1963-1996)
p. 161-184
Texte intégral
1En septembre 1963, un an après sa démission du poste de ministre de l’Éducation nationale du premier gouvernement Pompidou1, Pierre Sudreau prend la tête de la Chambre syndicale de l’industrie ferroviaire, Il arrive à ce poste dans une phase de prospérité liée la reconstruction. Il estime cependant qu’il reste beaucoup à faire. Réélu à l’unanimité tous les trois ans, il garde cette présidence jusqu’en octobre 19962, ce qui ne l’empêche pas de demeurer très actif comme président d’honneur jusqu’en 2010.
2Pourquoi a-t-il été choisi pour cette direction, lui qui n’est pas industriel ? Il semble que ses qualités et ses fonctions antérieures ne sont pas étrangères à cette nomination : résistant, haut fonctionnaire, homme politique. Les actions qu’il va mener d’une part au sein de l’organisation, d’autre part sur le plan national et international paraissent en effet, s’inscrire dans la continuité de ces positions antérieures, le passage de l’action publique à des fonctions dans le secteur privé ne signifiant pas une rupture dans ses principes et ses pratiques3.
Réorganiser la profession
3La profession, organisée depuis la fin du xixe siècle, a connu des mutations liées à l’évolution de la conjoncture économique, sociale mais aussi politique. Une des premières missions de Pierre Sudreau est d’accompagner une nouvelle transformation.
Une organisation professionnelle mise sur pied en 1899
4À la fin du xixe siècle, les producteurs de matériels ferroviaires – industrie au cœur des deux premières industrialisations – s’estimaient insuffisamment représentés et défendus par le vieux Comité des forges créé en 1864. En effet, avec l’installation de la IIIe République et particulièrement durant le gouvernement Waldeck-Rousseau (1899-1902), de nouveaux besoins et problèmes économiques (commandes disparates, liées à l’absence de normalisation du matériel, et irrégulières des diverses compagnies de chemin de fer, concurrence étrangère, notamment américaine) auxquels s’ajoutent des conflits sociaux ont incité les industriels à mieux s’organiser afin de défendre leurs intérêts4. C’est pourquoi est fondée la Chambre syndicale des constructeurs de matériel de chemin de fer et tramways le 4 mai 1899 par Edmond Duval :
« Les constructeurs en question ne se trouvent pas aussi bien éclairés, protégés, aidés qu’ils le souhaiteraient par le Comité des Forges, auquel appartiennent pourtant ses instigateurs et ses principaux membres5. »
5Cette Chambre syndicale, dirigée par Robert Pinot (1862-1926), est à l’origine de la création de l’Union des industries métallurgiques et minières (UIMM) en 1901. Compte tenu de l’expansion de la branche ferroviaire, d’autres syndicats sont mis sur pied durant la première partie du xxe siècle comme ceux du Matériel de chemin de fer et de la construction navale en 1901, des Constructeurs de matériel naval et roulant en 1919. L’Office central d’études du matériel, créé en août 1919, est une autre étape dans la standardisation des matériels roulants, renforcée lors de la création de la SNCF en 1937, ce qui amorce une politique volontaire d’unification des divers types de matériel roulant. Les syndicats se créent ainsi au gré des innovations techniques6, ce qui provoque soit l’augmentation du nombre d’adhérents de la Chambre syndicale, soit le renforcement des liens avec d’autres fédérations comme le Syndicat général de la construction électrique auquel adhère le Groupement des locomotives électriques ou la Fédération des industries mécaniques (FIM), dont dépend le Syndicat des constructeurs de moteurs thermiques.
6La Chambre syndicale de la construction, de la réparation et des industries annexes du matériel roulant de chemin de fer (nom qu’elle porte depuis 1943) a alors pour rôle de traiter les questions d’intérêt général pour la profession ainsi que les questions communes aux différents groupements (coordination et harmonisation des actions, service de statistiques, questions fiscales, accords commerciaux, rapports avec la SNCF, liaisons professionnelles, administratives, politiques, etc.)7.
7Le nouveau contexte politique de l’après-guerre, puis la construction européenne la contraignent à envisager différemment ses rapports au politique en intensifiant notamment ses relations avec les différents ministres des Transports, la Commission économique européenne et les organisations professionnelles européennes. Parallèlement la modification de son organisation avec un renforcement de l’union s’impose. Le projet de la transformation de la Chambre syndicale du matériel roulant de chemin de fer en Union des syndicats est adopté par le Groupement syndical des constructeurs de matériel roulant et le Syndicat des constructeurs mécaniciens de locomotives lors de la séance du conseil d’administration du 19 juillet 19638.
8Jusqu’à l’arrivée de Sudreau, les présidents successifs appartenaient tous à l’industrie. Cependant les premiers présidents avaient aussi occupé des fonctions politiques : ministre des colonies (1898-1899) et vice-président de la Chambre des députés (1902-1906) pour Florent Guillain (présidence 1904-1915), député (1888-1910), puis président de la Chambre des députés (1906), ministre des Finances (1895-1896) pour Paul Doumer (présidence 1911-1914)9. Les chambres étaient dirigées par les délégués généraux souvent très actifs (voir les tableaux en annexe).
Pourquoi Pierre Sudreau a-t-il été choisi ?
9Le choix d’une personnalité bien introduite dans le monde politique sur le plan national et international semble crucial à ce moment de réorganisation. C’est le président de l’Union internationale des chemins de fer (UIC), Louis Armand, que Pierre Sudreau avait connu en 1943 alors que lui-même était responsable d’un réseau de renseignements en zone occupée, qui l’a sollicité : « Tu as participé à la bataille du rail et bien la bataille continue. » Il l’invite alors à devenir « l’ambassadeur de la technologie ferroviaire française10 ». Lors de la séance du conseil d’administration du 20 septembre 1963, le président en place André Petel11, PDG des Établissements Decauville aîné, annonce la nomination comme administrateur de Pierre Sudreau. Dans la même séance, unique candidat, il est élu président à l’unanimité12. Ancien ministre du gouvernement Pompidou, Pierre Sudreau continue de mener de front la direction de l’organisation syndicale et sa carrière politique13 : « Je pense que ces différentes fonctions m’ont aidé dans ma tâche à la tête de la FIF », écrit-il en 199914.
10L’articulation public-privé présente de nombreux atouts pour cette fonction. Une bonne connaissance des milieux politiques et de la haute administration est cruciale pour une industrie qui a pour principal client des entreprises nationalisées ou des États.
11En effet, sur le plan intérieur, le président doit d’une part défendre auprès des pouvoirs publics la nécessité d’importants investissements pour le rail face aux autres moyens de transport, d’autre part inciter l’État à veiller à l’égalité des conditions de concurrence vis-à-vis des producteurs étrangers (problème des prix et des salaires). Sur le plan international, le président sollicite également l’aide de l’État, par exemple pour l’octroi de prêts de long terme à taux d’intérêts réduits à certains pays afin qu’ils s’équipent en matériel ferroviaire français (les emprunts liés), pour l’aide à la propagande et à la prospection dans le but de pénétrer de nouveaux marchés, pour affronter « dans de meilleures conditions les grandes adjudications internationales dotées de crédits libres, telles que celles correspondant à des prêts de la Banque mondiale15 ».
12En résumé, une multiplicité de missions pour le président de la Fédération.
Méthodes et pratiques du président
13Comme en témoignent les archives consultées, Pierre Sudreau déploie une activité intense. Selon une technique éprouvée dans les organisations syndicales patronales, mise au point par le premier secrétaire général de la Chambre syndicale, Robert Pinot, être informé constitue un préalable à toute action16. L’information est collectée auprès des adhérents via leurs chambres professionnelles (enquêtes sur les chiffres d’affaires, sur les problèmes en cours), auprès des pouvoirs politiques, commissions parlementaires, ministres, etc. Des études et des rapports sont rédigés par les services de la Fédération17. Pierre Sudreau est épaulé pour diriger ces multiples tâches par les quatre délégués généraux qui se succèdent durant ses mandats : Félix Battestini (1963-1976), Jean-Claude Guibal (1976- 1991), Philippe Guillemard (1991-1996) et Jean-Pierre Audoux (1996-). Une fois les dossiers constitués, Pierre Sudreau peut les défendre oralement ou par courrier – il écrit beaucoup18 – auprès des divers ministres (Finances, Industrie, Affaires étrangères), voire du Premier ministre ou du président de la République, auprès des administrations, ainsi qu’auprès des ministres des pays clients ou clients potentiels des industries ferroviaires. Pierre Sudreau noue également des contacts très fréquents avec les dirigeants de la SNCF. Toutes ces missions sont bien sûr étroitement liées.
14Une des clés pour être entendu et établir un rapport de force favorable à la profession réside dans la cohésion de celle-ci. Cela signifie le respect, par tous, des décisions prises, ce qui n’est pas chose facile puisque les entreprises adhérentes de chaque syndicat professionnel sont concurrentes. Pierre Sudreau s’emploie donc à renforcer cette cohésion, ce qui passe notamment par la réorganisation de la profession. Toute fédération patronale doit sa légitimité auprès de ses adhérents à la réalisation de ses objectifs initiaux : défendre les intérêts professionnels vis-à-vis, notamment, de la concurrence mais aussi de l’État législateur, investisseur et client par l’intermédiaire des sociétés nationalisées, les aspects sociaux étant gérés pour la métallurgie par l’UIMM.
15À l’arrivée de Pierre Sudreau en septembre 1963, la Fédération des industries ferroviaires n’existait pas encore. Le projet, adopté en juillet, ne devient réalité que le 1er octobre 1963 avec la constitution de l’Union des syndicats, la réorganisation administrative passant par une modification des statuts19. La mission est de rassembler « toutes les forces vives – les industriels, la SNCF et les autres – pour partir à la conquête de l’Europe20 ».
16La nouvelle Fédération œuvre pour renforcer le dialogue et l’union au sein de la filière ferroviaire entre équipementiers, ensembliers, professionnels de la signalisation, des voies et du matériel roulant. La direction rappelle régulièrement que constituant « une véritable entité économique », elle doit résoudre les problèmes d’investissements, de sous-traitance pour éviter les suréquipements, les problèmes de structures, mais aussi ceux liés à une concurrence accrue du fait de l’ouverture des frontières à l’intérieur du Marché commun, et plus largement à l’internationalisation, puis à la mondialisation croissante. Des responsables d’entreprises ou des représentants de groupements professionnels sont invités régulièrement à exposer les principaux problèmes se posant à eux21. Dans la plupart de ses interventions, Pierre Sudreau milite pour une meilleure concentration des moyens de la profession qui doit conduire à l’abaissement des prix de revient, au développement des innovations technologiques et à une adaptation à l’élargissement des marchés. Cette incitation se renforce en fonction de la conjoncture. Ainsi entre 1983 et 1987, l’industrie ayant perdu plus de 6800 emplois, la direction de la FIF estime très urgent de poursuivre « des opérations de regroupements des fabrications afin de ne pas aborder le Grand marché européen en état d’infériorité22 ».
Tableau 1. – Évolution des effectifs de l’industrie ferroviaire 1963-1978.

Sources : PV des assemblées générales. * Équipements électriques et moteurs Diesel non compris. ° Rapports du conseil d’administration : la différence entre ces deux évaluations n’est pas expliquée. On peut penser que la deuxième prend en compte l’ensemble des secteurs (signalisation et voie).
17Lors des assemblées générales, Pierre Sudreau rappelle très régulièrement que l’amélioration de l’organisation et de la coordination est essentielle. Dès les années soixante, il attire l’attention sur la « manifestation d’un individualisme excessif », la « nécessité pour les entreprises de ne pas se blesser à mort inutilement, sous peine d’arriver exsangues en face de la concurrence étrangère intensifiée, et particulièrement celle de l’Allemagne, au moment du Marché commun » ; « Elles ont intérêt à s’articuler avec les autres secteurs de l’équipement23… » Même litanie en 1972 : « Je forme le vœu que nous puissions conserver notre cohésion afin de renforcer nos positions vis-à-vis des pouvoirs publics comme à l’exportation24. »
Tableau 2. – Évolution des effectifs 1978-1997.

Sources : Rapports du conseil d’administration.
18Ces exhortations constantes conduisent à penser que le maintien de la cohésion est un combat permanent. En mai 1988, une nouvelle réorganisation a lieu, l’objectif affiché étant « d’améliorer la représentativité syndicale de l’ensemble des professions », et surtout de faire des économies de fonctionnement. De nouveaux statuts sont alors élaborés. La FIF absorbe les syndicats membres de la Fédération, qui est désormais subdivisée en groupements25. Compte tenu des caractères spécifiques de la production ferroviaire, le concours des pouvoirs publics et de la SNCF est essentiel26. Quels vont être les objectifs, les stratégies et les pratiques des dirigeants de la FIF ?
Promouvoir les industries ferroviaires sur le marché national
19Lors de l’arrivée de Pierre Sudreau, l’objectif prioritaire est le développement du rail sur le territoire national. L’action auprès des acteurs économiques et politiques se décline souvent conjointement en trois volets :
se faire entendre lors de la rédaction des plans quinquennaux ;
tenter d’influer sur la politique monétaire et fiscale ;
intervenir ponctuellement auprès des pouvoirs publics en rapport étroit avec les dirigeants de la SNCF.
20Pour maintenir, voire faire progresser, les investissements dans le secteur ferroviaire, la direction de la FIF tente de peser sur les orientations des différents plans quinquennaux. Dès sa prise de fonction, Pierre Sudreau entame des démarches auprès du ministère des Finances et des Affaires économiques et de l’Élysée, l’enjeu étant la préparation en 1964 du Ve plan (1966-1970)27. Il est à l’origine de la formation d’un groupe de travail « Prospectives » dont l’objet était d’examiner les « perspectives du chemin de fer dans le développement prévisible de l’économie française ». Il s’agit ensuite de veiller à la réalisation des prévisions de production du Plan, car il est nécessaire que la SNCF dispose des crédits nécessaires afin « de réaliser les prévisions du Plan » et de « satisfaire aux impératifs de l’exploitation28 ». À chaque nouveau plan, la même stratégie se déploie avec plus ou moins de résultats selon la conjoncture et le gouvernement en place. Ainsi, en mai 1970, le président souligne le « manque évident de cohérence entre les taux de croissance admis pour l’économie » (8 à 10 % selon les secteurs) « et les chiffres, beaucoup moins encourageants, avancés ici et là, pour les prévisions du trafic ferroviaire » dans le VIe Plan (1971-1975), qui pourtant s’est donné comme impératif le développement de l’industrie française face à une compétition internationale de plus en plus dure29. Il propose alors « la définition d’un minimum vital des commandes intérieures », les industriels étant prêts à donner suite à un programme contractuel. Visiblement cette suggestion n’est pas retenue puisqu’un an plus tard « le programme SNCF pour 1971 est l’un des plus austères que nous ayons connus ». Si les programmes ne sont pas plus étoffés, les plans de charge des usines s’établissent à un niveau très inférieur à la moyenne du Ve Plan. Le contexte économique instable remet en cause le principe de la planification. Les plans suivants suscitent ainsi des combats moins intenses.
21Pierre Sudreau se bat parallèlement pour les grands projets ferroviaires contre « les groupes de pression suffisamment organisés », les milieux incomplètement informés, particulièrement les Chambres de commerce
« qui pensent que la SNCF a, jusqu’à présent, été plutôt favorisée en tant qu’entreprise nationale et qu’elle peut consentir à freiner sa modernisation au bénéfice d’équipements collectifs jugés plus urgents ou essentiels30 ».
22La défense de l’industrie ferroviaire passe également par d’autres types d’action auprès des pouvoirs publics : se faire entendre sur la politique monétaire et financière et plus globalement sur les aléas de la politique conjoncturelle. Ainsi en 1963, l’expansion économique se poursuit avec un développement de l’inflation qui affaiblit la compétitivité des industries par rapport au Marché commun provoquant une dégradation des échanges extérieurs. Cela conduit les pouvoirs publics à adopter une politique de stabilisation en essayant de ne pas compromettre la croissance : le décret du 5 mars 1963 baisse le jeu des formules de variations des prix dans les marchés d’État et du secteur nationalisé. Pour la FIF, ces mesures pénalisent le secteur, particulièrement avec la mise en place du Plan de stabilisation en septembre 1963, qui rétablit le blocage des prix avec des restrictions du crédit bancaire. Seuls les prix sur devis (avec une interprétation restrictive) conservent la possibilité d’utiliser les formules de variation de prix. Selon la FIF, l’industrie ferroviaire est la plus touchée par cette politique, car la hausse des produits industriels a été moins forte que celles des produits alimentaires et des services. De plus, « le blocage ne porte que sur les effets et non sur les causes de l’inflation », essentiellement constituées par « des hausses excessives des salaires qui résident dans l’insuffisance de la main-d’œuvre qualifiée, due elle-même aux déficiences de la formation professionnelle31 ».
23La situation est d’autant plus difficile pour ce secteur qu’il doit faire face à une intensification de la concurrence sur les marchés intérieurs et extérieurs. Pierre Sudreau souligne que l’industrie ferroviaire ne fait que subir la hausse des prix. De plus
« de longs délais de livraison et des marges insuffisantes ne permettaient pas à nos entreprises de s’engager si elles ne pouvaient pas tenir compte des modifications des éléments de leurs prix de revient intervenant en cours de marché, modifications sur lesquelles elles n’ont aucune prise32 ».
24Grâce à ses interventions auprès des Pouvoirs publics (entretiens avec le ministre des Finances, tandis que les vice-présidents travaillent avec le cabinet de celui-ci)33, il obtient des mesures de desserrement du blocage des prix à venir et des mesures favorables à une action plus efficace sur les marchés extérieurs34 (cf. l’arrêté du 12 mai 1964). Mais les dérogations comportent des dispositions moins libérales qu’espérées35.
25Des interventions ponctuelles sont fréquemment menées de concert avec les clients quasi exclusifs de l’industrie ferroviaire sur le marché national – SNCF et dans une moindre mesure RATP. Au fil des années, l’arrivée d’autres acteurs aux niveaux national et européen, oblige la FIF à élargir son réseau. En effet, jusque-là, son action s’inscrivait dans un monde ferroviaire relativement monolithique, dominé par la verticalité des relations et avec un nombre très restreint d’acteurs « stratégiques » (principalement ministère des Transports, SNCF et RATP). Aux interlocuteurs traditionnels s’ajoutent les Régions, les Agglomérations, mais aussi, dans les années 1990, d’autres organismes dont certains sont européens comme l’UNIFE (Union des industries ferroviaires européennes) créée en 199436. Comme toujours, il s’agit au sein de ces nouveaux organismes de consolider la position des industriels français : ainsi en 198937, Pierre Sudreau incite les régions, particulièrement la Région parisienne, à développer leurs programmes d’investissements.
26Toutes ces interventions impliquent des liens privilégiés avec la SNCF avec qui les industries ferroviaires font de 55 % en 1963 à près de 68 % en 1966 de leur chiffre d’affaires global pour osciller dans les années 1970 entre 31 et 40 %. À la fin de celles-ci, les oscillations perdurent, mais le chiffre d’affaires avec la SNCF progresse : entre 35 et 55 %. Cela est dû en partie à l’équipement en automotrices et en TGV (locomotives et remorques) à partir de 1980 (voir tableaux 8 et 9 en annexes).
Tableau 3. – Évolution du chiffre d’affaires de l’industrie ferroviaire – CA avec la SNCF et CA total – 1961-1976 (en millions de francs constants : francs de 1981 + coefficient de transformation INSEE).

Sources : – Rapports du CA (légères différences selon les rapports, incorporation ou non de certaines fabrications). En 1964 et 1966, les chiffres d’affaires comprennent des fabrications de certaines pièces détachées et de certains matériels d’équipement qui ne figuraient pas jusqu’alors dans les statistiques de la profession. – Coefficient de transformation Bulletin mensuel de statistiques, mars 1982. * Non compris les équipements électriques et les moteurs Diesel.
Tableau 4. – Évolution du chiffre d’affaires de l’industrie ferroviaire – CA avec la SNCF et CA total – 1978-1997 (en millions de francs courants et constants : francs de 1981 + coefficient de transformation INSEE).

Sources : – Rapports du conseil d’administration. Des différences d’évaluation des chiffres d’affaires ont été constatées d’un rapport à l’autre pour une même année. Nous avons choisi de présenter ici les chiffres du rapport d’activité de l’année suivante. – Coefficient de transformation : INSEE [http://www.insee.fr/fr/themes/calcul-pouvoir-achat.asp].
27Entre autres formes de contacts, jusqu’au début des années 1980, un déjeuner annuel réunit les dirigeants de la FIF et ceux de la SNCF38. Chacun des deux présidents y prononce des discours qui font le point sur l’état des commandes, les perspectives, les problèmes. Fréquemment, les dirigeants de la SNCF, André Ségalat, puis Jacques Pélissier se plaignent des prix élevés de l’industrie ferroviaire française, ce que note également Pierre Sudreau, mais dans des notes internes. Ce dernier préfère publiquement leur rétorquer que les conditions de travail différentes chez les concurrents ne sont pas prises en compte et pointer les risques de concurrence déloyale avec l’ouverture du Marché commun39. Néanmoins, les dirigeants de la SNCF et de la FIF s’accordent toujours sur le fait que la passation des commandes par la SNCF dépend des crédits obtenus et qu’il faut donc déployer une vigilance constante notamment contre la concurrence des autres moyens de transport.
« Il ne faut pas se dissimuler que les thèses officielles sont en faveur du développement du transport des personnes par la voie aérienne et des marchandises par les gros transporteurs routiers, le chemin de fer devenant lentement, mais sûrement, un outil périmé »,
28note Pierre Sudreau en 196540. Il tente des démarches régulières notamment auprès du ministre des Finances, Michel Debré (1966-1968), du ministre des Transports, Jean Chamant (1967), du ministre du Plan, Olivier Guichard (1968) pour obtenir des dotations supplémentaires pour la SNCF (notamment en 1966 et en 1967), fondées sur de multiples études sur les grands problèmes de la SNCF, et sur la comparaison avec la situation dans d’autres pays (rapport rail/route)41.
« M. Debré et ses services ne semblent pas se préoccuper des mutations techniques en cours, en particulier dans le domaine ferroviaire, et dont les récents essais de l’autorail à turbine, après ceux de l’aérotrain, sont la manifestation42. »
29De nouveau en mai 1972, il veut convaincre que le rail est « l’instrument de la civilisation de demain » à trois niveaux : comme transport urbain, dans la mise en valeur des ressources planétaires et dans la lutte contre la pollution43.
30Si la crise énergétique relance les équipements ferroviaires – supérieurs de 45 % en 1974-1975 à ceux des deux années précédentes44 –, le président Sudreau dresse de nouveau un bilan alarmiste en juin 1977 sur la situation de l’industrie ferroviaire soumise à une « politique d’étranglement » avec des réductions de programme et une modification défavorable des structures des formules de révision des prix, qui va à l’encontre des intérêts nationaux en ouvrant le marché aux concurrents étrangers.
31Dans la ligne de son parti pris en faveur de la modernisation lorsqu’il était ministre de la Construction avec son appui à l’implantation du RER, il s’engage complètement dans la promotion du TGV. Ces combats sont menés avec les dirigeants de la SNCF45. Cela n’exclut pas les remises en cause du projet avec des résistances au sein même de la SNCF, relayées par celles de certains membres du gouvernement, en particulier du ministre des Finances Valéry Giscard d’Estaing. Certains financiers pensaient qu’investir dans le ferroviaire était un non-sens. Les discussions, débutées en 1966-1967, se poursuivent jusqu’en mai 1973. Georges Pompidou décide alors de construire un TGV entre Paris et Lyon. Dans un entretien effectué en 1991, Pierre Sudreau mentionne que le président de la SNCF Jacques Pélissier a été convoqué en avril 1975 par le nouveau président de la République Valéry Giscard d’Estaing pour mettre fin à ce projet car le chemin de fer, selon celui-ci et son ministre des Finances Jean-Pierre Fourcade, était dépassé et sa modernisation serait beaucoup trop coûteuse46. En fait, le projet a suivi son cours. Certes, Giscard d’Estaing a refusé d’inaugurer le TGV, mais il le sera par François Mitterrand en 1982.
32Pierre Sudreau continue d’œuvrer pour la poursuite de ce projet. En 1989, il incite à la préparation impérative de « la 3e génération TGV », sans se laisser entraver par le manque de coopération manifeste de la RFA47. En 1990, il accepte le renouvellement de son mandat afin de participer à la mise au point de l’exportation du TGV, au développement de l’industrie ferroviaire dans sa dimension européenne et de discuter les principaux dossiers « avec les hautes autorités du pays48 ». Il multiplie les interventions auprès du Premier ministre Édouard Balladur afin de le convaincre de réaliser le programme de recherche « TGV Nouvelle Génération » envisagé par la SNCF et Gec Alsthom, qui contribuerait efficacement « à l’Aménagement du Territoire, à transformer le visage de l’Europe et affirmer la place de la France sur le marché mondial49 ».
33Il regrette que le TGV n’ait pas impulsé une modernisation accrue du système ferroviaire.
Et sur les marchés extérieurs
34La FIF dès les années 1960 mène une action de promotion du savoir-faire des industriels du secteur avec une présence institutionnelle forte et fréquente dans les salons ferroviaires nationaux et étrangers. L’européanisation et la mondialisation ont profondément modifié cette action, qui désormais s’inscrit davantage dans un rôle d’appui de ses membres à l’international en organisant de séminaires bilatéraux. Dans quelle mesure cette conquête des marchés extérieurs est-elle imputable à l’action du président ? Action difficile à évaluer, mais les archives nous montrent son activité incessante pour faire progresser ces parts de marché.
35Les relations (entretiens, courriers avec les différents ministres des Affaires étrangères) sont très fréquentes tout au long de sa présidence. Il lui faut obtenir un appui efficace concernant à la fois l’aide au financement et le maintien, voire le développement, des échanges avec les « pays susceptibles d’aider la profession50 ». Deux axes principaux requièrent l’attention des dirigeants de la FIF, particulièrement de son président.
36D’abord, l’Europe. Pierre Sudreau établit des contacts plus nombreux avec les pays du Marché commun, puis de la CEE, ce qui, selon lui, est un moyen de lutter contre la concurrence51. Mais il lui arrive aussi, comme en 1964, de solliciter l’aide gouvernementale pour intervenir à Bruxelles afin de lutter contre une concurrence jugée déloyale des industriels italiens qui bénéficient de conditions de prix avantageuses dans les adjudications lancées par la Société Interfrigo pour la livraison de wagons réfrigérants52.
37Il déploie également une intense activité auprès des présidents successifs de la Commission européenne pour promouvoir l’industrie ferroviaire française, particulièrement le TGV53. Si de forts besoins potentiels caractérisent le marché mondial, Pierre Sudreau estime que le marché européen est le plus porteur dans la décennie 1990 du fait des besoins de renouvellement (Espagne, Grande-Bretagne…) et de la réalisation d’un réseau à grande vitesse54. La France, possédant un grand groupe, Alsthom et disposant de technologies avancées, semble bien placée.
38La FIF s’intéresse également à l’Europe de l’Est et à l’URSS. Pierre Sudreau était en contact officiel avec ce pays depuis septembre 1959, date à laquelle il s’était rendu à Moscou pour préparer le voyage du président Khrouchtchev en mars 1960. Un dialogue s’était dès lors instauré avec les autorités soviétiques. On peut penser que les rapports en ont été facilités lors des démarches entreprises pour exporter le métro sur pneus55. De multiples rencontres ont lieu durant ses mandats à différents niveaux, parmi lesquelles on peut relever celle avec le ministre des Voies de communication, Konarev, et le vice-ministre du Commerce extérieur, Komarov en juin 1984 à Moscou. À plusieurs reprises il intervient, comme à l’automne 1965 auprès de Giscard d’Estaing, pour obtenir un assouplissement des conditions de crédit dans certains pays de l’Est dont la situation économique se dégrade56.
39Autre responsabilité, Pierre Sudreau prend, en mai-juin 1965, la direction de la mission organisée par le Conseil national du commerce extérieur CNCE et le comité France-Europe de l’Est en Hongrie.
40Ensuite, l’Asie. Avec, en 1964, la reconnaissance de la Chine populaire par le général de Gaulle et l’appui de Georges Pompidou, alors Premier ministre (1962-1968), se développent les rapports avec ce pays57. une exposition technique française est organisée à Pékin en 1965. Pierre Sudreau y accompagne le ministre des Finances Giscard d’Estaing pour son inauguration (22 novembre-4 décembre 1965). Il se félicite de l’accueil très chaleureux des Chinois tout en constatant que, pour ceux-ci, les problèmes politiques priment sur les problèmes techniques et économiques, et que leur volonté d’indépendance est farouche : « Ne compter que sur soi-même. » « Cette politique se traduira nécessairement […] par un développement progressif de la fabrication locale », remarque-t-il le 17 décembre 1965. Les relations se poursuivent tout au long de ses mandats. Ainsi, le 21 juin 1974, il rencontre le Premier ministre Chou-en-Lai et les principaux dirigeants de l’économie chinoise. En mai 1978, il reçoit Ku Ming, vicepremier ministre et président de la Commission du Plan d’État, au château de Blois. En mai-juin 1985, il suscite une réunion du groupe plénier de coopération ferroviaire avec l’ambassadeur de Chine. Le Japon, très dynamique dans le domaine ferroviaire, intéresse également les industriels français. Pierre Sudreau crée en 1965 le comité France-Japon à la demande de Georges Pompidou. La même année, il participe à une mission officielle à Tokyo auprès du patronat japonais et inaugure le Tokaïdo entre Tokyo et Osaka, conçu à partir de la haute technologie ferroviaire française, train qui préfigure le Shinkansen.
41Il établit également d’étroites relations avec les ambassadeurs de France dans le Sud Est asiatique et en Corée du Sud. Ce pays lui semble un marché prometteur. Il y fait plusieurs visites (entre autres en 1972, 1985 et 1993, année où il y accompagne François Mitterrand). Il devient en 1975 le président du comité France-Corée. Tout un travail de lobbying s’exerce ainsi auprès des pouvoirs publics coréens, en particulier auprès de son ami le président de Korean Airlines, Cho Choung Hoon. Une véritable bataille s’est engagée sur ce marché entre Siemens et Alsthom, remportée par cette dernière firme, conséquence de ces liens privilégiés, sans doute.
42On pourrait ainsi multiplier les exemples. Quels sont les résultats de cette activité intense ?
Tableau 5. – Évolution du chiffre d’affaires de l’industrie ferroviaire – Exportations et CA total – 1961-1976 (en millions de francs courants et constants : francs de 1981 + coefficient de transformation INSEE).

Sources : – Rapports du CA (légères différences selon les rapports, incorporation ou non de certaines fabrications). En 1964 et 1966, les chiffres d’affaires comprennent des fabrications de certaines pièces détachées et de certains matériels d’équipement qui ne figuraient pas jusqu’alors dans les statistiques de la profession. * Non compris les équipements électriques et les moteurs Diesel. – Coefficient de transformation : Bulletin mensuel de statistiques, mars 1982.
Tableau 6. – Évolution du chiffre d’affaires de l’industrie ferroviaire – exportations et total – 1978-1997 en millions de francs courants et constants (francs de 1981 coefficient de transformation INSEE).

Sources : – Rapports du conseil d’administration. Des différences d’évaluation des chiffres d’affaires ont été constatées d’un rapport à l’autre pour une même année. Nous avons choisi de présenter ici les chiffres du rapport d’activité de l’année suivante. – Coefficient de transformation : INSEE [http://www.insee.fr/fr/themes/calcul-pouvoir-achat.asp].
43Si en 1963 les exportations ont décru en valeur de 33 % par rapport à l’année précédente (36 % dans la zone franc, 26 % à l’étranger), elles croissent à partir de 1965 (9,5 %) pour atteindre 41,7 % en 1972, équipements électriques et diesel inclus58. À la fin des années 1960, Sudreau se félicite des succès engrangés sur le marché international59, même s’ils ne compensent pas la baisse sur le marché intérieur et sont soumis aux aléas de la conjoncture mondiale.
44Ensuite, la part des exportations dans le chiffre d’affaires total est très variable, oscillant entre moins de 20 % en 1990 (« creux historique »), 24 % en 1978 et 1990, et des résultats en augmentation croissante de 1979 (34 %) à 1987 (près de 50 %). Les exportations progressent aussi bien en Europe de l’Est (par exemple vente de 10000 wagons à la RDA en 1972) qu’en Chine, en Corée, en Birmanie, en Thaïlande et en Inde (ventes importantes de locomotives toujours en 197260). Des commandes sont également enregistrées en Irak, Turquie, Maroc et Mexique. De véritables contrats de coopération sont signés avec l’Espagne, la Yougoslavie, le Portugal, l’Inde et le Mexique (métro de Mexico)… Pierre Sudreau s’emploie à démontrer au monde politique que la réussite de l’implantation sur les marchés extérieurs dépend de la capacité d’innovation de l’industrie ferroviaire :
« Nous avons forgé, avec vous, un instrument industriel de premier ordre. Dans cette optique, la réalisation du projet de ligne à grande vitesse Paris-Lyon, outre l’assurance d’un complément d’activité non négligeable à partir de 1975, constituerait une excellente image de marque de l’industrie ferroviaire française61… »
45D’où l’importance du projet TGV. Il regrette de ne pas avoir réussi à implanter les industries ferroviaires sur le marché américain, expliquant les difficultés d’exportations et l’échec de la vente du TGV par la puissance des lobbies.
46Les données du marché international s’étant considérablement transformées à la fin des années 1980 (disparition de marchés captifs, absence de moyens de financement de clients potentiels, internationalisation de la production, etc.), une nouvelle stratégie internationale a été mise en œuvre. Outre l’accentuation de l’internationalisation des sociétés ferroviaires, l’adoption de méthodes « plus modernes d’ingénierie financière », les exportations se sont réorientées vers les pays industrialisés solvables. La moyenne annuelle de la part des exportations de matériel roulant vers l’Europe et dans une petite mesure vers les États-Unis est passée de 20,5 % entre 1982 et 1984 à 62,5 % durant la période 1989-1991. A contrario, celle des exportations vers l’Afrique et le Moyen-Orient a évolué de 41,5 % à 22,5 % durant les mêmes périodes62. La part de l’Asie progresse : 3,5 % en 1982-1984, 7,5 en 1989-199163. Par la suite, elle stagne (8 % en 1996, même si le TGV se vend bien en Corée à partir de 1993). Quelques succès sont enregistrés en Amérique latine au Brésil à la fin des années 1970 et au début des années 1980.
47La suprématie européenne se confirme dans les années 1990 : 57 % des débouchés de l’industrie ferroviaire, dont plus de 50 % dans l’UE en 199664.
48Dans un entretien au journal Le Rail en 1999, Pierre Sudreau résume son action à la tête de la FIF : « Mon rôle a été celui d’un ambassadeur. J’ai essayé d’être un rassembleur pour promouvoir l’industrie et la grande vitesse65. » Il exprime un regret : celui de « ne pas avoir assez œuvré politiquement parlant, pour promouvoir une politique intelligente du fret66 ».
49Ces succès ne l’empêchent pas, en 1996, de dresser un bilan négatif de la situation de la SNCF, lié en partie au ralentissement économique de l’Europe67. Il déplore le fait que ces interventions récentes auprès des différents ministres concernés par l’industrie ferroviaire68 n’aient pas été suffisamment convaincantes. Il propose de continuer le combat auprès du nouveau président Jacques Douffiagues, qui « conjugue le culte du service public… avec la connaissance approfondie des problèmes politiques et économiques69 ».
50Le délégué général en poste lors de son dernier mandat, Jean-Pierre Audoux, mentionne :
« En fait, je ne connus de Pierre Sudreau que deux “échecs” qu’il déplorait régulièrement sur les dossiers ferroviaires : la vente du TGV aux États-Unis et la proposition de désendettement total de la SNCF et de RFF faite à Matignon dans le contexte de la réforme du système ferroviaire français au début de 1997. Nous échouâmes alors faire admettre à Matignon que, sans un ‘traitement à l’allemande’ de la dette du système ferroviaire français, celui-ci ne pourrait se redévelopper et irait au contraire vers l’asphyxie70. »
51Pierre Sudreau paraît avoir pleinement rempli les missions pour lesquelles il avait été choisi. Cela confirme l’intérêt pour les organisations professionnelles de choisir des dirigeants qui possèdent un important réseau relationnel et qui sont capables de par leurs diverses fonctions de faire la synthèse entre les sphères publique et privée. Pierre Sudreau a ainsi montré dans sa vie professionnelle une continuité certaine dans l’action, même si ses combats portaient sur des objets différents.
Annexe
ANNEXES
Présidents de la Chambre syndicale 1899-1997
Tableau 7a. – CS des fabricants et constructeurs de matériel pour chemin de fer et tramways (1899-1938).

Tableau 7b. – CS des constructeurs de matériel roulant de chemin de fer et des industries annexes de la construction de matériel de chemin de fer (1938-1943). CS de la construction, de la réparation et des industries annexes du matériel roulant de chemin de fer (1943-1963).

Tableau 7c. – FIF 1965.


FIF Délégués généraux
* 1963-1976 : Félix Battestini – Capitaine de Corvette.
*1976-1991 : Jean-Claude Guibal (1941-) HEC, Sciences po, ENA – député maire de Menton, UDF, RPR, UMP – délégué général d’Entreprise et Progrès (1982-1986).
* 1991-1996 : Philippe Guillemard. Malade, il décède en 1996.
*1996- : Jean-Pierre Audoux, docteur en économie internationale, nommé le 22 janvier 1996 après une carrière au ministère de la Défense nationale, EDF, etc.
Présidents de la SNCF
3 février 1955 : Louis Armand, Polytechnicien X-Mines, directeur général de la SNCF. 23 janvier 1958 : André Ségalat, Secrétaire général du gouvernement.
1er septembre 1975 : Jacques Pélissier, Ingénieur agronome, directeur de cabinet de Jacques Chirac.
5 août 1981-23 février 1983 : André Chadeau, École libre des sciences politiques, conseiller de Pierre Mauroy, démissionne après les accidents meurtriers d’Argenton-sur-Creuse et de Flaujac.
19 septembre 1985 : Philippe Essig, Polytechnicien X-Ponts, directeur général de la RATP.
29 février 1988 : Philippe Rouvillois, ENA, inspecteur des finances, directeur adjoint de la SNCF, chargé des finances, démissionne le 7 août 1988 au lendemain de l’accident de la gare de l’Est à Paris.
24 août 1988-1er mars 1993 : Jacques Fournier, ENA, président de Gaz de France.
2 mai 1994 : Jean Bergougnoux, Polytechnicien, ENSAE, directeur général d’EDF, a démissionné à la suite de la grande grève de 1995.
21 décembre 1995 : Loïk Le Floch-Prigent, Institut polytechnique de Grenoble, président de Gaz de France, démissionne après sa mise en examen dans l’affaire Elf.
24 juillet 1996-juillet 2006 : Louis Gallois, HEC, ENA, PDG de l’Aerospatiale.
Tableau 8. – Répartition du chiffre d’affaires de l’industrie ferroviaire (construction et réparation) 1961-1976 (en million de francs courants et en pourcentage).

Sources : – Rapports du CA (légères différences selon les rapports, incorporation ou non de certaines fabrications). En 1964 et 1966, les chiffres d’affaires comprenant des fabrications de certaines pièces détachées et de certains matériels d’équipement qui ne figuraient pas jusqu’alors dans les statistiques de la profession. * Non compris les équipements électriques et les moteurs Diesel.
Tableau 9. – Répartition du chiffre d’affaires de l’industrie ferroviaire 1978-1997 (en millions de francs courants et en pourcentage).

Sources : rapports du conseil d’administration. Des différences d’évaluation des chiffres d’affaires ont été constatées d’un rapport à l’autre pour une même année. Nous avons choisi de présenter ici les chiffres du rapport d’activité de l’année suivante.
Notes de bas de page
1 Cette démission, le 15 octobre 1962, était liée à son opposition au projet de référendum sur l’élection du président de la République au suffrage universel.
2 Archives de la FIF, Assemblée générale ordinaire (AGO), 20 juin 1996. Jacques Douffiagues remplace alors P. Sudreau à la présidence pour 3 ans. Il a également fait une carrière de haut fonctionnaire (IEP et ENA), mais il est aussi PDG de la SOFRESA (Société française d’exportation des systèmes d’armement) de juin 1993 à décembre 1995.
3 Cette étude est basée essentiellement sur les archives de la Fédération des industries ferroviaires. Je remercie le délégué général, M. Jean-Pierre Audoux, qui m’a permis de consulter ces archives : essentiellement des procès-verbaux des assemblées générales, les statuts, les documents comptables, les dossiers concernant les questions économiques et professionnelles intérieures et extérieures, le commerce extérieur, l’organisation professionnelle et les questions techniques. Des dossiers concernent également les différents syndicats qui composent la FIF. Ces dossiers de la Fédération ont été complétés par ceux des Archives nationales et par des archives audiovisuelles. AN 91AJ/77-78 : activités de P. Sudreau dans le domaine économique et industriel = nombreuses photographies de ses voyages et de ses contacts, quelques articles de presse et notes, textes des interventions. Sites internet : [http://fif.asso.fr/index.php/nos-actions/historique/item/125963] ; enregistrement réalisé le 8 janvier 1991 au siège de la FIF par Alain Beltran et Jean-François Picard. [http://www.memoire-orale.org/ent-fiche/sudreau-pierre-2012-aas.pdf].
4 Une convention commerciale entre la France et les États-Unis devait être négociée en juillet 1899. De plus, les exposants de matériel ferroviaire à l’Exposition universelle de Paris (1900) devaient être relégués à Vincennes – et non pas au Champ de Mars - –, ce qui leur semblait inadmissible. Le secrétaire général R. Pinot a obtenu satisfaction sur les deux plans.
5 A. François-Poncet, La vie et l’œuvre de Robert Pinot, Paris, A. Colin, 1927, p. 90. L’auteur évoque les difficultés spécifiques de ces fabricants qui doivent faire face à l’irrégularité des commandes des compagnies ferroviaires ainsi que les difficultés communes à l’ensemble de la métallurgie, notamment « la pression croissante de la concurrence étrangère » et la législation sociale de la IIIe République.
6 Ainsi après 1945, le Groupement des locomotives à vapeur réduit ses activités alors que se crée un Groupement des constructeurs de locomotives à moteurs thermiques. À partir du 1er janvier 1959, les deux anciens groupements (vapeur et diesel) ont cédé la place au Syndicat des constructeurs mécaniciens de locomotives.
7 Archives de la FIF (48), monographies, 8 septembre 1959.
8 Archives de la FIF, PV de la séance du conseil d’administration de la Chambre syndicale du matériel roulant de chemin de fer.
9 Cf. Dictionnaire des dirigeants patronaux, annexes, in Danièle Fraboulet, Quand les patrons s’organisent. Stratégies et pratiques de l’Union des industries métallurgiques et minières 1901-1950, Villeneuve-d’Ascq, Presses universitaires du Septentrion, 2007.
10 Le Rail, octobre 1999, n° 77, p. 38.
11 André Petel a dirigé à plusieurs reprises la Chambre syndicale : 1946-1949,1955-1958, 1959-1963.
12 « La présidence de la Fédération a été proposée à M. Pierre Sudreau, ancien ministre, qui l’a acceptée », Combat, 2 octobre 1963, L’Usine Nouvelle, 10 octobre 1963, archives de la FIF 47. « J’ai accepté la présidence d’un rassemblement de toutes les forces vives – les industriels, la SNCF et les autres – pour partir à la conquête de l’Europe et ouvrir des perspectives pour l’avenir. Et, passionné, j’y suis resté plus de 30 ans… » Relaté dans l’historique de la FIF : [http://fif.asso.fr/index.php/nos-actions/historique/item/125963-des-hommes-volontaires].
13 En 1967, il est élu député centriste du Loir-et-Cher (Progrès et Démocratie moderne – PDM –, puis réformateur) et siège à l’Assemblée nationale jusqu’en 1981. Il est élu maire de Blois en 1971, réélu au premier tour en 1977 et en 1983, mais battu en 1989 par Jack Lang à la suite des divisions de la droite locale. Il préside aussi le Conseil régional du Centre (1976-1979).
14 Le Rail, art. cit., p. 38.
15 Ibid.
16 Danièle Fraboulet, Quand les patrons s’organisent, op. cit., p. 109 sq.
17 Par exemple sur « l’exportation du matériel ferroviaire » en 1965, « les mesures à l’exportation » en 1969 ou les enquêtes sur les rémunérations (1967-1986), sur les déclarations de demandes de prix et de commandes auprès des entreprises (années 1960).
18 Comme l’ont noté également plusieurs intervenants au colloque qui ont fourni les matériaux du présent ouvrage.
19 Objet d’une réunion d’une assemblée constitutive composée des présidents des syndicats intéressés et d’une assemblée générale extraordinaire devant décider des biens de l’ancienne chambre syndicale. Archives de la FIF, PV de la séance du conseil d’administration du 16 octobre 1963.
20 Le Rail, art. cit., p. 38.
21 Archives de la FIF (51), procès-verbaux (PV) des assemblées du 12 février 1965, du 20 mai 1966, à titre d’exemples.
22 Archives de la FIF, AGO du 20 mai 1988.
23 Archives de la FIF (51), PV des assemblées du 22 janvier, 21 mai 1965, 22 octobre 1965, 20 mai 1966.
24 Archives de la FIF (49), compte rendu (CR) AGO 26 mai 1972.
25 Archives de la FIF, Assemblée générale extraordinaire (AGE) du 20 mai 1988. Chaque syndicat est dissous avec dévolution de son patrimoine à la Fédération (Syndicats des constructeurs de matériel de traction ferroviaire, du matériel de transport ferroviaire, des fabricants d’équipements ferroviaires, des réparateurs de matériel roulant de chemin de fer, des industries de la signalisation électrique pour chemin de fer, des constructeurs d’appareils de branchement et de producteurs de matériels pour voies de chemin de fer, des ensembliers ferroviaires).
26 Archives de la FIF, PV de l’assemblée du 16 juin 1964.
27 Archives de la FIF, PV de l’assemblée du 12 novembre 1963.
28 Ibid.
29 Archives de la FIF (49), CR AG 22 mai 1970.
30 Archives de la FIF (49), CR AG 14 mai 1971. Allocution de Pierre Sudreau au déjeuner FIF-SNCF.
31 Archives de la FIF, AGO du 19 juin 1964, rapport du CA, exercice 1963.
32 Ibid.
33 Archives de la FIF, Compte rendu (CR) du 21 février 1964.
34 Ibid. Voir aussi le PV de l’assemblée du 17 janvier 1964 : « Le Ministre a affirmé son intension de tenir compte des suggestions des industriels dans la mesure où elles ne risquent pas de compromettre le plan de stabilisation. » Si le secteur obtient un assouplissement, il faudra qu’il songe en contrepartie à des « engagements dans le domaine des structures » et qu’il démontre que ses prix se situent à un niveau insuffisant pour dégager les possibilités nécessaires en matière d’investissements, d’études et d’exportation. Le danger est l’appel par l’État à de nouveaux constructeurs. Archives de la FIF, AGO du 19 juin 1964, rapport du CA, exercice 1963.
35 Archives de la FIF, PV du 21 mai 1964.
36 Et après le départ de Pierre Sudreau, l’agence de certification ferroviaire, CERTIFER (1er organisme notifié tierce partie créé en Europe) fondée en 1997.
37 Archives de la FIF, AGO du 1er juin 1989.
38 Pierre Sudreau entretient une amitié et une complicité profonde avec André Ségalat (ancien conseiller d’État de 1937 à 1945 et secrétaire général du gouvernement de 1946 à 1958), président de la SNCF de 1958 à 1975. Il entretient de bonnes relations avec son successeur, Jacques Pélissier (haut fonctionnaire et préfet, puis en 1974 directeur du cabinet de J. Chirac alors Premier ministre), président de la SNCF de 1975 à 1981. Les relations avec les suivants sont plus formelles. Les déjeuners ne sont plus mentionnés, excepté celui de 1982 avec André Chadeau. Ainsi en juin 1995, le nouveau président Jean Bergougnoux semble seulement accueilli lors de l’Assemblée générale (cf. allocution de Pierre Sudreau et des extraits de celle de Bergougnoux en annexe au PV du 23 juin 1995).
39 Archives de la FIF, PV de l’assemblée du 21 mai 1965 – Discours de Pierre Sudreau qui évoque les pratiques de dumping des concurrents et l’inefficacité de Bruxelles face à ces pratiques.
40 Archives de la FIF, PV de l’assemblée du 17 septembre 1965.
41 « Nous avons à démontrer que le chemin de fer est imbattable pour le transport des voyageurs à moyenne distance… Il l’est également pour le transport de masse et pour la desserte des grandes agglomérations. Le système ferroviaire doit être réactivé et adapté au monde moderne » (intervention de P. Sudreau, AG du 20 mai 1966).
42 Archives de la FIF, PV AG du 16 juin 1967.
43 Archives de la FIF, PV du 26 mai 1972. Référence à des études du MIT sur les conséquences de l’explosion démographique dans le monde alors que l’activité de l’ensemble de l’industrie ferroviaire ne progresse que grâce aux exportations (1971-1972) car la SNCF enregistre une baisse de son chiffre d’affaires.
44 Intervention d’André Ségalat, PV du 21 juin 1974.
45 « Dossier poussé en liaison étroite avec le président de la SNCF, André Ségalat, auprès du président Pompidou » : allocution prononcée par Jean-Pierre Audoux, délégué général de la Fédération des Industries Ferroviaires à l’occasion de l’hommage rendu à Pierre Sudreau, le 29 mars 2012 à l’Assemblée nationale, [http://www.fondationresistance.org/documents/dossier_them/Doc00157.pdf].
46 Enregistrement réalisé le 8 janvier 1991 au siège de la FIF par Alain Beltran et Jean-François Picard, [http://www.memoire-orale.org/ent-fiche/sudreau-pierre-2012-aas.pdf].
47 Archives de la FIF, AGO du 1er juin 1989.
48 Archives de la FIF, AGO du 30 mai 1990.
49 Archives de la FIF, note à l’attention de Monsieur le Premier ministre, 20 décembre 1994.
50 Archives de la FIF, PV de l’assemblée du 18 septembre 1964.
51 Ibid.
52 Interventions de Pierre Sudreau auprès des ministres de l’Industrie, des Finances. Archives de la FIF (51), lettres de septembre, novembre 1964.
53 Par exemple pour appuyer la réalisation du TGV Est-européen, du TGV Lyon-Turin et du TGV Franco-Espagnol. Archives de la FIF, lettre à Jacques Delors, 15 novembre 1994.
54 Archives de la FIF, PV de l’assemblée du 1er juin 1989. Thèmes à évoquer auprès de M. Delebarre, ministre de l’Équipement.
55 Archives de la FIF, PV de l’assemblée du 17 janvier 1964.
56 Archives de la FIF, PV de l’assemblée du 19 novembre 1965.
57 Archives de la FIF (51). Lettre du vice-ministre du ministère des Chemins de fer de la République populaire de Chine, 1er décembre 1964, etc.
58 En conséquence le chiffre d’affaires avec la SNCF pour la construction n’est plus que de 34,2 %, alors qu’il était de 64,4 % en 1968. Archives de la FIF, PV des assemblées générales de 1968 et 1972.
59 Archives de la FIF (49), PV du 22 mai 1970.
60 Archives de la FIF (49). Allocution de P. Sudreau au déjeuner SNCF du 16 mai 1973.
61 Archives de la FIF (49), PV du 22 mai 1970.
62 Archives de la FIF PV AGO du 2 juillet 1992.
63 Archives de la FIF PV AGO du 2 juillet 1992.
64 Archives de la FIF, intervention de J.-P. Audoux – AG du 21 mai 1997.
65 Le Rail, art. cit., octobre 1999, p. 40.
66 Ibid.
67 Archives de la FIF, allocution de départ à l’AG du 20 juin 1996.
68 B. Pons, Mme A.-M. Idrac, J. Arthuis, F. Borotra.
69 Par exemple, il s’entretiendra avec le président Chirac (1995-2007) et il interviendra pour l’implantation de l’agence européenne de sécurité ferroviaire en novembre 2003.
70 Allocution prononcée par Jean-Pierre Audoux, délégué général de la Fédération des industries ferroviaires à l’occasion de l’hommage rendu à Pierre Sudreau, le 29 mars 2012 à l’Assemblée nationale, [http://www.fondationresistance.org/documents/dossier_them/Doc00157.pdf].
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